Un groupe rebelle syrien dans le quartier de Jobar, à Damas, dimanche, lors des affrontements sans précédent qui ont secoué la ville. Photo Amer Almohibany. AFP
La capitale syrienne est depuis dimanche le théâtre de violents affrontements entre rebelles et forces du régime. L’occasion pour les insurgés, alliés avec les jihadistes, de galvaniser les troupes démotivées après la défaite d’Alep.
Une bataille féroce et inattendue a éclaté ces dernières quarante-huit heures au cœur de la capitale syrienne. L’attaque, lancée dimanche par une coalition de groupes rebelles dans des quartiers de l’est de Damas, a pris par surprise les forces du régime de Bachar al-Assad. Ces dernières ont mené une contre-offensive appuyée par d’intenses bombardements aériens, reprenant lundi les positions perdues la veille.
En six ans de conflit, les habitants de Damas n’avaient jamais vécu la guerre de si près. Elle fait rage depuis dimanche dans leur ciel et dans leurs rues.
Surprise.
Explosions, tirs de mortiers et d’armes automatiques ont même atteint la place des Abbassides, un carrefour central de la capitale, comparable à la place de la Nation à Paris. L’attaque coordonnée de plusieurs groupes de l’Armée syrienne libre (ASL) et de jihadistes du Front Fatah al-Sham, ancienne branche syrienne d’Al-Qaeda, était destinée à briser le siège de trois quartiers insurgés du nord-est de Damas, encerclés et bombardés par les forces du régime depuis des mois. Dimanche, l’offensive a commencé par deux voitures piégées lancées contre une position forte de l’armée et des milices progouvernementales, faisant des dizaines de victimes et provoquant surtout une grande panique dans leurs rangs. L’effet de surprise a permis l’avancée rapide des rebelles sur le terrain et la prise d’un tronçon de l’autoroute Damas-Alep, qui sépare les deux quartiers assiégés de Jobar et Qaboun. Cette voie a été une cible prioritaire de la contre-offensive menée par les forces du régime, qui ont réussi à la reprendre lundi matin grâce à leur supériorité militaire dans les airs. Des raids intensifs des aviations syrienne et russe se sont poursuivis, même après la reprise de positions conquises dimanche par les insurgés.
Outre son objectif militaire local, cette bataille a été lancée par l’ASL «pour montrer que la révolution reste forte et que le régime n’a pas gagné la partie comme on le dit à l’extérieur», selon les mots d’un commandant.
Dans un appel audio diffusé par WhatsApp aux groupes insurgés à travers le pays, le chef militaire de la région de Damas appelle à rallumer les fronts contre les forces du régime. Une volonté de remonter le moral des troupes transparaît dans cette démonstration de force en pleine capitale au moment où la rébellion syrienne est rongée par les divisions et la démotivation depuis la défaite d’Alep.
Protestation.
A quelques jours de la reprise des négociations sous l’égide de l’ONU, prévue jeudi à Genève entre les représentants du régime d’Al-Assad et de l’opposition, la rébellion veut ainsi signaler qu’elle ne désarme pas et peut résister à la capitulation. Les groupes armés qui avaient participé aux pourparlers d’Astana au Kazakhstan, initiés par la Russie, ont refusé de se rendre la semaine dernière à une nouvelle session de discussions. Un geste de protestation contre le non-respect par le régime du cessez-le-feu négocié en décembre par la Russie et la Turquie puisque les combats n’ont pas cessé dans le pays. Reste que le morcellement des forces opposées à Al-Assad entre modérés, islamistes ou jihadistes, qui se combattent ou se regroupent selon les régions et les adversaires à affronter, mine leur crédibilité dans toute négociation.
Source : Liberation - Date de parution le : 20/03/2017
Souria Houria le 21 mars 2017