http://www.ujfp.org/spip.php?article4923
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La polémique sur la résolution votée par l’Unesco à propos de Jérusalem a connu, cette semaine, un tour nouveau.
Le CRIF et ses amis ont déployé une stratégie d’interpellations acharnées du gouvernement français. En totale disproportion avec la réalité de l’affaire. Et au prix de quelques gros mensonges, validés par Valls et Cazeneuve ! Du jamais vu sous la cinquième république. Récit détaillé.
Il n’était pas dans mes intentions d’ajouter une suite au précédent billet que j’ai consacré à cette affaire, mais les développements de ces derniers jours m’y obligent un peu.
Pour mémoire, rappelons donc que le 16 avril dernier, l’Unesco avait voté, une résolution proposée par diffé- rents pays arabes, reprochant à Israël de multiples violations du statu quo qui avait normalement prévalu dans la vieille ville de Jérusalem, de 1967 à 2000, par lequel les Israéliens et le Waqf jordanien s’étaient partagé la gestion et l’administration des lieux saints juifs et musulmans.
Cette résolution critiquait notamment divers travaux effectués par les Israéliens sur et aux alentours d’une passerelle reliant le mur des lamentations - le lieu le plus saint du judaïsme - à l’esplanade des mosquées, troisième lieu saint de l’islam. Deux lieux dont la contigüité est d’autant plus source d’affrontements, réels ou fantasmés, que la tradition juive désigne l’esplanade des mosquées sous l’appellation de « Mont du temple ». Depuis quelques années, des groupes juifs religieux intégristes militent pour la reconstruction d’un troisième temple, réplique de celui qui fut détruit par les Romains en 70 après JC en lieu et place des mosquées qui datent du 7ème siècle…
La résolution de l’Unesco critiquait donc Israël pour toutes une série d’actions alléguées par les pays arabes (et pas toujours vérifiables dans la mesure où Israël se refuse à autoriser des experts indépendants à se rendre sur place) et appelait de ses vœux au retour du statu quo qui avait fonctionné à peu près normalement jusqu’en 2000. Enfin, cette résolution réitérait les termes d’une précédente décision de novembre 2015 relative aux « tombeaux des patriarches », lieux saints communs au judaïsme, au christianisme et à l’islam situés en Cisjordanie mais qu’Israël avait décidé d’inscrire à son patrimoine national : l’Unesco avait alors estimé que ces tombeaux devaient être considérés comme faisant « partie intégrante des territoires palestiniens occupés ».
Colère du gouvernement Israélien, et de ses relais habituels en France.
Certes, cette résolution critique beaucoup Israël, peut-être parfois à tort. Mais on l’a dit, le gouvernement israélien refuse le moindre contrôle sur ses fouilles archéologiques et ses travaux d’aménagement de la vieille ville. Certes, la résolution qualifie à chaque ligne Israël de « puissance occupante ». Mais, contrairement à ce que prétendent certains, ce qualificatif n’implique aucune intention péjorative : il désigne un statut juridique qui, en droit international, implique un certains nombre d’obligations, celles-là mêmes dont le non-respect est, à tort ou à raison, reproché, à Israël. Certes, les lieux litigieux sont désignés sous leur nom arabe. Rien d’étonnant puisque le projet a été écrit… dans la langue des pays requérants. Mais le texte de la résolution soumis au vote final a ajouté à certains d’entre eux l’appellation habituellement utilisée par les israéliens : ainsi le mur des lamentations appelée par les Arabes « Place al Buraq » est également appelée « Mur occidental ». Quant à l’esplanade des mosquées, il ne saurait être question de l’appeler « Mont du temple », précisément en raison du statu quo de 1967 par lequel Israéliens et Jordaniens était tombés d’accord pour qu’elle demeurât un lieu de culte musulman.
Mais surtout, horresco referens … la France a voté en faveur de cette résolution !
Il n’en fallait pas plus pour que le ressentiment contre l’Unesco se transforme aussitôt en une série d’attaques très ciblées contre la diplomatie française. Un french bashing dont certains milieux pro-israéliens sont coutumiers, qui se manifeste habituellement par la voie d’insinuations, que relayent divers médias, radios, journaux ou sites Internet. Cette fois-ci, l’affaire devait être grave puisque les attaques ont pris la forme de mises en demeures adressées tous azimuts aux plus hautes autorités de l’Etat, de manière officielle, solennelle, grandiloquente et… mensongère.
La France « négationniste »
C’est le président du CRIF Roger Cukierman qui ouvre le ban par un courrier adressé à François Hollande le 18 avril, soit deux jours après le vote controversé, dans lequel il déplore que la France ait voté « en faveur d’une résolution qui dénie le lien historique entre les Juifs, le Mur des Lamentations et le Mont du Temple à Jérusalem ». Ce faisant, dès cette première phrase, le président du CRIF entretient en fait une confusion entre le lien historique (c’est-à-dire mémoriel, émotionnel et subjectif) qui peut s’attacher à tel ou tel lieu et la destination de ce lieu qui, dans une réalité présente, actuelle, objective, et en vertu d’accords juridiques explicites ou implicites, le constitue comme un lieu de culte pour une religion particulière. Une confusion qui permet ainsi, à Roger Cukierman de mettre dans le même sac le mur des lamentations et le mont du temple (là où, précisément, la résolution de l’Unesco, attachée au statu quo de 1967, se fonde sur le fait que l’esplanade des mosquées est effectivement un lieu de culte musulman). Et qui permet au président du CRIF de poursuivre, à la phrase suivante : « Cette décision est une négation délibérée [qui] ignore le lien historique du judaïsme avec Jérusalem, capitale du peuple juif ». Il n’est donc plus seulement question du mur des lamentations et du mont du temple, mais de Jérusalem tout entière, dont le simple fait de rappeler qu’elle abrite des lieux saints des trois religions monothéistes s’apparenterait donc à une « négation »… Moyennant quoi Roger Cukierman peut asséner sa conclusion : « L’Unesco tente de réécrire une partie de l’histoire de l’humanité et prouve encore une fois que la mauvaise foi et la haine d’Israël ne connaissent aucune limite ». Rien que ça.
La campagne est lancée. Le 25 avril, Gilles-William Goldnadel, président de l’association France-Israël, écrit dans Le Figaro que « cette résolution insensée fait du Mur des lamentations à Jérusalem, un monument exclusivement musulman ». Trois jours plus tard, c’est Meyer Habib, député (UDI) des Français de l’étranger (il possède la double nationalité franco-israélienne et fait partie des intimes du premier ministre israélien Netanyahu) qui écrit sur le Huffington Post que « la France s’est déshonorée » en votant une « résolution négationniste », et qu’elle se rend complice d’une tentative de rendre Jérusalem « judenrei » (une expression allemande empruntée à la phraséologie nazie qui signifie « vide de juifs »). Dans la foulée, Meyer Habib, prétend (en se référant à une autre résolution, mais citée elle aussi de manière grossièrement inexacte) que l’Unesco aurait fait des tombeaux des patriarches un site « exclusivement musulman ». Affirmation reprise quelques jours plus tard, toujours dans le Figaro, par le Grand rabbin de France Haïm Korsia, ainsi que par un grand nombre de sites et blogs de la communauté juive. Le monde à l’envers ! Car bien au contraire, dans sa résolution du 16 avril comme dans les précédentes, l’Unesco s’appuyait sur « l’importance religieuse » revêtue par les tombeaux des patriarches aux yeux « du judaïsme, du christianisme et de l’Islam » pour affirmer qu’ils ne pouvaient en conséquence être inscrits sur le patrimoine national israélien, étant de surcroit « partie intégrante des territoires palestiniens ». Ou comment faire dire à autrui l’exact contraire de ce qu’il a réellement dit.
L’affaire aurait pu en rester là, ce qui aurait déjà été beaucoup de bruit pour rien.
Mais le 6 mai, François Hollande adresse à Roger Cukierman une lettre en réponse à son courrier du 18 avril. La missive présidentielle est courte, formelle, mais le ton est courtois ; ni sec, ni laconique, avec quelques mentions manuscrites amicales. Le président de la république admet que des incompréhensions ont pu naitre de certaines formulations du texte de la résolution (ce qui est le cas de 99% des textes émanant des organisations internationales, rédigés dans un jargon onusien indigeste censé représenter un consensus très relatif, obtenu au prix de laborieuses négociations, à travers des traductions en plusieurs langues…), mais affirme que la France garde une position claire, fondée sur le respect du statu quo et de la garantie d’accès aux lieux saints pour les trois grandes religions.
Ces mots, certes convenus mais qui se veulent apaisants, déclenchent la tempête. Chose inouïe dans l’histoire de la cinquième république, les plus hautes autorités de l’Etat vont alors accepter de venir se justifier – et pour certains s’excuser – d’une faute imaginaire commise à l’occasion de ce qui constitue un non-évènement absolu.
Cazeneuve et Valls désavouent Hollande et Ayrault
C’est d’abord une nouvelle lettre que Cukierman adresse le 10 mai à François Hollande, mise en ligne sur le site du CRIF. Il s’y déclare « blessé » par la réponse du président de la république en ce quelle ne reconnait pas « le caractère négationniste » du vote de la France. Pas moins !
Le même jour, le député LR Claude Goasguen interpelle le ministre des affaires étrangères Jean-Marc Ayrault lors de la séance des questions au gouvernement.
Les mensonges du CRIF et de ses amis font leur entrée à l’assemblée nationale : « Ainsi, depuis le 16 avril, le mont du temple à Jérusalem et d’autres édifices religieux juifs situés également à Jérusalem doivent être considérés comme des lieux saints exclusivement musulmans ! (…) la France s’est déshonorée en participant à une opération de négationnisme culturel, qui n’implique pas seulement Israël mais l’ensemble de l’humanité ! ». Car, ajoute Goasguen : « le Mont du temple n’est pas seulement un des fondements de la culture juive, mais c’est aussi un des fondements de la culture chrétienne ». On se croirait revenu au temps de Christine Boutin brandissant sa bible. La réponse d’Ayrault reprend les termes de la lettre adressée par Hollande à Cukierman : la France n’a fait que marquer son attachement au statu quo afin que soit garantie pour tous l’accès aux lieux saints.
Mais le soir même, le ministre de l’intérieur Bernard Cazeneuve est invité à une conférence organisée par Les amis du CRIF, et il désavoue la diplomatie française en déclarant – après avoir beaucoup tourné autour du pot – « qu’il ne fallait pas adopter » la résolution de l’Unesco. Reste à savoir quelle sont les compétences d’attribution en matière de politique extérieure du locataire de la place Beauvau. Mais la salle, chauffée à blanc par les semaines qui viennent de s’écouler n’en reste pas là et réclame… des excuses publiques de François Hollande ! Réponse particulièrement emberlificotée – et totalement surréaliste ! - de Cazeneuve qui, benoitement, semble admettre la légitimité d’une telle demande : « Si [François Hollande] me demande ce que j’en pense, je lui dirai des choses qui sont de nature à lui permettre de faire la déclaration que vous avez envie d’entendre. Je ne peux pas être plus clair… » [1].Un ministre de l’intérieur désavouant publiquement le président de la république sur un sujet de politique étrangère et anticipant sur ses excuses souhaitables… Une grande première sous la cinquième !
Le lendemain, 11 mai, nouvelle interpellation au Palais Bourbon. Et c’est à nouveau Meyer Habib qui interpelle le premier ministre, car, dit-il, la réponse de Jean-Marc Ayrault, la veille, ne l’a pas convaincu. Le refrain est maintenant bien rodé : la France s’est « déshonorée » et s’est « fourvoyée dans une entreprise négationniste ». Valls prend la parole et admet que « ce vote n’aurait pas du avoir lieu ». Le chef du gouvernement vient à cet instant précis de valider devant la représentation nationale les mensonges du CRIF, en désavouant son ministre des affaires étrangères ainsi que le… président de la république.
La réaction israélienne ne se fait pas attendre. Dès le lendemain, la classe politique et les médias exultent. Une lettre adressée par Netanyahu à Hollande est rendue publique. La France se serait disqualifiée en tant qu’organisateur de la réunion internationale censée relancer le processus de paix au Proche-Orient, qui doit se tenir à Paris à partir du 30 mai prochain, et qu’Israël a de toute façon annoncé, de longue date, rejeter par avance. C’était donc ça…
Ce dimanche 15 mai, la chaîne Israélienne francophone I24, a mis en ligne un article intitulé « France : " le soutien à la résolution de l’Unesco est un malentendu (Hollande) ». Hollande n’a jamais dit ça. Dans sa lettre à Cukierman il évoquait un « malentendu », non pour parler du soutien de la France à la résolution de l’Unesco mais de l’interprétation qui en était faite par certains… Mais déjà, hier, samedi, le journal Haaretz mettait en ligne un article expliquant que dans sa lettre à Cukierman, Hollande s’était « engagé à ne plus soutenir, à l’avenir, de pareilles résolutions ».
Deux petits mensonges de plus. Au point où on en est…
15 MAI 2016 PAR GUILLAUME WEILL RAYNAL
BLOG : LE BLOG DE GUILLAUME WEILL RAYNAL
Mercredi 18 mai
20h00 - Landeleau - Salle multifonctions, derrière le collège Dans les collines au Sud d’Hébron Film de François Xavier Gilles. L’expulsion des villageois palestiniens par l’armée israélienne et les colons. Débat avec le réalisateur. (gratuit)
Jeudi 19 mai
18h00 - Carhaix - Médiathèque, Château Rouge Cultivons la Paix Film réalisé par Denys Piningre. Le commerce équitable et la production d’huile d’olives. Débat avec Michel Besson, responsable de la coopérative Andine. (gratuit)
Lundi 21 mai
20h30 - Callac - Cinéma l’Argoat This is my Land Film de Tamara Erde (cinéaste franco-israélienne) suivi d’un débat avec la réalisatrice. Et si le conflit israélo-palestinien était surtout une question d’éducation ? Comment est enseignée l’histoire dans les écoles palestiniennes et israéliennes. (tarif cinéma)
Mercredi 25 mai
20h00 - Carhaix - Foyer des Jeunes Travailleurs, rue Anatole France Omar Film de Hany Abu-Assad. Jeune Palestinien, Omar aime Nadia qu’il rejoint en franchissant clandestinement le mur. Arrêté par les israéliens, il est relâché contre la promesse d’une trahison. Parviendra-t-il à rester fidèle à ses amis, à la femme qu’il aime, à sa cause ? suivi d’un débat. (gratuit)
Dimanche 29 mai
17h30 - Motreff - Salle polyvalente Clôture du mois de la Palestine Soirée Musicale avec le groupe SAFARA SAFAR, suivie d’un buffet (concert + buffet : 10 €)
http://www.le-chiffon-rouge-morlaix.fr/mai-de-la-palestine-on-peut-encore-participer
http://www.france-palestine.org/Conference-1947-1949-Le-plan-de-partage-de-l-ONU
La Nakba (« catastrophe » en arabe) renvoie au nettoyage ethnique des Palestiniens et à la destruction des communautés palestiniennes qui ont eu lieu lors de la création de l’Etat d’Israël en 1948.
Environ 85 à 90 % des Palestiniens qui vivaient dans ce qui est devenu Israël furent expulsés (quelque 700 à 800.000). [1] Les quatre cinquièmes des villes et des villages palestiniens furent détruits, ou repeuplés par des Israéliens juifs. [2] Dans des villes comme Haïfa et Acre, les quartiers palestiniens furent vidés, et réoccupés.
Le déplacement des Palestiniens était en bonne voie au moment de la déclaration unilatérale d’indépendance d’Israël. Entre le 30 mars et le 15 mai, quelque 200 villages palestiniens furent, selon les mots de l’historien israélien Ilan Pappe, “occupés et leurs habitants expulsés.” [3] Ainsi avant même que la guerre" israélo-arabe » n’ait commencé, environ la moitié du total final des réfugiés palestiniens avaient déjà perdu leur foyer. [4]
Le nettoyage ethnique n’a pas seulement commencé avant mai 1948, il a aussi continué pendant quelque temps après ; l’expulsion des Palestiniens de Al-Majdal vers la Bande de Gaza, par exemple, n’a pas été totale jusqu’à la fin de 1950. [5]. Vidée de ses habitants palestiniens, Al-Majdal devint la ville portuaire israélienne d’ Ashkelon.
La raison primordiale de l’évacuation de centaines de villages palestiniens en 1947-48 a été un mélange de force et de peur, quelque chose longtemps maintenu par les historiens palestiniens. [6] Le travail d’historiens israéliens comme Benny Morris en a fourni des preuves supplémentaires ; selon Morris, sur à peu près les 400 villages palestiniens détruits qu’il a étudiés, “l’évacuation sur des ordres arabes” n’a été le facteur décisif dans l’évacuation de la population que dans six cas. [7]
Les massacres par les forces sionistes – dont il y a eu au moins deux douzaines – a joué un rôle majeur pour répandre la terreur parmi les Palestiniens. [8] Deir Yassin, où 100 à 120 villageois furent tués le 9 avril 1948, est l’atrocité la plus célèbre, mais il y en a eu beaucoup d’autres : à al-Dawamiya, en octobre 1948, plus de 100 villageois– hommes, femmes, et enfants – furent tués. ‘The Poem That Exposed Israeli War Crimes in 1948’, Ha’aretz, March 18, 2016, http://www.haaretz.com/israel-news/.premium-1.709439.
Dans beaucoup de villes et de villages, les Palestiniens furent expulsés sous la menace des armes, comme à Lydda and Ramla. Après que des centaines de personnes aient été tués dans la conquête des villes, on estime que 50.000 habitants furent forcés de partir à pied vers la Cisjordanie. [9]. Dans beaucoup d’autres villages, des colonnes de réfugiés furent la cible de tirs de mortiers pour “leur faire accélérer le train.” [10]
Les réfugiés palestiniens furent empêchés de retourner chez eux par la violence, et par les lois. Dès juin 1948, David Ben-Gourion – premier Premier ministre d’Israël – déclara à son cabinet que “aucun réfugié arabe ne doit être autorisé à revenir". [11] Il est resté fidèle à sa parole.
Les Palestiniens essayant de revenir furent qualifiés d’ "agents infiltrés » par les autorités israéliennes, et considérés comme une menace à la sécurité. En 1956, jusqu’à 5.000 réfugiés palestiniens essayant de revenir chez eux avaient été tués par les forces israéliennes ; la plupart moururent alors qu’ils essayaient de retourner chez eux, d’avoir accès à leurs récoltes ou à leurs propriétés perdues, ou recherchaient ceux qui leur étaient chers. [12]
Pendant ce temps, le gouvernement israélien a fait rapidement adopter des lois qui à la fois s’appropriaient les biens et les terres des Palestiniens expulsés, et aussi les dépouillaient de la citoyenneté qui leur avait été attribuée en tant qu’habitants du nouvel état. [13]
Il n’y a pas de définition formelle du nettoyage ethnique dans le droit humanitaire international, et ce terme tire son origine de la violence du début des années 1990 dans l’ancienne Yougoslavie. [14] En 1994, un article du Journal Européen de Droit International a défini le but à long terme d’une « politique de nettoyage ethnique” comme “la création de conditions de vie qui rendent impossible le retour de la communauté déplacée.” [15]
La Nakba correspond à notre compréhension du nettoyage ethnique : la peur et la violence ont été utilisées pour vider des centaines de villes et villages et leur habitants furent empêchés de revenir. En outre , les intentions de la direction sioniste antérieure à l’état, qui devint Ie premier gouvernement d’Israël, étaient claires.
Comme les recherches historiques l’ont montré, l’idée de « "transférer" tous les Arabes de Palestine ou une partie d’entre eux en dehors du futur état juif était largement répandue parmi les cercles dirigeants sionistes", longtemps avant la Nakba. [16] En 1930, par exemple, le président d’alors du Fonds National Juif déclarait : “S’il y a là d’autres habitants, ils doivent être transférés ailleurs. Nous devons prendre le contrôle des terres.” [17]
Pendant la Nakba, encore, un ordre opérationnel commun donnait comme instruction aux forces israéliennes “de s’emparer des villages, de les nettoyer de leurs habitants (les femmes et les enfants devaient (aussi) être expulsés)” et “de brûler le plus grand nombre possible de maisons .” [18] Quand on a demandé à Ben-Gourion ce qu’ils fallait faire des habitants de Lydda et Ramla, sa réponse fut brève : “Expulsez-les.” [19]
En 1900, la population de la Palestine était environ à 4 % Juive et à 96 % arabe, et en1947, les arabes palestiniens constituaient encore plus des deux tiers de la population. [20] Ainsi, comme le journaliste et historien israélien Tom Segev l’a dit, “’faire disparaître les Arabes se situait au coeur du rêve sioniste, et était aussi une condition nécessaire de sa réalisation.” [21]
Les Palestiniens célèbrent le Jour de la Nakba le 15 mai, parmi lesquels les Palestiniens de Cisjordanie et de la Bande de Gaza Occupées. Beaucoup de citoyens palestiniens d’ Israël, dans le même temps, célèbrent la Nakba le "Jour de l’Indépendance » officiel de l’état, qui change chaque année car fondé sur le calendrier juif.
Ce jour-ci, les citoyens Palestiniens, rejoints par un certain nombre d’Israéliens juifs, marchent vers le site d’un village détruit. Ceci n’est pas seulement une action de commémoration ; ainsi au moins un quart des Palestiniens qui vivent à l’intérieur des frontières d’Israël d’avant 1967 sont qualifiés de "présents absents", ils sont des déplacés internes de la Nakba et jusqu’à ce jour, sont empêchés légalement de revenir sur leur terre et sur leurs propriétés. [22]
Ces dernières années, le gouvernement israélien a cherché à saper la commémoration de la Nakba par la communauté palestinienne, en faisant passer une loi qui “punit d’amende les entités qui ouvertement rejettent Israël en tant qu’état juif ou qui célèbrent la Jour de l‘Indépendance d’Israël comme un jour de deuil.” ‘ [23] En janvier 2012, la Haute Cour de Justice a rejeté une pétition contre la loi, bien qu’elle porte atteinte à la “liberté d’expression.” [24]
Les réfugiés palestiniens continuent à exiger que leur droit, internationalement reconnu, à la fois au retour et à la restitution de leurs biens soit respecté. Aujourd’hui il y a environ 5,2 millions de réfugiés enregistrés par l’ONU (le nombre total de Palestiniens dans la diaspora est de 7,5 millions), dont 2 millions vivant en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza sous gouvernement militaire israélien– et à quelques milles de distance de leurs terres. [25]
Les Palestiniens font référence aussi à une « Nakba continue", dans le sens où Ies politiques israéliennes de déplacement forcé et de colonisation ont continué, et même pris de l’ampleur , au cours des décennies. Pendant la conquête israélienne en 1967 de la Bande de Gaza et de la Cisjordanie, par exemple, quelque 300.000 Palestiniens ont fui ou ont été expulsés. Parmi ceux qui ont quitté la Cisjordanie, moins de 8 % furent autorisés par Israël à revenir. [26]
Actuellement, les exemples en cours comprennent l’expulsion de familles palestiniennes par des colons israéliens à Jérusalem-Est occupée, ainsi que la démolition de maisons et le déplacement des Palestiniens dans diverses zones de Cisjordanie, parmi lesquelles la Vallée du Jourdain et le Sud des collines d’Hébron.
Avril 2016 (traduit de l’anglais par Yves Jardin, membre du GT de l’AFPS sur les prisonniers)
Article commandé spécialement par la "Palestine Solidarity Campaign" (PSC) équivalent britannique de l’AFPS, écrit par l’auteur Ben White.
Ben White - PSC, dimanche 15 mai 2016
[1] Charles D. Smith, ‘Palestine and the Arab-Israeli Conflict’, Bedford/St Martin’s, 2004 ; Rosemary Sayigh, ‘The Palestinians : From Peasants to Revolutionaries’, Zed Books, 2007.
[2] Hussein Abu Hussein & Fiona McKay, ‘Access Denied’, Zed Books, 2003.
[3] Ilan Pappe, ‘The Ethnic Cleansing of Palestine’, Oneworld Publications, 2007.
[4] Rashid Khalidi, ‘The Palestinians and 1948 : the underlying causes of failure’, in ‘The War for Palestine’, Cambridge University Press, 2007.
[5] Benny Morris, ‘The Birth of the Palestinian Refugee Problem Revisited’, Cambridge University Press, 2004
[6] Walid Khalidi, ‘Plan Dalet : Master Plan for the Conquest of Palestine’, Journal of Palestine Studies, Vol. 18, No. 1, Autumn, 1988, pp. 4-33.
[7] Morris, ‘The Birth of the Palestinian Refugee Problem Revisited’, 2004.
[8] ‘Survival of the fittest’, Ha’aretz, January 8, 2004, http://www.haaretz.com/survival-of-the-fittest-1.61345.
[9] Pappe, 2007 ; Morris, ‘The Birth of the Palestinian Refugee Problem Revisited’, 2004
[10] Morris, ‘The Birth of the Palestinian Refugee Problem Revisited’, 2004.
[11] Mark A. Tessler, ‘A History of the Israeli-Palestinian Conflict’, Indiana University Press, 1994.
[12] Benny Morris, ‘Israel’s Border Wars, 1949-1956’, Oxford University Press, 1993 ; Avi Shlaim, ‘The Iron Wall’, W.W.Norton, 2000.
[13] Victor Kattan, ‘The Nationality of Denationalised Palestinians’, Nordic Journal of International Law, Vol. 74, 2005.
[14] International Committee of the Red Cross, https://www.icrc.org/customary-ihl/eng/docs/v2_rul_rule129_sectionc.
[15] Ethnic Cleansing – an Attempt at Methodology, Drazan Petrovic, European Journal of International Law, Issue Vol. 5 (1994) No. 1.
[16] Benny Morris, ‘Revisiting the Palestinian exodus of 1948’, in ‘The War for Palestine : Rewriting the History of 1948’, Cambridge University Press, 2008.
[17] Nur Masalha, ‘Expulsion of the Palestinians : The Concept of “Transfer” in Zionist Political Thought, 1882-1948’, Institute of Palestine Studies, 1992.
[18] Morris, ‘The Birth of the Palestinian Refugee Problem Revisited’, 2004.
[19] Alexander B. Downes, ‘Targeting Civilians in War’, Cornell University Press, 2008.
[20] Ben White, ‘Israeli Apartheid : A Beginner’s Guide’ (Second Edition), Pluto Press, 2014.
[21] Tom Segev, ‘One Palestine, Complete : Jews and Arabs Under the British Mandate’, Abacus, 2001.
[22] ‘High Court Rejects the Right of Ikrit Refugees to Return Home’, Ha’aretz, June 27, 2003, http://www.haaretz.com/high-court-rejects-the-right-of-ikrit-refugees-to-return-home-1.92437.
[23] High Court Rejects Petition Against Israel’s Controversial ‘Nakba Law’, Ha’aretz, January 5, 2012, http://www.haaretz.com/israel-news/high-court-rejects-petition-against-israel-s-controversial-nakba-law-1.405636.
[24] Adalah press release, January 5, 2012, http://www.adalah.org/en/content/view/7188.
[25] ‘Where we work’, UNRWA, www.unrwa.org ; ‘Bureau : Majority of Palestinians live in diaspora’, Ma’an News Agency, May 13, 2015, https://www.maannews.com/Content.aspx?id=765378.
[26] White, 2013.
Le 17 février 2016, des représentant-e-s des enseignants, du personnel, des titulaires de bourses de recherche et des chercheurs associés de l’Institut Simone de Beauvoir (SdBI) ont voté à l’unanimité leur soutien à la résolution ci-dessous concernant l’appel palestinien pour un mouvement de boycott, de désinvestissement et de sanctions.
En tant qu’universitaires, militant-e-s, enseignant-e-s féministes et intellectuel-le-s publics, nous reconnaissons l’interconnexion des formes systémiques d’oppression. Dans cet esprit, nous ne pouvons ignorer l’injustice et la violence, dont la violence sexuelle et la violence basée sur le genre perpétrée contre les Palestiniens et les autres Arabes de Cisjordanie, de la bande de Gaza, au sein d’Israël et dans les monts du Golan, tout autant que le déplacement colonial de centaines de milliers de Palestiniens au cours de la Nakba en 1948. Le traitement discriminatoire, l’exclusion, le siège militaire et l’apartheid imposés par Israël sur ses propres citoyens palestiniens comme sur ceux résidant dans les territoires occupés constituent une violation flagrante du droit international, des résolutions de l’ONU, et des droits humains fondamentaux.
En ce moment même, nos collègues en Palestine font face à des violations quotidiennes de leurs droits humains, dont leurs droits académiques à la liberté de parole, à se réunir, à s’associer et à se déplacer. En même temps, les institutions israéliennes d’enseignement supérieur n’ont pas contesté mais ont au contraire légitimé la politique d’oppression d’Israël et ses violations. Ces violations, qui ont un impact sérieux sur la vie quotidienne et sur les conditions de travail des universitaires, des étudiants et de la société palestinienne dans son ensemble, sont aussi permis par les impôts et le soutien tacite des puissances occidentales, faisant ainsi de chaque contribuable au Canada et en occident un complice de la perpétuation de ces injustices.
Nous, membres du SdBI engagés pour la justice, la dignité, l’égalité et la paix, affirmons notre opposition aux injustices qui se produisent depuis longtemps sans discontinuer en Palestine et que nous voyons comme partie intégrante des multiples formes d’oppression que nous étudions et enseignons. Nous affirmons aussi l’engagement de SdBI aux principes des droits humains, de la justice et de la liberté pour tous, dont la liberté académique.
L’Institut Simone de Beauvoir a eu une longue tradition d’accueil de féministes engagées pour la paix. Au cours des années, le SdBI a organisé ou sponsorisé de nombreuses activités BDS ou des activités de la semaine de l’Apartheid israélien. Aussi, par fidélité aux principes ci-dessus et dans le droit fil de l’histoire du SdBI comme de ses engagements actuels, décidons, au nom du SdBI, d’endosser l’appel de la société civile palestinienne pour le Boycott, le Désinvestissement et les Sanctions (BDS) contre les entités économiques, militaires, académiques et culturelles et contre les projets sponsorisés par l’État d’Israël. Ce faisant nous rejoignons le consensus international en plein développement et ajoutons nos voix à un grand nombre d’associations universitaires et d’entités qui ont adopté de semblables résolutions ces dernières années.
Nous ajoutons nos voix à celles qui ont déclaré leur soutien à BDS parce que nous croyons que le boycott, le désinvestissement et les sanctions sont les moyens non violents les plus efficaces pour réaliser la paix et la justice dans la région. L’Institut Simone de Beauvoir reconnaît que BDS soulève beaucoup de questions et suscite des débats enflammés. En tant qu’éducateur-trice-s et étudiant-e-s féministes, nous promouvons le dialogue ouvert et une approche éducative pour comprendre les problèmes. Dans les pages suivantes, nous soulignons quelques uns des principes-clef de la résolution et ce qu’elle implique. Nous fournissons aussi une liste de ressources pour de plus amples lectures sur le sujet (voir page 12).
Institut Simone de Beauvoir, Université Concordia, Montréal, 13 avril 2016
* Traduction SF pour BDS France et pour l’AURDIP.
Organisée par l’Association France-Palestine Solidarité de Saint-Brieuc. Avec Julien Salingue, Docteur en science politique spécialiste du mouvement national palestinien et des dynamiques politiques, sociales et économiques en Palestine.
Dans son dernier livre consacré aux ONG palestiniennes, il poursuit son étude du « processus de paix », conçu non comme une « étape vers la fin de l’occupation » mais comme une « reconfiguration de l’occupation ». A travers la question des ONG, c’est l’évolution du mouvement national palestinien qu’il rend visible.
Après plus d’un demi-siècle d’occupation militaire et d’oppression permanente par l’État d’Israël, les Palestiniens, conscients de leurs Droits Nationaux, revendiquent toujours leur indépendance et la reconnaissance internationale de l’État Palestinien.
Face à la disproportion dans le rapport de forces entre Palestiniens et Israéliens, comment réagit la société palestinienne ? Comment vivre entre l’espoir politique et les nécessités de la vie quotidienne ? Peut-on survivre à l’oppression de tous les instants sans se soumettre ?
Les « Accords d’Oslo », sensés apporter la paix, ont en fait permis une occupation dura- ble des territoires du futur État Palestinien. Il n’y a jamais eu de « processus de paix », mais une succession de discussions qui servent de paravent à la poursuite de l’occupation, de l’accaparement des terres et à la colonisation intensive.
Nous ne devons pas laisser les Palestiniens seuls face à Israël et ses soutiens interna- tionaux, le développement des mouvements de solidarité partout dans le monde est une urgen- ce. Le soutien des opinions publiques peut faire évoluer favorablement les revendications palestiniennes au niveau international.
A l’exemple du succès du boycott contre l’apartheid en Afrique du Sud, la campagne BDS (Boycott – Désinvestissement – Sanctions) active dans de nombreux pays, accroît l’isolement de l’État d’Israël pour le contraindre à se conformer au Droit International.
À Saint-Brieuc (22), conférence-débat de Julien Salingue
Le vendredi 20 mai 2016 à 20h30
Salle Fraboulet 13 rue de Penthièvre
Saint-Brieuc
http://www.ujfp.org/spip.php?article4904