Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

LGBT

  • Les luttes LGBTIQ, mal aimées des processus révolutionnaires arabes (NPA)

    n-LGBT-large570.jpg

    La dimension inédite atteinte par les combats des LGBTIQ dans les pays arabes est largement liée au déclenchement des processus révolutionnaires.

    Les lignes qui suivent, extraites d’un article beaucoup plus long et détaillé, tentent de décrypter l’inscription de ces luttes dans ces processus, leurs dynamiques, leur mode d’expression et d’action.

    Avant 2010, date formelle du début des processus, existaient déjà des initiatives dans la région, notamment au Liban, au Soudan, en Algérie, dans les Territoires occupés, le sultanat d’Oman, en Syrie, au Maroc ou en Tunisie, qu’il s’agisse de blogs, d’associations ou de noyaux plus ou moins clandestins. Au plan régional, Bekhsoos (« A propos »), est une revue arabe féministe et queer, un site et une page Facebook. 

    Ces initiatives étaient contemporaines de la montée d’une série de luttes qui ont débouché sur des mouvements de rue dans l’écrasante majorité des pays arabes, ou de minorités arabes (Iran).

    Les processus révolutionnaires vont voir les LGBTIQ participer aux mouvements, manifestations et initiatives de rue dans une série de pays ; à ce stade, ils et elles se joignent à titre individuel aux soulèvements et mêlent leurs voix à celles de millions de manifestant-e-s qui veulent en découdre avec les pouvoirs en place. Leurs slogans sont ceux de l’ensemble du peuple insurgé, leurs drapeaux ceux du pays en révolution, leurs espoirs ceux de voir s’effondrer des régimes despotiques et antisociaux.

    Lors de cette phase initiale des soulèvements, ils et elles ne développent pas de revendications particulières. C’est une nouvelle génération qui n’a pas connu, ni participé aux initiatives des militants LGBT de la décennie 2000, ne serait-ce qu’en raison de son extrême jeunesse. Le caractère de masse des révolutions les inclut naturellement, alors que les associations qui avaient vu le jour dans les années précédentes avaient une dynamique concernant plus des militant-e-s confiné-e-s dans des capitales ou des villes importantes.

    Une multiplicité d’expressions

    De là va naître un triple mouvement : 

    • Une série limitée de coming out individuels qui sont de fait des actes militants, que ce soit au niveau de la famille, du lycée, du quartier ou de façon médiatisée, à la télévision, la radio, les réseaux sociaux ou des autobiographies publiées dans la région.

    • Un mouvement d’expression individuel ou collectif à travers à travers des sites, blogs, pages Facebook ou hashtags (en Algérie, Arabie Saoudite, Egypte, Bahrein, Irak, Yémen, Khouzestan d’Iran, Liban, Libye, Emirats arabes unis, Soudan, Syrie, Tunisie), une revue papier clandestine (au Maroc), des revues électroniques (Tunisie, Syrie, Algérie, Soudan, Egypte) et même une radio (radio Alouen, en Algérie).

    • Et enfin, un nouvement d’action collective, qui va se dissocier partiellement de la dynamique des révolutions. Celles-ci, qui sont nées et se sont développées dans les zones les plus éloignées des centres urbains et des capitales, rassemblent chaque jour des milliers de manifestant-e-s sur des bases largement spontanées et se heurtent à mains nues à la répression des contre-révolutionnaires. Les militant-e-s LGBTIQ, s’ils et elles sont né-e-s de ce mouvement et en utilisent la symbolique (le drapeau national), ne vont pas suivre la dynamique de ces révolutions. Ils et elles vont lutter et combattre dans les villes les plus importantes, sans occuper la rue spontanément pour des raisons faciles à comprendre. Ils et elles se regroupent et s’organisent sur leurs propres bases, créent des organisations ou des associations susceptibles de porter leurs revendications.

    Le mouvement LGBTIQ est en rupture avec la spontanéité et le caractère de masse du mouvement révolutionnaire arabe, dont il est largement issu.

    Mu-e-s par la certitude que ce mouvement ne portera pas leurs revendications, que les sociétés civiles émergentes sont parfois décevantes, ils et elles comptent sur leurs propres forces pour se battre. Les LGBTIQ vont créer leurs propres structures qui organisent l’expression, l’élaboration, la défense des droits et des revendications et développent des modes d’actions extrêmement divers, sur la forme et sur le fond.

    Ne pouvant mener des actions publiques, ces organisations, non reconnues pour l’écrasante majorité d’entre elles, développent néanmoins des activités.

    Des événements comme des défilés de mode sont parfois utilisés pour arborer le drapeau arc-en-ciel, certaines associations tentent d’organiser des initiatives en ligne comme en Arabie Saoudite (janvier 2012). En Algérie, des bougies sont allumées tous les 10 octobre, dit « Ten Ten », pour mettre en lumière les LGBTIQ. L’association Bedayaa, qui travaille quasiment dans la clandestinité, vise à venir en aide, écouter et protéger les LGBT en Egypte et au Soudan. L’association Aswat, au Maroc, lance une campagne en 2013 « L’amour pour tous », puis en 2015 la campagne « L’amour n’est pas un crime », surTwitter, pour la dépénalisation de l’homosexualité et l’abrogation des articles 489 et 490 du code pénal. La campagne se fait avec la participation de militants de la société civile, notamment de l’Association marocaine des droits humains.

    Le 10 décembre 2016, anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme,  Mawjoudin, qui lutte en Tunisie pour l’égalité et les droits des  LGBTQI, lance sur le net la campagne « Hetta houni fomma mithliyyin » (Même ici il y a des homosexuels) avec le hashtag de la ville et le nom de l’association. La campagne a un écho dans toute la Tunisie et cette association participe au débat sur les LGBT à l’occasion de la « Nuit des idées », en 2017 à Tunis.

    Les LGBTIQ s’expriment sur les murs par des campagnes de graffitis, tags ou peintures murales ; au Liban, « Support Gay Rights », « Stop Homophobia », « No homophobia, racism, sexism, classism. Stand up for our rights », « Gay is OK »,  « shou fiyya ? » (Et alors ?) écrit à côté d’un dessin représentant deux hommes s’embrassant, « Arab Lesbian Liberation Front », « Queers kanou houna. Thawra » (Des queers sont passés par là, Révolution)...

    De même au Caire, en Israël et dans les territoires occupés palestiniens, en Tunisie, au Kurdistan d’Irak... Ces graffitis ne relèvent généralement pas d’initiatives individuelles improvisées, mais de campagnes initiées par des associations.

    Les revendications

    Au-delà des revendications générales du droit à l’existence, de fierté ou de liberté, viennent celles de  la décriminalisation de l’homosexualité par l’abrogation des articles du Code pénal (Maroc, Tunisie, Liban, Soudan), la suppression du recours au test anal (Liban : test supprimé dans la loi, mais en vigueur dans certains commissariats, et Tunisie), la libération de femmes trans emprisonnées (Liban), d’homosexuels incarcérés (Tunisie) ou de lesbiennes en détention préventive (Maroc), et la légalisation des associations LGBTIQ.

    Certaines associations demandent à l’Etat la prévention des MST/IST/VIH. La question du mariage homosexuel n’est généralement pas à l’ordre du jour des associations, même si leurs représentants sont souvent mis en demeure de manière peu amène de se prononcer sur le sujet. Des associations s’adressent d’abord à la société et aux LGBTIQ, d’autres pensent initier le changement par des revendications s’adressant aux pouvoirs en place ou aux institutions internationales. Shams et l’Association tunisienne de soutien aux minorités (ASTM) vont participer à l’intergroupe LGBT, un forum informel du Parlement européen.

    Iraqueer sollicite l’appui des autorités du Royaume-Uni via des parlementaires, le 15 juillet 2016, salue la levée du drapeau arc-en-ciel devant le consulat américain d’Irbil en 2016, lors du très officiel Pride Month et développe une analyse critique de la fragile avancée contenue dans les déclarations de 2016 du chef chiite irakien, Moktada al Sadr.

    Au Liban, Helem, La Fondation arabe pour les libertés et l’égalité, M-Coalition, le centre de santé sexuelle Marsa et la
    LebMASH dénoncent des arrestations dans un hammam gay en août 2014 et exigent la libération des emprisonnés.

    Un front LGBTQI (incluant des associations de la société civile) appelle les autorités tunisiennes à s’engager lors du prochain Examen périodique universel de la Tunisie devant le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, prévu en mai 2017, à abroger l’article 230 du code pénal, interdire la pratique du test anal, lutter contre toutes les formes de discrimination envers les LGBTQI et réprimer tout appel à la haine ou la violence. 

    Des manifestations publiques

    Les LGBT organisent des manifestations publiques au Maroc, en Tunisie et au Liban. Ainsi, au Maroc, un sit-in de nuit a lieu à Rabat en 2016, pour rendre hommage aux victimes de la tuerie d’Orlando, avec drapeaux arc-en-ciel et bougies. Au Liban, en 2012, des drapeaux arc-en-ciel sont arborés lors d’une « Laïque Pride » qui exigeait la fin du système confessionnel.

    La même année, une autre manifestation est organisée par l’association Helem, à Beyrouth, contre la pratique du test anal. En 2014, une centaine de manifestant-e-s se rassemblent devant le ministère de la Justice après l’arrestation et la garde à vue, assortie d’humiliations et de violences, de six gays et personnes trans dans un club. En 2016, Helem organise une projection-débat du film Priscilla, suivie d’une conférence de presse d’un rassemblement exigeant l’abrogation de l’article 534 du code pénal et la libération de personnes trans emprisonnées. En 2016, Proud Lebanon organise une réception à Khan Al Harir, en présence d’autres organisations et de diplomates.

    En Tunisie, le drapeau arc-en-ciel est arboré dès 2011, et une Première Gay Pride a lieu en 2015 sur le campus universitaire de Tunis, avec drapeaux et pancartes :

    « L’amour n’est pas un crime », « Mon corps, ma sexualité, mon droit ». La même année, un festival d’art féministe est organisé par Chouf à Carthage, repris l’année suivante (choufouhonna, soit « vous les avez vues »). Shams organise son premier meeting pour la dépénalisation de l’homosexualité à La Marsa, en 2015. A l’occasion du Forum social mondial à Tunis, en 2015, un rassemblement a lieu arborant le drapeau arc-en-ciel. En 2016, des militants LGBT défilent à Tunis avec ce drapeau à l’occasion du cinquième anniversaire de la révolution. Puis Shams organise un événement public à l’espace El Teatro de Tunis. En 2017, des équipes de Damj se rendent à Beja, Sousse et Gabes pour diffuser un guide de sécurité, juridique, numérique et informatique. Les projets poussent comme des champignons, ainsi Shams devrait lancer une hotline et une revue pour les homosexuel-le-s, intitulée Shams Mag.

    La dimension internationale  et régionale

    Très tôt, Tunisia’s Gay Day a pris part à la campagne de solidarité avec les gays d’Irak. La dimension s’est particulièrement exprimée au moment de la tuerie d’Orlando, en 2016.

    Les LGBTIQ joignent aux drapeaux nationaux leur bannière arc-en-ciel et participent à des manifestations au niveau international : Gay Pride d’Amsterdam (participation d’un bateau marocain en 2014 et 2016), Forum social mondial au Canada en 2016, avec la participation de Without Restriction (Tunisie). 

    Iraqueer participe au congrès de Stockholm de 2015, au Malmoë for Diversity Festival en 2016 (Suède), à la Copenhagen Winter Pride en 2016 (Danemark), à Queer Asia 2016 et à une action conjointe avec Out Right et London Young Professionnal Engagement Committee, à Londres en 2016.

    UAE LGBT Rights (Emirats arabes unis) s’associe à la célébration de l’IDAHO (Journée internationale contre l’homophobie et la transphobie) en 2011, appelle à signer une pétition pour les homosexuels persécutés en Iran, appelle au Spirit Day, le 16 octobre 2014 et au Bisexual Visibility Day le 23 septembre 2014.

    En 2007, Abu Nawas (Algérie) participe à la conférence panafricaine de
    l’ILGA  (International Lesbian, Gay, Bisexual, Trans and Intersex Association) à Johannesburg, en Afrique du Sud.

    Quzah (Libye) participe à la Gay Pride 2016 en Italie, arborant drapeau libyen et drapeau arc-en-ciel.

    Des initiatives se font jour au niveau régional comme « Ensemble, notre voix est plus forte », organisée le 15 mai 2016 par des associations d’Algérie (trans et homosexuelles), d’Egypte ou du Soudan (Mesahat, Bedayaa). Ces mêmes associations lancent à  l’occasion du 8 mars 2016 la campagne « La voix des femmes queer du Nord de l’Afrique ».

    Khomsa est le premier réseau LGBT maghrébin ; il a été lancé en 2011. Queers of Levant, lancé par deux femmes de 22 ans en 2015, veut couvrir le Liban, la Syrie, la Palestine et la Jordanie. En novembre 2016, vingt-deux structures LGBTQI du Maghreb et du Moyen Orient publient une déclaration commune, suite à l’arrestation et à l’incarcération de deux marocaines mineures, en raison d’un baiser échangé sur la voie publique à Marrakech. Quatre associations du Maroc, d'Algérie, de Tunisie et Libye publient un communiqué commun pour la décriminalisation de l’homosexualité.

    MantiQitna (« Notre région », avec le Q majuscule pour Queer) est une association qui organise un stage annuel dans la discrétion, à destination des militant-e-s LGBTIQ de la région arabe. La dimension régionale se traduit aussi par l’émergence de blogs, sites et pages « arabes ».

    Pouvoirs, sociétés et répression

    Les réactions des pouvoirs en place peuvent être contradictoires. Ainsi, en Irak, on a vu Moqtada Al Sadr déclarer qu’il faut que les exactions à l’encontre des LGBT cessent, tout en réaffirmant dans la même phrase que l’homosexualité est une « maladie psychologique ». L’ambassadeur des Emirats arabes unis aux Etats-Unis s’est fendu d’une condamnation de la « tuerie haineuse d’Orlando » sans toutefois préciser qu’il s’agissait d’un massacre homophobe, tandis que les ambassadeurs des autres pays arabes se taisaient. Les Emirats arabes unis et l’Egypte  ont légalisé les opérations chirurgicales de réassignation de sexe (auquelles la minorité arabe d’Iran avait accès de plus longue date), mais cette légalisation vise à « supprimer » l’homosexualité.

    Au Liban, des évolutions sont régulièrement enregistrées au niveau juridique. L’article 534 du code pénal punit les relations sexuelles contraires « à l’ordre de la nature », une formulation sujette à diverses interprétations, qui a permis en 2009 de faire acquitter deux homos, le juge ayant estimé que « l’homosexualité (...) fait partie de la nature ». En 2017, le juge unique du tribunal du Metn n’a pu poursuivre un couple pour la même raison et en s’appuyant sur un article protégeant la liberté d’expression. En 2014, un juge acquitte une trans en se fondant notamment sur l’« égalité de tous les Libanais » prévue par la constitution. Un juge de la Cour d’appel de Beyrouth confirmera le droit d’une femme trans à faire modifier son identité, lui ouvrant l’accès aux traitements et à une vie privée.

    Il reste qu’à la différence d’autres mouvements (écologiques et féministes, notamment) ayant surgi ou s’étant renforcés dans le cadre des révolutions arabes, les LGBTIQ rencontrent l’hostilité de la majorité des sociétés et des révolutionnaires eux-mêmes. S’y ajoute le fait que les contre-révolutions ont sérieusement réduit les petits espaces militants, contraints à limiter voire suspendre leurs activités, particulièrement en Libye, Irak, Bahrein, Syrie ou au Yémen, où les homosexuel-le-s encourent la peine de mort. De façon générale, c’est la répression qui est la règle.

    En plus de celle qui vise tous les  LGBTIQ (criminalisation pénale, répression sociale et tortures spécifiques), ceux et celles qui les soutiennent, voire se contentent de leur donner la parole, sont à leur tour réprimés. Des publications sont interdites, leurs responsables pourchassés. En Tunisie, les militants de Shams sont menacés de mort et agressés régulièrement, parfois en présence de policiers impassibles. Les autorités yéménites bloquent l’accès à des sites LGBT. A Oman, Omantel bloque le blog Comunity Queer.

    D’autres sont purement et simplement assassinés comme en Libye, après passage devant des cours. En 2014, Ali Shalwi, Saad Fakhakhiri et Nassib Jazawi sont exécutés à l’issue d’un procès devant un tribunal de l’EI en Libye. C’est également le cas en Arabie Saoudite. En février 2017, Amna et Meeno, personnes trans d’origine pakistanaise, sont décédées sous la torture.

    Un mandat d’arrêt a été émis en 2017 contre Abbad Yahya, un romancier de Cisjordanie. Son polar, Jarima fi Ramallah (Un crime à Ramallah), a été saisi en Cisjordanie et à Gaza. Le procureur général de Palestine estime que le livre comporte des textes et termes dont la connotation sexuelle menace la « moralité et la pudeur publiques, et qui pourraient affecter la population, en particulier les mineurs. » Il est soutenu en cela par le président de l’Association des écrivains palestiniens, qui affirme : « c’est un roman stupide qui viole les valeurs nationales et religieuses de notre société pour flatter l’Occident et gagner des prix. Ma liberté d’écrivain s’arrête aux limites de la liberté du pays »...

    Luiza Toscane 

  • Soutien pour la maison LGBTQI de Sidi Bou Saïd (Ulule.com)

    lbgft.jpg

    Appel à la solidarité.

    À propos du projet

     Bonjour, je m'appelle Amina Sboui, je suis une militante des droits humains, féministe et activiste LGBTQI. Après avoir passé deux ans à Paris, je suis de retour en Tunisie pour y terminer mon combat ; malheureusement j'ai assisté dès mon retour en 2015 à une montée d'homophobie. En Tunisie comme ailleurs, des dizaines d'activistes et personnes LGBTQI se retrouvent à la rue à cause de leur sexualité. Ma maison a servi de refuge pour eux, j'ai réussi à loger quelques dizaines de gays, transgenres, lesbiennes... Plusieurs d'entre eux trouvent une solution au bout de quelques jours, d'autres au bout de quelques semaines...

    Mais depuis presque deux ans la situation générale n'a pas changé.

    Aujourd'hui je n'ai plus les moyens de payer mon loyer, en dépit des personnes de la communauté qui ont encore besoin de ce refuge. C'est pour cela nous que nous avons besoin de votre aide. La maison se situe à Sidi Bou Saïd, un quartier sécurisé dans la banlieue nord de la Tunisie.

    Cette maison a été attaquée par des homophobes en mi-septembre, un groupe de cinq personnes ont tenté de forcer notre porte, armés d'armes blanches. Quelques semaines après, 800 personnes ont signé une pétition pour revendiquer notre évacuation de la maison. J'ai profité de mon passage à la télé à propos de ces incidents pour faire un coming-out (une première sur la télé tunisienne) et pour défendre notre communauté ; par la suite deux autre pétitions ont été créées pour nous soutenir, une signée par une quarantaine d'artistes et de militants tunisiens, l'autre par une vingtaine d'associations tunisiennes qui militent pour les droits humains.

    Nous avons tenu et nous voulons tenir encore.

    Merci pour votre soutien.

    Amina Sboui

    A quoi va servir le financement ?

    Pouvoir assurer plusieurs mois de loyer afin de perpétrer et soutenir notre communauté et LGBTQI de Sidi Bou Saïd.

    5000€ = 4 mois de loyer + divers frais de la maison + frais Ulule et frais d'envoi
    8000€ = 6 mois de loyer + divers frais de la maison + frais Ulule et frais d'envoi
    15 000€ = 1 an de loyer + divers frais de la maison + frais Ulule et frais d'envoi

    A propos du porteur de projet :

    Safia Lebdi, née à Clermont Ferrand s'est engagée des 1998 d'abord pour les femmes de son quartier, animant des réunions et puis une marche nationale dans 23 villes de France la marche des femmes contre les ghettos et pour l’égalité qui donnera naissance à l'association Ni Putes Ni Soumises. Fondatrice et porte parole elle refuse la récupération politique, elle crée ensuite les Insoumis-e-s.

    En 2010 elle sera élue régionale en Île de France avec EELV, elle présidera pendant six ans la commission du film qui organise l’industrie du cinéma de la région doté d’un budget de 14 millions d’euros. Elle soutiendra alors de nombreuses créations exprimant la jeunesse issue de l’immigration dont Houda Benyamina qui obtient en mai 2016 au festival de Cannes la Caméra d'or pour son premier long métrage, Divines. Safia organise parallèlement la venue à Paris des Femen d'Ukraine, participant à l'internationalisation de ce mouvement dont elle est l'inspiratrice. Apparaîtront ainsi d'éminentes Femen dans le monde arabe, pour un combat qui rejoint celui des LGBT, particulièrement en Tunisie et au Maroc. Elle se consacre maintenant à la production de documentaires et d'une collection de livres féministes donnant la parole à toutes ces femmes remarquables qu'elle aura rencontré dans son parcours.

    Ces liens vous aiderons également à mieux comprendre notre cas :

    http://www.bbc.com/news/magazine-34942881

    http://www.agoravox.fr/actualites/international/article/tunisie-38-personnalites-publiques-185537

    http://www.middleeasteye.net/fr/reportages/tunisie-amina-l-ex-femen-n-est-pas-la-bienvenue-chez-elle-1592491241

    http://www.liberation.fr/direct/element/amina-sb-sboui-ex-femen-fait-son-coming-out-a-la-television-tunisienne_48240/

    http://www.wepostmag.com/habitants-de-sidi-bou-said-petition-contre-amina-sboui/

    http://www.tuniscope.com/article/102683/actualites/tunisie/menaces-amina-sboui-255814


    safia.l@hotmail.fr 

    https://fr.ulule.com/

  • Nouveautés sur Europe Solidaire Sans frontières

    fatima.jpg

     

     

  • Quand le Ministre de la Défense légitime les manœuvres militaires franco-israéliennes et encourage de futurs crimes de guerre (BDS)

     
    Par question publiée au J.O. du 6 décembre 2016, Jean Jacques Candelier, député du Nord a demandé au ministre de la défense de s’expliquer  sur les manoeuvres militaires aériennes franco-israéliennes qui ont eu lieu en  Corse en novembre 2016.
     
    Le député évoque notamment Gaza, où l’aviation israélienne s’est illustrée à 3 reprises par des raids meurtriers sur la population civile (agressions de 2008-09, 2012 et 2014), avec le bilan effroyable de 541 enfants tués au cours des opérations sanglantes de l’été 2014.
     
    Le ministre a affirmé par réponse publiée au J.O. du 24 janvier que la coopération militaire de la France avec Israël est ancienne, que la France développe ce type de relations avec de nombreux autres pays, et que cette coopération relève du cadre strict de l’action diplomatique.
     
    En somme, il n’y aurait pas lieu de s’inquiéter !
     
    A cela nous répondons que bien au contraire toute coopération militaire de la France avec l’Etat colonial et d’apartheid israélien nous inquiète et nous scandalise, et que nous participons sans relâche à la campagne internationale pour l’embargo sur le commerce d’armes et contre toute coopération militaire avec Israël.
    Il est inadmissible que le gouvernement français affiche une telle réponse après le refus méprisant d’Israël de se plier à la résolution 2334 du Conseil de sécurité de l’ONU contre la poursuite de la colonisation, puis de participer à la conférence de Paris !
     

    NON Monsieur le ministre, les manœuvres militaires franco-israéliennes ne sont pas anodines : elles préparent de futurs crimes de guerre ! Vous n’êtes pas sans savoir que la population civile palestinienne sert de cobaye pour tester les armes israéliennes, en toute violation de la 4ème convention de Genève.

     Vous savez aussi que les États, dont la France au regard de ses engagements européens et internationaux, ont pour obligation de garantir qu’Israël, comme tout autre État, se conforme au droit international.
     
    En 2014, Israël a assassiné plus de 2250 palestiniens à Gaza, dont plus de 550 enfants selon l’UNICEF. Aujourd’hui, des raids meurtriers frappent encore trop souvent la population de Gaza  et, vous ne l’ignorez sans doute pas,  les emprisonnements et les exécutions sommaires de Palestiniens résistants  sont quasi quotidiens en Cisjordanie
     
    Votre réponse, qui occulte complètement cette réalité est un encouragement à de nouveaux crimes de guerre contre un peuple désarmé.

    Nous continuerons à nous mobiliser pour que la France déclare un embargo militaire d’Israël, conformément à la demande unanime de la société civile palestinienne.

     
    Paris, le 13 février 2017,
     
    La Campagne BDS France
     
  • Nouveautés sur Europe Solidaire Sans frontières

    56e1c7951e0000c60070fb4a.jpeg

    • Syrie, périphérie de Damas : Etranglé par le régime d’Al-Assad, Daraya capitule

      , par KODMANI Hala

      L’évacuation ce vendredi des derniers habitants de Daraya, en périphérie de Damas, a été obtenue à l’issue d’un accord entre le régime Assad et les insurgés syriens qui lui tenaient tête après quatre ans de siège.
      Traînant d’une main une valise à roulettes et de l’autre un enfant en bas âge, des centaines de (...)

    • Turkey
      Turkey’s incursion in Syria is aimed at defeating the Kurds and overthrowing Rojava

      , by HEARSE Phil

      Turkey’s incursion into northern Syria on 24 August was flagged up as a move to drive the so-called Islamic State (ISIS) out of the border town of Jarabulus. But that is just a cover: Turkey’s not very secret major objective is to crush the 50,000-strong Kurdish YPG (people’s Protection Unit) (...)

    • Kurdistan in Turkey
      Debate – Analysing the PKK: a reply to Alex de Jong

      , by HEARSE Phil, PARKER Sarah

      In the wake of the failed military coup in Turkey, and the massive wave of state repression that has followed, building solidarity with the progressive resistance in Turkey and Kurdistan is even more vital. The attention of socialists and democrats worldwide will be turned towards the (...)

    • LGBT+ Egypt
      Egypt’s grand mufti says harming gays is unacceptable even as LGBT crackdown continues

      , by ETEHAD Melissa

      In an interview with Germany’s Süddeutsche Zeitung newspaper late last month, Shawki Allam said that he condemned the Orlando massacre in which 49 people were killed and that no one had “the right to hurt homosexuals or to take the law into their own hands.”
      Allam’s comments, which were part of a (...)

    • A gauche
      Tunisie : Déclarations de dirigeants du Front populaire sur leur refus de voter la confiance au gouvernement Chahed

      , par AMROUSSIA Ammar, AMAMI Nizar, HAMMAMI Hamma, HAMMAMI Jilani, LAKHDHAR Zied

      D’autres déclarations convergentes rapportées par les media sont disponibles sur ESSF aux adresses suivantes
      http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article38728 http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article38788 http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article38800
      25 août : Jilani Hammami (...)

     

  • Un bateau marocain à la Gay Pride d'Amsterdam (El Huff' Maghreb)


     
     

    LGBT - Des Marocains étaient présents au défilé de la Gay Pride à Amsterdam, qui s'est déroulée le samedi 6 août dans l'après-midi. Ils ont défilé à bord d'un bateau arborant les couleurs du drapeau marocain.

    Le message "Join our freedom, feel free to join us" était inscrit sur le bateau. Comme on peut le voir dans la vidéo ci-dessus, les personnes à bord du bateau marocain brandissaient pour certains des pancartes appelant à l'abrogation de l'article 489 du Code pénal, qui criminalise les relations homosexuelles.

    D'autres hissaient le drapeau arc-en-ciel, symbole de la communauté LGBT, ou encore le drapeau amazigh, tandis que des passagers portaient des petites pancartes avec les inscriptions "fier", "liberté" ou "vie".

    Les Pays-Bas sont le premier pays au monde à avoir légalisé le mariage homosexuel en 2001. La Gay Pride d'Amsterdam, connue aux Pays-Bas sous le nom de Canal Pride, est un rendez-vous annuel incontournable pour la communauté gay.

    Entre 300.000 et 400.000 personnes étaient présentes à Amsterdam pour voir défiler les péniches colorées sur les canaux de la ville.

    En 2014, un bateau marocain conduit par le mouvement M.A.L.I avait participé à la Gay Pride d'Amsterdam. Vêtus d’une tunique rose avec une grande étoile chérifienne, les manifestants avaient défilé le long du canal de la ville.

  • En Egypte, la situation des homosexuels se dégrade (Essf)

    gay-foreigners-banned-in-egypt-gay-travel-advice.jpg

    « Des bars gays ? En Egypte ? »

    La stupéfaction quelque peu théâtrale de Tarek* sied bien au personnage. Trentenaire coquet et volubile, conversant sans détour sur un ton sarcastique, Tarek sirote son café glacé en gardant un sourire en coin avant de s’expliquer plus consciencieusement : « Il n’y a pas de bars gays ici, comme tu peux en trouver en Europe. Il existe des cafés et des clubs connus pour accueillir ou du moins tolérer les homosexuels. Ce café-là l’est par exemple, mais la présence des gays est très aléatoire. On ne sait jamais vraiment à l’avance si la soirée sera gay ou non. »

    « Immoralité », « incitation à la débauche » et « mépris de la religion » : si les relations homosexuelles ne sont pas formellement interdites en Egypte, de nombreux textes permettent aux tribunaux de condamner les relations entre personnes de même sexe. Si l’Egypte n’a jamais connu de tuerie dans un bar gay comme celle d’Orlando le 12 juin aux Etats-Unis, les lieux de rassemblement de la communauté lesbienne, gay, bi et trans (LGBT) sont régulièrement pris pour cible par la police.

    Arrestations et condamnations

    L’affaire du Queens Boat, une boîte de nuit située sur un des bateaux qui longent le Nil, a marqué les esprits : en mai 2001, 52 hommes y ont été arrêtés par la police puis condamnés par la justice. Plus récemment, en avril, le ministère français des affaires étrangères s’est ému de la condamnation jusqu’à douze ans d’emprisonnement de onze homosexuels arrêtés dans un lieu privé.

    Plusieurs cafés du centre-ville acceptaient voire favorisaient la présence des gays avant la période de désordre qui a suivi la révolution en 2011. « Par peur, je n’y ai jamais mis les pieds », confie Sameh*, un ami de Tarek particulièrement circonspect. « Je n’y remettrai plus les miens », rétorque aussitôt celui-ci, gardant en mémoire un souvenir douloureux. « Une fois, j’ai participé à une soirée gay organisée dans un club connu du centre-ville, raconte Tarek, l’air soudainement grave. J’ai été pris de panique quand le personnel nous a annoncé que les portes avaient été bloquées pour empêcher la police d’entrer. Nous craignions tous d’être arrêtés. J’avais si peur pour ma réputation, celle de ma famille. Je me suis posé des centaines de questions en une fraction de seconde. » Si le club en question n’a pas été fermé, mais a quand même cessé d’organiser de telles soirées, d’autres n’y ont pas échappé.

    Portes closes

    Depuis 2011, les lieux réputés ouverts aux gays se succèdent aussi furtivement qu’ils disparaissent. Cette année-là, le gérant du Salvatore*, de crainte de voir son établissement menacé, a littéralement chassé ce public. Celui-ci a également trouvé portes closes au Altag*, qualifié de « bar d’athées » par la police dans la foulée des fermetures administratives qui ont frappé plusieurs cafés du Caire à la fin de 2014.

    Même le plus gay des cafés du Caire, Alwan*, tenu jadis par des membres connus de la communauté LGBT, a mis la clef sous la porte à cause des menaces de la police ou, indirectement, des baltagueya – des petites frappes devenues sbires des forces de sécurité. C’est d’ailleurs au cours de cette période que la présentatrice Mona Iraqi a fomenté une rafle de la police dans un hammam gay pour son émission diffusée sur la chaîne privée Al-Kahera Wal Nas.

    L’omniprésence de la police dans chaque recoin du centre-ville a conduit les groupes de jeunes homosexuels à chercher de nouveaux lieux de rassemblement dans les alentours. Mais pour l’essentiel désormais, les seules tables qui leur sont offertes se trouvent dans les bars des grands hôtels.

    Clientèle argentée

    Dans un beau quartier résidentiel en périphérie du Caire, Shady*, un jeune étudiant en commerce international, a ses habitudes au Venus, un établissement réservé à une clientèle argentée. « Ici, je ne risque pas grand-chose, murmure-t-il avec un petit sourire qui fend sa petite barbe de hipster. Je fais partie d’une classe sociale qui ne craint pas la police. Elle ne s’en prend pas à nous parce que nos parents ont le bras long, qu’ils ont les moyens de se payer des avocats influents. Pour autant, je fais attention et prends soin de ne pas être exposé comme étant gay. »

    Dans ces lieux où le demi-litre de bière coûte au moins deux fois plus cher qu’ailleurs, les homosexuels des classes moyenne et populaire n’y ont pas leur place. Les applications disponibles sur smartphone deviennent quasiment leur unique espace de rencontres. Si leur utilisation discrète donne une impression de confort et de sécurité, aucun danger ne leur est épargné.

    La célèbre application de rencontres gays Grindr a appelé en septembre 2014 ses utilisateurs égyptiens à se méfier des faux profils créés par la police pour arrêter des homosexuels. La géolocalisation, qui a fait le succès de cette application dans le monde entier, a même été supprimée en Egypte. D’autant plus que d’autres utilisateurs mal intentionnés sévissent sur le réseau, en particulier des voyous qui cherchent à extorquer de l’argent en faisant chanter leurs victimes.

    « La magie s’est rompue »

    Jeune homme gracile et timide, Ehab*, un autre ami de Tarek, confie avoir vécu l’une des pires expériences de sa vie. « J’étais jeune et naïf, se remémore-t-il calmement. Un garçon m’a abordé sur Grindr. J’étais tellement obnubilé par sa beauté que j’en ai oublié de me méfier, j’en ai oublié le pays dans lequel je vivais. Je l’ai rencontré, on a un peu discuté. Et d’un coup, la magie s’est rompue. Il m’a volé mon portefeuille et mon iPhone en me menaçant de tout révéler si j’allais me plaindre à la police ». Ehab a choisi de rester connecté, ne sachant pas trop quoi faire d’autre, dit-il, pour vivre sa vie.

    Après l’attaque d’Orlando, le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a voté le 30 juin une résolution destinée à nommer un expert indépendant sur les violences et discriminations à l’encontre des communautés LGBT. Une décision « sans valeur » aux yeux d’Amr Ramadan, le délégué permanent de l’Egypte à l’ONU, indigné par ce qu’il a qualifié de « pensées perverses promues par les pays occidentaux ».

    Aziz El Massassi
    contributeur Le Monde Afrique, Le Caire

    * Les prénoms et noms ont été modifiés.

    * LE MONDE Le 14.07.2016


    http://www.lemonde.fr/au-caire-les-homosexuels-n'ont-plus-de-bars-ou-se-retrouver

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php

  • Homosexualité au Maroc (Essf)

    premier-mariage-gay.jpg

    « On me disait que j’avais une maladie contagieuse »

    L’agression violente de deux homosexuels à Beni Mellal, le 9 mars, a mis en lumière la difficile condition des personnes homosexuelles au Maroc. Si une partie de la population a été profondément choquée, notamment par les images terribles de la vidéo de leur agression qui a circulé sur les réseaux sociaux, reste que, dans la petite ville, se sont tenues depuis plusieurs manifestations de soutien… aux agresseurs. Ceux-ci, jugés pour « effraction, recours à la violence et port d’armes », n’ont été condamnés qu’à six mois et quatre mois de prison ferme.

    Quant aux victimes, l’une d’elle a été condamnée à quatre mois de prison ferme le 15 mars pour « actes sexuels contre nature » tandis que son partenaire a été condamné à la même peine avec sursis pour « déviance sexuelle ». Mais la justice a finalement décidé, lundi 11 avril, de relaxer le premier homme en appel. Il aura passé vingt-six jours en détention.

    C’est dans ce contexte que plusieurs homosexuels marocains ont raconté au Monde Afrique à quel point il leur est difficile d’assumer leur homosexualité et combien il peut être dangereux de vivre sa différence dans la société marocaine et même au sein de sa famille.

    « Quand j’ai découvert mon homosexualité, vers 10 ou 11 ans, raconte Karim*, j’ai cru que j’étais fou, ou malade. J’ai même pensé au suicide. A l’époque, j’allais à l’école coranique, et j’avais été très marqué par ce que nous avait dit l’imam : les homosexuels étaient possédés par le diable, et il fallait les brûler. » Nadia est passée par les mêmes tourments adolescents : « Quand j’ai découvert que j’étais lesbienne, je me suis dit que c’était donc Dieu qui m’avait créée lesbienne. Mais, en même temps, je savais que le Coran condamnait l’homosexualité. J’ai passé plusieurs années à me débattre avec ces contradictions. »

    « Comporte-toi comme un homme »

    Dans de nombreuses familles, l’homosexualité, fortement réprimée, est un facteur d’exclusion. Les comportements dits « déviants », non conformes au stéréotype de l’homme hétérosexuel, sont corrigés dès la petite enfance. Mohammed se souvient : « Enfant, je jouais innocemment avec des filles. Un jour, ma mère a décidé de me punir en me mettant du piment sur la langue. Elle m’a dit : “Il ne faut pas être comme une fille, tu es un homme.” Elle était persuadée de faire ça pour mon bien. C’était pour me protéger et me faire comprendre comment il faut se comporter dans la société marocaine. Elle m’a secoué pour me dire : “Fais attention, tu vis dans une société où tu dois être viril, avoir les cheveux courts et jouer à la guerre.” Et c’est vrai que notre société ne supporte pas la différence. » Rachid, lui, se rappelle du traitement que lui réservait son père : « Il me reprochait ma façon de marcher, de parler ou de manger… Je n’étais pas assez viril pour lui. Alors il me frappait tout le temps en me disant : “Comporte-toi comme un homme !” »

    Si l’éducation est aussi répressive vis-à-vis de l’homosexualité ou de ses prétendus signes extérieurs, c’est parce qu’elle est taboue au Maroc, explique Rachid, qui est aujourd’hui l’un des membres du Collectif Aswat, qui lutte contre la discrimination basée sur le genre et la sexualité : « On travaille sur la sensibilisation de la communauté homosexuelle et trans, qui n’est, elle-même, pas forcément consciente de son identité. Le deuxième objectif est de faire abolir l’article 489 du Code pénal. » Cet article, sur la base duquel a été condamnée l’une des victimes de l’agression de Beni Mellal, ne criminalise pas nommément l’homosexualité mais punit « les actes licencieux ou contre nature avec un individu du même sexe ».

    « Au Maroc, la victime paie le prix de son agression ! », dénonce Ibtissame Betty Lachgar, cofondatrice de M.A.L.I (Mouvement pour les libertés individuelles), qui lutte elle aussi pour l’abrogation de l’article 489. « Pénaliser les relations homosexuelles entre adultes consentants, c’est méconnaître une réalité sociale et nier la dignité humaine », souligne M.A.L.I qui, face à l’inertie des responsables politiques, a mis en ligne depuis 2013 une pétition pour appeler l’Etat marocain à prendre ses responsabilités.

    L’association de défense des droits de l’homme Human Rights Watch a réagi à l’incarcération de la première victime, affirmant que « ces poursuites judiciaires démontrent la détermination des autorités marocaines à imposer les lois anti-homosexualité, même lorsque les actes en question se déroulent dans une résidence privée entre adultes consentants ». Et la clémence de la justice envers les agresseurs « risque de dissuader d’autres victimes de demander justice et d’accroître le nombre de crimes homophobes », a ajouté Sarah Leah Whitson, directrice exécutive de la division Moyen-Orient et Afrique du Nord de l’association.

    Vivre librement ailleurs

    « J’ai peur de cette sauvagerie et de cette ignorance, confirme Soufyan, jeune homosexuel de 19 ans originaire de Rabat. La réaction des autorités me met hors de moi. C’est illégal de ne pas rendre justice à deux personnes agressées à leur domicile. Je suis aussi choqué par la faible mobilisation des citoyens. Les seules manifestations sont celles qui soutiennent les agresseurs. »

    Pour une large partie de la société marocaine, il est mieux vu d’être homophobe, ce qui revient à lutter contre le « vice », que de défendre un homosexuel. Ce qui explique la sévérité des sanctions contre les homosexuels de Beni Mellal et la clémence de celles prononcées contre leurs agresseurs. En juin 2015, le magazine Maroc Hebdo n’avait pas hésité à titrer en couverture : « Faut-il brûler les homos ? ».

    Soufyan s’estime chanceux de n’avoir jamais été agressé physiquement, mais reste marqué par « les insultes et les provocations quotidiennes au lycée » et par les bouleversements qu’il a connus quand il a décidé d’assumer son homosexualité : « J’ai perdu presque tous mes amis. Ils me disaient que j’étais atteint d’une maladie, et d’une maladie contagieuse. » Depuis, Soufyan a préféré quitter le Maroc pour l’Espagne : « J’avais tout le temps peur de me faire tabasser. Avec le soutien de ma mère, qui a accepté ma différence, j’ai préféré tout laisser derrière moi pour enfin vivre librement et dignement. »

    « Etre un comédien en permanence »

    Dans un tel climat, les homosexuels au Maroc vivent souvent cachés, dans la peur d’être découverts, et parfois dans la honte. « Pour survivre, chuchote Karim, j’ai tout fait pour qu’on ne se doute pas de mon homosexualité. Je m’entraînais devant la glace à marcher et à parler de la manière la plus virile possible. Je m’arrangeais pour qu’on me voie avec des filles, que je me forçais à embrasser devant mes camarades. J’étais très malheureux parce que ça ne marchait jamais, puisque je n’étais pas attiré par les femmes et que je leur brisais le cœur sans pouvoir leur expliquer pourquoi. Elles n’auraient pas compris non plus, soupire-t-il. Etre homo au Maroc, c’est être un comédien en permanence. » Pour éloigner les soupçons, Karim raconte avoir été jusqu’à insulter d’autres homosexuels devant les autres. « J’ai honte quand j’y repense, mais je n’avais pas le choix : lorsque mes amis se moquaient d’un homo ou de quelqu’un d’efféminé, je le faisais avec eux et même, j’en rajoutais. Garder le silence aurait pu paraître suspect. En ne participant pas, j’aurais pu avoir l’air de les défendre. »

    Aujourd’hui, le jeune homme s’est libéré de cette prison mentale grâce à son compagnon, rencontré dans un bar fréquenté par de nombreux homosexuels à Casablanca. Mais il vit encore dans la peur d’être démasqué : « Mon copain est binational franco-marocain, et aujourd’hui plus que jamais, on a peur de vivre au Maroc. On prévoit de rentrer vivre en France pour se marier et vivre sereinement. »

    Paul Blondé Julia Küntzle
    contributeurs Le Monde Afrique

    * Les prénoms ont été changés.*

    LE MONDE Le 12.04.2016


    http://www.lemonde.fr/homosexualite-au-maroc-on-me-disait-que-j'avais-une-maladie-contagieuse

  • Maroc : homophobie légalisée (Lutte Ouvrière)

    Maroc-pétition_news.jpg

    Après avoir été arrêtés et condamnés, les deux homosexuels qui avaient subi une violente agression le 9 mars dernier à Beni Mellal, au Maroc, ont finalement été remis en liberté le 11 avril.

    Dans ce pays, la loi condamne les actes homosexuels, et les agressions homophobes ne sont pas systématiquement réprouvées.

    Ces dernières années les médias se sont fait l’écho de plusieurs condamnations d’homosexuels, comme en décembre 2014, lorsque les deux membres d’un couple ont été arrêtés lors d’un contrôle routier, puis condamnés respectivement à un an et six mois de prison. En 2015, deux homosexuels qui s’étaient embrassés sur une place publique très touristique de Rabat ont été condamnés à de la prison ferme pour « outrage public à la pudeur ». Deux autres peines de prison ont été prononcées alors que les victimes avaient été arrêtées dans un lieu privé. Comme le soulignent les associations, les aveux des victimes sont bien souvent extorqués par intimidation et sous la pression des policiers, et surtout en dehors de la présence d’avocats.

    L’affaire de Beni Mellal ne peut que soulever l’indignation.

    Le couple a été violemment agressé dans son lit par plusieurs personnes et une vidéo a été postée sur les réseaux sociaux. En dehors de plusieurs associations connues pour défendre le droit de chacun à vivre librement, ni le gouvernement ni le roi Mohamed VI n’ont alors réagi. Et pour cause, car ni ce gouvernement ni le précédent n’ont retiré du Code pénal le fait que l’homosexualité soit considérée comme un crime. La loi rend passible d’amende et de prison ferme « quiconque commet un acte impudique ou contre nature avec un individu de son sexe » ou « quiconque, par son état de nudité volontaire ou par l’obscénité de ses gestes ou de ses actes, commet un outrage public à la pudeur ».

    L’homosexualité n’est plus vraiment un tabou au Maroc, l’opinion commence à évoluer et une association, Aswat, défend les droits des homosexuels.

    Elle fait partie des treize organisations qui ont exigé dans un communiqué la libération immédiate des deux homosexuels de Beni Mellal et l’ouverture d’une enquête contre le groupe d’agresseurs.

    Leur combat ne fait certainement que commencer.

    Malika FARES 13 Avril 2016
     
  • Nouveautés sur Europe Solidaire Sans frontières

    P33-2-IMG_8527.jpg