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Gaza et l’économie néolibérale de la violence en Israël (Afps)

 

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Gaza est ainsi devenu un véri­table labo­ra­toire d’expérimentation sur la misère humaine et sur le contrôle des popu­la­tions « non dési­rables ».

Labo­ra­toire qui sert éga­lement à tester les tech­niques et armes déve­loppées par le com­plexe militaro-​​industriel. C’est ainsi que le gou­ver­nement israélien relança l’économie pro­pulsée par son secteur des tech­no­logies liées à la sécurité et à l’industrie de l’armement. Les Israé­liens ont pris conscience de la « valeur » de leur expé­rience et savoir-​​faire en matière d’opérations mili­taires et poli­cières dans un contexte post-​​9/​11. Il en va de même pour l’armement testé sur des cibles humaines

Depuis le « désen­ga­gement » de Gaza en sep­tembre 2005, se suc­cèdent, entre les opé­ra­tions mili­taires d’envergure contre les Gazaouis, des épi­sodes de « paix » pendant les­quels la vie des Israé­liens res­semble à celle des pays euro­péens voisins. En Cis­jor­danie, l’occupation va bon train. Entre 2005 et 2011, la popu­lation de colons israé­liens a aug­menté de 22%, passant de 425 000 à 520 000 (excluant Jérusalem-​​Est).

Israël a gagné en tous points.

Devant le non respect du droit inter­na­tional régissant les devoirs de l’occupant, la com­mu­nauté inter­na­tionale a baissé les bras. Depuis la signature des Accords d’Oslo en 1993, Israël n’a plus à se soucier des frais relatifs à ses res­pon­sa­bi­lités de puis­sance occu­pante. La logique guidant la par­tition des ter­ri­toires pales­ti­niens occupés oscille « entre pré­sence et absence sélective, adressant deux stra­tégies israé­liennes contra­dic­toires : ter­ri­to­riale (qui tente d’annexer le plus de ter­ri­toires pos­sible) et démo­gra­phique (excluant les zones for­tement peu­plées par des Pales­ti­niens). » (Wizman, Hollow Land, 2007) Ainsi, les Accords d’Oslo et le « désen­ga­gement » ont assuré la pérennité de l’occupation et la colo­ni­sation en aban­donnant le plus gros de la popu­lation pales­ti­nienne tout en gardant le contrôle sur l’ensemble du ter­ri­toire encore colonisable.

La ren­ta­bilité de l’économie de la vio­lence depuis le « désen­ga­gement » de Gaza, l’occupation est marquée par une admi­nis­tration de plus en plus dépen­dante d’une logique de « vio­lence retenue » per­mettant à Israël d’affirmer sa domi­nation sur les ter­ri­toires pales­ti­niens et sur la popu­lation tout en répondant à l’impératif éco­no­mique. Comme le sou­lignent des uni­ver­si­taires israé­liens, cette vio­lence retenue « promet un contrôle maximal […] au plus bas prix. ». Au-​​delà de la miti­gation des réper­cus­sions poli­tiques d’une longue occu­pation, l’administration israé­lienne, en plus de réduire les coûts éco­no­miques, exploite main­tenant la vio­lence dans les ter­ri­toires pales­ti­niens comme sti­mulus éco­no­mique. C’est dans ce cadre d’économie de la vio­lence qu’il faut situer la pré­sente opération.

Gaza est ainsi devenu un véri­table labo­ra­toire d’expérimentation sur la misère humaine et sur le contrôle des popu­la­tions « non dési­rables ». Labo­ra­toire qui sert éga­lement à tester les tech­niques et armes déve­loppées par le com­plexe militaro-​​industriel. C’est ainsi que le gou­ver­nement israélien relança l’économie pro­pulsée par son secteur des tech­no­logies liées à la sécurité et à l’industrie de l’armement. Les Israé­liens ont pris conscience de la « valeur » de leur expé­rience et savoir-​​faire en matière d’opérations mili­taires et poli­cières dans un contexte post-​​9/​11. Il en va de même pour l’armement testé sur des cibles humaines. Ainsi, à la question par le jour­na­liste israélien M. Feldman « pourquoi une telle demande pour les armes israé­liennes ? », le ministre de l’industrie israélien, M. Ben-​​Eliezer, affirmait « Si Israël vend des armes, les ache­teurs savent qu’elles ont été testées. » Le jour­na­liste demande alors si cette expé­rience avec la vio­lence est liée à la crois­sance éco­no­mique et le ministre répond : « cela génère des mil­liards de dollars ».

Cette éco­nomie de la vio­lence retenue est basée sur un principe de modu­lation qui vise à éviter les débor­de­ments : des seuils à ne pas franchir sont déter­minés pour main­tenir un contrôle poli­tique et éco­no­mique efficace. Les diri­geants israé­liens nomment « zone élas­tique de dis­crétion » cet équi­libre dyna­mique. Des jour­na­listes israé­liens ont révélé l’existence d’un document appelé « Lignes rouges » qui établit une liste de ces seuils. Par exemple, le minimum de calories requises pour sou­tenir une popu­lation de 1.8 million de Gazaouis est réglé juste au-​​dessus de la défi­nition du seuil de famine de l’ONU et la « zone de dis­crétion » est constamment réévaluée grâce à la sur­veillance permanente.

LA « PAIX », CETTE GUERRE SANS FIN

Alors qu’Israël se retire de Gaza, le compte de l’opération « Bordure Pro­tec­trice » s’élève à 1817 tués et plus de 9000 blessés du côté pales­tinien. Ces chiffres révèlent l’ampleur du drame qui se déroule sous nos yeux, qui n’est qu’une montée en intensité de la vio­lence quo­ti­dienne de l’occupation.

Des­titués via une poli­tique raciale et iden­tifiés comme un « pro­blème démo­gra­phique », les Pales­ti­niens, entre deux opé­ra­tions mili­taires, ren­contrent constamment les obs­tacles de l’occupation qui les dirigent gra­duel­lement vers une mort beaucoup moins spec­ta­cu­laire que les scènes télé­visées actuelles. Cette forme de « mort en douceur » prend la forme d’un non-​​événement où les impli­ca­tions poli­tiques et éthiques de l’État Israélien sont dis­sipées dans la matrice d’occupation qui implique la taxation, la séques­tration de revenus, la vio­lence quo­ti­dienne des colons israé­liens, un blocus aérien, naval et ter­restre, un réseau de « check­points », la mul­ti­pli­cation des permis, des cartes magné­tiques, etc.

Le poli­to­logue Achille Mbembe écrivait au sujet de la Palestine :

« Les vil­lages et villes assiégés sont enfermés et coupés du monde. La vie quo­ti­dienne est mili­ta­risée. Liberté est donnée aux com­man­dants mili­taires locaux de tuer quand et qui bon leur semble. Les mou­ve­ments entre cel­lules ter­ri­to­riales néces­sitent des permis offi­ciels. Les ins­ti­tu­tions civiles locales sont sys­té­ma­ti­quement détruites. La popu­lation assiégée est privée de ses sources de revenus. Tuer de façon invi­sible s’ajoute aux exé­cu­tions ouvertes. » L’odeur des eaux usées suite au bom­bar­dement de l’usine de trai­tement, les cou­pures d’électricité, le vrom­bis­sement des drones, le blocus, les assas­sinats ciblés, les res­tric­tions de dépla­cement, le manque de nour­riture, les tirs spo­ra­diques venant de la bar­rière de sécurité qui sert de cage aux Gazaouis sont autant de signes quo­ti­diens qui rap­pellent que la « paix », de leur côté du mur, prend la forme d’une guerre sans fin. Le Monde.fr

Par François-​​Xavier Plasse-​​Couture (Doc­torant en Science Poli­tique à l’Université d’Hawaii à Manoa, chargé de cours à l’université du Québec à Montréal et à l’Université de Sherbrooke), samedi 9 août 2014

http://www.france-palestine.org/Gaza-et-l-economie-neoliberale-de

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