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Tunisie : élections législatives et crise sociale (Lutte Ouvrière)



Les résultats des élections législatives du 26 octobre en Tunisie semblent avoir réjoui, outre les deux partis qui arrivent en tête, Nidaa Tounes et Ennahda, quelques ministres des Affaires extérieures, en particulier Laurent Fabius.

La population, elle, s'est nettement moins déplacée qu'au précédent scrutin du même type, en octobre 2011, destiné à élire l'Assemblée chargée de rédiger la nouvelle Constitution du pays.

Dans ce pays de 11 millions d'habitants, 3,2 millions seulement d'entre eux sont allés voter sur 7 à 8 millions en âge de le faire, alors qu'en octobre 2011, 4,3 millions s'étaient déplacés. Pourtant, ils étaient 5,2 millions à avoir fait la démarche d'inscription sur les listes électorales, dès 2011 ou plus récemment.

Arrivé en tête, le parti Nidaa Tounes (« l'Appel de la Tunisie ») tire apparemment profit de son absence dans la « troïka » qui a gouverné le pays depuis trois ans. Son leader, Caïd Essebsi, n'a pourtant rien d'une figure nouvelle : à 88 ans, il a été ministre de Bourguiba, puis président de la Chambre des députés sous Ben Ali, avant d'être Premier ministre d'un gouvernement de transition, après la chute de ce dernier en 2011. Son parti est un regroupement hétéroclite de notables, allant d'anciens responsables du RCD de Ben Ali à des politiciens transfuges du parti social-démocrate Ettakatol.

Ayant décroché environ 80 sièges sur les 217 à pourvoir, Nidaa Tounes devra, pour obtenir une majorité, faire alliance soit avec le parti islamiste Ennahda, qui n'en a obtenu que 70 environ, avec deux fois moins de voix qu'en octobre 2011, soit avec le regroupement de gauche du Front populaire, qui aura beaucoup moins de députés (il obtiendrait entre 5,5 et 7 % des voix).

Nidaa Tounes a fait campagne sur le slogan du « vote utile » contre Ennahda et a, sur cette base, bénéficié du ralliement de plusieurs autres partis. Les candidats des deux anciens partis qui avaient partagé le gouvernement avec Ennahda, le CPR de Monzef Marzouki et Ettakatol ont été largement rejetés. Cependant, même si la majorité des électeurs a sans doute voulu marquer une défiance à l'égard du parti islamiste, celui-ci garde une large assise électorale.

On ne sait encore quelle alliance se formera pour gouverner. Nidaa Tounes et Essebsi disent pour l'instant n'en exclure aucune. Quoi qu'il en soit, les aspirations de la population pauvre ne seront pas davantage prises en compte qu'auparavant. Le chômage, la misère, l'absence d'espoir qui avaient provoqué les révoltes populaires de l'hiver 2010-2011 et avaient conduit au départ du dictateur Ben Ali sont toujours d'actualité. Les centaines de milliers de sans-emploi, les « diplômés chômeurs », les bas salaires, la corruption, les hausses des prix, la hausse des carburants, du café... continuent d'alimenter la colère. C'est le cas en particulier dans les régions « oubliées » du centre ouest, où d'ailleurs le Front populaire fait ses meilleurs scores.

À ces problèmes, la campagne pour l'élection présidentielle qui va suivre ces élections législatives n'apportera sans doute guère plus de réponses.

Viviane Lafont

http://www.lutte-ouvriere-journal.org/?act=artl&num=2413&id=44

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