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Arabie Saoudite

  • Wahhabisme (Orient 21)

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    Conférence

    Orient XXI et Le Monde des Religions organisent le 22 juin une conférence intitulée :

    « Vers la fin du wahhabisme ? »

    avec Fatiha Dazi-Héni, politologue spécialiste de la péninsule Arabique, maître de conférences à l’Institut d’études politiques (IEP) de Paris et auteure de L’Arabie Saoudite en 100 questions (éditions Tallandier, 2017).

    Né en Arabie saoudite au 18è siècle, le wahhabisme imprègne le pays depuis sa fondation et s’est répandu au-delà de ses frontières. Mais aujourd’hui, cette doctrine s’avère être en perte de vitesse dans ce pays en dépit d’un conservatisme ancré, qui demeure la toile de fond à partir de laquelle les autorités comme la société tentent d’agir.

    Inscription obligatoire ici.

    Auditorium du journal Le Monde
    80, boulevard Auguste Blanqui
    75013 Paris
    Tarif : 8 €
    De 19 h à 21 h (justificatif d’identité demandé à l’accueil)

    http://orientxxi.info/

  • Nouveautés "Arabie"

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    Le Qatar expulse vers l'Arabie saoudite un militant des droits de l'Homme

    Bahreïn. Au moins un mort et des centaines de blessés dans le cadre de la violente répression que mène le gouvernement contre l'opposition

    Bahreïn : la police ouvre le feu, un mort et des dizaines de blessés

    Bahreïn. Le pays se dirige vers une «répression totale» des droits humains avec l’interdiction d’un parti d’opposition laïc

    De Cuba au Bangladesh : Comment l’Arabie saoudite veut influencer l’islam mondial et étendre le wahhabisme

     

     

  • Etats-Unis-Arabie saoudite. Des dizaines de milliards pour des contrats entre un Trump contesté et un royaume dont le portefeuille n’est plus si replet (A l'Encontre)

    Des contrats… pas pour des épées

    Rédaction A l’Encontre

    La réception spectaculaire à Riyad contraste avec la pression qui s’accumule sur le président américain après une semaine de révélations accablantes à Washington sur les liens entre sa garde rapprochée et la Russie. En effet, selon l’AFP: «Le président est apparu détendu, alors qu’à Washington, de nouveaux développements sur l’enquête russe venaient d’être révélés. Facteur d’inquiétude supplémentaire pour la Maison Blanche: le Sénat [à majorité républicaine] a annoncé que l’ex-chef du FBI, James Comey, silencieux depuis son limogeage brutal il y a dix jours, avait accepté de témoigner.»

    Outre les rencontres bilatérales, dont celle avec le roi Salmane, Donald Trump a axé la première de ses deux journées à Riyad sur les investissements avec une série de colossaux contrats. «C’était une journée formidable», a lancé le président républicain. «Des centaines de milliards de dollars d’investissements aux Etats-Unis et des emplois, des emplois, des emplois.»

    34 accords… pour des armes et des infrastructures états-uniennes

    L’agence officielle saoudienne SPA a fait état de 34 accords dans des domaines aussi divers que la défense, le pétrole et le transport aérien. «Les deux pays ont signé une série d’accords […]. La valeur des investissements dépasse les 380 milliards de dollars», a précisé le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir lors d’une conférence de presse conjointe avec le secrétaire d’Etat Rex Tillerson, ex-patron d’ExxonMobil. Après avoir été en 1995 président d’Exxon Yémen, puis en 1998 d’Exxon Russie et en mer Caspienne, Tillerson avait, dès la fusion ExxonMobil, grimpé les échelons pour en devenir en 2006 le PDG. Il est aussi membre du Center for Strategic and International Studies.

    Cent cinquante hélicoptères Blackhawk conçus par l’américain Lockheeed Martin seront ainsi assemblés en Arabie saoudite. D’une valeur totale de 6 milliards de dollars, ils devraient entraîner la création de 450 emplois locaux. General Electric a signé avec le royaume pour une valeur de 15 milliards de dollars une série de protocoles portant sur des projets de diversification économique, de développement industriel et de construction de centrales électriques et un programme d’informatisation des opérations d’Aramco, le géant pétrolier saoudien.

    Autre bonne nouvelle pour Donald Trump, le fonds souverain saoudien s’est joint au géant américain de la gestion d’actifs Blackstone pour créer une structure financière de 40 milliards de dollars afin de rénover les infrastructures américaines, qui sont vétustes. C’était l’une des promesses électorales de Trump qui veut y consacrer 100 milliards. Le fonds souverain contribuera pour sa part à hauteur de 20 milliards.

    Faire face «aux menaces iraniennes»

    Un accord de 109 milliards de dollars de ventes d’armes a également été conclu. Le porte-parole de la Maison Blanche l’a qualifié de «plus important de l’histoire des Etats-Unis». Ces équipements de défense visent à soutenir «la sécurité à long terme» de l’Arabie saoudite et de la région du Golfe «face aux menaces iraniennes», a précisé Donald Trump.

    Cette annonce est intervenue le jour de la réélection du président iranien Hassan Rohani. L’Arabie saoudite considère l’Iran comme son principal rival au Moyen-Orient. Les deux pays s’opposent notamment sur les théâtres de conflit en Syrie et au Yémen.

    La Maison Blanche a précisé que les contrats militaires allaient renforcer la capacité du royaume à «contribuer aux opérations de contre-terrorisme à travers la région», ce qui «réduira le fardeau» pour l’armée américaine. Washington compte ainsi voir Riyad jouer un plus grand rôle dans la lutte contre les groupes djihadistes, comme le groupe Etat islamique et Al-Qaida. Selon l’AFP, en date du 21 mai, le secrétaire d’Etat Rex Tillerson a déclaré que ces accords de défense visaient à contrer la «mauvaise influence iranienne et les menaces liées à l’Iran qui existent aux frontières de l’Arabie saoudite de tous les côtés».

    Ce dimanche 21 mai 2017, le président américain prononcera à Riyad devant une cinquantaine de dirigeants de pays musulmans un discours soulignant ses «espoirs» pour une «vision pacifique» de l’islam. «J’exprimerai la position du peuple américain de manière franche et claire», a promis le président américain dans son allocution hebdomadaire diffusée vendredi soir. Ce sera sans doute l’un des discours les plus attendus de ce début de mandat. D’abord parce que Donald Trump a été accusé, à plusieurs reprises, durant sa campagne électorale américaine d’avoir tenu des propos islamophobes. Ensuite, parce que l’une de ses premières mesures en tant que président a été de fermer l’accès des Etats-Unis à plusieurs pays à majorité musulmane. Bloqué par la justice américaine, le décret a heurté profondément le «monde musulman».

    Avec ce discours, Donald Trump devrait donc tenter d’adoucir cette image anti-islam. Selon l’entourage du président américain, celui-ci devrait ainsi s’abstenir de tracer un lien entre la religion musulmane et le terrorisme. Le discours de Donald Trump sera scruté avec d’autant plus d’attention qu’il interviendra huit ans après le discours du Caire, prononcé par Barack Obama en Egypte. A l’époque, le prédécesseur de Donald Trump avait lancé un appel à un nouveau départ entre les Etats-Unis et les musulmans. (Sources: AFP, RFI et autres)

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    «L’Arabie saoudite paie pour se protéger, même pour des armes qu’elle pourrait ne jamais utiliser»

    Par David Hearst

    Mohammed ben Salmane

    Le prix d’une audience avec Donald Trump est élevé et continue de monter. Selon les estimations, l’Arabie saoudite a déjà promis 300 milliards de dollars de contrats de défense pour la prochaine décennie et 40 milliards de dollars d’investissements dans des infrastructures. Le chiffre final, selon certains initiés de Wall Street, pourrait encore grimper à 1000 millions de dollars d’investissements dans l’économie américaine.

    Au moment où il a atterri à Riyad ce vendredi 19 mai 2017, Trump avait dans ses bagages le plus gros contrat d’armement de l’histoire américaine. Il a ainsi rempli sa promesse de faire payer la maison des Saoud, même pour des roquettes qu’elle n’utilisera jamais.

    S’il y a une guerre avec l’Iran, ce seront les Etats-Unis qui la livreront. La Corée du Sud, un pays beaucoup plus proche d’escarmouches avec son voisin, s’avère être un acheteur plus difficile de systèmes de défense antimissiles américains. Le pays rechigne à payer 1 milliard de dollars pour le système THAAD. Pas Riyad.

    La Maison Blanche était en liesse devant l’effet que cet argent saoudien tombé du ciel pourrait avoir sur les emplois à l’intérieur du pays. D’après le compte-rendu officiel de la rencontre qui a eu lieu le mois dernier entre le vice-prince héritier Mohammed ben Salmane et Trump, jusqu’à un million d’emplois pouvaient être créés directement à l’intérieur du pays et des millions d’autres pouvaient l’être dans la chaîne d’approvisionnement.

    La question que se posent les Saoudiens qui, contrairement au prince de 31 ans, n’ont pas les moyens de s’acheter sur un coup de tête le yacht d’un milliardaire russe ou un archipel dans les Maldives, est la suivante: «Comment, pour l’amour de Dieu, pouvez-vous inonder les Américains de tant d’argent alors que vous êtes si réticents à le faire pour votre propre peuple?»

    Le taux de chômage officiel est de 12% et le pourcentage réel est beaucoup plus élevé. Alors que les hôpitaux ont du mal à trouver des médecins, le plus grand fonds du royaume, la General Retirement Foundation, qui verse les retraites des travailleurs du secteur public et de l’armée, a annoncé la semaine dernière que ses réserves étaient épuisées.

    A quelle déclaration du ministre adjoint de l’Economie Mohammed al-Tuwaijri la plupart des Saoudiens croient-ils le plus? Celle où il a annoncé que le royaume avait réduit de plus de moitié son déficit au premier trimestre en raison de mesures d’austérité, ou la déclaration antérieure lors de laquelle il a prévenu que le royaume serait en faillite en quatre ans, si le prix du baril de pétrole restait entre 40 et 45 dollars? Il n’était pas le seul. Le FMI aussi a averti le royaume qu’il risquait la faillite. Quel Saoudien ne se dit pas qu’une intensification des mesures d’austérité et de nouvelles taxes sur la TVA se profilent à l’horizon?

    Les jours révolus des bureaux et des fauteuils roulants

    Il existe deux raisons possibles pour lesquelles le royaume est prêt à inonder ses riches cousins américains de plus de richesses.

    La première est personnelle. Mohammed ben Salmane paie une rançon de roi ou, du moins, l’espère sincèrement. Il est loin le temps où les cadeaux offerts par les Etats étaient modestes. Une des pièces exposées à Riyad dans le musée du fondateur du royaume, le roi Ibn Saoud, est un modeste bureau que le président Franklin D. Roosevelt lui a offert après leur première rencontre à bord d’un destroyer américain. Il a également reçu l’un des deux fauteuils roulants du président américain. Ces jours-ci, un bureau ou un fauteuil roulant serait une insulte, comparé à un dessous-de-table pour un contrat d’armement.

    La seconde raison est collective. Le royaume a subi un tel choc de la part d’une administration Obama qui a fait de la paix avec l’Iran son objectif principal qu’il souhaite ne plus jamais se sentir exposé aux vents du désert. L’Arabie saoudite paie pour se protéger, même pour des armes qu’elle pourrait ne jamais utiliser.

    Il serait toutefois prématuré de prendre les affirmations de Ben Salmane pour argent comptant. Même si c’est son ambition, Ben Salmane parle-t-il toutefois au nom de son pays ou même de la famille royale? Il est toujours écarté de la succession au trône et son cousin plus âgé – et certains diraient plus sage – Mohammed ben Nayef n’a pas l’intention de céder la pole position en tant que prince héritier.

    Mohammed ben Nayef

    Une brouille au Yémen

    Tous les princes héritiers font profil bas et gardent le silence. Ben Nayef est toujours responsable d’une des trois forces militaires du royaume, le puissant ministère de l’Intérieur qui contrôle les frontières. Il n’est pas rare pour les visiteurs étrangers invités par Ben Salmane de passer des moments gênants d’interrogatoires pratiqués par les services de contrôle aux frontières de Ben Nayef dans le simple but d’envoyer un message. En privé, Ben Nayef reste calme et confiant.

    Ben Nayef a tout d’abord soutenu la campagne aérienne lancée par son jeune cousin et ministre de la Défense contre les Houthis au Yémen. La rumeur court que ce n’est plus le cas aujourd’hui. La dernière catastrophe qui est arrivée à Ben Salmane a été la brouille entre le président yéménite Abd Rabbo Mansour Hadi dont il protège la légitimité et le principal allié militaire des Saoudiens, le prince héritier émirati d’Abou Dhabi Mohammed ben Zayed.

    Après un échange de piques entre Hadi et Ben Zayed en février 2017 sur le contrôle de l’aéroport d’Aden, les alliés yéménites de Ben Zayed se sont séparés de la sphère de contrôle du président exilé, divisant ainsi les forces qui tentent de reprendre le Yémen aux Houthis en au moins deux factions. La politique de Ben Salmane est en proie au chaos. Il dépend de Hadi comme source de légitimité pour ses attaques aériennes mais doit l’empêcher de s’envoler pour le sud libéré du Yémen.

    Ben Zayed, pour sa part, n’est pas prêt à céder. Il a toujours eu au Yémen une mise plus importante que les Houthis soutenus par l’Iran. En effet, il a tout d’abord encouragé les Houthis à se soulever contre Hadi jusqu’à ce que leur insurrection échappe à tout contrôle. Son objectif est l’éradication du mouvement al-Islah, affilié aux Frères musulmans.

    Par l’intermédiaire du fils de l’ancien dictateur Ali Abdallah Saleh, Ben Zayed poursuit des négociations actives avec le principal partenaire militaire des Houthis. Et à travers ses représentants, Ben Zayed est déterminé à poursuivre ses objectifs originels. Ben Zayed est tout sauf incohérent.

    Et si… avaient existé «des banquiers du changement pacifique»

    Jouons à un petit jeu de réflexion. Imaginons qu’au lieu de s’opposer au Printemps arabe et aux soulèvements populaires de 2011, l’Arabie saoudite ait décidé d’investir dans le développement du monde arabe. Imaginons que la Maison des Saoud ait versé 340 milliards de dollars pour soutenir les résultats d’élections libres en Egypte, en Libye et au Yémen au lieu de soutenir des coups d’Etat militaires et des contre-révolutions.

    Où en seraient aujourd’hui la Maison des Saoud et le monde arabe? Les choses ne seraient pas de tout repos. Les premiers dirigeants arrivés au pouvoir après la dictature auraient été évincés depuis longtemps mais, au moins, la tradition du recours aux urnes plutôt qu’aux armes pour y parvenir serait établie.

    Les économies seraient bien sur la voie de la transition. Le monde arabe serait rempli de touristes occidentaux. Les plages de Tunisie et les pyramides d’Egypte ne seraient pas vides aujourd’hui. Il pourrait y avoir un mouvement de sécession au Sinaï, mais l’Etat islamique (Daech) n’y jouirait d’aucune présence. Les djihadistes seraient retournés depuis longtemps dans leurs grottes en Afghanistan. Ils auraient considéré leur mission comme un échec.

    Les membres de la maison des Saoud, alors banquiers du changement pacifique, seraient maintenant salués comme des héros. Ils pourraient avoir autant de yachts de luxe ou d’îles qu’ils le souhaitent. Ils n’auraient pas à verser le prix du sang à Trump. Leur monde serait tellement plus sûr s’ils s’étaient déjà lancés dans le seul voyage qu’il leur reste: d’une monarchie absolue à une monarchie constitutionnelle.

    Ce qui se passe dans la région aujourd’hui est une leçon d’histoire pour ceux qui sont lents à apprendre. Trump attend avec impatience l’accueil chaleureux qu’il recevra à Riyad, ce qui le distraira des nuages d’orage qui s’accumulent dans son pays. Mais son administration est prise dans une spirale descendante, même aux yeux des Républicains. Dans l’état actuel des choses, 56 dirigeants musulmans et arabes vont se réunir à Riyad pour écouter Trump leur donner une leçon de démocratie et prêcher devant eux au sujet de l’islam. Nous vivons dans un monde étrange. (MEE, 20 mai 2017)

    Alencontre le 21 - mai - 2017
     
  • Arabie Saoudite (Amnesty + A l'Encontre.ch)

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    La visite de Donald Trump risque de donner le feu vert à des violations des droits humains

    Les droits humains sont attaqués sans relâche dans les États du Golfe. Margaret Huang, directrice d'Amnesty International États-Unis

    Le président américain Donald Trump entame son premier voyage à l'étranger et se rend au sommet de Riyad, en Arabie saoudite : la lutte contre le terrorisme et la sécurité seront au cœur de ses discussions avec les dirigeants des États du Golfe et des États arabes. Le président devrait également dévoiler des contrats d’armement de plusieurs milliards de dollars avec l'Arabie saoudite. Le fait que les droits humains ne figurent pas à l’ordre du jour risque de favoriser les violations dans une région où les gouvernements bafouent les droits de leurs propres citoyens au nom de la lutte contre le terrorisme et violent le droit international humanitaire dans des conflits alimentés en grande partie par des transferts d'armes américains, a déclaré Amnesty International.

    « Les droits humains sont attaqués sans relâche dans les États du Golfe. L'Arabie saoudite et d'autres pays du Golfe se servent de la lutte contre le terrorisme comme d'un prétexte pour écraser et persécuter les détracteurs, les dissidents pacifiques et les défenseurs des droits humains, a déclaré Margaret Huang, directrice d'Amnesty International États-Unis.

    « Alors même que des familles sont tuées chez elles et que des armes interdites par le droit international sont utilisées par la coalition que dirige l'Arabie saoudite au Yémen, l'administration Trump prévoit des contrats d’armement de plusieurs milliards de dollars avec l'Arabie saoudite. Ce mépris flagrant pour les droits humains et le droit humanitaire ne fera qu'inciter les États du Golfe et du monde à poursuivre leur quête de " sécurité " au détriment des droits fondamentaux des citoyens. »

    Transferts d'armement des États-Unis

    Lors d'une récente visite en Arabie saoudite, le rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte contre le terrorisme a conclu que l'Arabie saoudite n'avait pas pris de mesures concrètes pour enquêter sur de possibles crimes de guerre commis par ses propres forces dans le conflit au Yémen.

    Or, les États-Unis restent le principal fournisseur d'armes de l'Arabie saoudite. L'administration Trump est en train de finaliser les dernières étapes d'une vente d'armes de plusieurs milliards de dollars avec le gouvernement saoudien.

    Amnesty International a rassemblé des informations sur un vaste éventail de violations du droit international commises par tous les belligérants au Yémen, y compris la coalition que dirige l'Arabie saoudite. La coalition a mené des raids aériens incessants, tuant et blessant des civils et détruisant des habitations, des biens et des infrastructures civils dans des attaques menées sans discrimination ou visant des biens de caractère civil. Plusieurs de ces attaques, dont certaines constituent des crimes de guerre, ont utilisé des armes américaines.

    « Les États-Unis, via des transferts d'armes à destination de l'Arabie saoudite, continuent d'alimenter de graves violations des droits humains, qui causent de terribles souffrances à la population civile du Yémen, a déclaré Margaret Huang.

    « Des preuves accablantes attestent de crimes de guerre commis par la coalition que dirige l'Arabie saoudite. Les États-Unis doivent immédiatement cesser de fournir des armes aux membres de la coalition en vue d'une utilisation au Yémen et faire pression en faveur d'une enquête indépendante et efficace sur les nombreuses violations recensées dans le cadre de cette guerre oubliée. »

    Répression des droits humains

    En mai 2017, le rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte contre le terrorisme a conclu que les lois antiterroristes du pays ne respectent pas les normes internationales et que l'Arabie saoudite « doit cesser d’utiliser la législation antiterroriste contre les personnes exerçant pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion ».

    Amnesty International a constaté une répression continue et systématique orchestrée par les autorités en Arabie saoudite contre les militants des droits humains, s'attaquant violemment aux derniers vestiges d'une société civile très fragilisée dans le pays. Des militants sont arrêtés et poursuivis, aux termes des lois antiterroristes et de lois destinées à étouffer toute critique pacifique, sur la base de chefs d'inculpation à la formulation vague et excessivement large. Parmi les détenus, les prévenus ou ceux qui purgent des peines d’emprisonnement figurent plusieurs membres de l’Association saoudienne des droits civils et politiques (ACPRA), une organisation indépendante de défense des droits humains créée en 2009 et que les autorités ont dissoute en 2013.

    « Les autorités saoudiennes se cachent derrière les lois antiterroristes draconiennes pour justifier les condamnations de défenseurs pacifiques des droits humains. Les uns après les autres, les militants en Arabie saoudite disparaissent », a déclaré Margaret Huang.

    D'autres pays du Golfe invoquent la sécurité et la lutte contre le terrorisme pour réprimer la dissidence. Le gouvernement de Bahreïn restreint la liberté d'expression et le droit de réunion pacifique : il arrête d'éminents défenseurs des droits humains, prive des Bahreïnites de leur nationalité, réprime violemment les manifestations et dissout les partis d'opposition.

    Aux Émirats arabes unis, les autorités restreignent de manière arbitraire les droits à la liberté d’expression et d’association, arrêtent et poursuivent en justice, aux termes des textes législatifs sur la diffamation et des lois antiterroristes, des opposants et des personnes critiques à l’égard du gouvernement, ainsi que des étrangers. Les disparitions forcées et les procès inéquitables sont des pratiques courantes. Les détenus sont régulièrement torturés et maltraités. 19 mai 2017,

    https://www.amnesty.org/

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    Etats-Unis-Arabie saoudite. Des dizaines de milliards pour des contrats entre un Trump contesté et un royaume dont le portefeuille n’est plus si replet

  • Yémen. Famine, choléra, mortalité maternelle, dizaines de milliers de civils tués. Une guerre oubliée (Al'Encontre.ch)

    Rédaction A l’Encontre

    En date du 9 mai, Médecins sans frontières rapporte: «Après 25 mois de conflit au Yémen, la population vit toujours à l’heure de la guerre opposant les Houthis, qui contrôlent le nord du pays avec le soutien du président déchu Saleh, aux groupes armés de la Résistance du Sud alliés au président Hadi. Ce dernier avait fui Sanaa début 2015, quand les Houthis avaient pris le contrôle de la capitale, et a installé à Aden son propre gouvernement. Autre acteur du conflit, une coalition internationale menée par l’Arabie saoudite, qui intervient aux côtés des forces du sud depuis mars 2015 et a le soutien des Etats-Unis, de la France et de la Grande-Bretagne.

    Bombardements et tirs d’artillerie frappent le pays, du gouvernorat de Saada dans le nord, au gouvernorat de Taiz dans le sud. Le 15 août 2016, l’hôpital de la ville de Abs, située dans le gouvernorat de Hajjah, dans le nord-ouest du Yémen, a été touché par une frappe aérienne de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite. Cette attaque était la quatrième en un an touchant une structure de soins MSF. Avec 19 morts et 24 blessés, c’était aussi la plus meurtrière.

    Pour des raisons de sécurité, MSF a alors décidé d’évacuer son personnel des six hôpitaux qu’elle soutenait dans le nord du Yémen, à savoir les hôpitaux de Haydan, Razeh, Joumouri et Yasnim (gouvernorat de Saada) et ceux de Abs et Gamhouri (gouvernorat de Hajjah). Depuis, MSF a repris ses activités à Abs et Gamhouri en novembre 2016, puis à Haydan en mars 2017.

    Globalement, le bilan de ce conflit est très lourd. Il a fait plus de 6000 morts et plus de trois millions de déplacés, selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires aux Nations unies. Le pays est également confronté à des restrictions sur les importations, rendant difficile l’approvisionnement.

    Pour la population, l’accès aux soins est très difficile. De nombreuses structures de soins ne fonctionnent plus. Celles encore ouvertes manquent souvent de matériel essentiel, de personnel, de médicaments et de carburant pour faire fonctionner les générateurs électriques, ou alors elles sont situées dans des zones trop dangereuses.

    Entre mars 2015 et avril 2017, MSF a reçu plus de 493 000 patients dans ses services d’urgence et a pris en charge plus de 60 000 blessés de guerre. Les équipes MSF ont également dispensé plus de 191 000 consultations à des personnes déplacées, grâce à des dispensaires mobiles.

    Epidémie de choléra

    Depuis le 30 mars 2017, les équipes MSF reçoivent et traitent un nombre croissant de cas de choléra et de diarrhée aqueuse aiguë dans les gouvernorats d’Amran, Hajjah, Al-Dhale, Taiz et Ibb. Au 9 mai, le nombre de patients avait atteint plus de 780.

    En réponse à cette épidémie, MSF a mis en place des centres de traitement du choléra dans cinq hôpitaux afin d’isoler les patients et de traiter ceux qui présentent des symptômes. L’organisation soutient également d’autres structures gérées par les autorités sanitaires.»

     

     

    Mortalité maternelle

    Dans ce contexte, la mortalité en couches des femmes explose. Le taux de mortalité maternelle était déjà le plus élevé au Moyen-Orient et le taux de fécondité totale se situait à hauteur de 3,77 naissances par femme. La référence au taux de mortalité. La dernière estimation du taux de mortalité maternelle date d’avril 2015 (voir tableau ci-dessous)

     

    Actuellement, dans la mesure où, comme indiqué par MSF, la majorité des hôpitaux sont fermés, le manque de soins pour les femmes enceintes est quasi total, particulièrement dans les zones rurales qui rassemblent quelque 70% de la population. Face à cette situation désastreuse, une action déterminée a été engagée par des femmes professionnelles du système sanitaire, à la fois pour permettre des mesures de contraception accessibles – le salaire moyen, pour autant qu’il puisse être calculé est de 45 euros par mois et la pilule contraceptive coûte 35 centimes d’euro pour 32 jours – et l’accès à des avortements. Une gynécologue basée à Taïzz a confié à la reporter de MME: «Dans la plupart des cas, ma première réponse à une patiente est de lui suggérer que sa grossesse est une bénédiction d’Allah et qu’elle doit garder le bébé. Je lui explique que les Hadiths – le recueil des paroles du prophète Mahomet – interdisent les avortements après 42 jours, mais que le Coran ne comporte pas de tels versets. Si la vie de la femme est menacée, alors je demande à rencontrer son mari pour obtenir un accord et j’interromps la grossesse avant 12 semaines.» Pour un avortement après cette période, cette obstétricienne ne le fait qu’en cas de fatwa émise par un cheikh. Ahmed al-Fioush, cheikh de la province de Taïzz, confie aux deux reporters de MME: «Il n’y a pas de versets clairs dans le Coran qui interdit l’avortement. Toutefois, plusieurs Hadiths interdisent l’avortement, car cela revient à tuer l’âme. Si toutes les femmes pouvaient interrompre leur grossesse, cela contribuerait à répandre l’adultère. La société doit rejeter les femmes qui interrompent leur grossesse après 42 jours pour une quelconque raison car elles désobéissent à l’islam.» (MME, 5 mai 2007)

    Se conjuguent ainsi les multiples effets de la guerre, la quasi-absence de services médicaux et la désapprobation sociale (qui, ne l’oublions pas, est une réalité qui est encore activement présente dans de nombreux pays européens, en particulier ceux où domine l’Eglise catholique).

    Une famine de proportion «biblique»

    La famine a pris des proportions «bibliques», selon un vétéran de l’aide humanitaire. Jan Egeland considère que le nombre de tués dépasse 10’000. Il est à la tête du Conseil norvégien pour les réfugiés et a informé sur la situation, par téléphone, depuis Sanaa un journaliste de l’agence Reuters. Il a répété une fois de plus que l’aide des agences humanitaires – telle que proclamée lors du sommet de Genève de fin avril 2017 – répondait au maximum, pour autant qu’elle soit concrétisée, à un tiers des nécessités. Egeland affirme sobrement: «Cette crise est faite de mains d’hommes et ne relève pas d’une science concernant l’exactitude des bombes chirurgicales des bombardements ou des roquettes.» Selon lui, un demi-million d’enfants peuvent mourir de faim à chaque instant. L’état de dénutrition étant très avancé et ses effets à long terme terrifiants. Sur 27 millions d’habitants, dit-il, 19 millions ne peuvent pas être maintenus en vie grâce à des «injections d’aide» dans un contexte où l’Arabie saoudite et ses alliés s’affrontent avec l’Iran et d’autres forces en mettant à profit un conflit interne ayant des racines historiques. Quelques jours après la conférence de Genève, cet expert en crises humanitaires insistait sur «la non-existence de réserves alimentaires au Yémen».

    Etats-Unis et Arabie saoudite… face à l’Iran

    Le 4 mai, Donald Trump, suite à la visite en mars 2017 de Mohamed ben Salmane, vice-prince héritier et ministre de la Défense, a annoncé un prochain voyage en Arabie saoudite pour «construire les nouvelles bases d’une coopération et d’un soutien avec nos alliés musulmans pour combattre l’extrémisme, le terrorisme et la violence». Il est vrai que Donald Trump, une semaine avant, avait tempêté contre le manque d’aide financière de l’Arabie saoudite au système de défense des Etats-Unis, bien que le royaume soit le principal acheteur d’armes aux transnationales états-uniennes. L’administration Trump, le Pentagone et le commandement du Cemtcom (centre opérationnel pour le Moyen-Orient) vont-ils non seulement accentuer leurs activités meurtrières au Yémen, mais accroître les menaces face à l’Iran? Un danger qui n’est pas à négliger.

    L’Arabie saoudite censure l’information (BBC)

    Dès lors, au regard du drame qui se joue actuellement au Yémen, comment expliquer que la presse, dans son ensemble, ne s’intéresse pas davantage à ce conflit? Nawal Al-Maghafi, de la BBC (24 avril), est l’une des dernières journalistes étrangères à avoir pu se rendre dans ce pays, le plus pauvre de la péninsule arabique et où pleuvent, littéralement, les bombes. «Le Yémen, c’est vrai, est un pays compliqué», soupire-t-elle. Mais cela ne saurait suffire, bien entendu, à expliquer toute la négligence des médias. Tout d’abord, «il est aujourd’hui extrêmement difficile d’accéder aux régions tenues par les rebelles», admet-elle. «L’Arabie saoudite ne permet plus, par exemple, que des journalistes embarquent sur des vols humanitaires de l’ONU. Cela signifie qu’il faut passer par le sud du pays, où Al-Qaida est aujourd’hui présent. Et pour les Occidentaux (explique la jeune femme à la nationalité yéménite et britannique) c’est trop dangereux.»

    En ce sens, l’Arabie saoudite a tout mis en œuvre pour organiser un véritable blocus sur l’information. Evidemment, c’est une stratégie délibérée. Cette volonté d’écarter les témoins s’explique, en particulier, du fait des critiques de plus en plus vives contre les carnages provoqués par l’aviation saoudienne et ses alliés du Golfe. Or même si la journaliste précise, par ailleurs, n’éprouver aucune espèce de sympathie à l’égard des rebelles, «corrompus et brutaux», tant que les bombardements saoudiens continueront, prévient-elle, la population ne se désolidarisera pas d’eux.

    Alencontre le 10 - mai - 2017

    http://alencontre.org/

  • Femmes en Arabie saoudite : l’ONU renforce les barreaux (Lutte Ouvrière)

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    Le 22 avril dernier, 47 des 54 membres du Conseil économique et social de l’ONU ont approuvé l’entrée de l’Arabie saoudite au sein de la Commission de la condition des femmes des Nations unies.

    Le vote s’est fait à bulletin secret, mais plusieurs pays européen dont la Belgique ont voté pour.

    En Arabie saoudite, les femmes, privées de toute liberté, sont traitées comme des mineures à vie. Elles doivent avoir la permission d’un mâle de la famille pour ouvrir un compte en banque, détenir un passeport, sortir du domicile ou se soigner. Cette monarchie intégriste d’un autre âge va pouvoir participer à partir de 2018 à un organisme censé promouvoir l’égalité des sexes et l’autonomie des femmes.

    Immédiatement, des femmes d’Arabie saoudite, en lutte contre la dictature quotidienne, ont dénoncé cette décision qui va conforter ce régime patriarcal où la misogynie a force de loi.

    Par cette nouvelle insulte pour la moitié de l’humanité, la décision de l’ONU démontre une fois de plus toute l’hypocrisie de cette institution. Elle a toujours servi de feuille de vigne aux grandes puissances, justifiant leurs rapines au nom de grandes déclarations sur les droits de l’homme. En montrant tout son mépris pour les droits humains les plus élémentaires, l’ONU en fait une nouvelle fois la démonstration.

    Gilles BOTI 03 Mai 2017
     
  • Éveil et révoltes du « deuxième sexe » en Arabie saoudite (Orient 21)

    « Deux femmes de Djeddah »le 3 mai prochain à 18 h 30 à l’Iremmo, 7, rue des Carmes 75005 Paris.

    À travers l’histoire de deux femmes aux prises avec le machisme d’une société très conservatrice, Deux femmes de Djeddah, de la romancière saoudienne Hanaa Hijazi démonte le système patriarcal qui la régit socialement. Un roman non censuré dans le royaume et qui participe aussi de la vitalité méconnue de la création saoudienne contemporaine.

    Le lecteur du roman de la Saoudienne Hanaa Hijazi Deux femmes de Djeddah, dont L’Harmattan vient de publier la traduction française1 ne sera pas surpris du tableau que l’auteure dresse de la condition de la femme à Djeddah, pourtant réputée la ville la plus libérale d’Arabie saoudite : une description qui s’apparente à une descente aux enfers. L’auteure fait pourtant évoluer ses personnages dans des milieux qui ne comptent pas parmi les plus rétrogrades. Mais elle montre bien comment le conformisme social vient à bout de l’homme le plus libéral qui soit, en partie par simple machisme et en partie pour prix de son intégration dans la société. La femme, elle, reste la victime. Tout est fictif, mais rien n’est inventé.

    Pourtant, contrairement au cliché de la Saoudienne accablée par la tradition au point de s’y soumettre, la victime n’est ici pas consentante, et c’est là que le roman prend son intérêt et son originalité. Elle est, certes, tentée par la prison dorée offerte à toute Saoudienne soumise, pourvu qu’elle appartienne aux classes aisées. Une vie confortable et futile qui ferait rêver bien des Occidentales, libérées de la tyrannie masculine pour tomber dans celle du travail… Les héroïnes rebelles de Hanaa Hijazi se démènent pour maîtriser leur destin mais, livrées à elles-mêmes, échouent face à un système qui rejette pareil comportement. L’auteure relate leur révolte sans didactisme aucun et dans une langue simple qui rend son œuvre très accessible.

    Ce faisant, Hanaa Hijazi traduit bien deux traits fondamentaux de la société saoudienne contemporaine. Tout d’abord son atomisation, le système patriarcal en place empêchant avec efficacité la formation de groupes contestataires ou alternatifs. Dans ces conditions, le dissident se trouve face à lui-même dans un combat perdu d’avance. Le second enseignement est que le système autoritaire auquel se heurte les Saoudiennes — mais aussi les Saoudiens — est d’ordre social avant d’être politique ou religieux. L’alliance du sabre et de la chahada (profession de foi musulmane) qui régit la société figure bel et bien sur le drapeau national, mais elle repose sur un soubassement invisible qui forme l’obstacle premier à l’émancipation : le système patriarcal. Hanaa Hijazi en montre bien la puissance, qui parvient à faire de ses victimes des alliées, quand la mère accable sa fille à son tour. Camille Lacoste-Dujardin l’avait bien expliqué dans un travail fondateur2.

    Dynamisme culturel

    On pourrait désespérer face au pessimisme de l’auteure. Mais c’est celui-là même qui porte au contraire à ne pas perdre espoir. Hanaa Hijazi connaît la réussite professionnelle dans la ville même où se déroule son roman — elle est médecin à Djeddah — et rencontre en Arabie une véritable reconnaissance sur le plan intellectuel. Malgré la critique sociale radicale qu’il contient, son roman est autorisé dans un pays où la censure est tatillonne, et elle tient une rubrique hebdomadaire dans le principal quotidien, Al-Riyadh. Rançon du succès, les milieux conservateurs la dénigrent sur les réseaux sociaux, mais il y a de quoi déjouer les idées simples des pourfendeurs de l’obscurantisme de l’Arabie saoudite. Car voilà un pays plus divers et complexe qu’il ne paraît à ceux qui le critiquent en méconnaissance de cause, un pays misogyne où une féministe jouit d’une grande estime… Elle n’est ni la seule romancière à s’élever contre l’inégalité entre hommes et femmes, ni le premier écrivain contestant le caractère inique de l’ordre local. Depuis les années 1990, nombre de Saoudiens ont pris la plume pour s’opposer au conservatisme social par le biais de la littérature.

    Le roman de Hanaa Hijazi participe au contraire d’un courant alimenté par les diverses facettes d’une culture saoudienne contemporaine dont le dynamisme échappe largement à un œil occidental focalisé sur le politique et le religieux. On disait autrefois que l’Égypte écrivait, le Liban publiait et l’Irak lisait. L’Arabie saoudite a désormais supplanté ce malheureux pays. Les foires du livre y rencontrent un succès croissant et le grand public trouve dans la lecture le traditionnel moyen d’évasion dont il a tant besoin, en particulier via le roman3. Ceci éveille des vocations et les jeunes auteurs saoudiens foisonnent désormais.

    Mais l’éveil culturel ne se borne pas à l’écrit. Il touche tous les domaines de l’art, devenu le vecteur privilégié de l’expression dans un pays où elle est bridée sur le plan politique. Les espaces de liberté bourgeonnent au sein d’une Arabie moins monolithique qu’on ne le croit. Ce bouillonnement culturel en prépare-t-il d’autres ? À long terme peut-être, mais certainement pas tant que les liens traditionnels ligoteront la société de la manière dont l’illustre le roman.

    Libéralisation des mœurs ?

    D’aucuns en Occident regretteront que les opprimé(e)s ne se rebellent pas davantage. Mais les Saoudiennes courageuses qui ont défié l’ordre social en défilant dans les rues au volant se sont heurtées au marais de l’indifférence tout autant qu’au mur des gardiens de la tradition. D’autres ont choisi un mode plus adapté aux pesanteurs locales, qui sont loin d’être limitées à la condition de la femme. Alliant clarté et fermeté, loin de tout extrême et dénué de violence, le style de Hanaa Hijazi exprime bien le mode de révolte calme mais déterminé, adopté avec réalisme par la plupart des femmes saoudiennes qui luttent pour leur émancipation. On peut y voir une prise de recul salutaire.

    Tout d’abord, la société saoudienne n’a pas toujours été conservatrice. Nombreux http://orientxxi.info/ecrire/?exec=article_edit&id_article=1839#sont les nostalgiques de la période qui a précédé la vague islamiste de 1979 et des années qui suivirent. L’attaque cette année-là de la grande mosquée de La Mecque par Juhayman Al-Otaibi a provoqué un traumatisme durable dont les conservateurs ont profité pour mettre la société au pas, au désespoir des nombreux progressistes relégués dans l’ombre. Ici comme dans l’ensemble du monde arabe, le conservatisme des mœurs n’a rien d’un atavisme et une nouvelle vague de libéralisation n’a rien d’une hypothèse absurde, quelque incongrue qu’elle puisse paraître aujourd’hui. À Djeddah, les aînés se souviennent d’un temps où des femmes circulaient en ville au volant de leur voiture ou déambulaient dans la rue habillées à l’occidentale, le temps des piscines mixtes… Si l’on remonte avant même l’occidentalisation des mœurs qui a suivi la seconde guerre mondiale, on pourra rappeler la liberté de mouvement et d’habillement de la Bédouine des steppes d’Arabie ou de la paysanne de ses montagnes, avant que l’urbanisation ne cloître la femme et ne l’enserre sous des atours noirs moins traditionnels qu’il n’y paraît.

    Sous une critique d’autant plus féroce qu’elle semble objective, Deux femmes de Djeddah contribue à humaniser une société dont on comprend mieux la complexité, en relatant l’histoire poignante de deux amies alliées contre l’adversité. Ce roman réaliste témoigne aussi de la vitalité de la création saoudienne contemporaine, encore trop méconnue.

    1Hanaa Hijazi, Deux femmes de Djeddah, traduit de l’arabe par Philippe Mischkowsky, Paris, L’Harmattan, 2017. Édition originale Dar al-Saqi, Beyrouth, 2015.

    2Camille Lacoste-Dujardin, Des mères contre les femmes. Maternité et patriarcat au Maghreb, Paris, La Découverte, 1996.

    3Voir à ce sujet l’article de la Saoudienne Salwa Al-Maiman «  Le roman contemporain saoudien face à ses défis  », in Arabian Humanities, 3, 2014.

     

    http://orientxxi.info

  • Nouveautés sur "Amnesty International"

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    Oumou Kane

    Mauritanie. La condamnation d’une jeune manifestante vise à intimider les défenseurs des droits humains

    Le Qatar ne doit pas expulser vers l'Arabie saoudite les militants des droits humains qui risquent d'y être torturés et persécutés

    Yémen. Le journaliste Yahia al Jubaihi condamné à mort par les forces houthies

  • Guerre au Yémen : la France finance le conflit… et empoche 455 millions d’euros (Anti-k)

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    François Hollande vient de donner son accord pour vendre à l’Arabie saoudite des armes en masse dans le cadre de la guerre au Yémen où sunnites et chiites se déchirent.

    Un contrat de près de 455 millions d’euros suffisant pour fermer les yeux sur l’horreur de la situation… et de l’intervention saoudienne.

    Yémen : un conflit entre sunnites et chiites

    Depuis près de deux ans, le Yémen est en proie à un conflit interne entre le gouvernement de Sanaa et les rebelles houtis. Ce conflit dépasse largement les frontières nationales puisque les puissances présentes au Moyen-Orient alimentent le conflit de leur soutien et se livrent une guerre par procuration. Dans le camp des houtis, c’est l’Iran chiite qui finance la guerre tandis que la coalition dirigée par l’Arabie saoudite et soutenue par les États-Unis entend remettre en selle le président Abd Rabbo Mansour Hadi, d’obédience sunnite.

    Les conflits au Yémen font rage et touchent sans distinction les combattants, les populations civiles, les hôpitaux et les écoles.

    Le nombres de victimes de raids aériens sur des hôpitaux est astronomique à l’image de celui qui a fait 140 morts et 500 blessés en octobre 2016 ou celui perpétré par les États-Unis au mois de janvier dernier. Alors que les violations des droits les plus élémentaires sont monnaie courante dans ce conflit, que de nombreuses associations comme Amnesty International dénoncent l’implication des États-Unis et du Royaume-Uni dans la coalition, la France fait la sourde oreille à propos des souffrances des civils et n’écoute que l’appel des profits que la vente d’armes peut lui rapporter. Avec près de 20 milliards d’euros de matériel vendu en 2016, la France a battu son précédent record de 17 milliard atteint en 2015. Elle entend donc consolider sa place dans le trio mondial d’exportateurs d’armes.

    Saudi-French Military Contract : 455 millions d’euros de contrat d’armement

    Les relations commerciales en matière d’armement entre la France et la pétromonarchie du golfe remontent, pour la période récente, à 2014. Le contrat Donas, signé par l’Arabie saoudite et la France au profit du Liban s’est finalement mué en achat direct d’armes pour le compte du principal pays de la péninsule arabique. D’un montant de 3 milliard d’euros, il a déjà fait la joie des industriels français. Aujourd’hui le contrat a été rebaptisé SFMC pour Saudi-French Military Contract. C’est sur ce nouveau contrat que les saoudiens ont entrepris de refaire leur stock d’armement pour une somme qui atteint actuellement les 455 millions d’euros mais qui pourrait, à terme, représenter 1,2 à 1,4 milliard d’euros.

    Dans ces conditions, pas question de faire perdre de juteux contrats en munitions et canons à Nexter et Thalès TDA Armements. Pourtant, la procédure de transfert des armes dans le golfe n’a pas été facile et il a finalement fallu qu’Hollande mette un terme aux réticences de Cazeneuve et du Quai d’Orsay et tranche en faveur de l’autorisation de la vente d’armes à l’Arabie saoudite. C’est donc la ligne du ministère des Finances, toujours près à rendre service aux grands groupes, et de celle Le Drian, toujours près à combattre le terrorisme en finançant les pires dictatures, qui l’a emporté.

    Pour masquer un financement ouvert du conflit, le contrat a été rédigé dans des termes qui ne laissent pas entendre qu’il finance une guerre d’influence locale, alors que les armes une fois livrées y serviront sans aucun doute. Une partie des fournitures est directement destinée à la garde nationale qui n’intervient pas en dehors du pays et les munitions livrées le seront sans qu’on s’inquiète de leur usage, bien que la quantité commandée indique un besoin supérieur aux demandes ordinaires de Riyad.

    Dans le domaine des règles commerciale comme dans celui des droits démocratiques, la France fait une fois de plus la démonstration qu’elle se moque éperdument de celles qu’elle s’enorgueillit de respecter et de promouvoir. En dépit de la ratification du traité sur le commerce des armes qui interdit la vente d’équipements militaires s’il est avéré qu’ils serviront à perpétrer des violences contre les civils, la France finance bel et bien une guerre ouverte qui la conforte dans sa position de puissance industrielle et militaire d’envergure internationale.

    Boris Lefebvre mercredi 22 mars

    http://www.anti-k.org/

    http://www.revolutionpermanente.fr/

    Commentaire:

    Anti-k est le site de la Commission Economie du NPA. Révolution Permanente est un courant interne du NPA.

     

     

  • Yémen : De la guerre à la famine (NPA)

    C’est une guerre largement oubliée ici mais qui sévit depuis plusieurs années. Mais les humanitaires y pensent, par la force des choses...

    Ainsi, dans ce pays d’environ 26 millions d’habitantEs, deux millions de personnes dépendaient d’une aide alimentaire d’urgence fin janvier. Fin février, c’est même le chiffre de 7,3 millions de personnes qui a été évoqué auprès des Nations unies, qui chiffraient le besoin d’aide urgentissime à 1,7 milliard de dollars. Le 26 janvier, le dirigeant des opérations humanitaires de l’ONU, Stephen O’Brien, évoquait « la plus grande urgence pour la sécurité alimentaire dans le monde ». 14 millions de Yéménites ont par ailleurs besoin d’un soutien alimentaire venu de l’extérieur. Les réserves de blé du pays sont en train de s’épuiser, et 2,2 millions d’enfants souffrent de malnutrition, soit une augmentation de + 53 % par rapport à la situation de 2015.

    C’est essentiellement le blocage des ports du pays qui est responsable de cette situation catastrophique, ainsi qu’un arrêt des transactions des banques avec le Yémen, alors que ce pays dépend largement des importations. Dans un rapport élaboré par un groupe d’experts des Nations unies rendu public fin février, il est écrit que « toutes les parties (du conflit armé) ont fait obstacle à la distribution de l’aide alimentaire dans le pays »...

    Ces parties belligérantes sont essentiellement d’un côté une coalition menée par l’Arabie saoudite (soutenue par les monarchies arabes et notamment les Émirats arabes unis), et de l’autre une alliance de circonstance entre l’ex-président Ali Abdallah Saleh (déchu en 2012 suite à une révolte dans le contexte du « printemps arabe ») et des miliciens chiites.

    Alors que pendant ses années au pouvoir (1979 à 2012), Saleh s’était surtout appuyé sur l’Arabie saoudite voisine et les USA, une fois évincé, il s’est rappelé qu’il était lui-même chiite... Et alors qu’il avait combattu le groupe armé des houthistes, une rébellion de type intégriste issue de la minorité chiite du pays, il s’est rapproché de ces mêmes houthistes après son remplacement au palais présidentiel par son ancien vice-président Abd Rabbo Mansour Hadi (élu en 2012 lors d’une élection où il fut le seul candidat...).

    Le jeu des puissants

    L’alliance Saleh-houthistes a conquis une large partie du pays en 2014, ce qui a déclenché en mars 2015 une intervention militaire de l’Arabie saoudite appuyée par des régimes arabes sunnites. La guerre, dont le nombre de morts civils était chiffré à 10 000 fin 2016, a donc pris des allures de conflit confessionnalisé. Mais c’est aussi une lutte d’influence entre le régime saoudien et son grand rival chiite, le régime iranien, soupçonné d’appuyer les houthistes.

    La coalition dirigée par le régime saoudien bloque les ports du pays, surtout ceux de la Mer rouge, ce qui empêche les importations alimentaires d’entrer. Le principal port, celui de Hodeida, est toujours tenu par les houthistes, alors que le président Rabo a pu reprendre celui de Moka.

    Les USA, qui se contentaient jusque-là d’appuyer les monarchies du Golfe (alors que l’Arabie saoudite est aussi armée par la France et l’Allemagne), se sont mêlés du conflit ces dernières semaines. Les Saoudiens sont soupçonnés de complaisance avec les forces djihadistes sunnites, Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA) et dans une moindre mesure Daesh opérant dans le pays.

    Or, depuis l’arrivée à la Maison Blanche de Donald Trump, les USA ont bombardé les combattants d’AQPA. Le 29 janvier, un premier raid étatsunien contre une mosquée et un dispensaire à Yakla a tué 57 personnes... dont au moins 16 civils. Et le Yémen figure aussi sur la liste des pays – initialement sept, désormais six puisque l’Irak a été retiré de la liste – dont les ressortissants sont interdits d’entrée aux USA par l’administration Trump...

    Bertold du Ryon