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Ecologie - Page 6

  • Gaz de schiste Algérie (Basta)

    « Quelles que soient les provocations du pouvoir, notre mobilisation restera pacifique »

    Peu médiatisée, la mobilisation citoyenne se poursuit en Algérie contre l’exploitation des gaz de schiste. Entre arrestation de caricaturiste engagé et convocation policière d’opposants à la fracturation hydraulique, les autorités tentent de freiner le mouvement. Basta ! a rencontré l’un des piliers de cette lutte, Mouhad Gasmi. « Il va y avoir tôt ou tard une convergence des luttes, prédit-il, et je suis convaincu que cela peut faire vaciller le régime si le gouvernement continue à camper sur ses positions. » Rencontre.

    « Une fois rentré en Algérie, je crains qu’on m’arrête ». Les craintes de Mouhad Gasmi, opposant farouche à l’exploitation de gaz de schiste, étaient fondées. Le 13 mai, il a été convoqué avec trente autres militants, par la police d’Adrar, la ville algérienne où il vit, suite à une plainte déposée cinq mois plus tôt par le directeur d’un hôpital pour « insulte et saccages de biens » [1]. Des accusations réfutées par Mouhad. « Nous avons organisé un sit-in devant l’hôpital pour revendiquer de meilleures conditions d’accueil et nous avons exprimé notre soutien aux médecins qui travaillent dans des conditions pénibles », indique t-il au site d’informations Impact 24. Nous n’avons insulté personne et nous n’avons jamais cassé le moindre objet. » Le militant a pour l’instant été relâché, mais sera traduit en justice.

    Cette pression policière est-elle en lien avec les activités militantes connexes de Mouhad ? Cet activiste infatigable pour le droit au travail et les chômeurs algériens est pleinement engagé depuis fin décembre dans une mobilisation citoyenne inédite contre l’exploitation des hydrocarbures non conventionnels. C’est à Tunis, à l’occasion du Forum social mondial fin mars, que Basta ! a pu le rencontrer. Sa famille habite à In Salah, une ville de 50 000 habitants au cœur du Sahara, proche des sites de forage qui menacent de précieuses ressources en eau [2]. Dès 2013, son implication dans la ligue de défense de droits des chômeurs l’amène à participer à des conférences sur les risques liés à l’exploitation des gaz de schiste. D’emblée, les préoccupations liées à la préservation de l’eau et l’impact sur la santé des populations l’interpellent. Adepte des réseaux sociaux et réalisateur amateur de petites vidéos, il commence à diffuser des informations à ce sujet sur le web. 

    Un mouvement social venu du désert

    Mouhad refuse d’être qualifié de leader de la contestation. « Le mouvement est de la base, comme moi, insiste t-il. Je ne fais que contribuer à l’organisation d’une contestation. » Durant des mois, il parcourt les villes et oasis du Sud de l’Algérie pour informer et aider à la constitution de groupes de citoyens. Une tâche compliquée quand il s’agit de populations très éloignées des unes des autres, ne disposant pas forcément d’un accès aux technologies modernes d’informations et de communication. L’annonce officielle en décembre 2014 par le gouvernement algérien du forage d’un premier puits près d’In Salah va donner un coup d’accélérateur à la mobilisation.

    Pour passer à la vitesse supérieure, rien de mieux qu’un campus universitaire, où étudiants et enseignants commencent à rallier la lutte. Des cadres de la compagnie pétrolière publique Sonatrach apportent même leur expertise. Les premières assemblées générales s’organisent. Les femmes vont alors jouer un rôle déterminant dans la prise de conscience : elles font du porte-à-porte pour exposer les dangers des gaz de schiste. Le 29 décembre, un premier rassemblement attire plusieurs milliers de personnes dans une ville qui compte 50 000 habitants.

    Combat contre l’impunité des multinationales

    Le manque de transparence entourant les opérations pétrolières et gazières renforce la ténacité des opposants. « Il y a une grande opacité dans les produits chimiques utilisés, c’est le secret gardé des multinationales, affirme Mouhad. Ce dont on est sûr c’est que les produits toxiques utilisés pour la fracturation hydraulique sont toxiques et déversés ensuite dans la nature. » Si la pollution remonte à l’exploitation du gaz et du pétrole conventionnel débutée il y a plus d’un demi siècle, l’absence de réglementation en la matière a soulevé la colère. Dans la région saharienne, les dégâts environnementaux sont déjà perceptibles (lire notre enquête, notamment l’absence de traitement des eaux et boues de forage). « Les multinationales polluent depuis des décennies en toute impunité », fustige l’activiste.

    Des mobilisations émergent dans d’autres régions du Sahara. « Nous demandons l’arrêt immédiat du fracking, la réparation immédiate des dégâts dans les eaux usées, et un rapport qui justifie l’exploitation du gaz de schiste. » La demande officielle de moratoire sur le gaz de schiste, envoyée le 21 février par le collectif d’In Salah et cosignée par des experts algériens, n’a reçu pour l’heure aucune réponse du président Abdelaziz Bouteflika et du Premier ministre. Le président algérien a en revanche réaffirmé fin février sa volonté de faire « fructifier » et de « tirer profit » de tous les hydrocarbures, dont les gaz de schiste qualifiés de « dons de Dieu »...

    Le régime algérien sous pression citoyenne

    « Les citoyens d’In Salah prennent de plus en plus conscience que ce problème de gaz de schiste est intimement lié à la nature du pouvoir algérien. Soit cette question sera enterrée et l’on ne gagnera pas, soit elle peut faire vaciller le régime », analyse Mouhad. Son rôle dans le mouvement d’opposition aux gaz de schiste en Algérie est incontestable. Et connu des autorités algériennes qui n’hésitent pas à l’occasion d’un débat à Tunis où Mouhad intervient, à le qualifier publiquement d’ « agent du Mossad », le service secret israélien honni... Tous les moyens sont bons semble t-il, pour tenter de disqualifier le mouvement.

    Mouhad est très attaché à l’autonomie du mouvement et à son caractère non partisan. « Il va y avoir tôt ou tard une convergence des luttes, prédit-il, et je suis convaincu que, si le gouvernement continue à camper sur ses positions, cela le mettra en grandes difficultés. » A ses yeux, la médiatisation de la lutte peut contribuer à faire pression sur le pouvoir. Pour lui comme pour ses camarades, elle peut aussi permettre « d’éviter une répression violente et sanglante dans la région. »

    Le 20 avril, relève Mediapart, le caricaturiste Tahar Djehiche a été convoqué par la police, accusé d’avoir partagé des dessins sur Facebook autour de la problématique de l’exploitation du gaz de schiste [3]. La récente convocation de Mouhad par la police à Adrar devrait, elle, déboucher sur un procès. Le militant l’assure : « Quelles que soient les provocations du pouvoir, notre mobilisation restera pacifique ».

    Pour aller plus loin : le rapport de Basta ! et l’Observatoire des multinationales sur Total et les gaz de schiste en Algérie (à télécharger ici)

    par Sophie Chapelle 20 mai 2015

    Notes

    [1Lire l’article d’Impact 24

    [3L’un de ses dessins a été jugé insultant pour le président Bouteflika par les policiers car il le campait à l’intérieur d’un sablier croulant sous le sable d’In Salah. Lire à ce sujet sur Mediapart Algérie : l’opposition au gaz de schiste souligne les impasses du régime (lien payant).

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  • Algérie: des actions le 29 mai pour l’AG du requin Total (Attac)

     

    Total fait parti de nos trois requins 2015 pour son implication dans les projets de Gaz de Schiste en Algérie.

    Fin janvier 2015, nous avons obtenu une première victoire symbolique puisque Total a publié en catimini sur son site une information clé : « Le permis d’exploration d’Ahnet étant arrivé à échéance le 6 juin 2014, Total n’y est plus présent depuis cette date » [1]. Désormais, nous exigeons de Total l’engagement à ne pas s’impliquer dans les projets de gaz de Schiste en Algérie.

    Pour y arriver, nous nous mobiliserons à l’occasion de l’assemblée générale des actionnaires de Total prévue le 29 mai prochain au Palais des congrès de la porte Maillot à Paris. Nous mènerons des actions à l’entrée de l’assemblée générale et remettrons à tous les actionnaires le rapport « Total et le gaz de schiste en Algérie->3759] » rédigé par Basta ! et l’observatoire des multinationales.

    Nous vous invitons également à mener des actions contre Total partout en France les 30 et 31 mai dans le cadre des « 1 000 initiatives pour le climat ».

     

  • L’industrie pétrolière algérienne danse sur un baril de poudre (Orient 21)

    Depuis l’élection d’Abdelaziz Bouteflika à la présidence, en 1999, l’avenir du régime n’a jamais été aussi incertain.

    Malade, le chef de l’État n’exerce plus guère de fonction autre que protocolaire. Ses pouvoirs sont allés à un collège officieux de régents : des proches collaborateurs, comme son conseiller et frère Saïd Bouteflika, le premier ministre, Abdelmalek Sellal et le vice-ministre de la défense ou le chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaid Salah. Rien n’indique qu’une solution consensuelle ait été trouvée à la crise de succession qui secoue le régime et qui s’est manifestée, à la veille de l’élection présidentielle de 2014, par un conflit feutré, par justice et presse interposées, entre deux groupes adverses, l’un hostile, l’autre favorable à la candidature d’Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat.

    Cet inquiétant tableau politique voisine avec un tableau économique non moins préoccupant.

    L’année 2014 a fermé la boucle d’une aisance financière sans précédent dans l’histoire de l’Algérie, due à d’excellents cours pétroliers depuis le début des années 2000. Mais les prix du brut ont plongé ces derniers mois de 50 % environ entre juin 2014 et avril 2015. Rien ne présage de leur redressement à court terme, leur effondrement ne s’expliquant pas uniquement par une offre excédentaire, mais aussi par un début de bouleversement du marché énergétique mondial, avec l’essor des énergies renouvelables et l’entrée en compétition des hydrocarbures non conventionnels, notamment les gaz de schiste américains.

    Crise des revenus de l’État

    Selon le Fonds monétaire international (FMI), sur la base d’un prix du baril de pétrole à 89 dollars, les revenus extérieurs de l’Algérie ne dépasseraient pas 48,9 milliards de dollars en 2015, contre 62,95 milliards en 2014 et 76,9 milliards en 2008. L’hypothèse d’un baril de pétrole à 89 dollars paraît, au demeurant, bien trop optimiste. Si les prix se maintiennent en 2015 à 50 dollars en moyenne, les recettes en devises seront divisées par deux et les recettes fiscales en recul d’un gros tiers.

    Les contestations sociales ne feront que s’étendre et se radicaliser.

    Si la protestation a pu être contenue ces dernières années, c’est aussi grâce à la redistribution de la rente pétrolière, après une décennie 1990 marquée par une chute libre du pouvoir d’achat de la majorité des Algériens. La détérioration des cours pétroliers n’était pas imprévisible. Nombre d’observateurs avaient mis en garde contre le caractère éphémère de l’aisance financière de la décennie 2000.

    Ils avaient rappelé que les mirobolants revenus des exportations devaient être employés pour mettre l’Algérie sur les rails d’une économie moins dépendante du brut. Car s’ils ont financé nombre d’infrastructures et amélioré le pouvoir d’achat de larges couches (les dépenses des ménages ont triplé en dinars courants entre 2000 et 2011), ces revenus n’ont pas servi à transformer l’Algérie en pays émergent — le rêve officiel. Le pétrole et le gaz représentent toujours la majeure partie des exportations (95,6 % en 2014) et l’industrie pétrogazière fournit, à elle seule, près du tiers du PIB (27,5 % en 2014 selon les prévisions gouvernementales). La chute des cours s’ajoute à la stagnation de la production et des exportations pétrolières (1,202 milliard de barils produits en 2013, selon l’Organisation des pays producteurs de pétrole - OPEP, contre 1,371 en 2007) et à la baisse sensible des exportations gazières (44 milliards de mètres cubes en 2014 contre 46,708 milliards en 2013 et plus de 50 milliards en 2010), baisse due à une explosion de la consommation intérieure, qui devrait passer à 50 milliards de mètres cubes en 2017-2020.

    Diversification de l’économie  ?

    Devant ce contre-choc pétrolier rappelant par certains aspects celui de 1985-1986, des mesures pour une meilleure maîtrise des dépenses publiques ont été annoncées : arrêt du recrutement de fonctionnaires, gel des chantiers d’infrastructures «  non indispensables  », etc. La crise, s’est plu à déclarer le président de la République fin 2014, devrait être transformée en opportunité pour diversifier l’économie.

    Mais le gouvernement est-il réellement résolu à prendre le chemin d’une déconnexion progressive du budget et des recettes en devises de la manne pétrogazière  ? Rien ne permet de l’affirmer. L’importance du programme d’investissement de la société publique d’hydrocarbures Sonatrach (90 milliards de dollars pour 2015-2019) n’est pas, en soi, la preuve que la voie rentière demeure celle privilégiée par les pouvoirs publics (les revenus du pétrole et du gaz pourraient aussi bien financer la constitution d’une économie plus diversifiée). En revanche, il témoigne du caractère imprécis des orientations présidentielles pour la diversification économique.

    Des orientations similaires pour la dynamisation de l’industrie, de la pétrochimie, de l’agriculture, du tourisme et des NTIC ont été données, par le passé, à l’exécutif sans jamais se traduire en objectifs chiffrés ni en réalisations. L’augmentation promise de la production d’hydrocarbures vise sans doute moins à financer le passage à une économie émergente qu’à compenser le manque à gagner pour les caisses de l’État de la baisse des prix du brut.

    Le gouvernement espère d’ici à 2019 augmenter la production de pétrole de 20 % et produire 151 milliards de mètres cubes de gaz conventionnels (contre 131 milliards en 2014). Il entend également lancer l’exploitation des gaz de schiste, dont l’Algérie détiendrait, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), les quatrièmes réserves mondiales techniquement récupérables. Comment financer ces ambitieux projets si les revenus pétrogaziers sont en baisse  ? Le recours à l’investissement étranger n’est pas l’option la plus probable, à en juger par le peu empressement des firmes internationales à répondre au 4e appel d’offres de l’Agence nationale pour la valorisation des ressources en hydrocarbures (Alnaft) en septembre 2014 (quatre périmètres de recherche et d’exploration attribués sur 32 offres).

    Le gaz de schiste : une aubaine  ?

    Légale depuis 2013, l’exploitation des gaz non conventionnels tient une place de plus en plus grande dans les projets gaziers algériens. Leur production, a déclaré le 7 décembre 2014 le président de Sonatrach Saïd Sahnoune, atteindra 20 milliards de mètres cubes en 2022 et 30 milliards en 2025 (soit, respectivement, 15,2 % et 22,9 % de la production gazière algérienne de 2014).

    Qualifiée d’«  aubaine  » par le premier ministre Abdelmalek Sellal, le gaz de schiste n’est pourtant pas la solution-miracle à la crise financière. L’extraction de ces ressources non conventionnelles nécessite de plus lourds investissements que les hydrocarbures classiques. Et même si le potentiel algérien est confirmé par l’exploration sur le terrain, son exploitation nécessitera le recours aux sociétés étrangères. En effet, Sonatrach ne peut mener seule un projet d’exploitation commercialement rentable.

    À supposer qu’elles aient envie d’investir dans le sous-sol algérien, les compagnies internationales ont besoin d’être rassurées sur l’accueil par la population du gaz de schiste, réputé dangereux pour l’environnement. Or, leur acceptation est loin d’être acquise. Le mouvement anti-gaz de schiste à In Salah, ville de l’extrême sud, l’a récemment montré. Les habitants s’opposent à son exploitation dans le bassin d’Ahnet où des tests de production ont été concluants. Ils craignent une possible pollution des nappes phréatiques et leur tarissement rapide à cause des besoins en eau de la fracturation hydraulique. Dans une région où le souvenir des essais nucléaires français des années 1960 reste vivace, la préoccupation écologique et sanitaire est profonde.

    Le sud et la menace djihadiste

    Le gouvernement, si prompt à réprimer la moindre contestation populaire, a montré une certaine prudence dans le traitement des protestations d’In Salah : réunions entre des membres du gouvernement et les représentants de la population, envoyés spéciaux de la présidence... Cette prudence s’explique par la délicatesse de la situation dans le sud, région ouverte, de surcroît, sur deux pays instables : le Mali et la Libye. Le sud vit, en effet, depuis plus d’un an au rythme d’affrontements ethno-religieux dans la vallée du M’zab entre ibadites «  berbères  » et sunnites «  arabes  ». Il vit également, depuis plus longtemps encore, au rythme de contestations sociales non négligeables. Avant In Salah, la ville de Ouargla, chef lieu de la wilaya où se situe le plus grand gisement algérien de pétrole (Hassi Messaoud), avait été — est toujours — le théâtre d’un mouvement radical de chômeurs qui revendiquent la priorité pour la population locale dans l’accès aux emplois des hydrocarbures.

    La contestation exprime le sentiment d’injustice des habitants du sud, pauvres en dépit des budgets colossaux qui ont été officiellement alloués (2,415 milliards de dinars, soit quelque 24 milliards d’euros, entre 1999 et 2013, selon une déclaration d’Abdelmalek Sellal le 23 mai 2013). Une des banderoles déployées par les manifestants d’In-Salah énonçait : «  Nous avons été un champ d’expérimentation pour vos bombes. Nous ne le serons pas pour le gaz de schiste  ! Nous n’avons pas profité du gaz conventionnel, ni des retombées de la manne pétrolière. (...) Le gaz de schiste nous prendra le peu que nous avons.  »

    Le fruit amer de la répression

    La répression des premières contestations sociales dans le sud a été à l’origine de la naissance du groupe armé appelé «  Les enfants du sud pour la justice islamique  ». La justice condamna à des peines d’emprisonnement, en 2004, certains de ses fondateurs, alors membres d’un mouvement social pacifique, le Mouvement des enfants du sud pour la justice. Des médiations traditionnelles persuadèrent une partie de ses membres de se rendre aux autorités en 2008 mais il n’a pas pour autant disparu. Son émir, Mohamed Lamine Ben Cheneb, a lancé en janvier 2013 un audacieux assaut sur le site gazier de Tiguentourine (sud-est), qui s’est soldé par 40 morts, en majorité étrangers.

    Le gouvernement semble être, face à la contestation d’In Salah, devant un dilemme : la répression pourrait engendrer une dangereuse radicalisation de la jeunesse du sud  ; cependant, céder à ses revendications éloignerait les firmes pétrogazières internationales, indispensables à l’exploitation des gaz de schiste. Il est toutefois improbable que pour échapper à ce dilemme le choix se porte sur une solution démocratique : ouvrir un débat sur la production des hydrocarbures non conventionnels et sur un meilleur modèle de développement du Sahara. Le plus probable est que, sous la pression de services de sécurité de plus en plus omnipotents, l’exécutif soit tenté par le tout-répressif. Ce n’est pas un hasard si l’émissaire dépêché par la présidence pour écouter les doléances des habitants d’In Salah est le patron de la sûreté nationale, le général Abdelghani Hamel, «  grand spécialiste des gaz lacrymogènes  », pour citer un journaliste algérien.

    Yassin Temlal 21 mai 2011.

    http://orientxxi.info/magazine/l-industrie-petroliere-algerienne,0874

  • Quand l'avenir de l'Algérie s'oppose au gaz de schiste (Algeria Watch)

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    La question de l'exploitation du gaz de schiste en Algérie se pose publiquement depuis moins de deux ans alors que le gouvernement semble en avoir fait l'option depuis au moins 2008.

    Une fois révélée, elle a été très rapidement imposée sans débats ni consultation d'experts critiques. Comme à l'accoutumée, le parlement a approuvé dans sa grande majorité cette orientation. Les déclarations de membres du gouvernement ainsi que les informations disponibles sur les projets, l'agenda, les financements, les sociétés étrangères impliquées sont contradictoires. Les uns défendent ouvertement ce choix sous prétexte de nécessité face au déclin des réserves de pétrole tandis que d'autres assurent qu'il n'est pas à l'ordre du jour.

    La mobilisation à In Salah contre l'exploitation du gaz de schiste en Algérie a débuté le 31 décembre 2014 et perdure à ce jour.

    C'est à quelques kilomètres de cette ville de 50 000 habitants située à 1200km d'Alger que le premier forage a été réalisé, officiellement à titre d'exploration. La population est alarmée des conséquences des techniques employées dans l'extraction du gaz de schiste, en particulier la fracturation hydraulique (fracking) qui nécessite de grande quantité d'eau, de sable et de produits chimiques. Il s'agit du premier mouvement populaire sans caractère revendicatif socio-professionnel ou partisan. La contestation se répand à la fois dans le temps et dans l'espace. Et plus elle perdure plus elle attire la convoitise d'acteurs politiques qui en font leur cheval de bataille dans leur confrontation avec le pouvoir qui lui, passe d'une attitude paternaliste aux menaces contre une population qui demande qu'une question aussi importante pour le pays fasse l'objet d'un débat national.

    Les autorités agissent dans l’opacité

    Les conditions juridiques et pratiques pour l'exploitation du gaz de schiste sont mises en place à partir de la fin des années 2000 : Des firmes étrangères dont la française Total obtiennent des permis « d'exploration et d'exploitation » sans toutefois se lancer tout de suite dans le projet. Une nouvelle loi sur les hydrocarbures est adoptée par le parlement en 2012 et publiée au Journal officiel le 24 février 2013 (jour anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures en 1971). Cette loi est particulièrement scandaleuse car elle revient sur des principes de souveraineté. Pour attirer les compagnies spécialisées, frileuses face à ce qu'elles considèrent être des contraintes financières, la fiscalité est dorénavant calculée sur la base du rendement que fixe les compagnies elles-mêmes sans que l'administration algérienne n'ait de moyen de contrôle.

    En juin 2013, l'EIA, Energy Information Administration des Etats-Unis, publie un rapport dans lequel il est affirmé que l'Algérie détiendrait la 3e réserve mondiale de gaz de schiste (707 trillions m3) située dans sept bassins : Ahnet, Berkine-Ghadames, Mouydir, Reggane, Timimoun et Tindouf. Dans d'autres régions du monde ces estimations se sont souvent avérées fausses et auraient été lancées pour motiver et justifier l'option gaz de schiste, en particulier lorsque les réserves de gaz et de pétrole conventionnelles se tarissent comme c'est le cas en Algérie.

    Rapidement après la publication de cette information, les premières déclarations officielles expriment la volonté de se lancer dans cette voie et le Conseil des ministres du 21 mai 2014 donne le feu vert à l’exploitation du gaz de schiste. Quatre puits d'exploration dans les bassins d'Ahnet et Illizi ont été prévus pour l'année 2014 dans le cadre d'un programme de forage de 11 puits étalés sur 7 à 13 ans. Ils ne semblent pas avoir été tous forés. Les travaux d'exploration du site Ahnet, à près de 20 km au sud d’In Salah, ont débuté en août 2014 par la compagnie nationale d'hydrocarbures Sonatrach et Total. Les sociétés Halliburton (américaine) et Schlumberger (française) chargées de l'aspect technique de la fracturation sont également présentes sur le site. En 2012 déjà, un forage schiste expérimental qui s'est avéré prometteur avait été réalisé à Ahnet.

    Le 27 décembre 2014, la mise en service « avec succès » de ce puits-pilote est annoncée en grande pompe par les ministres de l’Énergie, des Ressources en eau et de l’Environnement devant un parterre de journalistes venus sur place. Sonatrach se félicite de cet exploit sans évoquer le rôle crucial des firmes étrangères alors qu'il est connu que la compagnie algérienne ne peut réaliser les forages horizontaux qui sont indispensables à l'extraction du gaz de schiste. Le PDG de Sonatrach, Saïd Sahnoun, déclare le 11 janvier 2015 vouloir investir « 70 milliards de dollars sur 20 ans pour produire 20 milliards de mètres cubes de gaz de schiste par an ».

    Mais ce que les officiels et les partisans de cette option ne disent pas c'est que l'extraction de ce gaz est très onéreux: Un puits de schiste coûte aujourd'hui entre 15 et 20 millions de dollars et le déclin de la production est d'environ 40 % après à peine un an d'exploitation. Ceci signifie selon les experts qu'il faut sans cesse forer de nouveaux puits. Pour produire environ 25 milliards de m3, il faut forer 600 puits. Ces puits une fois abandonnés continuent de dégager des gaz, notamment du méthane, gaz à effet de serre bien plus puissant que le CO2. La fracturation de roches entraîne l’accentuation des fissures et failles et provoque des séismes de magnitude 4,5 à 5 degrés sur l’échelle de Richter.

    Bien plus dangereux cependant, sont les conséquences de l'utilisation extensive d'eau et de produits chimiques nécessaire à la fracturation hydraulique.

    Chacune nécessite entre 10 et 25 millions de litres d’eau qui seront extraits de la nappe phréatique, une ressource qui ne se renouvelle pas. Des tonnes de sable et une grande quantité de substances chimiques (500 d'après les spécialistes), dont les composantes de certaines restent inconnues, sont également essentielles pour fracturer la roche dans laquelle le gaz est enfermé. Selon les explications données, l'eau usée de la fracturation, très toxique, serait décontaminée et réinjectée dans le sol ou transportée par camion vers des centres de décontamination. Mais ces précautions très coûteuses ne seront pas prises et elles n'assurent pas la détoxication totale, on le voit aux Etats-Unis, qui pourtant disposent d'une plus longue expérience de ces techniques. Dans de nombreux lieux, l'agriculture est impossible, l'eau alimentaire est contaminée et les paysages sont massacrés par les centaines de puits, de bassins de décantation des eaux polluées, de routes aménagées pour les véhicules transportant le gaz ou les eaux, etc.

    Une population aspirant à préserver son environnement

    Les précurseurs de la forte mobilisation du début de l'année 2015 se manifestent peu après le fameux Conseil des ministres du 21 mai qui officialise l'entrée de l'Algérie dans l'ère du gaz de schiste. A Adrar et Ouargla les premiers rassemblements ont lieu dès le mois de juin 2014. Dès ce moment les appels à un débat national sont adressés au gouvernement et au Président mais également aux sociétés étrangères qui sont sommées de quitter le pays.

    Le 31 décembre 2014, quatre jours après la visite officielle des ministres à In Salah pour célébrer l'entrée officielle de l'Algérie dans l'exploitation du gaz de schiste, des habitants d’In Salah bloquent la route nationale 1 qui mène vers le puits pilote de Gour Mahmoud, situé dans le périmètre Ahnet, à une trentaine de kilomètres de leur ville. C'est le début des protestations qui vont s'amplifier jour après jour et entraîner les populations de Tamanrasset, Adrar, Ouargla.

    Le mouvement de protestation fait preuve d'une maturité impressionnante.

    Composé d'âges et de milieux différents, travailleurs, agriculteurs, notables, cadres de la Sonatrach, rappeurs, enseignants, universitaires, les femmes y jouent un rôle prédominant en raison des enjeux de la lutte. Il n'exprime pas de revendications socio-professionnelles, ne demande pas programmes de développement ou de lutte contre le chômage. Il n'exige encore moins un changement de régime ou le départ du président Bouteflika. La population du Sud se sait en marge des richesses que génèrent leur région pétrolifère de laquelle elle profite bien moins que d'autres régions. Mais pour elle, l'urgence de l'heure est de préserver un environnement fragile, déjà malmenée par l'exploitation conventionnelle du gaz et du pétrole. Cette société agricole, profondément attachée à la terre, a une conscience accrue de l'importance de la terre qui la nourrit mais surtout de l'eau qu'elle a appris à gérer avec parcimonie grâce au système d'irrigation ancestral appelé Foggara, canalisation souterraine alimentée par la nappe aquifère. Si l'eau est menacée par le pompage extensif et la pollution chimique, la vie de ces populations est en danger.

    Dans ce combat, les femmes sont aux avant-postes, car comme l'explique l'anthropologue Dida Badi « le rapport est évident entre la terre qui enfante la source des entrailles de laquelle l’eau jaillit, et la mère qui engendre et fonde le groupe de parenté qui s’en réclame ». Et comme l'explique Mohad Gasemi, le président du bureau régional de l’Association de promotion de l’activité agricole : « Nos ancêtres ont développé dans la région d’Adrar des systèmes d’irrigation qui ont permis à toutes les populations de se nourrir grâce à leurs propres efforts. L’exploitation de gaz de schiste détruira tout ce trésor. Les produits chimiques qui seront utilisés dans la fracturation hydraulique pollueront toutes les nappes du pays, puisque les bassins hydriques sont interconnectés. Au lieu d’investir dans un projet destructeur, qui d’ailleurs n’est pas rentable économiquement, il serait plus judicieux d’investir dans les ressources humaines locales. Outre le tourisme, je ne vois que le secteur de l’agriculture à développer dans notre région, entre autres les céréales et le maïs. Avec le soleil régulier, et l’eau à profusion, les récoltes peuvent être triplées dans le pays. »

    Rapidement la place centrale de la ville d'In Salah est investie par les opposants et dénommée «maydan as-soumoud » (Place de la résistance) où des tentes sont érigées et les habitants se regroupent quotidiennement pour s'échanger et sensibiliser la population. Dans les autres villes du Sud des manifestations sont également organisées régulièrement, mais le centre de la contestation reste In Salah. Une grande manifestation est organisée le 15 janvier à laquelle participent plus de 25 000 marcheurs venus de toute la région pour exprimer leur refus de ce projet qu'ils considèrent être une « question de vie ou de mort ».

    Face à l'absence de réponse aux différents appels lancés par les habitants d'In Salah, le 21 février 2015, une demande de moratoire - le temps de tenir un débat national - tel qu'il est appliqué dans d'autres pays, est adressée par la société civile et des organisations non gouvernementales locales au Président de la République. En se basant sur plusieurs études d'experts, le document met en relief la dangerosité des procédés employés dans la fracturation hydraulique, la pollution de l'air et les risques pour la nappe phréatique ainsi que les conséquences à long terme une fois les puits de fracturation abandonnés. Les photos du site du forage du puits-pilote d'Ahnet montrent qu'aucune mesure de protection n'a été prise : les produits chimiques de la société Halliburton sont stockés dans des sacs à l'air libre ; les bassins de récupération de l'eau utilisée lors de la fracturation hydraulique ne sont que de simples bâches dont l'étanchéité n'est que relative, tandis que l'eau s'évapore, le sable et les produits toxiques subsistent et sont livrés aux vents ; les cadavres d'animaux entrés en contact avec ces bassins sans évoquer la destruction du site. De nombreux pays et notamment la France ont décidé d'un moratoire en raison des dangers des procédés d'extraction et de l'opposition des populations concernées.

    De la confrontation à l'apaisement

    Entre temps le mouvement fait des émules dans le pays et la Coordination pour les libertés et la transition démocratique, CNLTD, dans laquelle se retrouvent de nombreux partis autrefois au pouvoir et aujourd'hui unis contre le 4e mandat d'un président malade et absent, s'empare du sujet. Des manifestations sont programmées dans différentes villes le 24 février, jour anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures en 1971. A In Salah défilent à nouveau près de 25 000 personnes, et dans toutes les grandes villes, plusieurs centaines d'opposants se rassemblent. Les têtes de partis d'opposition tentent de marcher à Alger mais la police les en empêche et des dizaines de manifestants sont arrêtés, tout comme en Kabylie.

    Mais à In Salah également le climat paisible des protestations bascule ce 28 février, lorsque des activistes se rendent à la base de vie de la société Halliburton pour remettre à ses représentants une lettre informant que la population s'oppose au forage d’un nouveau puits. Des gendarmes anti-émeutes les reçoivent sur place en proférant des insultes racistes et les chassent avec violence. Le ton monte et la confrontation éclate, jets de pierre contre bombes de gaz lacrymogène.

    Les affrontements se poursuivent en ville, les forces de l'ordre n'ont plus aucune retenue, à coup de bulldozers, matraques et de gaz, ils évacuent la place As-soumoud, symbole de résilience d'une population jusque là patiente et attachée à la non-violence. Des bâtiments publics sont incendiés, tandis que des personnes sont arrêtées et blessées notamment par des tirs à balles réelles. Ce n'est que lorsque l'armée intervient pour apaiser les esprits et pousser les policiers à retourner dans leurs casernes que le calme se rétablit. Le collectif des habitants de In Salah dénonce dans un communiqué d'une grande lucidité que pour « respecter les contrats signés avec les multinationales étrangères et de manière à satisfaire ses exigences premières, Sonatrach a décidé d'opérer le 'fracking' en soutenant, par un renfort sécuritaire extraordinaire, l'entreprise Halliburton, en charge des hydro-fracturations assassines ». Tout en voulant préserver le caractère pacifique de leur mouvement, malgré le débordement de fin février, les habitants d'In Salah restent attachés au dialogue avec le gouvernement afin de trouver une solution commune.

    L'irresponsabilité des autorités met en danger l'avenir du pays

    Si jusqu'à présent les autorités algériennes ont fait preuve d'une certaine retenue - à l'exception de la vague de répression fin février - face à un mouvement qui par sa maturité et son expertise représente un véritable défi pour le gouvernement, d'autant plus qu'il ne conteste pas le pouvoir en place, n'exige pas son départ, les différents ministres et responsables de la Sonatrach ont quant à eux brillé par leurs propos incompétents et contradictoires qui ne sont pas pour rassurer les populations laissées dans l'ignorance quant à l'évolution du programme d'extraction de gaz de schiste. Les uns parlent de stade d’exploration, les autres d’exploitation et les troisièmes suggèrent les deux étapes.

    Les rares arguments opposés aux militants anti-gaz de schiste critiquent qu’ils ne prendraient pas en considération « l’impératif économique » et verseraient dans « l’utopie environnementale ». Quel impératif économique ? Celui d'honorer des contrats de vente d'hydrocarbures à long terme datant de la période de Chekib Khelil, ministre de l'énergie et des mines jusqu'en 2010, qui a bradé les ressources fossiles du pays et qui est aujourd'hui poursuivi dans des affaires de corruption de la Sonatrach ?

    N'est-ce pas plutôt l'esprit de rente qui prédomine à la fois dans la classe politique mais également chez de nombreux journalistes et une bonne partie des Algériens ?

    Habitués à recourir à la manne pétrolière, la perspective d'un tarissement des hydrocarbures, est inimaginable voire inacceptable. C'est la paix sociale qui est en jeu dans un pays qui bien qu'aspirant à l'apaisement après les violences subies durant la « sale guerre » des années 1992-2002 est traversé d'antagonismes explosifs.

    Que faut il penser d'un Président de la République qui en réponse à la demande de moratoire présentée par les habitants d'In Salah assène fin février que le gaz de schiste est « un don de Dieu qu’il faut fructifier » ? Invoquer le registre religieux et infantiliser ceux qui en appellent à la responsabilité du chef de l'Etat montre une fois de plus quelle relation il entretient avec ses administrés. Et face à une mobilisation qui ne fléchit pas, Le président Bouteflika passe peu après à des menaces à peine larvées. Lors de la commémoration du cessez-le-feu du 19 mars 1962, à Ghardaia, dans une déclaration qui lui est attribuée, il lance un avertissement aux opposants du gaz de schiste qui remettraient en question les « programmes de développement ». « C’est un Etat généreux qu’offense la propension de certains de ses citoyens à douter de lui, et de ses engagements. Je veux parler d’une partie de la population d’In Salah qui persiste dans ses protestations, en dépit de toutes les assurances qui lui ont été données. (…) Je suis particulièrement affligé de voir des enfants de la région poussés à nuire à l’Etat de leur pays, et de constater que d’autres tendent à mettre en doute le dévouement et l’intégrité des dirigeants de leur Etat, et à s’inscrire en faux contre le bien-fondé de leurs actions, décisions et plans conçus pour réaliser le développement du pays dans son ensemble ». Ces déclarations ne laissent pas présager de volonté à prendre véritablement en considération les inquiétudes fondées des populations du Sud.

    En conclusion

    La mobilisation populaire contre la fracturation hydraulique, bascule dans une autre dimension avec la participation de politiques. Les responsables de divers partis d'opposition se rendent dernièrement régulièrement à In Salah pour participer aux protestations. Le 14 mars une grande manifestation nationale a été organisée à Ouargla à laquelle avait également appelé la CNLTD. Les opposants politiques ont été à cette occasion accueillis avec enthousiasme par la population qui n'aspire qu'à sortir de son relative isolement et désire que le débat autour de la question du gaz de schiste s'élargisse en particulier au nord du pays où la mobilisation pour un moratoire n'est pas encore très forte. Certains avertissent toutefois qu'il est nécessaire que le mouvement anti-gaz de schiste conserve son autonomie et ne laisse pas brouiller son message par les actions de politiciens qui aspirent à un « printemps arabe » en Algérie. Ceci est d'autant plus important que cette mobilisation non-partisane, de par son caractère populaire transcendant tous les clivages sociaux et professionnels, désarçonne le gouvernement. Si elle devait être récupérée par l'opposition politique, elle risquerait de perdre de sa force et de sa vitalité.

    La question de l'exploitation du gaz de schiste n'est pas à traiter comme un problème du Sud algérien en raison de la localisation des gisements.

    Elle concerne le pays tout entier et en appelle à une réponse globale afin de préserver un environnement qui permettrait le développement du pays à condition d'engager d'autres orientations. L'utilisation prudente des nappes d'eau phréatiques et albiennes pourraient garantir une couverture alimentaire du pays entier tout en fournissant du travail à des milliers d'agriculteurs. L'exploitation d'une richesse naturelle, le soleil, pourrait produire une grande partie de l'énergie nécessaire en Algérie et être exportée. Mais ce sont là des décisions politiques qui placent au centre des préoccupations non pas les profits à court terme mais l'avenir du pays et des générations futures.

    Salima Mellah, Assafir al-arabi, 16 avril 2015

    http://www.algeria-watch.org/fr/article/analyse/mellah_gaz_schiste.htm

  • Le Collectif national pour un moratoire sur le gaz de schiste dénonce (Le Matin.dz)

    Le collectif national pour un moratoire sur le gaz de schiste Algérie (CNMGS) s’indigne et dénonce l’éminence de nouvelles fracturations hydro-chimiques dans la région d’in Salah, malgré le refus de la population locale mobilisée depuis plus de 100 jours pacifiquement et de façon déterminée et le refus des nombreux militants antigaz de schiste en Algérie.

    En effet, il a été constaté sur le site du KM 35 la présence de quantités importantes de produits chimiques stockées dans des fûts mais aussi dans des sacs, ces derniers pouvant laisser échapper des produits chimiques dans l’atmosphère et, ce faisant, créer une irrémédiable pollution sur l’environnement et les personnes. Il a été également constaté la présence de matériel lourd de fracturation, véhicules, etc.

    Alors que le débat transparent souhaité par la société civile et la communauté scientifique algérienne contre la fracturation hydro-chimique des schistes ainsi que l’appel à moratoire n’ont reçu aucune réponse des pouvoirs publics, nous revoilà, encore une fois, confrontés aux dangers de cette technique sur les ressources hydriques et sur la population.

    Face aux déclarations contradictoires et à tort rassurantes des pouvoirs publics le Collectif national pour un moratoire du gaz de schiste Algérie réitère avec force et détermination l’urgence d’un moratoire et en appelle aux plus hautes instances de notre pays.

    Il est de notre devoir de citoyens de continuer notre mobilisation contre la fracturation hydrochimique des schistes et de rester intransigeants quant au devenir de la gestion de nos ressources naturelles et hydriques afin de préserver l’avenir des générations futures.

    Il est également de notre devoir de soutenir la mobilisation exemplaire d’In Salah et de faire écho à Sahet Essoumoud.


    Nous rappelons que le Collectif national pour un moratoire sur le gaz de schiste Algérie a été créé le 25 février 2015 afin de soutenir l’appel à moratoire adressé par la société civile d’In Salah le 23 février 2015 au Président de la République.
    Notre collectif appelle par ailleurs à la création d’une commission indépendante sur la question des gaz de schistes par fracturation hydraulique et nous demandons à ce que soient rendus publics:


    - Le document validé par l’Assemblée nationale populaire sur la question des gaz de schistes,
    - Le rapport des experts remis par M. Mebtoul au Premier ministre,
    - Et les conclusions qui ont permis à l’Autorité de Régulation des hydrocarbures la validation de l’exploitation des gaz de schistes en Algérie.

    Bien que l’arrêt de l’exploitation des gaz de schistes soit notre préoccupation première au vu de ses diverses conséquences, il n’en demeure pas moins que nous nous inscrivons dans une démarche plus large, celle du développement durable, de l’économie responsable, de la diversification de nos ressources énergétiques et d’une économie plurielle et diverse qui mettrait l’Algérie à l’abri des aléas d’une économie rentière

    Signataires :

    le Collectif national pour un moratoire sur le gaz de schiste Algérie: Alger, Adrar, Timimoum, Metlili, Tamanrasset, Tébessa, Oum El Bouaghi, Bejaia, Tizi-Ouzou, Constantine, Oran, Boumerdès, Batna, Djelfa, Jijel, les représentants de la diaspora (France, Angleterre, Etats-Unis et Canada).Par Le Matin | 15/04/2015 10:42:00

    http://www.lematindz.net/news/17177-le-collectif-national-pour-un-moratoire-sur-le-gaz-de-schiste-denonce.html

  • Algérie. L'exploitation du gaz de schiste commence en catimini ( Courrier International)

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

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    Le matériel pour le lancement des opérations de fracturation hydraulique dans le sud de l’Algérie a été discrètement acheminé sur place, déjouant la vigilance des habitants pourtant mobilisés depuis plusieurs mois contre ce projet.

     

    “La compagnie pétrolière étatique Sonatrach et la multinationale Halliburton sont sur le point de lancer les opérations de fracturation hydraulique dans un puits de gaz de schiste situé à une trentaine de kilomètres de la ville de In Salah”, dans le sud algérien, révèle Algérie-Focus, citant “des sources locales”, qui ont alerté le 12 avril au soir la rédaction du site d’information.

    Le projet avait été mis en sourdine ces dernières semaines, à la suite des échauffourées qui ont éclaté début mars à In Salah entre les manifestants contre l'exploitation du gaz de schiste et les forces de l’ordre. ‘Tout le matériel est en place. Ils sont prêts à commencer la fracturation hydraulique. Demain, après-demain, on ne sait pas au juste quand, mais ce qui est sûr, c’est que c’est imminent’, raconte l’un des animateurs du mouvement. Il précise : ‘Les camions transportant ce matériel sont passés sans que la population ne les remarque. Ils ont certainement dû prendre des chemins dérobés, des raccourcis par des pistes pour échapper à notre contrôle et rouler de nuit.’

    Bravo Monsieur Sellal

    Depuis l’émergence, le 1er janvier 2015, du mouvement populaire et écologique, dont les participants manifestent contre l’exploration du gaz de schiste et réclament un moratoire sur la question énergétique, des brigades de jeunes manifestants observent les allées et venues sur la route menant au puits contrôlé par Halliburton afin de s’assurer que le matériel utilisé pour la fracturation hydraulique n’entre pas sur le site gazier.

    “Autre indice : une délégation d’experts étrangers, chargée d’assurer les premières opérations de fracturation hydraulique en Algérie, d’après nos sources, s’est également rendue sur place ce dimanche, escortée par des forces de sécurité.”

    Les animateurs du mouvement se disent désormais “impuissants”, souligne le site d'information. ‘On va certainement encore manifester, mais le dispositif sécuritaire est trop important pour qu’on arrive à changer la donne. Bravo Monsieur Sellal [Abdelmalek Sellal, Premier ministre], vous avez réussi quelque chose de grand’, lâche sur un ton amer l’un des fondateurs du mouvement contre l'exploitation du gaz de schiste.”

    Publié le 13/04/2015 - 13:07

    http://www.courrierinternational.com/article/algerie-lexploitation-du-gaz-de-schiste-commence-en-catimini

  • Nouveautés sur "Algeria Watch"

    Résultat de recherche d'images pour "algerie"

     

    http://www.algeria-watch.org/francais.htm

  • Forum de Tunis (Al Huff' + Cadtm)

    Les militants de la "vraie" société civile algérienne dénoncent les agissements de la délégation officielle au FSM Tunis

    Dz Fsm
     
     

    Violences au FSM: "Le pouvoir algérien a envoyé ces gens pour décrédibiliser les militants algériens"

    Tunisia Habib Bourguiba
     
     

    Bientôt un Forum social mondial au Maroc?

    Forum Social Mondial

     

    Le pouvoir algérien occupe le terrain au Forum social mondial de Tunis

    Algrie Au Fsm

     

     
     
    • Le Forum veut durcir le front de la dette

      par Benito Pérez

      27 mars

    • TUNIS L’accalmie des années 2000 était trompeuse : les Etats les plus faibles demeurent à la merci du chantage de leurs créanciers. A Tunis, le cas grec suscite la mobilisation. On la croyait dépassée, elle fait un retour en force au Forum social mondial (FSM) de Tunis. Sur le campus d’El Manar, (...)

     

    •  Plusieurs marches d’ouverture au FSM 2015

      par Claude Quémar, Salaheddine Lemaizi

      27 mars

    • Les travaux de la 13e édition du Forum social mondial ont démarré le 24 mars avec la traditionnelle marche d’ouverture. L’itinéraire de cette marche a été modifié par les organisateurs pour pouvoir converger vers le Musée du Bardo, lieu des attaques terroristes du 18 mars dernier. Récit d’une marche (...)

     

  • En Tunisie, le phosphate a saccagé la nature du golfe de Gabès (Reporterre)

    POLLUTION GABS

    Située sur la côte est du pays, Gabès subit depuis trente ans une pollution rampante au phosphate. Oasis asséché, mer polluée, développement de maladies… En cause, l’activité industrielle du Groupe Chimique Tunisien (GCT), qui produit de l’acide phosphorique.

     

    Gabès, reportage

    Une plage de sable fin, des palmiers en abondance, une nature généreuse… Ce paysage de carte postale, la ville de Gabès, à 400 km au sud de Tunis, l’a connu jusque dans les années 1960. « Gabès n’avait pas son pareil, on pouvait trouver de l’ombre un peu partout, la ville était entourée par l’oasis », relate Sami Badrouchi, membre de l’Association de Sauvegarde de l’Oasis de Chenini, qui entoure Gabès.

    Une période glorieuse pour les habitants, « un paradis sur terre avant l’arrivée de l’industrie », se rappelle Abdallah Zrelli, président de la branche régionale de l’Association de Protection de la Nature et de l’Environnement. « C’était le seul oasis au monde situé directement en bord de mer ! Le territoire était d’une richesse extraordinaire », insiste-t-il. À cette époque, la région est très prisée des touristes, notamment libyens. Le gouvernement crée même un train touristique depuis Tunis pour rejoindre Gabès et son oasis.

    Le tournant dans l’histoire de la ville se situe au début des années 1970. En 1972 exactement, lorsque l’Etat, dirigé par Habib Bourguiba, crée le Groupe Chimique Tunisien (GCT). L’entreprise est chargée d’exploiter le phosphate, la principale ressource naturelle du pays. Le bassin minier se trouve autour de Gafsa (au nord-ouest de Gabès), où est récolté le minerai, avant d’être acheminé par train vers la région côtière. Trois pôles sont créés, à Gabès, Skhira et Sfax. Le pôle principal, à Ghannouche (banlieue de Gabès), vise notamment à transformer le phosphate pour produire de l’acide phosphorique. D’autres unités industrielles (cimenterie, agroalimentaire, manufacture) sont également implantées autour de la ville.

    Une manne financière

    Dans la Tunisie des années Bourguiba puis Ben Ali, l’exploitation du phosphate est un secteur clé de l’économie du pays. Aujourd’hui encore, cette activité génère plus de 4 300 emplois directs, repré- sentant 3 % du PIB et 10 % de l’exportation. Le GCT est un poids lourd contre lequel il est impossible de lutter.

    « Avant la Révolution, il n’y avait aucune association de protection de l’environnement. On n’avait aucun moyen d’agir, il n’y avait pas d’informations sur le sujet », déplore Sami Badrouchi. Une opacité favorisée par le régime autoritaire et corrompu de Ben Ali.

    Après la chute du dictateur, la société civile s’empare d’un certain nombre de sujets, dont l’environnement. « À partir de la Révolution, la pollution a cessé d’être un sujet tabou que l’on ne sortait qu’au moment des élections », explique Abdallah Zrelli. L’impact de l’activité industrielle est de toute façon trop visible pour cacher plus longtemps la réalité de la situation. Les associations locales se mobilisent pour informer la population sur le « problème du phosphate ». Ou plutôt les problèmes, tant les conséquences sont nombreuses.

    Autrefois verdoyant, l’oasis de Gabès n’est plus que l’ombre de lui-même. La faute à l’accaparement de l’eau par l’usine chimique, selon Sami Badrouchi. « Le groupe chimique pompe une très grande partie de l’eau présente dans les nappes, sans la renouveler. Sur la zone voisine de Ras el Oued, on comptait auparavant 400 sources naturelles. Aujourd’hui, on est obligé de pomper l’eau… À cause de cela, l’activité agricole n’est plus rentable ». En manque d’eau, le territoire souffre également d’une pollution considérable due à l’activité industrielle.

    Des boues radioactives

    La production d’acide phosphorique génère un déchet, nommé phosphogypse, composé notamment d’uranium, de plomb, de polonium et de radium. Pour une tonne d’acide phosphorique, 5,1 tonnes de phosphogypse sont rejetées. Ces déchets radioactifs sont stockés à l’air libre à Sfax et Skhira, sous forme de terrils plus ou moins bien protégés. A Gabès, en revanche, le phosphogypse est entièrement déversé dans le golfe par un canal à ciel ouvert. Mélangé à de l’eau de mer, il forme des « boues gypseuses ». La ville portuaire est touchée de plein fouet par ces rejets. Mohamed Ali Daymi, qui est ingénieur et suit de très près la question, décrit la situation : « La décharge est située précisément entre les ports de commerce et de pêche de Gabès… ».

    Le site de Shkira

    Les chiffres recensés jusqu’à présent donnent le vertige. L’usine de Ghannouche déverse chaque jour environ 42 000 m3 de ces boues dans la mer, soit 12 500 tonnes de phosphogypse sec. Selon Samir Jomaa, de l’Université de Carthage, « on estime que 135 millions de tonnes de phosphogypse sec ont été rejetées sur les côtes du Golfe durant les trente dernières années ». [1]

    La baignade est interdite et de nombreuses espèces de poissons ont disparu.

    On n’en compte plus que sept actuellement, contre plusieurs dizaines dans les années 1960. Les pêcheurs, inquiets de voir leur activité réduite à peau de chagrin, ont manifesté la semaine dernière dans les rues de la ville. Les autorités ont répondu par des tirs de gaz lacrymogène et plusieurs interpellations. Les habitants de Gabès ne sont évidemment pas épargnés par le fléau. Les consé- quences sur la santé sont préoccupantes. Ici, on ne compte plus les personnes atteintes d’un cancer, surnommé « la mauvaise maladie ».

    Pourtant, aucune étude précise n’a été menée jusqu’à présent. « Une association des agents de santé de l’hôpital a demandé un registre des maladies recensées sur Gabès, mais cela n’a pas encore été mis en œuvre », déplore Sami Badrouchi.

    La plupart des malades partent à Sfax ou à Tunis pour se faire soigner, ce qui rend difficile le lancement d’une telle étude. D’autres maladies, comme l’ostéofluorose, liée à l’importante concentration de fluor, ont également vu le jour dans la région. À cela s’ajoutent la pollution atmosphérique ou les mauvaises odeurs à proximité du site…

    Vers un arrêt des rejets en mer

    Après des années de silence, le Groupe Chimique Tunisien, qui fait face aux pressions de la société civile, semble réagir. Une cellule de veille, composée de responsables du GCT et de membres d’associations, est chargée d’étudier les projets du groupe. L’entreprise envisage notamment plusieurs mesures pour réduire son impact environnemental. La plus emblématique serait l’abandon des rejets de phosphogypse en pleine mer. À la place, une décharge implantée sur le continent pourrait voir le jour. Elle serait dotée d’une « géo-membrane destinée à protéger les eaux souterraines contre les infiltrations », selon le groupe.

    Trois sites sont pressentis pour accueillir ce futur terril, situés entre 20 et 40 km de l’usine. L’installation nécessiterait le transport des boues gypseuses sur plusieurs dizaines de kilomètres, via le plus long pipeline de phosphogypse du monde… Le montant serait de 400 millions d’euros. Pour l’un des sites proposés, à El Malah (à 20 km de Gabès), les habitants ont déjà clairement exprimé leur refus.

    Si l’arrêt de la production de phosphate est pour l’instant peu envisageable, le cœur du problème est d’ordre économique, selon Mohamed Ali Daymi. « Avec 23,7 % de chômage dans le gouvernorat de Gabès, dont 40,2 % pour les jeunes diplômés, il faut mettre en œuvre une économie alternative pour sortir de l’emprise du phosphate. Si l’on installe des systèmes de dépollution, d’ingénierie de l’eau, etc., on permettra à des gens qualifiés d’avoir du travail et de contribuer à éradiquer la pollution ». Le seul moyen, selon lui, de redonner de l’espoir à la population : « Le niveau de bien-être est négatif ici, les gens souffrent. Ils veulent juste vivre ».

    27 mars 2015 / Clément Barraud (Reporterre) [1Etude présentée lors du Forum social de l’environnement, le 7 février 2015, à Monastir

    Lire aussi : La menace du gaz de schiste plane sur la Tunisie

    http://www.reporterre.net/En-Tunisie-le-phosphate-a-saccage

  • Non au gaz de schiste

    Lotfi Dk / Desert Boys / Samidoune (Clip Officiel) HD