L’article 87 bis, ayant fait couler beaucoup d’encre ces derniers temps, et dont l’abrogation a été présentée comme la revendication phare de la bureaucratie syndicale, n’a été que reformulé. Les salariés sont ainsi mis face à une vraie fausse victoire de l’Ugta.
Revendication phare de la centrale syndicale : l’article 87 bis n’a pas été abrogé
Tout un tapage médiatique a été fait autour du fameux article 87 bis à l’occasion de l’adoption en Conseil des ministres de l’avant-projet de loi portant code du travail. D’aucuns ont péroré sur “l’abrogation” de cet article tant controversé et mis en garde quant aux retombées financières de cette décision ! Mais qu’en est-il au juste ? L’article 87 bis de la loi n° 90-11 du 21 avril 1990 relative aux relations de travail a-t-il réellement été supprimé, comme le disent certains ?
Regardons un peu de plus près les textes. Dans l’ancienne loi, qui est d’ailleurs toujours en vigueur, on peut retrouver le fameux article au titre IV : “Rémunération du travail” et au chapitre II : “Salaire national minimum garanti.”
Ledit chapitre compte deux articles : le 87 et le 87 bis. “Le salaire national minimum garanti (SNMG) applicable dans les secteurs d’activité est fixé par décret, après consultation des associations syndicales de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives.
Pour la détermination du SNMG, il est tenu compte de l’évolution : de la productivité moyenne nationale enregistrée ; de l’indice des prix à la consommation ; de la conjoncture économique générale”, lit-on dans l’article 87.
Le second article, appelé le 87 bis, stipule ce qui suit : “Le salaire national minimum garanti, prévu à l’article 87 ci-dessus, comprend le salaire de base, les indemnités et primes de toute nature à l’exclusion des indemnités versées au titre de remboursement de frais engagés par le travailleur.”
L’introduction de cet article, suite aux injonctions du Fonds monétaire international (FMI), avait induit, depuis, le gel des salaires et provoqué l’ire des travailleurs.
Mais que prévoit l’avant-projet de loi portant code du travail ? Rien de différent ou de substantiellement différent, serions-nous tentés de répondre ! En fait, au chapitre VIII intitulé “De la rémunération du travail” et à la section 2 portant “Salaire national minimum garanti”, on retrouve deux articles, le 129 et le 130. Exactement comme dans le futur ancien texte. L’article 87 a été légèrement lifté comme suit : “Le salaire national minimum garanti (SNMG) applicable dans (l’ensemble des) secteurs d’activité (y compris celui des institutions et administrations publiques) est fixé par décret, après consultation des associations syndicales de travailleurs et d’employeurs les plus représentatives (à l’échelle nationale).
Pour la détermination du SNMG, il est tenu compte de l’évolution : de la productivité moyenne nationale enregistrée ; de l’indice des prix à la consommation ; de la conjoncture économique générale.” Ce qui a été rajouté est mis entre parenthèses.
Le 87 bis, lui, s’est transformé en article 130, et voilà ce qu’il stipule : “Le salaire national minimum garanti comprend le salaire de base, ainsi que les primes liées à la production, au rendement et aux résultats du travail.
Les primes et indemnités exclues du contenu du salaire national minimum garanti seront définies par voie réglementaire.” On l’aura noté, on est face à un amendement de l’article et non à une abrogation. Si le SNMG comptait jusqu’à présent le salaire de base et “les primes et indemnités de toute nature”, désormais, il ne sera question que du salaire de base et “des primes liées à la production, au rendement et aux résultats du travail”.
Autrement dit, des primes, comme la PRC et la PRI, seront incluses dans le calcul du Snmg. Quand on sait qu’il s’agit en général de primes conventionnelles, instituées par voie de négociations collectives syndicat-employeurs, il est fort à craindre pour les travailleurs qui n’ont pas de représentation syndicale.
Aussi, il faut souligner que la plupart des employeurs, notamment dans le secteur privé, déclarent rarement leurs employés, comme vient de le confirmer l’enquête de l’ONS, comme ils sont très peu à avoir institué des indemnités dans leur pratique gestionnaire. Plus concrètement donc, le nouveau code du travail ne changera pas grand-chose à la fiche de paie des salariés, comme veulent le faire croire l’UGTA et le gouvernement.
Mourad Fenzi 18 septembre 2014