Une plainte déposée par une ONG (l’association Sherpa pour la défense des populations victimes des crimes économiques) et la Fédération CGT de la construction vise les activités du groupe de BTP français Vinci au Qatar. Sa filiale QDVC emploie directement 3 000 salariés et 6 000 dans des entreprises sous-traitantes. « Les enquêtes menées sur place concluent à l’utilisation par ces entreprises de menaces diverses pour contraindre une population vulnérable à des conditions de travail et d’hébergement indignes et à une rémunération dérisoire », dénoncent Sherpa et la CGT.
Si footballeurs et spectateurs vont éviter l’été qatari, ce n’est pas le cas des milliers de travailleurs migrants employés sur les chantiers du Mondial 2022. La durée maximale hebdo du travail au Qatar est en principe de 60 heures mais peut atteindre 66 heures, et le salaire mensuel sur les chantiers est de 700 ryals, soit 176 dollars. Les ouvriers sont souvent maintenus dans une situation de servitude, contraints de vivre et travailler dans des conditions terribles sans possibilité de protester ni de partir, puisque leurs passeports sont confisqués d’entrée par les employeurs. Sherpa et la CGT ont mené une enquête de terrain, difficile, car les migrants sont terrorisés par le risque de représailles s’ils témoignent.
Cette plainte est déposée alors que, le 30 mars, l’Assemblée a commencé à examiner la nouvelle mouture de la loi sur le devoir de vigilance des multinationales vis-à-vis des activités de leurs filiales et sous-traitants à l’étranger. Ce texte a été considérablement édulcoré par rapport au projet initial : il ne prévoit plus qu’une amende relativement modeste et rend l’imputation de la responsabilité beaucoup plus difficile. Et pourtant, Gattaz et le Medef sont frontalement contre. Une nouvelle leçon de choses : comme en matière fiscale, les patrons préfèrent l’ombre à la lumière, et veulent pouvoir exploiter en paix.