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Palestine - Page 62

  • Une nouvelle génération se fait entendre La révolte et l’insoumission de milliers de jeunes Palestiniens et Palestiniennes (Essf)

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    Une « troisième Intifada » est-elle en cours ? Jusqu’à présent, les pronostics de ceux qui ont cru, au cours des dernières semaines, voir se dessiner un nouveau soulèvement massif de la population palestinienne, ont été invalidés : la « troisième Intifada » tant redoutée – ou souhaitée – n’a pas eu lieu...

    Cela ne signifie pas, bien au contraire, que la révolte en cours dans les territoires palestiniens et en Israël n’est pas l’expression d’une exaspération collective avec aux avant-postes, comme toujours, les jeunes.

    Génération spontanée ?

    En effet, il faut être aveugle pour ne pas voir dans les événements de ces dernières semaines, qu’il s’agisse des manifestations, des affrontements avec l’armée d’occupation et les colons, ou des attaques à l’arme blanche, la traduction de la révolte et de l’insoumission de milliers de jeunes Palestiniens et Palestiniennes. La moyenne d’âge des victimes de la nouvelle vague de répression israélienne se situe en effet en dessous des vingt ans, et on a même pu voir des jeunes de treize ans tenter de poignarder des soldats, tout en sachant pertinemment qu’en commettant de telles actions ils seraient abattus...

    À en croire certains commentateurs ou responsables politiques, ces jeunes seraient « manipulés », « instrumentalisés », et envoyés à la mort par des organisations ou des leaders désireux de se repositionner dans le champ politique palestinien en s’appuyant sur une « radicalisation » qu’ils auraient provoquée. On a ainsi pu lire, ici ou là, que tel imam, tel responsable du Hamas ou tel dirigeant d’un groupe armé, tirerait les ficelles des événements en cours. Certains sont même allés jusqu’à accuser le paisible Mahmoud Abbas d’inciter les Palestiniens à la violence…

    On croit rêver, ou plutôt cauchemarder. Les jeunes qui se révoltent aujourd’hui et qui sont prêts à mourir plutôt que de subir en silence ne sont manipulés par personne. Ils se révoltent contre une situation d’oppression et d’injustice manifestes, et n’ont pas attendu les appels ou les consignes des responsables politiques palestiniens pour entrer en action. Bien au contraire : ces derniers courent en réalité après les événements et sont dans l’incapacité d’offrir un cadre structuré et des perspectives politiques (revendications, modalités d’action, etc.) à la jeunesse palestinienne.

    Génération 2000

    Les générations palestiniennes se succèdent et ne se ressemblent pas toujours. L’Intifada de 1987 a été l’expression du ras-le-bol d’une génération qui n’avait connu que l’occupation. Le soulèvement de septembre 2000 fut en grande partie celui des désillusionnés du « processus de paix ». La génération qui s’exprime aujourd’hui est la « génération 2000 », qui n’a pas connu les années 1990 et la chimère du « processus de paix », qui n’a pas participé au soulèvement de septembre 2000 et qui n’est pas imprégnée des traditions politiques qui ont longtemps matricé la société palestinienne.

    D’où le caractère spontané et désorganisé du soulèvement en cours, mais aussi son caractère explosif : ces jeunes sont sans avenir et sans espoir et, n’ayant rien à perdre, ils sont prêts à aller loin, très loin – jusqu’à la mort. À une ou deux exceptions près, aucun des jeunes qui ont mené des attaques à l’arme blanche n’était membre d’une faction politique, et aucun d’entre eux n’a tenté, à l’instar des auteurs d’attaques-­suicides dans les années 1990 et 2000, d’enregistrer ou d’écrire un message expliquant les motivations de son acte. Voilà qui devrait faire réfléchir ceux qui veulent voir derrière chaque jeune Palestinien la main de telle ou telle organisation – forcément « jihadiste » : la génération 2000 ne rend de comptes à aucune faction ou aucun leader politique, et elle a même tendance à bousculer le « vieux » mouvement national palestinien.

    En effet, s’il est difficile de prévoir les développements à venir, nul doute que le soulèvement en cours laissera des traces : au sein de la société palestinienne tout d’abord, dans laquelle certains voient d’un très mauvais œil cette nouvelle séquence d’affrontements, peu propice aux affaires, qu’elles soient économiques ou politiques ; au sein du mouvement national palestinien ensuite, qu’il s’agisse du Fatah ou du Hamas, qui apparaissent plus que jamais en décalage avec les aspirations des franges les plus mobilisées de la jeunesse ; au sein de la génération 2000 enfin qui, si la répression se poursuit et s’intensifie, pourrait se radicaliser davantage encore et passer à la vitesse supérieure, sans demander l’autorisation à quiconque et sans tenir compte des avis hypocrites de ceux qui les enjoignent de faire preuve de « calme » et de « patience ». Julien Salingue  mercredi 28 octobre 2015

    * « Palestine : Une nouvelle génération palestinienne se fait entendre ». Paru dans l’Hebdo L’Anticapitaliste - 309 (29/10/2015). http://www.npa2009.org/

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article36186

  • Nouveautés sur Afps Rennes

     

    • Un graph découvert du côté de l’université de Rennes 2

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      Bravo l’artiste !

    • Les méthodes israéliennes pour réprimer la protestation des Palestiniens

      27 octobre

      Mya Guarnieri Des groupes de défense des droits de l’homme affirment qu’Israël fait appel à des « arrestations préventives » pour réprimer les protestations des Palestiniens à l’intérieur de la Ligne Verte. __0__ Heurts violents entre manifestants palestiniens et forces israéliennes d’occupation à proximité de l’Esplanade des Mosquées à Al-Qods - Photo : AFP/Ahmad Gharabli __0__ La police israélienne s’est présentée, le 7 octobre dernier, au domicile de la militante Adan Tartour en frappant violemment la (...)

    • Cueillettes solidaire des olives en Palestine occupée - Campagne 2015

      27 octobre

      Ma’an News Agency Hébron (Al-Khalil) : La municipalité de Yatta en son rôle de coordinateur général de la campagne nationale d’aide aux agriculteurs a repris ses activités de récolte d’olives dans le quartier de "Rajm al Hamra" au sud de la ville de "Yatta", à proximité de la colonie de "Sussya" avec l’aide de volontaires étrangers, dans les terres proches des colonies et du mur de séparation. Les volontaires européens installés dans la ville de Halhul et accueillis par l’Association France Palestine (...)

    • Traitement médiatique des événements en Palestine et en Israël

      26 octobre

      Plateforme Palestine - Lettre ouverte aux médias, 22 octobre 2015 La Plateforme des ONG françaises pour la Palestine a envoyé une lettre ouverte aux principaux médias français concernant le traitement médiatique des événements en Palestine et en Israël. Madame, Monsieur, L’actualité de cette région vous a amenés à donner une bonne place à celle-ci dans vos différents journaux ou émissions. Cela est essentiel mais n’a de sens que si votre couverture offre des explications et analyses complètes. Ce qui est (...)

    • La montée de l’hystérie anti-palestinienne

      26 octobre

      Des exécutions extrajudiciaires aux lynchages dans les rues, une vague de haine submerge la société juive israélienne. Netanyahou ne fait qu’attiser cette haine. Meron Rapoport, Middle East Eye, lundi 26 octobre 2015 __0__ Haptom Zerhom, un demandeur d’asile érythréen, n’avait rien à voir avec le conflit israélo-palestinien. Pourtant, le dimanche 18 octobre, il se trouvait dans la gare routière de Beer-Sheva, dans le sud d’Israël, au moment où un Palestinien armé y est entré. Zerhom s’est enfui, mais (...)

    • Une nouvelle génération se dresse contre l’occupation, le colonialisme et l’apartheid

      26 octobre

      Omar Barghouti Cette résistance palestinienne n’est rien d’autre qu’une réaction spontanée au gouvernement le plus raciste et extrémiste de toute l’histoire d’Israël. __0__ Des manifestants palestiniens aident un camarade blessé lors d’affrontements avec les forces israéliennes d’occupation en dehors de la colonie de El Beit, près de la ville cisjordanienne de Ramallah, le 20 Octobre.- Photo : APA/Shadi Hatem __0__ Au moment où j’écris ces lignes, une nouvelle génération de Palestiniens on ne peut plus (...)

    • Plus d’un millier de Palestiniens arrêtés depuis début octobre

      26 octobre

      L’Orient le Jour avec AFP, dimanche 25 octobre 2015 Plus d’un millier de Palestiniens ont été arrêtés par les autorités israéliennes, en majorité des jeunes garçons et filles, depuis début octobre et la nouvelle spirale de violences entre Israéliens et Palestiniens, a indiqué dimanche le Club des prisonniers palestinien. Ce chiffre inclut les arrestations menées en Cisjordanie occupée, à Jérusalem et parmi les Arabes Israéliens. Parmi les villes les plus concernées figure Hébron, dans le sud de la (...)

    • Palestine : les enfants d’Oslo comptent résister par tous les moyens

      26 octobre

      Ils ont entre 17 et 22 ans, sont étudiants à l’université de Bir Zeit. 
Ils racontent le quotidien de l’occupation, les exactions des colons, leur rejet de l’Autorité palestinienne 
et des partis politiques. Et leur volonté de résister par tous les moyens. Pierre Barbancey, l’Humanité, lundi 26 octobre 2015 Bir Zeit (territoires palestiniens occupés), envoyé spécial. L’air est irrespirable. Entre la fumée âcre des pneus qui brûlent et les effroyables gaz lacrymogènes tirés par les soldats israéliens qui (...)

  • Appel au boycott des produits israéliens : une décision de la Cour de cassation inquiétante pour la liberté d’expression (Afps)

    http://revolutionsarabes.hautetfort.com/media/01/01/287085506.jpeg

    La Cour de cassation vient de rendre sa décision dans l’affaire d’appel au boycott par des militants de Mulhouse. Elle confirme l’arrêt de la Cour d’appel de Colmar de novembre 2013, qui condamnait les militants, après leur relaxe en 1ère instance par le tribunal correctionnel de Mulhouse en décembre 2011.

    C’est une décision inquiétante pour la liberté d’expression et nous exprimons tout notre soutien et toute notre solidarité aux militants de Mulhouse visés par cette décision.

    Le conseiller rapporteur désigné par la Cour de cassation avait pourtant laissé la porte ouverte à la cassation de la décision de la cour de Colmar, en préparant deux projets d’arrêts en novembre 2014, l’un pour l’autre contre, soumis à la décision de la Cour de cassation. Mais l’avocat général avait ensuite clairement pris parti et recommandé le rejet du pourvoi, en juin 2015. Ceci en contradiction avec nombre de tribunaux et cours d’appel qui ont jugé que :

    « Cet appel au boycott est en réalité une critique passive de la politique d’un état, critique relevant du libre jeu du débat politique qui se trouve au cœur même de la notion de société démocratique. Ainsi dès lors que le droit de s’exprimer librement sur des sujets politiques est une liberté essentielle dans une société démocratique, cet appel au boycott entre dans le cadre normal de cette liberté » (Tribunal de Pontoise décembre 2013)

    « Attendu qu’il résulte ensemble des articles 1382 du code civil et 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales que le principe de la liberté d’expression ne peut subir que les restrictions rendues nécessaires par la défense des droits d’autrui ; que relève de l’exercice de la liberté d’expression la provocation d’autrui à se détourner d’un produit ou « appel au boycott »(TGI de Paris janvier 2014)

    C’est donc le représentant de l’Etat qui aura eu le dernier mot.

    Ce même Etat, qui, malgré les déclarations multiples de Madame Taubira sur le caractère politique de l’appel au boycott, qui ressort donc de la liberté d’expression, n’a toujours pas abrogé la circulaire inique de Madame Alliot Marie, qui appelait les procureurs de France à poursuivre tous les militants qui appelaient au boycott des produits israéliens.

    Il deviendrait donc impossible en France de mettre en cause la politique de l’Etat d’Israël ? La France, le pays des Droits de l’Homme, serait donc l’exception européenne, le seul pays où les militants du Droit international seraient poursuivis devant les tribunaux ?

    Nous assistons actuellement à une offensive systématique de l’Etat d’Israël, de ses ambassades et de ses réseaux de soutien, qui veulent faire taire toute opposition à la politique criminelle de cet Etat. Même la timide tentative européenne de rappeler les règles du droit en matière de différenciation des produits des colonies, encouragée par 16 pays européens, engagée depuis des années et toujours retardée, fait l’objet d’une campagne hystérique d’intimidation par le gouvernement israélien, qui déclare que toute mesure dans ce sens serait de l’antisémitisme !!!

    La contestation de la politique d’un Etat qui bafoue toutes les règles du droit international et qui opprime un autre peuple est un droit absolu, nous entendons bien nous battre pour le faire respecter et nous appelons tous les démocrates à se joindre à notre combat.

    Avec nos amis de Mulhouse, nous nous réservons la possibilité d’utiliser toutes les voies de droit, nationales et européennes, pour que la liberté d’expression soit respectée. Et nous renouvelons solennellement notre appel au gouvernement français pour qu’il abolisse enfin et sans délai les circulaires Alliot-Marie / Mercier.

    Nous continuerons bien sûr nos campagnes de Boycott, Désinvestissement et Sanctions contre la politique de colonisation, d’occupation et d’apartheid menée par l’Etat d’Israël, et pour faire respecter le droit international. Nous appelons nos concitoyens à nous rejoindre nombreux pour la journée d’action du 7 novembre, au cours de laquelle nous demanderons, devant les magasins Carrefour et plus généralement les chaînes de grande distribution, qu’ils cessent de vendre des produits provenant des colonies israéliennes en territoire palestinien occupé.

    Le Bureau National de l’AFPS samedi 24 octobre 2015

    http://www.france-palestine.org/Appel-au-boycott-des-produits-israeliens-Cour-de-cassation

     

  • Nouveautés sur A l'Encontre.ch

    «La colonisation est la racine de la violence»

    25 - octobre - 2015

    Par Ilan Pappe Au milieu de ce qui est devenu connu en Israël sous le nom de l’«Intifada des couteaux» a eu lieu une scène inhabituelle qui se déroulait à Ramat Gan, où de nombreux habitants sont des Juifs irakiens. Une petite femme mince protégeait un homme gisant sur le sol qui avait été poursuivi […]

    Israël/Palestine. Le contexte des «événements» à Jérusalem

    24 - octobre - 2015

    Par Noam Sheizaf Le quotidien Haaretz, en date du 23 octobre, citait la déposition du major général Nitzan Alon qui soulignait qu’une des origines de la situation présente dans les territoires occupés avait ses racines dans «les violences des extrémistes de droite en Cisjordanie». Alon fait, évidemment, la différence entre la violence des colons extrémistes et […]

    Syrie-Russie. «Nouveaux colonialismes et crise des valeurs de la gauche»

    21 - octobre - 2015

     

    Par Raúl Zibechi La visite de Bachar el-Assad à Moscou n’a été révélée que mercredi 21 octobre au matin, par le porte-parole du Kremlin. «Hier soir, le président de la République arabe syrienne Bachar el-Assad est venu en visite de travail à Moscou», a annoncé Dmitri Peskov. Cette visite de Bachar el-Assad est le premier déplacement […]

  • Nouveautés sur Association France Palestine Solidarité

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  • Israël-Palestine. «Pas de paix tant que l’occupation continue» (Al'Encontre.ch)

    Marwan Barghouti devant un tribunal de Tel-Aviv, en 2003

    Marwan Barghouti devant un tribunal de Tel-Aviv, en 2003

    Une grande partie des médias présente la situation à Jérusalem-Est, en Cisjordanie et à Gaza comme une «soudaine explosion» qualifiée sommairement – avec un inuendo dépréciatif – d’«Intifada des couteaux». Or, au printemps 2015, dans un rapport des consuls généraux de l’Union européenne, présents en Israël et dans les territoires occupés, portant sur l’année 2014, ces derniers insistaient sur «la polarisation et la violence», sans commune mesure depuis 1967 ou la fin de la seconde Intifada (2005) à Jérusalem-Est et en Cisjordanie. Ce document, intitulé EU Heads of Mission (HOMS) Report on Jerusalem, a été publié en anglais et peut être consulté à l’adresse suivante: http://www.eccpalestine.org/wp-content/uploads/2015/03/EU_HOMS_REPORT_ON_JERUSALEM-2014.pdf.

    Il ressort, pour faire court, que: «Aussi longtemps que le statut de la ville ne sera pas résolu, un accord global entre Israéliens et Palestiniens ne sera pas possible. Ce point n’a jamais été aussi pertinent que cette année. […] Au cours de l’année 2014, la situation s’est gravement détériorée à Jérusalem dans pratiquement tous les domaines couverts par les rapports précédents.

    »L’expansion de la colonisation s’est poursuivie, y compris dans les zones très sensibles; des politiques très restrictives sur les constructions palestiniennes à Jérusalem ont été maintenues avec force et ont été suivies par des vagues de démolitions et d’expulsions; l’éducation pour les Palestiniens reste inéquitable; les Palestiniens continuent d’affronter des difficultés pour bénéficier des soins de santé; l’économie de Jérusalem-Est ne montre aucun signe d’amélioration. De surcroît, Israël a remis en vigueur des mesures punitives, comme la révocation des droits de résidence et la démolition des habitations des Palestiniens impliqués dans des attentats.»

    Le constat a été confirmé. Et les mesures répressives de l’Etat israélien se sont accentuées: blocus de Jérusalem-Est traité comme de fait intégré à Jérusalem-Ouest, revendication ouverte que les corps de Palestiniens tués ne seraient pas restitués aux familles (une pratique existant depuis longtemps, mais rarement revendiquée, le «cimetière des numéros» se trouve dans un camp militaire israélien tenu secret), encouragement au port d’armes pour les citoyens et citoyennes (à l’exception des citoyens arabes israéliens), tirs à balles réelles indiscriminés étayés par la loi, etc. Les médias qui dénoncent la violence de jeunes Palestiniens, poignardant des Israéliens, font une différence qualitative entre une exécution effectuée par un drone israélien et une attaque avec un couteau. «S’opposer à la violence» – quand bien même lutter contre une occupation militaire relève d’un droit légitime – impliquerait de dénoncer tout ce genre de violences. Le climat créé par les autorités et pas seulement par quelques groupes nationalistes et/ou intégristes extrémistes aboutit à ce que Dahlia Scheindlin décrit ainsi: «Jérusalem est devenu un mini-Etat policier et une capitale fantôme» (site israélien +972, 20 octobre 2015).

    Zev Sternhell, membre de l’Académie israélienne des sciences et lettres, professeur à l’université hébraïque de Jérusalem, commençait ainsi une longue tribune publiée dans Le Monde du 13 octobre: «C’est contre la colonisation continue des territoires conquis en 1967 que se révoltent une fois de plus en ce moment les Palestiniens. Ils comprennent que la colonisation vise à perpétuer l’infériorité palestinienne et rendre irréversible la situation qui dénie à leur peuple ses droits fondamentaux.»

    Marwan Barghouti, détenu dans une prison israélienne de haute sécurité depuis 2002, a transmis au quotidien anglais The Guardian le texte que nous publions ci-dessous. Il est en syntonie, sur le fond, avec Zev Sternhell. (Rédaction A l’Encontre)

    Par Marwan Barghouti:

    L’escalade de violence actuelle n’a pas commencé lorsque deux colons israéliens ont été tués le 3 octobre. Cette escalade a commencé il y a bien longtemps et a continué durant des années. Chaque jour, des Palestiniens sont tués, blessés et arrêtés. Chaque jour, la colonisation avance, le siège de notre peuple à Gaza se prolonge, l’oppression persiste. Alors que beaucoup veulent que nous nous sentions écrasés par les conséquences potentielles d’une nouvelle spirale de violence, je demande – comme je le plaidais en 2002 – de nous occuper des causes fondamentales de cette situation: la négation de la liberté des Palestiniens.

    Quelques-uns ont suggéré que la raison pour laquelle un accord de paix n’avait pu être atteint résidait dans le manque de volonté du président Yasser Arafat [mort en novembre 2004] ou l’incapacité du président Mahmoud Abbas [élu en janvier 2005]. Or, les deux étaient prêts et capables de signer un accord de paix. Le problème réel est qu’Israël a choisi l’occupation et non la paix, a utilisé les négociations comme un écran de fumée pour camoufler l’avance de son projet colonial. Chaque gouvernement dans le monde est conscient de ce simple fait et néanmoins beaucoup prétendent que revenir aux recettes ayant échoué dans le passé pourrait faire aboutir la liberté et la paix. Cette absurdité est répétée sans cesse tout en en attendant des résultats différents.

    Il ne peut y avoir de négociations sans un compromis avec Israël impliquant un retrait complet des territoires palestiniens occupés en 1976, y compris Jérusalem-Est; sans mettre fin totalement à tous les aspects de la politique coloniale; sans la reconnaissance du droit inaliénable du peuple palestinien, y compris son droit à l’autodétermination et au retour; et sans la libération de tous les prisonniers palestiniens. Nous ne pouvons coexister avec l’occupation et nous n’allons pas capituler face à elle.

    On nous a demandé d’être patients et nous l’avons été, donnant chance après chance à ce qu’un accord de paix soit atteint. Peut-être est-il utile de rappeler au monde que notre dépossession, que notre exil forcé et notre transfert [sur d’autres terres et dans d’autres pays] et finalement notre oppression durent maintenant depuis près de 70 ans. Nous représentons l’unique question qui reste à l’agenda de l’ONU depuis la fondation de cette dernière. On nous a dit que si nous avions recours à des moyens pacifiques et aux canaux diplomatiques, nous recevrions l’appui de la communauté internationale pour mettre fin à l’occupation. Toutefois, au même titre que durant la période qui s’est ouverte en 1999 [accord de Charm el-Cheikh signé entre les représentants de l’OLP et de l’Etat israélien], la communauté internationale échoue à nouveau à prendre quelques initiatives significatives, que ce soit en mettant en place un cadre international pour appliquer la loi internationale et les résolutions de l’ONU ou que ce soit en prenant des mesures assurant que les responsabilités soient établies, en incluant le boycott, les désinvestissements et les sanctions, mesures qui ont joué un rôle crucial pour que le régime d’apartheid [sud-africain] soit éliminé.

    Ainsi, en l’absence d’une action internationale pour mettre fin à l’occupation israélienne et à l’impunité du pouvoir israélien, ou même pour assurer notre protection, que nous demande-t-on de faire? Rester là et attendre que la prochaine famille palestinienne soit brûlée [incendie la nuit de la maison d’une famille palestinienne dans le village de Douma, le 31 juillet, un enfant et trois membres de la famille sont décédés], qu’un autre enfant palestinien soit tué [référence est faite à Mohamed Abu Khdeir, kidnappé par des colons et brûlé vif, le 4 juillet 2014], qu’une nouvelle colonie soit construite? Le monde entier sait que Jérusalem est la flamme qui peut inspirer la paix et aussi provoquer la guerre. Pourquoi dès lors le monde reste coi alors que les attaques israéliennes contre le peuple palestinien dans la ville qui est le lieu saint des musulmans et des chrétiens, en particulier pour ce qui a trait à la Mosquée Al-Aqsa, continuent sans relâche. Les actions et les crimes de l’Etat israélien non seulement détruisent la solution des deux Etats sur les frontières de 1967, mais violent la loi internationale. Ils menacent de transformer une solution politique viable en une guerre religieuse sans fin qui minera la stabilité dans cette région qui subit déjà des bouleversements sans précédent.

    Personne sur terre n’accepterait de vivre sous l’oppression. Par définition, les êtres humains aspirent à la liberté, luttent pour la liberté, se sacrifient pour la liberté, et la liberté du peuple palestinien lui est due depuis longtemps. Pendant la première Intifada [commencée en décembre 1987], le gouvernement israélien a lancé une politique de «briser les os pour briser la volonté» [la formule fait référence à l’ordre d’Yitzhak Rabin, alors ministre de la Défense, de «briser les os» des lanceurs de pierres], mais génération après génération, le peuple palestinien a donné la preuve que sa volonté était inflexible et cela n’a pas besoin d’être testé.

    La nouvelle génération palestinienne n’a pas attendu l’aboutissement de discussions de réconciliation pour concrétiser une unité nationale que les partis politiques [Fatah et Hamas] ont échoué à concrétiser. Cette nouvelle génération s’est élevée au-dessus des divisions politiques et de la fragmentation géographique [entre les divers «bantoustans» créés par le système de colonisation israélien en Cisjordanie, à quoi s’ajoutent le statut de Jérusalem-Est et la césure entre la Cisjordanie et Gaza]. Cette génération n’a pas attendu des instructions pour exiger ses droits et accomplir son devoir: résister à l’occupation. Elle le fait sans armes, tout en devant s’affronter à l’une des plus puissantes forces militaires dans le monde. Dès lors, nous sommes convaincus que cette liberté et cette dignité doivent triompher et nous vaincrons. Le drapeau que nous avons brandi avec fierté à l’ONU [le drapeau palestinien a été déployé à l’ONU pour la première fois après l’Assemblée générale fin septembre 2015] va flotter un jour sur les murailles de la vieille ville de Jérusalem pour signaler notre indépendance.

    J’ai adhéré au combat pour l’indépendance de la Palestine il y a 40 ans et je fus incarcéré pour la première fois à l’âge de 15 ans. Cela ne m’a pas empêché de plaider pour la paix en accord avec la loi internationale et les résolutions de l’ONU. Mais Israël, la puissance occupante, a méthodiquement détruit cette perspective année après année. J’ai passé 20 ans de ma vie dans les prisons israéliennes, y compris les 13 dernières années, et ces années m’ont rendu encore plus certain de cette vérité inaltérable: le dernier jour de l’occupation sera le premier jour de paix. Ceux qui veulent la paix ont besoin d’agir, d’agir maintenant, pour que survienne ce moment. (Article publié dans The Guardian, le 11 octobre 2015, traduction A l’Encontre)

    Publié par Alencontre le 21 - octobre - 2015
     
  • La mosquée: encore une autre bataille dans la lutte pour la libération nationale (Ujfp)

    La mosquée al-Aqsa en danger - Résumé du rapport annuel de l’Institution Internationale al-Qods (QII) - septembre 2012

    Samah Jabr est Jérusalémite, psychiatre et psychothérapeute, dévouée au bien-être de sa communauté, au-delà des questions de la maladie mentale.

    Si la lutte pour le sanctuaire d’Al-Aqsa est perçue en Occident comme une cause alimentée par un Islam fanatique, les Palestiniens la perçoivent comme une bataille parmi d’autres dans leur lutte contre une occupation coloniale et ses injustices et violations incessantes des droits humains fondamentaux.

    Il est indéniable que beaucoup d’entre nous considèrent Al Aqsa comme sainte et sacrée, même si le Président palestinien considère comme sacrée la coordination de la sécurité avec Israël ! Mais même ces Palestiniens qui ne voient pas en Al Aqsa un lieu saint le considèrent comme un magnifique monument historique national, qui leur fournit des souvenirs de ces pique-niques auxquels nous avions l’habitude de participer avec nos grands-mères quand nous étions jeunes, et comme un immense atout pour les enfants qui autrement seraient privés d’un endroit pour jouer. Le sanctuaire d’Al Aqsa continue d’être un foyer, un lieu d’attachement chaleureux, et un sanctuaire psychologique pour les Palestiniens – qu’ils soient ou non musulmans pratiquants –, contraints de vivre sous un système d’apartheid qui fait d’eux des étrangers dans leur propre ville.

    Au beau milieu de cette lutte pour préserver l’identité de la mosquée et du sanctuaire comme musulmane et arabe-palestinienne, les Palestiniens se trouvent de plus en plus isolés des régimes et institutions arabes et musulmans défaillants de toute la région. Le Président égyptien vient de rouvrir l’ambassade israélienne en Égypte et il a appelé, depuis la tribune des Nations-Unies, à l’expansion de l’accord de paix égyptien avec Israël en y intégrant les autres pays arabes.

    Les modifications israéliennes du statut d’Al Aqsa incluent l’imposition d’heures de visite séparées pour les musulmans et pour les juifs, et l’expansion des travaux d’excavation secrets sous la mosquée. Ces modifications interviennent en violation de l’accord de paix de 1994 entre les autorités jordaniennes et israéliennes donnant aux premières le contrôle sur le sanctuaire, parmi d’autres sites islamiques ; la réticence jordanienne à réagir face à ces violations n’est qu’une invitation à Israël à s’approprier le site. Israël viole déjà, et le droit international, et les sept résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies qui condamnent la tentative d’Israël d’annexer Jérusalem-Est – notamment les Résolutions 478 et 476 qui dénoncent la proclamation, par Israël, de Jérusalem comme sa capitale éternelle et indivisible.

    Ce ne sont plus seulement les extrémistes israéliens qui poussent à l’appropriation du sanctuaire et de l’enceinte de la mosquée. Les déclarations sur la démolition des sites islamiques en tant que sites païens, et sur la reconstruction du Mont du Temple en leur lieu et place, ne sont plus un discours chez les jusqu’au-boutistes uniquement.

    Des ministres et des membres de la Knesset, tels que le ministre de la Sécurité intérieure Gilad Erdan, le ministre de l’Agriculture Uri Ariel, et la membre de la Knesset Miri Regev, exigent maintenant de changer le statu quo afin de permettre aux juifs de venir prier dans le sanctuaire. Tsypi Hotovely, autre membre de la Knesset, qui a marqué son dernier jour de femme célibataire par une visite au sanctuaire, a pris une photo devant le Dôme du Rocher, se référant à lui comme au « site le plus sacré du judaïsme ».

    Moshe Feiglin, vice-président du parlement israélien, du parti Likoud, a déclaré il y a un an : « Je ne demande pas l’égalité au Mont du Temple ; il n’y a aucune égalité – il est à nous, et à nous seuls ». En outre, le mouvement religieux qui se développe rapidement profite du soutien israélien, gouvernemental, politique et financier – de même que du soutien des forces militaires israéliennes. Pendant ce temps, les autorités israéliennes font tout ce qu’elles peuvent pour interdire aux organisations et institutions palestiniennes musulmanes, tels le Murabiteen, le Murabitat et le mouvement islamique en Israël, toute action juridique et pacifique pour protéger l’identité musulmane du site.

    Les craintes des Palestiniens à propos de la mosquée ne sont pas déconnectées de la réalité. En 1967, dans les deux premiers jours de l’occupation de Jérusalem-Est, l’armée israélienne a entrepris précipitamment la démolition du quartier palestinien appelé Quartier marocain, dans la Vieille Ville, et celle de la mosquée Sheikh Eid, qui avait été construite sur l’École Afdalieh, l’une des plus anciennes écoles islamiques. Tout cela a été détruit pour ouvrir l’espace pour la place du Mur des Lamentations. Plus de cent familles palestiniennes ont reçu l’ordre de quitter leurs maisons, et celles qui ont refusé ont été ensevelies sous leurs propres maisons quand les bulldozers ont rasé le quartier.

    En 1994, la déclaration sur l’importance juive revendiquée pour la mosquée Ibrahimi a provoqué un massacre de fidèles palestiniens et une division spatiale de la mosquée. Peu après, les autorités israéliennes ont fermé 520 entreprises autour de la Vieille Ville et fermé aux Palestiniens la principale route qui traverse la ville afin de sécuriser un passage par un usage exclusif pour la population juive.

    Les craintes des Palestiniens se fondent sur l’expansion juive rapide dans la ville, la construction de petits commerces et du « Musée de la Tolérance » sur le cimetière islamique historique de Mamanullah, l’appropriation de maisons à Silwan et Sheikh Jarrah, et la réalisation du tramway et des téléphériques sur la terre palestinienne afin de rendre plus accessible la Vieille Ville de Jérusalem aux colons. Pendant ce temps, les Palestiniens sont traités comme des résidents temporaires dans la ville de leurs grands-parents, et punis pour leur lien biologique avec tous ceux qui défient l’occupation par la démolition de leurs maisons et la privation de leurs cartes de résidence.

    Les sentiments pandémiques de l’islamophobie ont fait que la communauté internationale – qui a décriée bruyamment la destruction de ruines et de temples antiques par les Talibans et ISIS – que cette communauté internationale est devenue sourde et muette devant les destructions israéliennes.

    Les autorités israéliennes offrent librement leur concours aux groupes religieux et aux bandes de colons pour qu’ils s’approprient tout Jérusalem, en refusant aux Palestiniens de la Cisjordanie et de la bande de Gaza occupées l’accès à la ville et à ses lieux saints. Même les habitants palestiniens de Jérusalem-Est sont séparés par des restrictions sur le sexe et l’âge quand ils souhaitent entrer à la mosquée et ils sont contraints de laisser leurs papiers d’identité à la porte, pour les récupérer un moment plus tard à un poste de police.

    Israël a fait tout ce qu’il a pu pour briser le lien spirituel et émotionnel des Palestiniens avec Jérusalem. Mais leur politique a conduit à l’effet inverse. La lutte pour la mosquée qui s’est engagée dans chaque ville, chaque commune et chaque village de la Palestine, démontre aujourd’hui que nous sommes conscients qu’il ne s’agit pas seulement de culte ou de religion, mais qu’il s’agit aussi de résister à une occupation illégale qui resserre son emprise sur Jérusalem-Est, qui s’empare de ce qui est le plus précieux pour tous les Palestiniens, qu’ils soient chrétiens ou musulmans.

    mercredi 21 octobre 2015 par Samah Jabr
     
  • Ces villages palestiniens qui vivent dans la peur des attaques des colons (Basta)

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    Alors que la Palestine s’embrase, les villages de Cisjordanie font face aux attaques quasi quotidiennes de colons israéliens installés sur leurs terres. Menaces, jets de pierres ou de cocktails Molotov, incendies de terres agricoles ou de maisons : ils rendent la vie impossible à leurs voisins arabes, jusqu’à brûler vive une famille palestinienne, fin juillet. Un harcèlement qui s’inscrit dans une logique de conquête de territoire et contribue à alimenter le cycle de violence actuel. Malgré des déclarations de principes, qualifiant les colons d’extrême droite de « terroristes », le gouvernement israélien les laisse perpétrer leurs exactions dans l’impunité la plus totale.

    « Nous intervenons dans 27 villages [environ 100 000 habitants en tout], que nous avons notamment sélectionnés en fonction du nombre d’attaques de colons dont ils étaient victimes chaque année », explique Mahmud Isleem, coordinateur pour Médecins du Monde. Depuis 2012, l’organisation a lancé un programme de soutien psychosocial aux populations victimes de violences dans le nord de la Cisjordanie, autour de Naplouse, suite au constat de l’intensification des agressions.

    Une attaque de colons toutes les 36 heures

    Jets de pierres ou de cocktails Molotov, incendies de terres agricoles ou de maisons : selon les chiffres des Nations Unies, les attaques des colons contre des Palestiniens ont été multipliées par quatre entre 2006 et 2014, atteignant un total de 2100 attaques sur ces huit ans. Soit une attaque toutes les 36 heures.

    Les agressions visent autant les personnes que les biens : maisons, voitures, écoles… Dans le village de Qusra, on compte au moins un incident par mois. A Urif, à 13 km au sud de Naplouse, une maison a été visée 18 fois. Jusqu’à ce qu’une ONG les aide à construire une clôture autour de la propriété. Certaines maisons se mettent à ressembler à des prisons, mais c’est la seule solution pour les protéger. « Les colons s’en prennent aussi beaucoup aux oliviers, en les coupant ou en les brûlant, car nous sommes dans des communautés rurales, qui économiquement, dépendent largement de la récolte des olives », précise Patricia Grillo, chargée de plaidoyer à l’ONG Première urgence internationale (PUI).

    Des attaques pour récupérer illégalement des terres

    Principales victimes : les villages situés à proximité des colonies, ou des avant-postes, les implantations qui n’ont pas été approuvées par le gouvernement israélien. Les colonies israéliennes sont illégales au regard du droit international puisque la Convention de Genève interdit strictement le transfert de population civile d’un État vers un territoire occupé, mais Israël n’en tient pas compte en autorisant une grande partie des colonies en Cisjordanie. Les avant-postes s’y installent sans autorisation du gouvernement, et violent donc également les lois israéliennes, mais ils bénéficient pourtant souvent d’une validation rétroactive. « Ils attaquent pour gagner du terrain, récupérer des terres », analyse Mahmud Isleem.

    Autre moteur des violences : la vengeance, avec le mouvement « le prix à payer », un mouvement informel dont se revendique les colons d’extrême droite. Ces colons ripostent ainsi à toute décision du gouvernement israélien qui ne leur serait pas favorable en s’en prenant au hasard aux Palestiniens. C’est notamment le cas après des évacuations d’avant-postes, qui sont illégaux même au regard de la loi israélienne.

    « On voit des gosses qui jouent aux colons et aux Palestiniens »

    « C’est la première fois que je vois autant d’incidents critiques en terme de fréquence. Au nord de la Cisjordanie, il y en a toutes les semaines. Et puis ce conflit dure depuis 60 ans », constate Maximilien Zimmerman, psychologue clinicien et coordinateur des programmes de santé mentale de Médecins du Monde en Palestine. Dans les villages où intervient l’organisation, un état de stress aigu semble être devenu la norme. Les familles évitent de sortir le soir, car c’est à ce moment-là que les risques sont les plus grands. Les parents ne laissent plus les enfants jouer librement dehors. Le climat de violence est présent dans tous les esprits, dès le plus jeune âge : « Dans ces endroits on voit des gosses qui jouent aux colons et aux Palestiniens, et on les voit imiter les incidents violents. »

    « La répétition des attaques impacte la vie des habitants de ces communautés, leur manière d’éduquer leurs enfants, leur sentiment de sécurité. Quand ils élèvent leurs enfants, la question se pose : pour quel avenir ? Tout peut arriver n’importe quand. Même quand ils ne sont pas directement impliqués, c’est ancré dans leur tête et dans leur esprit », observe Maximilien Zimmermann. Dans une culture où exprimer ses émotions est encore perçu comme une faiblesse, les gens somatisent beaucoup. Les tensions au sein des familles augmentent. Les parents sont souvent plus affectés, car ils se sentent responsables de leurs enfants, qu’ils ne sont pas toujours sûrs de pouvoir protéger.

    Une famille brûlée vive par des colons : « Un impact sans précédent »

    Le 31 juillet dernier, de nuit, deux colons s’introduisent dans le village de Duma (2000 habitants) et mettent le feu à la maison de la famille Dawabsheh, surprenant les parents et leurs deux enfants dans leur sommeil. Ali, un bébé de 18 mois, est brûlé vif. Ses parents, Sa’ad et Reham, mourront de leurs blessures dans les semaines suivantes. Ahmad, son frère de 4 ans, est toujours hospitalisé, victime de brûlures à 60%. Tout indique une attaque du « prix à payer ». Les auteurs ont laissé des graffitis derrière eux : « Vengeance » et « longue vie au Messie ». Le crime intervient alors que le gouvernement vient de démolir deux bâtiments de l’influente colonie de Beit El, suite à une décision de justice reconnaissant qu’ils étaient construits illégalement sur un terrain privé palestinien.

    Pour Médecins du Monde, l’impact de ce triple meurtre est sans précédent et va bien au-delà de Duma. « Duma, c’est incompréhensible en terme d’inhumanité. Insulter, jeter des pierres, c’est quelque chose. Mais brûler vif des gens dans leur sommeil… on passe un cap », analyse Maximilien Zimmermann. Jamais autant de victimes directes et indirectes n’auront sollicité une assistance psychologique. Près de la moitié des 70 personnes visitées a eu besoin d’une intervention psychologique d’urgence. Tout le monde se connait à Duma. Personne n’était préparé à entendre les cris de Sa’ad et Reham, à voir leurs corps presque totalement brûlés, à attendre avec eux l’ambulance, à sortir un enfant calciné de la maison. Dans les villages voisins, et jusqu’à 50 kilomètres à la ronde, l’attaque hante les Palestiniens. Tous se disent qu’ils auraient pu être la famille Dawabsheh, et qu’il pourrait y avoir une autre famille décimée à l’avenir. D’après les psychologues intervenus sur le terrain, Duma a un effet boule de neige, encore difficile à évaluer.

    Plus de 98% des crimes restent impunis

    L’incendie de Duma a été condamné de toutes parts, y compris par le gouvernement israélien qui l’a qualifié d’acte terroriste. Problème : à ce jour, les responsables n’ont pas été arrêtés, alors même qu’ils auraient été identifiés. Selon le ministre de la Défense israélien Moshe Ya’alon, une arrestation mettrait en danger les services de renseignement [1]. Dans ce climat d’impunité, malgré l’appel de Benjamin Netanyahu pour une « tolérance zéro » envers les colons violents, les attaques ont connu une recrudescence. Après Duma, Médecins du Monde en compte deux par semaine dans les villages où l’ONG est présente, davantage que les mois précédents.

    L’absence de sanction, là encore, n’a rien d’exceptionnel. D’après les chiffres de Yesh Din, une organisation israélienne de protection des droits humains, seuls 1,9% des cas de plaintes pour agressions par des colons aboutissent à une condamnation des auteurs des attaques. Dans bien des cas, les victimes renoncent à se signaler : porter plainte semble vain et beaucoup craignent de le payer en perdant, par exemple, leur permis de travail en Israël. Pour les ONG, cette impunité encourage la répétition des agressions. Les colons n’ont presque jamais à assumer les conséquences de leurs actes.

    Des Palestiniens sans protection, des colons accompagnés par l’armée

    Le contraste avec le traitement des Palestiniens auteurs d’attaques contre des israéliens est saisissant : eux sont exécutés sur le coup par l’armée, ou arrêtés dans les jours qui suivent, avec leurs complices, après des vagues d’incursions et de perquisitions dans toute la Cisjordanie. Leurs maisons font également l’objet de « démolitions punitives », qui touchent ainsi toute leur famille sans discrimination.

    Autre différence majeure : les colons, y compris pendant leurs attaques, sont protégés par les forces de sécurité israéliennes, qui n’hésitent pas à tirer sur les Palestiniens à coup de bombes lacrymogènes, balles en caoutchouc voire balles réelles si ceux-ci répliquent face aux agresseurs. Côté palestinien, aucune force de sécurité officielle. Les accords d’Oslo ne les autorisent pas à gérer la sécurité dans les zones B et C de la Cisjordanie, qui représentent 98% du territoire. Ce serait donc à Israël de protéger les populations dans ces zones. Et aux États tiers de faire pression sur l’État hébreu pour respecter cette obligation en vertu du droit international. En l’absence de réaction des uns et des autres, les violences des colons se perpétuent.

    La colonisation par l’instauration de « zones de peur »

    Les acteurs humanitaires s’entendent pour dire que ces actes violents doivent être mis en lien avec la politique de colonisation de la Cisjordanie. D’après l’organisation israélienne Yesh Din, ils font partie des stratégies d’accaparement de ce territoire par ceux qui le considèrent comme la Judée et Samarie, une terre israélienne. Cela passe par l’installation des colonies et avant-postes, la déclaration de zones de sécurité ou zones militaires autour de ces implantations, l’appropriation de terrains pour leurs infrastructures… puis l’instauration de « zones de peur » où en raison des violences et du harcèlement les Palestiniens n’oseront plus aller [2]

    Le mouvement du « prix à payer », quant à lui, contribue à faire pression sur le gouvernement israélien pour obtenir des politiques favorables à la colonisation. En 2013 la ministre de la justice israélienne Tzipi Livni propose de les sanctionner comme des terroristes, proposition qui sera rejetée par Benjamin Netanyahu. L’absence de fermeté d’Israël à l’encontre de ces factions – ils ne représentent qu’une partie des 340 000 colons – est souvent perçue comme un soutien implicite à la colonisation. Impression alimentée par la poursuite des implantations en Cisjordanie et la légalisation a posteriori des avant-postes.

    Les gens qui vont mieux sont souvent ceux qui sont actifs dans la lutte

    Selon Mahmud Isleem, « les Palestiniens restent parce qu’ils ne veulent pas devenir des réfugiés ». Mais pour Maximilien Zimmerman, « dans une situation pareille, il est difficile de se projeter dans l’avenir, de donner du sens à l’existence, de faire des projets ». Dans la région, les sources de frustration sont multiples : expansion des implantations israéliennes illégales en Cisjordanie, conflit autour de la mosquée d’Al Aqsa, démolitions, restrictions de mouvements, arrestations, impossibilité de développer l’économie, enfermement et bombardements de Gaza, radicalisation d’une frange de plus en plus importante de la société israélienne à l’encontre des Palestiniens…

    La cohabitation avec des colons agressifs et les confrontations avec l’armée sont à replacer dans un contexte de sentiment d’oppression et d’injustice plus large, à l’échelle de tout un territoire, et sur des décennies. « Ce qu’on fait est un sparadrap sur une plaie qui ne se refermera pas tant que le conflit est là », conclut Maximilien Zimmermann. « Finalement, on constate que les gens qui vont mieux sont souvent ceux qui sont actifs dans la lutte : ils gèrent mieux d’un point de vue psychologique. Les gens désespérés, passifs, ont une souffrance plus grande que ceux qui vont s’engager dans un mouvement, une ONG, ou une forme d’expression artistique pour transformer ces émotions négatives. » Avec la montée des tensions dans toute la Cisjordanie, les attaques se sont intensifiées et les acteurs de terrain peinent à tenir les comptes. L’issue de cette escalade est pour le moins incertaine mais les impacts sur les communautés seront forcément significatifs.

    Antoine Besson 20 octobre 2015

    Notes

    [1Lire ici.

    [2Voir Yesh Din, Under the radar, mars 2015.

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    http://www.bastamag.net/Palestine-ces-villages-qui-vivent-sous-la-menace-des-colons-violents

  • Quand Paris Match prétend qu’un drapeau palestinien est « un masque aux couleurs du Hamas » (Acrimed)

     

    La situation en Israël et dans les territoires palestiniens fait de nouveau l’actualité. Nous aurons l’occasion de revenir sur le traitement médiatique des récents « événements » dans les jours à venir, qui reproduit malheureusement la plupart des travers que nous avons déjà eu l’occasion d’identifier par le passé [1].

    Mais nous ne pouvons d’ores et déjà nous empêcher de signaler la remarquable – au sens strict du terme – bévue de l’hebdomadaire Paris Match dans sa livraison du 15 octobre 2015, avec le curieux choix de légende d’une photo illustrant un article sur la situation à Jérusalem (page 70) :

    Ou comment un drapeau palestinien devient un… « masque aux couleurs du Hamas ».

    Méconnaissance ? Incompétence ? Précipitation ? Nous ne le savons pas. Mais ne pas reconnaître le drapeau palestinien, pourtant récemment hissé au siège de l’ONU, et soupçonner « instinctivement » les jeunes Palestiniens et Palestiniennes qui luttent contre les forces israéliennes d’être sous la coupe du Hamas en dit long. Cette bévue est en effet révélatrice de l’ignorance et des parti-pris, conscients ou non, de certains journalistes et de certaines rédactions sur le dossier palestinien, et des ravages de la « pensée automatique ». Ce qui est d’autant plus blâmable ici que l’article illustré par cette photo est de fort bonne tenue. Encore un effort ?

    Colin Brunel lundi 19 octobre 2015

    PS : merci au lecteur qui nous a signalé cette photo.

    http://www.acrimed.org/Quand-Paris-Match-pretend-qu-un-drapeau-palestinien-est-un-masque-