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Libye - Page 2

  • Vers une nouvelle intervention en Libye ? (Le Monde Diplomatique)

     
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    Fadi Al-Hamwi. – « 4:00 am at Studio » (4 heures du matin à l’atelier), 2012 www.fadialhamwi.com
     
    Un dialogue national instrumentalisé par les Occidentaux
     
    Mercredi 20 juillet 2016. Le ministère de la défense a annoncé le 20 juillet la mort de trois militaires français en Libye, pays où la France mène « des opérations périlleuses de renseignement ». En février dernier, le journal Le Monde révélait qu’elle procédait également à des bombardements. Jean-Yves Le Drian avait aussitôt lancé une enquête pour « compromission du secret de la défense nationale », confirmant les informations du quotidien ainsi que l’analyse de Patrick Haimzadeh dans nos colonnes.

    Après la conclusion d’un accord entre Parlements rivaux, la mise en place d’un gouvernement d’union nationale ouvre la voie à une action militaire occidentale en Libye. Dirigée contre les forces de l’Organisation de l’Etat islamique, une nouvelle ingérence de forces étrangères risquerait d’aggraver les violences entre factions et de faire échouer le fragile dialogue interlibyen. 

    La signature le 17 décembre à Skhirat, au Maroc, d’un accord d’entente nationale entre les représentants des deux Parlements libyens sous l’égide de l’Organisation des Nations unies (ONU) a ouvert la voie à la désignation, le 19 janvier, d’un gouvernement d’union nationale de 32 ministres dirigé par l’homme d’affaires tripolitain Fayez Sarraj. Cela démontre la pertinence du dialogue engagé en septembre 2014. Malgré les tensions entre entités politiques et groupes rivaux, une grande majorité des adversaires qui refusaient de se rencontrer il y a encore un an ont accepté de faire des concessions. Même les plus radicaux des deux camps ne rejettent pas l’idée d’une conciliation. Bien que perfectible à maints égards, la politique des « petits pas » déployée par l’ONU (1), alliée à la multiplication des initiatives d’acteurs locaux dans l’ouest du pays pour mettre en œuvre des mesures de confiance, a permis d’y contenir, voire d’y réduire sensiblement, le niveau de violence.

    En dépit des apparences, et même si les médias occidentaux emploient souvent le mot « chaos », les adversaires se parlent en Libye. Dans ce pays où un semblant de normalité quotidienne peut très vite céder la place aux combats, nombre d’habitants soutiennent les discussions et font pression sur leurs responsables locaux pour qu’ils œuvrent au retour de la paix civile.

    Pour autant, l’accord du 17 décembre, pierre angulaire du processus de réconciliation, souffre de deux défauts majeurs : l’insuffisante représentativité de ses signataires et le fait qu’il semble n’avoir été conclu — dans l’urgence et sous la forte pression de puissances européennes — que pour permettre une intervention occidentale contre les milices et groupes armés ayant fait allégeance à l’Organisation de l’Etat islamique (OEI).

    Depuis deux ans, il ne se passe pas une semaine sans que des responsables politiques et militaires américains, français, britanniques et, dans une moindre mesure, italiens n’annoncent l’inéluctabilité d’une telle intervention. Dès le 27 janvier 2014, l’amiral français Edouard Guillaud, alors chef d’état-major des armées, déclarait : « En Libye, l’idéal serait de monter une opération internationale. Le problème du sud de la Libye, c’est qu’il faudrait qu’il y ait un Etat dans le Nord. » Il s’agissait alors d’intervenir dans le Sud pour y combattre les groupes ayant quitté le nord du Mali après l’intervention française dans ce pays.

    Au printemps 2015, après les naufrages successifs de plusieurs embarcations de migrants en provenance de Libye, l’Union européenne lançait son opération navale « Sophia ». « Il n’y aura d’effet final que lorsque nous pourrons travailler au plus près des réseaux eux-mêmes, aller appréhender les gros poissons, et pas les petits qui vont en mer », estimait le 27 octobre 2015, à Rome, le contre-amiral français Hervé Bléjean, commandant en second de cette opération. « C’est-à-dire qu’à un moment, il va falloir travailler dans l’espace de souveraineté libyen. » Ces mesures qui correspondent à la troisième phase de l’opération « Sophia » ne sont possibles qu’avec l’aval des autorités légitimes libyennes ; accord que le Parlement de Tobrouk, reconnu par les pays occidentaux, s’est toujours refusé à donner, à la différence de celui de Tripoli.

    « Terminer le travail »

    Par la suite, les attentats du 13 novembre à Paris ont relancé l’idée d’une nouvelle intervention internationale en Libye. Bien que les tueurs, tous français et belges, n’aient pas séjourné dans ce pays, la nouvelle « guerre contre le terrorisme » officialisée par le président François Hollande inclut désormais le territoire libyen, où des milices ont fait allégeance à l’OEI dans les villes de Derna (Est) et de Syrte (Centre-Ouest). Les 21 et 23 novembre 2015, des Rafale ont décollé du porte-avions Charles-de-Gaulle et effectué des vols de reconnaissance sur la ville de Syrte. Des groupes armés, dont les effectifs sont évalués à plusieurs centaines d’hommes, tiennent la ville et mènent régulièrement des attaques, notamment contre les installations pétrolières.

    Quelques jours plus tard, le premier ministre Manuel Valls affirmait : « La Libye est incontestablement le grand dossier des mois qui viennent » (Europe 1, 1er décembre 2015) ; puis : « Il faudra combattre Daech [acronyme de l’OEI en arabe], sans doute demain en Libye » (France Inter, 11 décembre). Dans un article intitulé « Daech : la France va-t-elle intervenir à nouveau en Libye ? », Le Figaro du 22 décembre, citant des sources au ministère de la défense, se montrait plus précis : « Pour éradiquer le “cancer Daech et ses métastases libyennes”, une action militaire est jugée indispensable à l’horizon de six mois, voire avant le printemps. »

    Les experts en stratégie, spécialistes multicartes et partisans systématiques des interventions militaires, qui prédisaient en 2011 la chute du régime de Mouammar Kadhafi en quelques jours puis l’avènement de la démocratie, se relaient désormais dans les médias pour expliquer la nécessité d’une nouvelle expédition. Cinq ans après celle de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord, il s’agirait de « terminer le travail » — une rhétorique qui n’est pas sans rappeler le discours des néoconservateurs américains pour justifier l’invasion de l’Irak en 2003. Certains vont jusqu’à affirmer la nécessité de mettre le pays sous tutelle pour y instaurer une gouvernance digne de ce nom (2).

    Afin de respecter les formes de la légalité internationale, cette intervention doit néanmoins être demandée officiellement par des institutions reconnues. La formation du gouvernement d’union nationale, légitime aux yeux du Conseil de sécurité, constituait donc un préalable à tout appel à l’aide. Le nouveau représentant du secrétaire général de l’ONU, le diplomate allemand Martin Kobler, s’était attelé à cet objectif dès sa nomination à la mi-novembre. Le 6 décembre, alors qu’aucun consensus ne se dégageait au sein des deux Parlements libyens, il déclarait à la chaîne qatarie Al-Jazira : « L’heure a sonné pour une approbation rapide de l’accord politique libyen. Le train a quitté la gare. » Manière de signifier que la proposition était à prendre ou à laisser. Le message s’adressait aux deux Parlements, qui, quoique rivaux, formulaient la même exigence : entériner la composition de tout gouvernement d’entente nationale.

    La volonté onusienne et européenne d’aboutir coûte que coûte, et ce malgré les oppositions, s’est confirmée le 13 décembre 2015, lors de la conférence internationale pour la Libye coprésidée par le ministre des affaires étrangères italien et le secrétaire d’Etat américain. Le communiqué final de cette rencontre conférait, avant même sa nomination, le statut de « seul gouvernement légitime » au futur gouvernement d’union nationale.

    Les chercheurs spécialistes de la Libye exprimaient des réserves unanimes, et des cercles de réflexion influents, dont l’International Crisis Group (présidé par l’ancien secrétaire général adjoint des Nations unies chargé des opérations de maintien de la paix, M. Jean-Marie Guéhenno), mettaient en garde contre la précipitation à obtenir un accord qui ne serait pas validé par le plus grand nombre possible de parties libyennes (3). Qu’importe : M. Kobler s’est démené pour y parvenir à tout prix. Le 15 décembre, il s’est notamment entretenu avec le général Khalifa Haftar, commandant en chef de l’Armée nationale libyenne, basée en Cyrénaïque et opposée au gouvernement de Tripoli. Il lui a donné des garanties sur son avenir comme chef d’état-major des armées.

    A la demande des parrains de la conférence de Rome, l’accord interlibyen du 17 décembre prévoyait dans son article 39.2 que le futur gouvernement aurait le droit, dans le domaine sécuritaire, de « requérir l’assistance nécessaire des Nations unies, de la communauté internationale et des organisations régionales compétentes ». Le 23 décembre, la résolution 2259 du Conseil de sécurité, adoptée sur proposition britannique, l’a entériné en rappelant que la situation en Libye « constitue une menace pour la paix et la sécurité internationales ». Son article 12 « exhorte les Etats membres à aider au plus vite le gouvernement d’entente nationale, à sa demande, à lutter contre les menaces qui pèsent sur la sécurité en Libye et à prêter un concours actif au nouveau gouvernement en vue de vaincre l’Organisation de l’Etat islamique, les groupes qui lui ont prêté allégeance, Ansar Al-Charia et tous les individus, groupes, entreprises associés à Al-Qaida opérant en Libye ».

    Sur le papier, les exigences des puissances occidentales réunies à Rome sont donc satisfaites, et les bases légales d’une nouvelle intervention sont en place. Mais, dans la pratique, cet accord et la désignation du nouveau gouvernement risquent d’engendrer de nouvelles lignes de fracture et d’accroître la violence. De nombreux députés de l’Est n’approuvent pas le document de Skhirat ; le Parlement de Tobrouk n’était d’ailleurs représenté que par 75 élus sur 188 lors de la cérémonie de signature au Maroc. Toujours en Cyrénaïque, le général Haftar a certes déclaré qu’il reconnaîtrait le gouvernement d’entente nationale, mais il est peu probable qu’il renonce à combattre ses adversaires politiques de Tripoli. Quant à M. Ibrahim Jadhran, autre homme fort de l’Est et chef de la garde des installations pétrolières — ses puissantes milices font face à celles de l’OEI dans le golfe de Syrte —, il soutient l’accord, mais il accuse le général Haftar et son embryon d’armée nationale de faire le jeu de l’OEI en ne luttant pas prioritairement contre elle.

    Cependant, c’est à l’Ouest que la situation demeure la plus problématique. Seuls 26 députés sur 136 de l’ex-Congrès national général de Tripoli assistaient à la signature de l’accord de Skhirat. Le nombre total de parlementaires soutenant le gouvernement d’entente nationale est quant à lui inférieur à 75. Certains de ses opposants, tel M. Abdelkader Al-Huweïli, y voient déjà un « complot étranger contre la Libye ». Si certaines milices de Zintan, Misrata et Zaouia acceptent d’« assurer la protection » du nouveau gouvernement, les quatre plus puissantes milices de la capitale ont d’ores et déjà déclaré qu’elles s’opposeraient à cette nouvelle instance. Les milices de Misrata affiliées au Front de la fermeté (Jabhat Al-Sumud) de M. Salah Badi ont également fait part de leur hostilité. Le grand mufti de Libye, M. Sadek Al-Ghariani, affirme quant à lui que cet accord imposé par l’étranger « n’est pas conforme aux principes islamiques ». La position de certains personnages influents de Misrata, dont M. Abdelrahman Suweihli, qui s’opposent au texte dans sa forme actuelle, dépendra quant à elle de la volonté et de la capacité de M. Kobler à répondre à leurs demandes. Ils souhaitent que l’on donne un poids accru à l’ancien Congrès général national, élu en 2012, pour contrebalancer celui du Parlement de Tobrouk, qui, selon les termes de l’accord, doit être maintenu comme principal corps législatif. De plus, une majorité de députés de l’Ouest refusent la nomination du général Haftar en tant que chef des armées.

    Hostilité de la population

    Obtenir un accord à marche forcée, fût-il insatisfaisant pour nombre d’acteurs libyens influents, tel a été le pari onusien ; mais il risque d’aboutir à une nouvelle impasse. Pour l’éviter, les Nations unies auraient dû faire preuve de souplesse en poursuivant les négociations avec les parties qui ne se reconnaissent pas dans cet arrangement, ainsi qu’en ouvrant un dialogue sécuritaire avec les acteurs politico-militaires locaux et les chefs de milice. A défaut, la situation ressemblera à celle qui prévalait en août 2014, quand la « communauté internationale » reconnaissait comme seul représentant du peuple libyen le Parlement de Tobrouk, qui ne contrôlait, au mieux, qu’un tiers du pays.

    S’il a vite été désigné, rien ne dit que le gouvernement d’union nationale pourra s’installer facilement à Tripoli ni, surtout, s’y maintenir sans heurts. Et même si c’était le cas, il devrait sans doute se garder d’appeler à une intervention étrangère. Si elles unissent leurs efforts, les milices de Misrata et de l’est du pays ont en effet la capacité de vaincre celles affiliées à l’OEI dans la ville de Syrte. De plus, toute ingérence étrangère, outre qu’elle décrédibiliserait le gouvernement et compromettrait durablement la reconstruction d’une nation et d’un Etat libyens, ne ferait que nourrir la propagande de l’OEI : l’Occident bombarderait une nouvelle fois des populations arabes. Cette propagande trouverait un écho au sein d’une population majoritairement hostile à une telle hypothèse, alimentant ainsi le recrutement de l’OEI. Il est toutefois peu probable que les responsables politiques et militaires occidentaux s’en préoccupent. Pour beaucoup d’entre eux, la prochaine guerre en Libye n’est désormais qu’une question de semaines (4).

    Patrick Haimzadeh

    Ancien diplomate français à Tripoli (2001-2004), auteur de l’ouvrage Au cœur de la Libye de Kadhafi, Jean-Claude Lattès, Paris, 2011.
     
    http://www.monde-diplomatique.fr/
  • Contre Daesh, une stratégie militaire vouée à l’échec politique (NPA)

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    Les États occidentaux, avec à leur tête les États-Unis, veulent montrer que l’État islamique (ou Daesh) est l’ennemi principal, car il constitue un facteur d’instabilité régionale et internationale, notamment avec les attentats terroristes en Europe...

    Les éléments qui ont nourri son développement sont à nouveau utilisés pour tenter d’y mettre fin militairement : soutien à des régimes et groupes autoritaires et confessionnels, politiques néolibérales et interventions militaires...

    Ainsi, en Syrie, les États-Unis ou la France concentrent leurs actions militaires contre Daesh, alors qu’un changement du régime autoritaire d’Assad n’a jamais été à l’agenda. Les alliés (Russie, Iran, Hezbollah et milices chiites fondamentalistes irakiennes) du régime poursuivent de leur côté leur assistance militaire à Damas pour éliminer toute forme d’opposition armée, démocratique (Armée syrienne libre) ou réactionnaire (Jabhat al-Nusra et Daesh), tout en continuant leurs exactions contre les civils syriens. Les raids de l’aviation russe le samedi 25 juin contre la localité d’al-Kouriyé, au sud-est de la ville de Deir Ezzor, ont par exemple tué 31 civils.

    En Irak, les combats contre Daesh sont menés par l’armée irakienne et ses groupes d’élite, mais aussi par des milices fondamentalistes chiites soutenus politiquement, économiquement et militairement par la République islamique d’Iran, et surtout détesté par des larges sections des populations sunnites d’Irak à cause de leurs exactions contre elles et leurs discours et pratiques confessionnels.

    En Libye, les États occidentaux ont poussé à la formation d’un gouvernement d’union, avec deux objectifs prioritaires : lutter contre Daesh et « l’immigration clandestine ». Les questions politique et socio-économiques sont quasiment ignorées. Plusieurs pays européens ont déjà promis plusieurs dizaines de millions d’euros en soutien à ce gouvernement... Cela ans oublier le soutien des États occidentaux, en particulier français, au régime égyptien présidé par le dictateur Sissi qui continue sa répression violente contre toute forme d’opposition, des mouvements de gauche aux Frères musulmans. Une répression tous azimuts qui a pour effet de créer de nouveaux Daesh en nombre dans le pays...

    En soutien aux mouvements démocratiques et non confessionnels

    Il ne suffit pas simplement de mettre fin militairement à toute capacité de nuisance de Daesh, au risque de le voir réapparaître dans le futur comme ce fut le cas dans le passé, mais de s’attaquer aux conditions politiques et socio-économiques qui permettent et ont permis son développement. Il faut se rappeler que Daesh, élément fondamental de la contre-révolution, a connu un développement sans précédent à la suite de l’écrasement des mouvements populaires, se nourrissant de la répression massive et violente des régimes et groupes autoritaires, souvent attisés par des discours et pratiques confessionnelles s’appuyant sur les haines religieuses.

    Les interventions des États régionaux et internationaux ont grandement contribué, et continuent par leurs politiques, au développement de Daesh. Les politiques néolibérales appauvrissant les  classes populaires, accompagnées de la répression des forces démocratiques et syndicales, sont bien sûr un élément fondamental du développement de Daesh.

    Il s’agit de lutter contre ces éléments, tout en soutenant des mouvements populaires de masse démocratiques et non confessionnels qui continuent à travers la région malgré des reculs importants, défiant à la fois les régimes autoritaires et les organisations fondamentalistes religieuses. C’est le seul moyen de mettre fin à ces deux formes de barbarie, au lieu de répéter des erreurs du passé contribuant à leur renaissance.

    Joseph Daher

     

  • Nouveautés sur Afriques en Lutte

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    Manifestation féministe à Rabat

    Samedi 18 juin à 21H30, une manifestation féministe s’est tenue sur l’esplanade du parlement, à Rabat. La manifestation, qui a regroupé plusieurs associations et collectifs d’associations féministes, a aussi vu la participation de personnalités du milieu associatif, dont Khadija Ryadi, ex-présidente de l’Association marocaine des droits humains (AMDH), ou encore Ahmed El Haij, l’actuel président de l’association. Les participantes ont brandi des pancartes appelant à la parité et à l’égalité des sexes, (...)

    L’UE risque d’alimenter les violations des droits des réfugiés et des migrants en Libye

    L’Union européenne (UE) projette de coopérer plus étroitement avec la Libye en matière de migration, au risque de favoriser les mauvais traitements endémiques et la détention pour une durée indéterminée, dans des conditions terribles, que subissent des milliers de réfugiés et de migrants, a déclaré Amnesty International. En mai, faisant suite à une demande du nouveau gouvernement libyen, l’UE a annoncé son plan axé sur la prolongation pendant un an de l’opération Sophia, sa mission navale de lutte contre (...)

    Tunisie - Tataouine : Grève de trois jours des employés de la société pétrolière SODAPES

    Abdallah Ben Jabeur, membre du syndicat de base de SODAPES, a indiqué ce mardi 21 juin 2016, à la TAP, que les employés de la société pétrolière à Tataouine entament une grève de trois jours, à partir d’aujourd’hui. Cette grève, indique la même source, a (...)

    Une pétition demande la restitution à Alger des crânes des insurgés de Zaatcha, entreposés dans les sous-sols du musée de l’Homme, à Paris.

    Ils sont numérotés, entreposés dans des boîtes, dans les armoires métalliques de quelque obscur sous-sol du musée de l’Homme, à Paris. Les crânes des résistants algériens tués, puis décapités en 1849, lors de la célèbre bataille de Zaatcha, furent longtemps (...)

    OÙ VA DJIBOUTI ?

    Va-t-on vers un scénario similaire à celui de la Somalie, du Burundi ou du Sud Soudan ? Sur ce petit territoire, trois acteurs se font face : les bases militaires étrangères, le régime et la population djiboutienne. Qu’en est-il de l’opposition ? (...)

  • Libye : le chaos libéral et impérialiste (Npa)

     

    Dans The Atlantic le 10 mars, Barack Obama désavoue la coalition conduite par la France et la Grande-Bretagne qui a commencé, en 2011, l’intervention en Libye ; celle-ci aboutissant, après la chute du régime de Mouammar Kadhafi, à la désagrégation du pays. « La Libye est plongée dans le chaos », constate Obama. Selon lui, Sarkozy « voulait claironner ses succès dans la campagne aérienne alors que nous avions détruit toutes les défenses anti-aériennes » . Une juste appréciation de l’aventurisme politicien de la politique de la France sous Sarkozy et que Hollande poursuit avec zèle.

    Mais Obama claironne aussi pour tenter de masquer le rôle des USA dans la désagrégation de tout le Moyen Orient. Il se dit « fier » d’avoir renoncé à frapper le régime syrien de Bachar al-Assad il y a près de trois ans, lorsque ce dernier avait franchi une « ligne rouge » avec une attaque chimique, à l’été 2013. Satisfait de lui-même, Obama veut masquer ses responsabilités en Irak, en Afghanistan, et aussi en Syrie où il a laissé la dictature écraser la révolte populaire, ou en Égypte où il accorde son soutien à l’armée qui fait régner la terreur.

    En voulant étouffer voire écraser les révolutions arabes, la politique des grandes puissances sous la direction des USA a engendré sur tout le Moyen-Orient le chaos qui a nourri Daesh. 5 ans après l’intervention franco-britannique, ce dossier revient sur ce processus au sein duquel la Libye occupe une place particulière. Là comme dans tout le Moyen-Orient, la révolte des peuples reste bien vivante.

    Libye : Il y a cinq ans débutait l’intervention...

    Cela va faire tout juste cinq ans que l’intervention militaire franco-britannique en Libye a commencé, débutée le 19 mars 2011 et justifiée par la résolution numéro 1973 des Nations unies adoptée le 16 mars 2011 qui légitimait « le recours à la force » contre le régime de Kadhafi. 

     

    Libye : Un espoir qui persiste

    Beaucoup ont vu dans la chute de Kadhafi, une simple opération de l’impérialisme, occultant pourtant un fait majeur : la mobilisation massive des populations contre une dictature.

     

    Libye : Stopper la nouvelle catastrophe

    L’intervention militaire française en Libye a déjà commencé avec l’envoi des forces spéciales ayant pour mission le renseignement et l’identification des cibles pour les frappes aériennes futures.

     
     
     
    Lire aussi:
     
    Patriarcat, femme
    Déclaration sur la situation en Libye, les droits des femmes et la charia

    , par Femmes sous lois musulmanes

    Déclaration du Réseau international de solidarité Femmes sous lois musulmanes (WLUML) sur la situation en Libye
    25 Octobre 2011
    WLUML s’inquiète du fait que le premier acte public du Comité national de transition de Libye a été de proclamer, le 23 octobre 2011, l’annulation d’un certain nombre de (...)

     
  • Nouveautés sur "Lutte Ouvrière"

  • France-Libye. La préparation d’une guerre ouverte, avec ses répercussions régionales, par définition, imprévues (Al'Encontre.ch)

    Une vingtaine de «spécialistes» américains, avec des armes dites lourdes, en civil, en Libye (Mail Online du 18 décembre 2015)

    Une vingtaine de «spécialistes» américains, avec des armes dites lourdes, en civil, en Libye (Mail Online du 18 décembre 2015)

    Par Nathalie Guibert

    Des frappes ponctuelles très ciblées, préparées par des actions discrètes voire secrètes: en Libye, telle est la ligne de conduite de la France face à la menace de l’organisation Etat islamique (EI). Un haut responsable de la défense française confirme au Monde que «la dernière chose à faire serait d’intervenir en Libye. Il faut éviter tout engagement militaire ouvert, il faut agir discrètement.»

    Dans ce pays [1] où la France scrute depuis des mois la menace de l’EI, l’objectif n’est pas de gagner une guerre mais de frapper l’encadrement du groupe terroriste, dans l’idée de freiner sa montée en puissance. Une action menée de concert par Washington, Londres et Paris, comme l’a de nouveau illustré le raid américain du 19 février contre un cadre tunisien de l’EI à Sabratha [2].

    Moyens d’«ouverture de théâtre»

    La ligne fixée par le président François Hollande repose pour l’heure sur des actions militaires non officielles. Elles s’appuient sur des forces spéciales – leur présence, dont Le Monde a eu connaissance, a été repérée dans l’est de la Libye depuis mi-février par des blogueurs spécialisés. Ce n’est pas tout. Plusieurs sources ont indiqué au Monde que la lutte contre les terroristes pouvait couvrir des opérations clandestines, menées par le service action de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE). Les premières engagent la France car leurs soldats, même très discrets, agissent sous l’uniforme. Les secondes sont aussi assurées par des militaires, mais restent invisibles.

    Forces spéciales et clandestines sont considérées dans la doctrine militaire comme des «précurseurs», des outils classiques en l’absence de cadre disponible pour une guerre ouverte. Ces moyens, dits «d’ouverture de théâtre», ne préjugent toutefois pas d’une future opération en bonne et due forme.

    Une intervention internationale, dont l’idée est agitée depuis des mois, bute en tout premier lieu sur le rejet des autorités libyennes : elles tolèrent des actions ciblées mais refusent une coalition étrangère sur leur sol. Les principaux acteurs occidentaux qui pourraient constituer une telle force – France, Etats-Unis, ou Italie – n’ont que très peu d’appétit après l’aventure de 2011 qui a tué Mouammar Kadhafi et semé le chaos dans la région, surtout en l’absence d’un mandat de l’ONU. En exerçant une pression nouvelle sur l’EI, l’on risque, en outre, de déplacer le problème vers la fragile Tunisie ou de rapprocher encore la menace du sud de l’Europe. Avec son implantation libyenne, «pour la première fois, l’EI dispose d’une côte», souligne l’état-major de la marine française, qui dévoile: «Nous nous préparons sur des scénarios durs en mer.»

    Eliminations ciblées

    Le 19 février à Sabratha, le Tunisien Nourredine Chouchane a été tué parmi une cinquantaine d’autres personnes par l’US Air Force, une mort non confirmée par la Tunisie. «Nous avons décidé de frapper après avoir déterminé que Chouchane et les autres combattants [dans ce camp] préparaient des attaques extérieures contre des intérêts américains et occidentaux dans la région», a justifié un porte-parole du département américain de la défense.

    Ces raids d’éliminations ciblées sont l’objet d’une coopération étroite entre les services américains, britanniques et français. Ainsi, c’est la troisième fois, depuis juin 2015, que des F15 américains sont partis de la base anglaise de Lakenheath pour frapper les groupes djihadistes dans ce pays.

    Considéré comme le plus haut responsable de l’EI en Libye, l’Irakien Abou Nabil avait, lui, été tué à Derna, en novembre 2015, par un bombardement similaire. Selon les informations du Monde, cette frappe a été initiée par Paris : «L’élimination d’Abou Nabil s’est faite grâce à un renseignement français», assure une source proche.

    Avant lui, en juin 2015, près d’Ajdabiya, c’est le chef du groupe Al-Mourabitoune, Mokhtar Belmokhtar, qui avait été visé par les F-15 américains – mais sa mort, démentie par les groupes djihadistes, n’a jamais été confirmée par le Pentagone.

    Les observateurs extérieurs ne doutent pas que le service action de la DGSE soit très mobilisé, en Libye comme en Syrie. La situation a radicalement évolué par rapport à 2014, quand trois sénateurs proposaient dans un rapport de verser les unités militaires du service clandestin de la DGSE (un groupe aérien et deux centres d’entraînement) dans la corbeille du Commandement des opérations spéciales (COS) des armées. Leur suggestion, illustrant alors d’âpres bagarres de périmètre, n’a pas débouché. «Nos conclusions de 2014 ne sont plus pertinentes, le contexte a changé», confirme l’un des co-auteurs, Jacques Gautier (Les Républicains – LR). «Dans les années 2010-2012, le service était moins sollicité, mais aujourd’hui, la nécessité de renforts devient d’actualité pour la DGSE comme pour le COS.»

    Clandestinité renforcée

    Du point de vue de l’usage des moyens clandestins, une différence d’approche démarque ainsi l’actuel chef de l’Etat de son prédécesseur : selon les spécialistes, Nicolas Sarkozy défendait les opérations ouvertes, convaincu que «tout finit par se savoir». Aujourd’hui, la DGSE est engagée dans un renforcement de la clandestinité. Les effectifs et la formation du service action ont été étoffés. Il compte un millier d’agents. «C’est un instrument de souveraineté dans les mains du président, qui augmente sa marge de manœuvre, argumente un expert du secteur. Dans un monde de plus en plus transparent, il faut que l’Etat puisse faire des choses qui ne se sachent pas, non revendiquées.» La France agissant dans des coalitions, il y aurait aussi des circonstances où elle a besoin d’agir à titre purement national sans que ses partenaires ne l’apprennent.

    Membre d'un commando français en Libye (MEMO - Middle East Monitor, 23 février 2016)

    Membre d’un commando français en Libye (MEMO – Middle East Monitor, 23 février 2016)

    Les orientations du combat militaire contre l’EI s’inscrivent dans le cadre d’une réforme plus large de la DGSE. Son patron, le diplomate Bernard Bajolet, 67 ans en mai, que M. Hollande a prolongé à son poste jusqu’en 2017 au-delà de la limite d’âge, espère mettre en œuvre un «plan stratégique» à l’horizon 2025. La réforme comprend une forte augmentation des effectifs (850 recrutements d’ici à 2019 pour atteindre 7000 agents), des partenariats avec les Européens, un renforcement du renseignement humain pour suivre l’explosion du renseignement technique acquis par les services secrets ces dernières années.

    Face à l’EI, tous les moyens sont employés, et la France est également présente dans le ciel libyen avec des outils conventionnels sur lesquels le ministère de la défense ne communique pas. Engagées depuis la mi-novembre 2015 par des avions de chasse et de reconnaissance, les opérations d’ISR (Intelligence, surveillance, reconnaissance) se poursuivent. Des sources militaires évoquent la nécessité de «préparer l’avenir» pour d’éventuelles actions plus larges, même si cet horizon reste peu clair. Pour l’heure, il s’agit de garantir au président la politique du «hit and run» («frappe et fuis»): disposer d’un renseignement complet à jour, afin de pouvoir frapper dès que se présente l’opportunité de «neutraliser» un cadre connu de l’EI ou de casser un projet d’attentat menaçant la France.

    Parmi les 3000 à 5000 combattants de l’EI en Libye, le nombre des Français ne représenterait qu’ «une poignée», certains faisant partie des quelques dizaines de cadres envoyés d’Irak par Abou Bakr Al-Baghdadi, le chef de l’EI, pour structurer ses forces en Libye. Mais l’on compterait aussi un nombre indéterminé de binationaux parmi les Tunisiens déjà enrôlés en Libye.

    Publié par Alencontre le 24 - février - 2016

    (Article publié dans Le Monde en date du 24 février 2016)

    [1] Voir, entre autres, l’entretien avec Valérie Collombier reproduit sur ce site en date du 22 février 2016. Et l’article de Patrick Haimzadeh en date du 8 février 2016.

    [2] Voir à ce sujet BBC World. «Islamic State camp in Libya attacked by US planes», 19 février 2016.

    http://alencontre.org/libye-la-preparation-dune-guerre-ouverte-avec-ses-repercussions-regionales

  • «Dans l’euphorie de la révolution, les blessures libyennes ont été sous-estimées» (A l'Encontre.ch)

    Des rebelles libyens dans le district de Swabi de Misrata,  avril 2011

    Des rebelles libyens dans le district de Swabi de Misrata,
    avril 2011

    Entretien avec Valérie Collombier
    conduit par Cécile Hennion

    Chercheuse à l’Institut universitaire européen de Florence depuis septembre 2013, Virginie Collombier étudie les changements sociaux et politiques de l’après-Kadhafi en Libye, en partenariat avec le Centre de ressources norvégien pour la consolidation de la paix (Noref; Norsk Ressurssenter for Fredsbygging). Elle effectue régulièrement des enquêtes de terrain dans l’Ouest libyen.

    Le système tribal, souvent évoqué quand il est question de la Libye, est-il une grille d’analyse pertinente pour comprendre les dissensions politiques actuelles?

    La tribu comme mode d’organisation sociale a en grande partie structuré la société libyenne. Si la confrérie Senoussi a pu prendre racine dans l’Est libyen à l’époque de l’Empire ottoman par exemple, puis jouer un rôle majeur dans la résistance à la colonisation italienne, c’est parce qu’elle a été capable de se greffer sur le réseau tribal existant.

    En Occident, quand on parle du caractère «traditionnel» de la tribu, on imagine une structure archaïque, voire rétrograde. Et aussi une structure immuable où la hiérarchie serait fixée une fois pour toutes. La tribu est certes un groupe de familles et d’individus unis par l’appartenance à un ancêtre commun. Mais la répartition des pouvoirs en son sein change au gré de compétitions internes, en fonction du contexte politique et des manipulations exercées par des éléments extérieurs. Les tribus ont ainsi été un vecteur essentiel du pouvoir de Kadhafi, qui a joué des divisions internes pour promouvoir certains clans ou personnalités, parfois inférieurs en termes de rang, mais qui, alors, ont pris de l’ascendant.

    La tribu Warfallah, l’une des plus nombreuses (on évoque jusqu’à un million de membres, sur une population totale estimée à six millions), a pour berceau la ville de Beni Oualid, l’un des fiefs de Kadhafi. Mais elle essaime aussi dans l’Est et dans le Sud. Or, en 2011, elle n’a pas agi comme un acteur unifié. Tandis que Beni Oualid a résisté jusqu’à la fin de la révolution, les Warfallah de l’Est ont, en majorité, soutenu la révolution dès le début. La situation actuelle est comparable, sur la question de l’accord politique chapeauté par les Nations unies, avec des divisions profondes au sein de la tribu Awagir, dont est issu Aguila Salah Issa, le président du Parlement de Tobrouk [reconnu par la communauté internationale]. La tribu ne doit donc pas être vue comme un acteur unifié, un système d’organisation figé.

    Ce système d’organisation sociale a-t-il évolué après la «révolution du 17 février»?

    Depuis 2011, quand les Libyens parlent de tribalisme, ils évoquent certes la tribu comme forme d’organisation sociale, surtout forte dans l’Est, mais ils se réfèrent plus largement à la façon dont les gens conçoivent leur appartenance identitaire. Dans le contexte politique post-2011, on a ainsi entendu parler de «la tribu de Misrata». C’est intéressant, car il n’y a pas, en soi, de «tribu de Misrata». Misrata est avant tout une ville commerçante, avec des élites largement héritées de l’Empire ottoman. Les tribus y jouent un rôle marginal. Se référer à la «tribu de Misrata» n’a ainsi pas de sens, sauf en termes d’appartenance à une communauté particulière.

    Plus généralement, quand les Libyens parlent de l‘importance de la qabaliya («tribalisme») dans la société et les luttes politiques, ils parlent d’une communauté première qui fonde l’appartenance et l’identité. C’est parfois une tribu au sens strict (Warfallah), parfois une ville (Misrata), parfois une région (l’Est). Dans la situation de blocage actuelle, c’est souvent négatif, pour dire que les politiciens pensent avant tout aux intérêts de leur communauté.

    Ce réseau tribal peut-il servir de vecteur de paix dans les négociations actuelles?

    La tribu a joué un rôle positif en 2011 et après. Elle a servi de base de repli, organisant les réseaux de solidarité et assurant la protection des gens quand les structures de gouvernance de l’ancien régime se sont effondrées.

    Plus récemment, quand le pays s’est retrouvé divisé en deux, les dialogues menés sous l’égide des Nations unies ont été limités aux principaux acteurs politiques ou militaires, à ceux qui avaient une capacité de nuisance sur le terrain, pour éviter que la situation dégénère. Pendant ce temps, les Libyens ont dû faire face à des situations conflictuelles, parfois à des violences. Là, on a vu des tribus et d’autres types de structures sociales prendre le relais et jouer un rôle important dans la résolution des conflits locaux.

    Début 2015, et pendant huit mois, le djebel Nefoussa (massif montagneux de l’Ouest, dominé par les Berbères) a ainsi été le théâtre d’affrontements entre groupes armés de Zinten, alliés au général Haftar, et milices de plusieurs villes voisines, alliées à Fajr Libya et au gouvernement de Tripoli. Les routes ont été coupées, l’approvisionnement en carburant et médicaments interrompu. Les structures sociales locales – en particulier les conseils d’anciens, qui n’ont pas forcément de fondement tribal – ont alors joué un important rôle de médiation entre les belligérants et ont permis l’ouverture des routes, des échanges de prisonniers et la conclusion de cessez-le-feu.

    Ces structures locales peuvent-elles interagir et venir compléter les processus politiques au niveau national?

    Dans le djebel Nefoussa, les conseils d’anciens ont pu jouer un rôle parce que les dynamiques nationales ont évolué. Misrata, isolée, a retiré ses forces de la région. Zinten, en situation d’infériorité militaire, a dû négocier avec ses voisins. Quand le cadre général est propice, les structures locales peuvent œuvrer à la stabilité. Mais il faut considérer un autre aspect. Du fait des divisions et des compétitions inhérentes aux tribus, leur participation peut être facteur de tensions. C’est le cas à Benghazi, et dans l’Est en général, où les divisions croissantes au sein des Awagir pourraient dégénérer en affrontements armés. Attention donc à ne pas voir la tribu comme un instrument idéal qui permettrait de réguler la société et le jeu politique de manière naturelle, quasi parfaite.

    Une partie des tribus pro-Kadhafi constitue aujourd’hui un élément de déstabilisation. Dans certains cas, elles ont rallié l’organisation Etat islamique…

    A Beni Oualid, cœur du kadhafisme, le leadership tribal avait pourtant accepté le processus électoral en 2012. Les candidats soutenus par le conseil tribal des Warfallah ont gagné, avant d’être écartés au prétexte qu’ils ne correspondaient pas aux critères de la commission d’intégrité. L’impact a été majeur: le processus politique a été décrédibilisé, ainsi que les institutions centrales et nationales. Les gens de Beni Oualid ont ensuite tenté de faire émerger une alternative politique: ni Karama ni Fajr Libya. Ils ont échoué et sont d’autant plus marginalisés qu’ils n’ont aucune puissance militaire. Or, depuis 2013-1014, sur la scène politique libyenne, quand on n’a pas d’armes, on n’est pas grand-chose!

    Ces mises à l’écart font courir le risque de voir les plus jeunes et les plus marginalisés rejoindre l’[organisation] Etat islamique [EI]. La situation à Syrte l’illustre bien. Si des combattants étrangers ont pu s’imposer, c’est notamment parce que la sécurité dans la ville, après 2011, a été confiée à des groupes armés qui incarnaient aux yeux des habitants la destruction de leur ville. C’était inacceptable. Ils ont considéré que l’EI pouvait être l’instrument de la reconquête d’un statut social, un mode d’entrée dans le champ politique et militaire. C’est malheureusement le même processus qu’on a vu à l’œuvre en Irak.

    Un autre risque vient des acteurs extérieurs, comme l’Egypte qui cherche à instrumentaliser les membres des tribus pro-Kadhafi présents sur son territoire.

    Faut-il inviter ces tribus parias à la table des négociations?

    Un des échecs majeurs de la transition libyenne est d’avoir fondé le processus de transition sur l’organisation d’élections rapides, privilégiant ainsi la légitimité électorale à la réconciliation. Cette dynamique a occulté l’importance du clivage entre vainqueurs et vaincus de la guerre civile. Mais aussi des divisions héritées de l’ancien régime, où Kadhafi a divisé pour mieux régner, montant les tribus les unes contre les autres.

    Dans l’euphorie de la révolution, ces blessures ont été sous-estimées. Des forces politiques immatures ont été lancées sans qu’il y ait d’institutions solides ni de cadre légal pour les canaliser. Le résultat a été une militarisation de la compétition politique et l’effondrement de la transition. Il n’y a pas eu de réel effort pour rétablir un dialogue entre les différentes communautés et favoriser des formes de consensus.

    Plus le temps passe, plus le processus de réconciliation nationale sera difficile. Ce travail est pourtant nécessaire, et il a besoin d’un pendant «justice», pour prendre en compte les crimes commis avant et pendant la révolution. Il ne s’agit pas de tout régler, personne n’est naïf à ce point-là, mais de rétablir un lien.

    Les communautés exclues l’ont été en particulier dans la Libye centrale, sur l’axe Syrte-Beni Oualid-Sebha. Beaucoup ont dû quitter le pays en 2011. Certains parce qu’ils avaient participé à la répression. Les figures incarnant l’ancien régime et qui ont du sang sur les mains sont inacceptables dans la Libye actuelle, mais on ne peut exclure les communautés qui leur sont rattachées et qui vivent en Egypte, en Tunisie, en Jordanie ou ailleurs. Il y a un besoin de réintégrer cette partie de la communauté nationale, en restaurant la confiance entre « vainqueurs » et « vaincus » de la révolution. Sans cela, il sera impossible de créer des institutions légitimes. L’exemple irakien montre que les conséquences d’une telle exclusion peut avoir des résultats dramatiques. Publié par Alencontre le 22 - février - 2016

    (Publié dans Le Monde des 21-22 février 2016, p. 13)

    http://alencontre.org/libye/dans-leuphorie-de-la-revolution-les-blessures-libyennes-ont-ete-sous-estimees

     
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