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Crédit Photo: Démantélement du camp de Gdeim Izik le 8 novembre 2010. DR
C’est un procès spectaculaire et suivi à l’échelle internationale qui s’est ouvert ce lundi 13 mars, à Rabat.
Dans la capitale marocaine, 25 militantEs pour l’indépendance du Sahara occidental – dernière colonie « à l’ancienne » en Afrique, occupée jusqu’en 1975 par le colonisateur espagnol et depuis cette date par le Maroc – sont jugés en appel pour des affrontements dans le camp de Gdeim Izik en 2010.
Trois avocatEs français participent au procès et plaident (avec beaucoup de mal) pour les accuséEs... vu qu’aucun avocat marocain ne peut plaider dans un dossier lié au militantisme sahraoui, sous peine de radiation du barreau !
À l’époque des faits, le régime marocain avait fait attaquer le camp de protestation de Gdeim Izik, proche de la ville de Laayoune (la capitale du Sahara occidental occupé), où des Sahraouis déplacés dénonçaient leurs conditions de vie. Ce camp avait été implanté à partir d’octobre 2010 et comptait, au plus fort, jusqu’à 15 000 personnes abritées sous 3 000 tentes. L’attaque puis le démantèlement du camp le 8 novembre 2010, avait déclenché des affrontements dont le bilan exact est encore en discussion. Les autorités prétendent que 11 policiers auraient été tués lors des affrontements, et le Front Polisario, qui milite pour l’indépendance, a de son côté évoqué 36 tués dans ses rangs. Par ailleurs, deux civils ont été tués, 70 blessés et 163 personnes emprisonnées.
Après avoir été torturés, 25 militantEs furent jugés en première instance en 2013, prétendument pour avoir tué les 11 policiers. S’il est probable que certains agents aient trouvé la mort lors des affrontements, les autorités marocaines n’ont jamais publié les noms des « victimes », réelles ou supposées, au nom desquelles elles poursuivent en justice les indépendantistes sahraouis... À la suite de ce procès tenu en 2013, les accusés ont été condamnés à des peines allant de 20 ans de prison jusqu’à la perpétuité. Les seules preuves à charge étaient des aveux... obtenus sous la torture !
Faire le procès de l’occupation
En juillet 2016, le Comité international contre la torture (organisme des Nations unies) a condamné le Maroc pour ces faits de torture. Cela a touché un point sensible, le régime marocain étant engagé dans une campagne de communication qui vise à le présenter à l’international comme un prétendu défenseur des droits de l’homme (surtout depuis la nouvelle Constitution de 2011... qui interdit formellement la torture !). Et au bout de trois ans et demi, les autorités marocaines se sont donc réveillées pour accepter un procès en appel pour les 25 condamnéEs de l’affaire de Gdeim Izik.
Deux audiences se sont tenues jusqu’ici, les 26 décembre 2016 et 23 janvier 2017, avant la réouverture du procès cette semaine. Lors des premières audiences, il était facile de constater que le tribunal avait un parti pris plus qu’affirmé. Dès lors que les mots « torture » ou, pire aux yeux du régime marocain, « territoire occupé », furent prononcés, le président de séance, le procureur et les avocats des parties civiles (familles de policiers) se sont unanimement mis à insulter les avocatEs des Sahraouis. La séance a été levée à plusieurs reprises...
Alors que l’émissaire spécial des Nations unies pour le Sahara occidental, le diplomate étatsunien Christopher Ross, vient de démissionner, en partie à cause des ingérences de la France aux Nations unies au profit du régime marocain, la solidarité en France reste plus que jamais d’actualité. Une solidarité qui va à la fois aux Sahraouis et aux opposantEs marocains.
Quelques infos sur la mobilisation sur la question sahraouie dans les semaines qui viennent, notamment dans le cadre de la 12ème Semaine anticoloniale et antiraciste qui se tiendra du 4 au 20 mars à Paris mais aussi en région (voir le programme actualisé sur www.anticolonial.net). Les associations sahraouies et de soutien à la cause sahraouie sont particulièrement intéressées par plusieurs évènements : Soirée d’ouverture le jeudi 23 février à 18h au siège du PCF place du Colonel Fabien centrée sur (...)
Le Comité pour le respect des libertés des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT), le Centre de recherche et d’information pour le développement (CRID), - l’Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne (...)
Le parlement tunisien devrait amender le projet de loi sur les stupéfiants qui lui a été présenté, afin d’en renforcer les dispositions en matière de droits humains, ont déclaré aujourd’hui Human Rights Watch, Avocats sans Frontières et la Ligue (...)
La réception en visite officielle d’Ismaël Omar Guelleh en France est inacceptable pour les citoyens du monde que nous sommes. Elle constitue un dénigrement manifeste des droits des Djiboutiens à la démocratie et à la liberté déjà totalement bafoués (...)
À la COP22, faites attention à ce que vous lirez sur les efforts du Maroc en matière d’énergie renouvelable.
Une part croissante de tels projets est située dans le territoire occupé du Sahara Occidental, est utilisée pour le pillage des minerais. Le nouveau rapport WSRW le détaille.
Une part croissante des programmes d’énergies renouvelables dont se vante le Maroc – jusque sur le site officiel de la COP22 - ne sont pas implantés au Maroc mais au Sahara Occidental, territoire qu’il occupe illégalement et brutalement.
Lors des négociations climatiques de la COP22 à Marrakech, du 7 au 18 novembre 2016, le gouvernement marocain et une poignée de compagnies d’énergies renouvelables vont activement faire le marketing de leurs efforts pour le développement de solutions d’énergies vertes.
22 éoliennes nouvellement construites par la société allemande Siemens fournissent 95% de l’énergie nécessaire au pillage très polémique des minéraux non renouvelables du Sahara Occidental. La production d’énergie verte rend le pillage du territoire marocain encore plus lucratif.
En 2020, plus d’un quart de toute la production d’énergie verte du Maroc serait située dans le territoire qu’il maintient sous occupation, les détails dans le nouveau rapport WSRW.
Le 27 septembre 2016, des centaines de réfugiés sahraouis manifestent contre la construction d’infrastructures énergétiques par la société allemande Siemens au Sahara Occidental occupé
Siemens et la compagnie italienne Enel sont les plus impliquées. Elles gagnent des appels d’offres marocains au Sahara Occidental en s’associant à la compagnie énergétique détenue par le roi du Maroc.
« Quand le palais royal marocain - qui réglemente le marché de l’énergie - reçoit de gros contrats énergétiques sur le territoire, cela coûte très cher au processus de paix des Nations Unies au Sahara Occidental », a déclaré Erik Hagen, de Western Sahara Resource Watch (Observatoire des ressources du Sahara Occidental).
« En exportant l’énergie au Maroc, le pays et la famille royale ancrent leur lien avec le territoire. Comment le roi serait-il intéressé par un processus d’autodétermination et de décolonisation au Sahara Occidental alors qu’il bénéficie lui-même de la présence illégale de l’armée marocaine là-bas ? », déclare Hagen.
Le propriétaire légitime du territoire, le peuple sahraoui, n’a jamais consenti aux projets marocains. La moitié de la population originelle du territoire a fui le pays quand le Maroc l’a envahi en 1975. Les principaux opposants à la marginalisation socio-économique des Sahraouis purgent des peines d’emprisonnement à perpétuité dans les prisons marocaines.
Ce rapport détaille comment le Maroc projette de construire des centrales à énergie renouvelable au Sahara Occidental pour plus de 1000 MW (mégawatts). A ce jour, la production d’énergie solaire et éolienne au Sahara Occidental, qui est polémique, constitue au plus 7% de la production énergétique totale du Maroc à partir de ces sources. D’ici 2020, la part pourrait être augmenté à 26,4%.
Western Sahara Resource Watch demande aux entreprises impliquées de stopper leurs projets d’infrastructure au Sahara Occidental avec le gouvernement marocain, afin de ne pas mettre d’obstacles au processus de paix de l’ONU.
La Cop22 commence le jour où le Maroc organise sa célébration annuelle de l’occupation. Plusieurs centaines de sahraouis sont toujours portés disparus depuis l’invasion.
41 ans d'occupation illégale du Sahara occidental par le Maroc
41 ans de lutte du peuple sahraoui pour son indépendance
41 ans de répression dans les territoires sahraouis occupés
41 ans d'exil dans des campements dans le désert
41 ans de violation du droit international par le pouvoir marocain
41 ans de soutien du gouvernement français au Maroc
Assez! Referendum d'autodétermination maintenant!
Liberation des prisonniers politiques sahraouis!
Le 6 novembre 1975, jour de la sinistre "marche verte", les autorités marocaines ont occupé illégalement le Sahara occidental. 41 ans plus tard, le Sahara occidental est toujours occupé et colonisé par le Maroc et le peuple sahraoui n'a toujours pas exercé son droit à l'autodétermination.
Le 8 novembre 2010, les forces de sécurité marocaines ont démantelé avec violence le camp de Gdeim Izik instalé par plus de 20 000 Sahraouis. 22 militants sahraouis ont été condamnés à de lourdes peines de prison (de 20 ans à la perpétuité). Malgré l'annulation de leur condamnation par la Cour de cassation le 27 juillet 2016 et le renvoi de l'affaire devant une cour d'appel civile, ils sont maintenus en détention de façon arbitraire! Ils doivent être libérés immédiatement et sans condition.
Le pouvoir marocain impose un véritable blocus du Sahara occidental pour cacher la situation réelle en expulsant les délégations étrangères (journalistes, juristes, syndicalistes et associatifs). Claude Mangin a été refoulée par les autorités marocaines le 20 octobre 2016 alors qu'elle venait rendre visite à son mari, Naâma Asfari, prisonnier politique sahraoui emprisonné depuis novembre 2010.
Six ans après le démantèlement du camp de Gdeim Izik, nous appelons au
Rassemblement mardi 8 novembre à 15h30 Place du trocadero suivi d'une manifestation jusqu'à l'Ambassade du Maroc Paris 16ème
Pour exiger en priorité:
l'organisation rapide du référendum d'autodétermination
la libération des prisonniers politiques sahraouis et l'arrêt de la répression dans les territoires sahraouis occupés
La mobilisation est aussi indispensable pour briser le silence des principaux médias et contraindre le gouvernement français à changer de politique et à ne plus soutenir le pouvoir marocain.
Solidarité avec la lutte du peuple sahraoui pour son independance!
Des femmes, des jeunes filles et des fillettes yézidies ayant été réduites en esclavage, violées, frappées et soumises à d’autres actes de torture par le groupe armé se faisant appeler État islamique (EI) ne bénéficient pas d’un soutien adéquat de la part de la communauté internationale, a déclaré Amnesty International lundi 10 octobre.
Lors d’une mission dans la région semi-autonome du Kurdistan irakien en août 2016, des délégués de l’organisation ont recueilli les propos de 18 femmes et jeunes filles qui avaient été enlevées par l’EI. Soit ces femmes et jeunes filles s’étaient échappées, soit elles avaient été libérées après le paiement d’une rançon par leur famille. Plusieurs d’entre elles ont très sérieusement envisagé le suicide, ou ont des sœurs ou des filles qui se sont donné la mort après avoir subi de terribles abus en captivité. La souffrance des victimes est exacerbée par leurs misérables conditions de vie actuelles, leur peine pour leurs proches tués par l’EI et leurs craintes pour ceux qui restent en captivité.
« L’horreur subie par ces femmes et jeunes filles yézidies aux mains de l’EI donne un éclairage nouveau sur les crimes de guerre et crimes contre l'humanité commis par ce groupe. De nombreuses femmes et jeunes filles ont été violées, frappées ou soumises à d’autres actes de torture de manière répétée, et continuent à souffrir du traumatisme causé par ce qu’elles ont traversé », a déclaré Lynn Maalouf, directrice adjointe pour les recherches au bureau régional d’Amnesty International à Beyrouth.
« Ces témoignages soulignent la nécessité absolue d’un soutien international accru, afin d’aider ces personnes à faire face aux traumatismes physiques et psychologiques à long terme causés par les sévices qu’elles ont subis et dont elles ont été témoins. »
Il n’existe actuellement aucun système unifié permettant d’évaluer les besoins des personnes ayant connu la captivité aux mains de l’EI. Il faut en faire beaucoup plus pour s’assurer qu’elles reçoivent les soins et le soutien dont elles ont besoin en urgence pour reconstruire leur vie.
Depuis que des combattants de l’EI ont attaqué la région de Sinjar, dans le nord-ouest de l’Irak en août 2014, les Yézidis sont systématiquement et délibérément pris pour cible.
Des milliers de personnes ont été enlevées ; des centaines d’hommes et de garçons ont été massacrés ; beaucoup ont été menacés de mort s’ils ne se convertissaient pas à l’islam. Des femmes et des jeunes filles yézidies enlevées sont séparées de leurs proches, puis « offertes » ou « vendues » à d’autres combattants de l’EI en Irak et en Syrie. Elles sont souvent échangées à plusieurs reprises entre combattants, violées, frappées ou victimes d’autres violences physiques, privées de nourriture et d’autres biens de première nécessité, et forcées à nettoyer, cuisiner et accomplir d’autres corvées pour leurs ravisseurs.
Beaucoup de personnes auxquelles Amnesty International a parlé ont dit que leurs enfants leur ont été arrachés. Des garçons ayant plus de sept ans ont été emmenés pour être endoctrinés et entraînés au combat, tandis que des fillettes n’ayant pas plus de neuf ans ont été « vendues » comme esclaves sexuelles. Selon certains politiciens, militants et prestataires de services de santé locaux, quelque 3 800 femmes et enfants se trouvent toujours en captivité aux mains de l’EI. On ne sait pas ce qui est advenu de centaines d’hommes yézidis enlevés et on craint que la plupart ne soient morts.
L’horreur en captivité
Jamila*, une jeune femme de 20 ans originaire de la ville de Sinjar, enlevée le 3 août 2014, a déclaré à Amnesty International qu’elle avait été violée à plusieurs reprises par au moins 10 hommes différents après avoir été « revendue » d’un combattant à l’autre. Elle a finalement été libérée en décembre 2015 après que sa famille a versé une forte somme à son tortionnaire.
Jamila a expliqué que des combattants les ont forcées, elle et d’autres femmes et jeunes filles à se déshabiller et à « poser » pour des photos à Mossoul, avant de les « revendre ». Elle a essayé de s’échapper à deux reprises mais a été rattrapée à chaque fois. À titre de punition, elle a été attachée à un lit par les mains et les jambes, a subi un viol en réunion, et a été frappée à coups de câbles et privée de nourriture.
Comme de nombreuses autres femmes, ce qu’elle a vécu en captivité l’a amenée à envisager le suicide. Mais elle est déterminée à s’exprimer : « Je ne veux pas cacher ce qui s’est passé, pour que les gens puissent aider non seulement celles qui sont toujours avec Daech [acronyme arabe de l’EI], mais aussi les anciennes victimes à reconstruire leur vie. »
Nour, une jeune fille de 16 ans de Siba Sheikh Khidir ayant donné naissance à une petite fille durant sa période de captivité aux mains de l’EI, qui a duré près de deux ans, a été transférée à au moins six reprises entre plusieurs lieux en Syrie et en Irak, notamment à Tal Afar, à Mossoul, à Alep et à Raqqa.
Elle a décrit à quel point les mauvais traitements que les combattants de l’EI infligent aux Yézidis sont déshumanisants.
« Pour eux nous sommes des "kouffar" [infidèles] et ils peuvent faire tout ce qu’ils veulent. Ce fut tellement humiliant. Nous étions emprisonnés ; ils ne nous donnaient pas à manger ; ils nous frappaient [tous] même les jeunes enfants ; ils nous achetaient et nous vendaient et nous faisaient ce qu’ils voulaient [...] C’est comme si nous n’étions pas humains pour eux », a-t-elle dit, ajoutant que ses trois sœurs et sa tante sont toujours en captivité.
« Je suis libre maintenant, mais d’autres continuent à vivre ce cauchemar, et nous n’avons pas assez d’argent pour subvenir à nos besoins et payer pour faire revenir nos proches. »
Fahima, 31 ans, mère de sept enfants, est originaire de la région de Sinjar. Elle s’est échappée en février 2016, mais deux de ses filles, Nadia, 12 ans, et Nurin, trois ans, sont toujours aux mains du groupe armé, ainsi que trois de ses sœurs, son père, son frère et quatre nièces et neveux. Elle a expliqué à Amnesty International qu’avant leur enlèvement, sa fille Nadia vivait déjà dans la terreur : « Ellesavait que Daech prenait des filles. Elle m’a dit de nombreuses fois : "Maman s’ils m’emmènent, je me tuerai". »
Les femmes et jeunes filles rencontrées ont répété à Amnesty International qu’elles traversent des phases de dépression profonde, ainsi que de colère, et beaucoup ont des pensées suicidaires. Certaines ont fait des tentatives de suicide en captivité ou après s’être échappées.
Shirin, 32 ans, mère de six enfants originaire de Tel Qasab, un village situé dans l’ouest de la région de Sinjar, a été enlevée à Solakh le 3 août 2014 avec cinq de ses enfants, alors âgés de cinq à 11 ans. Sa fille de 13 ans s’est suicidée après s’être échappée.
« Il y avait des combattants de Daech de toutes sortes de nationalités différentes. J’ai vu des Européens et des arabes, et même des Kurdes [...] Ils ont pris mon fils aîné [âgé de 10 ans] et deux de mes filles, Nermeen [11 ans] et Seveh [17 ans]. Seveh a été enlevée avec son bébé », a déclaré Shirin.
Sa fille Seveh a indiqué à Amnesty International que six combattants se l’étaient échangée en Irak et en Syrie, avant de la « revendre » à sa famille en novembre 2015. Elle a été violée et agressée à de nombreuses reprises en captivité, et a dit que ses ravisseurs avaient aussi frappé son bébé de trois mois et les affamaient régulièrement. Elle a essayé de se tuer à trois reprises, mais d’autres captives l’en ont empêchée.
Seveh continue à souffrir des graves conséquences physiques et psychologiques de ce qu’elle a traversé, et elle reste bouleversée que sa sœur se soit suicidée après s’être échappée et par le sort réservé aux membres de sa famille manquant à l’appel.
Sa sœur Nermeen était dans un tel désarroi après ce qu’elle avait vécu en captivité qu’elle s’est enfermée dans une cabane et s’est immolée par le feu au camp pour personnes déplacées de Zakho, dans le gouvernorat de Dohuk. Elle a rapidement été transportée à l’hôpital, mais est morte trois jours plus tard.
« À l’hôpital, je lui ai demandé pourquoi elle avait fait ça, et elle m’a dit qu’elle n’en pouvait plus. Elle souffrait en permanence, elle pleurait tout le temps », a déclaré Shirin, la mère de Nermeen, à Amnesty International, ajoutant que la famille avait demandé à de nombreuses reprises qu’elle puisse faire une thérapie spécialisée à l’étranger.
En plus de se débattre avec leurs traumatismes, de nombreuses victimes comme Shirin se retrouvent à devoir rembourser d’énormes dettes - jusqu’à des dizaines de milliers de dollars américains -, après que leur famille a fait des emprunts pour payer leur libération.
Un soutien international insuffisant
La majorité des centaines de femmes et de jeunes filles yézidies parvenues à s’échapper après avoir été capturées par l’EI vivent dans des conditions difficiles, soit avec des membres de leur famille sans ressource qui ont été déplacés de chez eux, soit dans des camps pour personnes déplacées du Kurdistan irakien. Leurs besoins sont bien supérieurs au soutien disponible.
La situation de beaucoup d’entre elles nécessite une aide financière ainsi qu’une prise en charge psychologique. Une femme de 42 ans originaire de la région de Sinjar, qui a passé 22 mois en captivité avec ses quatre enfants, a indiqué qu’ils restent traumatisés. Elle a expliqué qu’un combattant de l’EI particulièrement brutal a cassé les dents de son fils de six ans et s’est moqué de lui, et frappé sa fille de 10 ans si sauvagement qu’elle s’est uriné dessus.
« Il frappait mes enfants et les enfermait dans une pièce. Ils pleuraient à l’intérieur et je pleurais aussi, assise devant la porte. Je l’ai supplié de nous tuer mais il m’a répondu qu’il ne voulait pas aller en enfer à cause de nous », a-t-elle dit.
Elle s’inquiète également du remboursement de l’argent emprunté pour obtenir leur libération. Elle a arrêté d’aller chez le médecin parce qu’elle n’en a plus les moyens.
Il faut renforcer les moyens d’agir des victimes et leur donner la capacité de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Il n’existe actuellement aucun système unifié permettant d’évaluer et satisfaire les besoins des personnes ayant connu la captivité aux mains de l’EI, et la plupart dépendent de réseaux familiaux ou de proximité pour obtenir de l’aide. Les services et l’assistance humanitaire dont bénéficient actuellement les victimes, fournis par divers gouvernements, organisations non gouvernementales et agences des Nations unies sont sous-financés et leur qualité est variable.
Un programme soutenu par le gouvernement allemand a permis à 1 080 Yézidis - des personnes ayant subi des violences sexuelles et leur famille immédiate - de se rendre en Allemagne pour recevoir des soins spécialisés, mais les victimes ont désespérément besoin d’autres initiatives de ce genre.
Une femme d’une soixantaine d’années de la région de Sinjar, qui vit désormais dans le camp de Chem Meshko pour personnes déplacées, et dont 32 parents sont aux mains de l’EI ou manquent à l’appel, a dit à Amnesty International : « Le monde entier sait ce qui est arrivé aux Yézidis [...] Je veux savoir ce qu’ils vont faire maintenant ? »
« Le monde peut et doit en faire plus pour aider à panser les profondes blessures physiques et psychologiques des femmes et des enfants qui ont passé de longues périodes en captivité, et leur offrir un espoir de reconstruire leur vie brisée », a déclaré Lynn Maalouf.
« La communauté internationale doit traduire en actions concrètes le choc et l’horreur que lui inspirent les crimes de l’EI et sa sympathie pour les victimes yézidies de violences sexuelles et d’autres sévices. Les donateurs doivent en faire plus, en établissant et finançant des programmes de soutien et de soins spécialisés, en consultation avec les victimes, les militants de cette communauté et les prestataires de soins. »
La capacité des victimes à bénéficier de services et à se déplacer librement est par ailleurs souvent entravée par la bureaucratie irakienne - beaucoup éprouvent des difficultés à obtenir des papiers d’identité, qu’elles ont perdus lorsque l’EI a attaqué Sinjar.
Si la proportion de victimes prêtes à parler de ce qu’elles ont vécu a augmenté étant donné qu’un grand nombre de captifs de l’EI ont pu s’échapper ces deux dernières années, la stigmatisation et la crainte des comportements sociaux négatifs et de leur impact sur les perspectives de mariage pour les femmes et les filles demeurent.
Obligation de rendre des comptes pour les violations
Jusqu’à présent, pas une seule personne accusée d’avoir commis des crimes contre la communauté yézidie n’a été poursuivie ni jugée en Irak. Les quelques procès ayant eu lieu concernant des crimes que l’EI aurait commis en Irak n’ont pas fait grand chose pour établir la vérité sur les violations, ni rendre justice et accorder des réparations aux victimes. Par exemple, les procès de 40 personnes accusées d’avoir pris part au massacre de quelque 1 700 élèves officiers chiites au camp d’entraînement de Speicher en juin 2014 ont été entachés d'irrégularités, et de nombreuses personnes ont été déclarées coupables sur la base d’« aveux » arrachés sous la torture.
« Si les autorités irakiennes veulent réellement obliger les membres de l’EI à rendre des comptes pour leurs crimes, elles doivent de toute urgence ratifier le Statut de Rome et déclarer la Cour pénale internationale compétente pour juger de tous les crimes perpétrés en Irak dans le cadre de ce conflit. Elles doivent promulguer des lois érigeant en infraction les crimes de guerre et crimes contre l'humanité, et réformer les secteurs de la sécurité et de la justice afin de les mettre en conformité avec les normes internationales », a déclaré Lynn Maalouf.
« En attendant, l’Irak doit coopérer avec la communauté internationale afin de garantir que ces crimes donnent lieu à des enquêtes et des poursuites efficaces. Il convient d’accorder une priorité élevée à la préservation des éléments de preuve, afin que les responsables présumés d’atteintes aux droits humains puissent être traduits en justice dans le cadre de procès équitables, ce qui est essentiel pour que les victimes yézidies - et toutes les victimes de crimes de droit international en Irak - obtiennent justice et réparations, ainsi qu’elles le méritent. » 10 octobre 2016
* Tous les noms ont été modifiés pour protéger l’identité des victimes.
Incursions marocaines au sud-ouest du Sahara occidental
La Conférence européenne de coordination et de soutien au peuple sahraoui (Eucoco) a dénoncé hier les «nouvelles agressions» contre le peuple sahraoui, rapporte l’APS citant un communiqué de son président, Pierre Galand.
Elle qualifie les incursions militaires marocaines dans la zone tampon d’Alguergarat, au sud-ouest du Sahara occidental, de «violations graves» de l’accord de cessez-le-feu signé le 6 septembre 1991 sous les auspices des Nations unies. «Ces nouvelles agressions contre le peuple sahraoui constituent de graves violations des accords signés le 6 septembre 1991 sous les auspices des Nations unies, qui prévoyaient, sous contrôle onusien, la fin des hostilités afin de permettre le déploiement de la Mission des Nations unies pour l’organisation du référendum d’autodétermination au Sahara occidental (Minurso)», a écrit le président de l’Eucoco, Pierre Galand, dans un communiqué.
Rappelant que cet accord a été ratifié par les deux parties en conflit, le Front Polisario et le Maroc, le président de l’Eucoco a souligné qu’en août dernier, à plusieurs reprises, les forces d’occupation marocaines ont outrepassé le mur de séparation qu’elles ont érigé au sud d’Alguergarat au Sahara occidental. Selon l’Eucoco, «cette reprise d’opérations militaires d’envergure inquiète à plus d’un titre». Elle survient alors que le Conseil de sécurité a condamné le Maroc pour avoir exigé le départ de la composante civile de la Minurso des territoires occupés. Le Conseil de sécurité a aussi fixé un agenda précis pour son redéploiement complet, a expliqué son président dans le communiqué.
Le Maroc, a-t-il poursuivi, vient en outre de subir plusieurs revers diplomatiques en Europe, à l’Union africaine et à l’ONU. Pierre Galand a rappelé que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a annulé, le 10 décembre 2015, l’accord agricole — conclu dans le cadre de l’accord d’association avec le Maroc — au motif qu’il ne respecte pas les frontières internationalement reconnues du royaume. Il a fait remarquer, en outre, que le Maroc vient de se faire recadrer par l’Union africaine qu’il «prétendait vouloir rejoindre à la condition que la République arabe sahraouie démocratique en soit exclue». Il a souligné que l’UA a réservé une fin de non-recevoir à sa demande. L’Eucoco a relevé aussi la réaction du secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, qui a chargé son envoyé personnel, Christopher Ross, de relancer les négociations pour une proposition «formelle», rappelant que l’ONU considère le Sahara occidental comme «territoire non autonome» dont il a la responsabilité, notamment d’y conduire un référendum d’autodétermination.
Soutenant la demande du secrétaire général du Front Polisario, Brahim Ghali, qui a appelé l’ONU à forcer par «des mesures immédiates et décisives» l’arrêt des agressions marocaines, le retour de toute la compo- sante de la Minurso et la mise en place d’un poste de contrôle de la Mission à Alguergarat, l’Eucoco a exhorté le Conseil de sécurité à «agir en urgence». L’Eucoco a ainsi plaidé pour qu’une solution pacifique, conforme au droit international, «permette sans retard la libre expression du peuple sahraoui» dans un contexte sécurisé par l’ONU, conformément aux résolutions de l’Assemblée générale et du Conseil de sécurité des Nations unies.
Les prisonniers politiques sahraouis du groupe de Gdeim Izik ont entamé, vendredi, une grève de la faimde 48 heures pour demander le règlement de leur situation et protester contre les conditions inhumaines et les mauvais traitements perpétrés à leur encontre de la part de l’administration de la prison marocaine, a rapporté hier l’APS citant le ministère des Territoires occupés et de la Communauté sahraouie établie à l’étranger.
Les autorités marocaines ont procédé récemment au transfert de 21 prisonniers politiques sahraouis du groupe de Gdeim Izik depuis la prison de Salé à El Aarjat, après l’annonce de la Cour de cassation marocaine, le 27 juillet dernier, du jugement des 23 condamnés dudit groupe et le renvoi de l’affaire devant une juridiction pénale de droit commun.
En novembre 2010, des affrontements ont éclaté au Sahara occidental occupé, lorsque les forces de sécurité marocaines ont démantelé un camp sahraoui à Gdeim Izik, où des milliers de Sahraouis manifestaient pour des revendications sociales et économiques. Des centaines de Sahraouis ont été arrêtés et 25 d’entre eux ont été condamnés par un tribunal militaire à de lourdes peines d’emprisonnement allant de 20 ans à la perpétuité.
Les prisonniers politiques sahraouis avaient mené plusieurs fois des grèves de la faim pour protester contre leur incarcération arbitraire et leur jugement inéquitable. Des organisations internationales ainsi que les familles des prisonniers ont, à plusieurs occasions, demandé un procès équitable, conformément au droit international dans ce dossier, puisqu’il s’agit de détenus politiques.
De son côté, le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a exprimé son inquiétude face aux rapports attestant que les accusés sahraouis avaient été torturés et maltraités pendant leur détention provisoire. «Le recours aux tribunaux militaires ou d’exception pour juger des civils soulève de sérieux problèmes quant à l’équité, l’impartialité et l’indépendance de l’appareil judiciaire», a déclaré le porte-parole du Haut-Commissariat onusien.
Trois ans après le verdict du procès, la Cour de cassation marocaine a ordonné la tenue d’un nouveau procès devant une juridiction civile. Fin août, l’eurodéputée espagnole Paloma Lopez a exhorté l’Union européenne à prendre toutes les mesures nécessaires afin de garantir le respect des droits de l’homme au Sahara occidental par les autorités d’occupation marocaines.
Elle a préconisé ainsi la suspension de l’Accord d’association avec le Maroc, eu égard à «l’échec de la politique du dialogue». «Compte tenu du niveau d’utilisation de la violence contre les prisonniers politiques sahraouis et l’échec de la politique européenne fondée uniquement sur le dialogue avec les autorités marocaines d’occupation et institutions connexes, d’autres mesures sont nécessaires pour garantir le respect des obligations du Maroc en matière des droits de l’homme, y compris la suspension de l’accord d’association», a-t-elle plaidé dans une question écrite adressée à la chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini.
Les forces marocaines ont réprimé une manifestation pacifique organisée par des jeunes Sahraouis à la plage de Foum Al Ouad, située à 25 km à l’ouest de la ville occupée d’Al Ayoun, a rapporté hier l’APS citant l’agence de presse sahraouie (SPS).
Les manifestants ont scandé des slogans réclamant le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination et l’indépendance et dénoncé le pillage systématique des richesses et des ressources naturelles sahraouies par l’occupant marocain.
Les forces de répression marocaines, en uniforme et en civil, ont eu recours à la force pour disperser la manifestation, faisant plusieurs blessés. Elles ont également procédé à l’arrestation de la militante et ex-prisonnière politique sahraouie, Sukaina Djed Ahlou, la journaliste sahraouie Nazha Khaldi, Laroussi Andour et Al Gardek Khaded qui ont été transférés au siège de la gendarmerie marocaine à la ville d’Al Ayoun occupée. Par ailleurs, l’organisation britannique chargée de promouvoir les droits de l’homme au Sahara occidental, Adala UK, a dénoncé l’arrestation de la journaliste et correspondante de la télévision sahraouie (RASD TV) des territoires sahraouis occupés, Nazha Khaldi, par les forces marocaines lors de sa couverture de la manifestation.
«Cette arrestation s’inscrit dans le cadre des crimes commis par le gouvernement marocain contre les journalistes sahraouis», a indiqué l’organisation britannique, observant que «cette opération confirme la nécessité d’un mécanisme pour la protection des journalistes sahraouis dans les territoires sahraouis occupés». Elle a rappelé que la journaliste N. Khaldi a pris part à plusieurs congrès internationaux et sessions du Conseil des droits de l’homme de l’ONU à Genève pour dénoncer les pratiques et les crimes de l’occupant marocain contre les civils sahraouis. Adala UK a également indiqué que cela confirme le niveau de persécution exercée par l’occupant marocain et ses organes contre les journalistes en violation flagrante des valeurs, principes et résolutions des institutions internationales, y compris les résolutions des Nations unies qui garantissent et assurent la liberté du travail journalistique et les droits des journalistes. Elle a aussi appelé la Fédération internationale des journalistes, la Fédération européenne des journalistes et Reporters sans frontières à dénoncer l’arrestation de Nazha Khaldi par les autorités d’occupation marocaines et intervenir immédiatement pour sa libération.
«Insécurité totale»
Récemment, Adala UK a affirmé que le syndicaliste sahraoui Brahim Saika a été enterré par les forces marocaines sans le consentement de sa famille et sans que soit connue la cause de sa mort et appelé à une action urgente de l’ONU pour dénoncer cet «acte injustifiable et inhumain». Adala UK a rapporté que «Brahim Saika, le jeune syndicaliste sahraoui et chef de la Coordination des Sahraouis sans emploi, mort en détention arbitraire le 15 avril dernier, a été enterré le 4 août, à 19h30 sans le consentement de sa famille». «La famille du jeune militant sahraoui a été informée seulement 15 minutes avant l’enterrement et n’avait pas donné son consentement», selon l’organisation qui cite des membres de la famille de Brahim Saika. Adala UK a noté qu’à ce jour, les forces marocaines refusent de procéder à une autopsie pour déterminer la cause de la mort de Brahim Saika et ils ont même «proposé à sa famille la somme de 700 000 dirhams marocains (70 000 dollars) pour signer l’accord d’enterrer la victime sans autopsie».
Brahim Saika a été arrêté arbitrairement par les forces marocaines le 1er avril 2016. Il est mort en détention deux semaines après. Ses bourreaux n’ont pas donné d’explication concernant sa mort. La sœur de la victime, Khadidja Saika, a affirmé qu’effectivement, le 4 août, deux hommes se sont présentés au domicile de la victime comme étant des représentants du gouvernement marocain. «Ils nous ont informés qu’ils allaient enterrer Brahim à 19h30. Notre famille n’a pas accepté qu’il soit enterré avant qu’une autopsie ne soit effectuée pour déterminer la cause de la mort», a-t-elle dit. Elle a ajouté que «finalement, ils l’ont enterré sans déterminer la cause de sa mort», et que «de cette façon, les responsables de son décès ne seront jamais punis». Et d’interpeller «la communauté internationale et les Nations unies sur les violations systématiques et répétées des droits de l’homme et les répressions» perpétrées par l’«occupant marocain» à l’égard du peuple sahraoui. «Le gouvernement marocain représente l’insécurité totale pour les citoyens sahraouis», a-t-elle affirmé. Elle dit enfin que «la famille de Brahim Saika n’a pas l’intention de se taire».
Adala UK, qui a condamné vigoureusement ce dernier acte perpétré par l’Etat marocain, a exigé en conséquence «une action urgente de la communauté internationale, en particulier l’ONU». Et de poursuivre : «Le gouvernement marocain devrait s’expliquer sur les circonstances de la mort de Brahim Saika, et désigner les responsables de cet assassinat politique arbitraire.» Des membres de la coordination des Sahraouis sans emploi ont affirmé que Brahim Saika a été victime d’une campagne d’intimidation constante de la part des forces marocaines avant son interpellation, ayant entraîné son décès resté sans explication.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a adopté le 29 avril la résolution 2285 par laquelle il proroge d’un an le mandat de la Mission des Nations unies pour le référendum au Sahara occidental (Minurso) sans intégrer la revendication sahraouie qui consiste à élargir ses prérogatives à la protection des droits de l’homme. Elle se contente ainsi de surveiller un cessez-le-feu conclu en 1991, en attendant le référendum sur l’autodétermination du peuple sahraoui.
Marchandage au Conseil de Sécurité de l’ONU, agitation médiatique en Afrique, effet d’annonce au Maroc… tout y est passé pour masquer l’embarras d’un colonisateur dos au mur, face à un peuple qui ne démord pas de son droit international à l’autodétermination.
Rappel des faits :
En mars 2016, le roi du Maroc expulsait 75 membres civils de la MINURSO, chargés principalement de l’organisation du référendum d’autodétermination au prétexte que Ban Ki-moon aurait évoqué la partie occupée du Sahara occidental. Expulsion accompagnée d’une campagne médiatique d’insultes à l’égard du Secrétaire général de l’ONU. Le roi du Maroc mettait ainsi au défi l’organisation internationale.
Fin avril 2016, le Conseil de sécurité de l’ONU en renouvelant le mandat de la MINURSO, donnait trois mois au Maroc pour rétablir la mission dans sa plénitude. Trois mois, c’est court pour se sortir d’une telle injonction sans perdre la face !
Ce fut donc l’heure de nouvelles diversions : à la mi-juillet, en marge du sommet de l’Union Africaine, le Maroc annonce avoir exprimé son intention en vue d’intégrer l’Union Africaine, alors qu’il a quitté l’Organisation de l’Unité Africaine en novembre 1984 après l’admission de la RASD. Contrairement à ce que certains médias marocains ont sous-entendu, le sommet de l’UA n’a pas traité de la question. C’est l’ami du roi, Idriss Dehbi président en exercice de l’UA, qui fut chargé de remettre une lettre d’intention à Nkosazana Dlamini Zuma, présidente de la Commission de l’Union africaine.
La lettre du roi du Maroc est d’ailleurs méprisante à plus d’un titre pour les pays africains et les dirigeants de l’époque. L’adhésion de la RASD est qualifiée « d’effraction, de connivence » (…) « une tromperie, un détournement de procédures, au service d’on ne sait quels intérêts. Un acte comparable à un détournement de mineur, l’OUA étant encore, adolescente à cette époque » (…) « une erreur historique et un legs encombrant. » Et de s’interroger sur une « contradiction évidente » de la position de l’Union africaine avec la légalité internationale ! De la part d’un monarque qui ne respect ni ses lois, ni les conventions qu’il signe, ni la Charte des Nations Unies, c’est pathétique ! Au final il estime (en toute modestie) qu’il lui sera plus facile de « soigner de l’intérieur que de l’extérieur » le « corps malade » de l’UA !
La réponse de la Commission fut claire : l’Acte constitutif de l’Union africaine « ne contient pas de disposition relative à l’expulsion d’un membre quelconque de l’Union ».
Le roi du Maroc ne ménage pas ses efforts du pour se faire des alliés parmi les dirigeants africains. Outre les investissements qu’il fait à droite, à gauche, et qui rapportent à sa holding ou celles de ses partenaires, il se pare de la lutte antiterroriste en formant des imams d’Afrique de l’ouest et envoyant son armée dans des pays qui devront bien sûr lui en être reconnaissants. Etonnant que le commandeur des croyants ne s’inquiète pas plus sur les motivations des vocations djihadistes de ses ressortissants qui fuient le pays.
Fin juillet, le Conseil de Sécurité de l’ONU entérinait le retour de 25 membres de la MINURSO sans donner de délai au Maroc pour revenir à la plénitude de sa capacité. Le lendemain on annonçait au Maroc l’annulation du verdict du Tribunal militaire de Rabat par la Cour de Cassation qui avait condamné en février 2013, vingt-trois civils sahraouis (incarcérés depuis 27 mois), à des peines de prison de 2, 20, 25, 30 ans et allant à la perpétuité pour 9 d’entre eux. Un verdict énoncé sans preuve, sur la base de rapports de police et d’aveux extorqués sous la torture, au cours d’un procès dont les organisations internationales de défense des droits de l’homme indépendantes ont dénoncé le manque d’équité. Un procès qui n’a pas fait la lumière sur ce qui s’est passé lors du démantèlement violent du campement de Gdeim Izik comme l’attendaient les familles des victimes.
Une nouvelle fois, lors de la séance de cassation, la loi n’a pas été respectée.
Les avocats des condamnés ont été prévenus deux jours avant sa tenue et non cinq jours, ce qui a empêché les avocats sahraouis d’y assister. L’avis de cassation de leur procès a été remis à chacun des prisonniers le 29 juillet, avec un renvoi devant la Cour d’appel de Rabat, sans indication de la motivation de la cassation, sans avis de détention préventive, ce qui aurait dû, en toute logique, conduire à leur libération immédiate… ce n’est pas le cas, ils sont embastillés depuis 5 ans et 9 mois, dont 27 mois de détention provisoire !
Autre illégalité : le renvoi devant le Tribunal de Rabat alors que les faits reprochés aux militants se sont déroulés au Sahara occidental, leur pays d’origine occupé par le Maroc.
Or, ni l’ONU, ni aucun pays au monde, n’a reconnu la souveraineté du royaume sur le Sahara occidental. Le Maroc ne peut même pas prétendre au statut de puissance administrante, ce qui l’obligerait à rendre régulièrement des comptes aux Nations Unies. Non, le Maroc est une puissance occupante au titre du droit de la guerre édicté par les Conventions de Genève dont il est partie tout comme le Front Polisario. Dans ce cadre, il lui est interdit de déplacer les ressortissants du territoire occupé hors de leurs frontières. S’il peut tenir procès contre ces militants, c’est à l’intérieur du seul territoire du Sahara occidental. Et ce procès devra bien sûr être équitable et transparent, respectant les droits de la défense internationalement reconnus. En l’occurrence les procès verbaux comportant des aveux obtenus sous la torture ne pourront plus être retenus comme preuves.
Cette annonce de la cassation n’est-elle pas une nouvelle façon de « jouer la montre » pour le monarque conscient que le référendum, qui interviendra un jour ou l’autre, est perdu d’avance pour lui ?
Ce que redoute le Palais, et qui devrait tomber au cours de la seconde quinzaine d’août, c’est la décision du Comité contre la torture de l’ONU à propos de la plainte de Naâma Asfari pour les tortures qu’il a subies lors des interrogatoires à l’origine des procès verbaux de police, seules preuves pour sa condamnation à 30 ans de prison. Si cette décision demandait la libération du militant sahraoui, elle devrait en toute logique entraîner celle de ses 23 compagnons qui ont subi les mêmes traitements inhumains et dégradants, auxquels on a opposé les mêmes « preuves » et infligé les mêmes peines, voir la perpétuité.
Mais ni la logique ni la légalité ne sont de mise au Maroc, et comme disent les Sahraouis « Au Maroc il n’y a pas de loi, il n’y a que le roi ».