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LGBT - Page 2

  • Un couple de réfugiés syriens gays construit un nouvel avenir en Allemagne (Amnesty)

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    Photo de la banderolle des camarades allemands de "Die Linke"

    Said et Jamal ont fui la Syrie après avoir été torturés en raison de leur engagement politique. Ils viennent de démarrer une nouvelle vie à Berlin, la capitale allemande, où ils ont été accueillis au titre de la réinstallation.

    « Nous avons pleuré de joie, déclare Jamal* en évoquant le moment où lui et Said*, son compagnon, ont appris que l'Allemagne leur ouvrait ses portes.

    « Ça a été un moment de bonheur. Nous avons été surpris d'être rapidement acceptés pour une réinstallation, [après seulement] six mois. »

    Said et Jamal ont eu de la chance. Beaucoup d'autres réfugiés qui peuvent prétendre à la réinstallation attendent bien plus longtemps l'appel téléphonique décisif annonçant qu'ils peuvent s'installer pour de bon dans un lieu sûr et en paix.

    Un nouveau chez-soi à Berlin

    Nous trouvons Said et Jamal au milieu des cartons et des meubles, en train de déballer leurs affaires et de s'organiser dans leur nouvel appartement. Leur soulagement est perceptible, ils rayonnent de bonheur : cela fait bien longtemps qu'ils n'avaient pas eu un lieu où s'installer.

    Tous deux étaient journalistes en Syrie. Engagés en politique, ils ont été arrêtés par les forces de sécurité, puis torturés. Il était trop dangereux de rester, et ils ont fui au Liban en 2014.

    Mais Jamal, qui est séropositif, ne pouvait pas obtenir dans ce pays le traitement dont il a besoin. En janvier 2015, le HCR, l'Agence des Nations unies pour les réfugiés, leur a tendu une planche de salut. On leur a proposé un accueil à Berlin dans le cadre du programme d'admission à titre humanitaire des réfugiés syriens mis en place par l'Allemagne.

    Comme une famille

    « Nous avons quitté le Liban le 8 janvier 2015, explique Said. Il faisait si froid quand nous avons débarqué de l'avion ! » « Nous étions à la fois très impatients et inquiets, se souvient Jamal. Nous ne savions pas ce qui nous attendait. Nous nous étions préparés pour tout. »

    Après avoir passé 12 jours dans un centre de transit pour réfugiés, les deux hommes ont été placés dans un Wohnheim, un foyer d'hébergement pour les familles et les jeunes. « Nous avions notre propre appartement, explique Jamal, ils nous ont pris en compte comme une famille, pas comme deux adultes isolés. Nous avons eu vraiment de la chance ! »

    Ils ont décidé de partir au bout de neuf mois parce qu'ils ne sentaient pas à l'aise. « Une personne qui suivait les cours d'allemand avec moi savait que j'étais gay et l'a dit à nos voisins », explique Jamal.

    Ils ont fait une demande d'appartement et ont dû avoir de nombreux entretiens avec leur assistante sociale. Ils ont fini par obtenir l'aide d'une organisation de soutien aux personnes vivant avec le VIH.

    Construire une nouvelle vie

    Lorsqu'ils sont arrivés en Allemagne, Jamal craignait de se trouver à court du traitement antirétroviral dont il a besoin pour rester en bonne santé. Maintenant qu'il est pris en charge par un médecin, il peut se consacrer à d'autres choses, par exemple à apprendre la langue. Said dit en plaisantant qu'il est jaloux de Jamal, qui apprend l'allemand à toute vitesse.

    Tous deux suivent des cours cinq jours par semaine et doivent valider le premier niveau avant de pouvoir postuler à un emploi. En attendant, ils font un peu de journalisme en ligne – sans être payés pour le moment.

    Ils ont de nouveau une vie sociale, et c'est une vraie délivrance après le stress de plusieurs années à fuir. « Ça a été l'une des choses les plus difficiles, nous dit Jamal. Il faut beaucoup de temps pour établir la confiance. Mais nous nous sommes déjà fait de bons amis – des Allemands, des Israéliens et des Norvégiens. »

    Et tous deux apprécient beaucoup Berlin, une ville accueillante où l'on peut vivre ouvertement son homosexualité. « C'est si différent du Liban ou de la Syrie, dit Jamal. Au Liban il y a deux clubs [gays], mais c'est illégal [d'être homo]. »

    Donner quelque chose en retour

    Pour le moment, Said et Jamal ne pensent qu'à construire leur avenir, et pour commencer, à terminer leurs études universitaires. « J'aimerais bien aussi m'engager dans un parti politique ici, nous dit Said. En Syrie, nous étions militants et nous avons participé aux manifestations [du début 2011, à l'époque où le conflit a éclaté.] »

    « Je veux travailler avec d'autres réfugiés installés à Berlin, déclare Jamal. Je suis réfugié, alors je sais ce dont ils ont besoin. Ce serait vraiment bien de pouvoir aider les autres de la même façon que moi j'ai été aidé. »

    « La plupart des Syriens qui arrivent ici ont des problèmes psychologiques en raison de ce qu'ils ont vécu, ajoute Said. Ils ont le sentiment d'avoir tout perdu : leurs amis, leur famille, leur travail – leur vie. »

    Jamal explique que certains réfugiés ont peur et préfèrent ne pas révéler leur orientation sexuelle ou leur éventuelle séropositivité. « Et s'ils ne disent rien, ils ne peuvent pas être aidés. Nous pourrions intervenir par exemple en assurant la traduction pour des gens qui ont à parler de choses délicates. Vous imaginez la situation si je ne pouvais pas parler de mes problèmes de santé ? Ce serait catastrophique. »

    La réinstallation a donné à Said et Jamal la possibilité de commencer à reconstruire la vie qu'ils ont été contraints de laisser derrière eux en Syrie. « Nous voulons travailler, être indépendants, avoir un bon travail et un salaire, expliquent-ils. Comme avant. »

    *Les noms des deux hommes ont été modifiés pour protéger leur anonymat.

    Actuellement, plus de 4 millions de réfugiés de Syrie ont trouvé abri dans seulement cinq pays de la région voisine. Amnesty demande que 400 000 d'entre eux, ceux que le HCR considère comme les plus vulnérables, soient réinstallés dans des pays riches d'ici à la fin de l'année 2016. La réinstallation est une planche de salut pour les réfugiés les plus vulnérables dans le monde, notamment les personnes avec de graves problèmes de santé. Nous estimons que 1,45 million de personnes auront besoin de cette protection vitale d'ici à la fin de 2017.

    Lorna Hayes and Khairunissa Dhala, Amnesty International's Refugee and Migrants' Rights Team,

    https://www.amnesty.org/fr/latest/campaigns/gay-syrian-refugees-build-future-germany

  • Maroc, pays de l’hypocrisie et de la violence machiste et d’État ! (Emancipation)

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    Que la prostitution soit pratique courante dans un pays où la sexualité est fortement encadrée par une morale religieuse et sociale des plus obtuses et hypocrites, pour toute personne ayant vécu au Maroc est une évidence.

    Dès leur plus jeune âge, les filles mais aussi les garçons issuEs des classes les plus pauvres n’ont que ce seul recours pour subsister… pour le plus grand plaisir d’une masse d’hommes qui en profitent plus que couramment !!!

    Mais qu’un film ose mettre sur la place publique – et internationale, qui plus est ! – la réalité marocaine dans ce domaine et tous les démons machistes se déchaînent. Loubda Abidar, l’actrice qui joue le rôle de l’une des prostituées du film Much loved , de Nabil Ayouch, l’a appris à ses dépens.

    Dans une lettre ouverte, publiée par Le Monde , en date du 12/11/2015, elle dénonce la censure conservatrice de l’État : le film a été interdit “avant même que la production demande l’autorisation, de le diffuser”[par]“un ministre qui ne [l’] avait même pas vu”, dit-elle.

    Alors, prolifèrent sur les réseaux sociaux insultes et menaces – orchestrées par les forces réactionnaires du pays – qui l’amènent à se cloîtrer chez elle puis à sortir en burka et qui se terminent par une folie barbare de jeunes en goguette qui la forcent à monter dans leur voiture. Quoi de plus héroïque que d’enlever, rouer de coups de pieds au visage et sur tout le corps une “sale pute” de ciné ? Quoi de plus glorieux que des policiers qui se moquent de la victime lorsqu’elle veut porter plainte et qui – après publication de sa lettre ouverte – portent plainte pour diffamation ?

    Loubda Abidar n’est pas seulement une “sale pute”, c’est aussi une mauvaise Marocaine : elle a quitté son pays pour s’installer en France. À croire que ce pays dont le roi a voulu, dès 2003, donner aux femmes un statut personnel plus progressiste que celui de la plupart des pays musulmans est rattrapé par les forces conservatrices les plus arriérées, à l’instar de certains autres royaumes proches-orientaux !

    Eliane Paul-Di Vincenzo mardi 22 décembre 2015

    http://www.emancipation.fr/spip.php?article1208

  • Tunisie : cessez de punir les victimes (Amnesty)

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    La Tunisie a la réputation de montrer l'exemple en matière de droits des femmes et d'égalité des genres dans la région, mais cette renommée sonne creux quand on sait que la législation du pays permet encore aux violeurs de s'en sortir en toute impunité.

    Elle a été violée. Pour protéger son honneur, elle doit désormais épouser son violeur.

    Il a été agressé et maintenant il est accusé de sodomie.

    En Tunisie, si vous êtes victime de violences sexuelles, vous risquez d'être également la cible de sanctions tandis que votre agresseur reste impuni.

    Bien trop souvent, la législation manque à tous ses devoirs envers vous. Bien trop souvent, on vous dit de prendre sur vous pour supporter un mari violent. Bien trop souvent, vous n'avez personne vers qui vous tourner pour obtenir de l'aide. Bien trop souvent, on vous dit d'assumer.

    Et vous, la victime, vous qui avez survécu, vous vous retrouvez livré(e) à vous-même. Vous avez survécu au crime, et maintenant vous êtes victime de la loi.

    Ce n'est pas ce que l'on pourrait attendre d'un pays qui se targue de montrer l'exemple en matière de droits des femmes et d'égalité des genres dans le monde Arabe. Après tout, la Tunisie a légalisé l'avortement sur demande en 1973, soit deux ans avant la France.

    Mais en réalité, la belle réussite de la Tunisie est une histoire inachevée. Des failles dans la législation permettent encore aux violeurs de ne pas être inquiétés pour leurs crimes, des femmes violées par leur mari ne disposent d'aucune protection juridique et les rapports sexuels entre hommes ou entre femmes sont toujours illégaux. Ne serait-il pas temps que la Tunisie cesse d'accuser les victimes et commence à se pencher sur les failles de sa législation ?

    Une violence omniprésente à l'égard les femmes

    Selon une étude menée en 2010 par le ministère tunisien de la Santé, près de la moitié des femmes en Tunisie ont déjà subi des violences ; 15,7 % d'entre elles ont été victimes de violences sexuelles. Si l'on tient compte de la réticence bien réelle de nombreuses femmes à parler de la violence sexuelle de crainte d'être mises au ban de leur famille et de leur communauté, les véritables chiffres sont probablement bien plus élevés.

    L'enquête a également révélé que les violences familiales et conjugales étaient de loin les plus répandues. Pourtant, la législation tunisienne ne reconnaît pas le viol conjugal. En outre, la loi permet encore aux violeurs d'éviter les poursuites en épousant leur victime adolescente - une faille juridique qui a récemment disparu des textes de loi au Maroc.

    Les victimes de violences familiales s'entendent souvent dire par la police, ou même par leurs proches, qu'elles doivent « faire avec » ou « assumer [leurs] responsabilités », comme si les femmes devaient accepter que leur mari les violente.

    Les femmes censées supporter la violence

    Malgré de nombreuses grandes avancées en faveur des femmes en Tunisie, les comportements discriminatoires persistent. Les rapports sexuels sont considérés comme un devoir conjugal à la fois pour les hommes et pour les femmes mais, en réalité, cela signifie surtout que les femmes ont l'impression de devoir se soumettre aux exigences de leur mari.

    Une femme a déclaré à Amnesty International : « Dire non n'est pas une option, il n'aime pas ça, alors quel que soit mon état, que je sois fatiguée ou malade, je n'ai pas le choix. Si je dis non, il me force et me bat - jusqu'à ce qu'il obtienne ce qu'il veut. » 

    Même si elle le souhaite, une femme aura du mal à dénoncer un viol commis sur elle par son mari car le viol conjugal n'est pas reconnu dans le droit tunisien. Les femmes engagées dans une relation avec un partenaire violent ne sont pas mieux loties : la police rechigne à prendre leurs plaintes au sérieux. 

    Une femme d'une quarantaine d'années a décrit à Amnesty International la manière dont son mari l'a rouée de coups un jour : « Quand nous sommes entrés dans la maison, il a commencé à me donner des coups de poing sur la tête et au visage et à me frapper avec sa chaussure. J'avais un œil au beurre noir », a-t-elle expliqué. Mais tenter de signaler cet épisode à la police ne l'a menée nulle part. 

    « J'ai porté plainte au poste de police et j'ai obtenu un certificat médical, après quoi la police a convoqué mon mari. Mais le policier était l'un de ses amis et il ne s'est rien passé. Tout ce que la police a fait, c'est lui dire de penser aux enfants. »

    Violé et accusé

    La réaction de la police face aux femmes est déjà loin d'être satisfaisante, mais lorsque vous êtes homosexuel et avez des relations sexuelles avec un homme, ce qui est illégal en Tunisie, la discrimination à laquelle vous êtes confronté est tout aussi forte, voire pire.

    Fin 2009, Hedi, 37 ans, a été arrêté et poursuivi pour relations sexuelles avec une personne du même sexe après qu'il eut signalé une agression. Il avait été poussé dans sa voiture par trois hommes alors qu'il quittait le domicile d'un ami. L'un des hommes l'a violé et son téléphone et son argent lui ont été dérobés. La police a demandé à Hedi de signer une déclaration.

    Distrait par l'arrivé de ses parents au poste de police, il a signé le document sans le lire. « J'ai été arrêté et placé dans une cellule », a-t-il déclaré. « Les trois hommes qui m'avaient agressé y ont eux aussi été placés. »

    Hedi a expliqué à Amnesty International que sa déclaration avait été modifiée et indiquait qu'il avait accepté d'avoir des relations sexuelles avec les trois hommes. Il a été condamné à six mois de prison mais libéré quatre mois plus tard, après que sa peine eut été réduite en appel.

    La riposte

    La situation n'est pas complètement noire. Les Tunisiens réclament déjà des changements législatifs afin d'en finir pour de bon avec les violences liées au genre et les violences sexuelles.

    L'affaire qui a tout déclenché, c'est celle de Meriem Ben Mohamed. En 2012, elle a été inculpée d'« atteinte aux bonnes mœurs » après avoir porté plainte contre deux policiers qui l'avaient violée.

    Les Tunisiens, scandalisés, se sont tournés vers les médias sociaux et sont descendus dans les rues pour protester jusqu'à ce que les charges soient abandonnées et les policiers traduits en justice. Grâce au soutien de l'opinion publique et de sa famille, Meriem a obtenu justice. En 2014, les policiers ont été condamnés à 15 ans de prison, une issue sans précédent dans une telle affaire.

    Plus récemment, le public s'est fédéré autour du cas de « Marwan », un étudiant de 22 ans condamné pour sodomie en septembre 2015 et dont le procès en appel est en cours.

    Le concert de protestations, au premier rang duquel se trouvent les militants tunisiens en faveur des droits des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées (LGBTI), soutenus par des militants des droits humains et des droits des femmes dans le pays et à l'étranger, a poussé les autorités à se réveiller et à prêter attention à la situation.

    C'est le meilleur moment pour que des personnes du monde entier s'allient aux militants tunisiens en relayant leur message. Avec une impulsion supplémentaire, les changements sont à portée de main.

    Il est temps pour la Tunisie de ne plus laisser les violeurs s’en sortir, de cesser de prétendre que le viol conjugal n’est pas un viol, de cesser d’emprisonner des hommes parce qu’ils sont homosexuels. On dit aux victimes de violences sexuelles et liées au genre de « faire avec », mais n’est-il pas temps pour les autorités tunisiennes d'assumer leurs responsabilités ?

    En août 2014, les autorités ont promis de protéger et de soutenir les victimes de ce type de crimes. Il est désormais temps pour la Tunisie de marquer l'histoire en tenant cette promesse.

    https://www.amnesty.org/fr/latest/campaigns/2015/12/my-body-my-rights-tunisia/ 

  • Il faut combattre les tabous homophobes en Tunisie (Amnesty)

    La condamnation d’un étudiant de 22 ans à un an de prison pour «relations homosexuelles»  aura au moins eu le mérite douvrir enfin le débat sur ce sujet en Tunisie. Lundi 28 septembre 2015, dans une déclaration sans précédent, le ministre de la Justice Mohamed Salah Ben Aissa a appelé publiquement à la dépénalisation des relations homosexuelles.

    Le jeune étudiant, connu sous le pseudonyme de Marwan, a été condamné par un tribunal de Sousse le 23 septembre, après avoir subi un examen anal forcé destiné à « prouver » sa pratique de la sodomie.

    Le 6 septembre 2015, Marwan avait été convoqué par la police en lien avec le meurtre dun homme commis à Sousse. Il a nié toute implication dans ce meurtre, mais a reconnu avoir eu des relations sexuelles avec la victime, semble-t-il après que les policiers leurent menacé de linculper du meurtre. Il a alors été inculpé de « sodomie » en vertu de larticle 230 du Code pénal, qui prévoit pour cette infraction une peine pouvant aller jusquà trois ans de prison. Ce même article érige aussi en infraction le « lesbianisme », même sil est rarement utilisé pour arrêter des femmes lesbiennes.

    Les militants LGTBI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués) de Tunisie se sont vite emparés du cas de Marwan. Ces groupes sont de plus en plus actifs depuis quelques mois, enhardis par larrivée au pouvoir dun nouveau gouvernement de coalition plus progressiste. Ils font campagne contre la criminalisation des relations homosexuelles entre personnes consentantes, soulignant que celle-ci porte atteinte à deux droits fondamentaux garantis par la nouvelle Constitution tunisienne : le droit au respect de la vie privée et le droit de ne pas subir de discrimination.

    Certains groupes ont même lancé une campagne en ligne demandant quil ne soit plus pratiqué dexamens anaux forcés – une initiative sans précédent en Tunisie.

    Dans une interview accordée aux médias quelques jours après la condamnation de Marwan, le ministre de la Justice, Mohamed Salah Ben Aissa, a reconnu que larticle 230 violait le droit au respect de la vie privée garanti par la Constitution et devait être abrogé. Les défenseurs des droits humains tunisiens doivent profiter de cette dynamique pour faire évoluer le discours sur lhomosexualité en Tunisie, afin que les paroles se traduisent en actes.

    Malheureusement, le cas de Marwan est loin d’être isolé. Dans le cadre de sa campagne contre les violences sexuelles et la violence liée au genre en Tunisie, Amnesty International a récemment recueilli des informations sur plusieurs cas dhommes gays ayant été arrêtés, placés en détention et poursuivis entre 2009 et 2014 – sans compter les nombreux autres cas qui, daprès les militants, ne sont pas signalés.

    Des gays tunisiens ont raconté à Amnesty International avoir été interpelés simplement parce qu’ils avaient l’air « efféminés » ou parce quon les avait vus parler à un autre homme dans un quartier connu par la police pour être fréquenté par des gays. Comme Marwan, beaucoup ont été arrêtés sans preuves et contraints de subir un examen anal destiné à prouver la sodomie, bien que la fiabilité de ce type dexamen invasif ne soit pas scientifiquement prouvée. Amnesty International considère que les examens anaux forcés constituent une forme de torture ou dautre mauvais traitement.

    Des personnes transgenres ont également dit à l’organisation quelles avaient été arrêtées et poursuivies pour atteinte à la moralité publique simplement parce quelles ne se conformaient pas aux stéréotypes de genre et aux normes sociales en vigueur.

    Toutefois, les répercussions de ces lois vont bien au-delà du risque permanent darrestation et de poursuites. Partout dans le monde, la criminalisation des relations entre personnes de même sexe favorise la violence contre les LGBTI et crée un climat permissif qui les rend vulnérables aux violences policières, ainsi quaux actes de harcèlement et dintimidation au sein de leur famille et de leur milieu de vie. Malheureusement, la Tunisie ne fait pas exception à la règle.

    Amnesty International a rencontré des personnes LGBTI qui avaient reçu des coups de couteau, des coups de pied dans la tête, des brûlures de cigarette et des menaces de mort en raison de leur identité de genre ou de leur orientation sexuelle. Or, bien souvent, la police a rejeté ou ignoré leurs plaintes à cause des dispositions de larticle 230.

    Dans certains cas, au lieu de mener une enquête en bonne et due forme sur ces crimes homophobes et transphobes – conformément à leurs obligations aux termes du droit international – les policiers ont ouvertement adressé des avertissements ou des menaces aux victimes (y compris à des lesbiennes) pour les inciter à retirer leur plainte sous peine dêtre elles-mêmes poursuivies. Dans dautre cas, ils ont profité de la peur des poursuites pour soumettre des personnes LGBTI à du chantage, des manœuvres dextorsion et, parfois, des atteintes sexuelles. Les gays et les personnes transgenres qui ne veulent pas être arrêtés sont souvent obligés de verser des pots-de-vin aux policiers et de leur donner leur téléphone ou dautres objets de valeur.

    En conséquence, les victimes LGBTI de viol ou dautres agressions sexuelles sont souvent réticentes à se faire connaître et à signaler ces actes à la police.

    Les lois qui érigent en infraction les relations homosexuelles entre personnes consentantes, en Tunisie ou ailleurs, sont contraires au droit international et aux normes internationales relatifs aux droits humains.

    Avec cette récente ouverture dun véritable débat public sur les droits des LGBTI, la Tunisie semble enfin faire de petits pas – petits mais essentiels – dans la bonne direction, faisant naître une lueur despoir.

    Toutefois, ce nest quen abrogeant larticle 230 du Code pénal et en dépénalisant une bonne fois pour toutes les relations consenties entre personnes de même sexe que les autorités tunisiennes pourront espérer offrir une protection suffisante contre la violence et la discrimination. Elles doivent immédiatement libérer Marwan et sengager dans un processus de réforme législative afin que plus personne ne soit arrêté ni poursuivi en raison de son identité de genre ou de son orientation sexuelle.

    Cet article a été initialement publié sur le site du Huffington Post Maghreb.

    30 septembre 2015

    https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2015/09/challenging-tunisias-homophobic-taboos/

  • Maroc : L’homosexualité illégale ! (Lcr.be)

     

    Deux hommes accusés de s’être embrassés en public début juin sur un site historique de Rabat ont été condamnés vendredi 19 juin à quatre mois de prison ferme. Lahcen, 38 ans, et Mohsine, 25 ans, qui étaient poursuivis pour « outrage public à la pudeur » et « acte contre nature avec un individu du même sexe », ont également écopé d’une amende de 500 dirhams chacun (environ 45 euros – salaire moyen : 300 euros).

     

    L’article 489 du code pénal marocain punit ce qu’il appelle les actes « impudiques ou contre nature » d’une peine pouvant aller jusqu’à trois ans de prison ferme. C’est d’ailleurs ce dont avaient écopé il y a un mois trois hommes également poursuivis pour homosexualité, après avoir été dénoncés par des voisins. Pourtant « Toute personne a droit à la protection de sa vie privée », stipule la Constitution du Maroc adoptée en 2011…

     

    Cette condamnation a eu lieu malgré la mobilisation du collectif Aswat pour la défense des homosexuels au Maroc. Une pétition en ligne réclamant la libération de Lahcen et Mohsine a recueilli près de 75 000 signatures. Sur son compte Facebook, Aswat expliquait que le juge a refusé la libération conditionnelle que réclamaient les avocats de Lahcen et Mohsine pour plusieurs vices de procédure : des aveux qui « leur auraient été arrachés suite à des violences physiques et morales durant l’interrogatoire », et « l’atteinte au principe du secret de la procédure judiciaire », leurs photos et leurs identités ayant été divulguées dans la presse.

     

    Ce lundi 22 juin, les autorités marocaines auraient aussi arrêté une vingtaine d’homosexuels et de travestis dans la région d’Agadir. Ces derniers sont poursuivis…

     

    Source : NPA

    10 juillet 2015

    http://www.lcr-lagauche.org/maroc-lhomosexualite-illegale%E2%80%89/

  • Rhabillons les Femen ! Une réponse féministe marocaine (Orient 21)

    Le 2 juin dernier, deux Femen françaises, seins nus, s’embrassaient sur l’esplanade de la tour Hassan à Rabat, prétendant manifester de la sorte leur solidarité avec la communauté LGBT marocaine.

    Si certains militant-e-s et féministes ont pu y voir un geste fort anti-homophobie et anti-patriarcat, d’autres dénoncent une attitude paternaliste et post-coloniale qui ne peut que nuire aux luttes d’émancipation menées au Maroc par les femmes et les groupes marginalisés.

    Deux activistes des Femen ont débarqué mardi 2 juin à Rabat pour une action seins nus sur la très symbolique esplanade de la tour Hassan. Le poing levé, c’est en se donnant en spectacle dans un baiser «  intersexe  » que ces deux activistes ont entendu manifester leur solidarité avec le groupe LGBT (Lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) au Maroc. Cette petite escapade en «  terre d’Arabie  » qui marque la première venue des Femen au Maroc a été interprété par certaines féministes progressistes et par certains militants LGBT comme un geste fort censé venir éclairer nos sociétés archaïques et sauver nos mentalités dégénérées par l’homophobie et le patriarcat arabe.

    Pourtant, ce qu’expriment les actions éclair des Femen qui «  font le buzz  » n’est rien d’autre qu’un mépris envers toutes les femmes qui luttent depuis des années au sein de la société marocaine. C’est de ces femmes-là que l’on devrait normalement parler. Celles qui militent au grand jour, mais aussi celles qui décident de lutter dans l’ombre, celles qui refusent même, parfois, de se définir féministes mais qui sont de fait des femmes qui se battent au quotidien dans la société marocaine.

    Il serait bon de rappeler aux quelques défenseurs marocains des actions des Femen que ce groupe d’activistes n’est en rien représentatif de la cause féministe. Il en est même la manifestation la plus dévoyée et la plus odieuse. D’ailleurs, de nombreuses féministes, y compris occidentales, dénoncent le caractère islamophobe et impérialiste de leurs actions. Deux critiques majeures sont à retenir. Premièrement, ce groupe d’activistes instrumentalise le corps des femmes en exhibant des plastiques qui répondent complaisamment et en tous points aux standards imposés par les canons de beautés eurocentrés. Deuxièmement, en imposant leurs agendas politiques sans concertation ni même prise en compte des stratégies internes et propres aux dynamiques des différentes luttes existantes au Maroc, elles participent à monopoliser et à façonner un débat déconnecté des réalités locales.

    Si les critiques fusent à l’encontre des Femen, c’est bien parce que bon nombre de féministes s’insurgent de la direction qu’elles font prendre à la cause des femmes en général. Ces critiques ne sont pas l’expression d’un archaïsme  ; elles témoignent en réalité de l’effervescence des féminismes qui s’inventent et se pratiquent de par le monde. Aujourd’hui, un feminism of color existe, de même qu’un «  féminisme islamique  », et bon nombre de féministes du Nord dénoncent elles aussi le racisme structurel induit par ce type de discours qui infériorise, au nom de la liberté des femmes, les sociétés post-colonisées. En créant l’image d’une communauté musulmane minée par le «  patriarcat arabe  », les Femen produisent un discours qui réduit les rapports de force à une sorte de pathologie culturelle.

    Plus grave encore, en imposant un discours essentialisant, les Femen tentent également d’imposer des pratiques de résistance. Avec leur guide de bonnes pratiques militantes, elles ne font que reproduire un discours paternaliste tout à fait insupportable à toute personne qui entend s’inscrire dans une lutte pour l’émancipation. Les actions paternalistes, de type Femen, qui bénéficient, usent, et abusent du white privilege (privilège blanc) ne peuvent qu’engendrer des dégâts néfastes à toute possibilité d’instauration d’un dialogue social autour de questions aussi épineuses que celle de la dépénalisation des pratiques sexuelles — en particulier homosexuelles —, au Maroc. En effet, ce type d’action qui instrumentalise la question des libertés individuelles participe à dépolitiser les questions sociales, notamment en refusant de pointer les causes politico-structurelles à l’œuvre dans la criminalisation des mœurs, au profit d’un mépris sociétal et d’un discours pathogène.

    Toutefois, en dépit de tous les efforts déployés par des groupes assimilés à l’hégémonie occidentale, une alternative s’organise. Il est important de savoir qu’existe une pluralité de voix issues des sociétés post-colonisées, qui dialoguent et essaient de trouver leur propre voie d’autonomie. Elles donnent du courage, car bon nombre de défenseurs du féminisme «  va-t-en-guerre  » pensent que tout ce qui ne répond pas aux critères érigés par un féminisme eurocentré est une offense à la cause des femmes et une défense du patriarcat. Et ils sont nombreux et surtout ils (ou elles) sont ceux qui ont le pouvoir, tant médiatique que politique.

    À ces critiques, il faut simplement oser dire non  !

    Il faut oser dire, que nous, femmes marocaines, nous ne voulons plus être le bras droit d’un féminisme qui se veut prétexte à une réduction de l’homme arabe au patriarcat.

    Il faut oser affirmer que ce type de féminisme laïcard, éradicateur, exprime non seulement un mépris de classe repris par certaines de nos élites progressistes, mais surtout qu’il infériorise notre culture en niant totalement les expressions complexes et diverses des résistances des femmes qui s’expriment et se pratiquent constamment dans le quotidien marocain.

    Il est temps d’oser affirmer que nous avons le pouvoir et le devoir de ne pas vouloir que la cause des femmes soit le prétexte à des discours impérialistes, directement empruntés aux discours coloniaux. Des discours utilisés pour justifier les interventions étrangères et les politiques islamophobes qui affectent négativement toute la diaspora maghrébine en Europe.

    Et, pour ce qui est de notre émancipation, que les féministes du Nord cessent de s’inquiéter : on s’en charge  !

     
    Soraya El-Kahlaoui  16 juin 2015
    Doctorante en sociologie à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et contributrice pour Le Monde Afrique.

    http://orientxxi.info/magazine/rhabillons-les-femen,0936
  • Egypte : Répression accrue de l’homosexualité sous le régime de Sissi (Afriques en lutte)

    « Maintenant, même à la maison tu as peur », s’alarme Hassan Shérif, un jeune Egyptien gay dont la crainte d’être inquiété par les autorités a décuplé depuis l’arrestation dans un hammam du Caire de 26 hommes soupçonnés d’homosexualité et poursuivis pour « débauche ».

    Habitués à se faire discret dans un pays où seul 3% de la population estime que « la société doit accepter l’homosexualité » –selon un sondage publié en 2013 par le centre de recherches américain Pew–, ce médecin de 32 ans redoute d’être à son tour victime de la répression ciblant la communauté gay.

    Cette chasse aux sorcières s’est intensifiée depuis que l’ex-chef de l’armée et actuel président Abdel Fattah al-Sissi a destitué l’islamiste Mohamed Morsi en juillet 2013.

    « Nous vivons constamment dans la peur et l’angoisse. De toute ma vie, je n’ai jamais ressenti ça », poursuit M. Shérif, qui habite un appartement du Caire avec son compagnon et s’exprime sous un pseudonyme.

    Les images de la dernière descente policière, diffusées sur une chaîne de télévision privée et montrant les prévenus à moitié nus, portant seulement leurs sous-vêtements, le hantent toujours. M. Shérif explique s’être déjà rendu dans cet établissement, mais dément les accusations « d’orgies sexuelles » lancées par les autorités et les médias.

    Arrestation médiatisée -

    Les 26 hommes arrêtés lors de ce raid du 7 décembre sont actuellement jugés pour « débauche » et une nouvelle audience du procès est prévue dimanche. La journaliste qui a filmé l’intervention, Mona Iraqi, s’était targuée d’avoir dénoncé le hammam à la police, après avoir découvert son existence au cours d’une enquête sur le sida.

    Cette affaire est loin d’être un cas isolé : fin décembre, huit hommes ont ainsi été condamnés à un an de prison après être apparus dans une vidéo filmée, selon le parquet, lors d’un « mariage gay ».

    Si la loi égyptienne n’interdit pas formellement l’homosexualité, plusieurs personnes ont été condamnées ces dernières années pour « débauche » dans des procès qui ont défrayé la chronique.

    Et dans un pays où l’homosexualité reste décriée, le gouvernement peut multiplier les exactions sans craindre l’opinion publique. L’ONG Human Rights Watch accusait en septembre les autorités d’avoir « à plusieurs reprises arrêté, torturé et détenu des hommes soupçonnés de conduite homosexuelle ».

    De nombreux gays et militants expliquent l’intensification de cette répression par la volonté du nouveau pouvoir de se montrer encore plus soucieux du respect des bonnes mœurs que les Frères musulmans, le groupe islamo-conservateur de M. Morsi, dont les sympathisants sont la cible d’une sanglante répression ayant fait plus de 1.400 morts.

    ‘Plus islamique que les islamistes’ -

    Dalia Abdel Hamid, experte de l’Initiative égyptienne pour les droits individuels (EIPR), parle ainsi de « répression systématique », alors que plus de 150 personnes ont été arrêtées depuis novembre pour des accusations de débauche ou de prostitution.

    « L’Etat essaye de prouver qu’il est plus islamique que les islamistes », avance-t-elle.

    Une position qui n’est pas pour déplaire aux autorités religieuses. « Il y a une différence entre les libertés et la décadence », assène Abbas Shoman, un représentant d’Al-Azhar, l’une des plus prestigieuses institutions théologiques de l’islam sunnite. « Si le pouvoir et le président n’interdisent pas une telle turpitude, quelle est leur fonction ? », poursuit-il.

    Dans ce contexte, les homosexuels font profil bas. « Je me souviens de l’époque où tout le monde allait aux mêmes fêtes et fréquentait les mêmes endroits (…) aujourd’hui, on reste en petit groupe », regrette M. Shérif, en couple depuis sept ans.

    De son côté, Bouthaina Halim, écrivain lesbienne de 34 ans, qui s’exprime sous un pseudonyme, juge les dernières arrestations « inquiétantes. »

    « Cela montre que nous sommes moins protégés que nous le pensons », affirme Mme Halim, qui a révélé son homosexualité à ses amis à l’âge de 18 ans.

    Pour elle, l’avenir de la communauté s’annonce « extrêmement triste ». Être gay en Egypte, « c’est une lutte constante », résume-t-elle. « Pas seulement pour nous ajuster à l’espace que nous concède l’Etat, mais aussi une lutte interne, pour réaffirmer que nous avons le droit de disposer de notre corps. »

    Source AFP 8 janvier 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/egypte/article/egypte-repression-accrue-de-l

     

  • Algérie, "El Shad", le premier magazine pour les LGBT (Courrier Inter)

    Fait inédit dans un pays où l’homosexualité est criminalisée, El Shad, magazine qui s’adresse à la communauté LGBT, est diffusé depuis le 20 novembre gratuitement sur le Net. Algérie-Focus a interviewé un de ses fondateurs.
    ALGERIE-FOCUS Pouvez-vous nous expliquer ce qui vous a amené à créer cette revue trimestrielle ? 

    O. HARIM En réalité, nous sommes trois à l'origine de ce magazine : Sapho, S. P. et moi. On a tous commencé à militer pour les droits LGBT en créant l'association Alouen en 2011. C'est ensuite que l'idée du magazine nous est venue, car nous sommes le seul pays maghrébin à ne pas en avoir. Il existe un magazine lesbien algérien, Lexo Fanzine, qui a été créé il y a longtemps par un membre d'Alouen, mais pas de magazine s'adressant à toute la communauté LGBT.

    Vous adressez-vous seulement à la communauté LGBT ou bien cherchez-vous à toucher un public plus large ? 

    Bien sûr, nous nous adressons en premier lieu à la communauté LGBT pour dire à ceux qui la composent que leur différence n'est pas une tare, que l'on est tous différents et qu'il faut s'accepter comme on est. Mais je tiens à préciser que nous ne sommes pas les porte-parole d'Alouen. Nous donnons la parole et nous nous adressons aussi à des gens qui n'appartiennent pas à la communauté LGBT, comme avec notre "ABCD de la transsexualité" dans le premier numéro de la revue. La transsexualité est une problématique sociétale qu'il faut amener à la connaissance du public algérien. Ce n'est qu'en faisant connaître ces problématiques que l'on peut faire accepter la différence.

    Pourquoi ce nom, "El Shad" ? 

    Le mot "shad" était au départ utilisé par les hétérosexuels pour désigner les homosexuels, car il signifie "anormal". Nous avons choisi ce nom car nous revendiquons cette anormalité, au même titre que tout le monde est anormal. Il est aussi anormal d'être blond, roux, blanc ou noir qu'homosexuel. Ce nom a beaucoup suscité le débat car "shad" est une insulte reprise par la presse arabophone. Mais nous voulions justement nous réapproprier ce terme dans le but de montrer aux lecteurs que "l'anormalité" est normale et que la différence est une richesse.

    Pensez-vous que votre magazine puisse trouver son public en Algérie ? 

    Si l'on n'y croyait pas, on ne l'aurait pas fait ! Ce sont des petits ruisseaux comme ce projet qui font les grandes rivières. El Shad veut parler aux lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres pour leur dire que des gens comme eux peuvent réussir. Des jeunes se suicident à cause de la pression sociétale, nous voulons que ces drames s'arrêtent. Nous sommes bien conscients que ce magazine ne va pas changer les lois et la société du jour au lendemain, mais c'est avec de petites initiatives comme celle-là que le regard des gens peut changer progressivement.

    Le premier numéro d'El Shad est sorti symboliquement le 20 novembre, Journée internationale du souvenir trans, et aborde le thème de la transsexualité. De quoi parleront les prochains numéros ? 

    El Shad est un magazine trimestriel, le deuxième numéro sortira en février. On y parlera d'amour, pour montrer que, contrairement aux clichés, l'homosexualité n'est pas qu'une histoire de sexe, mais, comme pour tous les couples, de sentiments, de tendresse, etc. Le prochain numéro sera bilingue français/arabe pour toucher un public plus large.

    Algérie-Focus Propos recueillis par Agnès Nabat30 novembre 2014 

    http://www.courrierinternational.com/article/2014/11/30/el-shad-le-premier-magazine-pour-les-lgbt-algeriens