Le Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP) a condamné le blocage de plusieurs sites de presse palestiniens et arabes, en Cisjordanie occupée par une décision de l'Autorité palestinienne (AP).
Dans un communiqué, le FPLP a déclaré : "Cette action est une grave atteinte à la liberté de la presse et d'expression, ainsi qu'une dangereuse tendance et acquiescement aux diktats des ennemis de la lutte de notre peuple, et la concordance avec les tentatives de museler la voix palestinienne et de l'étrangler et la camoufler, tout en appelant à annuler cette action immédiatement et arrêter la politique de punir le peuple palestinien ferme."
Le communiqué ajoute que la décision a été prise en de mauvaises circonstances, par laquelle l'occupation sioniste soutenue par la machine médiatique siono-américaine de fausser, falsifier et distordre les significations nobles nationales de la lutte et la résistance de notre peuple fermement établie par le sang, les sacrifices, la vérité et les mots sincères et libres face au récit et à la désinformation sionistes.
Le FPLP a poursuivi dans son communiqué: « La bataille est toujours ouverte contre notre peuple résistant, notamment en raison de ce qui a été annoncé au sommet de Riyad, en présence du président américain Trump, des déclarations désespérées stigmatisant la résistance de notre peuple au terrorisme en présence des dirigeants arabes et de l'AP, afin de bouleverser les cartes et les concepts, et resserrer l'attaque contre les forces de la résistance et tous ceux qui la soutiennent au profit des crimes de l'occupation israélienne, et la pratique fasciste couverte par le système officiel américano-arabe conspirateur derrière la normalisation avec l'occupation et le terrorisme sioniste".
Le FPLP a dénoncé fermement la décision de fermeture et blocage des sites de presse, la qualifiant de violation flagrante du droit d'opinion publique et de la liberté d'expression, appelant l'AP dirigée par Mahmoud Abbas à revenir sur cette action illégale et injuste contre la lutte du peuple palestinien qui souffre des crimes de l'occupation israélienne.
Dimanche 18/Juin/2017
Droits humains
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La fermeture des sites de presse est une violation de la liberté d'expression (FPLP)
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Syrie. Utilisation de phosphore blanc par la coalition dirigée par les États-Unis : un possible crime de guerre (Amnesty)
L'utilisation par la coalition emmenée par les États-Unis de munitions au phosphore blanc dans la banlieue de Raqqa, en Syrie, est illégale et pourrait constituer un crime de guerre, a confirmé Amnesty International après avoir étudié soigneusement cinq vidéos des faits.
Ces vidéos, publiées en ligne les 8 et 9 juin 2017, montrent des tirs d'artillerie de la coalition utilisant de telles munitions sur les quartiers civils de Jezra et d'El Sebahiya. Le droit international humanitaire interdit d'utiliser du phosphore blanc à proximité de civils.
« L'utilisation de munitions au phosphore blanc par la coalition dirigée par les États-Unis met gravement en danger la vie des milliers de civils piégés dans la ville de Raqqa et aux alentours, et pourrait dans ces circonstances constituer un crime de guerre. Cette substance peut provoquer de terribles blessures en brûlant la chair et les os, et reste dangereuse pendant des semaines après son utilisation car des résidus peuvent se rallumer spontanément et atteindre des températures extrêmement élevées », a déclaré Samah Hadid, directrice Campagnes pour le Moyen-Orient à Amnesty International.
« Les forces dirigées par les États-Unis doivent enquêter immédiatement sur les tirs d'artillerie qui ont visé Jezra et El Sebahiya et prendre toutes les mesures possibles pour protéger les civils. L'utilisation de phosphore blanc dans des zones densément peuplées fait courir aux civils un risque inacceptable et s'apparente presque immanquablement à une attaque menée sans discrimination. »
Amnesty International a vérifié et recoupé cinq vidéos rendues publiques les 8 et 9 juin 2017.
Celles-ci montrent clairement, sous différents angles, du phosphore blanc exploser au dessus de ces zones et une pluie de particules de phosphore en combustion retomber sur des bâtiments de faible hauteur. L'utilisation répétée de phosphore blanc dans des conditions où des civils risquent d'entrer en contact avec des particules en combustion est contraire au droit international humanitaire.
Selon le groupe d'observateurs locaux « Raqqa est assassinée en silence » et d'autres sources locales, 14 civils ont été tués lors d'une des frappes. Des militants de « Raqqa est assassinée en silence » ont dit à Amnesty International que, outre la population civile, de nombreuses personnes déplacées ayant fui l'ouest de Raqqa avaient aussi trouvé refuge dans ces zones au moment de l'attaque.
Du phosphore blanc de fabrication américaine
Selon l'analyse réalisée par Amnesty International, les obus au phosphore blanc que l'on voit sur les images sont très probablement des M825A1 de 155 millimètres, fabriqués aux États-Unis.
Le phosphore blanc est le plus souvent utilisé pour créer un écran de fumée dense susceptible de dissimuler des mouvements de troupes aux forces ennemies, ainsi que pour marquer des cibles en vue d'une nouvelle attaque. Si son utilisation à ces fins n'est pas interdite, elle doit être entourée des plus grandes précautions. Cette substance ne doit en aucun cas être utilisée à proximité de civils.
« La protection des forces ne doit pas être prioritaire sur la protection des civils. La coalition emmenée par les États-Unis, ainsi que les Forces démocratiques syriennes, doivent s'abstenir d'utiliser des armes explosives puissantes et des armes imprécises dans des zones habitées, et doivent prendre toutes les mesures possibles pour protéger la population civile », a déclaré Samah Hadid.
Utilisation confirmée de phosphore blanc à Mossoul, en Irak
La coalition dirigée par les États-Unis a confirmé avoir récemment utilisé du phosphore blanc dans la ville irakienne de Mossoul, mais n'a pas confirmé l'utilisation de cette substance à Raqqa. À Mossoul, elle a affirmé avoir utilisé du phosphore blanc pour créer un écran de fumée afin d'aider les civils à fuir les zones de la ville contrôlées par le groupe armé se faisant appeler État islamique (EI).
Complément d’information
Les combats s'intensifient à Raqqa tandis que les Forces démocratiques syriennes, soutenues par la coalition emmenée par les États-Unis, cherchent à reprendre le contrôle de la ville à l'EI. Des centaines de milliers de civils restent pris au piège dans la ville et aux alentours.
Amnesty International surveille le comportement de toutes les parties au conflit à Raqqa, au regard de leurs obligations en vertu du droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits humains qui s'applique.
16 juin 2017
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Maroc. Vague d'arrestations massives visant des manifestants dans le Rif (Amnesty)
Depuis une semaine, les autorités marocaines procèdent à une vague massive d'arrestations, visant de nombreux manifestants, militants et blogueurs dans la région du Rif, dans le nord du Maroc, qui font suite à des mois de contestations réclamant la fin de la marginalisation des habitants et un meilleur accès aux services dans la région, a déclaré Amnesty International.
Dans certains cas, les personnes arrêtées sont privées de la possibilité de consulter rapidement leur avocat en garde à vue. Dans d’autres, les avocats qui ont pu voir leurs clients au tribunal d’Al Hoceima ont déclaré qu'ils présentaient des blessures visibles et avaient affirmé avoir été frappés lors de leur arrestation. En outre, on craint que des manifestants et des blogueurs pacifiques relayant les manifestations sur les réseaux sociaux ne figurent parmi les accusés, probablement pour des charges liées à la sûreté de l'État.
« Cette vague d'arrestations ressemble fort à une tentative délibérée de punir les manifestants dans le Rif pour les mois de dissidence pacifique. Les autorités marocaines doivent respecter les droits à la liberté d'expression et de réunion. Les personnes accusées d'une infraction reconnue par la loi doivent bénéficier du droit à un procès équitable. Les autorités doivent veiller à ce que les militants pacifiques ne soient pas inculpés d'accusations forgées de toutes pièces en vue de les sanctionner pour leur participation aux manifestations dans le Rif », a déclaré Heba Morayef, directrice des recherches pour l'Afrique du Nord à Amnesty International.
La récente vague de manifestations a éclaté après qu’un leader des contestations Nasser Zefzafi a publiquement pris à parti, lors de la prière du midi à la mosquée d'Al Hoceima le 26 mai, un imam qui aurait fait des déclarations hostiles aux manifestations populaires dans le Rif. Une vidéo de l'incident a ensuite été partagée sur les réseaux sociaux et il a été arrêté quelques jours plus tard.
Entre le 26 et le 31 mai, les forces de sécurité ont appréhendé au moins 71 personnes en marge des manifestations à Al Hoceima et dans les villes voisines d'Imzouren et de Beni Bouayach. Certaines manifestations ont dégénéré en jets de pierres sur les forces de sécurité qui ont parfois réagi à coups de canons à eau et de gaz lacrymogènes. Des blessés ont été recensés dans les deux camps. Cependant, de nombreux militants, dont des manifestants pacifiques et des blogueurs qui avaient relayé les événements sur les réseaux sociaux, ont été arrêtés après la fin des manifestations.
Au moins 33 personnes comparaissent devant les tribunaux, inculpées par le procureur général du roi à Al Hoceima. Elles sont notamment accusées d'assaut et insulte contre des représentants de l’État, jet de pierres, rébellion et rassemblement non autorisé. Une demande concernant la libération de 26 personnes placées en détention provisoire a été refusée et l'affaire est reportée au 6 juin. Elles sont détenues à la prison locale d'Al Hoceima.
Selon les avocats, plusieurs accusés ayant comparu devant le procureur général du roi à Al Hoceima présentaient des blessures visibles sur le visage et le corps. Les accusés leur ont raconté que les policiers les avaient battus, frappés, leur avaient donné des coups de pied et des claques lors de leur arrestation et durant leur transfert aux postes de police. Beaucoup ont relaté avoir été insultés ou menacés, notamment de viol, par les policiers qui les ont arrêtés. D'autres ont signé des procès-verbaux d'interrogatoire pour s'apercevoir ensuite que des pages y avaient été ajoutées sans leur consentement. Le procureur général du roi a ordonné des examens médicaux dans plusieurs affaires.
Les avocats ont déclaré qu'ils n'avaient pas pu rendre visite à leurs clients pendant leur garde à vue au poste d'Al Hoceima. En effet, la police judiciaire d'Al Hoceima n'a pas informé les proches des détenus de l'endroit où ils se trouvaient, et ils n’ont donc pas pu donner d’instructions à leurs avocats. En outre, les avocats n'ont pas pu obtenir l'autorisation du procureur général du roi de rendre visite à leurs clients en garde à vue avant l'expiration du délai de 24 heures après l'arrestation, comme l'exige pourtant le droit marocain.
Sur les 71 personnes arrêtées entre le 26 et le 31 mai, 31 ont été transférées à Casablanca pour être interrogées par la Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ), organe national chargé des crimes graves, notamment des infractions liées à la sûreté de l'État et au terrorisme. Bien que les détenus n'aient pas encore été inculpés, il est à craindre qu’ils ne soient accusés d'atteintes à la sûreté de l'État.
« Nous déplorons que les autorités envisagent de porter des accusations liées à la sûreté de l'État pour sanctionner des militants ayant pris part aux manifestations », a déclaré Heba Morayef.
Les avocats n'ont pu rendre visite qu'à 22 détenus sur les 31 transférés à Casablanca le 1er juin. La plupart ont affirmé que des policiers les avaient insultés, menacés et parfois roués de coups de pied, lors de l'arrestation, durant le transfert vers le poste d'Al Hoceima ou au poste. Toutefois, ils ont décrit des conditions de détention décentes pendant leur garde à vue à la Brigade nationale de la police judiciaire. Ils seront rapidement rapatriés à Al Hoceima pour une audience devant le procureur général du roi à la cour d'appel d'Al Hoceima.
Les avocats n'ont pas encore pu rencontrer un groupe de sept autres détenus, dont le leader des contestations Nasser Zefzafi, les magistrats ayant retardé leur entrevue. Ces détenus devraient recevoir la visite de leurs avocats le 5 juin. Deux personnes arrêtées le 31 mai n’ont toujours pas rencontré leur avocat.
Au titre du Code de procédure pénale du Maroc, la police peut maintenir en garde à vue un détenu sans inculpation jusqu'à trois jours pour des infractions de droit commun, jusqu'à huit jours pour des infractions liées à la sûreté de l'État, et jusqu'à 12 jours pour des infractions liées au terrorisme. La loi autorise les magistrats à retarder l'accès aux avocats, pour les besoins de l'enquête.
« Le risque d’atteintes aux droits humains est maximal au cours des premières heures suivant l'arrestation, surtout si les détenus sont coupés du monde extérieur – aussi est-il essentiel d'informer les familles et de pouvoir consulter rapidement un avocat », a déclaré Heba Morayef.
Amnesty International demande aux autorités d'inclure dans la réforme de la procédure pénale le droit pour tous les suspects d'être assistés d'un avocat pendant les interrogatoires de la police.
Peu après l'incident à la mosquée d'Al Hoceima qui a déclenché la vague de protestations, les forces de sécurité ont perquisitionné le domicile du leader contestataire Nasser Zefzafi en son absence, abîmant des biens et confisquant des livres appartenant à ses parents âgés avec qui il vit. Quelques jours plus tard, le 29 mai, il a été arrêté au terme d'une traque compliquée, au cours de laquelle les maisons voisines ont été réquisitionnées, et transféré par hélicoptère au siège de la BNPJ, à Casablanca.
Amnesty International craint que les conditions de son arrestation et les déclarations officielles reprenant en détail les infractions dont il est soupçonné alors qu'il n’est pas encore inculpé ne bafouent son droit à la présomption d'innocence et celui des militants arrêtés avec lui. Des images et des vidéos divulguées de son arrestation, sur lesquelles on le voit cagoulé et contraint de baisser la tête, laissent à penser qu'il a pu être traité de manière dégradante.
2 juin 2017
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Algérie : Assurer un procès équitable aux défenseurs des droits des minorités (Amnesty)
Les autorités algériennes devraient abandonner tous les chefs d'inculpation retenus à l'encontre d'un activiste de renom et de ses 40 co-accusés, qui sont fondés sur leur militantisme pacifi- que en faveur des droits de la minorité amazigh, ou berbère, ont déclaré aujourd'hui Human Rights Watch, EuroMed Rights, Amnesty International et Front Line Defenders.
Kamaleddine Fekhar et la plupart de ses co-accusés sont en détention préventive depuis juillet 2015.Pour ce qui concerne les autres chefs d'inculpation, relatifs à des actes de violence, retenus contre les prévenus, les autorités devraient immédiatement mettre fin à leur détention préventive, à moins qu'il n'y ait dans chaque cas une justification individuelle nécessitant de prolonger cette détention alors que près de deux ans se sont écoulés depuis leur arrestation. Tous les détenus sont en droit d'être jugés dans un délai raisonnable.
Ces prévenus sont confrontés à des inculpations très similaires, notamment de meurtre, de terrorisme et d'autres graves infractions qui pourraient leur valoir la peine de mort, pour leur rôle présumé dans les sanglants affrontements ethniques qui ont éclaté dans la région du Mzab entre 2013 et 2015. « Si les autorités algériennes considèrent qu'elles doivent juger les personnes soupçonnées d'avoir fomenté et d'avoir participé aux graves violences survenues dans la province de Ghardaïa, cela devrait être sur la base d'éléments de preuve solides et individualisés », a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient à Human Rights Watch.La chambre d'inculpation, une chambre préliminaire chargée de confirmer ou de rejeter les chefs d'accusation sur la base d'un rapport rédigé par un juge d'instruction, a émis le 14 février 2017 une décision de 150 pages, dans laquelle elle ordonnait le transfert du dossier au tribunal en vue d'un procès. Les organisations signataires du présent communiqué ont examiné le rapport.
La Haute Cour d'Algérie a rejeté l'appel interjeté par la défense contre la décision d'intenter un procès, et celui-ci s'est ouvert le 25 mai.
Kamaleddine Fekhar a dirigé la section de la Ligue algérienne des Droits de l'homme dans la ville de Ghardaïa de 2004 à 2014. Fin 2013, il a fondé le Mouvement pour l'autonomie du Mzab, une région du nord du Sahara, et a condamné le gouvernement pour ce qu'il a qualifié de politique d'apartheid et de discrimination à l'encontre des Mozabites, une minorité d'ethnie amazigh vivant dans cette région. La plupart de ses co-accusés sont aussi des activistes pro-amazigh qui militent en faveur d'une autonomie du Mzab. « Aux termes des obligations internationales de l'Algérie, personne ne devrait être poursuivi en justice pour avoir plaidé pacifiquement pour les droits de minorités, y compris pour une autonomie régionale ou pour l'indépendance », a déclaré Michel Tubiana, président d'EuroMed Rights. Selon le droit international en matière de droits humains, les gouvernements sont en droit de sanctionner pénalement l'incitation à la violence, à la haine ou à la discrimination.
Mais les lois qui interdisent ces formes d'incitation doivent être formulées sur la base de définitions claires, étroites et spécifiques, qui soient compatibles avec la protection du droit à la liberté d'expression. Poursuivre en justice l'incitation à la violence devrait être limité à des cas dans lesquels l'incitation est intentionnelle et directement liée à la violence. Les poursuites pour incitation à la haine ou à la discrimination ne devraient jamais viser le plaidoyer pacifique en faveur des droits d'un segment de la population, ou d'une autonomie régionale ou de l'indépendance.
Le tribunal a rejeté plusieurs requêtes présentées par les avocats de la défense en faveur d'une mise en liberté sous caution de leurs clients en attendant le procès, la plus récente datant du 14 février. Les autorités judiciaires n'ont fourni aucun élément particulier ou circonstances pouvant justifier ces rejets, comme l'exigent le droit et les normes internationales humanitaires.
Outre les déficiences relevées dans les chefs d'accusation et les éléments à charge, la longue détention préventive infligée aux prévenus, sans fournir dans chaque cas une justification de la nécessité d'une telle détention prolongée, constitue une violation de leurs droits à la liberté et à des procédures équitables, qui incluent la présomption d'une remise en liberté dans l'attente du procès. L'article 14.3(c) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par l'Algérie ainsi que son Protocole optionnel, stipule que « toute personne accusée d'une infraction pénale a droit à être jugée sans retard excessif.» Les Directives et principes sur le droit à un procès équitable et à l'assistance judiciaire en Afrique, adoptés par la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples en 1999, stipulent que «à moins que des éléments de preuve suffisants rendent nécessaire la prise de mesures pour empêcher qu’une personne arrêtée et inculpée pour une infraction pénale ne s’évade, n’influence les témoins ou ne constitue une menace manifeste et grave pour d’autres, les États veillent à ce que ladite personne ne soit pas placée en détention préventive.»
« Les victimes des tragiques événements du Mzab méritent justice, et celle-ci ne peut être rendue par un procès profondément défectueux », a déclaré Heba Morayef, directrice de recherche sur l'Afrique du Nord à Amnesty International.
Éléments de contexte
Kamaleddine Fekhar a entamé une grève de la faim le 3 janvier 2017, pour réclamer sa remise en liberté, mais il l'a suspendue le 20 avril. Les autorités l'avaient arrêté, ainsi que 30 de ses co-accusés, le 9 juillet 2015, dans une maison dont il est le propriétaire dans la ville de Ghardaïa, à la suite de violences intercommunautaires qui avaient éclaté dans la province de Ghardaïa au début du même mois, derniers incidents en date dans cette région où les tensions interethniques sont fortes. Les autres prévenus ont été arrêtés en 2016, le 26 juillet et le 12 décembre.Des violences ont éclaté sporadiquement entre Mozabites et Arabes dans la province de Ghardaïa depuis 2013. L'un des épisodes les plus sanglants, survenu entre le 7 et le 10 juillet 2015, a fait environ 25 morts et plus de 70 blessés dans les deux communautés confondues, la plupart victimes de tirs à l'arme à feu, selon les informations parues dans les médias. La chambre d'inculpation a confirmé les chefs d'accusation retenus contre Kamaleddine Fekhar, notamment terrorisme, incitation à la haine ou à la discrimination, distribution de documents portant atteinte à l'intérêt national et dénigrement des institutions de l'État, tous relevant du code pénal.
En plus de ces inculpations, certains de ses co-prévenus ont également été accusés d'avoir constitué une bande criminelle en vue de commettre des crimes et des assassinats.
Plusieurs de ces infractions sont passibles de la peine de mort.Le rapport de la chambre, qui a établi les chefs d'inculpation, pose problème pour trois raisons: premièrement, le rapport ne comporte pas d'éléments de preuve à charge contre les prévenus pour les infractions constitutives d'une violence commise dans des buts criminels, telles que les accusations spécifiques de « terrorisme », de meurtre et d'incendie volontaire; deuxièmement, il inclut des infractions qui devraient être abolies car elles criminalisent l'exercice du droit à la liberté d'expression pacifique qui est protégé par les conventions internationales relatives aux droits humains, telles que « dénigrement des institutions de l'État » et « distribution de documents portant atteinte à l'intérêt national »; et troisièmement, il inclut des infractions qui sont recevables, telles qu'incitation à la haine, à la discrimination ou à la violence, mais qui doivent être prouvées selon des critères étroits et précis, en conformité avec l'obligation incombant à l'Algérie de respecter le droit à la liberté d'expression.
Le rapport de la chambre d'inculpation ne comporte aucun élément de preuve établissant que Kamaleddine Fekhar ou l'un quelconque de ses co-accusés auraient planifié ou perpétré le moindre acte de violence.
Au contraire, il justifie les chefs d'inculpation sur la base d'enregistrements de leurs discours, sans fournir la preuve qu'ils contenaient des incitations à la violence; sur le fait qu'ils ont tenu des réunions publiques; et sur leur appartenance à des mouvements amazigh. La chambre a également considéré le fait qu'un individu non identifié qui se trouvait à proximité de la maison de Fekhar avait pris pour cible les agents de la police judiciaire en pointant une arme à feu sur eux et en lançant des engins explosifs artisanaux lors de l'opération d'arrestation, comme preuve que les prévenus faisaient partie d'une bande criminelle. L'individu en question n'avait blessé aucun policier, a échappé à l'arrestation et ne figure donc pas parmi les accusés. Le rapport de la chambre d'inculpation cite une vidéo d'une rencontre entre Kamaleddine Fekhar et plusieurs de ses co-accusés, datant du 5 octobre 2013. Selon le rapport, dans cette vidéo, Fekhar déclare qu'un « divorce » entre les Mozabites et les Arabes est inévitable.
Il fustige la police pour n'avoir pas poursuivi les personnes responsables de violences ayant visé la communauté mozabite, qualifie les Arabes d'« envahisseurs » et d'« hypocrites », et déclare que les « autorités sont dictatoriales, corrompues, criminelles, répressives » et partiales en faveur des populations arabes.
Le rapport cite une autre vidéo dans laquelle Kamaleddine Fekhar aurait déclaré: « Nous sommes sur notre terre et la terre de nos ancêtres, les Arabes ne sont pas des invités mais des envahisseurs; nous devons les chasser de nos terres et de toute l'Afrique du Nord, Daesh [l'État islamique] est la source de la corruption et des crimes.»
En ce qui concerne les autres accusés, la chambre d'inculpation cite des rapports de police qui les identifient comme étant parmi les participants à la réunion filmée dans cette vidéo d'octobre 2013. La chambre cite également des déclarations faites par les accusés à la police, dans lesquelles ils reconnaissent être des activistes pro-autonomie, avoir été présents dans la maison de Fekhar lors de l'opération d'arrestation du 9 juillet 2015 et avoir participé à des défilés ou à des manifestations pour les droits des Mozabites. Dans sa présentation d'éléments de preuve de leur appartenance à une bande criminelle et de leur tentative de déstabiliser la sécurité de l'État, le tribunal fournit une liste d'organisations pro-autonomie dans lesquelles Fekhar et d'autres accusés étaient actifs.
29 mai 2017
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Arabie Saoudite (Amnesty + A l'Encontre.ch)
La visite de Donald Trump risque de donner le feu vert à des violations des droits humains
Les droits humains sont attaqués sans relâche dans les États du Golfe. Margaret Huang, directrice d'Amnesty International États-UnisLe président américain Donald Trump entame son premier voyage à l'étranger et se rend au sommet de Riyad, en Arabie saoudite : la lutte contre le terrorisme et la sécurité seront au cœur de ses discussions avec les dirigeants des États du Golfe et des États arabes. Le président devrait également dévoiler des contrats d’armement de plusieurs milliards de dollars avec l'Arabie saoudite. Le fait que les droits humains ne figurent pas à l’ordre du jour risque de favoriser les violations dans une région où les gouvernements bafouent les droits de leurs propres citoyens au nom de la lutte contre le terrorisme et violent le droit international humanitaire dans des conflits alimentés en grande partie par des transferts d'armes américains, a déclaré Amnesty International.
« Les droits humains sont attaqués sans relâche dans les États du Golfe. L'Arabie saoudite et d'autres pays du Golfe se servent de la lutte contre le terrorisme comme d'un prétexte pour écraser et persécuter les détracteurs, les dissidents pacifiques et les défenseurs des droits humains, a déclaré Margaret Huang, directrice d'Amnesty International États-Unis.
« Alors même que des familles sont tuées chez elles et que des armes interdites par le droit international sont utilisées par la coalition que dirige l'Arabie saoudite au Yémen, l'administration Trump prévoit des contrats d’armement de plusieurs milliards de dollars avec l'Arabie saoudite. Ce mépris flagrant pour les droits humains et le droit humanitaire ne fera qu'inciter les États du Golfe et du monde à poursuivre leur quête de " sécurité " au détriment des droits fondamentaux des citoyens. »
Transferts d'armement des États-Unis
Lors d'une récente visite en Arabie saoudite, le rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte contre le terrorisme a conclu que l'Arabie saoudite n'avait pas pris de mesures concrètes pour enquêter sur de possibles crimes de guerre commis par ses propres forces dans le conflit au Yémen.
Or, les États-Unis restent le principal fournisseur d'armes de l'Arabie saoudite. L'administration Trump est en train de finaliser les dernières étapes d'une vente d'armes de plusieurs milliards de dollars avec le gouvernement saoudien.
Amnesty International a rassemblé des informations sur un vaste éventail de violations du droit international commises par tous les belligérants au Yémen, y compris la coalition que dirige l'Arabie saoudite. La coalition a mené des raids aériens incessants, tuant et blessant des civils et détruisant des habitations, des biens et des infrastructures civils dans des attaques menées sans discrimination ou visant des biens de caractère civil. Plusieurs de ces attaques, dont certaines constituent des crimes de guerre, ont utilisé des armes américaines.
« Les États-Unis, via des transferts d'armes à destination de l'Arabie saoudite, continuent d'alimenter de graves violations des droits humains, qui causent de terribles souffrances à la population civile du Yémen, a déclaré Margaret Huang.
« Des preuves accablantes attestent de crimes de guerre commis par la coalition que dirige l'Arabie saoudite. Les États-Unis doivent immédiatement cesser de fournir des armes aux membres de la coalition en vue d'une utilisation au Yémen et faire pression en faveur d'une enquête indépendante et efficace sur les nombreuses violations recensées dans le cadre de cette guerre oubliée. »
Répression des droits humains
En mai 2017, le rapporteur spécial des Nations unies sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte contre le terrorisme a conclu que les lois antiterroristes du pays ne respectent pas les normes internationales et que l'Arabie saoudite « doit cesser d’utiliser la législation antiterroriste contre les personnes exerçant pacifiquement leurs droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion ».
Amnesty International a constaté une répression continue et systématique orchestrée par les autorités en Arabie saoudite contre les militants des droits humains, s'attaquant violemment aux derniers vestiges d'une société civile très fragilisée dans le pays. Des militants sont arrêtés et poursuivis, aux termes des lois antiterroristes et de lois destinées à étouffer toute critique pacifique, sur la base de chefs d'inculpation à la formulation vague et excessivement large. Parmi les détenus, les prévenus ou ceux qui purgent des peines d’emprisonnement figurent plusieurs membres de l’Association saoudienne des droits civils et politiques (ACPRA), une organisation indépendante de défense des droits humains créée en 2009 et que les autorités ont dissoute en 2013.
« Les autorités saoudiennes se cachent derrière les lois antiterroristes draconiennes pour justifier les condamnations de défenseurs pacifiques des droits humains. Les uns après les autres, les militants en Arabie saoudite disparaissent », a déclaré Margaret Huang.
D'autres pays du Golfe invoquent la sécurité et la lutte contre le terrorisme pour réprimer la dissidence. Le gouvernement de Bahreïn restreint la liberté d'expression et le droit de réunion pacifique : il arrête d'éminents défenseurs des droits humains, prive des Bahreïnites de leur nationalité, réprime violemment les manifestations et dissout les partis d'opposition.
Aux Émirats arabes unis, les autorités restreignent de manière arbitraire les droits à la liberté d’expression et d’association, arrêtent et poursuivent en justice, aux termes des textes législatifs sur la diffamation et des lois antiterroristes, des opposants et des personnes critiques à l’égard du gouvernement, ainsi que des étrangers. Les disparitions forcées et les procès inéquitables sont des pratiques courantes. Les détenus sont régulièrement torturés et maltraités. 19 mai 2017,
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Lire aussi:
Etats-Unis-Arabie saoudite. Des dizaines de milliards pour des contrats entre un Trump contesté et un royaume dont le portefeuille n’est plus si replet
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Quimper Palestine (Le Télégramme)
Rassemblement de soutien aux prisonniers en grève de la faim
Dix associations appellent au rassemblement, demain, en soutien aux prisonniers palestiniens grévistes de la faim. Dix associations appellent à un rassemblement, demain, en soutien aux prisonniers palesti- niens en grève de la faim depuis le 17 avril en Israël. « Les prisonniers participant à la grève de la faim, lancée par Marwan Barghouti, dirigeant du Fatah détenu depuis quinze ans et condamné à cinq peines de perpétuité, seraient 1.500 sur les 6.300 Palestiniens actuellement détenus par Israël..Il est difficile d’avoir une participation précise à cette grève de la faim d’une ampleur inédite car les prisonniers sont déplacés, dispersés dans les prisons et placés à l’isolement », affirme Yves Jardin de l’association France Palestine Solidarité..« Ils demandent à être traités de façon digne et dans le respect du droit, la fin du recours à la torture et aux mauvais traitements, l’abandon de la détention administrative, l’amélioration des conditions de visite des familles, la fin de la détention en Israël et non dans les territoires occupés, des soins de santé adaptés, la possibilité de faire des études », précise-t-il..« La situation est grave, des grévistes de la faim connaissent une dégradation de leur état de santé, les autorités israéliennes restent inflexibles..Il y a des craintes de nourriture de force à laquelle s’est opposée l’association professionnelle des médecins israéliens », poursuit le porte-parole des associations. Elles ont demandé une entrevue à la préfecture et une intervention de la France auprès du gouvernementisraélien..Dix associations appellent au rassemblement, demain, en soutien aux prisonniers palestiniens grévistes de la faim: AFPS, le PCF, EELV, Ensemble ! l’ARAC, le Mouvement de la paix, l’UDB, la FSU, Attac et l’Acat Bretagne. (Le NPA soutient bien évidemment!).17 mai 2017.Pratique:.
Rassemblement Jeudi, 18 h, Place de la Résistance.. -
Bahreïn. Première affaire civile déférée à un tribunal militaire (Amnesty)
Les autorités bahreïnites ont déféré un civil devant un tribunal militaire pour la première fois depuis 2011, à la suite de la ratification par le roi en avril 2017 d'un amendement à la Constitution ayant de très graves conséquences. Le parquet bahreïnite a déféré le cas de Fadhel Sayed Abbas Hasan Radhi, victime d'une disparition forcée, à une juridiction militaire le 9 mai 2017.
« Cette manœuvre des autorités vise à effrayer la population. Il s'agit également d'un grave coup porté à la justice à Bahreïn. Les procès militaires à Bahreïn sont d'une flagrante iniquité. Le fait de faire juger des civils par des tribunaux militaires est contraire aux dispositions des normes internationales, a déclaré Samah Hadid, directrice des campagnes au bureau régional d’Amnesty International à Beyrouth.
« La décision de transférer Fadhel Sayed Abbas Hasan Radhi devant un tribunal militaire doit être immédiatement annulée. Il doit être immédiatement autorisé à avoir accès à une représentation juridique digne de ce nom, informé des accusations retenues contre lui, et jugé devant un tribunal civil, conformément aux normes relatives à l'équité des procès. »
Fadhel Sayed Abbas Hasan Radhi a subi une disparition forcée pendant sept mois à la suite de son arrestation le 29 septembre 2016 à son domicile familial à Hamad Town – au sud-est de la capitale, Manama – par des membres de la Direction des enquêtes criminelles. Durant cette période, il n'a pas été autorisé à consulter un avocat et a été coupé du monde extérieur, ce qui a fait craindre qu'il n'ait été soumis à la torture ou à d'autres mauvais traitements. L'organisation est également préoccupée par le fait qu'il pourrait avoir été contraint de faire des « aveux » qui seront utilisés en tant que preuve lors de son procès devant un tribunal militaire.
Ses proches n’ont pas été informés de l’endroit où il a été emmené ni des motifs de son arrestation, et ils sont restés sans nouvelles de lui pendant deux semaines jusqu’à ce qu’il les appelle pour leur dire où il se trouvait. Depuis, ils n'ont eu que des contacts très sporadiques avec lui par téléphone.
Les proches de Fadhel Radhi et Amnesty International ont adressé de nombreuses requêtes au bureau du procureur et au bureau du médiateur du ministère de l’Intérieur, ce dernier étant chargé d'enquêter sur les allégations de torture et d'autres mauvais traitements, mais ils n'ont reçu une réponse que dans la matinée du 9 mai : le bureau du procureur leur a alors annoncé que le dossier de Fadhel Radhi avait été transmis à ce tribunal. Son avocat n'a pas été informé de cette décision, et il n'a reçu aucune information au sujet de ce dossier et des accusations retenues contre son client.
Amnesty International craint en outre qu'une autre personne soumise à une disparition forcée depuis plus de six mois, Al Sayed Alawi Hussain al Alawi, ne soit déférée devant un tribunal militaire. Cet homme a lui aussi été coupé du monde extérieur depuis son arrestation en octobre 2016 ; il n'a pas eu accès à son avocat durant toute sa détention et on ignore de quoi il est accusé. Il risque toujours d'être soumis à la torture ou à d'autres mauvais traitements.
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Respect des droits de l’homme : la Tunisie a encore des efforts à faire (MEE)
« Je suis déçue. Déçue par le rapport présenté aujourd’hui qui me rappelle les temps passés. On ne parle que de l’arsenal administratif alors qu’il faut parler de défense des droits de l’homme, de garanties. »
Voici ce qu’affirmait mardi Hafidha Cheki, vice-présidente de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH), à l’issue de l’Examen Périodique Universel (EPU) du Haut-commissariat des droits de l’homme des Nations unies consacré à la Tunisie.
Mené par les États sous les auspices du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, l’EPU consiste à passer en revue les réalisations d’un pays dans le domaine des droits de l’homme, fournissant à chacun l’opportunité de présenter les mesures qu’il a prises pour améliorer la situation en la matière sur son territoire. Il s’agissait de la troisième audience de la Tunisie, la dernière ayant eu lieu en 2012.
L’audience, qui s’est déroulée ce mardi à Genève en présence des représentants de divers pays membres de l’ONU, était retransmise en direct au Rio, un cinéma du centre-ville de Tunis, où les membres de la société civile s’étaient réunis.
À Genève, la matinée a commencé par la présentation du rapport gouvernemental par le ministre tunisien des Relations avec les instances constitutionnelles, la société civile et les droits de l’homme, Mehdi Ben Gharbia, qui s’est dit « déterminé à continuer le processus démocratique et à lutter pour protéger les droits humains », tout en évoquant des « challenges économiques sans précédent. » Une façon d’expliquer les manquements, concernant notamment les recommandations de 2012, qui n’ont pas toutes étaient suivies d’actes.
C’est le représentant du Soudan qui s’est exprimé le premier, insistant sur la lutte contre le terrorisme et la radicalisation. La plupart des pays de la région d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient évoqueront par la suite cette question qui touche à la sécurité des citoyens. La Tunisie est considérée comme le plus gros exportateur de militants partis rejoindre le groupe État islamique, avec 5 500 combattants à l’étranger selon un rapport de 2015 de l’ONU et 3 000 selon le ministère tunisien de l’Intérieur.
Les pays européens ont, quant à eux, mis l’accent sur les discriminations. La Suisse a, par exemple, recommandé une modification du code tunisien du statut personnel. Promulgué en 1956, le texte, considéré comme moderne à l’époque, semble aujourd’hui dépassé. Il précise notamment que l’homme est le chef de famille.
Bien que la nouvelle Constitution instaure l’égalité entre hommes et femmes, ces dernières héritent généralement de la moitié de la part d’un homme. Autre discrimination : une Tunisienne de confession musulmane ne peut pas épouser un non-musulman, alors qu’un Tunisien peut épouser une non-musulmane.
En 2012, déjà, le Conseil des droits de l’homme avait promulgué un certain nombre de recommandations concernant le droit des femmes. Un rapport alternatif (c’est-à-dire soumis par la société civile en vue de l’EPU) rédigé, entre autres, par l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), Avocats sans Frontières et la FIDH, remarque ainsi que « les discriminations polluent toujours la législation ».
C’est ce qui inquiète Yosra Frawes, membre de la FIDH : « Le gros point noir, pour nous, c’est que la Tunisie ait pris des engagements en 2012 sans aller au bout », a-t-elle déclaré à MEE.
Azaiz Sammoud, membre d’Avocats Sans Frontières, exprime lui aussi sa déception auprès de Middle East Eye : « La Constitution de 2014 a été un événement majeur. Mais la Tunisie n’a pas réussi à avancer face à ses défis. Depuis 2012, il y a tout un arsenal juridique qui a été créé, mais aucune mise en oeuvre. »
Toujours sur la question des discriminations, la Belgique a demandé une loi de « portée générale sur les violences faites aux femmes » et l’abrogation de l’article 230 du code pénal. Celui-ci criminalise la sodomie, passible de trois ans de prison ferme. Les forces de l’ordre font constater l’acte sexuel par le biais d’un test annal pratiqué par un médecin légiste.
Au diapason de la plupart des représentations, le Togo a demandé « la fin de la peine de mort et de mieux lutter contre la torture ». En Tunisie, la peine de mort est placée sous moratoire depuis 1991. « C’est censé être la phase préalable à l’abolition », explique Wahid Ferchichi, professeur en droit public présent à la retransmission de l’EPU à Tunis.
Or, l’expert note que « la peine de mort est consacrée dans la loi anti-terrorisme de 2015 ». Des peines sont donc toujours prononcées, sans être appliquées. Wahid Ferchichi critique dès lors un État qui « n’a pas tranché ». Pour se justifier de ne pas avoir suivi les recommandations de 2012 concernant l’abolition de la peine de mort (114.45, 116.6 et 116.7), la Tunisie a prétexté l’absence de consensus national.
Au sujet de la torture, qui faisait l’objet d’une petite dizaine de recommandations en 2012, les autorités tunisiennes se sont à nouveau engagées à lutter contre cette pratique en mettant notamment en place un organe indépendant. La délégation tunisienne a tout de même souligné que les plaintes étaient en baisse. 153 cas enregistrés entre janvier et novembre 2016 contre 250 en 2015 selon l’Organisation tunisienne contre la torture.
Dans son rapport de 2016 intitulé « L’Impunité, pourquoi ? », l’OMCT note que 80 % des cas de torture qui lui sont rapportés accusent la police ou la garde nationale, qui emploieraient ces méthodes pour soutirer aveux ou informations.
Pour la société civile réunie ce mardi au Rio de Tunis, le bilan de cette audience est plus que mitigé. « Le rapport présenté par les autorités tunisiennes à Genève a mis l’accent sur ce qui a été fait, notamment par rapport à la Constitution, note Wahid Ferchichi. Alors que les questions fondamentales adressées depuis 2011 ont obtenu les mêmes réponses. »
Les aspirations qui ont mené à la révolution de 2011 étaient en effet basées sur un désir de libertés, de justice et d’égalité plus fortes. Azaiz Sammoud, d’Avocat Sans Frontières, attend des actes concrets : « Nous souhaitons que la Tunisie s’engage vraiment à mettre en œuvre les recommandations de 2012. »
Un avis partagé par Hafidha Cheikh : « Je n’ai pas vu grand-chose de concret dans l’application de la Constitution. »
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Alors que la Tunisie a procédé ce mardi à l’Examen Périodique Universel du Haut-commissariat des droits de l’homme, la société civile tunisienne se dit déçue par le manque de progrès concrets