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Tunisie - Page 25

  • Pourquoi nous quittons le Front populaire

     
    Nous reproduisons ici la déclaration de rupture avec le Front populaire de militantes et militants tunisiens en France.
     
    Le courant Anticapitalisme & Révolution avait développé son point de vue, notamment sur le Front populaire, dans un article de sa lettre n° 3 (25/02/14), Organisations politiques tunisiennes de gauche : trois ans de choix et d'évolutions.
     
     
    BILAN

    Le Front populaire (FP), sur la base d’un compromis (plateforme fondatrice), a permis de rassembler une partie de l’opposition de gauche au moment où la troïka menée par Ennahdha était à la tête des institutions de l’État, avec le soutien des puissances impérialistes.

    Le FP a à ses début été moteur dans l’organisation de manifestations, le soutien à des mobilisations sociales dans les différentes régions. Cette expérience aurait pu être un premier pas vers la construction d’un Front mieux structuré, affirmant une orientation politique clairement indépendante des puissances de l’argent et des impérialistes.
     
    Malgré la place excessive prise par le porte-parole et son parti au sein du FP, notre préoccupation première était de structurer et faire évoluer le FP. Cependant, différents choix politiques de la direction du FP (conseil des secrétaires généraux) et notamment de son porte-parole ont amené le FP vers une pente droitière et opportuniste, avec des fautes politiques qui se sont accumulées et que nous avons déjà dénoncées à plusieurs reprises.

    Suite à l’assassinat de notre camarade Chokri Belaïd, la colère populaire était intense, massive, avec plusieurs centaines de milliers de personnes participant à la journée d’enterrement de notre camarade. Le rapport de forces permettait à ce moment précis de faire chuter la troïka, politiquement responsable de la multiplication des actes de violence contre les militants politiques et syndicaux, les intellectuels, les artistes, les journalistes, etc.
     
    Faisant fi de ce nouveau rapport de forces créé par la mobilisation populaire, la direction du FP a lancé un appel au calme et à « l’union nationale contre le terrorisme ». Suite au second assassinat d’un dirigeant du FP, Mohamed Brahmi, cette dérive a abouti à une alliance avec la bourgeoisie et les RCDistes (dans le cadre du Front de Salut National qui s’est poursuivi avec le “Dialogue National” sous l’égide de l’UTICA et de la direction de l’UGTT).

    Abandonnant totalement le terrain de la lutte des classes et d’indépendance nationale, la direction du FP s’est compromise avec la bourgeoisie, les RCDistes qui préparent leur retour au pouvoir, et les puissances étrangères qui ne veulent surtout pas d’une révolution populaire et sociale, seulement d’une « démocratie » néocoloniale avec des institutions téléguidées depuis Washington et Bruxelles. Ces relations avec les puissances impérialistes sont assumées par le porte-parole du Front populaire qui se vante d’être reçu par tel ou tel ambassadeur ou secrétaire d’État européen ou américain.

    A cela s’ajoute le positionnement totalement acritique des directions du FP vis-à-vis des bureaucraties syndicales. Ces dernières ont été coupables d’abandonner à leurs sorts voire de trahir de multiples luttes ouvrières, allant jusqu’à signer des accords avec des directions d’entreprises alors que les travailleurs concernés y étaient opposés. Le dernier exemple en date est celui des syndicalistes de Latelec, trahies par les bureaucrates syndicaux. Plus du tout étonnant, depuis la participation de la direction de l’UGTT au Quartet (avec l’UTICA !), cadre notoire de collaboration de classe, où un pacte de « paix sociale » a été signé pour trois ans.

    La lutte de classes, la lutte contre l’impérialisme, voilà des terrains que la direction du FP a abandonnés, sans permettre aux militants de donner leur avis, en les rappelant à l’ordre à chaque fois qu’il le fallait. Car le fonctionnement a été dès la fondation du FP antidémocratique : la réunion des secrétaires généraux décidait, et les militants devaient appliquer, bouche cousue.
     
    A Paris, nous avons eu droit à la démonstration la plus affligeante qui soit de ce fonctionnement antidémocratique de la part du représentant du Parti des Travailleurs, appuyé de la direction du FP en Tunisie. Il n’est pas du tout étonnant dans ce contexte de constater la démoralisation et la démobilisation des militants des différents partis du FP, dans différentes régions. Cinq partis ont d’ailleurs quitté le FP. Les dernières initiatives du FP ont souvent été des échecs. Le FP ne mobilise plus, ne suscite plus aucun enthousiasme, bien au contraire.

    C’est ce gâchis que nous constatons, trois ans et demi après la chute du dictateur et quelques mois avant le retour de ses alliés au pouvoir. Car c’est ce qui ressortira des prochaines élections, avec le retour de gros bonnets du RCD, presque tous candidats aux élections d’octobre et novembre. Ce ne sont pas des individus mais des hommes clés du régime de Ben Ali, organisés, bénéficiant d’un réseau de solidarité efficace, du soutien des puissances impérialistes, des capitalistes tunisiens et étrangers. Ils sont responsables à la fois de la politique répressive sous Ben Ali que des choix économiques ultralibéraux qui ont gravement porté atteinte aux droits de travailleurs en Tunisie et gravement alourdi la dette publique.

    Ennahdha a poursuivi cette politique hostile aux classes populaires, le gouvernement de Jomâa en fait de même et tout ce monde ne sera qu’en concurrence pour mieux représenter les classes dominantes et faire preuve de sa servilité au FMI et la Banque Mondiale : privatisations croissantes, baisse des dépenses publiques, dégradation des droits économiques et sociaux déjà affaiblis, contrôle des frontières pour limiter l’immigration, etc.

    Face à cette politique constante depuis les années 70, seule une gauche indépendante, défendant le droit des travailleurs et des démunis, qui ne fait pas d’alliances politiques aux dépens des classes populaires, sera capable, aujourd’hui de présenter une alternative démocratique, progressiste et crédible. Ce qu’il faut, c’est une gauche qui assume le fait de n’avoir comme alliés que les travailleurs, les précaires, les chômeurs, les jeunes et les opprimés de ce pays …et d’ailleurs.

    DÉCISIONS

    Constatant le gouffre qui s’élargit sans cesse entre cette conviction que nous portons et l’orientation opportuniste de la direction du FP,

    Constatant que nous avons épuisé tous les moyens en notre disposition pour mener de l’intérieur du FP la lutte pour son redressement,

    Constatant le désintérêt des classes populaires pour ces organisations politiques qui ne se font plus l’écho de leurs préoccupations,

    Ajoutant à cela les décisions antidémocratiques jusque dans la constitution des listes pour les législatives et l’acceptation par le candidat du FP aux présidentielles de parrainages d’élus d’Ennahdha et du CPR,

    Nous avons décidé d’assumer nos responsabilités, nous militants et membres fondateurs du FP-IdF, d’annoncer aujourd’hui que nous le quittons. C’est une décision difficile, qui nous pèse, parce qu’au Front Populaire, nous avons des camarades et des amis, dont nous ne confondons pas les luttes sincères avec l’opportunisme de leurs dirigeants, et parce que nous ne souhaitons aucunement nous couper d’eux. C’est ce qui a jusque là retardé notre prise de décision.

    Lors de l’assemblée générale de samedi 27/09/2014, les militant-e-s ont aussi décidé à une très large majorité de ne pas cautionner ces élections législatives et présidentielles de 2014. Pour ce faire, nous participerons au « boycott actif » avec d’autres coordinations de l’immigration et en Tunisie, en dénonçant l’argent mal acquis, la corruption systématisée, le financement de partis politiques et d’associations par des fondations européennes et américaines, les interventions étrangères directes dans les affaires internes du pays.

    PERSPECTIVES

    Enfin, en rompant avec le Front populaire, nous n’arrêtons pas la lutte. Au contraire, nous partons pour concentrer nos efforts sur la construction d’un organe de lutte et de résistance populaire, qui unira les révolutionnaires, un organe indépendant des puissances de l’argent, qui s’oppose à toute ingérence dans les affaires de notre pays.

    Nous invitons toutes celles et ceux qui, en Tunisie comme dans l’immigration, partagent notre analyse de la situation et des tâches du moment, à se joindre à nous pour définir et construire ensemble ce nouvel outil politique.

    Militants et membres fondateurs du Front Populaire – Ile de France
    Paris le 27-09-2014

    Pour nous contacter : 17decembre@laposte.net
     
     
    Commentaire: Le blog ne reprend pas ce texte à son compte, c 'est un document parmi d'autres

  • Tunisie : Grève dans le secteur de la santé ( Afriques en lutte)

    Un sit-in a été observé ce jeudi 11 septembre devant le ministère de la Santé publique parallèlement à la grève deux jours entamée à partir d’aujourd’hui dans tous les établissements publics de santé du pays.

    Une grève décidée après le blocage issu des négociations entre la Fédération générale de la santé, relevant de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) et le ministère de la Santé publique.

    La Fédération générale de la santé a exprimé des revendications qui consistent en :

    - La promotion et la mise à niveau du secteur de la santé publique
    - La non application de la décision relative à la réduction des budgets de certains établissements de santé
    - La généralisation des dispositions de l’article 2 de la loi de la fonction publique à l’ensemble du personnel du secteur de la santé
    - L’attribution d’une prime spécifique
    - La révision de la grille salariale pour les dimanches et les jours fériés
    - La reconnaissance de la pénibilité au travail dans le secteur de la santé
    - La généralisation de l’action sociale

    Selon l’UGTT, la grève a été suivie à 90% à Tunis et entre 90 et 100% à l’intérieur du pays, et la centrale syndicale prévoit de durcir son mouvement si ses revendications ne sont pas satisfaites par le ministère.

    La grève n’a pas concerné les services d’urgence ainsi que les rendez-vous de chimiothérapie et de radiothérapie, selon un communiqué publié, ce jeudi, par le ministère de la Santé, qui précise en outre dans un autre communiqué que les revendications de la fédération seront examinées dans le cadre des négociations sociales dans le secteur public entre le gouvernement et l’UGTT.

    Source : Webdo Tunisie 18 septembre 2014

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/tunisie/article/tunisie-greve-dans-le-secteur-de

  • Des chansons du Maghreb à Lyon Place du Pont Production (France Culture)

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    Un documentaire de Péroline Barbet et Jean-Philippe Navarre

    A l’instar de Paris et Marseille, villes phares de la concentration d’exilés du Maghreb, Lyon fut une plateforme pour de nombreux chanteurs, musiciens, éditeurs et producteurs, qui, de cafés en galas, de studios d’enregistrement, aux magasins de la rue Moncey, a vu fleurir une économie musicale artisanale, inventive, alternative et produit des métissages musicaux inédits.

    A moins de 100 mètres de la place du Pont, au cœur de Lyon, les maisons d’édition VisionPhone, l’Etoile verte, SEDICAV, Mérabet, Bouarfa ont produit, des années 70 à 90, des milliers de « K7 » de musiciens marocains, algériens et tunisiens locaux et nationaux.

    Au fil des chansons retrouvées, et à travers les bouches de ceux qui les ont écrites, ce documentaire nous plonge dans les récits des réalités nouvelles de l’exil de cette France post 30 glorieuses et sur le quotidien des premières générations de migrants. Ces chansons, multiformes et fraternelles, directement en prise avec la réalité quotidienne, nous parlent de séparation, de déracinement, d’amour, célèbrent ou ironisent le mythe du retour au pays. Loin de l’image mutique, passive et pleine d’abnégation des travailleurs immigrés de la première et deuxième génération, elles témoignent de la grande inventivité de ces hommes de l’ombre et d’une soif d’expression sans pareil.

    du lundi au jeudi de 17h à 17h55 53 minutes, 11.09.2014 - 17:01 

    Production : Péroline Barbet

    Réalisation : Jean-Philippe Navarre

    http://www.franceculture.fr/emission-sur-les-docks-des-chansons-du-maghreb-a-lyon-place-du-pont-production-2014-09-11

  • Des agents de la société Transcom Tunis en grève de la faim (AeL)

    Des agents d’un call center en grève de la faim en Tunisie, voilà qui n’est pas commun et plutôt radical comme moyen de contestation.

    Entretien avec M. Mustapha Nehdi, secrétaire général de la CGTT à Transcom Tunis, pour comprendre pour quelles raisons une telle mesure a été décidée.

    Combien d’agents sont impliqués dans la grève de la faim ?

    Deux agents et syndicalistes de la CGTT ont entamé une grève de la faim avec le soutien de sept membres du bureau syndical de la société, les deux grévistes sont MM. Kamel Dali et Anis Hasnaoui.

    Pourquoi avoir choisi un mode de contestation aussi radical ?

    Cette mesure a été prise en réaction à la décision de la direction de suspendre les deux agents et membres du syndicat du travail, pour des raisons qui selon notre syndicat ne sont pas admissibles. De plus, la décision de la suspension s’est faite sans préavis et sans l’aval de l’inspection du travail. Devant une telle mesure, nos collègues n’ont trouvé aucun autre moyen que de déclencher une grève de la faim. En outre, cette décision est le résultat d’une multitude d’obstacles que nous rencontrons dans notre travail au sein du syndicat et de mesures abusives et anti-syndicalistes venant de la direction, auxquels s’ajoute la surexploitation de nos agents, d’où la décision de recourir à un tel moyen de contestation.

    Depuis combien de temps sont-ils en grève de la faim et quel est leur état de santé ?

    Depuis le 18 août, les deux syndicalistes sont en grève de la faim. Un médecin les a examinés le 19 août au matin et a jugé leur état stable.

    Y a-t-il un suivi médical pour les personnes en grève ?

    Il n’y a pas de suivi médical quotidien. Par contre, la grève de la faim a été constatée par un huissier de justice.

    Quelles sont les doléances des deux agents en grève et du syndicat ?

    Les deux agents en grève ont été suspendus de leur travail sans aucun motif valable et abusivement. Nous exigeons donc la réintégration et la reprise du travail de nos collègues, sachant que ces personnes sont des pères de famille et ont des enfants à charge.

    Des négociations sont-elles en cours et quels sont les résultats ?

    Aucune mesure de la part de la direction n’a été prise, nous ne sommes jusqu’à présent toujours pas en cours de négociation avec celle-ci.

    Source : L’Economiste Maghrébin 22 août 2014 par Mustapha Nehdi

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/tunisie/article/des-agents-de-la-societe-transcom

  • Tunisie: se révolter, une émission de France Culture avec les ouvrières de Lattelec

    Lecture
     
    Nasawiyat par Charlotte Bienaimé le samedi de 12h à 12h30 
    Un voyage en huit étapes à la rencontre de jeunes résistantes qui se battent au quotidien pour l’égalité entre les hommes et les femmes, indispensable à l’instauration de réelles démocraties. Etudiantes, ouvrières, architectes, poètes, journalistes, agricultrices...certaines ont fait la révolution, d'autres l'ont vécu par procuration, toutes mènent une deuxième révolution dans les recoins intimes de leurs pays et réinventent un nouveau militantisme longtemps étouffé par des régimes autoritaires.

    Une série de Charlotte Bienaimé, réalisée par Annabelle Brouard

    6ème étape, Tunisie : se révolter 

    Monia et Sonia, 30 ans, sont ouvrières dans l'usine Lattelec, filiale d'une entreprise française de câblages aéronautiques travaillant pour Airbus et Dassault. Dans la foulée de la Révolution, elles créent un syndicat pour défendre les droits des 400 ouvrières victimes notamment de harcèlement moral et sexuel. Elles se battent, obtiennent des avancées sociales et parviennent à faire réintégrer plusieurs ouvrières licenciées suite aux grèves... Mais elles, restent sur le carreau. Monia et Sonia sont actuellement en grève de la faim. Elle réclament leur réintégration.

    L'histoire de Monia et Sonia pourrait se retrouver dans un des poèmes de la jeune slameuse Sham's qui lit ses textes engagés dans les rues de Tunis. Elle y parle notamment des femmes, de la classe ouvrière et de la Révolution.

    Générique de fin : Osfour par Watcha Clan / Album Radio Babel

    Une émission réalisée en partenariat avec le Fond pour les femmes en méditerranée et avec l'aide de la Scam.

    16.08.2014 - Nasawiyat
    6ème étape, Tunisie : se révolter 29 minutes Écouter l'émissionAjouter à ma liste de lecture

    Monia et Sonia, 30 ans, sont ouvrières dans l'usine Lattelec, filiale d'une entreprise française de câblages aéronautiques travaillant pour Airbus et Dassault. Dans la foulée de la Révolution, elles créent un syndicat pour défendre les droits des 400 ouvrières victimes notamment de harcèlement moral et sexuel. Elles se battent, obtiennent des avancées sociales et parviennent à faire ...

    Idées

    09.08.2014 - Nasawiyat
    5ème étape, Maroc : témoigner 29 minutes Écouter l'émissionAjouter à ma liste de lecture

    Fedwa, médecin de formation, a lancé fin 2011 le webzine collaboratif féministe « Quandisha ". Pour que des femmes de tous horizons, de tous âges, croyantes ou pas, voilées ou non, y témoignent de leurs conditions de femmes marocaines. Quandisha est vite devenue une communauté soudée de femmes qui s'entraident au quotidien. Fedwa nous fait rencontrer l'un d'elle: Fatima, institutrice et ...

    Idées

    02.08.2014 - Nasawiyat
    4ème étape, Maroc : comment militer ? 29 minutes Écouter l'émissionAjouter à ma liste de lecture

    Jihane, 23 ans est la plus jeune membre de l'« Association Démocratique des Femmes du Maroc ».Il y a quatre ans, elle retirait son voile et décidait de militer au sein d'associations pour «grignoter »des droits, petit à petit, aux pouvoirs en place.Betty, 38 ans croit en la désobéissance civile. Figure de la subversion au Maroc, elle déclencherégulièrement les passions avec ses actions ...

    Idées

    26.07.2014 - Nasawiyat
    3ème étape, Egypte : reprendre la rue 29 minutes Écouter l'émissionAjouter à ma liste de lecture

    Avec ses tenues moulantes et sa passion pour le tango, Zeinab vit à la marge de la sociétéégyptienne. Elle participe pourtant à son changement. Au Caire, elle organise des cours de selfdéfensepour les femmes victimes de harcèlement. Elle souhaite aussi travailler sur l'éducation desplus jeunes pour les inciter à transformer en profondeur le regard que la société égyptienne porte ...

    Idées

    19.07.2014 - Nasawiyat
    2ème étape, Tunisie : faire sa révolution 29 minutes Écouter l'émissionAjouter à ma liste de lecture

    Amal, 27 ans, se bat pour vivre libre. Dans des poèmes brûlants, elle remet en cause la sociétéconservatrice tunisienne en parlant de virginité, du rapport au père, de religion, de sexe et derévolution. En publiant régulièrement ses textes sur Facebook, elle espère inspirer d'autres jeunesfemmes.   Invitée : Amal, de Tunisie  

    Idées

    12.07.2014 - Nasawiyat
    1ère étape, Tunisie : retrouver le terrain 29 minutes Écouter l'émissionAjouter à ma liste de lecture

    Après la révolution, Ghofrane, 25 ans, décide de s’engager auprès des femmes de sa région agricole du Kef, au Nord ouest du pays. Déçue par les associations féministes rendues élitistes par le régime de Ben Ali, elle crée son association « Femmes et Citoyenneté » pour aider les femmes rurales à défendre leurs droits.

     

     

  • L’an 4 de la révolution tunisienne : bilan et perspectives (Essf)

    L’insurrection révolutionnaire, qui a secoué la Tunisie vers la fin de 2010 et le début de 2011, a permis aux classes populaires et à la jeunesse de chasser Ben Ali et de briser son pouvoir. Mais, abattre le dictateur est une chose. Abattre le système économique et social, qu’il gardait, en est une autre.

    1. Abattre la dictature est une chose, renverser le régime en est une autre


    Force et limites du mouvement révolutionnaire tunisien

    Après avoir supporté, pendant 23 ans, la dictature néocolonialiste du capitalisme mondial, le
    peuple tunisien s’est enfin révolté. Parti du centre de la Tunisie, l’insurrection révolutionnaire a vite gagné le reste du pays, notamment la capitale Tunis. Il ne lui a fallu que 29 jours pour déboulonner le dictateur.


    La révolution a affiché comme objectif central celui d’abattre le régime. Mais, celui-ci a bien résisté à l’assaut populaire, malgré la perte de son chef. Le mouvement révolutionnaire, essentiellement spontané et manquant d’expérience politique, n’a pas su intégrer ses actions et ses différentes initiatives politiques dans une perspective de rupture avec l’ordre dominant. Il s’est finalement laissé ‘apprivoiser’ par les partis politiques de droite. Le mouvement syndical et, surtout, la gauche assume une lourde responsabilité dans ce premier échec.

    Le mouvement syndical, sous contrôle bureaucratique. Un pas en avant, deux en arrière

    La direction du puissant syndicat ouvrier, UGTT, a été, durant les deux premières semaines de l’insurrection révolutionnaire, ouvertement hostile à ce mouvement. Pareil qu’en 2008, lors de la longue révolte du bassin minier.


    L’engagement massif des syndicalistes dans le mouvement révolutionnaire et la pression qu’ils exerçaient sur la direction de l’UGTT, l’augmentation du nombre des victimes et, surtout, l’incapacité évidente du pouvoir à éteindre le brasier, l’ont finalement poussé dans le camp de la révolution. Le 11 janvier, elle décida une série de grèves générales régionales tournantes. La région de Tunis a été programmée pour le 14 janvier. La direction de l’UGTT était loin de se douter que ce jour allait être le dernier du long règne de Ben Ali.
    Le ralliement de cette direction à la révolution a permis un dénouement rapide de l’affrontement avec la dictature et, surtout, d’en limiter le coût en vies humaines.

    La gauche, faiblesse et divisions

    Malgré son fort ancrage dans le mouvement ouvrier tunisien, dont les origines remontent au début du XXe siècle, son combat contre toutes les formes de colonialisme et son engagement dans le mouvement révolutionnaire, la gauche tunisienne n’a pas pu jouer un rôle politique décisif après la chute de Ben Ali. Ce qui a permis au régime en place et aux forces impérialistes, de parer au plus pressant, en faisant appel aux services de vieux responsables politiques, puis aux islamistes, pour contenir la vague révolutionnaire et stabiliser le pouvoir de nouveau.
    Le prix payé à la dictature, son extrême division et l’absence de perspectives politiques claires expliquent les défaillances de la gauche, à un moment décisif de la lutte des classes en Tunisie.

    Déroute du parti-Etat et de la grande bourgeoisie locale

    Il était difficile d’imaginer une insurrection révolutionnaire en Tunisie, en 2010. Encore moins, la chute du général Ben Ali. Bien entendu la situation sociale était catastrophique, la corruption générale et le contrôle criminel des familles du palais d’un pan de l’économie presque total. Cependant, les signes d’une irruption sociale imminente étaient difficiles à déceler.
    Le 17 décembre 2010, un fait divers dramatique a brusquement changé la donne. La contestation des parents de la victime de ce drame, devant le siège du gouverneur, a marqué le début d’un mouvement de remise en cause du système, qui a fini par enflammer l’ensemble du pays.
    Le pouvoir politique ne s’attendait pas à un embrasement social aussi général. La police et l’armée ont été vite débordées par l’ampleur du mouvement, mais aussi par sa forte détermination.
    Le 14 janvier, vers le début de l’après-midi, l’avenue principale de la capitale a été occupée par une immense foule. Des dizaines de milliers de manifestants se sont massés spontanément face à l’immeuble, symbole de la dictature, du ministère de l’Intérieur. Puis, elle a scandé pendant des heures ‘dégage’ contre le dictateur, avant d’être violemment dispersée les brigades anti-émeutes.
    Ben Ali a fini par être lâché par la grande bourgeoisie locale et par l’impérialisme. Son parti, qui comptait, quelques semaines plutôt, des centaines de milliers de membres, a, lui aussi, disparu dans la nature. Il ne restait au Général qu’une seule issue ; la fuite à l’étranger. Ce qu’il fit sans hésitation !

    Les forces impérialistes au secours du régime tunisien

    Au-delà des faiblesses du mouvement révolutionnaire, des erreurs de la gauche et des hésitations de la direction syndicale, le régime tunisien doit sa survie, notamment, grâce à l’intervention et au soutien multiforme des forces impérialistes. La grande bourgeoisie locale était, quant à elle, dans un désarroi total.
    La rencontre du G8 à Deauville, fin mai 2011, qui s’est penchée sur ‘le printemps arabe’, n’était que la partie visible de la réaction et des manœuvres de l’impérialisme face aux insurrections révolutionnaires qui remettaient en cause l’ordre impérialiste dans la région arabe.
    L’ingérence impérialiste, dans les affaires tunisiennes s’est renforcée. C’est ce qu’illustre l’influence qu’exercent les ambassades des Etats dominants sur les partis politiques locaux, et le contrôle quasi-total de la politique économique et sociale par les institutions financières internationales (IFI) et la Commission européenne.

    2. Les islamistes gardiens provisoires du régime

    Ennahdha à l’épreuve du pouvoir, face aux revendications populaires

    L’insurrection révolutionnaire et la chute du dictateur ont créé des conditions objectives idéales, pour commencer une transformation progressiste de la société tunisienne. Il était important pour les classes populaires de savoir quelle force politique pouvait le faire ?
    Beaucoup, parmi ces classes, étaient séduits par le parti islamiste Ennahdha, ce qui lui a permis d’obtenir la majorité relative aux élections, du 23 octobre 2011, de l’Assemblée Constituante, avec environ 37% des voix exprimées ; soit 89 sièges sur un total de 217 sièges. Mais, pour gouverner, il lui fallait plus. Il a noué une alliance gouvernementale avec deux autres partis, qui ont totalisé 49 sièges, formant ainsi la Troïka. Ennahdha, mais aussi les partis qui ont gouvernés avec elle, ont été chargée, d’une manière démocratique, de faire cette transformation.
    Cependant, la Troïka, avec les islamistes aux commandes, a préféré servir de relais aux plans et aux exigences néocolonialistes : en poursuivant le remboursement de la dette de la dictature, en signant l’Accord de libre-échange complet et approfondi, véritable traité néocolonialiste exigé par l’Union Européenne et en signant, avec le FMI, un nouveau plan, qui durci l’austérité budgétaire et les restructurations capitalistes néolibérales… Bref, elle a poursuivi, dans des conditions sociales radicalement différentes, la même politique qui a conduit la Tunisie à l’insurrection. Résultats : extension et approfondissement de la crise !
    La Troïka a été rattrapée par sa trahison des promesses de justice sociale, de lutte contre la corruption et de demander des comptes aux criminels de l’ancien régime. Les islamistes, et leurs alliés, savaient qu’il était impossible de dire oui, sur toute la ligne, au bourreau et de ménager, en même temps, ses victimes. Mais, leur nature de classe, leurs intérêts politiques et leur idéologie, ne pouvaient que les pousser à être les nouveaux serviteurs du néocolonialisme. Cette expérience a démontré, de manière irréfutable, l’incapacité de l’islam politique à satisfaire les revendications sociales, démocratiques et nationales exigées lors de l’insurrection révolutionnaire. Encore une voie sans issu !
    Après une première période de gouvernement chaotique, les islamistes ont jeté l’éponge, une première fois, le 6 février 2013, à la suite de l’assassinat de Belaid, l’un des dirigeants du Front populaire (FP). Puis, définitivement, le 9 janvier 2014, sous la pression conjuguée de la rue, des partis politiques d’opposition et des puissances étrangères. Ils ont mis fin à 767 jours de gouvernement de la Tunisie, par la Troïka. Un gouvernement dit de ‘technocrates’, estampillé du label ‘consensus national’, a pris le relais.

    Le Front Populaire : union difficile des forces de gauche et des nationalistes arabes

    La gauche et les nationalistes arabes ont subi une défaite cuisante aux élections de 2011. Tirant le bilan de cet échec, ils ont formé, le 7 octobre 2012, le FP pour la réalisation des objectifs de la révolution.
    Malgré des divergences idéologiques et un passé de conflictuel, les principales constituantes du FP ont réussi à préserver leur union, voire même à la consolider ; le FP est désormais un parti politique en construction.
    Le Front n’est pas homogène, loin s’en faut. Il renferme toutes les tendances de la gauche et du mouvement nationaliste arabe. Pour certaines tendances, ces dénominations ne veulent plus dire grand-chose. Le seul catalyseur, de ce corps politique composite, est une réalité sociale très tendue, conflictuelle et dépourvue de vision alternative claire.
    Le FP populaire se veut une force de progrès, voire révolutionnaire. Ses dizaines de milliers de membres sont bien ancrés dans le mouvement social, syndical et révolutionnaire.
    Par contre, la direction du FP ne mesure pas bien l’étendue de son capital de confiance auprès des classes populaires. Là où il faut agir fermement, elle hésite encore, elle doute même et s’impose des autolimitations. En politique il ne peut y avoir de certitudes sur l’issu d’un combat que l’on engage. Mais, prendre l’initiative, frapper le premier, contribue souvent à déterminer l’issue de la bataille.
    Le FP serait actuellement la troisième force politique. Il se prépare à participer aux prochaines élections législatives et présidentielles, qui débuteront à la fin d’octobre 2014, sous sa propre bannière.

    Nida Tounès : recomposition de la droite néolibérale

    Le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD), parti de l’ancien dictateur a été dissout le 9 mars 2011. Depuis, les initiatives de regroupement de ses anciens membres se sont multipliées. Nida Tounès est, de loin, le nouveau parti qui a réussi, non seulement à regrouper bon nombre d’entre eux, mais à attirer aussi vers lui des cadres du mouvement démocratique et syndical.
    Nida Tounès, serait le premier parti, selon les sondages d’opinions, devançant Ennahdha. À l’instar du FP, Nida Tounès a décidé d’aller seul aux prochaines élections. Plusieurs signes indiquent que ce dernier et Ennahdha seraient d’accord pour gouverner ensemble, après les élections. Leur accord est total concernant le maintien de l’orientation capitaliste néolibérale de la politique économique et sociale. Par contre, ils divergent concernant la sécularisation de la société et, plus particulièrement, les droits acquis des femmes tunisiennes.

    3. Le gouvernement ‘technocrate’

    Echec et déroute des islamistes au pouvoir.

    L’arrivée des islamistes au pouvoir, dans les conditions concrètes de la Tunisie après le 14 janvier, était inévitable. Cela a couté très cher à la Tunisie. Cependant, à quelque chose malheur est bon ! Cette expérience malheureuse a permis aux classes laborieuses de mettre les islamistes à l’épreuve de leurs revendications sociales légitimes, et qui nécessitent des choix politiques clairs. La faillite des islamistes au pouvoir est totale. Cela va certainement permettre à la société tunisienne de pouvoir enfin exorciser ses démons !
    L’une des tâches urgentes, des forces sociales et politiques progressistes tunisiennes, doit consister, à partir de l’expérience vécue, à aider à la cristallisation de la conscience de classe des forces laborieuses tunisiennes. Concrètement, il leur faut se battre pour que les élections prochaines soient l’occasion de réparer les erreurs graves du passé, et non pas une nouvelle tentative pour restaurer le pouvoir de la dictature. Cela veut dire, avoir un programme électoral qui marche sur les deux jambes : politique d’une part, et, économique et social, d’autre part. Contenant des mesures immédiates et opérantes pour renverser la tendance actuelle.

    Le ‘dialogue national’ accouche d’un gouvernement ‘technocrate’

    La Troïka a été docile vis-à-vis des injonctions impérialistes. Mais, signer des accords de libre-échange, et accepter des plans d’austérité et de restructurations néolibérales est une chose, les appliquer en est une autre. Aussi, face aux effets catastrophiques de ces mesures, les islamistes ont commencé à s’inquiéter de la dégradation de leur image, et du coût politique que cela impliquait, tandis que les Institutions financières internationales et la Commission européenne, continuaient d’exiger d’eux toujours plus et plus vite.

    Mission du gouvernement ‘technocrate’ : durcir l’austérité et les restructurations capitalistes néolibérales

    Les forces capitalistes ont finalement décidé d’écarter la Troïka du pouvoir. Parmi les moyens économiques utilisés pour atteindre cet objectif, l’embargo financier, qu’ils ont commencé à appliquer à partir de juin 2013. Il ne prit fin qu’avec l’entrée en fonction du nouveau gouvernement, en janvier 2014.
    Ce dernier a émergé, en apparence, du ‘dialogue national’ qui a été mise en place, un mois après l’assassinat de Brahmi, autre leader important du FP, le 25 juillet 2013, et le mouvement populaire qui s’en est suivi, pour réclamer le départ des islamistes du pouvoir et la dissolution de toutes les instances issues des élections de 2011.
    Ce gouvernement est supposé n’avoir pas de liens d’intérêts avec les partis politiques. Il est supposé aussi être l’émanation du dialogue national. Rien n’est moins vrai ! Il a été concocté dans les coulisses des chancelleries étrangères, avec la collaboration de la grande bourgeoisie locale dont les intérêts sont intimement liés aux intérêts des firmes transnationales.
    La plupart des membres du gouvernement actuel, sont des cadres dans les firmes transnationales, et dans les IFI. Leur mission, à laquelle ils s’y emploient avec dévouement, consiste à accélérer l’exécution des accords signés avec les IFI et la commission européenne.

    4. Quelles perspectives immédiates pour le processus révolutionnaire ?


    Les prochaines élections législatives et présidentielles (octobre-décembre 2014).

    Avant de quitter le pouvoir, la Troïka a fait voter à l’Assemblée Constituante, un budget qui durcit la politique d’austérité. Mais, quelques jours à peine après ce vote, la contestation populaire à fait reculer la Troïka, l’obligeant à annuler une partie des nouvelles mesures fiscales qui affectent les revenus et le pouvoir d’achat des classes populaires et moyennes. L’ampleur du mouvement a, du même coup, forcé le dirigeant d’Ennahdha et chef du gouvernement, Larayedh, à démissionner.
    Le départ des islamistes du pouvoir a été accueille avec un grand soulagement dans le pays. Le nouveau gouvernement a joui d’un préjugé favorable auprès de l’opinion publique. De plus, il jouit d’un large soutien politique. Il a aussi le soutien des deux grandes organisations professionnelles ouvrière et patronale. Officiellement, il doit réunir les conditions nécessaires pour le bon déroulement des élections, supposées marquer la fin de la transition démocratique de la Tunisie.
    Le gouvernement technocrate a mis cela à profit, pour faire des avancées significatives dans les grands dossiers des réformes structurelles néolibérales. Cependant, il avance avec précaution en ce qui concerne les mesures d’austérité budgétaire. Il a été contraint d’organiser ‘un dialogue économique national’ afin de garantir une couverture politique au programme d’austérité. Mais, ce dialogue n’a pas abouti, notamment à cause des réticences de l’UGTT et de l’opposition du FP aux augmentations des prix des produits de première nécessité.
    Cela a poussé le gouvernement à mettre de l’eau dans son vin ; il a été contraint de maintenir les subventions aux produits de base, mais a opéré dans le même temps des augmentations importantes pour le prix du carburant, de l’électricité et du gaz.
    Enfin, le projet de budget complémentaire pour 2014, qu’il vient de présenter à l’Assemblée Constituante comporte de nouvelles mesures fiscales et des retenues obligatoires sur les salaires, allant d’une journée à six journées de travail.

    La dernière ligne droite du processus révolutionnaire

    La tension sociale est de nouveau montée d’un cran à l’annonce de ces mesures. Dans le même temps, les partis politiques sont plongés dans les tractations et la recherche d’alliances pour les prochaines élections. Seul le syndicat UGTT demeure vigilant par rapport à la politique du gouvernement. Il s’est opposé à l’augmentation du prix de l’essence, il a aussi exigé des négociations sur les salaires.
    Les classes populaires se sentent de nouveau abandonnées par les partis politiques trop préoccupé à l’heure actuelle par les élections qui approchent vite. Le gouvernement semble lâcher du lest sur les questions très sensibles qui touche les produits de première nécessité. Par contre il a accéléré la cadence des réformes : secteur bancaire et financier, code des investissements, code fiscal, et libéralisation de l’agricole, des services et des marchés publiques…

    En guise de conclusion

    Les classes populaires et la jeunesse ont réussi, grâce à leur insurrection révolutionnaire, à briser leurs chaînes. Mais, presque quatre ans après la fin de la dictature leurs conditions de vie se sont dégradées. Aucune amélioration de l’emploi ou bien du pouvoir d’achat n’est attendue.
    L’avenir proche va dépendre du résultat des élections. Le pire sera le retour des islamistes au gouvernement, l’idéal sera une victoire électorale du FP.
    Enfin, la restauration de l’ancien système, dans les mois à venir, est peu probable. Par contre, une nouvelle victoire révolutionnaire est fort possible. Tout dépendra de la capacité du mouvement révolutionnaire à dépasser ses faiblesses organisationnelles et à se doter d’un programme capable de convaincre les classes laborieuses. CHAMKHI Fathi 16 juillet 2014

    Fathi Chamkhi est membre de la direction du Front populaire en tant que porte-parole de RAID, l’organisation affiliée à Attac et au Cadtm en Tunisie.

    Une version vidéo de ce texte est disponible sur https://www.dropbox.com/s/2ry15ovdz...

    Mis en ligne le 19 août 2014
     
  • Tunisie : Victoire pour les Latelec! (Cadtm)

    La détermination, le courage et la combativité des ouvrières de la filiale tunisienne de la multinationale française Latécoère-Latelec ont fini par payer.

    Sur les dix ouvrières licenciées en mars 2013, sept sont à ce jour réintégrées, dont deux suite aux 27 jours de grève de la faim d’Houda Thalji et de la déléguée syndicale UGTT Sonia Jebali.
    Une déléguée syndicale UGTT à qui la réintégration avait été proposée en mars 2014, avait alors renoncé à revenir au travail acceptant les indemnités proposées.
    Les deux déléguées UGTT, pour lesquelles la réintégration n’a malheureusement pas pu être arrachée le 15 juillet, ont par contre obtenu des indemnités de licenciement conséquentes.

    Pour obtenir cela, il a fallu près de deux ans de lutte, et 27 jours de grève de la faim !

    Pour mémoire, LATelec est la filiale tunisienne de Latécoère, multinationale française qui fournit en équipements les grands avionneurs mondiaux comme Airbus ou Dassault. Elle emploie plus de 80 % de femmes.

    Lorsque Latécoère-Latelec avait délocalisé en 2005 une partie de sa production de câblage dans la banlieue de Tunis, elle espérait trouver une main d’œuvre qualifiée et sensée docile, puisque féminine. Elle souhaitait ainsi conserver une exigence de qualité, tout en réduisant de façon considérable ses coûts de fabrication grâce à des salaires mensuels d’environ 150 euros.


    Mais Latécoère-Latelec s’est heurté à la détermination des salarié-es qui ont commencé à se rebeller contre les conditions de travail difficiles, les heures supplémentaires imposées et non payées, le harcèlement sexuel, et les insultes sexistes. Elles ont alors patiemment créé un syndicat UGTT
    (Union générale tunisienne du travail) qui a été légalisé après la chute de Ben Ali.

    Les ouvrières ont obtenu des augmentations de salaire, la reconnaissance de leurs droits à des congés, un respect accru. C’en était trop pour les dirigeants qui ont organisé un lock-out, transférant temporairement la production en France. Ils cherchaient ainsi à mettre en concurrence les salariés du Nord et les salariés du Sud. Simultanément, ils n’ont pas renouvelé le contrat d’environ 200 salariées temporaires.

    Début 2013, à l’occasion du FSM (Forum social mondial) un comité de soutien se met en place sous l’impulsion de féministes, regroupant notamment des militant-e-s syndicalistes, altermondialistes et féministes. Une manifestation a lieu devant l’Ambassade de France. Puis alors que la solidarité internationale s’organise, dix titulaires dont trois déléguées syndicales sont licenciées contre l’avis de l’Inspection du travail. A Toulouse, « cité de l’aviation », la solidarité s’organise aussi avec des actions concomitantes du Comité de soutien à la lutte du peuple tunisien (CSLPT) et plusieurs structures de la CGT, dont la CGT-Latécoère.

    Après des mois de luttes, la direction de LATelec a concédé en mars 2014 une première avancée : une partie des travailleuses étaient réintégrées mais quatre restaient licenciées, parmi elles les deux déléguées syndicales UGTT Monia Dridi et Sonia Jebali.

    Ne se résignant pas à voir le droit du travail tunisien ainsi bafoué par la multinationale, Houda et Sonia ont entamé le 19 juin 2014 une grève de la faim pour que toutes les travailleuses injustement licenciées puissent être réintégrées. Soutenues par les salarié-e-s de l’entreprise qui ont organisé des
    débrayages et des grèves, les ouvrières en lutte ont obtenu le soutien sans faille de multiples association tunisiennes.

    Des militant-e-s, notamment, de l’Union des diplômés-chômeurs (UDC), du syndicat étudiant UGET, de l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD), du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES), de Moussawet et Horra, etc..., se sont regroupé-e-s en Tunisie dans un comité de soutien qui les a accompagnées quotidiennement dans leur courageuse
    lutte.

    Par leur lutte ces salariées rappellent que les salarié-es ont le droit d’avoir un syndicat, ont le droit de revendiquer des conditions de travail correctes. Ainsi, le patronat ne peut pas impunément bafouer le droit du travail du pays où il délocalise une activité, ainsi que les normes internationales en vigueur.

    Mais malgré la réintégration de deux ouvrières supplémentaires dans l’usine, la lutte n’est pas termi- née. En effet, en maintenant le licenciement des deux principales déleguées, la direction a porté un coup grave au syndicat UGTT : elle peut être tentée de reprendre ce qu’elle avait été contrainte de lâcher antérieurement.

    Les salarié-e-s de Latelec-Tunisie auront donc encore plus besoin du soutien du mouvement syndical et associatif. Comme nous avons cherché à le faire depuis près de deux ans, nous continuerons donc à être disponibles à leurs demandes.

    Ce que ces salariées ont démontré est formidable :

    - Une détermination sans faille peut faire reculer le patronat, même puissant, dans un pays où le taux de chômage est élevé et le taux d’activité des femmes faible.


    - Les patrons, notamment des multinationales qui profitent des salaires très bas du Sud, et qui en Tunisie bénéficient d’avantages fiscaux considérables, doivent désormais accepter qu’une page se tourne. Ils ne peuvent plus se comporter comme au temps des colonies, ou comme sous une
    dictature bienveillante à leur égard comme l’était celle de Ben Ali


    - Cette lutte est aussi un exemple de ce que peut permettre la solidarité internationale, entre autres dénoncer les pratiques d’un autre âge d’une entreprise française par le biais d’une filiale.
    - Enfin, cette lutte montre la détermination et la capacité des femmes à se mobiliser quand elles sont touchées dans leur dignité et quand elles réclament leur juste droit.

    Le 16 juillet 2014

    Comité de soutien aux syndicalistes de Latelec-Fouchana
    https://www.facebook.com/ComiteSout...

    http://cadtm.org/Tunisie-VICTOIRE-POUR-LES-LATELEC