La législation algérienne est en train d’accompagner l’évolution du travail féminin, «mais nous sommes encore loin de l’égalité promise par la Constitution», constate Soumeya Salhi, syndicaliste et militante.
Les syndicats doivent se réapproprier le terrain de la lutte pour l’égalité homme-femme en milieu professionnel», plaide Soumeya Salhi, syndicaliste et militante, lors de son intervention à une rencontre animée hier à Alger sur le travail des femmes. Cette rencontre a été organisée par le Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest), à l’occasion du 70e anniversaire de la création de la Fédération mondiale des syndicats.
La précarisation des emplois à travers la généralisation de la contractualisation et autres formes d’emploi temporaire constitue la plus grande menace pour les droits des travailleurs de manière générale et la précarisation chez les femmes, qui sont les plus vulnérables, estime Mme Salhi, qui rappelle que plus de 70% des travailleurs ne sont pas déclarés à la Sécurité sociale. «L’informel représente un pan important des emplois non déclarés à la sécurité sociale.
Ces effectifs féminins ne peuvent prétendre à des congés de maternité ni à des remboursements de médicaments et représentent une menace pour le financement de notre système de sécurité sociale», soutient la syndicaliste, qui prévient contre «les manœuvres misogynes qui activent sous de nouveaux drapeaux, profitant de l’espace inoccupé par les femmes travailleuses». Pourtant, souligne Mme Salhi, une enquête de l’Office national des statistiques en 2014 affirme la présence acquise des femmes en milieu professionnel. Les chiffres indiquent même une surqualification des diplômées par rapport aux postes occupés.
La moitié des femmes travailleuses sont titulaires de diplômes universitaires, explique la conférencière, qui rappelle que 38% des magistrats sont des femmes.
Cependant, regrette l’intervenante, la précarité de l’emploi à travers les différentes formes de travail contractuel font que 84% des femmes occupant des postes de préemploi sont des universitaires. La précarité ouvre donc la brèche à toutes les formes de chantage et de harcèlement.
La législation algérienne est en train d’accompagner l’évolution du travail féminin, «mais nous sommes encore loin de l’égalité promise par la Constitution», constate la conférencière, qui rappelle, à titre d’exemple, l’abrogation de l’article du code de la famille relatif à la déchéance de la femme travailleuse du droit de garde de ses enfants en cas de divorce. Le code pénal s’est vu renforcé par plusieurs articles incriminant le harcèlement sexuel en milieu professionnel et luttant contre les violences faites aux femmes.
«C’est le fruit d’un long combat mené par des militantes qui n’ont pas été découragées par la folie meurtrière des années 1990», rappelle Mme Salhi, qui appelle les travailleuses à se mobiliser pour protéger leurs acquis et arracher d’autres droits. «Nous sommes actuellement en train de nous battre pour l’égalité d’accès aux postes de responsabilité.»
Soumeya Salhi évoque également la charte de la femme travailleuse – projet du ministère de la Solidarité – qui proposera que le congé de maternité soit de 18 semaines au lieu de 14 et instaurera un congé parental et des mécanismes d’amélioration des conditions de travail permettant aux femmes de maintenir leur productivité professionnelle sans avoir à sacrifier leurs enfants.
La conférencière regrette que les travailleuses soient toujours si peu motivées pour intégrer les organisations syndicales et se faire entendre. «Les femmes sont des milliers à militer à la base, mais sont de plus en plus discrètes dans la hiérarchie. Elles ne sont qu’une dizaine dans la représentation nationale», regrette la syndicaliste.