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Berbères, Kurdes...(minorités nationales) - Page 7

  • Hocine Aït Ahmed, le militant infatigable de la démocratie (Algeria Watch)

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    Hocine Aït Ahmed, l’un des neuf chefs historiques du FLN, est décédé mercredi 23 décembre dernier en Suisse à l’âge de 89 ans.

    Impliqué dès son jeune âge dans la lutte nationaliste, il adhère au Parti du Peuple Algérie (PPA) à 17 ans alors qu’il était lycéen. A 20 ans, il rédige pour la direction du parti le texte connu sous le nom « rapport Zeddine » qui esquisse la stratégie de la lutte armée.

    A la suite de ce rapport, le parti crée l’Organisation Secrète (OS) qu’il dirigera après la mort de Mohamed Belouizdad. Suite à la crise qui secoue le parti au début des années 1950, il appartiendra au courant populiste révolutionnaire qui créera le FLN et qui lancera l’insurrection le 1er Novembre 1954. En 1956, il est arrêté avec Ben Bella, Boudiaf, Khider et Lacheraf dans l’avion qui avait été mis à leur disposition par le roi Mohammed V et qui avait été détourné par l’armée de l’air française au-dessus de la méditerranée.

    Libéré lors du cessez-le-feu en mars 1962, il s’opposera en vain au renversement du Gouvernement Provisoire de la République Algérienne (GPRA) par l’Etat-Major dirigé par le colonel Houari Boumédiène. Il sera élu député dans la nouvelle Assemblée Nationale, se faisant remarquer par ses prises de position en faveur d’un Etat de droit et d’élections pluralistes. Lorsque le tandem Boumédiène-Ben Bella imposera le système du pari unique, il organise en 1963 une dissidence armée qui se limitera à la Kabylie. Arrêté en 1964, il sera jugé et condamné à mort par le régime de Ben Bella. Il s’évadera de prison en 1966 et s’installera à l’étranger où il continue à diriger son parti, le FFS, dans la clandestinité.

    A la suite des émeutes d’octobre 1988 qui mettront fin au système du parti unique, il rentre à Alger pour réorganiser son parti et le faire participer aux différentes élections. Face à la déferlante islamiste, il incarne l’espoir d’une démocratie ancrée dans les idéaux du mouvement national dont il est une des figures emblématiques.

    Il accepte le résultat des urnes même lorsque les élections sont remportées par les islamistes. C’est ainsi qu’il s’oppose à l’annulation du scrutin remporté par le FIS fin décembre 1991, et appelle à une marche historique le 2 janvier 1992 qui rassemble plus d’un million de personnes à Alger sous le slogan « ni Etat policier, ni Etat intégriste ». Cela n’empêche pas le coup d’Etat de janvier 1992 qui fera plonger le pays dans une violence meurtrière.

    En janvier 1995, il prendra part à la réunion de Rome à laquelle participent les partis qui ont eu des députés en décembre 1991 (FIS, FFS et FLN). Il apportera sa vision et son expérience dans la rédaction de la « Plate-Forme de sortie de crise », appelée « le contrat de Rome », rejeté par les chefs militaires opposés à l’idée de laisser la politique à des civils qu’ils ne choisissent pas. Malgré les pressions sur les militants de son parti, dont certains ont été assassinés dans des conditions non élucidées à ce jour, et malgré les campagnes de dénigrement dont il était quotidiennement l’objet, celui que le DRS appelait « le marabout de Lausanne » s’accroche à l’espoir d’un Etat civil dirigé par des élites représentatives élues par la population. Son parti présentera sa candidature au scrutin présidentiel d’avril 1999. Ayant été informé la veille que les chefs militaires avaient donné des instructions à l’administration pour truquer les élections en faveur de leur candidat, Abdelaziz Bouteflika, il se retire en refusant de légitimer par sa participation une élection dont le résultat avait été décidé à l’avance.

    Profitant de sa maladie apparue en 2012, la police politique infiltre le FFS et suscite une crise au sein de la direction, ce qui affaiblit le parti qui perdra des cadres de grande valeur. Soumis à des pressions de la part du régime, celui-ci arrive à infléchir sa ligne politique en lui faisant accepter les élections truquées et la gestion policière du champ politique.

    Après avoir détourné le FFS de sa vocation de vrai parti d’opposition, le régime opère un hold-up sur la mémoire de Aït Ahmed en suscitant des articles de presse dithyrambiques sur lui, occultant son combat pour la démocratie. Dans son message de condoléances à la famille du défunt, le président Bouteflika ira jusqu’à écrire que Aït Ahmed s’était évadé de la prison française alors qu’il s’était évadé en 1966 de la prison à l’époque du colonel Boumédiène.

    Après l’avoir pourchassé de son vivant, le régime récupère sa mémoire en décrétant un deuil national de 8 jours pour mieux cacher ce pourquoi Aït Ahmed a combattu. Avec lui, l’Algérie a raté l’occasion de se donner comme Chef d’Etat un homme qui incarnait à la fois le nationalisme et l’idéal démocratique universel.

    Lahouari Addi
    Professeur à l’Institut d’Etudes Politiques de Lyon  6 janvier 2016

    http://www.algeria-watch.org/fr/article/tribune/addi_hommage_ait_ahmed.htm

    Lire aussi:

    http://elwatan.com/contributions/l-ideal-democratique-constante-chez-ferhat-abbas-et-hocine-ait-ahmed

  • Nouveautés sur "Lutte Ouvrière"

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  • Le 12 janvier, on fête Yennayer ! (Le Peuple breton)

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    Il est de tradition, en occident, de fêter le nouvel an le 1er janvier.

    Ce nʼest pas le cas de tous les peuples. En Bretagne et dans lʼancien monde celte, la « Samain » était fêtée le 1er novembre, correspondant au premier jour dʼun nouveau cycle des saisons (comme la Toussaint). Pour les Imazighen, le nouvel an est le 12 janvier et sʼappelle « Yennayer » (janvier).

    Yennayer est fêté pour deux raisons. La première est culturelle : le 12 janvier est le premier jour du calendrier julien, calendrier agraire, et signifie, après lʼhiver, le renouveau, et donc la reprise de lʼactivité dans la société rurale traditionnelle. Lʼautre raison est plus politique : dans les années 1970, le mouvement berbère de Paris a choisi, pour se démarquer de lʼère chrétienne et de lʼère musulmane, un fait historique pour faire débuter le calendrier berbère. En 950 avant J.-C., le roi berbère Chacnaq (Scheshong 1er) aurait renversé le pharaon, créant ainsi « lʼère Scheshong ». Ainsi, le 12 janvier, les Iamzighen célébreront le nouvel an 2966 !

    Contrairement à ce quʼaffirmait Nicolas Sarkozy à Dakar, lʼhomme africain du nord (berbère donc) est entré « depuis longtemps dans lʼhistoire » : 950 ans dʼavance, cʼest beaucoup ! Cʼest pourquoi le caricaturiste Dilem remarquait avec humour le 12 janvier 1995 que la « grève du cartable » (boycott de lʼécole algérienne arabisante par le MCB, mouvement culturel berbère, en Kabylie pendant 7 mois) nʼétait pas pénalisante car les élèves avaient 650 ans dʼavance…

    Yennayer est célébré dans les familles là-bas et ici et donne lieu à des événements festifs. En Kabylie, de fait, cʼest un jour férié. LʼAssociation culturelle des Berbères de Bretagne (ACBB) le célèbre à Rennes chaque année autour dʼun couscous festif. Lʼan dernier, le thème était lʼamitié berbero-bretonne (événement que nous relations dans Le Peuple breton de février 2015). Cette année (le 16 janvier), le thème sera « hommage à Matoub Lounès ». Lʼassociation, qui fête ses 20 ans, a en effet eu comme parrain Matoub Lounès lors de la venue du chanteur kabyle à Rennes le 31 mai 1995. LʼACBB a demandé à la mairie de Rennes de baptiser une rue en hommage à ce chanteur dont lʼassassinat avait tant ému.

    Les valeurs défendues par Matoub Lounès dans ses poèmes et chansons (tolérance, laïcité, fraternité, culture, liberté, résistance) sont, ô combien dʼactualité. Yennayer est ouvert à tous, vous pouvez vous y inscrire sur le site acbbretagne.org

    Assegwas amegas 2966 !

  • Hocine Aït Ahmed sur Algeria Watch

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  • «Le meilleur hommage à Si L’Hocine, c’est l’instauration de la démocratie» (Algeria Watch)

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    Proche collaborateur durant la période difficile des années 1990, Mustapha Bouhadef apporte son témoignage sur le leader Aït Ahmed, le politique et l’homme qui se confondent. «On ne peut distinguer, chez Hocine Aït Ahmed, l’être humain de l’homme politique. Sa lutte pour les droits de la personne humaine et la démocratie est indissociable du vécu quotidien des Algériens.»

    Vous étiez l’un des collaborateurs directs de Hocine Aït Ahmed au sein du FFS pendant de longues années. A quand remonte votre premier contact et dans quel contexte ?

    Mon premier contact avec Hocine Aït Ahmed date de 1990, au moment de l’ouverture politique ayant suivi les événements d’Octobre 1988, qui laissait espérer enfin une voie démocratique. C’est dans ce contexte que j’ai rencontré Si L’Hocine, qui recevait beaucoup de monde à l’époque et qui m’a convaincu, par son charisme et le programme politique, de rejoindre le FFS.

    Dans le cadre de la préparation des textes du premier congrès, j’ai eu le privilège de diriger une commission sur l’éducation et la culture, qui a élaboré le projet du «système éducatif» du parti, avec le concours de beaucoup de compétences avérées dans ce domaine particulier. La période de la préparation de ce congrès était particulièrement féconde et constructive, période où j’ai commencé à mieux connaître Si L’Hocine.

    La période la plus difficile était la décennie rouge, notamment les années 1994 à 1996. Comment l’avez-vous vécue au FFS ? Avez-vous subi des pressions ?

    En effet, c’était une période très difficile. Hocine Aït Ahmed a été obligé de reprendre le chemin de l’exil pour différentes raisons, dont la «liquidation» en direct à la télévision de Mohamed Boudiaf pendant une conférence à Annaba, qui signifiait à la population jusqu’où les assassins pouvaient aller ; la fermeture de plus en plus dure des champs politique et médiatique ; la gestion, par un pouvoir autoritaire, de la société, avec une restriction drastique des libertés individuelles et collectives, faisant fi des droits de la personne humaine, droits qui furent le combat permanent d’Aït Ahmed.

    C’était une période où, pour le FFS, il s’agissait de résister, pacifiquement bien sûr, et de préserver ses militants, au moment où les enlèvements et les assassinats étaient le quotidien de la population algérienne. N’oublions pas le lourd tribut payé par le FFS avec les assassinats de militants, membres du conseil national, de M’barek Mahiou, secrétaire national, tant regrettés par tous. C’était aussi la période du contrat national qui aurait pu constituer une sortie de crise pacifique et qui aurait pu éviter la tragique effusion de sang. C’est dans cette conjoncture que, fin décembre 2001, des individus armés se sont présentés à mon domicile, alors que je n’y étais pas…

    Quels étaient vos rapports avec Aït Ahmed à ce moment-là ? Comment réagissait-il aux événements ?

    Nous nous rencontrions régulièrement à l’étranger, le secrétariat national et lui-même, pour faire des analyses de la situation du parti et du pays ; pendant ces séances il écoutait tout le monde et des décisions étaient prises concernant la marche du parti. De plus, son contact avec le FFS était pratiquement quotidien et on réalisait qu’il suivait attentivement l’évolution politique dans le pays.

    Qu’est-ce qui vous a le plus marqué chez l’homme ? Au-delà de l’homme politique, Aït Ahmed, l’humain, comment le décrivez-vous ?

    On ne peut distinguer chez Hocine Aït Ahmed, l’être humain de l’homme politique. Sa lutte pour les droits de la personne humaine et la démocratie est indissociable du «vécu quotidien» des Algériens. Doué d’une intelligence politique aiguë, il ajoute constance, persévérance, pugnacité dans les idées et les actions. J’ai pu apprécier sa capacité d’écoute, la pertinence de ses remarques, son esprit de synthèse, ses connaissances dans pratiquement tous les domaines, sa grande culture et surtout sa propension à proposer d’innovantes initiatives de dépassement aux événements conjoncturels.

    Mais ce qui m’a le plus marqué chez Hocine Aït Ahmed, c’est son humanisme, sa simplicité, sa défense permanente des droits de l’homme et son abhorration de la police politique dont il ne cessait de réclamer la dissolution. Toutes les précautions prises lui ont, peut-être, permis de finir son cycle de vie militante par une mort naturelle parmi ses proches. Cette hauteur de vue fait, peut-être, qu’il n’a pas su éviter parfois de sacrifier ses proches collaborateurs, dans certaines circonstances.

    Ceux qui l’ont combattu violemment hier le célèbrent aujourd’hui. Qu’est-ce que cela vous inspire ?

    Cette question me rappelle ce qu’il m’avait dit lors de la disparition d’un opposant, ancien responsable de la Révolution, que le pouvoir s’est soudainement mis à glorifier : «Ils nous préfèrent morts plutôt que vivants.» Il n’a pas échappé à cette règle. D’aucuns veulent déjà s’ériger en héritiers de son combat qu’ils ne partageaient pas de son vivant. Cela prouve, s’il en était besoin, la valeur universelle et la justesse de sa lutte pour la liberté et la démocratie.

    Comment avez-vous vécu la disparition de Si L’Hocine ?

    J’ai été frappé par le large mouvement de sympathie de la part de la population algérienne. Quant à moi, j’ai perdu quelqu’un qui m’a beaucoup appris. J’ai ressenti, au moment de l’annonce de son décès, que l’Algérie perdait un grand dirigeant politique et surtout un repère. C’est le seul qui a continué le combat pour la démocratie après l’indépendance du pays : le pays s’est libéré du colonialisme certes, mais sans liberté des personnes hélas ! Faire aboutir l’instauration de la démocratie et le respect des droits de la personne humaine, y compris dans les institutions, la société civile, la société politique, c’est le meilleur hommage que nous pouvons rendre à Hocine Aït Ahmed. 

    Hacen Ouali El Watan, 29 décembre 2015

    Mustapha Bouhadef. Ancien premier secrétaire national du FFS

    http://www.algeria-watch.org/fr/article/tribune/bouhadef_haa.htm

    Lire aussi:

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Front_des_forces_socialistes

  • Non, Aït Ahmed n’est pas récupérable par les clans (Anti-k)

    HOCINE AÏT AHMED N’EST PAS RÉCUPÉRABLE. IRRÉMÉDIABLEMENT, IL A PRIS LE CAMP DE LA SOCIÉTÉ CONTRE LE RÉGIME. NON, AÏT AHMED N’EST PAS RECUPERABLE PAR LES CLANS, IL EST L’HOMME DE LA NATION

    Saïd Djaafer, directeur éditorial du Huffington Post Algérie
    Huffpostmaghreb le 25 décembre 2015

    La mort de Hocine Aït Ahmed donne lieu à des expressions de reconnaissance venant même de ceux qui l’ont constamment insulté, dénigré et qui ont menti sur lui avec un aplomb extraordinaire. C’est inévitable et ses proches, sa famille, qui ont l’élégance du défunt sont obligés de faire avec et de laisser passer, d’attendre que la poussière retombe…

    Pourtant, avouons-le, il nous est insupportable d’entendre Ammar Saadani dire, avec une absence de pudeur qui nous hérisse, que Hocine Aït Ahmed, « comme Boudiaf et même Bouteflika… ont fait l’objet d’injustice de la part de petits ».

    Il nous est insupportable de l’entendre dire que lui et son clan veulent la démocratie que voulait Hocine Aït Ahmed. C’est faux. Hocine Aït Ahmed a combattu un régime autoritaire avec tous ses clans, par conviction et sans aucune compromission.

    Il nous est insupportable d’entendre de la part d’un représentant d’un clan du régime suggérer que Hocine Aït Ahmed ait besoin d’une quelconque « réhabilitation ». Cela est indécent de la part d’un représentant qualifié d’un régime qui a dilapidé le capital historique et humain d’une des plus grandes révolutions du 20ème siècle.

    Que ses proches nous pardonnent d’exprimer notre colère en ces temps de recueillement, Ammar Saadani, ne s’étant pas contenté de faire le minimum protocolaire mais a rompu la trêve de la pudeur.

    Il faut donc lui rappeler que Hocine Aït Ahmed a combattu l’ensemble du régime avec sa police politique et ses meutes d’aboyeurs politiques et médiatiques qu’il lâchait contre les militants de la démocratie et de la liberté.

    Il faut donc lui rappeler que Hocine Aït Ahmed n’a jamais, au grand jamais, joué un clan contre un autre et qu’il les considérait, tous, comme faisant partie d’un même régime, d’une même entreprise de saccage systématique de l’énorme potentiel de notre nation.

    Hocine Aït Ahmed était bien dans l’opposition au régime mis en place à l’orée de l’indépendance, il n’était pas seulement opposé « à certains responsables dont il contestait le mode de gouvernance et la méthode de gestion. », selon la formule de Bouteflika.

    Non, Hocine Aït Ahmed n’est pas récupérable. Irrémédiablement, il a pris le camp de la société contre le régime. Et ce n’est pas une déclaration scandaleusement opportuniste de M.Saadani qui changera les choses.

    Hors de question d’apporter une quelconque légitimité à certaines parties du régime contre d’autres. Ils font partie, pour lui, du même désastre.

    Il était ce que vous nous avez empêché d’être

    Hocine Aït Ahmed, contrairement aux éléments de langage que le régime a fourni à ses fonctionnaires politiques et à ses médias, n’a jamais été un homme qui ne dit « que non ». C’était un grand homme politique, un dirigeant responsable, soucieux d’éviter que le pays n’éclate en morceaux en raison de l’impéritie de ceux qui le gouvernent.

    Et même s’il ne tenait pas en grande estime ceux qui détenaient le pouvoir, il a toujours affiché sa disponibilité à discuter la recherche d’un compromis vertueux pour faire sortir le pays et la société de la régression, pour aller vers le rétablissement de la souveraineté de peuple et sortir d’une confiscation aux conséquences désastreuses.

    Disponibilité au compromis mais intransigeance absolue sur sa finalité qui ne peut être qu’un sortie ordonnée et pacifique vers l’Etat de droit et la démocratie. Hors de question de participer à la guerre des clans ou de l’alimenter.

    C’est ce qui rendait absolument pitoyables ces journaux qui ont « vu » Hocine Aït Ahmed avec le général Toufik à l’aéroport de Boufarik ou ceux qui n’en finissaient pas de trouver les preuves du « deal ».

    Ce n’est pas aujourd’hui qu’on instrumentalisera SI L’Hocine. Aucun clan ne peut l’utiliser car il était contre le système des clans. Il n’était pas contre Toufik pour être avec Bouteflika ou Saadani.
    Trop grand pour ces mesquineries. Il avait une autre idée de la politique et de l’Algérie.

    Il était jusqu’au bout ce rêve d’une Algérie humaine, plurielle, moderne et citoyenne que les clans nous ont empêché d’avoir. Et de voir. Et que nous voulons toujours.

    Laissez-nous donc enterrer Hocine Aït Ahmed, sans vos pitreries, sans vos opportunismes. Laissez les Algériens saluer le départ d’un grand sans vos parasitages. Que l’on ne nous force pas à aller plus loin. Ne nous forcez pas à rompre la trêve de la pudeur.

    Qu’on se le dise : Hocine Aït Ahmed n’a pas besoin d’une « réhabilitation » de la part du régime, de ses hommes, de ses clans. Il est au paradis des révolutionnaires, dans le cœur des femmes et des hommes. Dans nos cœurs.

    Sources : Huffpostmaghreb.com


    HOCINE AIT AHMED

    L’HOMME QUI AIMAIT LES MILITANTS ET LES ALGÉRIENS

    HuffPost Algérie
    Par Saïd Djaafer
    le 24 décembre 2015

     

    Ceux qui lisent ou relisent, les « Mémoires d’un combattant, l’esprit d’indépendance » de Hocine Aït Ahmed (republié et traduit en arabe aux éditions Barzakh) découvrent une chose assez rare : les notes de renvoi en bas de page sont aussi importantes que le récit.

    On ne les lit pas en « passant », on s’y informe. On y découvre des noms d’une multitude de militants que le jeune Hocine Aït Ahmed a côtoyés durant la période couverte par le livre, 1942-1952. C’était un témoignage respectueux pour ces faiseurs, peu connus en général, de l’histoire que les règles du récit obligeaient de les présenter de manière succincte.

     

    On lit le livre avec ses notes de bas de page en découvrant ce grand réservoir de militants sur lesquels on ne connait pas grand-chose. Quand on rencontre Hocine Aït Ahmed, il pouvait s’étaler longuement sur ces noms – et d’autres qui jalonneront son parcours – pour en parler avec respect, affection et aussi avec humour.

    Hocine Aït Ahmed était un militant. Il aimait les militants. Il aimait leur parler, les toucher, leur donner des tapes sur le dos, les plaisanter, les chambrer. Il aimait en parler. Pour lui, c’est cette multitude de militants qui a fait le mouvement national et la révolution.

    Les dirigeants « historiques » – il n’aimait pas particulièrement ce terme – sans en amoindrir leur rôle étaient portés par l’abnégation de ces militants qui n’auront pas les honneurs des journaux ou des manuels d’histoire.

    Et ces notes de bas de page succinctes devenaient dans sa bouche des récits extraordinaires sur les femmes et les hommes du mouvement national dont le carburant essentiel a été – et il le demeurera pour lui-même après l’indépendance et ses nouveaux combats – une quête de dignité, une affirmation d’humanité.

    Parfois, le nom ne revenait pas – et il s’en excusait avec humour, « mon cerveau est un disque dur qui est plein, on ne peut pas le formater me disent les médecins, il faut juste rebooter » – mais il persistait. Il avait trouvé la technique : il racontait la situation toujours avec humour, le décor, le nom du lieu… et par magie, le nom du militant revenait. Son visage s’illuminait alors d’une vraie joie d’enfant. Et ce nom, il le répétait plusieurs fois, comme pour s’excuser de l’avoir oublié…

    Une lutte permanente pour la dignité

    Ce combattant au long cours connaissait les servitudes du militantisme dans une adversité absolue, cet arrachement permanent au confort de l’abandon et du renoncement, du refus de la réflexion et de l’engagement. Il connaissait l’énorme effort sur soi que le militant, sous le poids d’une menace existentielle permanente, devait faire constamment pour renouveler la flamme, pour se renouveler.

    Il avait un immense respect des militants, ces déblayeurs de terrain, ces fabricants de progrès et de perspectives. Il n’acceptera jamais le fait que le régime qui s’est mis en place à l’indépendance a décidé que l’indépendance pouvait se passer de la liberté et des libertés. Il a continué, lui, avec d’autres à militer contre cette régression, ce coup d’arrêt brutal au mouvement d’émancipation de la société algérienne.

     

    Une lutte sans concession. Cet homme « historique » restera fidèle au combat premier : la dignité pour lequel on s’est battu, pour laquelle on est mort, ne pouvait s’accommoder de la chape de plomb militaro-policière qui s’est mise en place à l’indépendance. Une confiscation à laquelle il ne s’est jamais résigné. La primauté du politique sur le militaire, c’était en définitive, la primauté du citoyen, l’affirmation de sa souveraineté. C’était la primauté du militant politique sur l’agent de la police politique.

    Hocine Aït Ahmed a dirigé l’OS (organisation spéciale) C’était en quelque sorte un militaire. Il n’avait pas la naïveté de croire que l’Algérie indépendante pouvait se passer d’une armée ou de services de renseignements. Mais il avait la conviction absolue, totale, que ces instruments ne devaient pas se substituer à la nation et ni exercer, au nom de la légitimité révolutionnaire, une tutelle sur la société.

    La police politique et les « dobermans »

    Il a toujours combattu l’existence d’une police politique et il savait qu’il lui devait la campagne de dénigrement systématique qui le présentait comme un séparatiste, un agent de l’impérialisme… Il rendait les coups parfois à ces « dobermans » qui, dans les médias, se piquaient de lui faire des leçons de patriotisme.

     

    Il a été écœuré par l’outrance de la campagne de haine et d’accusation de « traîtrise » qui l’a ciblée ainsi que Abdelhamid Mehri – avec qui il a retrouvé une vieille complicité de militant – après la signature de la plateforme de Rome.

    Ce rejet de la police politique relève de sa conviction démocratique. Mais il y avait aussi une position éthique : quand la police politique phagocyte le champ social, on tue le militant, on fabrique des indicateurs, on tue le politique, on fabrique des marionnettes.

     

    Et pour Hocine Aït Ahmed cette entreprise organisée d’élimination du militant et du militantisme était le plus grand tort fait à l’Algérie. Une régression, un appauvrissement qui peut mener à l’asservissement dans un monde dangereux où les puissants n’hésitent pas à fabriquer des guerres pour remodeler les pays.

    Cette vision globale d’une Algérie – et d’un Maghreb uni – qui doit se donner les moyens par l’adhésion de la population et l’action des militants de toutes les tendances de se défendre recouvre une vision très moderne de la sécurité nationale.

    | Hocine Aït Ahmed avait en effet une vision très réaliste de ce que veut le « centre » : « l’ordre brutal du monde, du capitalisme colonial hier et de la globalisation néolibérale aujourd’hui, nous dit une seule et même chose : vous avez le droit d’être des peuples unis dans la soumission au colonialisme ou la dictature mais la démocratie et la liberté vous ne pouvez les vivre que comme des petites coteries, des clans, des ethnies, des sectes et que sais-je encore ! ». –

    Seules les libertés, celles-là qui permettent aux militants des différents courants de se concurrencer politiquement mais également de fabriquer en permanence un consensus national sont à même de nous prémunir d’une « fumisterie néocoloniale qui convient parfaitement à certains, qu’ils l’habillent d’extrémistes religieux, du despotisme des castes mercantilistes appuyées sur des dictatures militaires ou qu’il s’agisse des régionalismes racistes et belliqueux incapables de construire une route ou des tracés de pâturage entre deux communes sans provoquer une guerre ! »

    Un dessein

    Le chef politique et le chef militaire de l’OS en a tiré de manière définitive la conclusion de la supériorité morale, politique et même sécuritaire du militant sur l’agent et de la dangerosité absolue pour la nation du rôle assumé par la police politique.

    Les dégâts de cette mise au pas, de cette entreprise systématique du discrédit du politique, de la manipulation des partis et des médias et de la dissuasion à l’action militante écœuraient Hocine Aït Ahmed. Pour lui, c’était une entreprise d’affaiblissement du pays, une dilapidation d’un capital humain inestimable, celui-là même dont on a besoin dans les moments difficiles.

    Les militants pour Hocine Aït Ahmed n’étaient pas et ne sont pas des notes de bas de page. Ils sont beaucoup plus. Infiniment plus. Ils sont la nation qui se renouvelle sans cesse et qui accumule dans la liberté et la fidélité aux idéaux.

    Un jour, au détour d’une longue discussion en privée à Alger, il nous disait son espoir de voir les jeunes Algériens, malgré les difficultés et malgré un environnement dissuasif, renouer avec le militantisme politique.

    « Les militants politiques sont précieux, ils sont des citoyens en alerte, des vigilants. Ils sont engagés dans une action qui transcende leurs propres vies. Et dans notre cas, hier comme aujourd’hui, militer c’est être dans un dessein d’une société de progrès où les femmes et les hommes recouvrent leur dignité, leur humanité. Y a-t-il plus noble dessein que celui-là… ? » 28 décembre 2015

    Sources : Huffpostmaghreb

    LIRE AUSSI :

    Mécili : « Comprendre, se souvenir, pas pour se venger mais pour sortir du cauchemar… » (Hocine Aït Ahmed)

    Hocine Aït Ahmed, combattant de l’indépendance et infatigable militant de la démocratie en Algérie est mort

    http://www.anti-k.org/2015/12/28/non-ait-ahmed-nest-pas-recuperable-par-les-clans/

  • Décès de Hocine Ait-Ahmed (Siwel)

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    Hocine Ait-Ahmed lors d'un meeting du FFS (PH/DR)

    GENEVE, SUISSE (SIWEL) — Le plus vieil opposant kabyle au régime algérien, Hocine Ait-Ahmed, l'un des dirigeants historiques de la guerre d'Algérie est décédé ce mercredi matin à Lausanne (Suisse), à l'âge de 89 ans.

    Hocine Ait-Ahmed, figure de l'indépendance algérienne, est né le 20 août 1926 à At Yahya (Michelet / Ain El Hammam, dans le département de Tizi-Ouzou), en Kabylie.

    Le dernier encore en vie des neuf "fils de la Toussaint", les chefs qui ont déclenché la guerre d'Algérie contre la puissance coloniale française le 1er novembre 1954, est décédé à l'hôpital "à la suite d'une longue maladie", a indiqué le FFS dans un communiqué sans mentionner de quoi il souffrait.

    Après avoir été entre 1945 et 1949 le chef de l'OS (Organisation Spéciale du PPA MTLD note du blog) et pendant la guerre d'Algérie l'un des principaux chefs du Front de libération nationale (FLN), Hocine Aït Ahmed démissionne du gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA) et de tous les organes du nouveau pouvoir algérien après le coup d'Etat militaire orchestré par le clan d'Oujda et l'armée des frontières.

    En septembre 1963, il fonde le Front des forces socialistes (FFS) et réclame la démocratie et le pluralisme politique. Avec les derniers maquisards de la wilaya III (Kabylie), il prend le maquis contre le nouveau gouvernement algérien pan-arabe et mènera une guerre contre lui pendant deux ans.

    La Kabylie, lessivée par sept années de guerre, perdra la nouvelle guerre contre la dictature arabo-islamiste du Gouvernement algérien. Près de 400 maquisards kabyles seront liquidés par la nouvelle armée algérienne, toute fraîche et formée à l'étranger pour liquider le peuple kabyle et dévoyer l'indépendance acquise de haute lutte.

    La Kabylie vient de perdre l'un de ses grands hommes

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    Suite au décès du dirigeant historique de la révolution algérienne et du FFS, le PST présente ses sincères condoléances a la famille Ait Ahmed , au peuple Algérien et aux camarades du FFS.

    Le PCF:

    http://www.humanite.fr/hocine-ait-ahmed-un-des-chefs-historiques-du-fln-est-decede-593950

    Wikipedia:

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Hocine_A%C3%AFt_Ahmed

  • Tamazight otage de l’inertie des directeurs de l’éducation (El Watan)

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	La langue amazighe peine à trouver son chemin au niveau des écoles d’Alger

    L’enseignement peine à redémarrer dans la capitale

    L’enseignement de tamazight a été élargi, en ce début d’année scolaire, à 22 wilayas. «La généralisation est en cours pour la 23e wilaya, Relizane, avec 8 divisions ouvertes», a annoncé M. Merad, directeur de l’enseignement moyen au ministère de l’Education nationale.

    Contrairement à ce qui a été promis par le ministère, concernant l’élargissement de tamazight à la wilaya d’Alger, aucune nouvelle classe ni recrutement n’ont été effectués. Les directions de l’éducation de la capitale n’ont pas mis en place la procédure nécessaire pour la création de sections d’apprentissage de cette langue, contrairement à ce qui s’est réalisé dans les wilayas concernées par l’enseignement.

    «Il n’y a pas de blocage», assure M. Merad. Il explique que pour l’ouverture d’une section, la direction de l’éducation fait, au préalable, un état des lieux et soumet clairement le choix aux parents d’élèves en procédant à la collecte des choix favorables exprimés avant d’engager les moyens humains nécessaires.

    Or, expliquent des représentants de parents d’élèves de la capitale, «cette procédure n’a jamais été faite au niveau des établissements de la wilaya d’Alger». Le ministère, à travers les directions de l’éducation, est chargé de mener les campagnes de sensibilisation pour l’enseignement de tamazight auprès des élèves.

    «Dans les wilayas concernées par l’ouverture des nouvelles classes de tamazight. C’est au mois de février que les démarches ont été entamées pour la création des sections à ouvrir en septembre», explique le directeur de l’enseignement moyen.

    Et d’ajouter que le rôle du ministère est «purement pédagogique», c’est-à-dire fournir les enseignants et le manuel scolaire et suivre la matière enseignée conformément à la réglementation. Pour ce responsable, l’enseignement de tamazight doit bénéficier de toute l’attention nécessaire, étant un facteur de cohésion «tout comme les autres constantes nationales».

    Dans les cycles primaire et moyen, le secteur compte 1700 enseignants de tamazight. L’enseignement a démarré en 1995 dans 16 wilayas. Le nombre d’élèves est passé de 37 690 en 1995 à 234 690 ces dernières années.


    Effraction

    Si la langue amazighe peine à trouver son chemin au niveau des écoles d’Alger, c’est à travers les cours d’alphabétisation que les Algérois peuvent enfin apprendre à lire et écrire la langue de Mouloud Mammeri. Les cours de tamazight débuteront, selon le secrétaire général du HCA, aujourd’hui. Trois sections seront mises en place, dont une au niveau du siège du HCA.

    Les personnes intéressées peuvent s’inscrire via internet. Une campagne d’affichage est menée par le HCA au niveau des stands du Salon international du livre et sur le site web de la structure. Les cours seront dispensés une fois par semaine, gratuitement. La tablette Azul dotée d’applications d’apprentissage de tamazight sera offerte ainsi que le manuel Aseghmigh pour consolider cet apprentissage.

    L’année de formation se déroule de novembre à juin et le cursus sera sanctionné par une attestation de niveau. C’est en partenariat avec l’association algérienne d’alphabétisation Iqraa que l’enseignement de tamazight pour adultes a été lancé, et ce, conformément à la convention-cadre paraphée le 20 avril 2015 à Alger.

    S’agissant des enseignants qui accompliront cette mission, le HCA a assuré que des sessions de formation de l’enseignement de cette langue concernera comme première étape, 9 wilayas, à savoir Alger, Oran, Ghardaïa, Boumerdès, Tizi Ouzou, Béjaïa, Bouira, Sétif et Batna. D’autres wilayas intégreront ce processus au fur et à mesure selon un plan de généralisation couvrant tout le territoire national, ajoute le HCA .

    Fatima Aït Khaldoun-Arab le 07.11.15 | 10h00

    http://elwatan.com/actualite/tamazight-otage-de-l-inertie-des-directeurs-de-l-education-07-11-2015-307042_109.php

  • Turquie/Irak: Massacre commis par l’armée turque au Sud-Kurdistan (Irak)

    Nouveau massacre commis par l’Etat turc

    Le gouvernement Turc commet ouvertement un crime contre l’humanité.

    Dans la nuit du 31 juillet au 1er août, des F 16 de l’armée turque ont bombardé Zergelê, un village kurde situé aux abords du Mont Qandil (Kurdistan Irakien). Dix (10) civils, dont une femme enceinte, ont perdu la vie. Des dizaines personnes sont grièvement blessées, dont 15 grièvement, tandis que plusieurs autres se trouvent encore prisonnières des décombres des habitations visées une par une par l’aviation turque durant plus d’une heure. Aprés le premier bombardement, les villageois accourus sur place pour secourir les blessés ont eux aussi été ciblés par les frappes aériennes Le nombre de morts et de blessés pourrait malheureusement s’accentuer.

    L’aviation turque poursuit ses opérations et survole continuellement les régions Kurdes de Gare, Zap, Xakurke, Metina et Haftanin. Sans faire de distinction entre résistants du PKK et civils, la Turquie s’obstine dans sa logique de guerre, avec un seul objectif, commettre d’autres massacres

    N’est-il pas temps de dire STOP à la coalition Daesh-Turquie ?

    Nous appelons l’opinion publique démocratique à protester contre l’Etat turc et son gouvernement qui bombardent depuis le 24 Juillet 2015 de façon systématique la guérilla ainsi que les civils kurdes.

    Combien de temps encore l’ONU, l’UE et les USA vont-ils garder le silence face à ces massacres de civils et à cette logique de guerre du Président turc Recep Tayyip Erdogan et de son premier ministre Ahmet Davutoglu ?

    Les Etats et les institutions internationales en coalition avec l’Etat turc ne voient-ils pas que celui-ci commet un crime contre l’humanité ?

    Quand vont-ils s’interroger réellement sur leurs relations avec l’Etat Turc qui massacre le peuple kurde et bombarde les bases du PKK, alors même que ce dernier est un rempart contre DAESH ?

    Nous appelons la communauté Internationale à dénoncer avec vigueur le massacre commis contre notre peuple et à être solidaire avec le peuple kurde dans sa lutte légitime contre la collaboration sanguinaire Daesh-Turquie.

    Congrès national du Kurdistan (KNK)
    1er août 2015

    KNK   1er août 2015
     
  • La guerre contre l’Etat islamique est un alibi pour combattre les Kurdes (ci)

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    Les attaques à l’encontre des militants kurdes, alliés de la coalition contre l’Etat islamique, accompagnent les raids turcs contre l’EI en Syrie.

    Ankara privilégie ainsi son propre agenda politique au risque d’exacerber les tensions à l’intérieur du pays. La Turquie, présentée comme le fer de lance de la lutte contre le régime syrien du fait de son soutien actif aux groupes armés de l’opposition, s’est vu reprocher par ses alliés occidentaux sa connivence avec le groupe Etat islamique (EI) dans son opposition aux forces kurdes.

    Ankara, qui partage une frontière de 900 kilomètres avec Damas, a en effet longtemps servi de base arrière pour les combattants [islamistes] de Nosra et de Ahrar El-Cham, et a été fustigée pour son attitude attentiste et troublante au moment où les Kurdes du Parti de l’union démocratique [PYD, parti kurde syrien proche du Parti des travailleurs du Kurdistan en Turquie, PKK, séparatiste] combattaient l’EI à Kobané. Si cette passivité a pu se justifier notamment par la volonté turque d’affaiblir le régime de Bachar El-Assad et de contenir les velléités autonomistes kurdes, elle n’en a pas moins irrité son allié américain, dont l’objectif déclaré est celui d’une guerre “totale” contre l’EI.

    Aussi Washington a-t-il apporté un soutien au Parti de l’union démocratique (PYD) qui administre le Kurdistan syrien depuis trois ans, en fournissant depuis décembre 2014 des armes au PYD sous la stricte condition qu’elles ne soient pas redistribuées au PKK turc, qui figure sur la liste terroriste des Etats-Unis. Le PYD et le PKK constituent cependant une seule et même organisation “terroriste” pour Ankara.
     
    Dans un contexte où le rêve d’unité des trois cantons kurdes en Syrie pourrait se concrétiser, et face au dérapage de la situation sécuritaire interne et à l’évolution du rapport de force global régional, il semble que les Turcs aient fait le choix de conclure un accord avec l’administration Obama. Un accord qui fait de la Turquie une pierre angulaire de la lutte contre l’EI en permettant aux avions de la coalition d’utiliser ses bases aériennes.
     
    Mais en contrepartie de quoi ? Du fait de la proximité des bases turques avec le territoire syrien, les membres de la coalition vont pouvoir effectuer des opérations moins coûteuses et plus opérationnelles. Mais qu’a obtenu M. Erdogan en contrepartie de cette faveur? Les Américains ont-ils accepté, comme les Turcs le laissent entendre, l’idée d’une zone d’exclu- sion aérienne au nord de la Syrie et la possibilité d’une intervention turque pour créer une zone tampon entre les cantons kurdes de Syrie ?

    Les officiels américains répondent par la négative, mais il semble que, du côté turc, l’appui concret à la coalition internationale en Syrie ne s’est traduit qu’après l’acceptation des garanties américaines visant à empêcher la création d’une zone autonome kurde en Syrie et la possibilité de mettre en place une zone tampon dans le nord de la Syrie, qui servirait de base à l’opposition syrienne.

    Dans tous les cas, après avoir fait un pas en avant dans son engagement dans la coalition internationale, la Turquie s’est empressée de faire un pas en arrière en bombardant les positions du PKK, alors que les Kurdes du PYD (proche du PKK) sont les principaux alliés de l’Occident dans la lutte contre l’EI. Un bombardement qui attise un peu plus les tensions entre les différents acteurs et qui remet sérieusement en question le processus de paix entre Ankara et le PKK. La lutte contre l’EI n’est-elle qu’un alibi pour affaiblir le PKK et ses alliés, et pour, à terme, empêcher le projet d’union des trois cantons kurdes syriens ?

    In fine, si l’objectif demeure inchangé pour la Turquie, ce deal manifeste l’infléchis- sement de la position turque. L’équation “pas de bombardements de l’EI sans bombarde- ments du régime syrien” a été remplacée par l’équation “pas de bombardements contre l’EI sans bombardements contre les Kurdes”. Tout cela sans confrontation directe avec le régime Assad.La complexité de la situation turque, qui doit gérer, dans le même temps, une lutte contre trois ennemis (Assad/ les Kurdes du PKK/ l’EI) explique en partie ces revirements politiques. Revirements à haut risque pour Ankara : d’une part, le risque d’un mouvement de contes- tation de la part des Kurdes de Turquie (plus de 15 millions de personnes) ; d’autre part, le risque d’attentats de l’EI qui dispose de cellules dormantes en Turquie.

    Auteur Lina Kennouche Publié le 28/07/2015 – 10:12
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