Au moins 34 personnes de nationalités camerounaise, guinéenne, ivoirienne, malienne et sénégalaise ont été arrêtées et refoulées entre le 2 et le 10 mars à la frontière entre le Maroc et l'Algérie.
Parmi elles, une dizaine de mineurs. Certains de ces Subsahariens étaient sur le territoire marocain depuis plusieurs années, ou en cours de régularisation de leur situation dans le cadre de la seconde phase de l’opération lancée au Maroc en décembre dernier.
Selon les ONG de défense des migrants, ces personnes auraient subi des violences de la part des forces de l'ordre marocaines et algériennes, et été laissées sans nourriture dans le no man's land entre les deux pays, une zone connue des contrebandiers. Du "jamais vu" depuis le lancement de la nouvelle politique migratoire au Maroc en 2013.
"Campagne de ratissage"
"On a tous été choqués. C'est une pratique qui ne se faisait plus. On pense que c'est un dérapage, une erreur administrative à l'échelon local dans le cadre d'une campagne plus large de ratissage dans le nord du pays, pour empêcher la pression sur les grillages des enclaves espagnoles de Sebta et Melilla", explique au HuffPost Maroc Mehdi Alioua, président du Groupe antiraciste d'accompagnement et de défense des migrants (Gadem).
Selon les témoignages recueillis par l'association, plusieurs d'entre eux auraient été arrêtés à Oujda et emmenés au commissariat. Leurs effets personnels (téléphone, passeport) auraient été confisqués avant qu'ils ne soient expulsés près du poste-frontière algérien.
"Ils ont été contrôlés au faciès. Un homme marié à une Marocaine et vivant à Rabat, qui se trouvait là pour visiter un ami, a été arrêté", indique Mehdi Alioua. "Ils ne prennent plus le temps de contrôler l'identité et de mettre en place des procédures légales pour agir", déplore-t-il.
Violentés
Certains auraient été violentés à coups de pierres par la police algérienne. Ils auraient également reçu des coups de matraque côté marocain. Parmi eux, 14 auraient été blessés, dont trois grièvement. Sur Facebook, plusieurs photos et vidéos circulent, dans lesquelles ont voit certains migrants boire l'eau d'une rivière.
"Au début, nous avions quelques biscuits que nous nous partagions. Mais là, il ne nous reste plus rien. Pour nous alimenter, nous cueillons une plante qui pousse ici et qui ressemble à l’oignon", a raconté l'un des migrants à France 24.
Un tour de vis sécuritaire?
Le 8 mars, les autorités marocaines ont annoncé la construction de nouveaux postes de contrôle aux environs de Saïdia pour "renforcer la sécurité" en plus de la clôture métallique déjà en place. Le but de cette clôture et des postes de contrôle est de "protéger le Maroc des menaces terroristes" et de "lutter contre la criminalité transfrontalière", rappelle le Gadem dans un communiqué. "Les personnes en migration deviennent, malgré elles, les victimes collatérales de ce tour de vis sécuritaire", estime l'ONG.
Une vingtaine d'associations, dont les branches de syndicats marocains dédiées aux immigrés, ont signé un appel "pour que l’ensemble des personnes arbitrairement refoulées en dehors de toute procédure légale soient toutes réadmises - sans conditions et dans les plus brefs délais - sur le territoire marocain".
Selon France 24, "certains membres du groupe de migrants ont rejoint la ville algérienne de Maghnia, à une vingtaine de kilomètres de la frontière avec le Maroc, où ils sont hébergés par des amis".
Anaïs Lefébure, HuffPost Maroc, 15 mars 2017