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Algérie - Page 10

  • Oran (Algérie) débatise la rue Fernand Iveton « Fernand avait cru et combattu jusqu’à la mort pour une Algérie libre » (ESSF)

    Fernand Iveton avait cru et combattu jusqu’à la mort pour une Algérie libre (Mohamed Rebah, Le Matin d’Algérie)

    Pétition au Ministre des Moudjahidin Algérie

    Non à la débaptisation de la rue Fernand Iveton à Oran

    Le Nom de Fernand Iveton a été effacé de la rue qui portait son nom au quartier Ederb d’Oran. Né le 12 juin 1926 au Clos-Salembier (Alger) et guillotiné le 11 février 1957.

    la débaptisation est une décision grave, et ce, :

    - Pour la crédibilité et l’honneur des institutions

    - Pour la mémoire de ceux et celles qui ont donné leur vie et leur jeunesse pour l’Algérie, quelque soit leur origine, leur religion ou leur sexe.

    Nous citoyens et citoyennes , signataires de cette pétition, exigeons que le nom de Fernand Iveton, mort comme ses frères au combat soit réhabilité et remis en lieu et place sur les murs de la rue qui portait son nom.

    Gloire à nos Martyrs https://secure.avaaz.org/fr/petition/Ministre_des_Moudjahidin_Algerie_Non_a_la_debaptisation_de_la_rue_Fernand_Iveton_a_Oran/

     

    A l’aube du 11 février 1957 : Fernand Iveton

    Je voudrais associer à cet hommage particulier que nous rendons à un Algérien descendant d’immigrés européens, l’ouvrier-tourneur Fernand Iveton, le souvenir de ses frères de combat, des travailleurs soumis comme lui à l’exploitation coloniale, Ahmed Lakhnèche et Mohamed Ouennouri, morts tous les trois pour le même idéal, le même jour, presqu’à la même heure, à deux et trois minutes d’intervalle, mêlant leur sang chaud au pied de la guillotine, Et, à travers eux, dédier cet hommage à toutes celles et tous ceux qui ont mis leur vie en péril en s’engageant, corps et âme, dans la dure et longue lutte pour l’indépendance nationale.

    En évoquant le combat héroïque de l’enfant de la classe ouvrière, Fernand Iveton, nous avons également une pensée pour son compagnon d’armes, Taleb Abderrahmane, l’étudiant en chimie qui a mis ses compétences au service de la Patrie, bravant tous les dangers. Il est mort, lui aussi, la tête tranchée par la guillotine. C’était le 24 avril 1958, à l’aube, à 3 heures 17. Il avait 28 ans. Plus d’un millier d’universitaires français de renom étaient intervenus auprès du chef de l’Etat français pour arracher sa grâce. En vain.

    Avec l’exécution de Fernand Iveton, le 11 février 1957 à 5 heures 10, sur l’échafaud dressé furtivement au milieu d’une nuit glaciale dans la cour de la prison de Barberousse, dans la Haute Casbah, le bourreau attitré, Maurice Meyssonnier, descendant d’immigrés européens, patron de bar de son état, était à sa vingt et unième victime parmi les patriotes algériens.

    Fernand Iveton était lui aussi descendant d’immigrés européens. « C’était un pied noir typique : père français, mère espagnole », écrit son avocat parisien, Joë Nordmann, dans son livre « Aux vents de l’histoire », paru aux éditions Actes sud, en 1996. Mais « celui-là n’est pas comme les autres », avait dit, un jour, Didouche Mourad à son ami Ahmed Akkache. S’il y en avait beaucoup comme lui, cela aurait changé bien des choses". C’était vers la fin des années 1940, au quartier de La Redoute.

    Par « les autres », Didouche Mourad désignait ceux qui, contaminés par le racisme d’Etat, formaient la communauté française. « Cette société des »Français d’Algérie« dont parle, l’auteur de »La Question« , Henri Alleg, dans son livre »La Guerre d’Algérie«  : »Si diverse et si contradictoire, écrit-il, (elle) avait au moins une certitude commune qui faisait la force idéologique et politique de la grosse colonisation. Elle ne jouissait de ces « privilèges », pour aussi misérables qu’ils fussent, que parce qu’elle était l’heureuse élite, celle à qui la providence avait confié la tâche de régner sur les indigènes. Cela chacun l’apprenait avant même de savoir lire.« L’éducation familiale du mépris de l’indigène, du mépris de l’Arabe, était relayée par l’école. L’école publique française – conçue par Jules Ferry – contribua grandement à la construction d’un racisme d’Etat, en Algérie, en instituant une différence de statut entre les enfants européens (section »A« ) et les enfants indigènes (section B), et sa diffusion à travers les livres et les manuels scolaires. C’était dans la logique des choses, car, comme l’écrit le poète et homme politique martiniquais Aimé Césaire, »il n’y a pas de colonialisme sans racisme". Le racisme d’Etat était matérialisé par le Code de l’Indigénat.

    Fernand Iveton est né le 12 juin 1926, à la rue de la Marine, à Alger. Sa famille quitta le quartier pied-noir de Bab el Oued pour s’installer au Clos-Salembier, rue des Lilas, puis rue des Coquelicots où son père, ouvrier électricien, bâtit de ses propres mains une maison. Dans ce grand quartier peuplé majoritairement d’autochtones, où il passa son adolescence et sa prime jeunesse, Fernand Iveton, ouvrier-tourneur à l’E.G.A (Electricité Gaz d’Algérie), était connu pour ses solides convictions communistes. Les militants du PPA-MTLD, qu’il côtoyait au syndicat CGT des gaziers-électriciens, l’estimaient pour sa droiture.

    Il aimait l’ambiance sportive. Le samedi après-midi, on le voyait sur un terrain de football avec ses camarades de travail, Algériens et Européens, portant les couleurs du club corporatif de l’EGA, affilié à la Fédération gymnique et sportive du travail (FSGT), raconte son camarade de lutte, Maurice Baglietto.

    Fernand Iveton avait foi en une Algérie indépendante, juste et solidaire. Il avait suivi le chemin choisi par son père, militant communiste et syndicaliste, ouvrier à la société d’électricité Lebon avant qu’elle ne soit nationalisée en 1946. Il acquit les principes de liberté et d’indépendance nationale à travers les luttes ouvrières menées, côte à côte, avec les travailleurs musulmans, victime comme eux de la répression coloniale.

    C’est sur le terrain de ces luttes ouvrières et politiques, qui connurent un essor formidable entre 1947 et 1954, qu’il faut chercher les racines de son intégration à la nation algérienne à laquelle il donna sa vie.

    D’où cet hommage particulier.

    Par sa forte concentration intérieure, Fernand Iveton était de cette élite ouvrière européenne qui a pu se dégager de la mentalité colonialiste. « Il avait très tôt assimilé cette notion d’indépendance, à l’image d’autres Européens militants du PCA, comme Henri Maillot, Maurice Laban, Maurice Audin et d’autres. A ses yeux, la seule issue pour les Européens était de se détacher du système colonial », témoigne l’auteur de « La Question », Henri Alleg

    Fernand Iveton s’engagea dans la lutte armée avec la création, en juin 1955, des Combattants de la libération - la branche armée du PCA. A sa dissolution, en juin 1956, suite à l’accord PCA-FLN, il intégra, avec ses camarades, les rangs du FLN, guide unique du combat libérateur. Il fut membre du groupe d’action du Champ de Manœuvres dirigé par l’ouvrier métallurgiste à l’usine Neyrpic et syndicaliste, M’hamed Hachelaf.

    A propos de son activité, Jacqueline Guerroudj, rescapée de la guillotine, relate dans son livre-témoignage « Des douars et des prisons » : « L’objectif des fedayin, clairement exprimé, était, selon l’idée émise par Fernand Iveton qui connaissait bien les lieux à l’usine à gaz du Hamma où il travaillait, de placer des bombes sous les tuyaux à un endroit choisi pour que les dégâts empêchent l’usine de fonctionner, privant ainsi Alger d’électricité ».

    Jacqueline Guerroudj, qui assurait la liaison au sein du groupe, remit à Fernand Iveton les deux bombes réglées par l’étudiant en chimie, Abderrahmane Taleb, pour exploser à 19 heures 30, à l’heure où l’usine est totalement vidée de son personnel.

    Mais sa musette ne pouvant les contenir toutes les deux, il ne put en prendre qu’une seule. En arrivant à l’usine, il mit sa musette (un sac de sport) dans son placard. Le contremaître, qui le surveillait de près, entendit le « tic-tac » du réveil et courut alerter la police. Fernand Iveton, arrêté sur-le-champ, fut immédiatement conduit au Commissariat central d’Alger.

    Nous sommes le mercredi 14 novembre 1956. Fernand Iveton est soumis, durant trois jours, à d’atroces tortures, tortures relatées dans un Mémoire qu’il remit à son avocat, Joë Nordmann.

    Le 25 novembre 1956, le Tribunal militaire d’Alger prononce à son encontre la peine de mort, « au motif qu’il avait voulu faire sauter Alger », selon les propres mots de Jacques Soustelle, ancien gouverneur d’Algérie. Le procès se déroula dans un climat de haine raciale, alimenté et dirigé par des groupes fascistes, partisans féroces de l’Algérie française, qui avaient créé, en janvier 1956, un comité de Défense et d’Action pour l’Algérie française, berceau de l’OAS.

    A l’aube du 11 février 1957, soit 80 jours à peine après son procès, la lame de la guillotine, ce procédé sauvage, symbole de la barbarie fasciste, s’abat sur son cou. Dans le couloir qui le conduisait à l’échafaud, Fernand Iveton lança un vibrant « l’Algérie libre vivra ».

    C’est un des descendants de ces oiseaux de proie qui se sont abattus sur nos rivages dès 1831, « des trafiquants, aventuriers, spéculateurs, pègre des ports méditerranéens de France, d’Espagne, d’Italie, de Grèce, de Malte…, le patron de bar, Maurice Meyssonnier, qui fit tomber la lame ».

    Le recours en grâce avait été refusé à Fernand Iveton, le 10 février 1957, par le Président de la République française, René Coty, en accord avec le garde des sceaux, François Mitterrand et le secrétaire général de la SFIO, Guy Mollet, Président du conseil.

    C’était la période où la « Question algérienne » était inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée générale de l’O.N.U. Le socialiste Guy Mollet avait adressé, au mois de janvier, une lettre ouverte à cette haute institution internationale, dominée par les Etats membres de l’OTAN sous la houlette des Etats-Unis, pour dire que la guerre d’indépendance conduite par le FLN était, en fait, dirigée par les communistes à partir de Moscou. Il voulait ainsi créer un climat général de peur en exagérant la présence des communistes dans l’armée de libération nationale.

    Pour le gouvernement français dominé par les socialistes de la S.F.I.O, qui s’appuyait sur la communauté européenne raciste pour garder l’Algérie française, la décapitation rapide du fidaï Fernand Iveton devait absolument servir d’exemple.

    La mort de Fernand Iveton fut effectivement un exemple. Un exemple qui « éclaira la route » de milliers d’autres jeunes patriotes dans la longue lutte pour briser les chaînes séculaires de la servitude. Au greffe, Fernand Iveton, calme et détendu, prononça ces paroles recueillies par son avocat, Maître Albert Smadja : « La vie d’un homme, la mienne, ne compte pas. Ce qui compte, c’est l’Algérie, son avenir... » Ultimes paroles qu’il laisse comme un message-testament aux générations qui auront à bâtir l’Algérie indépendante.

    Avant d’aller au supplice, il embrasse ses frères de combat, Ahmed Lakhnèche et Mohamed Ouennouri, clamant, tous les trois, à l’unisson « Vive l’Algérie libre ! » Le cri des trois fedayin fut repris en chœur par la prison toute entière. Partis des terrasses des maisons de la Casbah voisine, parvinrent à la prison le chant patriotique « Min Djibalina » et les youyous des femmes admirables de courage.

    De cet homme aux vues lointaines, son avocat, Maître Joë Nordmann garde un souvenir fervent. « Sa droiture, sa clarté d’esprit, sa fidélité aux principes de liberté et d’indépendance, écrit-il dans ses Mémoires, m’impressionnèrent beaucoup lorsque, pour la première fois, je le rencontrai à la prison Barberousse d’Alger. Il avait trente ans ». Dans une lettre écrite de prison à son épouse, Fernand Iveton dit en substance : « Pour l’Algérie de demain, avec la lutte de classe qui s’annonce, nous avons besoin de tous les camarades ».

    Ses fidèles compagnons de lutte ne l’oublient pas. Chaque année, à la date du 11 février, ils se recueillent sur sa tombe, au cimetière de Saint Eugène (aujourd’hui Bologhine) pour évoquer son courage exceptionnel. Deux étudiantes de l’Institut des sciences de l’information de l’Université d’Alger consacrèrent un important chapitre à son combat, dans un Mémoire de licence soutenu en juillet 2011.

    Du fond de sa cellule de Serkadji, juste après la sauvage décapitation par la guillotine de Fernand Iveton, Ahmed Lakhnèche et Mohamed Ouennouri, Annie Steiner écrit :

    Ce matin ils ont osé

    Ils ont osé

    Vous assassiner

    C’était un matin clair

    Aussi doux que les autres

    Où vous aviez envie de vivre et de chanter

    Vivre était votre droit

    Vous l’avez refusé

    Pour que par votre sang d’autres soient

    libérés

    Que vive votre idéal

    Et vos sangs entremêlés

    Pour que demain ils n’osent plus

    Nous assassiner

    Mohamed Rebah

    Chercheur en histoire et auteur

    Ce texte a été donné en communication au Centre culturel algérien à Paris en décembre 2011

    A la mémoire de Fernand Iveton Sur Canal Algérie

    EMISSION LES VENDREDIS DE L’HISTOIRE

    Documentaire sur le parcours d’Annie Steiner. Elle évoque l’exécution de Fernand Iveton

    Ce vendredi 16 septembre 2016, à 20 heures 30 (après les informations de 20 heures)

     

    * http://www.lematindz.net/news/21770-a-laube-du-11-fevrier-1957-fernand-iveton.html

    Le martyr de la Guerre de Libération Fernand Iveton tué une deuxième fois

    Cette fois-ci c’est l’ignorance qui a frappé. Elle est à l’origine immédiate de la débaptisation d’une rue portant son nom à Oran. Les autorités locales l’ont remplacé par celui d’un autre chahid.

    Les citoyens d’Oran pouvaient jusque-là éprouver un légitime sentiment de fierté. Après l’indépendance ils avaient été les seuls à avoir donné son nom à une de leurs rues en hommage à son sacrifice suprême pour la libération du pays de l’oppression colonialiste.

    Fernand Iveton fut guillotiné en février 1957 en même temps que deux autres de ses compagnons de lutte, Mohamed Ouenouri et Mohamed Lakhnèche.

    On serait donc tenté de faire preuve d’indulgence en mettant ce déni, de prime abord incompréhensible, sur le compte d’une simple ignorance. On peut penser que les responsables locaux se seraient basés sur la consonance non arabe du nom pour rayer celui de Fernand Iveton.

    Mais cela ne les excuse nullement. Ils auraient pu se renseigner avant de commettre leur acte. Cela prouve en tout cas qu’ils ne se donnent même pas la peine de lire la rubrique culturelle des journaux. Sinon ils auraient appris qu’un livre vient d’être tout récemment édité en hommage à son martyre. Ici l’ignorance n’est plus une excuse. Elle est absolue et impardonnable pour des responsables présidant à la perpétuation de la mémoire combattante de l’Algérie.

    Il faut aller au delà de ce constat apparent.

    Cette ignorance n’a rien de fortuit ou d’accidentel. Elle est le produit de la méconnaissance organisée par les autorités du pays sur la participation des communistes algériens, de toutes origines, au combat pour la libération du pays. Ici il faut saluer Ben Bella. Il a droit à la reconnaissance de tous les patriotes honnêtes. Sans lui il est plus que probable qu’aucun lieu n’aurait porté le nom de Maurice Audin assassiné par les paras en juin 1957. Combien sont ceux dans la nouvelle génération qui ont entendu parler de Laban, Counillon, Raymonde Peschard, Maillot, Ghennaïssia, etc., morts au combat, les armes à la main pour délivrer le pays de l’oppression coloniale ?

    Certains continuent à voir dans la Plate-forme de la Soummam la proclamation des fondements d’un « Etat démocratique et social » moderne éloigné de toute étroitesse ethnique ou religieuse. On se demande en quoi ?

    Question légitime quand on sait que ce document dans sa partie politique, a jeté l’anathème sur le PCA de façon totalement calomnieuse, injuste, et injustifié, si ce n’est par désaccord avec les choix de classe devant être faits après la libération. Or, de par sa composition ethnique multiple, son internationalisme, son ouverture intrinsèque sur les langues nationales et la culture universelle, ce parti était le seul à incarner véritablement toutes ces caractéristiques. S’il avait commis des erreurs, elles étaient moins graves que celles des dirigeants nationalistes qui furent investis de hautes responsabilités par les organisateurs du congrès de la Soummam. Ces erreurs furent publiquement reconnues et leurs racines exposées dans des autocritiques sans complaisance. Le PCA a été le seul parti à refuser la pratique de l’auto-glorification.

    Akram El Kebir, correspondant du journal el Watan, qui a attiré l’attention sur cette vilénie écrit dans l’édition du 6 septembre :

    "Indignés, deux habitants de cette rue se sont rendus, hier, à notre bureau, pour se plaindre de cet état de fait. La rue Fernand Iveton s’appelle désormais rue du chahid Bachir Bouamer. « Je trouve que c’est bien qu’une rue porte le nom d’un autre chahid, mais pourquoi au détriment de Fernand Iveton ? » se désole Nourredine, la soixantaine, qui trouve scandaleux qu’on ait débaptisé le nom d’Iveton de cette rue qui jouxte le célèbre quartier populaire d’El Derb.

    Il faut noter que ce genre de procédé n’est pas isolé et répond, le plus souvent, à une méconnaissance des élus ou des responsables à qui est confiée la tâche de baptiser, qu’à une volonté farouche de porter atteinte à la mémoire et à l’histoire.

    On se rappelle, à titre d’exemple, de cette anecdote qui prévalait dans les années 1980, quand des élus avaient proposé, ni plus ni moins, de débaptiser la rue Max Marchand (non loin de Gambetta), sans savoir que cette rue avait été nommée après l’indépendance de l’Algérie, et que Max Marchand était un ami de l’Algérie algérienne, assassiné peu après le 19 mars 1962 par des militants de l’OAS.

    Pour revenir à Fernand Iveton, notons qu’un livre très poignant vient de lui être consacré, écrit par un jeune écrivain français Joseph Andras. Paru en mai dernier aux éditions Barzakh, le livre s’intitule « De nos frères blessés » et est disponible dans toutes les bonnes librairies algériennes."

    R. N. 07.09.16

    Alger républicain
    http://www.alger-republicain.com

    https://www.facebook.com/AlgerRepublicain/posts/1779701292288860

    REBAH Mohamed

    http://www.europe-solidaire.org/

  • 17 octobre 1961 (Que faire?)

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    À propos de La Bataille de Paris de Jean-Luc Einaudi

    Le 17 octobre 2011, la Ve république devra se souvenir de l’un des évènements les plus abjects de son histoire. En référence au film de Gillo Pontecorvo La bataille d’Alger, Jean-Luc Einaudi dresse un parallèle effarant en mettant en lumière le sort qui fût réservé aux « Français Musulmans d’Algérie » durant la période qui entoura le 17 octobre 1961.

    Pour Jean-Luc Einaudi, la « bataille de Paris » remonte à la guerre interne au mouvement indépendantiste algérien.

    Le conflit opposant le Front de Libération Nationale (FLN) au Mouvement National Algérien (MNA), qui a pour but le contrôle de la communauté algérienne, fait une centaine de morts. Si le FLN remporte cette lutte d’influence dans les années 50, c’est encore par la force qu’il doit s’imposer auprès de la population algérienne en obligeant les algériens qui résident en France à cotiser 3 000 francs par an.

    Devenu enfin hégémonique en 1958, le FLN peut alors lancer son offensive sur le territoire français.

    Les cibles visées sont des lieux stratégiques pour l’économie française mais aussi des commissariats, où des policiers perdent la vie. Comme le montre un certain nombre de procès-verbaux de syndicats policiers, les policiers s’indignent de la trop faible répression envers les militants du FLN.

    Il est alors mis en évidence par toute une série de témoignages que la population d’origine algérienne vit une véritable montée des violences policières à son égard.

    Vivant dans des conditions des plus précaires, les algériens sont victimes de « ratonades ». Ce terme désigne les rafles qui sont organisées en pleine rue, généralement la nuit, où les policiers ramassent des individus typés maghrébins, les font monter violemment dans des cars de police et les tabassent au commissariat. Une fois que ces innocents ont perdu connaissance, ils sont jetés dans la Seine, beaucoup mourront. C’est ce que Chebbah Iddir explique, un des nombreux témoignages récoltés par J-L Einaudi : « Les cinq policiers me firent monter dans le car. Là ils me fouillèrent mais ne trouvèrent rien. Alors que nous étions partis vers Colombes, les policiers firent monter dans le car un de mes compatriotes. Puis le car prit la direction de la seine. On s’arrêta près du pont d’Argenteuil. Les policiers firent d’abord descendre mon compatriote. Ils lui donnèrent des coups de crosse jusqu’à ce qu’il soit assommé. Puis le chauffeur le prit par les pieds et un autre par la tête. Ils le jetèrent dans l’eau. Peu après, je vis des petites bulles apparaître à la surface de l’eau. Mon frère était mort. » Grâce à un courage effarant C. Iddir réussit, lui, à s’en sortir.

    Ces violences racistes ne sont pas à déconnecter d’une discrimination orchestrée par l’État français.

    Celle-ci vise à faire payer la perte de l’Algérie aux Algériens résidant en France. Car si De Gaulle, fraîchement arrivé au pouvoir, veut en finir avec la guerre d’Algérie, des membres importants de son gouvernement ne l’entendent pas ainsi. Premier ministre, Michel Debré veut mener une guerre sans concession au FLN, et n’hésite pas à couvrir tous les crimes policiers. Et puis il y a celui que les militants pro-algériens appellent Charogne, celui que la république nomme M. Papon. L’auteur en trace un long portrait : collabo, tortionnaire à Constantine, il fût nommé préfet de police de Paris en mars 1958. Dès le 28 août, il organise une rafle de 5 000 algériens qui sont internés dans des lieux comme le Vel d’Hiv, qui rappelle des heures bien sombres. Là encore on pense qu’il y a eu des morts.

    Mais c’est en août 1961 que les violences s’intensifient.

    Les rafles diviennent quotidiennes, les arrêtés sont désormais constamment tabassés, humiliés voire tués. Un remaniement ministériel a lieu, où il est décidé de l’éviction d’Edmond Michelet qui était partisan de l’autonomie algérienne. Courant septembre 61, l’institut ­médico-légal relève 21 cadavres nord-africains, tous morts à la suite de violences. Le couvre-feu imposé aux FMA est déclaré le 5 octobre 1961. Face à la mise en place d’un véritable régime d’apartheid, le FLN est désormais hégémonique auprès de la population algérienne. Le 17 octobre 1961, les FMA seront volontaires pour défier pacifiquement le couvre-feu, imposé par un régime on ne peut plus raciste et appliqué par une police on ne peut plus assassine.

    Ces violences racistes ne sont pas à déconnecter d’une discrimination orchestrée par l’État français. Celle-ci vise à faire payer la perte de l’Algérie aux Algériens résidant en France Dans des termes des plus froids, Jean-Luc Einaudi retrace heure par heure, faubourg par faubourg et rue par rue le 17 octobre 61.

    On compterait environ 40 000 algériens désarmés qui seraient venus manifester en plein cœur de Paris.

    Sauf que la plupart d’entre eux n’arriveront jamais à former un cortège. De par les nombreux témoignages reçus, l’auteur montre la manière dont toutes les sorties de métro sont quadrillées. Dès que les algériens en sortent ils sont matraqués. Mains sur la tête, parfois inconscients, ils sont emmenés dans des bus affrétés par la RATP vers des commissariats, des centres d’internement ou des lieux réquisitionnés. À leur descente du bus ils sont de nouveau insultés, tabassés, et volés. La plupart des blessés graves ne recevront aucun soin et mourront. Par détermination, les Algérien arrivent malgré tout à former quelques cortèges. Les policiers tireront dans le tas, tuant femmes, hommes et enfants.

    Face à ce déchaînement de haine qu’ont fait les témoins ?

    Quelle fut la réaction de la population française ? Au mieux elle se rendit coupable de passivité. En effet, ­l’ouvrage démontre que bien peu de réactions ont émergé des témoins présents. Pire, des petits groupent se sont créés pour indiquer aux flics où se réfugiaient les manifestants.

    Il n’est donc pas étonnant que tout le monde ait voulu étouffer ce massacre pour mieux l’oublier ensuite. L’humanité parlera de violences importantes mais, prétextant la peur de la saisie, jamais le journal ne mènera l’enquête pour savoir ce qu’il s’est réellement passé. La population française se rassembla par centaines de milliers pour protester contre les 9 morts de Charonne, mais par quelques centaines seulement après le 17 octobre. Combien de morts ? Comment le savoir puisqu’aucune commission d’enquête n’a pu être saisie. Mais d’après les rapports du FLN, on monterait à plus de 300.

    Le livre se termine par un dernier évènement. En se rendant à une commémoration en 1990, un Algérien est arrêté par la police… au faciès. Cette anecdote, qui n’en est pas une, nous rappelle que le 17 octobre 61 n’est pas très loin, que les violences policières n’ont jamais disparu et que la racisme d’État agit toujours.

    par Gaël Braibant 25 mai 2012

    http://quefaire.lautre.net/17-octobre-1961

  • Zina Harraïgue : une grande figure de la Révolution algérienne nous quitte (ESSF)

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    Nous venons d’apprendre le décès de Zina Harraïgue-Benadouda.

    Pour beaucoup d’entre nous et surtout pour la nouvelle génération d’Algériennes et d’Algériens ce nom pourrait ne rien évoquer. Mais il nous semble important d’évoquer ce que Zina a été et surtout a donné pour qu’aujourd’hui nous puissions encore nous prévaloir de vivre dans un pays libre et indépendant. Permettez-moi d’apporter ce court résumé de son parcours recueilli de son vivant avant que la longue maladie dont elle souffrait ait fini par l’emporter.

    Une enfance difficile

    Née en 1934 d’une famille mixte (père algérien, mère allemande), Zina est sœur de 5 garçons et 2 filles. Orpheline de père à 8 ans, elle mène une vie difficile, guettée par le typhus et d’autres maladies endémiques que la misère générale faisait être le lot quotidien de la plupart des Algériens de l’époque. Pour y faire face, elle est obligée de travailler très jeune en gardant les enfants des familles européennes nanties.
    Ballottée entre Bougie et Sétif, elle va connaître à 11 ans sa première expérience politique en assistant aux massacres du 8 mai 1945. Marquée par l’événement, elle deviendra sensible aux propos de ses frères engagés dans la lutte clandestine du PPA.

    De 1945 à 1954, contrainte et forcée par les dures conditions d’existence, elle quitte l’école pour travailler comme fille de salle – infirmière dans une clinique de la ville. En novembre 1954, elle part pour la France avec sa mère, deux de ses frères et une sœur.

    C’est là que commence le travail en usine : fabrication à la chaîne de boulons pour bateaux de 6h du matin à 6h du soir.

    Une première responsabilité par délégation de pouvoir

    Militant nationaliste et syndicaliste, son frère est arrêté et déporté à la prison de Berrouaghia. Les ouvriers de l’usine viennent voir Zina et lui demandent de prendre la place du frère pour les représenter au syndicat. Elle avait déjà fait l’écrivain public pour eux.

    Au retour de prison, le frère réunit les ouvriers et les convainc de rejoindre le FLN. C’est la période de l’affrontement entre messalistes et frontistes pour s’assurer le contrôle de l’émigration. La région de Lyon, Saint Etienne, Firminy est un véritable champ de bataille et Zina s’y trouve impliquée pour le transport d’armes et la liaison avec les responsables régionaux et centraux. C’est là qu’elle rencontre Kaddour Ladlani, et Salah Louanchi, de la direction de la Fédération de France du FLN.

    Le travail pour l’organisation commence à l’emporter sur le travail à l’usine. Les jours fériés et les congés de maladie ne suffisent plus à justifier ses absences. Elle quitte donc l’usine pour s’adonner au travail de l’organisation clandestine à plein temps.

    Intégrée dans une cellule dont le frère était responsable [1], elle finit par assumer pratiquement les charges les plus ingrates : transport de documents, d’armes, d’argent pour les « groupes de choc ».

    « Elle est la seule à pouvoir passer inaperçue » et puis c’est la sœur de celui auquel les militants vouent un grand respect. Omar Harraïgue lui-même trouve en elle la seule personne en laquelle il puisse vouer une totale confiance. La voici donc investie de toute la confiance et de toutes les charges de liaison et communication.

    Les déplacements deviennent plus importants ; ils atteignent une échelle régionale. Ils comprennent même parfois l’accompagnement de hauts responsables pour leur servir de couverture.

    Une nouvelle responsabilité par délégation de pouvoir

    1957 est l’année qui voit la mise en place de l’Organisation spéciale de la Fédération de France du FLN (dorénavant OS.FFFLN). Zina y est intégrée sans qu’elle le sache vraiment. Elle subit les mêmes tests et les mêmes épreuves que les militants hommes qui ont été sélectionnés pour en faire partie.

    La sphère de ses missions s’élargit, le réseau des liaisons s’étend maintenant à tout le territoire français et c’est à elle, entre autres, que revient la lourde charge du transport de l’argent entre Lyon et Paris ainsi que celui des armes dans le sens inverse. Elle devient le contact principal de la wilaya du Sud avec la direction de la fédération. Elle rencontre toute la nomenclature de la FFFLN : Boudaoud, Bouaziz, Kebaïli, Manaa, Benadouda etc.

    Elle finit par être recherchée par les services de police français et condamnée elle aussi par contumace. Elle entre alors en clandestinité au moment même où son frère quitte le territoire français pour rejoindre l’armée de libération nationale aux frontières.

    « J’ai obtenu ainsi mon indépendance » dit-elle, en fait, elle devient libre de tout ancrage local ou régional. Elle ne sert plus de couverture à personne sauf s’il s’agit d’accomplir une mission dans le cadre des opérations militaires engagées par le FLN-ALN en territoire français.

    Elle fait l’apprentissage de la fabrication des bombes, du maniement des armes et s’implique dans les attentats visant des personnalités politiques entre autres Jacques Soustelle et le sénateur Benhabylès.

    En 1959-1960, elle prend la responsabilité de l’armement comme adjoint d’Aït Mokhtar quand l’O.S. est démantelée et qu’il n’y a plus, pour un temps, d’hommes pour accomplir cette mission.

    Adjoint d’Aït Mokhtar c’est-à-dire adjoint du principal responsable de l’O.S. encore en territoire français, soit un degré de responsabilité qui aurait placé n’importe quel homme au rang d’officier d’une unité de combat.

    Passages aux frontières et retour à la norme

    La période 1959-1960 aura été l’une des plus terribles de la bataille menée par le FLN en France. C’est pendant cette période que Zina est arrêtée avec 3 valises bourrées d’armes et des photos de policiers. Mais en fait qui arrête-t-on ? Non pas Zina Harraïgue, mais la sœur de Omar.

    On ne lui reconnaît pas encore, du côté français comme du côté algérien, son identité propre et sa pleine responsabilité dans l’action armée. C’est « la couverture », « l’auxiliaire », « la porteuse de valises » non pas l’une des responsables des actions armées de l’O.S. en France.

    Après un interrogatoire de 5 jours presque sans manger ni boire, elle est transférée à La Roquette d’où elle s’évade en février 1960. Il s’agit de la première grande évasion et l’une des plus spectaculaires de l’histoire de la révolution algérienne.

    Alors commence un long retour vers d’autres frontières. D’abord en Allemagne où elle est transférée après son évasion. Là, le plus haut responsable de la FF.FLN, Omar Boudaoud lui suggère de « faire comme les autres (militantes), essayer de terminer les études, d’apprendre quelque chose ». Evidemment, elle n’est pas de cet avis, elle veut rejoindre les frontières parce qu’on lui a toujours dit que le militant « brûlé » en ville devait rejoindre les maquis. Elle pouvait encore rendre service au pays et à l’organisation.

    On décide alors son départ pour Rabat où elle est hébergée chez une riche famille algérienne dont les filles n’étaient pas engagées dans la lutte.

    Elle découvre des aspects qu’elle n’avait jamais connus dans l’organisation du FLN en France. Le régionalisme battait son plein, l’écart entre les instances dirigeantes de la Fédération du FLN au Maroc, la base militante et la grande masse du peuple se creusait.

    On lui propose de travailler dans les camps de réfugiés un peu comme une assistante sociale, elle qui voulait poursuivre la lutte armée dans les maquis au milieu de ses frères d’armes.

    Elle découvre alors la misère des maquisardes cantonnées aux frontières et les mentalités rétrogrades : « les militantes étaient juste bonnes à marier ».

    En 1962, elle refuse de rejoindre le pays par ses propres moyens comme on le lui proposait. Elle reprend le chemin de l’Allemagne puis de la Suisse où elle est admise en sanatorium pour guérir des séquelles d’une grave maladie contractée durant les années de clandestinité.

    Elle apprend les festivités de l’indépendance par les journaux et la télévision.

    De retour au pays, elle se fond au milieu du peuple dans la plus grande modestie et humilité.

    Ce que l’on peut lire à travers le témoignage de cette femme militante, engagée dans la lutte de libération de son pays, l’Algérie, c’est cette terrible injustice qui a fait qu’à aucun moment, y compris aux pires instants de la traque policière, personne ni même elle-même, dans sa propre conscience de soi et dans la représentation de sa contribution à la lutte, n’a pu se vivre autrement que comme un prolongement (un substitut) du frère de sang (Omar), du frère de lutte (Madjid) et du grand frère (le FLN) dans lesquels elle s’est dissoute.

    Comment l’organisation révolutionnaire et la mémoire collective ont-elles pu à ce point occulter le rôle de ces femmes responsables sans pouvoir. Car il faudra bien reconnaître un jour et (se) poser la question du fait qu’aucune femme n’ait été désignée ni dans les instances dirigeantes de l’organisation politique ni dans les organes délibératifs.

    Daho Djerbal
    Maître de conférences
    Département d’histoire. Université d’Alger

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article38985

  • La promesse de Mohamed Yergui (El Watan)

    14es rencontres cinématographiques de Béjaïa

    Seul film en langue amazighe programmé aux 14es Rencontres cinématographiques de Béjaïa (RCB), Je te promets du jeune réalisateur bougiote Mohamed Yergui a intéressé un public nombreux.

    Ce court-métrage de 17 minutes est un pur produit bougiote, tourné totalement à Béjaïa et avec des comédiens de la région.

    L’histoire invite à réfléchir sur la condition féminine, mais aussi sur le poids d’une tradition injuste à l’égard de la femme. Un frère et une sœur, Allili et Baya, ont grandi ensemble dans un village kabyle, au sein d’une famille pauvre qui ne peut se permettre de scolariser qu’un seul de ses deux enfants. Le sacrifice est porté inexorablement sur la fille.

    Le père en a décidé ainsi. Soumise à la tradition et au poids de la société patriarcale, la jeune fille se consacre à son frère. Elle lui tend un livre et l’exhorte à étudier pour lui et pour elle. Lorsque, adulte, elle possède des bijoux, elle les lui offre pour lui permettre de poursuivre des études aux Beaux-Arts. Le frère, attentif et affectueux, lui promet qu’un jour il l'emmènera au mont Gouraya d’où elle pourra contempler son village au loin. La promesse est le fil d’Ariane pour cette fiction qui allie esthétique et aspect anthropologique, qui met en valeur les us et coutumes kabyles.

    Le film débute par l’arrivée au pays, un sac à la main, d’un jeune homme. Le rôle est joué par Farid Oukala, comédien et metteur en scène originaire de Béjaïa et installé à Toulouse, qui s’est déjà produit au Festival international du théâtre de Béjaïa avec une adaptation de La Terre et le sang de Mouloud Feraoun.

    En empruntant les chemins qui montent vers son village natal, sa randonnée pédestre de ces montagnes altières s’accompagne de souvenirs de sa jeunesse qui reviennent en flash-back pour lui rappeler sa sœur qui l’appelait «dada Allili». Les séquences se déroulent sous la musique de Abdelaziz Yousfi (Bazou) qui s’adaptent à la majesté des montagnes des Ath Bimoune. Au village qu’il retrouve après des années d’absence, le jeune homme est accueilli par des obsèques émouvantes. Une jeune femme vient de décéder et ont vient le consoler…

    Mohamed Yergui signe par ce film un travail qui force le respect. Il n’en est pas à son premier court-métrage. Il a réalisé en 2007 Au bout du tunnel (Ad bin tifrat) qui a reçu l’Olivier d’or au Festival culturel national du film amazigh, et Houria la même année, un autre court-métrage, primé (Ahaggar d’or) au Festival du film arabe d’Oran. Le jeune réalisateur, que l’on considère «enfant des RCB» et qui poursuit d’un pas sûr son parcours dans le monde du cinéma, semble promettre, par son nouveau film, de ne pas s’arrêter en si bon chemin.

    Kamel Medjdoub

    http://www.elwatan.com/

  • Rencontres cinématographiques de Béjaïa (Algeria Watch)

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    Le ministère de la Culture a refusé de délivrer le «visa culturel» sans lequel la projection du film ne peut se faire.

    Le film documentaire Vote off, du jeune réalisateur-producteur algérien Fayçal Hammoum, produit par Thala films, a été déprogrammé des 14es Rencontres cinématographiques (RCB) qui se déroulent jusqu’à ce vendredi à la Cinémathèque de Béjaïa. Le ministère de la Culture a refusé de délivrer un «visa culturel», qui tient lieu d’une autorisation de projection.

    C’est depuis 2011, en vertu de la loi n°11-03 du 17 février 2011 relative à la cinématographie, décret 13-276, que le département de Azeddine Mihoubi exige un «visa culturel» pour tout film programmé dans une manifestation culturelle. Vote off est le premier film à faire les frais de cette loi dans le cadre des RCB qui appliquent cette loi depuis l’année dernière.

    C’est l’incompréhension chez le réalisateur. «Je suis surpris, je ne m’attendais pas à cela, d’autant que mon film est très loin d’être partisan», nous a-t-il déclaré au téléphone. «On ne peut que se rendre à l’évidence et appeler les choses par leur nom : il s’agit là d’un cas flagrant de censure», accuse-t-il dans une lettre adressée à l’opinion publique, dont nous avos été destinataire d’une copie.

    Le ministère a dû prendre le soin de superviser au préalable ce film de 81 minutes dont le contenu est apparemment dérangeant par le spectre de l’abstention bien réelle qu’il ne fait que filmer à quelques mois des législatives de 2017. Selon son synopsis, «Vote Off suit la jeunesse algérienne pendant le mois qui a précédé l’élection de 2014. Une jeunesse active mais qui n’a jamais voté…».

    La caméra de Fayçal Hammoum a investi le terrain de la campagne électorale à Alger pour la présidentielle d’avril 2014 pour prendre le pouls de la société dont fait partie une jeunesse désabusée et abstentionniste. Elle s’est posée dans des meetings de candidats, dans leurs permanences, dans la rue, à El Watan… pour «un voyage électoral ou plutôt une balade où se côtoient le doute, la peur, l’espoir».

    «Au-delà des parcours individuels de mes personnages qui sont au centre du projet, j’ai aussi fait ce film pour une raison simple et sans doute un peu naïve : je veux croire que l’Algérie peut et doit devenir aussi démocratique que possible», réagit, dans sa lettre, Fayçal Hammoum. Il considère qu’«interdire ce film, c’est interdire la croyance qui en est à l’origine.

    La croyance en un pays de droit où l’expression d’une idée n’est pas vécue comme une menace mais une chance. Interdire ce film, c’est interdire par avance tous les films qui voudront affirmer cela. C’est, qu’on le veuille ou non, avouer que rien ne changera». Le jeune réalisateur est convaincu qu’«on peut toujours enterrer un film mais jamais la parole et encore moins la pensée des hommes».

    L’association Project’heurts qui a été forcée d’annuler la projection du film, et pour affirmer son attachement «aux valeurs de la démocratie et de la liberté d’expression et de création», a maintenu le rendez-vous de demain à 17h, l’heure prévue de la projection du film Vote off, mais pour engager un débat sur «la loi sur le cinéma, sur la liberté de création en Algérie en présence du réalisateur et du producteur du film».

    «Ce bras de fer constant avec le ministère de mon pays et autres autorités ‘‘suprêmes’’ de la culture commence à me fatiguer. Et je suis, de la même façon, fatigué d’avance de devoir demander grâce pour un film condamné à mort par la censure», écrit, déçu, Fayçal Hammoum à propos d’un film qu’il aurait pu appeler «A quoi rêvent wled houmti». A la liberté, certainement.


    Kamel Medjdoub El Watan, 7 septembre 2016

    http://www.algeria-watch.org/fr/article/presse/vote_off_censure.htm

    « Vote off », un documentaire sur la présidentielle de 2014 censuré (Jeune Afrique)

  • Algérie: Chaos mondial, krach pétrolier et impasse libérale, quels enseignements ? (Npa)

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    Entre juillet 2014 et janvier 2016, les cours du brut ont plongé de manière quasi ininterrompue, baissant de moins 75% en 18 mois seulement.

    Les médias abondent de considérations autour des retombées négatives de la brutale dégringolade du baril sur les économies dont les équilibres économiques extérieurs et internes sont fortement tributaires de la conjoncture des prix du pétrole. Dans notre pays, ce sont les répercussions de la chute des recettes d’exportation pétrogazières sur les équilibres de la balance commerciale et du budget de l’Etat qui mobilisent l’essentiel des commentaires, chiffres et données officielles à l’appui.

    Les exportations des hydrocarbures (94,54% des exportations globales) se sont réduites à 35,724 milliards de dollars en 2015 contre 60,304 milliards de dollars en 2014, moins-40,76%. Pour 2016, les prévisions situent les recettes en question à 26,4 milliards de dollars soit une baisse de moins 25%. Par rapport au niveau de 2014, la perte de recettes devises cumulée pourrait atteindre à fin 2016, le montant de 70 milliards de dollars environ. Il faut rappeler que l’Algérie a connu d’importantes « décrues » des cours pétroliers qui s’étaient soldées par une baisse substantielle des recettes d’exportation algériennes : moins 43% en 2009, moins 26% en 1998 ; moins 43% en 1986. La période 1989-1999 a été marquée par des fluctuations à la baisse, cinq au total.

    Le commerce extérieur enregistre un déficit de 13,71 milliards de dollars en 2015 contre un excédent de 4,306 milliards de dollars en 2014. La fiscalité pétrolière recouvrée durant les dix premiers mois de 2015 a totalisé 1.978,9 milliards de DA contre 2.885 milliards de DA durant la même période de 2014, soit une baisse de 31,4% en un an. Quant au niveau des réserves de changes de 185,273 milliards de dollars atteint à fin septembre 2014, il devrait descendre fin de l’année en cours sous la barre de 151.5 milliards de dollars.

    Pour une économie vivant quasi intégralement des importations financées exclusivement par des revenus pétroliers, la poursuite de l’effondrement des prix est effectivement lourde de périls. Pointe à l’horizon, le spectre de la régression économique et sociale et ses risques politiques majeurs, si un redressement rapide non seulement des cours mais aussi et surtout de la stratégie économique n’intervient pas. Mais, par delà les commentaires des chiffres de conjoncture pétrolière, l’interprétation qui domine très largement dans les discours et les médias illustre clairement que dans l’examen des faits économiques et sociaux, la posture analytique n’est jamais indépendante de la posture politique et idéologique qui l’inspire, assumée ou non. Les grilles de lecture de la réalité conjoncturelle mobilisées ne sont pas des constructions techniques socialement et politiquement incolores, elles sont le produit d’économistes ou observateurs engagés et reflètent des intérêts déterminés multiples, comme le signalent, d’ailleurs, les centres de préoccupation et les thèmes privilégiés, de même que des occultations, des omissions et des non-dits significatifs. Ainsi, le thème de » la contrainte extérieure » est remis en exergue, plus exactement ses succédanés, la « nécessaire » austérité, pour le peuple, bien sûr, et « l’urgence des réformes structurelles », un euphémisme pour le renoncement à toute politique de développement national authentique. Au secours, les « 10 commandements du Consensus de Washington » sont de retour. Haro sur les transferts sociaux, restriction des dépenses publiques, suppression des subventions, vérité des prix, privatisation des entreprises publiques, élimination des « obstacles » à l’entrée des capitaux étrangers, appel aux capitaux étrangers y compris par l’endettement externe, la batterie d’artillerie FMI est de nouveau alignée au complet… Vite oubliés les dégâts territoriaux et sociaux profonds, gros de menaces sur la stabilité du pays, dans le Sud du pays notamment, auxquels ont conduit les politiques à courte vue, de largage des responsabilités économiques et sociales de l’Etat, mises à l’honneur dans les années 1990. Ignorée, l’impasse dans laquelle nous ont conduit trois décennies de réformes libérales. Pis, la chute des prix du pétrole est l’occasion de nous proposer un nouveau coup d’accélérateur du processus de démantèlement libéral inauguré sous l’ère de Chadli

    On cherchera en vain dans les scénarios de l’impact de la chute des recettes d’exportation d’hydrocarbures sur les « équilibres stratégiques  du pays », qui reviennent en boucle dans les médias, les analyses qui en évaluent les retombées négatives sur le pouvoir d’achat et le coût de la vie de la majorité des familles algériennes qui vivent avec des revenus modestes et les risques de paupérisation accrue. Au contraire, on assiste à la promotion d’un discours délibérément alarmiste visant à apeurer la population et faire qu’elle aille désarmée sinon consentante à l’abattoir social qu’on lui prépare. Elites et patronat de concert, dissertent d’autant volontiers sur le thème des "nécessaires sacrifices" à consentir par la masse, qu’ils en sont, eux, dispensés par la grâce de Dieu. La malédiction de la pétrodépendance est décriée ad nauséam, mais les politiques qui ont, des décennies durant, aggravé les vulnérabilités et les handicaps structurels historiques de l’économie algérienne, la maintenant dans une position de mono-exportateur d’énergies (pétrole et gaz), sont toujours données comme la seule alternative possible. On sait que la contrainte extérieure a été, dans les années 1990, le prétexte d’une ouverture désindustrialisante et de révisions qui ont aggravé les carences structurelles de l’économie algérienne et installé la précarité sociale. La dynamique de développement initiée au cours des deux premières décennies de l’Indépendance a été brisée avant que ne soient corrigées ses fragilités et qu’elle n’ait atteint sa phase de maturité. L’édification d’une économie de production a laissé la place à une économie de bazar axée sur le seul commerce d’importation.

    En réalité, la «  contrainte extérieure » est le prétexte pour d’autres recompositions internes. Une recomposition et un repositionnement des intérêts économiques et politiques au profit du renforcement et de l’extension des positions du capital (privé algérien et multinationales) et des couches qui lui sont liées, au détriment des intérêts du peuple algérien et de son développement

    Focalisés à outrance sur les ajustements économiques et sociaux qu’ils somment l'Algérie d’opérer  obligatoirement - comme si elle avait la capacité de manœuvrer avec les mêmes armes et dans le cadre des mêmes règles du jeu que le capital mondialisé-les partisans d’un nouveau round de thérapies de choc occultent délibérément et volontairement la responsabilité fondamentale du capital financier et du cartel bancaire dans la manipulation à la baisse des prix de l’or noir masquant l'enjeu véritable qui se profile derrière la scène du chaos du marché pétrolier. Comment pourraient-ils, d’ailleurs, mettre en cause les agissements d’un modèle qui constitue pour eux la référence des références.

    Ils feignent d’ignorer qu’on est dans une logique de restructuration violente, guerrière et hors normes du rapport de forces international dont le chef d'orchestre sont les Etats-Unis (notamment les institutions et organismes-clé : FED, FMI, Banque Mondiale, AIE, mais aussi Pentagone, services spéciaux, think thank et réseaux affiliés...) et que dans la très grande reconfiguration géopolitique en cours, il est une construction qui est menacée, c’est l’État-national. Et singulièrement l’Etat périphérique. Ces « réformateurs » dont le verbe redouble d’agressivité à chaque chute des prix pétroliers se défaussent de leur responsabilité foncière dans l’état actuel de fragilité dangereuse des équilibres économiques stratégiques du pays en présentant au peuple la facture à payer, sous forme de Loi des Finance 2016. Il y a quelques années, le patronat et ses élites planchaient déjà, lors d’un symposium, sur la question de la facture en s’interrogeant ingénument : l’Algérie peut-elle satisfaire la forte demande sociale alors que ses ressources sont limitées ?

    Comme si c’était le petit peuple des salariés et des maigres retraites qui avait été à l’origine de la désindustrialisation, du désinvestissement, de l’explosion des importations tous azimuths et des consommations énergétiques, du boom des grosses fortunes, de l’évasion fiscale, de la fuite des capitaux, etc…

    Ils tirent argument de la conjoncture baissière du baril qui représente, on le sait, la donne-clé fondamentale dans l’élaboration des politiques économiques dans notre pays, pour exiger une relance du fameux triptyque libre-échange, IDE, privatisation qui a échoué – de l’aveu même des officiels – et qui nous a plombés dans le surplace depuis trois décennies comme nous allons le voir à travers l’examen de l’évolution de variables-clé de la politique économique ces dernières décennies.

     

    Une conjoncture pétrolière qui a évolué favorablement…

    Revenu brut moyen US $/TEP exportée(en dollars courants) 

    Période 1978-1988 1989-1999 2000-2010 2011-2015
    US dollar/TEP 165 116 312 597

     

    Mais qui n’a engendré aucune dynamique réelle de l’économie algérienne

    Taux de croissance annuelle moyen TCAM- 2000—2014

    Recettes d’exportation Hydrocarbures Importations PIB réel
    8,2% 13,8% 2,9%

     

    L’industrie, socle du système productif, parent pauvre de l’évolution : TCAM 2000-2013

    BTP Services Ind. Manuf Energie Hydrocarbures
    7,7% 6% - 2% 6, 5% -0, 6%

     

    Le secteur le plus dynamique de l’industrie nationale est celui de l’énergie électrique dontla production, il faut le rappeler, est assurée presque totalement à partir du gaz naturel. La génération électrique absorbe 40% environ de la consommation de cette énergie primaire.

    Durant les années 2000-2013, la croissance du PIB hors hydrocarbures et hors agriculture, a été stimulée par les activités de services, c’est-à-dire l’activité de transport (essentiellement routier) et le commerce (de détail essentiellement), dopées par le boom des importations de biens de consommation ainsi que par le BTP, 7,5%/an. Le dynamisme de la branche des services est fortement corrélé à celui des importations de marchandises qui ont cru de 500%  entre 2000 et 2013. La part de ce secteur dans la population occupée est passée de 40% en 2000 à 60% en 2013.

    Tandis que le secteur industriel ne représentait plus que 4% du PIB en 2012, on recensait cette même année 23.258 importateurs qui se partageaient une enveloppe devises de plus de 40 milliards de dollars.

    Désindustrialisation, désinvestissement

    Le secteur de la construction de logements et immobilière, ainsi que celui des infrastructures administratives et économiques ont été les principaux bénéficiaires des dépenses publiques d’équipement durant les années 2000-2013, en moyenne 36%, contre 0,16% à peine pour le secteur de l’industrie.

    Part des investissements du secteur industrie dans l’investissement public total -1990-2013

     

    Le paradoxe d’une croissance économique à la fois de contenu non industriel et énergivore

    Dynamique de la consommation énergétique finale durant les années 2000-2013

    Déclin des consommations industrielles

    Le secteur industriel ne  représente plus que le cinquième de la consommation énergétique. Hors BTP et matériaux de construction, il  n’occupe plus que la portion congrue de cette structure : 11,6%. 

    Le recul des consommations industrielles corrobore celui de la production industrielle hors branches des hydrocarbures et de l’énergie électrique, sur l’ensemble de la période. Entre 1989 et 2013, l’indice de la production industrielle hors secteurs de l’énergie a régulièrement baissé, -25%.En revanche, la branche des hydrocarbures affiche un accroissement de 31,5% et celle de l’énergie électrique de 314% environ. Le recul relatif des consommations énergétiques industrielles est également constatable  dans l’évolution de la structure des ventes physiques d’électricité et de gaz naturel. La part de la Haute tension baisse de 35% en 1980 à 20% en 2013.Même tendance pour le gaz où  la Haute pression descend de 68% à 34%.

    Les secteurs moteurs : Allocation à des fins improductives prédominantes d’une ressource rare et non renouvelable

    La croissance de la consommation énergétique a été tirée essentiellement par la demande des transports routiers (produits pétroliers), de la branche des matériaux de construction (gaz naturel et électricité) b,ranche à composante énergétique élevée en forte croissance : Matériaux de construction et cimenteries  pour les besoins de la construction immobilière ainsi que de l’infrastructure routière, ainsi que par la demande des secteurs résidentiels et résidentiels commercial et tertiaire en pleine expansion.Demande impulsée par la construction de routes, de logements, de parkings, le résidentiel commercial, l’habitat de rente. Déclin des autres branches

    Consommation énergétique finale par branche industrielle et secteur- TCAM 2001-2013

    Industrie Sider./Gaz Sider/elec. Chimie/gaz Chimie/elec. Autres ind./elec.
    4,55%   0,58%   0,12% 2,19% 2,0%  2,57%

     

    Autres ind./gaz  Mat. de const. MDC Gaz MDC Elec. Transport Ménages
    6,5% 5,8% 7% 4% 8,4% 4%

     

    L’énergie est utilisée de façon largement prédominante, comme bien de consommation et non comme facteur de production.

    La consommation énergétique finale ne traduit ni les priorités productives d’industrialiser le pays,  ni le profil de nos disponibilités, ni le souci de la contrainte devises, ni l’impératif de préserver l’environnement. Elle est en revanche caractérisée par de grandes disparités socio économiques croissantes et porteuses de risques pour la stabilité.

    Ces déséquilibres criants interpellent sur la question des orientations qui ont conduit à cette impasse

    Des choix économiques et sociaux fondamentaux

    Le marqueur énergétique est un révélateur pertinent de la nature sociale de ces choix

    Le choix d’infrastructures lourdes sur la consommation énergétique d’un pays ; urbanisme, logement, réseau de transport. Le mode de transport privilégie le secteur routier- autoroute Est-Ouest- contre le rail-, le véhicule particulier et la consommation des carburants déficitaires- diéselisation continue et grandissante du parc, couteux en devises et polluants. 97% du transport de voyageurs tout comme 97% du transport de marchandises se fait par route.71% de la consommation totale d’énergie des transports de voyageurs serait due à l’utilisation de la voiture particulière, et ce, pour assurer 48% de la demande totale de transport exprimée en voyageurs/km. Résultat :Entre 2000 et 2013, la consommation d’essences a doublé et celle de gas-oil a été multipliée par 2,68.En revanche, le GPL est très abondant mais totalement marginalisé. «SIRGHAZ», le carburant aujourd’hui le moins cher du marché algérien avec son prix de 9 DA/litre  ne représente que 3% dans le mix carburant et sa consommation stagne à un niveau bas.

    Durant la période 2000-2013, l’Algérie a importé un volume cumulé d’environ 7,2Mt de gas-oil et de 3,3Mt d’essences. Les importations au chapitre » Energie et lubrifiants » ont explosé, passant de 129 millions de dollars en 2000 à 4 955 millions de dollars en 2013.

    Le chemin de fer qui assurait en 1970 près de 30% du trafic national de voyageurs et de marchandises a vu sa part relative du marché réduite à 10% du trafic marchandises et à 15% du trafic voyageurs.Pour les déplacements urbains, avec la même dépense d’énergie, la distance possible est 11 fois plus importante en tramway et 2,5 fois plus importante en bus qu’en voiture. Avec la même consommation d’énergie, la tonne de frêt parcourt 5 fois plus de distance par cabotage maritime, 4 fois plus par train entier et 2 fois plus par voie fluviale que par poids lourd. Le transport en commun en bus consomme 13% de la consommation totale d’énergie pour satisfaire 30% de la demande. Le rail voyageurs1% de consommation pour /1% de demande ; le rail marchandises 1% de consommation pour 6% de la demande. Faible performance énergétique du système de transport en Algérie (énergie consommée par service de transport rendu Ce modèle ponctionne les réserves de pétrole et de change de l’Algérie. , Au choix délibéré mais anti économique du routier—s’ajoutent, les retards inexplicables dans le solaire, une fiscalité énergétique inexistante, le gaspillage énergétique du secteur énergétique lui-même..). Ce modèle pour couches aisées et riches ponctionne les réserves de pétrole et de change de l’Algérie. 

    La facture des importations de voitures : le coût de combien d’usines ?

    En 2013, les importations algériennes de voitures ont atteint le montant de plus de 7,33 milliards de dollars et le nombre a totalisé 554.269 unités contre 43 119 véhicules en 2000, soit 13 fois plus en…13 ans ! La facture totale de ces 13 années d’importation de véhicules s’élève à plusieurs dizaines de milliards de dollars sans compter celle de la pièce de rechange. Combien d’unités de montage et de postes d’emploi cette enveloppe aurait-elle servi à créer ? Le parc auto est passé de 2,9 millions de véhicules en 2000 à 5,5 millions en 2013, un parc de plus en plus diésélisé.

    Médicament : croissance des officines plutôt que des usines

    Les importations de médicaments (en millions de dollars)

    1975 1990 2013
    116 500 2280

     

    Inexistants au début des années 1990, les intervenants du secteur privé au stade de l’importation des médicaments et de la distribution grossiste regroupent, en 2008, 60 importateurs et 400 grossistes distributeurs. En 2013, la facture des importations de médicaments a atteint le montant de 2,28 milliards de dollars, soit 5 fois plus qu’en 1990 (500 millions de dollars)1 et 20 fois plus environ qu’en 1975 (116 millions de dollars)2 et ce, en dépit du dispositif fiscal avantageux mis en place par les pouvoirs publics au profit des laboratoires privés afin de limiter justement les importations et malgré l’option en faveur du générique et l’interdiction de l’importation des produits fabriqués localement.

    A l’ouverture du marché des médicaments au début des années 1990, il était prévu que les entreprises privées qui allaient se lancer dans l’importation s’installent au bout de 5 ans d’activités pour produire les nomenclatures de médicaments qu’ils importaient. Au contre leur nombre s’est multiplié et la facture a été multipliée par 4,22 en 23 ans. Les importateurs se sont conduit comme des commerçants considérant ce produit comme une marchandise comme les autres.

    LA STRATEGIE DU TRIPTYQUE : DU DISCOURS A LA REALITE

    Outre la libéralisation totale  du commerce extérieur - la conditionnalité - reine des programmes d’ajustement structurel du FMI (Le FMI n’accepte pas de gendarme qui contrôle ce qui entre et ce qui sort, déclare, à propos du commerce extérieur, son patron de l’époque, Michel Camdessus, à Abdesslam Belaid, alors Chef du gouvernement. Cf. La Tribune du 2 août 1995), privatiser pour attirer les IDE forme le complément systématique  des politiques d’ajustement du FMI et de  la Banque Mondiale. Les gouvernants algériens en ont fait les axes  d’orientation stratégique de l’économie et la preuve convaincante de leur engagement effectif dans la voie des  réformes libérales. De même,  les adhésions à la ZLE, la ZALE  et l’OMC sont  autant de «signes de notre volonté de s’intégrer au processus de mondialisation appréciés des investisseurs potentiels.

     

    LIBRE ECHANGE : un accord à sens unique

    L’accord sur la création, à l’horizon 2017, d’une zone de libre échange avec l’UE, avait été vivement salué lors de sa conclusion. Le ministre des Affaires étrangères de l’époque, Mohammed Bedjaoui avait jugé que l’association UE/Algérie était un succès politique. Son successeur au ministère, Abdelaziz Belkhadem qui, à ce titre, avait bouclé la série de négociations estimait, quant à lui, qu’ « avec cet accord, on perd une économie obsolète. Il se déclarait convaincu que la protection du produit national n’aurait pas servi à grand-chose. Ce serait, avait-il soutenu, une prime à la médiocrité et à la stagnation »3. Le ministre de l’Industrie et de la Promotion de l’investissement de l’époque, Abdelhamid Temmar, quant à lui, s’adressant à ceux qui exprimaient leur scepticisme quant aux bienfaits de cet accord, n’hésita pas, à l’occasion d’une conférence organisée par le Club Excellence Management, à affirmer « ne connaître aucun pays au monde qui ait été économiquement ni même politiquement fragilisé par son adhésion à la ZLE, mais qu’il connaît par contre des pays parmi lesquels nos voisins maghrébins qui en ont tiré grandement profité… Bien conduite, estimait-il, l’adhésion de l’Algérie à la ZLE pourrait se traduire positivement par un surcroît d’IDE, l’amélioration de notre système bancaire, la mise à niveau de nos entreprises et pourquoi pas l’émergence à terme d’un secteur privé performant »4. Le Docteur Abderrahmane Mebtoul insistait pour rappeler, pour sa part, que cet accord constituait une priorité dans le programme présidentiel 2004/20085. Le président du FCE, Réda Hamiani, était, lui aussi, au départ, favorable à l’accord d’association, estimant encore en septembre 2007 que le démantèlement allait profiter aux producteurs algériens6. L’Algérie allait bénéficier, pensait-on, de délocalisations et de sous-traitance. Des attentes estimées légitimes car, jugeait-on, à la mesure de la promptitude avec laquelle le gouvernement avait procédé au démantèlement tarifaire. On a offert sur un plateau tous les segments intéressants du marché intérieur autour desquels pouvaient se mouvoir et se développer les entreprises algériennes qui n’ont que le marché national de 32 millions de consommateurs.

    L’UE devait accompagner le processus de démantèlement tarifaire en accordant aux entreprises algériennes des mesures d’appui multiformes destinées à amortir le choc de l’ouverture..

    Cet accord, explique Réda Hamiani, était, à l’origine, « un accord sensé nous atteler à l’Europe dans une démarche de co-développement, d’investissement, de mise à niveau, etc7. Qu’en est-il en réalité ?

    L’accord en question qui a facilité les échanges a permis surtout de gonfler les importations de l’Algérie en provenance des pays de l’U.E. Selon les données du ministère du Commerce, leur montant est passé de 11,255 mds USD en 2005, année de la signature de l’accord d’association avec cette zone, à 29,49 mds USD en 2014 soit une augmentation de 162% en 10 ans. Au total, pour la période de 2005 à 2014, les pays de l’UE ont exporté vers l’Algérie pour 195 milliards de dollars. En contrepartie, les exportations algériennes hors-hydrocarbures vers les marchés européens, pour l’ensemble de cette période se sont établies au modeste niveau de 12,3 milliards de dollars, soit à peine 6,3% du montant cumulé des exportations européennes. « Le démantèlement tarifaire a déjà eu pour conséquence une perte de recettes pour le Trésor équivalente à 3 milliards de dollars. Le préjudice que l’Algérie aurait accusé en termes de recettes fiscales pour le Trésor de 2010 à 2017, est évalué à 8,5 milliards de dollars.

    Pour protéger son économie, l’Algérie a demandé à ses partenaires un report du démantèlement tarifaire qui devait marquer l’établissement de la zone de libre-échange entre eux. Celui-ci mettait en danger plusieurs filières de l’industrie nationale, mal protégées et mal préparées à la concurrence de produits européens admis sur notre marché sans taxes ni droits de douane

    L’ouverture économique «improvisée et non préparée a été fatale à bon nombre d'industries». «Hormis les secteurs de l'agroalimentaire et du bâtiment, tout est à reconstruire», a affirmé Réda Hamiani en soulignant que la production locale ne couvre aujourd'hui que 05% des besoins des consommateurs contre 18% dans les années 90 à cause d'une ouverture économique «improvisée et non préparée qui a été fatale à bon nombre d'industries».

    PRIVATISATION : La recette sans les ingrédients

    Des constats successifs d’échec

    Privatiser pour attirer les IDE : le FMI et la Banque Mondiale en ont fait un complément systématique des politiques d’ajustement. En signant, en 1995, un engagement avec le FMI et la Banque mondiale, les gouvernants algériens vont faire de la privatisation une préoccupation majeure. Selon le crédo libéral, elle est censée apporter une efficacité plus grande à la croissance d’une manière générale, la transition à l’économie de marché se mesurant, par ailleurs, par la prédominance de la place qu’occupe le secteur privé dans l’économie d’un pays. Pour les gouvernants algériens, la privatisation est considérée comme un signal d’attraction fort en direction des capitaux étrangers et la preuve convaincante de leur engagement effectif dans la voie des réformes libérales. Alors ministre de la Coordination des Réformes et de la Participation, Hamid Temmar, tout en confiant à une délégation patronale française, le 5 février 2000, que « l’Algérie allait privatiser et vite », révélait dans la foulée que cela allait concerner 903 entreprises publiques au total, dont 519 EPE et 384 EPL et 90% du tissu industriel public, les banques constituant, pour lui, la priorité des priorités en matière de privatisation. Il ne s’agit plus de réformer le secteur public, « nous n’allons pas assainir le secteur public. C’est clair et net. Nous vendons », insiste Hamid Temmar. Son successeur à ce poste, Noureddine Boukrouh, après avoir dénoncé les politiques menées avant lui, qui "n'ont rien produit parce que pleines de contradictions", faites théoriquement pour privatiser mais en fait "pour ne pas privatiser",« le processus de privatisation lancé entre 1995 et 2001 n’a pas donné les résultats escomptés », annonce le 2 avril 2001 un nouveau dispositif de privatisation, sur deux ans. La privatisation menée sous Temmar a été «un échec total», de l’avis de quasiment tout le monde. Sur plus de 1200 entreprises publiques proposées à la privatisation, à peine un tiers a été repris dans un processus conduit «n’importe comment», où l’on a privilégié «le copinage» et «le bradage», dixit l’économiste Camille Sari. 

    D’autres, comme l’ancien syndicaliste au complexe d’El Hadjar Smaïn Kouadria, y voit une opération de «corruption à grande échelle» qui a donné naissance à ceux qu’on nomme aujourd’hui «les nouveaux milliardaires».

    Amara Benyounes, ministre de l’Industrie est formel : « Le processus de privatisation des entreprises publiques a échoué ».

    L’objectif ne manque pas d’ambition : la privatisation doit nous apporter les capacités technologiques que nous n’avons pas, les capacités managériales dont nous sommes dépourvus et les marchés extérieurs sur lesquels nous devons commencer à prendre pied. Le questionnement porte sur la réalité des capacités technologiques, managériales et financières du secteur privé en Algérie.La privatisation est-elle en mesure de moderniser le potentiel industriel et d’en accroître la production ? Le tableau est fort éloigné de la vision optimiste qui semble animer les promoteurs de la privatisation

    Entre 2000 et 2011, 716 026 entités ont été crées dont 89% dans le tertiaire soit 34% dans les Services   et 55%  dans le commerce où plus de 84% de l’activité se concentre dans le commerce de détail.

    La répartition des PME privées par secteur d’activité montre la faiblesse caractérisée du nombre de PME industrielles pour espérer les voir relayer les entreprises du secteur public dans la relance économique sur base productive .

    À peine plus de 18 % de l’ensemble des PME privées sont de type industriel, le reste étant essentiellement des entreprises de services (près de 46 %) et de BTP (près de 35 %). Les entreprises spécialisées dans le secteur agroalimentaire sont essentiellement de type familial, ne maîtrisent pas le processus d'exportation et ignorent les exigences réglementaires. La branche des industries agro-alimentaires (IAA) ne compte que 5.000 entreprises, seules cinq entreprises exportent régulièrement, en majorité des produits de terroir comme l'huile d'olive et les dattes ainsi que le sucre raffiné. Ce « qui marche », c’est le commerce de mobiles,  d’automobiles, la spéculation immobilière, les services. Les PME qui sont dans la production, souligne Réda Hamiani, « sont malades». Lors d’une réunion avec les représentants du patronat et de la centrale syndicale UGTA, en novembre 2012, le Premier ministre Abdelmalek Sellal a révélé que seulement 15% des entreprises algériennes sont connectées à un réseau Internet, à peine 9% ont une adresse électronique et aucune entreprise ne propose sur son site un catalogue des produits qu’elle veut commercialiser.

    Un privé qui recherche des gains à court terme, peu enclin à investir dans la sphère productive

    La part des crédits allouée au secteur privé est plus importante que celle dédiée au secteur public, et ce, depuis 2005. La part des crédits octroyés au secteur privé est passée de 14,8% en 1997 à 57% en 2007, elle s’établit à 52% en 2012. Mais ces crédits ne sont pas orientés vers l’investissement productif qui reste le parent pauvre. Les crédits à l’importation, estimés à un peu plus de 12 milliards de dollars, sont plus importants que ceux alloués à l’investissement productif. Candidat à la reprise de Michelin, le patron de Cevital, Rebrab avait prévu de transformer le site industriel en d’autres activités, commerciales

    Le secteur des concessionnaires automobiles engrange un chiffre d’affaires annuel de quelque 700 milliards de dinars, des sommes transférées à l’étranger, sans compter les dividendes de l’activité des concessionnaires. De toutes ces sommes faramineuses, seuls 3% à 6% des résultats de l’exercice sont versés au Trésor public.

    L’échec de la privatisation d'El Hadjar

    Le complexe, propriété de l'Etat algérien, avait été racheté à 70% en 2001 par l'indien Ispat, qui appartient au groupe Mittal. Il devait doper la siderurgie algérienne, il l’a dupée, en fait. Le bilan est négatif : sous-investissement, dégradation des installations et équipements, fermeture des sites de production essentiels, réduction des effectifs et pas d'amélioration des conditions de travailLa cokerie mise à l’arrêt depuis la fin 2010 car la multinationale indienne n’ayant pas intérêt à la réhabilitation de cette structure, préférait s’appuyer sur le coke que le groupe produit dans ses usines européennes, le coke importé «à moindre coût» pour alimenter le haut fourneau

    Le complexe, faut-il le souligner, n’a pas concrétisé les prévisions du  million de tonnes d’acier annuellement depuis sa reprise par ArcelorMittal en 2001. La production d'acier prévue pour 1 million de tonnes a chuté à 600 000 en 2012, puis a carrément dégringolé en 2013 et 2014 pour se situer à 300 000 tonnes aujourd'hui au moment où la demande nationale a explosé pour atteindre pour les seuls ronds à béton et fils pour machines, environ 4 millions de tonnes, ce qui signifie qu'El-Hadjar ne fournit le marché national qu'à moins de 10%. L'importation lui coûte annuellement environ 10 milliards de dollars. La Banque extérieure d’Algérie (BEA), a été obligée de lui accorder un crédit bancaire de 14 milliards de dinars, dont 9 milliards destinés au rachat de la dette d'ArcelorMittal auprès de la banque.

    L’IDE, au compte-goutte et à puissant effet de levier

    Un quart de siècle après les premiers signaux concrets d’ouverture à l’investissement étranger émis par la loi sur la monnaie et le crédit de 1990, suivis d’une succession de Codes toujours plus soucieux, les uns que les autres, d’attractivité et de dispositions incitatives en faveur du capital étranger, celui-ci ne s’est guère précipité pour investir. . Pourtant, dans un schéma, disons idéal, de division régionale du travail, l’Algérie forte de ses atouts énergétique et de proximité géographique mais plus généralement la région euro-méditerranéenne représente, pour les économies européennes, dans le contexte de crise structurelle qu’elles traversent depuis plusieurs années, un espace de choix privilégié pour recomposer leur tissu industriel et redéployer leurs chaines de valeur, ouvrant, en même temps, à notre pays l’opportunité historique de répondre aux défis du développement d’un tissu productif diversifié et générateur d’emplois valorisants et gratifiants pour notre jeunesse. Un peu sur le modèle de celui qu’a impulsé le Japon, en Asie du Sud Est, dans les années 1980 ou l’Allemagne en Europe centrale, dans les années 1990 ; modèle, il est vrai, où les considérations géostratégiques et géopolitiques ont pesé autant sinon plus que les considérations économiques On nous dit, l’attirail algérien, si on ose s’exprimer ainsi, ne serait pas convaincant. S’il y a une faible attractivité pour les IDE, ce serait dû à l’inefficacité des dispositifs d’encouragement. La thèse du manque d’incitations internationales comme explication de la faible attractivité du pays ne tient pas la route. L’Algérie a ratifié 83 accords internationaux incitatifs à l’IDE dont 46 accords bilatéraux et 6 accords internationaux d’investissements, 42 conventions de protection réciproque et des investissements, 27 conventions fiscales de non double imposition mais en dehors des hydrocarbures point d’IDE ou presque. Les experts internationaux reconnaissent qu’il n’y a aucune grande entreprise qui ait investi en Algérie et qui ait échoué, qui n’ait pas rentabilisé son investissement. Le Président de la section algérienne du Comité national des Conseillers du commerce extérieur de France, Mr Michel Bissac lui-même reconnait qu’ « aucune entreprise française ne fait face à des blocages en termes d’investissement en Algérie. » La question, nous concernant, est : est ce que nos partenaires occidentaux qui dominent nos échanges commerciaux depuis près de quatre décennies sont vraiment intéressés par l’investissement productif hors hydrocarbures en Algérie ? Force est de le constater : l’Algérie est, pour ces pays, une destination commerciale fructueuse et très prisée mais pas une terre d’IDE sinon au compte-goutte et à puissant effet de levier, dans un rapport de 1 à 5 en moyenne. Le total des transferts des associés de Sonatrach  s’est élevé à 30 310,6 millions de dollars entre 2009 et 2014 pour une recette d’exportation totale cumulée durant cette période de 441 988,3 millions de dollars soit un taux de transfert moyen de 6,857% des recettes d’exportation

    IDE et transferts des associés de Sonatrach2000-2014

    Ces dix dernières années, l’Algérie a importé pour près de 200 milliards de dollars de l’Union Européenne, en contre partie, durant la même période, les investissements de cette région en Algérie ont représenté moins de 4% de ce montant et encore essentiellement dans les hydrocarbures.

    L’Algérie est le premier marché africain des produits agricoles français, un statut objectif de client stratégique de 1er plan mais qui ne s’est traduit par aucune construction d’usine, aucun investissement productif.

    Même constat à propos du marché du médicament qui atteint à présent des montants annuels de 3 milliards de dollars environ où les officines fleurissent mais pas les usines. L’Algérie est le 10 ème pays importateur de médicaments de la France
    Sans parler du secteur énergétique où l’Algérie a investi entre 2000 et 2013, une enveloppe globale de près de 100 milliards de dollars. Des investissements appelés à croître encore. Le seul marché de la pièce de rechange industrielle de Sonatrach représente en moyenne 3 à 4 milliards de dollars d’importation par an.

    Nos partenaires préfèrent le commerce aux IDE, pourquoi ? Parce que c’est un marché acquis ! En 35 ans, de 1978 à 2013, les parts de marché de nos fournisseurs traditionnels se sont remarquablement maintenues. En moyenne : entre 19% et 15% pour la France, entre 12% et 10% pour l’Italie, entre 5%et 9% pour l’Espagne, entre 6% et 4% pour les USA. La courbe de l’évolution des importations totales en milliards de dollars est équivalente à celle des importations à partir de la France

    En réalité, le point aveugle de ces approches est l’ordre économique mondial considéré de fait comme un donné auquel il faut s’adapter « au mieux de nos avantages et de nos intérêts ». Comme s’il suffisait d’ouvrir la porte pour que le capital étranger entre
    La question des motivations réelles des investisseurs étrangers est curieusement absente des élaborations de nos experts. Ces motivations sont-elles réellement fonction de la qualité de l’attirail, du moins pour ce qui est de l’Algérie. La rationalité qui guide les arbitrages des investisseurs entre tel ou tel placement tel ou tel investissement, tel ou tel pays n’est pas fonction de nos « efforts d’adaptation ».A fortiori dans le contexte de crise mondiale actuelle où c’est la rationalité du sauve- qui- peut qui domine chez les investisseurs internationaux. Depuis bientôt 8 années, le monde assiste, apparemment impuissant, aux métamorphoses brusques, violentes et imprévisibles de la crise qui a frappé, en 2007-2008, le système financier des Etats-Unis, clé de voute de l’ordre capitaliste mondial, le fracturant de l’intérieur même de son intime mécanisme. Cette crise qui a d’abord évolué en crise de dimension économique et sociale, puis en crise politique, dégénère, à présent, le verbe n’est pas fort, en crise géopolitique. Une crise de nature systémique et de proportion globale sans issue visible qui fait rappeler aux analystes qu’il a fallu au système capitaliste, 15 ans et une guerre mondiale pour sortir de celle de 1929. L’horizon de profit s’est raccourci de manière drastique, n’offrant plus que la spéculation financière et boursière et les guerres comme débouché rentable au capital. C’est l’immédiat qui tient lieu et place d’avenir.

    Il faut savoir que les Firmes multinationales sont tout simplement à la recherche de la liberté totale, celle d’investir là où elles veulent, le temps qu’elles veulent, pour produire ce qu’elles veulent, en s’approvisionnant là où elles veulent, et en ayant à supporter le moins de contraintes possible en matière de droit du travail et de conventions sociales. Elles peuvent toujours trouver d’autres espaces dans lesquels les salaires sont plus bas, les incitations fiscales et financières plus excitantes, le marché plus grand, le droit de l’environnement moins contraignant, etc, etc, etc. Pour reprendre l’image de l’expert pétrolier international Nicolas Sarkis, elles sont aujourd’hui, «  comme un chasseur qui se voit sollicité de choisir son gibier aux quatre cois du monde. Comment peut-on réussir dans ce benchmark effréné du plus attractif qui finit par laminer les marges de manœuvre de la politique nationale en la réduisant à des mesures d’amélioration du climat des affaires.

    Contre la stratégie de gestion de l’impasse,  travailler à remettre en perspective le projet émancipateur et social

    L’économie algérienne est- elle fatalement condamnée à faire du surplace et nos gouvernants à se contenter de «  faire tourner le ballon » ? Les questions posées dans les années cinquante par l’économie du développement restent pertinentes. Comment assurer la transition d’activités faiblement productives, où les possibilités d’évolution technologique et de gains de valeur ajoutée sont limitées, vers des activités fortement productives offrant de meilleures possibilités d’innovation et d’accroissement de la valeur ajoutée, devient alors le cœur du changement structurel et plus généralement du développement de l’économie. Ce qui distingue la manufacture des autres secteurs c’est la capacité à générer des rendements dynamiquement croissants. L’industrie manufacturière génère aussi des externalités dans le développement technologique, la création et l’acquisition de compétences. Pour les PED, la croissance et le développement ne consistent pas à repousser les frontières de la technologie mais plutôt à réorienter la structure de la production vers des activités à plus forte productivité.(Cf. Rapport sur le développement industriel. 2013. ONUDI)

    Où se trouvent véritablement, les sources essentielles des mécanismes de blocage du passage à une économie productive, à la diversification du PIB et de nos échanges internationaux. En un mot, des mécanismes qui nous condamnent au rôle de sous-périphérie plombée dans le sur-place.

    La casse libérale y est pour l’essentiel. L’expérience industrielle de l’Algérie a été de trop courte durée pour enclencher le processus de changement dans ses multiples facettes. L’apprentissage technologique qui aurait permis à la main-d’œuvre d’assimiler la logique de fonctionnement d’un système productif à base industrielle n’a pas eu lieu. Mais fondamentalement et l’exemple de notre pays le montre, l’impasse est de naturelle structurelle et elle traduit l’impossibilité radicale d’apporter les réponses qu’exige le développement économique et social de nos pays dans le cadre de la dépendance de la mondialisation capitaliste. Il est impératif de s’émanciper des rapports de puissance porteurs de logiques systémiques de dépendance et de sous-développement, en un mot à bâtir une cohérence alternative nouvelle.

    La crise exige une réponse centralisée de l’Etat, un secteur public fort entendu comme principal instrument de la maîtrise économique, car « là où est la propriété, là est le pouvoir ».

    Or l’Etat s’est-il donné les moyens politiques et institutionnels de repousser les limites actuelles de ses marges de manœuvre pour s’armer des capacités d’agir en tant que moteur et acteur majeur incontournable de la sortie du sous-développement, renforcer ses fonctions de garant de l’équité et de réducteur des inégalités et des injustices, du respect des priorités productives et environnementales et regagner ainsi sa légitimité dans toutes ses fonctions tant régaliennes qu’économiques.

    Sans les ruptures radicales qu’exige une politique effective de développement national, enraciné, ces régimes ne peuvent se donner les politiques qui répondent aux aspirations de leur jeunesse et de leurs peuples. En revanche, cette politique, hantée par les risques réels de déstabilisation, ne s’attaque pas, en vérité, à ce qui en constitue les racines politiques, économiques et sociale, car prisonnière des pressions des intérêts des forces de l’argent qui imposent les limites à ne pas franchir. Dictée par la conjoncture et la préoccupation de ne pas perdre le pouvoir, cette politique aux allures tactiques défensives de « faire tourner le ballon », n’est pas, cependant, un jeu à somme nulle. Elle conforte les privilèges mal acquis et les agissements des prédateurs de l’économie nationale, dont elle aggrave les vulnérabilités, creuse davantage les inégalités et érode en définitive les capacités de réponse aux menaces impérialistes dans la région et à nos frontières.

    Par Abdelatif Rebah.

     
  • Empêchement d’un rassemblement des familles de disparus à Alger (Algeria Watch)

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    La Laddh et le FFS dénoncent

    À l’appel de SOS disparus et du collectif des familles de disparus en Algérie, des familles de disparus ont tenté de se rassembler devant le siège de la CNCPPDH à Alger, hier, à l’occasion de la Journée internationale des disparitions forcées.

    La police est intervenue pour empêcher le rassemblement. Des arrestations ont été opérées parmi les manifestants. Un empêchement que la Laddh et le FFS ont dénoncé dans des communiqués publics. Dénonçant “avec force l’empêchement et la répression du rassemblement pacifique des familles de disparus et des militants des droits de l’Homme à Alger le 30 août 2016”, la Laddh qui a souligné que “les mères, femmes et filles de disparus ont été malmenées et plusieurs personnes ont été arrêtées et conduites aux commissariats de Rouiba et de Heuraoua, à une trentaine de kilomètres du lieu du rassemblement”, a exigé leur libération.

    Une exigence exprimée également par le FFS qui a dénoncé “une répression systématique de tout mouvement protestataire pacifique et alerte l’opinion publique sur ces dérives répétées”.

    R. N. Liberté, 31 août 2016

    http://www.algeria-watch.org/fr/rassemblement_familles_empeche

    http://www.huffpostmaghreb.com/manifestations-des-familles-des-disparus-la-laddh-et-le-ffs-denoncent

  • Veillée d’armes chez les syndicats autonomes (Algeria Watch)

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    Le front social des syndicats autonomes contre le projet de la suppression de la retraite anticipée affûte ses armes.

    Les dix-sept syndicats concernés se réuniront la deuxième semaine du mois de septembre prochain pour décider des actions de protestation à prendre en vue de «défendre les acquis sociaux et professionnels des travailleurs».

    La rentrée sociale risque d’être houleuse. Le premier appel à la protestation ne provient pas d’un seul secteur mais il est presque général. Jusqu’à présent, pas moins de dix-sept secteurs d’activité ont annoncé leur adhésion au front social de lutte contre la révision de l’ordonnance 97/13 régissant la retraite proportionnelle et la retraite sans conditions d’âge.

    Les syndicats autonomes des secteurs de l’éducation, de la santé, de la Fonction publique, des affaires religieuses, du secteur économique, de l’enseignement supérieur ou de la formation professionnelle mobilisent les travailleurs pour la rentrée sociale. Objectif, faire avorter le projet de suppression de la retraite anticipée.

    Après une première réunion tenue le mois de juin et une journée d’étude organisée le 30 juillet dernier, les syndicats se sont donné rendez-vous pour le premier week-end après les fêtes de l’Aïd, soit à la mi-septembre, pour tracer leur feuille de route de protestation de la rentrée.

    «Nous avons convenu de nous rencontrer après l’Aïd, pour discuter des propositions de chacun et décider ensemble des actions à mettre en place. Sachant que les enseignants revendiquent une retraite après 25 ans de service», a souligné Idir Achour, porte-parole du CLA (Conseil des lycées d’Algérie).

    Les protestataires appellent à une union des forces contre tout ce qui touche à l’atteinte des droits et des acquis des travailleurs. «Au moment où les travailleurs étaient en attente de décisions courageuses à même de développer une forte activité économique et diversifier les sources de richesses en dehors du secteur des hydrocarbures pour résorber le chômage et développer les ressources financières de la Caisse nationale de retraites, et au moment où tout le monde s’attendait à une revalorisation salariale avec une hausse des primes et de l’amélioration du pouvoir d’achat, le Premier ministre a annoncé la non-révision salariale et le gouvernement continue ainsi à chercher des solutions à l’échec de sa politique économique au détriment de la classe ouvrière», dénoncent les protestataires qui rejettent l’exclusion du partenaire social dans les décisions décisives touchant l’avenir de la classe ouvrière.

    Le gouvernement n’a pas encore rendu sa copie sur ce projet. Pour s’éviter une colère générale, une commission a été installée pour mettre en place une nomenclature des postes de travail dits métiers pénibles et qui ne seront pas touchés par la suppression de la retraite anticipée et proportionnelle.

    Salima Akkouche Le Soir d'Algérie, 28 août 2016

    http://www.algeria-watch.org/syndicat/veillee d'armes

  • Algérie : Gagner la bataille des retraites ! (PST)

    Crédit Photo: TSA

    Présentée comme une mesure incontournable pour préserver l’avenir de la Caisse nationale des retraites (CNR), la suppression de la retraite proportionnelle et sans condition d’âge constitue en réalité un choix de classe, celui de faire payer les travailleurs.

    Cette attaque ne se limite pas à la retraite proportionnelle et anticipée, mais annonce la remise en cause future d’autres acquis sociaux des travailleurs et des masses populaires. La veille de la tripartite du 5 juin, le président du Forum des chefs d’entreprise (FCE) annonçait fièrement à la télévision publique : « Nous allons augmenter l’âge de départ en retraite de 60 ans à 65 ans ».

    Si le gouvernement n’a finalement pas suivi Ali Haddad, c’est par crainte de la réaction des travailleurs qui se sont spontanément mobilisés à Rouiba, Hassi R’Mel, Hassi Messaoud… pour exiger l’annulation de la décision de suppression de la retraite proportionnelle et de la retraite anticipée. Leur protestation a été relayée par 16 syndicats autonomes regroupés au sein d’une coordination nationale pour faire face à la contre-réforme du gouvernement. Les Fédérations nationales de l’UGTA ont refusé la suppression de la retraite anticipée entérinée par le Secrétariat national de leur organisation. Soumis aux pressions de la direction qui relaie les exigences du gouvernement, les responsables de ces Fédérations risquent d’accepter la retraite proportionnelle et la définition des « postes de haute pénibilité » qui diviseront les travailleurs.

    L’enjeu de la bataille des retraites est énorme. La perdre, c’est ouvrir la voie à une remise en cause de l’âge de départ en retraite et, plus généralement, de tout le Code du travail. A l’inverse, remporter la bataille des retraites permettrait d’affaiblir l’offensive des classes dominantes, de renforcer le camp populaire et sa confiance en ses propres forces. Cela est possible.

    Il faut se donner les moyens de remporter la bataille des retraites.

    Cela passe par :

    l’élargissement de la mobilisation des travailleurs à la base par la tenue d’Assemblées générales sur les lieux de travail pour expliquer les enjeux de la contre-réforme des retraites, par l’adoption de motions et déclarations, par des rassemblements publics, par la signature de pétitions…

    le soutien et l’élargissement de la coordination des 16 syndicats autonomes contre les attaques du gouvernement contre les retraites, le Code du travail, le pouvoir d’achat…

    une bataille au sein de l’UGTA pour faire échec aux manœuvres de la bureaucratie syndicale qui tente de faire accepter la suppression de la retraite proportionnelle et la définition de « postes de haute pénibilité ».

    la construction d’une convergence des syndicats autonomes et de l’UGTA autour du refus de la contre-réforme des retraites et du Code du travail. La bataille des retraites doit être l’occasion de rebâtir l’unité des travailleurs et de leurs organisations que les classes dominantes se plaisent à diviser.

    la défense des libertés syndicales et démocratiques qui permettent aux travailleurs et aux masses populaires de résister au rouleau compresseur de la politique néolibérale du pouvoir. Cela passe par la construction d’une convergence de résistance démocratique, antilibérale et anti-impérialiste rassemblant le plus largement possible syndicats, mouvements, associations…

    Lamine Torki

    Extraits, reproduits El Khatwa avec l’autorisation de l’auteur, de la conférence de Nouredine Bouderba intitulée : Du code du travail à la retraite en passant par les transferts sociaux. La remise en cause de l’État social. Alger, le 16 juin 2016.

    Offensive contre les retraites

    Le gouvernement, le patronat et l'UGTA viennent de décider de supprimer la retraite proportionnelle et sans condition d'âge. Les Algériens ne pourront plus faire valoir leur droit à la retraite avant l'âge de 60 ans. […] La retraite anticipée n'est pas supprimée pour

    tous les Algériens puisque les cadres supérieurs de l'Etat et les députés continueront de bénéficier de la retraite sans condition d'âge après seulement 20 ans de cotisation dont 10 à un poste supérieur avec une pension égale à 100 % du meilleur salaire de la carrière qui évoluera au même rythme que ce salaire. Cette décision de suppression a été précédée par une campagne médiatique bien orchestrée menée par le patronat et les experts attitrés des néolibéraux

    sur le vieillissement de la population algérienne et le déséquilibre structurel du système de retraite que seule une "réforme anticipée et courageuse" pourra solutionner.

    Par réforme ils n’entendent pas une augmentation des ressources dont le potentiel est loin d’être épuisé, ce qui aurait mis à contribution les entrepreneurs, mais plutôt une diminution des pensions à travers le relèvement de l’âge de départ à la retraite accompagnée de la suppression ou la restriction de la retraite avant l’âge légal (Retraite proportionnelle et retraite sans condition d’âge). Certains experts proposent même la privatisation graduelle de la retraite à travers l’introduction de la retraite à trois (03) piliers, chère à la banque mondiale et/ou la souscription à des assurances privées.

    La suppression de la retraite avant l’âge légal, une mesure injuste

    Elle va pénaliser avant tout ceux qui ont commencé à travailler tôt. Un travailleur ayant entamé sa carrière professionnelle à l’âge de 16 ans, sera obligé de travailler durant une période allant jusqu’à 44 ans avant de pouvoir partir en retraite. Et comme il a commencé à travailler tôt, cela veut dire qu’il n’a pas eu la chance de poursuivre ses études et sa carrière sera une somme d’emplois d’exécution dans la plupart des cas.

    Or les études internationales montrent que l’espérance de vie à la naissance des ouvriers est inférieure, en moyenne, de sept (7) ans à celle des cadres supérieurs. Au final on sera face à une discrimination indiscutable puisque cet ouvrier va cotiser en moyenne 10 années de plus qu’un diplômé du supérieur pour toucher une pension de retraite durant une période inférieure, en moyenne, de 07 ans à celle de ce cadre. Dans la quasi-totalité des pays, la retraite anticipée permet aux travailleurs d’en bénéficier à un âge, en moyenne, inférieur de 05 à 10 ans avant l’âge légal. Elle est destinée à ceux qui ont commencé à travailler tôt comme […] mais aussi aux travailleurs qui ont occupé des postes pénibles durant une période de leur carrière et aux femmes qui ont élevé plusieurs enfants.Elle est destinée aussi aux travailleurs âgés mis en chômage etc.

    La discrimination sera d’autant plus inacceptable à digérer pour les travailleurs que la deuxième retraite sans conditions d’âge destinée aux cadres supérieurs de l’état et aux députés ne sera pas supprimée. Ces derniers pourront continuer d’en bénéficier après uniquement 20 ans d'activité (dont10 dans un poste supérieur) avec une pension égale à 100 % du dernier salaire (ou le meilleur salaire de la carrière) et qui sera revalorisée dans les mêmes termes que les salaires des titulaires de postes qui sont toujours en activité. Autrement dit un salaire à vie.

    Dans une récente contribution publiée par El Watan et plusieurs autres médias,j'avais souligné : « […] les véritables défis qui s’annoncent pour l’Algérie d’ici 2030 ne seront pas ceux des personnes âgées mais seront liés à la santé, la scolarisation, l’emploi et au logement des nouvelles générations avec une natalité de nouveau galopante. Il ne s’agira pas de faire travailler plus les Algériens mais de les faire travailler tous et il y aura suffisamment d’actifs pour prendre en charge tous les retraités dans le cadre du système actuel basé sur la solidarité et la répartition d’ici 2050 et même au-delà. » J'ajouterais aujourd'hui que nos décideurs seraient plus inspirés d'écouter les cris de détresse de ceux qui triment dans les chantiers pétroliers du sud à 50 °c, ceux de la SNVI qui peinent dans les postes pénibles et au travail à la chaine et les enseignants qui sont fatigués après 32 années de dur labeur avec des classes scolaires surchargées que d'écouter des patrons qui à force de vouloir tirer fort sur la corde risque de la casse ou certains experts qui ne sont motivés que par le désir de faire plaisir au patronat et aux institutions financières internationales mais qui ne connaissent rien de l'Algérie profonde.

    Déséquilibre financier de la retraite : Ni structurel ni lié à l’âge de départ

    En 2015 la CNR n’a pu faire face à ses engagements vis-à-vis des retraités qu’après une ponction de 125 milliards DA sur le Budget de la CNAS (entre autres) dans le cadre de la « solidarité inter-caisses » et l’augmentation de la part des cotisations affectée à la retraite de 17.25 % à 18.25 % au détriment des assurances sociales de la CNAS dont le taux est passé de 14 à 13 % (un différentiel de 27 milliards DA).

    En 2016, sur injonction des pouvoirs publics, la CNAS devra encore verser à la CNR 200 milliards DA soit un manque à gagner total de 230 milliards DA représentant l’équivalent de 61 % du montant des prestations sociales de la CNAS. Ces ponctions se font bien sûr au détriment de la couverture médicale des assurés sociaux et du remboursement des actes médicaux et des médicaments.

    Sans apporter une réponse durable au problème d’équilibre des comptes de la CNR, ces transferts mettent à rude épreuve l’équité de la solidarité intergénérationnelle qui caractérise le système de sécurité sociale en Algérie. En 2015 le nombre de salariés selon l’ONS est de 7.4 millions alors que le nombre de cotisants, selon les chiffres de la CNAS, n’est que de 5.1 millions. Soit un déficit de cotisations pour 2.3 millions de salariés. Une autre approche basée sur la masse salariale nationale de 2015 dont le montant avoisine les 4 670 milliards DA nous donnent des recettes potentielles pour la CNR de l’ordre de 850 milliards DA (taux de cotisation 18.25 %). Ce qui aurait largement couvert l'ensemble des dépenses de la CNR dont les prestations qui se sont élevées à 625 milliards DA en 2015 sans compter les recettes provenant du trésor pour couvrir les dépenses de solidarité nationale. Pour l’année 2015, le manque à gagner (différence entre les recettes potentielles et les recettes réelles) pour la CNAS et la CNR (pour le secteur formel uniquement) s'élève à 400 milliards DA.

    Vieillissement de la population algérienne : Un mensonge

    Le discours sur le « vieillissement » de la population et le « choc démographique » qui guetterait l’Algérie en 2025 « avec l’arrivée à l’âge de la retraite de la génération « baby‐boom » née dans les années 1970‐1980 » est un discours de propagande et n'est appuyé par aucune étude récente quiintègre les dernières évolutions démographiques qui mettrait en évidence ce vieillissement. […] S'il est vrai que l’espérance de vie de la population algérienne s'est améliorée dans notre pays (77.1ans en 2015) elle ne peut être comparée à celle observée dans les sociétés « vieillissantes » à l'exemple du Japon, la France, l’Espagne, l’Italie etc.… ou sa moyenne dépasse les 82 ans. […]

    En 2015 la proportion de la population algérienne âgée de plus de 60 ans était de 8.7 % soit trois fois moins la proportion de ce groupe d’âge dans les pays de l'Union européenne ou de l'OCDE. […] En 2015 toujours pour une personne âgée de plus de 60 ans, l’Algérie compte 07 personnes âgées de15 à 59 ans contre 2,5 dans les pays développés. Pourtant dans ces derniers pays on observe, sur lapériode 1960‐2000, une baisse continue de l’âge de départ à la retraite alors que l'indicateur de dépendance des personnes âgées était, durant cette période, plus défavorable que celui projeté pour l'Algérie à l’horizon 2030

    Consolidation du système des retraites : Un autre choix est possible

    Premièrement,[…] il ne s’agit pas de faire travailler plus les Algériens mais de les faire travailler tous. En 2015 avec 10.6 millions d’occupés le taux d’emploi global est seulement de 37.1 % et celui des femmes particulièrement bas (13.6 %). Le nombre officiel des chômeurs est de 1.34 millions auxquels il faut ajouter 1.94 millions de « découragés » mais néanmoins désirant travailler et non classés comme chômeurs par l’ONS.

    La population « inactive» s’élève à 16.6 millions dont 3.7 millions d’étudiants et 3.5 millions âgés de plus de 60 ans. Ce qui nous donne 9.4 millions d’«inactifs » (dont 8 millions de femmes) âgés entre 15 et 59 ans qui ne sont ni étudiants, ni dans l’emploi, ni dans le chômage. Voilà un réservoir de forces potentiellement actives mais inexploitées qui montre que le profil démographique de l’Algérie est une aubaine à saisir et non celui d’une société vieillissante. Seule la relance de la croissance boostée par les investissements productifs et créateurs de richesses pourra valoriser ce potentiel.

    Deuxièmement : Sur les 10.6 millions d’occupés les salariés, avec 7.4 millions, en représentent 69.8% et « les indépendant » 30.2 % (soit 3.2 millions). En 2015 seulement cinq (5.1) millions de salariés cotisaient à la CNAS et 300 000 indépendants cotisaient à la CASNOS. Soit 5 millions de non cotisants selon les chiffres des caisses et 4.1 millions de non affiliés selon les statistiques de l’ONS.

    L’année 2015 devait être celle du recouvrement selon le ministre du Travail. Des mesures législatives ont été prises dans ce sens. Depuis malgré l’expiration des délais aucun bilan n’est fourni et les prévisions budgétaires des caisses ne reflètent pas une amélioration. Seule une volonté réelle de lutte contre la non déclaration des salariés les sous-déclarations des salaires accompagnée de l‘élimination des différences exonérations de cotisations accordées aux entrepreneurs peut améliorer le taux de couverture et les équilibres du système de sécurité sociale.

    En sus des dépenses de revalorisation et de solidarité nationale (Indemnités complémentaires des pensions Minimum et complémentaires dont celles des moudjahidines) et de revalorisation la contribution de l’Etat à la prise en charge des dépenses de la CNR pourrait être envisagée pour couvrir notamment les pensions de retraite avant l’âge (servies avant 60 ans) avec remboursement à la CNR des sommes servies dans ce cadre par le passé. Dans tous les pays au monde la contribution des Etats aux dépenses de sécurité sociale est réelle et souvent importante.

    Des ressources fiscales additionnelles pourraient être instituées au profit des caisses des salariés : impôts sur les fortunes et le patrimoine, impôt sur les dividendes, sur-taxations des activités économiques polluantes ou sources de maladies professionnelles et d’accidents de travail ainsi que celles à faible intensité de main d’œuvre, affectation à la S.S. d’une partie de la TVA et des droits de douane institués par la loi de finances 2016 pour protéger la production nationale…

    Mettre fin au financement par la CNAC (elle-même financée par les cotisations des salariés) de la politique de l’emploi qui relève de l’Etat. Le hic est que la totalité des bénéficiaires du dispositif CNAC ne sont pas affiliés à la CNAS. L’arrêt de ces transferts pervers permettra aux caisses des salariés d’économiser annuellement 40 milliards DA. De plus le remboursement par l’Etat des dépenses passées pourrait être envisagé. Le taux des cotisations sociales dans 12 pays européens au moins dépasse 35 % et la part patronale y est supérieure à 25 % dans au moins 08 d’entre eux. Aucune étude sérieuse n’est venue étayer les affirmations qu’une éventuelle augmentation de ce taux mettrait en péril l’emploi en Algérie. Une augmentation progressive (sur 05 ans) de trois (03) points (dont 2 à la charge de l’employeur)pourrait être envisagée. L’impact sur le pouvoir d’achat des travailleurs aux revenus moyens pourrait être compensé par une réduction de l’IRG.

    Au 31 décembre 2014 les créances totales des caisses des salariés s’élevaient à 251 milliards DA dont l’état devait être garant. Le recouvrement de ces créances dans l’immédiat permettra de renflouer les réserves des caisses.

  • Algérie : “Comment sortir de l’impasse libérale, antisociale et antinationale” (PST)


    Abdelatif Rebah lors des rencontres-débats du PST.

    “Comment sortir de l’impasse libérale, antisociale et antinationale est l’intitulé de la conférence débat présentée le jeudi 30 juin 2016, au siège national du PST à Alger, par Abdelatif Rebah, enseignant chercheur en économie et militant de l’ex-PCA, le Parti communiste algérien.

    Le conférencier a hypnotisé l’assistance qui lui était tout acquise. Dans un silence de cathédrale, les invités du PST tendaient une oreille très attentive à l’exposé de Rebah qui était méthodique et précis. Programmée à 22h jeudi, la conférence, et les débats enflammés qui s’en sont sui- vis, ne s’est achevée qu’après 2h du matin (le vendredi). Une soirée des plus réussies du PST dont les activités ramadanesques ont drainé plein de monde avide de débat et d’échange dans cette conjoncture difficile.

    Abdelatif Rebah, économiste, a fait œuvre de déconstruction des politiques et discours libéraux dont l’impasse structurelle entraîne, à ses dires, inexorablement, le pays vers l’apocalypse. «Les libéraux nous disent qu’il n’y a pas de plan B, professe-t-il, que c’est le sentier libéral qui est dans l’impasse et non pas le libéralisme lui-même (…). Ils nous imposent un débat circulaire pour éviter de toucher à l’essentiel et de continuer à agir par parades, par rajouts, par mesures conjoncturelles. Car ce qui se pra- tique aujourd’hui en Algérie n’est rien d’autre qu’une politique de gestion de l’impasse. Le gouverne- ment fait tourner le ballon. Et à trop gérer l’impasse, on risque de perdre aussi bien le ballon que l’Algérie.» Pour Rebah, l’impasse structurelle du choix libéral incite les libéraux algériens à forcer le passage : «La contrainte extérieure est instrumentalisée par le gouvernement.

    Elle sert de prétexte à la normalisation, au retour des ces bons samaritains que sont les FMI et Banque mondiale (…). Ce qu’ils nous proposent, c’est de discuter des marges de manœuvre comme s’il pouvait y en avoir dans cette configuration libérale ; le gouvernement demande un autre chèque en blanc or l’impasse est structu- relle et ce que celle-ci nous an- nonce comme scénario catastrophe est pire que la Libye ou la Syrie, c’est la dislocation du tissu social et de cet espace national en forma- tion.» Auteur — entre autres — de Economie algérienne : le développement national contrarié (Inas Editions, 2011), Rebah analysera les «mutations systémiques» opérées et mettra à nu ces «transitions masquées» vers le libéralisme effectuées dans le sang et les larmes.

    «Le summum de ces transitions masquées fut atteint durant les années 1990, la décennie noire où un pouvoir de l’ombre, un pouvoir dans l’ombre a piloté un train de transformations libérales.» Aujourd’hui encore, souligne-t-il, il s’agit encore d’achever l’œuvre de « déconstruction » de l’entreprise de développement national. «Parler des réformes chez nous n’est qu’un paravent du Consensus de Washington», appellation donnée à ce corpus de mesures standard pour économie en difficultés prescrites par le FMI et la BM. Puisant profond dans l’histoire, l’universitaire épiloguera sur les limites objectives du mouvement national.

    «Le PPA, le Parti du peuple algérien a été un parti plébéien, mais ses dirigeants étaient pour la plupart des moyens et/ou de petits propriétaires.» «Et l’Algérie, ajoute-t-il, n’est venue au socialisme qu’à reculons. Et à la mort de Boumediène, son entourage était pressé de démanteler l’option socialiste qui a été et demeure un véritable casse- tête pour eux car seul le socialisme est à même de défendre l’indépendance nationale alors que la mondialisation capitaliste n’offre à l’Etat national que le suicide comme choix.»

    L’entrave au projet libéral, réitère Rebah, a été l’histoire. «132 ans de colonisation, de libéralisme n’ont pas développé l’Algérie (…)», oppose-t-il en argument massue aux divagations d’un gouvernement Sellal se voulant plus royaliste que le roi. «Et jusqu’à aujourd’hui, l’histoire, Novembre 1954 constituent l’entrave au libéralisme. La force motrice de la libération a été, ne l’oublions pas, la paysannerie. C’est la paysannerie qui a libéré l’Algérie.»