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Jeunesse

  • Maroc : Vers une nouvelle vague révolutionnaire ? (ESSF)

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    Les ingrédients d’une crise politique majeure s’accumulent

    De la journée du 18 Mai à la manifestation nationale du 11 juin, la situation sociale et politique est marquée par l’accélération des contradictions. Le pouvoir est réellement mis en difficulté et les ingrédients d’une crise politique majeure s’accumulent.

    Vers une crise de l’hégémonie du pouvoir

    Face à la profondeur de la mobilisation populaire dans le Rif, le pouvoir a cherché à la diviser et à l’isoler sans succès réel. Il espérait que le temps jouerait en sa faveur et que le mouvement faute de débouchés, s’épuiserait de lui-même. La contestation dévoile une crise profonde de la façade démocratique, de ses relais institutionnels, des dispositifs hégémoniques des dominants :

    - Les partis du système, associés à la gestion d’un système clientéliste, répressif et corrompu, sont discrédités. Le système politique officiel est contesté dans les urnes par un boycott massif et dans la rue. Les péripéties qui ont accompagné la formation du nouveau gouvernement, loin des résultats des urnes exprimées dans le cirque électoral de novembre 2016, ont fait la démonstration que les partis ne sont rien d’autre que des exécutants dociles, l’antichambre du clientélisme et des gratifications royales. Il n’y a même plus de forces politiques du système qui peuvent vendre la possibilité de réformes dans le cadre de la continuité, à l’instar du PJD il y a quelques années ou avant eux de l’USFP. La monarchie a épuisé ses médiations à force de domestiquer le champ social et politique en ne lui laissant aucune autonomie.

    - Ce n’est pas un hasard si le mouvement actuel refuse de négocier sans conditions et s’adresse directement à la monarchie. Ce qui et mis au-devant de la scène, c’est le dévoilement de la façade : le monarque est le pouvoir réel. Une nouvelle séquence, en termes d’horizon politique, commence à être posée et qui aura un effet majeur sur les perspectives d’ensemble, quelle que soit l’issue de cette lutte. Lorsque les demandes sociales et démocratiques sont adressées directement à la monarchie qui n’a même plus de fusible à présenter, elle devient la cible potentielle. Ce qui est nouveau ou du moins se manifeste avec une nouvelle ampleur, c’est la combinaison de la crise sociale et de la crise politique.

    - Autre fait qui a son importance symbolique et politique. La vague de répression actuelle a été initiée après l’interruption du prêche d’un imam officiel qui a tenu un sermon contre le Hirak. Nasser Zefzafi posait la question de savoir si « les mosquées sont la maison de dieu ou celle du makhzen ? » suivi par un mouvement de boycott des mosquées du pouvoir. C’est sans doute la première fois que la contestation s’immisce sous cette forme dans l’un des dispositifs les plus ancrées de la légitimation pré-moderne de la monarchie (où le roi s’affirme comme « commandeur des croyants »). Par ailleurs, le discours de la contestation puise, non pas dans les référents théologiques de l’islam politique organisé ou d’Etat, mais dans les ressorts culturels de l’islam populaire mis au service des luttes sociales et démocratiques. Il s’agit d’un discours politique laïc dans son contenu social et démocratique et les explications rationnelles des motifs de la lutte, mais qui s’irrigue en partie de la religion comme culture et langue intégrée dans le vécu populaire. Cette symbiose est corrosive pour le pouvoir. C’est donc autant les éléments de légitimité moderne de la façade démocratique que traditionnelle qui sont fissurés par la contestation actuelle.

    - L’autre bras du système, la répression organisée ou la menace de son emploi, produit un effet contraire. La peur du makhzen a largement reculé. Réprimer frontalement, provoquer un massacre, c’est prendre le risque d’un embrasement général et l’effondrement de la façade démocratique. La monarchie deviendrait la cible directe. L’image d’un royaume stable sur l’échiquier régional, « en transition démocratique », en mesure de respecter, dans un contexte de paix sociale, les conditions exigées par le FMI et les multinationales, volerait en éclat. Les ressources externes à la reproduction de la domination sur le plan interne se trouveraient considérablement affaibli, voire remises en cause en se combinant à des processus ouverts de délégitimation interne.

    - Le système témoigne d’une faiblesse grandissante. La nature même de la propagande contre le Hirak est révélatrice : la théorie du complot légitime la répression et révèle que face aux tensions sociales, le pouvoir ne véhicule plus la promesse d’un changement social et d‘une auto reforme. Le mythe d’une unité nationale menacée sonne creux tellement les injonctions sont multiples : un jour le mouvement serait à la botte des services secrets algériens, un autre il serait financé par le Polisario, une autrefois des accointances existeraient avec le chiisme sur fond de lourds motifs d’inculpation et de suspicion. Ce discours de fabrique de l’ennemi intérieur se nourrit d’une réactivation d’un racisme culturel latent. Le pouvoir en crise n’incarne plus un idéal type qui permet une identification positive permettant de temporiser les attentes qui émergent de la société. Les illusions tombent.

    - Il a perdu la bataille de la communication. On ne peut plus étouffer à l’heure des réseaux sociaux la réalité de la contestation et de sa parole. Les medias aux ordres ne sont plus en mesure d’invisibiliser et de détourner le sens des révoltes populaires et quand ils le font, ils renforcent la conviction que ce système n’est pas prêt au dialogue, ni à se reformer, parce qu’il ment et le mensonge est disséquée, analysée, contestée donnant des raisons supplémentaires à la détermination d’en finir avec lui.

    L’échec politique du pouvoir

    - La vague répressive qui a suivi le 26 Mai a visé le noyau dur de la direction du Hirak espérant ainsi désorganiser le mouvement. Cette stratégie ne marche pas :

    a) Le Hirak a fait émerger une nouvelle direction civile organiquement liée au mouvement de contestation car il a produit une large couche de militant-es anonymes ayant fait leurs armes dans l’expérience de masse de la confrontation avec le pouvoir. Signe de l’enracinement de la protestation même si celle-ci devient plus difficile

    b) La contestation s’est enracinée dans une activité quotidienne. Elle a également stimulé la solidarité dans tout le pays et le début d’extension géographique au-delà du Rif.

    c) La répression a fait émerger dans la lutte un mouvement de femmes à l’avant-garde du combat pour la libération des détenus mais aussi comme acteur dans la mobilisation.

    d) Il n’y aucun changement au niveau des exigences du Hirak. C’est l’ensemble des revendications portées depuis plusieurs mois qui constituent le socle de la lutte. La question de la libération des détenus porte à un niveau supérieur la combinaison de la lutte pour la liberté politique et la satisfaction des revendications sociales.

    e) Le dialogue est toujours refusé pour les mêmes (bonnes) raisons : tant qu’il n’y a pas de libération de tous les détenu-es, la levée de la militarisation, la reconnaissance des représentant-es décidés par le Hirak lui-même. Pas plus qu’il ne s’agit d’un dialogue en échange de l’arrêt de la mobilisation ou avec les personnages de la façade ou pour des objectifs contraires à la satisfaction des revendications assorties de mécanismes de garanties et de contrôle

    Le pouvoir a été mis en échec sur le plan politique. Entre le 18 mai et le 11 juin se sont succédés les appels de solidarité alors que le niveau de répression dans le RIF a imposé une chape de plomb. Celle ci vise à rendre impossible tout rassemblement ou manifestation massive et empêcher une activité de masse quotidienne. Tout en continuant la vague d’arrestation des animateurs de la mobilisation (plus de 120 aujourd’hui). Les mobilisations dans le reste du pays ont également été fortement réprimées. C’est dans ce contexte que l’appel à une initiative centralisée à rabat a vu le jour avec pour slogan fédérateur « Nous sommes un seul pays, un seul peuple, Tous contre la Hogra ».

    Cette initiative a été soutenue par un arc de force assez large regroupant des secteurs militants du mouvement social, la gauche non gouvernementale, les forces de la gauche radicale, l’opposition islamiste indépendante, les associations des droits de l’homme, les coordinations locales de soutien au RIF, les courants amazighs. Son objectif était de contrer la propagande du pouvoir contre le prétendu séparatisme, de situer le terrain du conflit sur le refus de la Hogra et des questions sociales, d’apporter une solidarité à la mobilisation du rif et d’exiger la libération des détenus et l’arrêt de la répression. Mais derrière ces objectifs, il s’agissait aussi de vérifier les possibilités de la construction d’un mouvement au niveau national. Malgré le contexte du ramadan, La manifestation ouverte par le comité des détenus des familles du Rif fut un véritable succès avec une participation de 100 à 150000 manifestants.

    Comme lors du M20F, les organisations n’apparaissent pas en tant que telles, même si on pouvait signaler l’imposante démonstration de force d’Al adl wal ihsanne. Mais l’essentiel est dans le fait que cette initiative a pu unifier les slogans sur des bases progressistes de revendications des droits pour tous et toutes contre la hogra et la repression. Elle annonce la constitution d’un front pour la défense des libertés, de la dignité et la justice sociale comme l’affirme son communiqué final, s’engageant dans toutes les régions du pays à construire les mobilisations. En tout état de cause, le pouvoir est maintenant confronté à deux processus qui doivent se combiner : le maintien de la résistance populaire dans le rif, le réveil social et démocratique dans les autres régions du pays.

    Le HIRAK Et le M20F

    - Nombre de manifestant-es actuell-es, slogans et le recul de la peur sont liés à l’expérience de 2011. Mais la comparaison s’arrête là. L’inquiétude du pouvoir n’est pas seulement que le Hirak puisse inciter d’autres populations à revendiquer mais que se cristallise une nouvelle vague révolutionnaire portée, cette fois çi, par un mouvement populaire sans médiations , sans revendications gérables pour le système, sans cibles secondaires ou dérivatifs, plus articulé à la population et aux urgences sociales dans leur globalité. Ce qui se profile est un mouvement qui tire sa légitimité et sa radicalité de la lutte pour mettre fin aux politiques d’austérité et à la militarisation et répression. Lorsque les demandes sociales sont traduites en revendications concrètes et claires, nul alchimie et tour de passe-passe électorale ou constitutionnel ne peut y répondre. Lorsque la lutte exige la fin de la militarisation, elle va plus loin que le dispositif en vigueur, elle touche l’architecture interne de l’appareil répressif et un système basé sur la violence de l’état. Quand la lutte exige la fin du règne de l’austérité, de la Hogra et de la répression, elle trace des lignes de fracture avec l’ordre établi qui ne peuvent être désamorcée sur le champ institutionnel.

    - Le pouvoir ne peut satisfaire les revendications. Le faire, c’est indiquer que par la lutte collective, il est possible de gagner. Le faire suppose une réorientation globale des politiques publiques. Une équation impossible pour le pouvoir associé organiquement à un capitalisme patrimonial fondé sur la dépossession continue, la dépendance et l’impunité économique de la caste dirigeante. La situation est telle, que de simples concessions minimes ou formelles, ne serait-ce que pour gagner du temps, relève maintenant d’une inefficacité politique. Car des secteurs de la population ont aussi assimilé l’expérience du 20 février et de sa suite. Les concessions accordées sont faites pour être reniées. Les changements constitutionnels ou du personnel politique, les élections ne changent rien au rapport de l’Etat à la société. Le dialogue social c’et échanger la lutte contre une promesse qui n’aboutit jamais. D’une certaine manière, le pouvoir a fait trop peu ou trop tard. [1] Sa stratégie de concessions partielles, de récupération/neutralisation des directions, d’éparpillement des revendications, sa guerre d’usure est sans effet.

    Par bien des aspects, le Hirak est un mouvement plus radical que le M20F.Il faut saisir la dynamique de lutte comme un processus ouvert de radicalisation qui, de la défense des questions sociales et démocratiques élémentaires en vient à contester progressivement la gestion sécuritaire et politique de ses demandes et de ses donneurs d’ordre. Ce qui nourrit cette radicalisation ce ne sont pas des mots d’ordre politiques centraux mais la contradiction concrète entre les revendications portées et la nature répressive et antipopulaire du pouvoir dans un contexte d’affrontement de masse qui passe par des phases multiples. Nous sommes loin de la simple revendication de la justice pour Fikri et le combat aujourd’hui est global bien que limitée par la situation d’isolement de la région. Dans ce contexte comment poser la question de la construction d’un mouvement populaire global ?

    Enjeux et défis de phase qui s’ouvre

    La possibilité qu’émerge une dynamique nationale victorieuse nécessitera d’éviter les pièges et la répétition des erreurs ou limites du M20F :

    - Il s’agit de mettre en cœur de la mobilisation les urgences sociales et démocratiques concrètes, de décliner la lutte contre la Hogra sur le plan local. En somme de combiner la défense des droits fondamentaux (« la fin du règne de la prédation de l’austérité de la hogra et de la répression ») en les associant aux besoins concrets et préoccupations immédiates des masses populaires.

    - De refuser les mots d’ordres qui canalisent la lutte populaire vers des objectifs constitutionnels (une constitution démocratique ou une monarchie parlementaire) ne traduisant pas concrètement, à cette étape, la nécessité de se mobiliser et d’en finir avec le makhzen de la prédation et de la répression, de répondre aux urgences sociales, et qui diviseraient le mouvement sur la nature des « solutions politiques ».

    - De refuser les officines politiques, les pseudos dialogues avec les marionnettes du pouvoir, les médiations et relais du système. Les demandes sociales et démocratiques doivent être orientées vers le pouvoir réel et les véritables centres de décisions à l’image des exigences du Hirak dans le Rif.

    - De structurer le mouvement à travers à des fronts de lutte locaux qui ne se résument pas à un cartel d’organisations ou des réseaux militants. Il s’agit d’avancer vers des cadres de mobilisation de masses, d’unité d’action populaire, réellement participatifs et inclusifs, vers un mouvement structuré par en bas, qui ne dépende pas de l’agenda des organisations, mais développe ses propres forces et directions de luttes. Cet enracinement populaire et local, où ceux et celles qui luttent, élaborent leurs revendications et dirigent leur lutte, est la condition d’une représentation organique du mouvement, y compris à l’échelle nationale. C’est ce processus qui permettra de massifier la mobilisation et de maintenir l’unité des forces qui luttent réellement pour le changement. Sans la prise en compte de cette dimension, c’est rester à une vision des rapports entre mouvements sociaux/populaires et forces politiques, contestable, historiquement dépassé et qui constitue un problème et non pas un début de solution.

    - De développer et élargir l’unité , en incluant d’une manière stable les différents mouvements sociaux et les secteurs syndicaux sans attendre l’aval des bureaucratie ou leur bon vouloir pour donner consistance à un véritable front social, démocratique et populaire tournée vers l’action. L’unité en ce qui concerne les forces politiques doit être sans exclusive mais sans concessions sur le fond : 1) l’unité pour la défense des revendications sociales et démocratiques immédiates de l’ensemble du peuple sans restreindre la lutte actuelle à des objectifs limités : libération des détenus, arrêt de la répression, solidarité avec le Rif. 2) l’unité sur la nécessité de construire un rapport de force sur la durée par les mobilisations jusqu’à la satisfaction des revendications. 3) l’unité sur la nécessité de respecter l’indépendance organisationnelle du Hirak, des mouvements populaires et de leurs structures propres.

    - L’enjeu est de surmonter les inégalités de rythmes, la diversité des configurations sociales et culturelles, faire face aux manœuvres du pouvoir, imposer le droit de manifestation. Mais si des « temps forts « nationaux sont nécessaires, nous ne pouvons oublier une leçon du M20F : des manifestations massives et régulières ne suffisent pas à déplacer le rapport de force. Il nous faudra, chemin faisant, développer des formes de luttes qui impulsent la désobéissance généralisée, les occupations des espaces publics, les arrêts et grèves sur les lieux de travail.

    - Il y a également un enjeu de solidarité internationale. Si la lutte du Rif a une relative visibilité médiatique sur le plan international, l’axe essentiel ne peut se réduire à mobiliser les communautés immigrés, les réseaux militants marocains existants, il faut mener une bataille de longue haleine et publique, visant inclure les forces progressistes des pays en question, dans le soutien concret au combat populaire et contre les complicités des Etats avec le pouvoir en place. Il s’agit de traquer le régime au niveau de ses appuis internationaux étatiques, de construire un courant d’opinion publique solidaire, de briser l’image d’un roi moderne qui camouffle une tyrannie réelle et un système maffieux.

    Rassembler la gauche de lutte

    Dans l’ensemble de cette séquence, Les courants de la gauche radicale et de lutte devraient s’unir sans préalables ou conditions. Cette unité ne peut se limiter à se coordonner ponctuellement dans des initiatives conjoncturelles de soutien à la mobilisation. L’enjeu est que se développe une expression politique commune permanente dans les batailles explicites ou implicites à venir et autour de quelques repères fondamentaux : aucune solution aux revendications populaires n’est possible sans une large mobilisation unitaire et combative, sans la perspective d’un affrontement majeur avec le pouvoir de la minorité maffieuse et prédatrice, sans mettre fin au makhzen et à toutes ses institutions. Nul ne peut se substituer au peuple et aux exploités dans la lutte pour la justice sociale, la dignité et la liberté ou décider à leur place ou parler en leur nom. Nous luttons pour que le mouvement populaire se représente lui-même, construit ses organes de lutte et de décisions en toute indépendance du pouvoir, ses relais et des partis, et mène la lutte jusqu’au bout pour la fin du règne de l’austérité, de la Hogra et de la matraque. Qu’ils soient organisés ou non, il s’agit de rassembler tous ceux et celles qui luttent pour une société sans discrimination et oppression, tournée vers la satisfaction des besoins sociaux, les libertés collectives et individuelles, des droits pour tous et toutes et l’égalité effective, tous ceux et celles qui luttent pour une autodétermination démocratique et sociale du peuple, une répartition égalitaire des richesses, pour agir ensemble, ici et maintenant. Quelque soient les différences passées ou actuelles, l’émergence d’un pôle dans la lutte clairement progressiste et radical est un atout pour la défense des intérêts généraux des classes populaires, la dynamique de la mobilisation, et la construction à terme d’une alternative politique plus crédible.

    Cette unité ne signifie pas masquer nos différences, mais à partir d’un socle commun défendue publiquement, nous pouvons les discuter sereinement, en partant des enjeux concrets et possibilités de la lutte. Nous ne pouvons prétexter la présence massive de AWI et de tactiques différentes vis-à-vis de ce courant pour paralyser l’expression collective, unitaire et indépendante de la gauche de lutte et les possibilités d’interventions communes. Nous ne pouvons non plus nous borner à construire des cartels d’organisations alors que l’enjeu pour une victoire réelle est que naisse un mouvement de masse indépendant, auto organisé, coordonné démocratiquement et qui compte sur ses propres forces. La gauche de lutte doit s’appuyer avant tout sur le peuple et les catégories populaires qui restent aujourd’hui majoritairement peu ou pas organisées. C’est aussi cela la leçon du Rif. La gauche de lutte doit aider que s’exprime une radicalité, non pas minoritaire mais de masse, évitant le piège de ceux, qui affolés devant les batailles qui peuvent venir, cherche encore une fois les compromis qui donneront une bouée d’oxygène au pouvoir actuel et à la perpétuation de la situation telle qu’elle est. C’est aussi cela la leçon du Rif. La gauche de lutte doit aider à ce que s’affirme un combat global qui vise à obtenir la victoire, loin des stratégies de pression, de calculs tactiques et de démonstration de force où se marchandent d’éventuels compromis ou retrait de la lutte demain. En tout état de cause, ne répétons pas l’erreur du M20F où les courants militants politiques et sociaux de la gauche de lutte sont entrés dans la bataille en rang dispersés et divisés, sans capacité de peser dans l’élargissement aussi bien du rapport de force que des perspectives d’émancipation sociale et démocratique. Notre responsabilité est collective et elle est clairement engagée vis-à-vis de notre peuple. La gauche réelle en sortira renforcée et reconnue où durablement défaite.

    Chawqui Lotfi

    note:

    [1L’envoi d’une délégation interministérielle après la manifestation du 18 mai supposée faire la démonstration que le gouvernement cherche des solutions a été accueillie comme il se doit. Un ouvrier du port de Hoceima a expliqué au ministre de l’agriculture et de la pêche, qu’il n’avait pas le temps d’écouter (ses balivernes). Le ministre de l’éducation a été accueilli par des manifestations, les étudiants l’obligeant à se présenter au milieu d’eux et à répondre à leurs interventions, le faisant quitter précipitamment les lieux. Le ministre de l’intérieur visitant une zone marquée par un conflit issue de l’expropriation de paysans dans la province de Hoceima , a été encerclé par les habitants devant son refus de s’expliquer devant eux tous, en plein air et face aux médias. Les habitants ont bloqué aux milieux de slogans son hélicoptère pendant deux heures. Ces faits peuvent apparaitre anecdotiques mais révèlent un fait : la fracture entre les élites et le peuple, le recul de la peur, l’insolence rebelle des pauvres quand ils ont conscience de leurs droits.

    http://taharour.org/

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article41302

    Lire aussi:

    Maroc : contre le chômage et la pauvreté mobilisation dans le Rif (Lutte Ouvrière)

     

  • Le “Hirak” dans le Rif marocain continue sa résistance et la contestation s’étends ! (ESSF)

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    Depuis plus de six mois, un mouvement de contestation populaire massif s’est développé dans la région du Rif au nord du Maroc, et a culminé par un rassemblement de plusieurs dizaines de milliers de manifestant·e·s à dans la ville de al-Hoceima le 18 mai dernier.

    Tout a débuté en octobre 2016 lorsqu’un jeune pêcheur, Mohsen Fikri, a été broyé dans une benne à ordures à al-Hoceima. Les populations locales du Rif se sont alors organisées dans des comités locaux, demandant le jugement des responsables de ce décès et de celui de cinq autres Rifains tués dans une agence de la Banque Populaire lors des manifestations populaires du 20 février 2011. Le mouvement de protestation réclame aussi la levée de la militarisation de la province d’al-Hoceima, l’arrêt des poursuites et du harcèlement contre les petits paysans, la libération de tous les prisonniers·ères politiques du Rif et l’augmentation et l’amélioration des services de santé, d’éducation, culturelles, et les infrastructures qui font défaut dans la région.

    Contre les politiques d’austérités

    Ces mobilisations sont le résultat de l’autoritarisme de la monarchie marocaine et surtout des politiques néolibérales destructrices au niveau social pour les classes populaires, encouragées et imposées par les institutions financières et commerciales internationales et les gouvernements des puissances impérialistes. Cela s’est en effet traduit par des politiques démolissant le tissu productif, par le pillage des ressources maritimes et forestières, la faiblesse des principaux services publics et l’absence d’emploi pour les jeunes.

    Ces dynamiques populaires sont également liées à la question Amazigh au Maroc, dont la région du Rif est peuplée. En plus de la justice sociale et la dignité, les manifestant·e·s demandent en effet que les services locaux de la fonction publique recrutent des habitant·e·s de la région, et l’adoption de l’amazigh comme langue de l’administration locale. Les autorités monarchiques ont en effet l’habitude d’envoyer des fonctionnaires et policiers d’autres régions du Maroc non Amazigh pour contrôler et intimider les habitant·e·s locaux, souvent en toute impunité. Le Rif a d’ailleurs des spécificités historiques, longtemps exclu par la monarchie, il a une longue histoire de résistance : de la création de la République du Rif avec Abdekrim el Khattabi, au soulèvement au lendemain de l’indépendance contre le pouvoir central, au cœur des révoltes contre les politiques d’ajustement structurel, particulièrement mobilisé durant le M20 Février. Le drapeau amazigh est d’ailleurs très présent dans les manifestations, associés aux slogans sociaux et démocratiques contre les autorités centrales de Rabat.

    L’Etat autoritaire marocain tente de son côté de réprimer et diffamer le mouvement de contestation pour qu’il ne soit pas suivi dans d’autres villes et régions du Maroc qui vivent dans les mêmes conditions de marginalisation, de paupérisation et de répression. Le pouvoir présente notamment les manifestant-es comme des « séparatistes » financés par l’étranger qui contestent l’autorité et l’intégrité territoriales. La répression est également très dure de la part des forces répressives et « balatgias » (voyous employés par le régime) contre les manifestant.es.

    Ces politiques répressives et autoritaires n’ont néanmoins pas permis de mettre fin au mouvement, qui s’étends même avec des discours et mobilisations de soutien en faveur du mouvement populaire dans le Rif à travers plusieurs villes du pays. Le 28 mai au soir, des rassemblements de solidarité ont eu lieu dans plusieurs villes (Tanger, Nador, Marrakech, M’diq), y compris devant le parlement à Rabat, avec le mouvement du Rif. Plus de 40 personnes du « Hirak » ont été arrêtées par les autorités depuis le début du mouvement du Rif, dont Nasser Zefzafi, le leader de la contestation populaire, incarcéré le 29 mai sous prétexte qu’il avait 3 jours plus tôt interrompu le prêche de l’imam à la mosquée qui accusait les manifestations d’apporter la « fitna » (discorde) dans le Royaume. Le soir même de son arrestation, près de 3000 manifestant·e·s réclamaient sa libération dans les rues d’al-Hoceima et « la liberté, la dignité et la justice sociale ». D’autres manifestations ont également eu lieu dans la région, plus précisément à Nador et dans les villes d’Atroukoute et Imzouren. Ce mouvement de contestation populaire s’est poursuivi toute la semaine.

    Le vendredi 2 juin, une grève générale a été lancée depuis la ville d’Al-Hoceïma à l’initiative du « hirak », contre les politiques autoritaires du gouvernement et la libération des activistes du mouvement incarcérés. La grève a été suivi dans plusieurs villes proche d’Al-Hoiceima. Les prêches officiels dans les mosquées ont également été boycottés dans al-Hoceima et ses environs. Cette journée fut marqué par de nombreux affrontements entre manifestant-es et forces répressive de l’état.

    Le 5 juin, c’était le tour de deux membres de premier plan du « Hirak » (mouvement) d’être arrêtés : Nabil Ahamjik, considéré comme le numéro deux du mouvement, et Silya Ziani, l’une des nouvelles figures des manifestations. Ces arrestations n’ont qu’attiser la colère de plusieurs milliers de manifestant-es qui continuent de se réunir chaque soir à Al-Hoceima et ses environs.

    La contestation est loin d’être finie, et la détermination des manifestant-es du Rif persiste. La solidarité se développe en même temps progressivement à travers le pays, malgré les tentatives de la monarchie marocaine d’empêcher tout effet boule de neige à travers le pays. L’extension est la clé de la réussite et de la survie du mouvement. On a notamment observé des manifestations et grèves dans plusieurs villes du pays ces derniers jours pour protester contre leurs marginalisations économiques et sociales. Le 6 juin, une grève et des manifestations ont par exemple eu lieu dans la ville de Imintanoute, proche de Marrakech, contre le coût élevé des factures d’eau et d’électricité qui ont augmenté de plus de 50 %, en plus d’autres revendications sociales et économiques comme la construction d’un hôpital. La contestation continuait dans la ville.

    Solidarité avec la lutte pour la liberté, la dignité et la justice sociale des classes populaires du Rif et du Maroc !

    Joe Daher mercredi 7 juin 2017

    https://syriafreedomforever.wordpress.com/

    http://www.europe-solidaire.org/

     

    Lire aussi:

    Au Maroc, le «Hirak» des manifestants de la région du Rif gagne tout le royaume (Médiapart)

     

  • Syrie, des centres éducatifs en zone assiégée de la banlieue de Damas «pour casser la routine quotidienne de la mort» (A l'Encontre.ch)

    Garderie d’enfants bombardée

    Entretien avec Majd al-Dik

    En mai 2017, deux quartiers de Damas (Qaboun et Barzeh) ont été repris par le régime syrien et les habitants déportés. Par conséquent le siège s’est accru dans la banlieue de Damas, sur la Ghouta Est, et ses habitants sont à leur tour menacés de déportation. Ces déportations s’accompagnent entre autres d’une destruction du tissu social et de la vie civile, soit avec les conseils locaux d’organisation de la survie, les structures associatives, médicales, éducatives.

    Bombardés par le régime de Assad, assiégés depuis 2013, de nombreux civils syriens de la banlieue Est de Damas (la Ghouta orientale, entre 350’000 et 400’000 habitant·e·s) cherchent à organiser «la vie au quotidien». Parmi eux Majd al-Dik, qui a grandi dans la Ghouta et a pris part à la révolution syrienne, a fondé des centres éducatifs comme Nabea El-Hayat (Source de vie). Il continue de s’occuper aujourd’hui, depuis la France, de l’appui à ces centres qui offrent un soutien psycho-social aux enfants. Cet entretien témoigne d’un aspect de la lutte pour la vie dans la Ghouta. Il a été publié dans le n° 9 de la revue de l’Emancipation syndicale et pédagogique. L’entretien a été effectué par Laure Jinquot. La traduction a été assurée part Luiza Toscane. (Avril 2017)

    Comment t’est venue l’idée de fonder un centre éducatif et psychologique?

    Majd al-Dik: En 2007, j’ai travaillé pour le projet “Child Friendly Spaces”, mené par le Croissant-Rouge et l’Unicef à destination des enfants irakiens réfugiés en Syrie. Avec la révolution syrienne, la répression et les bombardements, j’ai vu que ce qui se passait avec les enfants syriens, c’était comme ce qui se passait avec les enfants irakiens.

    On a eu ce rêve de développer un projet éducatif, mais pas comme l’éducation officielle sous la dictature de Assad, un projet alternatif. Les écoles avaient souffert de deux choses : les bombardements et les salaires qui n’étaient plus payés aux instituteurs.

    Le premier centre a ouvert en 2013. Au début, il ne devait être que provisoire. Aujourd’hui Nabea El-Hayat a neuf centres pour enfants. En parallèle à l’enseignement, nous avons mis en place un soutien psychologique et une aide alimentaire pour les enfants.

    Comment s’organise la journée pour les enfants?

    Majd al-Dik: Les enfants arrivent à 9h. Quand tous sont à la porte du centre, nous regardons s’il y a des avions ou non, nous évaluons si la situation est dangereuse pour que, si besoin, les enfants puissent repartir. Mais l’école est en général plus sûre que les maisons. Il y a trois ou quatre jours, il y a eu 90 survols d’avions dans la journée. On faisait chanter les enfants pour qu’ils n’entendent pas le bruit des avions.

    La matinée commence toujours par une activité avec des jeux, pour que les enfants oublient, afin qu’ils puissent ensuite se concentrer. De façon générale, l’enseignement n’est pas traditionnel, il y a toujours une part de jeu qui y est intégrée. Il y a des jeux, beaucoup de jeux collectifs, de la musique, des activités poétiques quotidiennes. L’objectif est de voir les enfants heureux, pour casser la routine quotidienne de la mort.

    Après manger, il y a une autre séance pour que les enfants révisent ce qu’ils ont fait dans la journée. Puis nous attendons que les parents viennent chercher leurs enfants. C’est là que nous rencontrons le plus de problèmes, nous sommes souvent obligés de ramener les enfants chez eux. Si un enfant est absent, nous voulons savoir pourquoi, nous nous sentons une responsabilité. Un matin, un enfant était absent, il avait été tué chez lui à cause d’un bombardement d’avion.

    Le repas du midi est préparé sur place?

    Majd al-Dik: Non, nous avons une cuisine centrale dans le Ghouta, dans laquelle dix adultes travaillent. Ils achètent la nourriture, préparent les repas. Puis les voitures amènent les repas dans chacun des neuf centres. Il y a souvent des problèmes pour circuler, à cause des bombardements. Il y a aussi des problèmes pour trouver et acheter de la nourriture à cause du siège.

    A 9h, des enfants arrivent avec la tête qui tourne à cause de la faim, car ils n’ont rien à manger chez eux. C’est pourquoi aussi le matin, dans les centres, nous leur donnons un petit en-cas.

    Comment s’organisent les sessions?

    Majd al-Dik: Au début les sessions étaient de trois mois, mais ce n’était pas assez important pour arriver à mettre en place un suivi psychologique. Aujourd’hui, les sessions vont de quatre mois et demi à un an. Sur les neuf centres, quatre prennent en charge les petits, de quatre à six ans, et cinq écoles prennent en charge les plus grands, de sept et huit ans. Dans les deux types de centres, il y a un soutien psychologique. Chaque centre accueille 150 à 170 enfants, pour chaque session, et cela six jours sur sept.

    Les parents remplissent une fiche au moment de l’inscription pour qu’on sache qui est l’enfant. Des enfants amenés ont parfois un lourd handicap (comme des enfants sourds, à cause des bombardements, ou comme des enfants nécessitant la pose d’une prothèse). Se pose alors la question de savoir s’il faut d’abord accueillir l’enfant dans une structure d’enseignement ou d’abord le soigner. Après l’attaque chimique d’août 2013, de nombreux enfants étaient orphelins et avaient besoin d’adultes qui jouent le rôle de parent. D’autres associations prennent en charge les enfants blessés mais elles ont peu de moyens et sont aussi débordées. Nous nous sentons impuissants face à ces handicaps.

    En début de session, lors de la première période, toutes les activités sont collectives. Puis nous évaluons les enfants pour voir comment ils se comportent. Par exemple quelle est leur réaction à un bombardement: est-ce qu’ils cherchent à se réfugier à l’intérieur ou non? Puis, dans la deuxième période, nous adaptons les activités à l’état de l’enfant.

    Le soutien psychologique les aide, mais les enfants, quand ils rentrent chez eux, voient du sang dans la rue tous les jours. Nous travaillons au quotidien, mais la cause du problème est là au quotidien.

    Les centres présentent-ils des aménagements spécifiques?

    Majd al-Dik: Les centres sont localisés dans les sous-sols d’immeubles, pour qu’ils soient protégés des bombardements. En 2011, l’État a commencé à couper plusieurs fois par semaine l’accès à l’eau, l’électricité, le gaz et l’accès à internet. En 2012, les coupures ont été définitives. Pour obtenir l’électricité, la méthode alternative mise en place est l’utilisation de générateurs. Mais cela nécessite d’importer du diesel, ce qui coûte cher. Dans les centres éducatifs, nous obtenons de l’électricité grâce à des panneaux solaires. Mais l’éclairage est parfois insuffisant.

    Les locaux que nous occupons sont soit prêtés par le Conseil local des villes soit loués à des particuliers. Les centres sont localisés dans huit villes de la Ghouta orientale contrôlées par différentes forces (l’Armée Syrienne Libre et Jaish al-Islam [qui parfois s’affrontent – réd. A l’Encontre]).

    Comment se répartit le personnel?

    Majd al-Dik: Par centre, pour 150-170 enfants environ, on compte: une directrice, quatre institutrices, quatre animatrices (pour les activités), deux personnes pour le nettoyage, une personne pour les menus travaux (réparation,…), une personne formée aux premiers secours. Il y a également un photographe, qui travaille sur plusieurs centres. Les réunions d’équipe sont quotidiennes.

    Une partie du matériel utilisé est celui qui était présent avant la mise en place du siège. Nous fabriquons aussi du mobilier (chaises, tables, tableaux…) et pouvons faire rentrer du petit matériel (stylos, livres…) par des tunnels, au niveau de points de passages. Depuis un mois, les tunnels sont fermés, le régime ayant bombardé nombre d’entre eux. Par conséquent, les taxes prélevées aux points de passage d’entrée du siège ont augmenté de 3% à 12%.

    Les salaires perçus par le personnel sont obtenus grâce à des ONG. Ces ONG, souvent internationales, passent des accords avec nous. Nous devons, en contrepartie, constituer une documentation sur ce que nous faisons.

    Aujourd’hui, nous avons trois bailleurs pour tous les centres. A chaque fois se pose la question de comment on va arriver à financer ces activités. Parfois, les financements durent trois mois, parfois un an. Le financement d’un de nos centres va s’arrêter en juin. Mon rôle est de chercher les financements. C’est le devoir du monde de protéger cette société civile.

    Nabea El-Hayat prend part à d’autres aspects de la vie civile, en plus des centres éducatifs?

    Majd al-Dik: En plus des neuf centres pour enfants, nous avons cinq centres délivrant une formation professionnelle pour les femmes: premiers secours, couture, informatique, langue, gestion de la maison en cas de blocus. Il y a environ 125 femmes par centre. Comme dans les centres pour enfants, tout est gratuit.

    Nous distribuons aussi des chèvres, à raison de quatre par famille. Ceci permet de produire du lait et maintenir une activité économique pour certaines familles. Depuis octobre 2016, nous louons des terres où sont cultivés du blé, du maïs et des légumes. Une quarantaine de personnes travaillent ces terres puis distribuent les récoltes aux familles, gratuitement toujours.

    Au total, il y a 185 personnes qui travaillent dans la Ghouta orientale dans les centres éducatifs, dans les centres pour femmes et dans l’agriculture. (Avril 2017)

    Publié par Alencontre le 9 - juin - 2017
     
  • Nouveautés sur Algeria Watch

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    «Le FMI propose l'austérité !»

    Les dockers menacent de paralyser les ports

    500 000 enfants sans scolarité en Algérie

    Alger verrouillée, Bejaia est devenue la capitale des contes- tations sociales et politiques

     

  • Le roi du Maroc face aux révoltés du Rif (JDD)

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    Au Maroc, cela fait maintenant plus d’une semaine que des manifestations ont lieu tous les jours dans l’une des plus importantes villes de la région du Rif où l’on n’a pas oublié la mort il y a 6 mois d’un vendeur de poisson, broyé dans une benne à ordures.

    Le mouvement prend de l’ampleur, ce qui embarrasse le gouvernement et le roi Mohammed VI.

    A tous ceux qui seraient tentés de croire que ce qui se passe en ce moment dans le Rif, au Maroc, correspond à un nouveau printemps arabe, autant dire tout de suite que ce n’est pas le cas. Certes, il y a des ressemblances. Les foules réclament justice, dignité, des investissements lourds pour soutenir l’une des régions les plus défavorisées du pays, une meilleure éducation, davantage  de considération en fait de la part des autorités centrales.

    Il y a aussi le fait que le leader du mouvement, Nasser Zefsafi, un chômeur de 39 ans, est extrêmement charismatique et qu’il utilise les réseaux sociaux brillamment, y compris depuis qu’il est détenu par les forces de l’ordre depuis une semaine pour menace à l’ordre public. Mais la comparaison s’arrête là.

    Le Rif a toujours été en révolte

    D’abord parce que le Rif a toujours été en révolte. Cette région était déjà rebelle du temps du protectorat français. C’est une région de culture intensive du cannabis depuis des siècles, raison pour laquelle les Français y avaient installé leur Régie du kif et des tabacs, une région où économie et trafics ont donc toujours été liés, ce qui a maintenu vivantes des pratiques de corruption, d’abus de pouvoir, et d’impunité très fortes.

    Ensuite parce que cette révolte n’est pas arabe mais majoritairement berbère. La population locale a long- temps souffert de ne pas faire valoir reconnaître ses droits à la différence, avec sa langue et ses pratiques religieuses différentes. Il n’est pas question de séparatisme mais d’être traité au contraire sur un pied d’égalité avec les autres régions à majorité arabe qui bénéficient de programmes sociaux et d’éducation plus avantageux. Cela ne veut pas dire pour autant que rien n’a été fait. Le Roi a en effet contribué à faire évoluer les choses sur le plan économique et social mais ce n’est pas suffisamment. (Affirmation gratuite! Note du blog)

    Les provinces enclavées, un défi pour Mohammed VI

    Il y a enfin de grandes différences avec les principaux mouvements d’opinion qui ont marqué le règne de Mohammed VI. Ce qui se passe dans le Rif n’a pas grand-chose à voir ( Ah Bon? Note du blog) avec le mouvement du 20 février, qui avait mobilisé dans les grandes villes marocaines des centaines de milliers de jeunes et qui réclamaient plus de libertés individuelles et publiques, une plus grande libéralisation de la société et des réformes modernes, notamment en faveur des femmes.

    Il ne s’agit pas non plus d’un mouvement traditionaliste et religieux comme on a pu le voir aussi dans le pays et qui a contribué à porter au pouvoir un parti islamiste, le PJD. Cette révolte du Rif montre en fait une dernière facette de la société marocaine. Celle des provinces enclavées, loin des grandes cités touristiques, celle de la pauvreté, souvent cachée et occultée. Et qui pourrait bien donner du fil à retordre à Mohammed VI, qui s’était autoproclamé au début de son règne, le "Roi des Pauvres". 

    Sur le même sujet :

      1 juin 2017

    http://www.lejdd.fr/

    Commentaire:

    Nous pensons au contraire que le Rif au Maroc, s'inscrit dans la situation globale déclenchée par les "Printemps Arabes" qui malgré des reculs n'a pas fini d'agiter la région. Les pays arabes monarchiques ou républicains, partagent un mode d'exploitation similaire des masses. Extorsion des richesses appuyée par l'armée (partie prenante de l'économie y compris frauduleuse) , obéissance aveugle au FMI: destruction des rares services publics. Grave crise écologique et désertification (réchauffement climatique). La situation est explosive du Maghreb au Moyen-Orient pour des dizaines d'années. Il suffit d'une étincelle.

  • Rassemblement en Solidarité avec le mouvement social pacifique du Rif (Essf)

    rif.jpg

    Rassemblement mercredi 7 juin 2017 18h30
    Ambassade du Maroc Paris
    Rue le Tasse
    75016- Paris
    Métro : Trocadéro

    Depuis le vendredi 26 mai 2017, une vague de répression, accompagnée par des arrestations massives, s’est abattue sur la ville d’Al-Hoceima en particulier, et s’est étendue à d’autres parties du Rif.

    Ces derniers jours, l’élan de solidarité et de contestation touche toutes les régions du Maroc, où des manifestations pacifiques sont dispersées avec violence.

    Ce mouvement populaire est né suite au décès de Mouhcine Fikri (mort broyé, le 28 Octobre 2016) qui tentait de sauver sa marchandise jetée arbitrairement par la police dans un camion poubelle.

    Cette attitude est symptomatique et à l’opposé des grands discours sur le développement, la bonne gouvernance, la démocratisation, l’égalité, la lutte contre les corruptions ; bref contre l’avènement d’un Etat de droit.

    Pour rappel, la région du Rif a été complètement délaissée pendant des décennies par le Makhzen et l’Etat central. Elle a été exclue, de tous les projets de développement que le Maroc a connu depuis plus d’un demi-siècle et ce, à l’instar des régions du Maroc dit inutile par opposition à un Maroc supposé utile.

    Bien que cette politique ait sensiblement changé depuis quelques années, il n’en reste pas moins que la région du Rif est en manque de tout : infrastructures routières, hôpitaux, écoles supérieures, emplois (taux de chômage des plus élevé du Maroc). Le Haut-Commissariat au Plan (2012) relève que 63% de la population d’Al Hoceima n’exerce aucune activité économique, que dans la région 52% de la population est analphabète, ce qui fait que l’écart avec d’autres régions s’est cruellement creusé. A cela s’ajoute comme dans l’ensemble du pays une corruption endémique.

    Devant cette situation, le mouvement qui secoue la région depuis la mort de Fikri a toujours été pacifique et les protestataires réclament essentiellement des mesures socio-économiques pour désenclaver leur région et permettre à sa population de vivre dans la dignité.

    Face à ces revendications légitimes, l’approche de l’état marocain a été dans un premier temps conciliante afin de calmer l’ardeur des revendications notamment par l’annonce fort médiatisée d’une série de projets de développement pour la ville d’Al-Hoceima.

    Par ailleurs l’état, et comme à son habitude, n’a pas manqué de lancer une campagne médiatique de dénigrement du mouvement et ses leaders. D’ailleurs, le principale responsable Nacer Zefzafi vient d’être arrêté ce lundi 30 mai ainsi que plusieurs autres militants de ce mouvement. Ils sont accusés « d’atteinte à la sécurité intérieure », « d’incitation à commettre des délits et des crimes », « d’humiliation de fonctionnaires publics » et « d’hostilité envers les symboles ». Dans un second temps ce sont les manifestations de soutien au mouvement qui sont réprimées.

    Nous associations et organisations de la société civile maghrébine en Europe, tout en exprimant notre totale solidarité et notre soutien au mouvement social dans la région du Rif, exigeons :

    · La libération sans conditions de toutes les personnes arrêtées dernièrement et l’abandon de toutes les charges à leur encontre ;

    · Cesser la chasse aux militants du Hirak et la répression des manifestations ;

    · Mettre en place un réel projet de développement socio-économique capable de sortir la région de son isolement, de créer de l’emploi, de scolariser la jeunesse dans des conditions décentes, de promouvoir la spécificité linguistique et culturelle et de désenclaver la région sur le plan sanitaire et social.

    · Accéder à toutes les revendications légitimes de ce mouvement.

    Enfin, nous condamnons :

    - L’utilisation de la religion et les mosquées comme outil politique à l’encontre des mouvements sociaux. En effet, Lors de son prêche, l’imam de la ville d’Al-Hoceima a reproché aux manifestants d’encourager la fitna [la discorde], une accusation très grave.

    - Les tentatives de décrédibilisation du mouvement associatif démocratique.

    - La désinformation systématique des médias officiels.

    Nous appelons l’ensemble des forces démocratiques à manifester leur solidarité et soutien au mouvement social du Rif aussi bien au Maghreb, en Europe qu’à travers le monde le mercredi 7 juin 2017 sous les différentes formes d’expression pacifiques appropriées à chaque pays.

    Premiers signataires :

    Association des Marocains en France – AMF

    Association des Travailleurs Maghrébins en France – ATMF

    Association Na’oura - Belgique

    La plateforme Euro-Marocaine - MDDC

    Réseau Marocain Transnational Migration & Développement Emcemo – Hollande

    Immigration Développement Démocratie – IDD – France

    Association Démocratique des Tunisiens en France - ADTF

    AIDDA

    Collectif 3C – Citoyenneté et Culture

    Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme en Tunisie – CRLDHT

    Fédération des Tunisiens Citoyens des deux Rives – FTCR

    RESEAU Euro6Maghrébin Citoyenneté et Culture – REMCC

    Agir Pour la Démocratie en Algérie – ACDA

    Association des Prisonniers et Disparus Sahraouis – AFAPREDESA

    Comité pour le Respect des Libertés au Sahara Occidental – CORELSO

    Avec le soutien de :

    - ATTAC

    - Cedétim

    - Droits Devant

    - Europe solidaire sans frontières (ESSF)

    - Initiatives pour un Autre Monde - IPAM

    - Sortir du Colonialisme

    - SOS Migrant - ASBL – Belgique

    - No Vox International

    - Ensemble

    - Europe Ecologie Les Verts - EELV

    - Nouveau Parti Anti Capitaliste - NPA

    - Parti Communiste Français – PCF

    Personnalités :

    Jean Claude Amara

    Tewfik Allal

    Bernard Dreano

    Jacques Fath

    Gustave Massiah

    Daniel Manceron

    Abdallah Zniber

    http://www.europe-solidaire.org/

  • Dossier Tunisie (Anti-k)

     

    Tunisie : La guerre contre la corruption est-elle réellement déclarée ?

    Les associations démocratiques de l’immigration tunisienne depuis toujours mobilisées contre la corruption qui gangrène le pays s’associent à l’appel ci-dessous « la guerre contre la corruption est-elle réellement déclarée ? » et appellent l’ensemble des tunisien(ne)s à l’étranger à faire barrage à ce fléau.

    Depuis quelques jours, les Tunisiens découvrent avec un sentiment d’émoi et d’indignation les effets de cette campagne d’arrestations qui vise des affairistes véreux sur lesquels, et depuis longtemps, de graves soupçons pèsent sur eux : activités douteuses, des grands contrebandiers, d’anciens cadres de la Douane suspectés de corruption et impliqués dans le commerce parallèle… La Commission de confiscation a d’ores et déjà procédé à la confiscation des biens de certains d’entre eux.

    Tout en exprimant notre soutien à cette campagne de salubrité publique qui constitue un début de concrétisation de l’un des objectifs de notre Révolution, nous tenons toutefois à affirmer que :

    - Cette campagne ne doit en aucune manière être sélective. Les arrestations doivent s’inscrire réellement dans un processus de démantèlement de tout le système de la corruption qui, au mépris de toutes les lois, gangrène encore la société tunisienne et met en péril l’institution étatique elle-même.

    - Les procédures légales et les normes de la justice équitable doivent être observées pour tous les acteurs publics afin d’éviter les risques d’abus, mais aussi les atteintes aux libertés ainsi que les possibles règlements de comptes, fussent-ils, sous couvert des recours « judiciaires ».

    - La justice doit examiner les affaires qui lui seront soumises en toute indépendance, sans pression aucune ; afin que nous, citoyens de ce pays, puissions en toute objectivité, constater la souveraineté de la loi et apprécier l’engagement résolu des autorités publiques dans la lutte contre le fléau de la corruption.

    - Nous tenons également à souligner que la détermination du gouvernement à combattre la corruption suppose également le respect du processus de la Justice transitionnelle. 
    En conséquence, nous appelons le gouvernement à retirer le projet de loi dit de réconciliation économique et financière car, son maintien, ne peut que semer le doute sur sa ferme détermination à s’attaquer durablement et sans exclusive à la corruption, sous toutes ses formes.

    - Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme CRLDHT
    - Association vigilance pour la démocratie et l’État civique (Yakhadha)
    - Association Démocratique des Tunisiens en France – ADTF
    - Association des Tunisiennes et Tunisiens de Suisse – ATTS
    - Association des Tunisiens de l’Isère Citoyens des Deux Rives – l’ATI-CDR
    - Comité de Vigilance pour la Démocratie en Tunisie – Belgique – CVDT
    - Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l’Homme CRLDHT
    - Fédération des Tunisiens Citoyens des deux Rives – FTCR
    - Réseau Euro Maghrébin Citoyenneté et Culture – REMCC

    Espérant mettre fin à son impopularité croissante, le pouvoir tunisien coupe quelques branches pourries

    En grande difficulté face à la révolte des populations paupérisées du sud tunisien (1), où rien n’est à ce jour réglé, le pouvoir a brusquement déclenché le 23 mai une grande opération contre certains affairistes.

    Un inventaire à la Prévert

    Tout a commencé par l’arrestation de Chafik Jarraya. « Ancien associé d’Imed Trabelsi (le neveu de Leïla Ben Ali), Jarraya se targuait publiquement d’acheter parlementaires, juges et journalistes. Longtemps proche du parti Nidaa Tounes, aujourd’hui dirigé par Hafedh Caïd Essebsi (le fils du chef de l’État), mais aussi des islamistes tunisiens et libyens, Jarraya personnifiait la caste des intouchables ».(2)
    Dans la foulée, ont été notamment arrêtés plusieurs importants « hommes d’affaires », des hauts responsables de la douane dont un ancien colonel, des gros bonnets et des lampistes de la contrebande, des petits et gros trafiquants de drogue, de métaux, de fruits secs, d’armes, l’ancien responsable de la lutte anti-terroriste et actuel responsable de la « police touristique », etc.
    Les biens de certains « hommes d’affaires », dont un yacht, ont été saisis, ainsi que des voitures et appartements qu’ils avaient mis à la disposition d’hommes politiques ou de journalistes. D’après certains media, la valeur totale des biens saisis serait « astronomique ».

    La volonté de mettre un coup d’arrêt à l’impopularité croissante du pouvoir

    D’après un sondage, 91,7% des citoyens tunisiens interrogés ont exprimé leur soutien à ces arrestations.(3)
    Reflétant cet état d’esprit, l’UGTT qualifie celles-ci de « courageuses » : « La lutte contre la corruption en Tunisie et son déracinement ont toujours été parmi les principales revendications de l’UGTT ».
    Gardant ses distances, l’UGTT ajoute néanmoins : « Il est nécessaire d’aller jusqu’au bout de cette campagne, de ne pas céder aux pressions et d’appliquer la loi contre tous ceux qui ont spolié l’argent public, et utilisé leur position et liens pour faire fortune ».

    De « curieux oublis »

    A ce jour, des individus connus pour faire partie des rouages essentiels du système de corruption qui ravage la Tunisie depuis des années continuent tranquillement à vaquer à leurs activités prédatrices. Il en va de même du côté d’hommes politiques particulièrement « arrosés ». La plupart d’entre eux appartiennent aux partis qui dirigent ou ont dirigé le pouvoir depuis 2011 :
    - Nidaa Tounès, constitué autour de notables de l’ancien régime (et qui dirige le pouvoir depuis janvier 2015),
    - le parti islamiste Ennahdha (qui a été au gouvernement en 2012-2013, et y participe à nouveau depuis 2015 aux côtés de Nidaa).

    Un pouvoir aux prétentions contradictoires

    - D’un côté, il déclare avoir engagé une offensive « anti-corruption » implacable ;
    - De l’autre, il persiste à vouloir imposer une loi de « réconciliation » (4) blanchissant les corrompus de l’époque Ben Ben Ali … dont fait justement partie Chafik Jarraya arrêté le 23 mai !

    Des menaces sur les libertés

    S’appuyant sur la proclamation de l’état d’urgence à la suite des attentats jihadistes, le pouvoir utilise abondamment des pratiques en vigueur du temps de Ben Ali, comme par exemple la comparution de civils devant le tribunal militaire.

    Le 1er juin 2017

    http://www.anti-k.org/

     

    Lire aussi:

    De Tataouine à Ouargla, le même malaise (El Watan)

    Tunisie : la guerre contre la corruption doit être globale et crédible (Front Populaire)

    Tunisie : le mouvement des chômeurs continue (Lutte Ouvrière)

    Tunisie : la bataille écologique des élections municipales (MEE)

     

     

  • Non à la répression ! Solidarité avec les luttes des masses populaires du Rif ! (PST)

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    Non à la répression !
    Solidarité avec les luttes des masses populaires du Rif !

    Depuis plusieurs mois, une formidable mobilisation populaire a embrassé toute la région du Rif marocain pour exiger le jugement et le châtiment des responsables de la mort du jeune vendeur de poissons Mohsen Fikri, broyé dans une benne à ordures en octobre 2016.

    Organisé démocratiquement et structuré autour des comités de base, le mouvement populaire du Rif a pris une ampleur sans précédent, après avoir intégré d’autres revendications démocratiques et sociales rappelant le soulèvement du 20 février 2011 au Maroc.

    En effet, c’est contre la répression et la militarisation de la région d’El Hoceima d’une part et, d’autre part, pour le développement des infrastructures sociales, notamment dans l’éducation et la santé, que le mouvement s’est cristallisé. Mais, le soulèvement des masses populaires du Rif a fini par remettre en cause les politiques libérales, imposées par le FMI, la BM, l’UE et les diktats des multinationales, et qui n’ont engendré que l’austérité, la marginalisation, la paupérisation et le chômage de masse.

    Après avoir misé vainement sur son essoufflement et son isolement, le régime monarchique et répressif marocain a tenté sans succès de discréditer le mouvement populaire en l’accusant d’être à la solde de l’étranger et qu’il vise à semer « le chaos et l’insécurité ». Face à la résistance du mouvement et la perspective de son développement dans d’autres régions du pays, le régime a enclenché, depuis le vendredi 28 mai, une répression criminelle de grande ampleur et une vague d’arrestations des principaux dirigeants du mouvement.

    Le PST dénonce la répression et les arrestations arbitraires qui s’abattent sur la population du Rif et des autres régions du Maroc et exprime sa solidarité avec les militants et les détenus du mouvement populaire du Rif.

    Le PST appelle les forces politiques, les syndicats et le mouvement associatif algériens à se solidariser avec la lutte du peuple marocain et à dénoncer la répression et les atteintes aux libertés démocratiques au Maroc.

    Non à la répression du Rif ! Solidarité avec les luttes du peuple marocain !
    Liberté pour Zefzafi et ses camarades !
    Pour le respect des libertés démocratiques au Maroc !
    Pour la satisfaction des revendications légitimes des masses populaires du Rif !
    Vive la solidarité et la lutte des peuples pour la liberté, la dignité et la justice sociale !

    Secrétariat National.
    Alger, le 30 mai 2017

    Parti Socialiste Des Travailleurs
  • Maroc. Les rebelles du Rif dans le viseur du roi Mohammed VI (L'Humanité + El Watan)

    Nasser Zefzafi est accusé d’atteinte à la sûreté de l’état. Youssef Boudlal/Reuters
    Nasser Zefzafi est accusé d’atteinte à la sûreté de l’état. Youssef Boudlal/Reuters
     

    Le Rif marocain est secoué depuis huit mois par un soulèvement populaire.

    Aux revendications sociales et culturelles de cette région marginalisée, le Palais répond par la répression. Nasser Zefzafi, porte-voix de la contestation, a été arrêté.

    Fin de cavale pour Nasser Zefzafi. Hier après-midi, les autorités marocaines ont annoncé l’arrestation de cette figure du soulèvement populaire qui secoue depuis huit mois le Rif, dans le nord du pays. Cette région traditionnellement rebelle s’est encore embrasée au mois d’octobre 2016 après la mort tragique de Mohcine Fikri, un poissonnier d’Al-Hoceima broyé par une benne à ordure alors qu’il tentait de récupérer sa marchandise, saisie par la police.

    Une illustration de la « hogra », du mépris du pouvoir central que dénoncent sans relâche, depuis, les protestataires de cette zone marginalisée. Vendredi, la situation s’est de nouveau brutalement tendue, lorsque Zefzafi a fait irruption dans la mosquée Mohammed-V, principal lieu de culte d’Al-Hoceima, pour interrompre un prêche hostile au « hirak » (la mouvance). L’imam reprochait aux manifestants de semer la « fitna », la discorde parmi les croyants. « Est-ce que les mosquées sont faites pour Dieu ou pour le makhzen (pouvoir – NDLR) ? » s’est exclamé le porte-voix de la contestation.

    Depuis cette altercation, Zefzafi était recherché pour avoir « insulté le prédicateur », « prononcé un discours provocateur » et « semé le trouble ».

    Entre-temps, des heurts ont encore éclaté, une quarantaine de personnes ont été arrêtées, chiffre sous-estimé selon certaines sources, qui parlent de 70 militants interpellés. Certains devaient comparaître dès hier devant la justice. D’autres, dont Zefzafi, ont été transférés au siège de la brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ) à Casablanca. Ils font l’objet d’une enquête pour « atteinte à la sécurité intérieure de l’État », selon le procureur du roi à Al-Hoceima. Dans un contexte d’extrême tension, les défenseurs des droits humains dénoncent cette nouvelle vague de répression contre les animateurs d’un mouvement social pacifique.

    « Le centre d’Al-Hoceima est bouclé par la police pour empêcher toute manifestation.

    Dans toute la région, des maisons sont fouillées, des jeunes militants kidnappés, témoigne Faissal Aoussar, un responsable local de l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH). Tout cela va envenimer la situation. La seule voie raisonnable serait d’écouter les Rifains, d’entendre leur soif de dignité et de respect, leurs revendications sociales, économiques, culturelles. »

    Les protestataires ont élaboré une solide plateforme revendicative, pour mettre fin au « blocus économique » infligé selon eux à la région, lutter contre « la corruption généralisée », créer des emplois, assurer le droit à l’éducation et à la formation pour tous, favoriser le développement de la région. Mais si la fracture est d’abord économique et sociale, elle se déploie aussi sur le terrain culturel et fait remonter à la surface un lourd contentieux historique.

    Les protestataires revendiquent fièrement leur filiation politique avec Abdelkrim El Khattabi, héros de la première guerre anticoloniale du XXe siècle (1921-1926), figure effacée de l’historiographie officielle, fondateur d’une éphémère république du Rif dont le drapeau rouge et blanc flotte sur les manifestations, un signe explicite de défi au pouvoir monarchique.

    Dans les mémoires, le souvenir de la révolte de 1958, écrasée dans le sang, reste vif.

    À l’époque, la région était devenue le théâtre d’une militarisation dont les contestataires demandent encore aujourd’hui la levée. Plus récemment, la passivité des autorités après le séisme de 2004, qui a fait plus de 600 morts, a attisé le sentiment de marginalisation.

    Cette région berbérophone réclame enfin la pleine reconnaissance de l’identité, du patrimoine culturel et de la langue amazigh.

    Celle-ci est inscrite depuis 2011 comme langue officielle dans la Constitution, mais sans effets sérieux sur l’administration et le système éducatif, dénoncent ses locuteurs. En guise de réponse à ce mouvement social et culturel profond, le makhzen manie l’accusation de séparatisme et crie au complot algérien. Pour mieux justifier ses opérations répressives et tenter d’isoler les rebelles du Rif. Sans succès : dimanche soir, des sit-in de solidarité ont eu lieu à Rabat, Casablanca, Tanger, Marrakech. Signe que le ras-le-bol de la « hogra » ne s’arrête pas aux montagnes du Rif.

  • Maroc Hirak: Grande manifestation à Al Hoceima, sit-in dispersés à Casablanca et Rabat (Tel Quel)

    Hirak: Grande manifestation à Al Hoceima, sit-in dispersés à Casablanca et Rabat
     

    Plusieurs manifestations et rassemblements de soutien au hirak se sont déroulées cette nuit, notamment à Al Hoceima. Certaines ont été rapidement dispersées par les forces de l'ordre.

    "Nous sommes tous Nasser Zafzafi". Portrait du leader récemment arrêté aux bouts des bras, plusieurs manifestants ont défilé cette nuit dans la ville d'Al Hoceima. Une foule "massive qui a rempli le quartier de Sidi Abid" rapporte notre journaliste. La presse internationale comme les policiers étaient massivement présents. Les avocats des prisonniers étaient aussi sur place pour réclamer leur libération. Le père de Nasser Zafzafi a également pris la parole en fin de l'événement pour remercier les participants et appeler à conserver le caractère "pacifique" des protestations. Un enregistrement sonore de Nasser Zafzafi a également été diffusé à la foule, mais nous n'avons pas pu en écouter la teneur exacte.

    Outre le grand rassemblement à Al Hoceima, plusieurs rassemblements de soutien ont eu lieu à Marrakech, Fès, Oujda et Nador. Des sit-in de soutien plus modestes se sont aussi déroulés dans de petites localités comme Martil. "Les rifains ne sont pas des awbach (sauvages)" pouvait-on entendre dans les lives diffusés par des participants à Martil.

    Dispersion de la foule

    A Casablanca et Rabat, les manifestants n'ont pas pu observer de sit in. La foule a été dispersée devant le parlement à Rabat, où se trouvait quelque 200 personnes, selon un journaliste de Telquel présent sur les lieux. Les manifestants ont à peine eu le temps de prononcer quelques slogans avant une charge des forces de l'ordre. Ils ont par la suite tenté de se regrouper près de la gare Rabat ville, mais ont de nouveau été dispersés. Les autorités ont continué de pourchasser les manifestants pour éviter tout rassemblement.

    A Casablanca, un rassemblement à l'appel du mouvement Anfass était prévu devant Brigade nationale de la police judiciaire (BNPJ) où avaient été transférés les détenus du hirak. Sur place, notre journaliste décrit de nombreux policiers en civil, brassards orange sur l'épaule, dispersant rapidement les manifestants avant qu'ils ne puissent se regrouper. Les forces de l'ordre se sont déployées tout le long du boulevard Roudani, jusqu'aux intersections avec Zerktouni et Moulay Youssef.

    Selon nos confrères du Desk, des "policiers ont d’abord poussé les manifestants avant de les courser et les frapper à l’aide de matraques pour les disperser, non loin de l’Institut Français de Casablanca." Des points de contrôles auraient alors été établis pour empêcher les rassemblement. Toujours selon le desk, "les noeuds autoroutiers desservant la rocade et l’entrée sud de la ville et les bretelles des autoroutes A1  et A3" ont été filtrées.

    Les manifestants ont tout même réussis à se rassembler plus tard dans la soirée. Selon notre confrère Mohamed Ezzouak, directeur du site d'informations Yabiladi, qui appuie ses propos par un live vidéo retransmis par le média.

    mai 31
     

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