Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Note sur la coopération militaire entre la France et Israël (Afps)

http://revolutionsarabes.hautetfort.com/media/01/01/436849504.jpeg

La coopé­ration mili­taire et sécu­ri­taire entre Israël et la France ne se limite pas aux expor­ta­tions d’armes, elle est multi-​​facettes : impor­tation d’armes ; consul­ta­tions stra­té­giques bila­té­rales ; ren­contre entre auto­rités mili­taires ; échange d’expertise tech­nique et de savoir-​​faire au niveau des dif­fé­rentes armées et des ser­vices de police ; échanges entre les ser­vices de ren­sei­gne­ments ; coopé­ration indus­trielle, avec création d’entreprises franco-​​israéliennes ; projet commun dans le domaine de la recherche ; etc.

Pour la France, l’enjeu prin­cipal — comme le ministère de la défense avait pu l’écrire en 2008 dans une réponse écrite au député Can­delier — reste de « main­tenir, en matière d’armement, une relation suf­fi­samment active pour per­mettre d’identifier les domaines où l’expertise israé­lienne est unique et utile pour notre pays, tout en demeurant extrê­mement vigilant sur des pro­po­si­tions de coopé­ration dans des domaines très sen­sibles ou pour les­quels nos indus­tries sont en concur­rence frontale ». Concrè­tement ces domaines relèvent pour l’essentiel, sur un plan indus­triel, des sys­tèmes de drones, du spatial et des mis­siles ; sans oublier le partage de savoir-​​faire sur l’intervention dans les zones urbaines acquise par les forces israé­liennes armées…

Pour Israël, les rela­tions avec la France — comme avec les autres pays euro­péens — sont très recher­chées car elles lui per­mettent de posi­tionner son industrie sur le marché européen et de se pré­valoir d’un label Otan. Dans sa réponse en 2008, le ministère français de la défense notait aussi « l’intérêt israélien pour le système français de com­man­dement inter­armées des opé­ra­tions spé­ciales  ». L’enjeu n’est pas tant tech­nique ou éco­no­mique, que surtout poli­tique en termes d’intégration et de recon­nais­sance par la com­mu­nauté inter­na­tionale — au moins dans sa partie occi­dentale ! —afin de ne pas être isolée sur un plan diplo­ma­tique et poli­tique. Parmi les autres enjeux, figure éga­lement l’Iran et la question de la pro­li­fé­ration nucléaire, mais qui relève d’une pro­blé­ma­tique dif­fé­rente non traitée ici…

Un enjeu économique limité

Nous ne dis­posons d’aucune données fiables sur les mon­tants des impor­ta­tions fran­çaises de matériel mili­taire ou sécu­ri­taire en pro­ve­nance d’Israël. Le niveau des ventes directes de maté­riels français à l’État israélien demeure rela­ti­vement faible — sur un plan éco­no­mique — et reste concentré sur des com­po­sants et non des pro­duits finis. En 2013 — der­nières données dis­po­nibles issues du Rapport au Par­lement 2014 sur les expor­ta­tions d’armements de la France, publié par le ministère de la Défense — la France a livré pour 14,4 mil­lions d’euros de matériel mili­taire à Israël ; et 107,4 mil­lions d’euros pour les cinq der­nières années (20092013), soit une moyenne annuelle de 21,5 mil­lions d’euros.

Au niveau des prises de com­mandes effec­tuées par Israël auprès de la France, en 2013 le montant est de 15,8 mil­lions d’euros. Et de 111,3 mil­lions d’euros pour la période 2009-​​2013 ; soit une moyenne annuelle de 22,3 mil­lions d’euros.

Comme élément de com­pa­raison, sur la période 2009-​​2013 : Israël repré­sente seulement 0,36 % du total des prises de com­mandes et 0,58 % du total des livraisons d’armes de la France ; et si on se limite aux trans­ferts effectués uni­quement sur la zone du Proche et Moyen-​​Orient : 2 % des livraisons et 1,4 % du montant des prises de com­mande de la France.

À noter : il s’agit de données finan­cières ! Nous ne dis­posons d’aucune infor­mation sur le type de matériel transféré… et donc l’usage qu’il peut en être fait.

Importance des salons d’armements

Le marché israélien devrait rester très dif­ficile d’accès pour les indus­triels français compte tenu, d’une part, de l’importance de l’aide amé­ri­caine qui détermine en grande partie la poli­tique d’achat israé­lienne ; d’autre part, de la per­for­mance de l’industrie d’armement de l’État hébreu qui reste fon­da­men­ta­lement concur­rente sur de nom­breux marchés que la France cherche à obtenir…

En revanche, un enjeu important pour l’industrie d’armement israé­lienne est l’autorisation accordée par la France pour sa par­ti­ci­pation aux dif­fé­rents salons d’armements inter­na­tionaux qu’elle organise et qui sont devenus au fil des édi­tions, des évé­ne­ments incon­tour­nables et de premier plan.

À savoir :
• Euro­satory, pour le matériel ter­restre, les années pairs ;
• Euro­naval, pour le matériel naval, les années pairs ;
• Le Bourget, salon aéro­nau­tique civil et mili­taire, les années impairs ;
• Milipol, spé­cialisé dans le matériel de sécurité et de maintien de l’ordre, les années impairs.

Ces salons repré­sentent un enjeu important pour le déve­lop­pement de l’industrie mili­taire et de sécurité israé­lienne car il lui donne une forte recon­nais­sance comme acteur et par­te­naire incon­tour­nables. La pré­sence israé­lienne est en constante pro­gression dans ses salons.

La France, complice des violations du droit international…

Alors qu’Israël commet des vio­la­tions du droit inter­na­tional huma­ni­taire avérées, le maintien d’une coopé­ration mili­taire est en contra­diction totale avec les propres enga­ge­ments de la France :

_​ • d’une part, au niveau européen avec la « Position commune du Conseil défi­nissant des règles com­munes régissant le contrôle des expor­ta­tions de tech­no­logie et d’équipements mili­taires » adoptée en décembre 2008, qui com­porte des obli­ga­tions d’interdire tout transfert menaçant « la pré­ser­vation de la paix, de la sécurité et de la sta­bilité régio­nales » ou «  sus­cep­tible d’aggraver les ten­sions et les conflits armées à l’intérieur du pays », par exemple ; des cri­tères qui sont allè­grement bafoués dans le cadre des expor­ta­tions de matériel mili­taire à Israël ;

_​ • d’autre part, au niveau inter­na­tional avec la signature des conven­tions de Genève com­portant une double « obli­gation négative » — à savoir ne pas encou­rager une partie à un conflit armé à violer le droit inter­na­tional huma­ni­taire, ni prendre des mesures sus­cep­tibles d’aider à la com­mission de telles vio­la­tions — et une « obli­gation positive » — consistant à prendre des mesures appro­priées pour mettre un terme aux violations.

Nota bene

• Il ne faut pas oublier l’échelon européen. En effet, l’Union euro­péenne intègre Israël comme un pays associé au niveau des dif­fé­rentes édi­tions du « Programme-​​cadre de recherche et déve­lop­pement tech­no­lo­gique ». Plu­sieurs projets concernent les ques­tions de sécurité, dont cer­tains sont direc­tement pilotés par Israël.

_​ • En juin 2008 a été signé entre la France et Israël un « accord de coopé­ration entre le gou­ver­nement de la Répu­blique fran­çaise et le gou­ver­nement de l’État d’Israël sur la lutte contre la cri­mi­nalité et le ter­ro­risme ». Sa mise en œuvre est le fait des minis­tères de l’Intérieur de chacun des États. Elle est encore plus opaque que les échanges au niveau militaire !

Pistes d’action

1) Demander un mora­toire de la coopé­ration mili­taire et la mise en place d’une com­mission d’enquête par­le­men­taire chargée de faire la trans­pa­rence sur les moda­lités de cette coopé­ration et de leur conformité au regard des enga­ge­ments inter­na­tionaux de la France. Cette ini­tiative peut être relayée par les groupes locaux ou les indi­vidus auprès de leurs parlementaires.

2) Orga­niser des mobi­li­sa­tions à l’occasion des dif­fé­rents salons d’armements avec en amont un travail d’information et d’interpellation de nos élus sur leurs res­pon­sa­bi­lités en la matière. En 2015 : le salon de l’aéronautique et de l’espace, du 15 au 21 juin à Paris-​​Le Bourget ; et Milipol (salon mondial de la sécurité inté­rieure) du 17 au 20 novembre au Parc des expo­si­tions de Paris Nord Villepinte.

3) La France vient de lancer un appel d’offre res­treint concernant l’achat d’un nouveau drone tac­tique pour l’armée de Terre en rem­pla­cement des actuels SDTI (Système de drone tac­tique inté­ri­maire). Thales par­ticipe à cette com­pé­tition avec le Wat­ch­keeper — dérivé du Hermes 450 israélien, déve­loppé par Elbit. Demander son retrait de la compétition.

4) Pro­fiter de la mise en place au niveau européen d’une nou­velle équipe et d’un nouveau par­lement pour demander la révision de la par­ti­ci­pation d’Israël dans le 8e Pro­gramme cadre de recherche et déve­lop­pement technologique.

Note rédigée par Patrice Bouveret

*L’Observatoire des arme­ments est un centre d’expertise indé­pendant fondé en 1984, issu de la société civile. Il a pour objectif d’étayer les travaux de la société civile sur les ques­tions de défense et de sécurité et ce, dans la pers­pective d’une démi­li­ta­ri­sation pro­gressive. L’Observatoire inter­vient sur deux axes prio­ri­taires : les trans­ferts et l’industrie d’armement ; les armes nucléaires et leurs consé­quences. Il publie des études et la lettre d’information Damoclès.

POUR EN SAVOIR PLUS : www​.obsarm​.org

 

Documents joints

  • Document (PDF – 129.2 ko)
  • Patrice Bouveret, Observatoire des armements, lundi 8 décembre 2014

    Note d’information, décembre 2014


    Par l’Observatoire des arme­ments Centre de Docu­men­tation et de Recherche sur la Paix et les Conflits

http://www.france-palestine.org/Note-sur-la-cooperation-militaire

Les commentaires sont fermés.