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IVè Internationale - Page 15

  • Déclaration de la LCR (Belgique)

    La LCR-SAP, en tant que composante des listes PTB-GO,  soutient  les deux députés fédéraux PTB-GO Raoul Hedebouw et Marco Van Hees qui s’opposent[1] aux bombardements menés en Irak et en Syrie par la coalition internationale autour des USA. Néanmoins, si la LCR-SAP partage leur opposition aux bombardements, la LCR-SAP met en avant d’autres arguments et d’autres solutions, solidaires avec des populations, contrairement à un partenariat avec des gouvernements sectaires complices de crimes contre l’humanité.

    La Belgique va donc à nouveau entrer en guerre,

    bénéficiant d’un large consensus belliciste, de la N-VA au PS, et une abstention qui signifie l’absence d’opposition d’Ecolo. L’opération belge n’aura lieu qu’en Irak, et la Belgique pourrait aussi envoyer des troupes spéciales pour assister l’armée irakienne et les Peshmergas kurdes. Le coût de cette opération, d’une durée minimale d’un mois, est estimé à 15 à 20 millions d’euros par mois. Les partis de gouvernement évoquent aussi de nouvelles lois « antiterroristes » en complément sécuritaire interne à la guerre menée en Irak.

    La LCR-SAP salue l’opposition affirmée par Raoul Hedebouw et Marco Van Hees à ces bombardements pour plusieurs raisons. D’abord, les Etats de la coalition internationale autour des USA, de la France à la Grande-Bretagne (ces deux derniers refusant jusqu’ici de bombarder en Syrie), en passant par les régimes despotiques locaux que sont l’Arabie Saoudite, les Emirats, le Bahreïn ou encore la Jordanie, sont bien mal placés pour offrir une solution à la véritable catastrophe subie par les populations civiles depuis des années, encore aggravée par la montée en puissance de l’EIIL. Cette organisation fondamentaliste a en effet pu naître et prospérer sur le terrain dévasté de la région suite aux multiples interventions militaires impérialistes et à la corruption des dictatures locales, qui jouent donc ici aux pompiers pyromanes. L’organisation de l’Etat islamique conteste en effet la position de l’Arabie Saoudite dans le monde musulman sunnite.

    Ensuite, les bombardements à venir vont ajouter encore des morts civils au décompte macabre. Les bastions de l’EIIL à Raqqa et à Mossoul sont de grandes villes : impossible de déloger les fondamentalistes sans massacrer des centaines, voire des milliers d’innocents.

    Derrière l’indignation sélective, les intérêts impérialistes

    Nous partageons comme beaucoup notre répulsion pour les agissements de l’EIIL dans les régions sous son contrôle, les assassinats de militant.e.s irakien.ne.s et syrien.ne.s comme de journalistes locaux et étrangers, la répression de tout mouvement ouvrier, des femmes et des jeunes.

    Mais cela ne doit pas nous empêcher de penser. Les horreurs médiatisées commises par l’EIIL ne sont certainement pas la raison profonde de l’indignation d’Obama, de Hollande, de Rohani, de Di Rupo ou Bart De Wever, pas plus que la « protection des minorités ». Avons-nous oublié les plus de plus de 200.000 morts causées par la dictature d’Assad, y compris des milliers de Palestinien.ne.s, et des milliers assassinés sous la torture, la famine organisée, les armes chimiques, 200.000 prisonnier.ère.s politiques et 9 millions de déplacés et réfugiés… Le silence des élus PTB-GO sur cet aspect précis laisse planer un doute et une ambiguïté suspects et pose un problème évident de cohérence, que nous soulignons. Mais la position des « interventionnistes » pose tout autant problème. Avons-nous oublié les massacres commis par Israël l’été dernier ? Et les crimes des USA en Irak depuis 2003, et en Afghanistan, et au Pakistan, et à Guantanamo ? Sans même parler des décapitations en Arabie Saoudite, ou de la répression qui a fait des centaines de morts et des milliers de prisonniers politiques en Egypte sous la férule du maréchal Sisi…Plus près de nous, puisque nos dirigeants feignent l’indignation, il n’est pas inutile de rappeler que la Belgique soutient Israël, qu’elle a activement participé à la guerre impérialiste en Afghanistan, au Mali. Elle soutient les mesures néolibérales menées par les pays arabes qui sèment la misère dans les classes populaires. La Belgique, comme de nombreux pays européens, a aussi participé au délire islamophobe stigmatisant les musulmans, et particulièrement les musulmanes qui portent le foulard et se voient menacées d’exclusion de l’enseignement et des emplois publics. Daesh (preciser que daesh = Organisation de l’État islamique) est aussi le produit de l’élimination des forces progressistes de la région assurée par l’Occident et par les régimes autoritaires locaux.

    Il faut aller chercher ailleurs : comme le rappelait notre camarade Joseph Daher, un des objectifs principaux de la coalition en Irak est de protéger les diplomates et les transnationales du secteur pétrolier, protéger les hydrocarbures, Israël, ainsi que le régime irakien hérité de l’invasion américaine. Les autres acteurs régionaux, qui ont laissé se développer Daesh, considèrent maintenant celui-ci comme une menace trop grande et ingérable pour rester passifs.

    Consensus sur la guerre contre le terrorisme…y compris à gauche ?

    Plus largement encore, un consensus « antiterroriste » inédit a émergé entre les grandes puissances et les acteurs régionaux. On a vu à quel point cette notion de « terrorisme » peut être manipulée à souhait en fonction de celui qui l’utilise. La société de contrôle, condamnée mondialement suite aux nombreuses révélations ces dernières années, reçoit un nouveau boost de la guerre en cours. La coalition est aussi à la pointe d’une manœuvre coordonnée qui vise à ce que l’impérialisme reprenne la main une bonne fois pour toute sur le processus révolutionnaire régional, et à poursuivre l’offensive contre-révolutionnaire généralisée dans la région. La guerre et le sectarisme, encouragés dans la région par la Russie et les USA, l’Iran et l’Arabie Saoudite entre autres, servent d’antidotes à l’émancipation des peuples. C’est vrai en Ukraine comme en Syrie. Dans le capitalisme actuel, qui est toujours en crise, les équilibres mondiaux changent, ainsi que les alliances opportuniste entre les différents Etats capitalistes, et c’est précisément maintenant qu’il faut être en état d’alerte face à une folie et une fuite en avant militariste des grandes puissances impérialistes, pour écraser violemment toute opposition interne et externe dans l’œuf.

    Et c’est précisément ici que la LCR-SAP a des divergences importantes avec les alternatives proposées par nos camarades élus PTB-GO. Nous reprenons ici un extrait de leur intervention :

    « Mais des opposants à l’EI comme la Syrie et l’Iran sont laissés en dehors de ce partenariat, ce qui n’a pas de sens. Les questions régionales doivent avoir une solution régionale dans laquelle on discute avec toutes les parties. Ces solutions doivent permettre aux peuples de la région de recouvrer leur souveraineté. Nous proposons de mettre la pression sur la Turquie, membre de l’Otan, pour qu’elle ferme sa frontière avec la Syrie, et sur l’Arabie saoudite et le Qatar pour qu’ils cessent toute forme de soutien ou de financement aux groupes réactionnaires de la région.»

    Y a-t-il une bonne et une mauvaise intervention étrangère ?

    Puisque l’on parle d’ « intervention étrangère », la première et la plus importante en Syrie, complice donc des crimes contre l’humanité commis par le régime, est de loin celle de l’impérialisme russe et de l’Iran : leur support financier, politique, militaire et humain (notamment avec les milices chiites sectaires et les conseillers envoyés par l’Iran) à la contre-révolution d’Assad est incomparablement plus important que le soutien extrêmement limité des USA ou de la France à l’insurrection armée. Ce soutien explique les regains du régime après la percée de l’insurrection en 2012. A la différence des cas égyptien et tunisien, les alliés les plus proches d’Assad, Russie et Iran, ne pouvaient jusqu’ici se permettre de prendre le risque d’un changement de dirigeant en Syrie. Mais aujourd’hui, les appuis du régime syrien, Russie, Iran et Hezbollah à l’extérieur, et une partie importante des minorités alaouites et chrétiennes, s’affaiblissent et s’épuisent petit à petit en voyant qu’aucune solution durable n’est possible dans le pays avec le maintien de la clique Assad au pouvoir, qui est précisément le contraire de toute forme de souveraineté populaire et démocratique que nous devons défendre.

    Un « partenariat régional » avec des responsables de crimes contre l’humanité ?

    Les camarades élus sur les listes PTB-GO évoquent donc le nécessaire soutien de l’ONU, de l’Iran et de la Syrie dans ces frappes, ce qui laisse planer une autre sérieuse ambigüité : les bombardements deviendraient-ils légitimes dès lors qu’ils seraient approuvés légalement par les génocidaires locaux et Moscou (qui tient le rôle-veto au Conseil de sécurité sur ce dossier comme les USA le font pour Israël)? Si nous défendons l’émancipation des peuples, nous ne pouvons tomber dans un tel piège. Le problème c’est que la Syrie et l’Iran sont déjà partenaires de facto de la coalition menée par les USA. Chacun s’en défend mais de nombreux témoignages de diplomates de tous bords confirment que tous les acteurs étatiques prétendant lutter contre « le terrorisme » s’informent sur le terrain et évitent de s’attaquer entre eux. Ainsi, jusqu’à présent, la Syrie d’Assad s’est réjouie publiquement des bombardements aériens, qui l’ont épargnée, et auxquels elle a même supplié de pouvoir participer de manière plus ouverte et directe.

    La position de la Syrie (et de la Russie de Poutine l’ « antiterroriste ») ne peut nous surprendre après le soutien très actif des Assad à l’écrasement de la résistance palestinienne et libanaise dans les décennies précédentes, à la première guerre du Golfe, ou encore plus récemment au dispositif sécuritaire antiterroriste mis en place par les USA dans le monde entier après les attentats de 2001. Plus encore si on lui accordait un rôle officiel de partenaire, ce serait la consécration pour le régime de sa prophétie : « Assad ou les jihadistes », qu’il a tout fait pour rendre réelle en libérant des milliers de fondamentalistes des prisons du pays au début du soulèvement populaire en 2011, alors qu’il massacrait allégrement les civils, puis en épargnant systématiquement Daesh tout en lui achetant du pétrole, alors qu’il concentrait ses forces sur les zones libérées par l’opposition démocratique…la même opposition civile et armée (Armée syrienne libre) qui affronte Daesh depuis des mois, avec parfois du succès, ce qui explique pourquoi l’écrasante majorité des victimes de Daech faisaient partie de l’opposition à Assad. Daesh et le Front Al-Nusra (Al-Qaeda en Syrie) connaissent un certain succès à cause du sectarisme anti-sunnite qui sévit dans la région, et parce qu’ils disposent de moyens (finances, armes, nourriture et équipement) bien plus grands que les forces démocratiques de la région. De nombreux témoignages montrent que ceux qui ont quitté des brigades « modérées » pour ces deux organisations l’ont fait simplement pour…éviter d’être tués faute de moyens face au régime syrien et à ses alliés.

    L’alliance de fait avec Assad et le gouvernement irakien qui bombarde également les civils et utilise des milices sectaires qui commettent également des massacres ne va donc qu’aggraver les crispations sectaires. Or le sectarisme nourrit Daesh, mais il permet de perpétuer la politique du «diviser pour régner» menée par l’Occident depuis plus d’un siècle dans la région. Ces frappes de l’impérialisme sont déjà rejetées par de larges secteurs de l’insurrection armée, dans et hors de l’Armée Syrienne Libre.

    Nous voyons donc qu’un début de « partenariat régional » est non seulement déjà là a minima, mais allons plus loin : qui seraient les partenaires régionaux desquels devraient émerger une solution à la situation dramatique dans la région ? L’Irak à la solde de Téhéran et Washington ? Assad le meurtrier de masse ? Israël, dernière colonie de peuplement dans la région ? La Turquie de l’autoritaire Erdogan qui joue un rôle ambigu par rapport au jihadisme, mais dont les frontières ouvertes ont permis à 200.000 kurdes d’échapper à l’horreur fondamentaliste ? L’Egypte du maréchal Sisi ? Les pétromonarchies du Golfe ? Aucun « partenaire » de ce genre ne vaut autre chose qu’écraser ou contrôler toute forme de révolte populaire. Croire le contraire serait se bercer d’illusions dangereuses.

    Le mythe de l’aide des prétendus « amis de la Syrie »

    Toutes les magouilles et ingérences des soi-disant « amis de la Syrie », Washington et Paris en tête, ne visent qu’à laisser s’affaiblir la Syrie d’Assad ainsi que l’opposition, tout en laissant la population à la merci du régime et des fondamentalistes. La suite du scénario : trouver un compromis avec le régime et ses alliés pour une « transition à la yéménite », ou à l’irakienne préservant l’appareil d’Etat et sécuritaire du régime tout en changeant la tête de celui-ci. Bien qu’il y ait un intérêt israélien et US à affaiblir le régime des Assad, ils n’ont aucune envie de voir la révolution syrienne réussir et faire émerger une démocratie contrôlée par le peuple syrien. Encore moins avec des armes anti-aériennes qui pourraient être utilisées contre Israël (qui occupe le Golan depuis des décennies avec la bienveillance du régime syrien) ou les USA. Une telle victoire révolutionnaire, si elle ne réglerait pas tout, loin de là, pourrait donner un énorme souffle à tous les peuples de la région pour suivre cet exemple.

    Rappelons que les USA parlent d’entraîner 5000 insurgés « soigneusement choisis par la Washington », pendant un an… sur un total de près de 100.000 rebelles, et ce « en vue de combattre Daech ». Autrement dit, les USA veulent coopter pour de bon une partie de l’opposition et diviser celle-ci, pour que ces insurgés servent directement les intérêts impérialistes en Syrie sans combattre le régime. Et ce alors que le besoin criant d’armes anti-aériennes pour stopper les bombardements du régime syrien est rappelé ad nauseam depuis 3 ans par l’opposition démocratique, sans réaction des puissances impérialistes. Certes quelques rares brigades ont suivi un entraînement aidées par les faux-amis impérialistes, des équipements non-létaux et des armes légères ont été livrées à dose homéopathique pour éviter l’écrasement total de l’insurrection. Mais près de 4 ans après le début de la révolution, il est maintenant un fait incontestable qu’aucun prétendu « ami de la Syrie » n’avait de volonté sincère de donner au peuple syrien les moyens de renverser la dictature.

    Sortir des alternatives infernales, soutenir l’autodéfense populaire et démocratique

    Notre conclusion est donc que le vote des élus PTB-GO est un vote correct, même si les alternatives proposées par eux ne permettent en rien d’espérer l’avancée des forces progressistes et démocratiques et la fin des massacres. La guerre contre Daech et Al-Nusra a déjà augmenté la popularité de ces forces dans la région. Elle renforce un climat étouffant de paranoïa islamophobe et raciste dans le monde entier, qui profite à l’extrême-droite et aux classes dominantes en Europe, en pleine crise économique.

    Pour sortir de cette spirale mortelle, le rôle de la gauche radicale et anti-impérialiste est de réaffirmer notre soutien aux forces populaires, démocratiques et de gauche dans la région, aux structures d’auto-organisation qui n’ont toujours pas disparu en Syrie malgré le déchaînement contre-révolutionnaire. Nous devons nous opposer aux régimes en place et dénoncer le double discours et les mensonges de nos gouvernements impérialistes et leurs alliés qui n’ont que faire du sort de millions de syrien.ne.s et d’irakien.ne.s. Nous devons refuser le délire antiterroriste et réclamer que nos gouvernements retirent le Parti des travailleurs du Kurdistan de la liste des organisations « terroristes » alors qu’ils risquent leur vie face à Daech.

    Nous devons réclamer le droit d’asile pour tou.te.s les syrien.ne.s et un investissement massif dans l’aide humanitaire d’urgence pour les millions de réfugié.e.s et déplacé.e.s. Nous devons combattre toutes les lois liberticides « antiterroristes » et les lois racistes contre les musulman.e.s. Nous devons exprimer notre solidarité féministe avec les femmes de la région qui subissent l’oppression, la torture, le viol, l’assassinat tant des régimes prétendument « laïques » et leurs alliés que de groupes réactionnaires. Elles aussi jouent un rôle sur tous les terrains : dans l’aide aux personnes comme dans la lutte armée et la lutte politique. Nous devons exiger que l’impérialisme retire toute ses bases militaires de la région, que ce soit les bases américaines ou celle de la Russie à Tartous (Syrie). Nous devons tout faire pour imposer une paix juste et durable en Palestine, basée sur les droits humains et démocratiques de tou.te.s ses habitant.e.s, par un large mouvement de Boycott-Désinvestissement et Sanctions contre le régime sioniste. Nous devons condamner aussi fermement la barbarie génocidaire du régime syrien et du gouvernement irakien (et leurs alliés) que celle de Daech, des USA ou d’Israël.

    Enfin, nous devons réclamer que les forces démocratiques qui combattent en ce moment Daech sur le terrain, notamment les kurdes et l’Armée Syrienne Libre qui ont joint leurs forces, puissent bénéficier de tous les moyens (équipements, soins, nourriture, armement) nécessaires à leur auto-défense, et qu’elles puissent rester souveraines dans l’utilisation de ces moyens contre les régimes oppresseurs de la région.

    C’est la clé pour que puisse advenir une réelle souveraineté et une auto-détermination populaires par en bas, pour relancer la vague révolutionnaire dans la région et faire vaciller les équilibres impérialistes dans le monde entier.

    [1] Les membres du Parlement fédéral Raoul Hedebouw et Marco Van Hees expriment sur cette question la vision du PTB-PVDA. Cette question n’a jusqu’à présent pas été discutée dans le partenariat PTB-GO (Gauche d’ouverture). Les partenaires qui font partie de la Gauche d’ouverture (LCR, PC et des personnalités) n’ont pas été consultées sur le sujet.

    http://www.lcr-lagauche.org/declaration-de-la-lcr-a-propos-de-la-position-des-elus-ptb-go-sur-la-nouvelle-guerre-imperialiste-en-irak-et-en-syrie/

  • L'usine invisible de la révolution algérienne (La Brèche)

    http://www.la-breche.com/catalog/images/011.jpg

    "Mémoires d'un trotskiste grec"

    Dimitris Livieratos, chargé, pour le compte de la IVeme Internationale, de coordonner et de mener a bien l'installation d’usines d’armement pour le FLN au Maroc, raconte dans ce livre ses propres mémoires


    Ce livre nous offre la possibilite de lire de la plume d'un acteur - et étroit collaborateur de Michel Raptis (Pablo), dirigeant célèbre de la IVeme Internationale - la manière dont il a vécu les évenements.
    Il laisse, dans la description d’une revolution en marche, loin des recits héroiques et hagiographiques, une place au tragique, au doute, aux incertitudes.

    Il pose des questions essentielles sur la difficulte d’etablir de nouvelles relations humaines, de nouvelles relations dans le travail, qui ne détruisent pas l’individu au service de la cause.


    Il décrit le décalage entre la classe ouvrière algérienne, qui «vivait hors des frontieres», «s'était développée dans un cadre européen» à «Paris, Marseille, Lyon, Frankfort ou Cologne», et les «gens des djebels», qui peut contribuer a expliquer les difficultes de l'Algerie independante. Il décrit la grandeur et les difficultes de l'internationalisme.

    http://www.la-breche.com/catalog/product_info.php?products_id=3101&osCsid=75a86e5e0d1538b907bc17d8b519f0c4

  • Palestine. Traduire les exigences du peuple de la Palestine historique et des opprimé·e·s d’une région entière (Al'E)

    Ce 15 août 2014, au Caire, se poursuivent les négociations indirectes – sous la houlette des services de l’intelligence militaire du président, ex-maréchal, Abdel Fattah al-Sissi – entre la «délégation palestinienne» et «la délégation israélienne». Cette dernière est formée de membres des divers services de l’armée et de la «sécurité». Avec leurs collègues d’Egypte il n’y a donc pas besoin de traducteurs.

    Pour disposer d’un pâle reflet du rapport de force effectif et de ce que représente le sys- tème territoires-libérés-pour-être-mieux contrôlés (Gaza), il suffit d’avoir connaissance de deux éléments abordés lors de ces tractations. Ainsi, l’Etat d’Israël semble prêt à permettre le transfert d’une somme pour le paiement des 40 000 fonctionnaires du Hamas à Gaza. Paiement qui serait effec- tué par l’Autorité palestinienne (AP) de Mahmoud Abbas et par ceux qui la financent.

    Cette information – élémentaire – est offerte par le quotidien israélien Yedioth Ahronoth qui suit les transactions cairotes. Autre «concession» d’Israël: le nombre de camions transitant par le point de contrôle de Karam Abu Salem pourrait passer à 600 par jour. Reconstruction oblige. Mais seront encore précisées les modalités de surveillance de ces convois ainsi que de leur contenu. Cette vigilance ne doit pas faire obstacle à un business favorable à l’économie d’Israël et à l’AP, dont les membres sont amateurs de quelques «dons».

    Pendant ce temps, un pilonnage de Gaza, par Israël, reste possible. Cela dans la mesure où il faudrait «recadrer les négociations» selon les vœux du gouvernement israélien et de son «conseil de sécurité».

    Pour l’heure, laissons de côté ces négociations indirectes, le rôle attribué à un Mahmoud Abbas qu’il «faut renforcer», les déclarations des diverses fractions du gouvernement israélien, les multiples chantages diplomatiques face à des Etats-Unis moins triomphants, les frictions au sein de la «délégation palestinienne», le rôle de l’Egypte et de ses alliances, etc.

    En effet, conjointement aux pourparlers du Caire, se déroule une autre tragédie, d’une ampleur historique.

    L’International New York Times, du 15 août, l’a compris. En première, avec photographie à l’appui, il titre : «Syria rebellion teeters on defeat» (La rébellion syrienne bascule vers la défaite). Les forces du peuple insurgé de Syrie ont dû se battre – sans appui – contre la dictature de Bachar el-Assad et contre les criminels de l’Etat islamique (ex-Etat islamique en Irak et au Levant). Sur la chaîne israélienne I24News, ce 15 août 2014, à 16 h 50, dans une émission consacrée à «la défense», Alon Pinkas, ancien consul général d’Israël à New York, reconnaissait que l’Armée syrienne libre (ASL) n’avait pas été soutenue par les Etats-Unis et par Israël.

    Pour une raison dite évidente: ce «boucher, ce criminel» (selon les termes de Pinkas), Bachar el-Assad, assurait le plus de stabilité relative dans la région. Ce d’autant plus qu’il «était affaibli» et qu’il n’existe pas d’alternative plus favorable pour ceux qui ont des intérêts dans cette région tourmentée. Plus exactement une région torturée: 180 000 morts, des centaines de milliers de blessé·e·s, des traumatismes pour des centaines de milliers d’enfants, d’adolescents, d’adultes, des millions de «personnes déplacées» en Syrie et dans les pays voisins, des milliers et milliers de déte- nu·e·s torturé·e·s. Cette lugubre énumération doit être répétée de manière inlassable; entre autres en direction de ceux et celles qui se mobilisent, à juste titre, pour les droits du peuple palestinien, mais qui expriment, au mieux, un égarement d’ignorant, au pire, un fanatisme rappelant les adeptes du «culte de Mao», avant leur conversion! Une volte-face qui frappe souvent les dévots.

    Parallèlement, les prosélytes armés de l’Etat islamique viennent de prendre, ces derniers jours, le contrôle de huit localités situées au nord d’Alep. Cette ville historique de Syrie – peuplée aujourd’hui d’un maximum de 500’000 habitants alors qu’elle en comptait plus de 2 millions en 2009 – est bom- bardée quartier par quartier par l’armée de Bachar el-Assad. En Irak, des dizaines de milliers d’Ira- kiens – de diverses confessions – cherchent à survivre dans des régions montagneuses et désertiques et à trouver refuge dans des villes du Kurdistan irakien ou en Syrie. Sans ces refuges, ces milliers de fugitifs seront soumis aux plus insupportables supplices.

    Voilà l’arrière-plan complexe et dramatique sur lequel va se dérouler, le 23 août 2014, une manifestation nationale de soutien aux droits du peuple palestinien. Il est dès lors impératif de prendre en compte cette réalité d’ensemble, même de façon sommaire. Les réunions dites unitaires ne semblent pas traduire une telle exigence. L’appel dit unitaire va être publié. Dans le cadre d’échan- ges préparatoires à cette manifestation, des membres du Mouvement pour le socialisme/Bewegung für Sozialismus (MPS-BFS) – qui partagent les objectifs généraux de la campagne BDS (Boycott, désin- vestissement et sanctions) – ont proposé le texte ci-dessous, datant du 10 août 2014. Un texte qui se veut élémentaire. Le MPS-BFS fera connaître sa propre analyse et ses options pour la solidarité avec les opprimé·e·s et les exploité·e·s de la Palestine historique et de la région, lors de la manifestation du 23 août 2014 à Berne. (Rédaction A l’Encontre)

    Les bombardements sur Gaza doivent cesser !
    Le blocus de Gaza doit être levé !
    Halte à la colonisation de la Cisjordanie !
    Pour l’application de toutes les résolutions de l’ONU !
    Pas de collaboration entre les appareils militaro-industriels d’Israël et de Suisse !

    Depuis le 8 juillet 2014, la puissante machine de guerre israélienne pilonne Gaza. En réalité, depuis des décennies, il ne s’agit que d’une guerre, dont les phases sont de plus en plus meurtrières. Une guerre pour contrôler, harceler, emmurer, emprisonner, expulser les Palestiniens et les Palestiniennes. Et contraindre des centaines de milliers de réfugié·e·s à littéralement croupir dans des camps-ghettos au Liban, en Jordanie, en Syrie.

    Un terme doit être mis à cette guerre. Une tâche historique, difficile, mais décisive pour l’émancipation de tous les peuples. Cette tâche repose sur les épaules blessées du peuple palestinien et sur sa volonté inébranlable, malgré toutes ses souffrances. Elle repose de même sur le combat contre tous les pouvoirs autocratiques de la région, complices des divers impérialismes.

    En Europe comme en Suisse, toutes les formes de solidarité avec le peuple palestinien – et ses frères dans la région – participent de ce combat pour la libération nationale et contre un Etat colonialiste. Une solidarité décidée, continue, concrète – au-delà de sa modestie – relève d’un impératif éthique universel. Elle est reçue comme telle par les opprimé·e·s de la Palestine historique. Cette fraternité est aussi entendue par les Arabes israéliens.

    Une minorité, en Israël, qui s’oppose à la politique guerrière et colonisatrice du gouvernement, peut comprendre le sens d’actions solidaires pour les droits du peuple palestinien car elles renvoient à des principes intelligibles que le sionisme fondamentaliste n’a pu gommer. Cela peut ébrécher «l’unité nationale sioniste» qui se reconstruit à coups de guerres dites défensives.

    Face à ces guerres à répétition contre le peuple palestinien, le premier devoir de la solidarité consiste à diffuser les revendications centrales portées par la société civile palestinienne :

    • un peuple occupé et opprimé détient le droit de se défendre et de mettre fin à l’occupation et à la colonisation des terres reconnues internationalement comme les siennes ;

    • le démantèlement du mur de séparation ;

    • l’arrêt de l’édification de colonies et l’établissement d’un plan régional pour la dislocation de celles établies contrairement à la résolution 446 du Conseil de sécurité, du 22 mars 1979. Elle affirmait que «ces colonies de peuplement dans les territoires palestiniens et autres territoires arabes occupés depuis 1967 n’avaient aucune validité en droit et faisaient gravement obstacle à l’instauration d’une paix générale, juste et durable au Moyen-Orient» ;

    • la mise en place d’une initiative intergouvernementale afin d’assurer le droit de retour et l’indemnisation des réfugié·e·s, selon les termes de la résolution 194 de 1948 de l’ONU ;

    • l’interruption de l’occupation déguisée de Gaza par le biais du blocus et le rejet d’une mise sous mandat international de la bande de Gaza ;

    • la libération de tous les prisonniers politiques palestiniens, doublement emprisonnés par le pouvoir israélien ;

    • l’application stricte de tous les droits fondamentaux des citoyens et citoyennes arabes israéliens, ce qui implique la dissolution du système de ségrégation qui les vise.

    Un vaste mouvement de solidarité en Suisse – au-delà de sa configuration plurielle, normale – met l’accent sur :

    • l’arrêt de toute collaboration militaire et coopération en matière d’armement de la Suisse avec l’Etat d’Israël. Dans l’immédiat, l’achat de drones israéliens doit être révoqué ; dans cette optique peuvent être développés des objectifs de la campagne internationale BDS ;

    • la convocation par les autorités suisses, en qualité d’Etat dépositaire des Conventions de Genève, d’une conférence pour l’application du droit humanitaire ;

    • le soutien à des initiatives internationales assurant la constitution d’une enquête complète sur l’opération «Bordure protectrice», cela afin que toute plainte qui serait déposée devant la CPI par des représentants de la société civile palestinienne puisse développer ses effets aux plans juridiques et économiques ;

    • la reconnaissance du statut de réfugié politique aux Palestiniens visés par le pouvoir militaire et policier israélien, comme à toutes les personnes menacées de mort, de torture et de prison par les gouvernements autocratiques de la région et par les forces obscurantistes et criminelles de l’Etat islamique. (10 août 2014)

    Rédaction A l’Encontre Publié par Alencontre le 15 - août - 2014

    http://alencontre.org/moyenorient/irak/palestine-traduire-les-exigences-du-peuple-de-la-palestine-historique-et-des-opprime%C2%B7e%C2%B7s-dune-region-entiere.html

  • Nouveautés sur "International Viewpoint"( 4è Internationale)

  • Le problème palestinien et le conflit israélo-arabe (Manifeste Matzpen 1967)

    Le dix-neuvième anniversaire de la création de l'Etat d'Israël aura lieu ce mois-ci. Durant ces dix-neuf années le conflit israélo-arabe ne s'est pas rapproché d'une solution.

    Le problème palestinien demeure une plaie ouverte au sein du Moyen-Orient ; une source incessante d'effusions de sang, de souffrances et d'injustices ; un lourd fardeau pesant sur les ressources économiques de la région ; un prétexte pour l'intervention impérialiste et l'agression militaire ; une menace grave pour la paix mondiale.

    Mais ce qui est particulièrement grave, c'est la situation des Arabes palestiniens, les victimes directes de la guerre de 1948 et de la collusion entre « les frères-ennemis » : Ben Gourion et Abdallah. La majorité des Arabes de Palestine ont été dépossédés de leurs foyers et de leurs terres durant la guerre de 1948 et après celle-ci, et ils vivent depuis lors comme réfugiés, dans les souffrances et la détresse, à l'extérieur d'Israël.

    Les dirigeants israéliens refusent catégoriquement de reconnaître leur droit élémentaire au rapatriement. Les Arabes qui sont restés en Israël sont victimes d'une sévère oppression économique, civique et nationale.

    Durant ces dix-neuf années, Israël a été un îlot isolé au sein du Moyen-Orient, un état qui n'est indépendant qu'au sens formel du terme, vu sa dépendance économique et politique des puissances impérialistes, spécialement des Etats-Unis. Il a servi continuellement d'instrument de ces puissances contre la nation Arabe et contre les forces progressistes du monde arabe. Ce rôle de la politique officielle israélienne s'est manifesté le plus clairement (mais ce ne fut pas la seule occasion) en 1956, lorsque le gouvernement israélien s'est joint à l'impérialisme anglo-français dans une collusion agressive contre l'Egypte, fournissant même à ces puissances le prétexte d'une intervention militaire.

    L'état de guerre et l'hostilité entre Israël et ses voisins arabes s'est poursuivi depuis dix-neuf ans et les dirigeants sionistes d'Israël n'ont aucune perspective réelle de modifier cette situation. La politique israélienne est dans l'impasse.

    La crise économique actuelle en Israël, qui a entraîné un chômage important chez les ouvriers et qui soumet les masses populaires à une pénible épreuve, souligne le fait qu'Israël ne peut continuer à exister longtemps sous sa forme présente, en tant qu'Etat sioniste, coupé de la partie du monde où il se situe.

    Ainsi la situation actuelle est contraire aux intérêts des masses arabes : Israël, sous sa forme actuelle, constitue un obstacle important à la lutte de ces masses contre l'impérialisme et pour l'unité socialiste Arabe. Le maintien du statu quo est également contraire aux intérêts des masses israéliennes.

    L'Organisation Socialiste Israélienne dans les rangs de laquelle se trouvent des Arabes comme des Juifs, estime que le problème palestinien et le conflit israélo-arabe peuvent et doivent être résolus dans une direction socialiste et internationaliste, prenant en considération les aspects spécifiques de ce problème complexe. Ce n'est pas un conflit ordinaire entre deux nations.

    Par conséquent il ne suffit pas d'en appeler à une coexistence basée sur la reconnaissance mutuelle des droits nationaux des deux peuples.

    L'état d'Israël est la conséquence de la colonisation jusqu'au boutiste de la Palestine par le mouvement sioniste, aux dépens du peuple arabe et sous les auspices de l'impérialisme. Le présent état d'Israël, sioniste, est aussi un instrument de la poursuite du "projet sioniste". Le monde arabe ne peut approuver l'existence en son sein d'un Etat sioniste dont l'objectif déclaré est non pas de servir d'expression politique à sa propre population, mais de tête de pont, instrument politique et destination de l'immigration des juifs du monde entier. Le caractère sioniste d'Israël est également contraire aux véritables intérêts des masses israéliennes, parce qu'il signifie que le pays se trouve dans une dépendance constante de forces extérieures.

    Nous estimons, par conséquent, qu'une solution du problème requiert la désionisation d'Israël. L'Etat d'Israël doit subir une profonde transformation révolutionnaire, de sorte que cet état sioniste (c'est-à-dire état des Juifs du monde entier) devienne un état socialiste représentant les intérêts des masses qui y vivent. En particulier, la « loi du retour » (qui accorde à tout juif du monde le droit absolu et automatique d'immigrer en Israël et en devenir un citoyen), doit être abrogée. Chaque demande d'immigration en Israël sera jugée à ce moment séparément sur ses mérites propres, sans discrimination aucune de nature raciale ou religieuse.

    Le problème des réfugiés arabes de Palestine est l'aspect le plus douloureux du conflit israélo-arabe. Nous sommes donc d'avis que tout réfugié qui désire retourner en Israël doit être mis en mesure de le faire ; dans ce cas, il devrait obtenir un rétablissement intégral dans tous ses droits économiques et sociaux. Les réfugiés qui choisiraient librement de ne pas être rapatriés devraient être intégralement indemnisés pour la perte de propriété et les souffrances personnelles subies par eux.

    En outre, tous les lois et règlements ayant pour objet d'exercer une discrimination envers la population arabe d'Israël, de l'opprimer et d'exproprier ses terres doivent être abrogés. Toutes expropriations et tous dommages (relatifs à la terre, à la propriété et à la personne) causés sous couvert de ces lois et règlements doivent être intégralement dédommagés.

    La désionisation d'Israël implique également que soit mis fin à la politique étrangère sioniste, qui sert l'impérialisme. Israël doit prendre une part active à la lutte des arabes contre l'impérialisme et pour l'établissement d'une unité socialiste arabe.

    La colonisation sioniste de la Palestine se différencie de la colonisation d'autres pays sous un rapport essentiel : alors que dans d'autres pays les colons ont fondé leur économie sur l'exploitation du travail des autochtones, la colonisation de la Palestine a été réalisée par le remplacement et l'expulsion de la population indigène.

    Ce fait a engendré une complication extrême du problème palestinien. Comme résultat de la colonisation sioniste s'est formée en Palestine une nation hébraïque avec ses propres caractéristiques nationales (langue commune, économie séparée, etc.). Qui plus est, cette nation a une structure de classe capitaliste ; elle se divise en exploiteurs et exploités, bourgeoisie et prolétariat.

    L'argument que cette nation s'est formée artificiellement et aux dépens de la population arabe indigène ne change rien au fait que cette nation hébraïque est maintenant existante. Ce serait une erreur désastreuse que d'ignorer ce fait.

    La solution du problème palestinien doit non seulement réparer les torts faits aux arabes de Palestine, mais également garantir l'avenir national des masses hébraïques. Ces masses ont été amenées en Palestine par le sionisme, mais elles ne sont pas responsables des actions du sionisme. Tenter de punir les travailleurs et les masses populaires d'Israël pour les péchés du sionisme ne peut résoudre le problème palestinien, mais seulement mener à de nouveaux malheurs.

    Ceux des dirigeants nationalistes arabes qui en appellent au Jihad [guerre sainte] pour la libération de la Palestine ignorent le fait que, même si Israël était vaincu militairement et cessait d'exister en tant qu'Etat, la nation hébraïque existerait encore. Si le problème de l'existence de cette nation n'est pas résolu correctement, une situation de conflit national dangereux et prolongé sera à nouveau créée, ce qui causera une effusion de sang et des souffrances sans fin et servira de nouveau prétexte à l'intervention impérialiste. Ce n'est pas une coïncidence que les dirigeants qui préconisent pareille « solution » s'avèrent également incapables de résoudre le problème kurde.

    De plus, il faut comprendre que les masses israéliennes ne seront délivrées de l'influence du sionisme et ne lutteront contre lui qu'à la condition que les forces progressistes du monde arabe leur présentent une perspective de coexistence sans oppression nationale. L'Organisation Socialiste Israélienne estime par conséquent qu'une solution véritable du problème palestinien requiert la reconnaissance du droit de la nation hébraïque à l'autodétermination.

    Autodétermination ne signifie pas nécessairement séparation. Au contraire, nous sommes d'avis qu'un petit pays pauvre en ressources naturelles, tel qu'Israël, ne peut exister en tant qu'entité séparée. Une seule alternative s'offre à lui : ou bien continuer à dépendre des puissances étrangères, ou bien s'intégrer dans une union régionale.

    Il s'ensuit que la seule solution conforme aux intérêts des masses arabes, comme des masses israéliennes, est l'intégration d'Israël en tant qu'unité dans une union économique et politique du Moyen-Orient sur la base du socialisme. Dans un pareil cadre, la nation hébraïque sera à même de mener sa propre vie nationale et culturelle sans mettre en péril le monde arabe et sans que sa propre existence soit menacée par les arabes. Les forces des masses israéliennes se joindront à celles des masses arabes dans une lutte commune pour le progrès et la prospérité.

    Nous estimons, par conséquent, que le problème palestinien, de même que d'autres problèmes essentiels du Moyen-Orient, ne peut être résolu que dans le cadre d'une Union du Moyen-Orient. L'analyse théorique et l'expérience pratique montrent toutes deux que l'unité arabe ne peut se former et exister de manière stable seulement si elle a un caractère socialiste.

    On peut donc résumer la solution que nous proposons par la formule : désionisation d'Israël et intégration de celle-ci dans une Fédération Socialiste du Moyen-Orient. Nous sommes d'avis que le problème de l'avenir politique des Arabes palestiniens devrait également être résolu dans le cadre décrit ci-dessus.

    Certains estiment que la justice exige la création d'une entité politique spéciale des Arabes de Palestine. Notre opinion est que cette question doit être décidée par les Arabes palestiniens eux-mêmes, sans ingérence extérieure. Cependant, nous pensons que ce serait une grave erreur de poser le problème de l'avenir politique des arabes palestiniens séparément et indépendamment de la question de l'union socialiste arabe. Les arabes palestiniens sont à présent aux premiers rangs de la lutte pour l'unité. Si on devait leur présenter un objectif séparé et indépendant, la cause de l'unité arabe pourrait en subir de sérieux dommages. De même, la création d'un petit etat arabe séparé n'est pas conforme aux intérêts de la nation arabe, y compris du peuple arabe de Palestine.

    Par conséquent, nous sommes d'avis que si les arabes de Palestine se prononcent pour la création d'une entité politique propre, les dispositions politiques et territoriales nécessaires devraient être prises dans le cadre de la formation d'une Fédération socialiste du Moyen-Orient. Les pays qui détiennent actuellement des portions du territoire de la Palestine — Israël, la Jordanie, et l'Egypte — devraient contribuer en particulier à un tel règlement.

    Nous en appelons aux forces socialistes révolutionnaires des pays arabes et des autres pays, afin qu'elles prennent en considération le programme présent qui est le nôtre, et entament une large discussion en vue de mettre au point une position commune sur les problèmes du Moyen-Orient.  

    Organisation Socialiste Israélienne

    Matzpen (La Boussole) 18 mai 1967

    https://www.marxists.org/francais/4int/suqi/1967/05/manifeste_matzpen.htm

  • Thèses du groupe trotskyste palestinien (Marxists.org)

    (Anti-sionistes années 1970)

     

    1. La faiblesse de l'impérialisme britannique après la deuxième guerre mondiale, la consolidation de la bour­geoisie indigène dans quelques colonies importantes et le dévelop- pement de la classe ouvrière ainsi que l'inten­sification de sa lutte sociale et anti-impérialiste ont obligé la Grande-Bretagne à évacuer ses troupes de certaines colonies et à prévoir un réajus-tement de la défense de l'Empire. D'autre part, la bourgeoisie indi­gène est devenue un agent de la domination impéria­liste indirect plus digne de confiance du fait de la peur grandissante devant la classe ouvrière organisée qui est sortie plus forte que jamais de cette guerre. Particulière­ment dans les colonies - et semi-colonies et dans les régions coloniales où l'impérialisme américain a pénétré comme principale puissance économique, l'impéria­lisme britannique essaie d'assigner une partie des tâches de la défense de l'Empire et de la préparation de la prochaine guerre mondiale à l'impérialisme améri­cain. D'autre part, la Grande-Bretagne cherche à main­tenir autant d'influence économique et d'autorité sur la bourgeoisie indigène qu'il est possible de le faire. C'est ce qui se passe à présent dans le Moyen-Orient. D'une part, l'impérialisme britannique évacue une partie de ses troupes de Palestine et de l'Irak et laisse à l'ONU, c'est-à-dire à l'impérialisme américain, le soin de déci­der le sort de la Palestine et, d'autre part; il incite à la “ guerre sainte ” en Palestine afin de gagner de l'in­fluence politique sur le monde arabe et il s'efforce de s'allier aux États arabes, comme par le traité prévu avec l'Irak qui donnerait à l'impérialisme britannique le maxi­mum de pouvoir possible dans les conditions de domi­nation indirecte. L'antagonisme entre les impérialismes américain et britannique dans cette région se manifeste particulièrement dans la question de savoir de quelle façon chacun d'eux peut obtenir le maximum d'influence directe sur l'économie et la politique indigène tout en y envoyant le plus petit nombre de troupes. La décision de diviser la Palestine appuyée par le États-Unis, appa­remment en opposition à la Grande-Bretagne, a créé la situation suivante dans l'Orient arabe : la Grande-Bre­tagne a obtenu la possibilité de retirer une partie de ses troupes tout en renforçant son prestige dans le monde arabe ; l'Amérique, dont les intérêts pétroliers n'ont pas souffert d'une certaine perte de prestige à cause de liens économiques qui lient la bourgeoisie indigène à l'impérialisme yankee, y a gagné un agent direct, la bourgeoisie sioniste, qui, de ce fait, est devenu complè­tement dépendante du capital américain et de la poli­tique américaine. De plus, l'impérialisme américain a maintenant une justification pour intervenir militairement dans le Moyen-Orient chaque fois que cela lui convien­dra. Tous les deux ont créé une situation de chauvi­nisme grandissant dans laquelle il est devenu possible d'écraser la classe ouvrière arabe et tous les mouve­ments de gauche dans tout l'Orient arabe, et ceci est également dû à cause de l'appui russe au plan impéria­liste de division de la Palestine.
    2. Les féodaux arabes et la bourgeoisie du Moyen-Orient, représentés par la Ligue Arabe, voient dans la bourgeoisie sioniste un concurrent non seulement sur le marché des moyens de consommation du Moyen-Orient (en ce qui concerne l'Égypte) mais également sur le marché des agents impérialistes dans l'Orient arabe. Par sa guerre raciale contre les Juifs de Palestine, la Ligue Arabe veut limiter la zone d'activité des industries juives et prouver à l'impérialisme qu'elle est un facteur qui peut encore mieux le servir que le sionisme. En même temps, elle favorise l'impérialisme dans ses plans sur une grande échelle au Moyen-Orient et elle n'est que trop intéressée à suivre ses ordres en vue d'utiliser cette guerre chauvine pour aviver les sentiments anti­-russes et pour écraser brutalement la classe ouvrière arabe et tous les groupes de gauche. Elle voit dans l'épouvantail sioniste et dans le problème palestinien en général une trop belle occasion pour détourner l'atten­tion des masses opprimées des pays arabes de leurs problèmes sociaux et de l'exploitation impérialiste et indigène et pour exacerber les haines raciales contre les minorités et pour recruter des chômeurs pour “ Gihad ” en Palestine. Dans ces circonstances, l'anta­gonisme traditionnel entre les deux cliques de la Ligue Arabe - la famille Hachémite britannique d'une part et le bloc américain du roi du pétrole de l'Arabie, de l'Égypte et du régime actuel en Syrie d'autre part - se manifeste dans leur compétition pour l'intervention la plus extrême et la plus active en Palestine afin d'être sur place, d'y créer un fait accompli et de rassembler le butin dès qu'il sera nécessaire de se conformer aux décisions finales de l'impérialisme.
    3. Les féodaux arabes de Palestine, sachant que dans une telle guerre raciale ils sont les dirigeants naturels, veulent reconquérir de cette façon leur autorité sur la population arabe de Palestine, autorité qui avait été affaiblie par le développement, durant la guerre, de la jeune bourgeoisie des villes du littoral et par la crois­sance et l'organisation de la classe ouvrière arabe de Palestine. L'appui direct que l'impérialisme britannique a accordé à des dirigeants féodaux, contre tout autre facteur arabe (rapatriement des Husseinis, reconnais­sance du Haut Comité arabe imposé par lui-même, etc.) - tout cela parce que l'impérialisme anglais était inté­ressé à voir la direction arabe la plus réactionnaire et chauvine - a permis à ces féodaux d'imprégner, dès le début, leur propre caractère aux événements actuels. Alors que la révolte de 1936 avait commencé par une grève générale et s'était concentrée au début dans les villes, cette fois-ci le principal aspect de l'activité a été dès le début une action militaire de bandes de guérillas rurales. Alors qu'en 1936-1939 une grande partie des “ combats ” a été menée contre les troupes britan­niques (même si le but principal était dirigé contre les Juifs), cette fois-ci ce sont principalement les Juifs qui sont attaqués tandis que les fonctionnaires de l'impéria­lisme britannique ainsi que les officiers et les soldats sont traités amicalement ou tout au plus accusés de ne pas tenir la “ neutralité ” promise. C'est ainsi qu'ils ont réussi à créer une atmosphère de chauvinisme extrême dans laquelle une provocation peut entraîner un mas­sacre massif des ouvriers juifs comme dans les raffine­ries de Haïfa de la part des sections arriérées de leurs compagnons ouvriers arabes (quelques-uns des ouvriers arabes les plus avancés ne participèrent pas à cette action et d'autres sauvèrent les Juifs), et où il n'y a plus de lutte gréviste commune entre ouvriers juifs et arabes pour les mêmes revendications, mais au contraire où ces luttes sont menées séparément pour l'introduction de mesures de sécurité contre des attaques éventuelles. La séparation entre ouvriers arabes et juifs et la séparation entre la classe ouvrière arabe des villes les plus avancées et de leur hinterland - les pauvres des campagnes - (l'un des principaux buts de la division) sont accomplies par la prétendue lutte des dirigeants féodaux arabes contre la division. La bourgeoisie arabe, dans la mesure où elle existe - en Palestine en tant que classe indépendante (proprié­taires de plantations de citrons et éléments urbains des villes du littoral - les adeptes de Muss el Alami) veut l'ordre et la sécurité dans l'intérêt des affaires, mais sa garde nationale, au cours des attaques chauvines de masse, est de moins en moins importante en compa­raison des guérillas à direction féodale.
    4. Le sionisme qui semble être au zénith de ses succès diplomatiques, a réussi à aider l'impérialisme à créer une situation dans laquelle les masses juives doivent apprendre ce que veut dire être le bouc émissaire de l'impérialisme. La guerre civile actuelle, qui exacerbe à l'extrême le chauvinisme dans les masses juives est elle-même en partie la conséquence du chauvinisme sioniste qui a accompagné l'établissement d'une écono­mie juive fermée. Si l'impérialisme a réussi à détourner de lui le mécontentement des masses arabes dans le Moyen-Orient et à le diriger contre la population juive de Palestine, la conséquence inévitable de cette guerre sera la dépendance totale du sionisme envers l'impéria­lisme américain.
    5. Dans ces circonstances, le recul de l'influence des organisations ouvrières arabes est évident. Après être parvenues à devenir un facteur important dans la vie politique arabe, elles sont aujourd'hui presque paraly­sées. Nous ne pouvons pas non plus nous attendre à ce qu'elles regagnent cette position dans le proche avenir, et ce pour les raisons suivantes :
    6. Si, dans le passé, l'activité politique du parti révolu­tionnaire parmi les ouvriers juifs a été difficile à cause de la position privilégiée de ceux-ci dans l'économie fer­mée des Juifs, elle le sera d'autant plus aujourd'hui que cette position a été soutenue non seulement par l'impé­rialisme américain mais encore par la Russie. Le tour­nant des staliniens juifs devenus les adeptes les plus enthousiastes de la division de la Palestine et de la création de l'Etat juif, limite encore les points de contact qui auraient pu être utilisés par le parti révolutionnaire comme point de départ pour son activité parmi les ouvriers juifs. D'autre part, l'influence accrue de la réac­tion féodale arabe s'exprime par un chauvinisme accru du côté juif. Une certaine perspective de notre travail consiste dans la possibilité de gagner individuellement des staliniens qui sont demeurés fermement opposés à la division et qui peuvent par conséquent admettre la trahison de la Russie stalinienne.
      7 L'analyse précédente montre que dans le proche avenir (les prochains mois) on ne peut pas s'attendre à des actions sur une grande échelle de la part des ouvriers arabes, encore moins d'actions communes entre ouvriers arabes et juifs. Avant que ne se fasse sentir la lassitude provoquée par la détérioration de la situation économique et par l'effusion de sang et qui sera le point de départ d'une nouvelle montée révolu­tionnaire, il est très probable qu'il y aura un renforce­ment du chauvinisme et des massacres sur une grande échelle. Dans le proche avenir, notre travail sera limité essentiellement au maintien des liaisons entre les ca­marades arabes et juifs, à renforcer les cadres, particu­lièrement du côté arabe, comme base pour une activité révolutionnaire dans l'avenir. Nous devons expliquer patiemment aux couches les plus avancées du proléta­riat arabe et à l'intelligentsia que les actions militaires raciales ne font qu'agrandir le fossé entre les Juifs et les Arabes et conduisent ainsi pratiquement à la division politique ; que le facteur fondamental et que la cause principale de la division c'est l'impérialisme ; que les combats actuels ne font que renforcer i'impérialisme ; que grâce à la direction bourgeoise et féodale des pays arabes - qui est l'agent de l'impérialisme - nous avons été battus à une étape de la lutte anti-impérialiste et que nous devons nous préparer pour la victoire à une pro­chaine étape - c'est-à-dire pour l'unification de la Pales­tine et de l'Orient arabe en général - en créant la seule force qui puisse parvenir à ces buts : le parti prolétarien révolutionnaire unifié de l'Orient arabe. Notre succès dépendra en très grande partie de la consolidation, entre temps, des forces communistes révolutionnaires en Egypte
      1. La vague d'écrasement des organisations de gauche et de la classe ouvrière dans l'orient arabe est survenue avant que celles-ci soient suffisamment fortes pour se défendre et pour maintenir leur position. Si cela a été le cas dans les centres de la classe ouvrière arabe, parti­culièrement en Égypte, il n'y aucun doute que cela influence la classe ouvrière plus arriérée de Palestine.
      2. Dans le proche avenir, il faut s'attendre à un déclin numérique de la classe ouvrière arabe en Palestine, premièrement à cause de la diminution du travail pour l'armée et deuxièmement à cause des arrêts de travail causés par les événements. Le chômage parmi les ouvriers arabes ne menacera pas seulement les conquêtes limitées des dernières années, mais créera un terrain fertile au chauvinisme et favorisera le recrute­ment des bandes à direction féodale.
      3. Les staliniens arabes ont perdu une partie de leur influence politique et organisationnelle parce que les masses les considéraient comme les représentants de la Russie qui a trahi les masses arabes en favorisant la division de l'État juif.
      4. Le chauvinisme grandissant des ouvriers juifs, l'appui ouvert du partage par les sionistes de “gauche” y compris les staliniens juifs, sont également reflétés parmi les ouvriers arabes et constituent un autre facteur qui les jette dans les bras de la réaction féodale. D'autre part la composition sociale de la classe ouvrière arabe est aujourd'hui beaucoup plus progressive qu'elle ne l'était au début de la révolte de 1936-1939. Alors qu'à cette époque les ouvriers agricoles, les employés de commerce, etc. constituaient plus de la moitié de la classe ouvrière arabe, aujourd'hui près des trois quarts des ouvriers arabes sont employés sur les chantiers gouvernementaux, dans les compagnies pétrolières et autres établissements industriels. Après la période de réaction et de recul, le point de départ sera à un niveau plus élevé qu'en 1939.

    Haïfa, janvier 1948

    Source : "Quatrième Internationale" n° de juin-juillet 1948, "La Révolution prolétarienne" n°740

    https://www.marxists.org/francais/4int/postwar/1948/4int_19480100.htm

  • 1947, la partition de la Palestine (Marxist.org)

    Après que les "trois grands" soient arrivés à un accord concernant la partition de la Palestine, le vote aux Nations Unies n'était plus qu'une formalité.

    L'impérialisme britannique se retire du Proche-Orient vers une seconde ligne de défense comparable à ce qui a été mis en place avec la division de l'Inde. Au sein des deux Etats, le Juif et l'Arabe, la Grande-Bretagne préserve l'essentiel de ses positions économiques et financières. La Légion Arabe de l'hypo- thétique Etat arabe et la Haganah [1] opéreront en étroite concertation avec le ministère de la Guerre britannique, comme c'est le cas des armées hindoues et musulmanes en Inde.

    Et, comme en Inde, la partition s'est avérée le meilleur moyen de dévier vers un combat fratricide la lutte des masses arabes et la colère de la population laborieuse juive.

    Les manœuvres de l'impérialisme britannique ont été rendues nécessaires par la diminution de ses ressources. Elle oblige les impérialistes à baisser leurs "engagements internationaux" afin d'économiser à la fois dollars, force de travail et armement.

    Ceci est même présenté encore plus hypocritement dans le cas spécifique de la Palestine. En fait, la création d'un Etat arabe indépendant en Palestine est hautement improbable. C'est pourquoi le roi Abdallah de Transjordanie, l'agent n°1 de la City de Londres dans le monde arabe pourrait tout à fait réussir à intégrer l'est de la Palestine à son royaume et réaliser ainsi la première étape de la formation de l'empire de Grande Syrie, objectif final de sa dynastie et de la bourgeoisie britannique au Proche-Orient.

    Londres continuera à régner sans que cela ne coûte le moindre penny au contribuable anglais. Le seul peuple à en souffrir serait bien sur les palestiniens eux-mêmes.

    Pour l'impérialisme américain, comme pour la bureaucratie soviétique, l'acceptation de la partition signifie surtout la liquidation du mandat britannique et l'ouverture de la lutte pour hériter des positions abandonnées.

    Le Kremlin se félicite de l'ouverture d'une période de troubles au Proche-Orient, à l'occasion desquels il fera de son mieux pour affaiblir les positions anglaises et préparer sa propre pénétration, soit sous couvert d'une "Commission mixte de l'ONU" ou d'une "tutelle des Trois Grands" sur Jérusalem.

    L'impérialisme américain se trouve confronté en Palestine, comme auparavant en Grèce, au problème de trouver une solution de rechange à la tutelle impérialiste que les britanniques ne peu- vent plus assumer.

    Après l'évacuation des troupes anglaises, la Haganah sera la seule force militaire disposant d'un équipement moderne, une force étrangère au monde arabe et qui servira si besoin est, à com- battre une insurrection autochtone ou une menace russe sur les sources de pétrole.

    Nous ne devrions donc pas être surpris à partir de maintenant, si l'impérialisme américain, soit en formant une "Ligue juive" soit en en finançant une, tente d'avoir une influence prédominante sur la Haganah et d'en faire l'instrument de sa politique au Proche-Orient. Mais il demeure évident qu'un Etat juif, comme le mouvement sioniste qui l'a précédé, n'est considéré par les grandes puissances que comme un pion de leurs manœuvres au sein du monde arabe.

    Un tel Etat, loin de recevoir une "protection" ouverte et permanente de n'importe laquelle de ces puissances, demeurera toujours en position précaire et incertaine, et pour sa population s'ouvrira une période de privations, de terreur et de terrible tension, qui ne deviendra que plus aiguë à mesure que se développeront les forces luttant pour l'émancipation du monde arabe.

    La partition de la Palestine et le renversement clair des positions sionistes face à l'impérialisme britannique - y compris celles de la plupart des extrémistes -, ont porté un coup mortel à toutes les théories impressionnistes qui ont fleuri avec les bombes de l'Irgoun [2].

    La solidarité fondamentale de la Haganah et même de l'Irgoun avec l'impérialisme et contre les masses arabes a été démontrée de la façon la plus éclatante. Le caractère criminel du sionisme apparaît clairement dans le fait, que grâce à son rôle réactionnaire, les premiers mouvements des masses arabes en faveur d'une Palestine unie et indépendante sont dirigés contre la population juive et non directement contre l'impérialisme.

    Les très réactionnaires chefs du Comité arabe pour la Palestine ont ainsi l'occasion de redorer leur blason en versant le sang des malheureux juifs qui sont des victimes de la politique sioniste.

    Les dirigeants sionistes de par le monde ont fêté la proclamation de l'Etat miniature comme une grande victoire. Erreur misérable ! Le piège que constitue la Palestine pour les juifs, selon les mots de Trotsky, vient de se refermer.

    Sans changement radical de la situation mondiale et sans recul du sionisme parmi le mouvement ou- vrier juif de Palestine, l'extermination complète du peuple juif lors de l'éruption de la revolution arabe sera le prix payé par les juifs pour leur triste succès de Lake Success [3].

    Et, par une ironie amère de l'Histoire, l'établissement d'un Etat juif indépendant, qui, selon les brillants théoriciens sionistes, était censé éradiquer l'antisémitisme dans le monde a été salué par l'éruption d'une vague pogromiste sauvage à Aden et une nouvelle vague d'antisémitisme dans le monde.

    La position de la IV° Internationale vis-à-vis de la question palestinienne demeure aussi claire que dans le passé.

    Elle sera à l'avant-garde du combat contre la partition, pour une Palestine unie et indépendante, dans laquelle les masses détermineront souverainement leur destin par l'élection d'une Assemblée Consti- tuante. Contre les effendis et les agents impérialistes, contre les manœuvres des bourgeoisies égyp- tiennes et syriennes qui essaient de dévier la lutte pour l'émancipation des masses en lutte contre les juifs, elle appellera à la révolution rurale, à la lutte anti-capitaliste et anti-impérialiste, qui sont les moteurs essentiels de la révolution arabe.

    Mais elle ne peut mener ce combat avec une chance de succès qu'à condition qu'elle prenne position, sans équivoque, contre la partition du pays et l'établissement d'un Etat juif.

    Plus que jamais, il faut en même temps appeler les masses travailleuses d'Amérique, Grande-Bretagne, Canada et Australie, le peuple travailleur de chaque pays à lutter pour l'ouverture des frontières de leurs pays respectifs aux réfugiés, aux personnes déplacées, à tous les juifs désireux d'émigrer, sans discrimination.

    Ce n'est que si nous menons sérieusement, effectivement et avec succès ce combat que nous pourrons expliquer aux juifs pourquoi il ne faut pas aller dans le piège palestinien. L'expérience terrible qui attend les juifs dans l'Etat miniature crée en même temps les prémisses de la rupture de larges masses d'avec le sionisme criminel. Si une telle rupture n'a pas lieu à temps, l'"Etat juif" s'effondrera dans le sang.

    Source : Éditorial de  "Quatrième Internationale", Novembre-Décembre 1947.

    Notes

    [1] Organisation paramilitaire juive alors dirigée par le « travailliste » D. Ben Gourion.  Elle avait été fondée à l'époque du mandat britannique sur pour assurer la défense des colons juifs.

    [2] Organisation nationaliste juive, née en 1935 d'une scission de la Haganah, et dirigée après 1945 par M. Begin. L'Irgoun organisa l'immigration clandestine des juifs en Palestine et lutta par le terrorisme contre la présence britannique dans le pays et contre les populations palestiniennes.

    [3] Lake Success : localité près de New-York où fut négocié le statut de la Palestine par l'ONU en 1947.

    https://www.marxists.org/francais/4int/postwar/1947/11/4int_palestine_1947.htm

  • Syrie Résolution du Comité international de la Quatrième Internationale

     

    Le soulèvement en Syrie contre la dictature d'Assad, qui a débuté en mars 2011, est un mouvement pour les droits démocratiques, sociaux et économiques semblable à ceux qui ont éclaté en Tunisie et en Égypte à la fin 2010 et début 2011. Il fait partie des « soulèvements arabes ».

    Le soulèvement en Syrie est un processus révolutionnaire pour le changement politique, pour la démocratie, la justice sociale et contre le communautarisme religieux. Cette révolution politique a sans aucun doute une base de masse, comme le démontre le fait que le régime Assad n'a pas pu vaincre l'opposition militairement ou politiquement, après presque trois ans. Certaines régions du pays sont libérées de la mainmise du régime.

    La répression qu'a exercée le régime contre cette révolte est terrifiante. Presque trois ans plus tard, il y a plus de 130.000 morts, 4,5 millions de déplacés internes et 3 millions de réfugiés à l'extérieur (pour un pays de 24 millions d'habitants).

    Le contexte social et économique ressemble à ceux de la région : après 40 ans de pouvoir des Assad, c'est le chômage, la pauvreté et la corruption de masse. De grandes nationalisations ont eu lieu dans les années 1960 mais, depuis les années 1990, la libéralisation économique et les privatisations dominent, ce qui a amené une inégalité de richesses dramatique et un grand appauvrissement de la population. Au moment du soulèvement, la croissance et le développement avaient stagné, l'inflation avait grimpé à plus de 100 % par an, et le taux de chômage était probablement de 30 %. La moitié des chômeurs sont des jeunes instruits et qualifiés de moins de 24 ans qui aspirent à un avenir meilleur.

    Le régime répressif en Syrie dure depuis 1970, quand Hafez al-Assad a pris le pouvoir avec un coup d'État. Malgré ses prétentions laïcistes, le régime syrien a adopté le favoritisme communautaire, fondé sur les réseaux familiaux, pour consolider son règne.

    Depuis les années 1970, il a encouragé l'islam conservateur afin de renforcer sa propre légitimité, y compris en faisant de grandes contributions financières aux écoles islamiques. En 1973, après les protestations de quelques personnalités religieuses sunnites, Hafez al-Assad a présenté un amendement à la nouvelle Constitution, qui déclarait que « la religion du président est l'islam ». Cet article a été maintenu dans la « nouvelle » Constitution adoptée par le régime actuel en mars 2012, en y ajoutant une nouvelle clause : « La jurisprudence islamique est source de toute législation ». Bachar al-Assad a maintenu cette orientation, menant une collaboration accrue avec des associations religieuses en même temps qu'il accélérait les politiques néo-libérales. Ces mesures ont été accompagnées par la censure, la promotion de la littérature religieuse et l'islamisation de l'enseignement supérieur.

    Le régime a exercé une forte pression sur la communauté alaouite, poussant beaucoup des jeunes les plus pauvres vers l'armée. Le régime a essayé d'éliminer les voix discordantes au sein de la communauté alaouite, et de la transformer en secte politique liée à son clan, mais il n'y est pas parvenu. Car globalement la communauté alaouite n'a bénéficié d'aucune politique économique spécifique la favorisant. La montagne alaouite est la deuxième région la plus pauvre après celle du nord-est majoritairement kurde. La région et la communauté alaouites ont souffert tout comme d'autres dans le pays de la libéralisation économique, de la fin des subventions et de l'inflation élevée.

    Le régime syrien utilise le communautarisme de façon consciente et délibérée, en particulier par la sélection de la garde prétorienne de l'appareil répressif autour d'Assad.

    L'occupation impérialiste de l'Irak ainsi que la rivalité entre l'Arabie saoudite et l'Iran ont également contribué au développement de l'intégrisme religieux dans la région, tout comme l'absence de soutien à la révolution en Syrie de la part d'un pan important du mouvement antiguerre à l'échelle internationale.

    Bien qu'il se qualifie lui-même de « socialiste », nationaliste et non-aligné, le régime Assad est un allié utile pour l'impérialisme. Il a maintenu une coexistence pacifique avec Israël, réprimé les Palestiniens (il est entré au Liban en 1976 pour participer à l'écrasement de l'OLP) ; en 1990, il a participé à la guerre du Golfe menée par les États-Unis contre Saddam Hussein, et a permis aux États-Unis d'utiliser ses prisons pour la torture dans le cadre de la guerre anti-terroriste.

    L'impérialisme est prêt à abandonner Assad devant le soulèvement, mais il cherche désespérément à maintenir l'infrastructure du régime et de l'État. Les États-Unis ont appris de la catastrophe en Irak où, malgré une victoire militaire, les États-Unis et le Royaume-Uni ont été incapables d'atteindre leurs objectifs politiques. Maintenant, l'impérialisme recherche une solution « yéménite », où la figure de proue du régime s'en va, mais le régime lui-même reste, ce qui signifie essayer de forcer l'opposition à accepter un partage des pouvoirs avec le parti Baas syrien. La pire crainte de l'impérialisme est la victoire de l'insurrection populaire contre Assad, ce qui donnerait un nouveau souffle aux soulèvements arabes qui ont marqué un temps d'arrêt en Égypte, en Tunisie et ailleurs. Cette peur se reflète dans la légitimation du régime Assad par l'accord négocié par la Russie pour retirer et détruire les armes chimiques tout en faisant semblant de ne pas voir les autres armes tout aussi destructrices – et en même temps cet accord a miné l'insurrection. Les pourparlers de paix constituent également une tentative de diviser l'opposition et de forcer un partage de pouvoirs entre le FSA/SNC et le régime syrien pour lutter contre le « terrorisme ».

    Avec l'Iran, la Russie est le soutien principal d'Assad, fournissant les armes nécessaires pour infliger une défaite à l'opposition. La seule base navale de la Russie en Méditerranée est en Syrie, et elle a besoin d'alliés dans la région en mesure de soutenir ses intérêts géostratégiques. Le peuple syrien doit avoir le droit de déterminer son avenir, libre de toute intervention étrangère, et pas seulement celle de l'impérialisme étatsunien et britannique mais aussi celle de l'impérialisme russe.

    La nature politique des forces qui s'opposent au régime est extrêmement diverse et contradictoire. Il y a un élément de gauche, progressiste et démocratique, petit mais significatif, organisé surtout par le biais des comités de coordination locaux, et qui connaît une croissance modeste.

    Les forces islamistes, soutenues par différentes forces externes (surtout le Qatar et le royaume saoudien) sont en guerre entre eux – militairement et politiquement. Un des développements les plus positifs de ces derniers mois a été la résistance d'une grande partie de la population à ces forces islamistes.

    Les femmes ont joué un rôle significatif dans le soulèvement, y compris sur la ligne de front, contre les forces intégristes qui cherchent à restreindre les droits des femmes encore plus.

    Par contre, les islamistes intégristes sont beaucoup plus forts maintenant qu'au début de la guerre. Ils ont reçu des fonds et ressources des États du Golfe, ce qui a accru leur avantage militaire, et ils peuvent ainsi attirer des volontaires.

    Malgré ses déclarations hypocrites en soutien à l'opposition, l'impérialisme étatsunien a empêché la fourniture au Conseil national syrien des armes nécessaires qu'il a réclamées pour se défendre contre l'armée d'Assad.

    Le conflit en Syrie pose un dilemme idéologique à l'impérialisme. La guerre contre le terrorisme est le ciment idéologique dont il se sert pour construire un soutien populaire à ses interventions en Irak et en Afghanistan, et imposer une démocratie avec approbation occidentale pour remplacer les tyrans locaux déloyaux. Ce dilemme renforce l'intention de l'impérialisme d'avoir une solution « yéménite » au conflit. Il ne veut donc pas que le conflit dépasse certaines limites. Une victoire de l'opposition, et la chute du régime Assad, serait un autre coup contre l'impérialisme et donnerait l'espoir à des millions de gens que le processus révolutionnaire des soulèvements arabes n'est pas achevé.

    Même s'il se prétend atterré par les crimes d'Assad, l'impérialisme agit pour décourager l'aide humanitaire et le soutien militaire au peuple syrien révolté.

    Le silence n'est pas possible face aux crimes du régime Assad, et nous ne pouvons pas être neutres dans ce conflit. Nous devons argumenter fermement contre ceux de la gauche qui ont adopté une attitude « campiste » à l'égard du régime Assad. Pour les marxistes révolutionnaires, le choix est clair : la solidarité avec le peuple syrien dans sa lutte pour la démocratie, la justice sociale et contre le communautarisme religieux, jusqu'à la chute d'Assad.

    En tant que marxistes révolutionnaires, nous soutenons :

    1. Assad dehors ! Solidarité avec le soulèvement, notamment avec l'ensemble des forces progressistes, laïques et démocratiques.

    2. Le droit du peuple syrien de lutter pour ses droits démocratiques et pour la justice sociale et économique. Solidarité avec les femmes syriennes qui se battent pour leurs droits.

    3. L'opposition à toute intervention militaire étrangère, que ce soit des pays impérialistes occidentaux, de la Russie, des puissances régionales ou du Hezbollah.

    4. Le droit du peuple syrien de déterminer l'avenir de son pays, libre de toute intervention étrangère.

    5. Le droit du peuple syrien de prendre les armes contre Assad, et de les obtenir là où il le veut.

    6. Pour les droits civiques, politiques et sociaux du peuple kurde.

    7. La nécessité d'un programme massif et immédiat d'aide humanitaire aux réfugiés.

    8. L'ouverture des frontières européennes pour héberger et assister les réfugiés, où qu'ils veuillent aller.

    9. La défense des droits démocratiques en Europe et l'opposition aux attaques contre les droits civiques au nom de la « guerre contre le terrorisme ». Aucune criminalisation de ceux qui luttent contre Assad.

    10. La condamnation de toute attaque aveugle contre la population civile et la poursuite judiciaire de tous ceux qui sont impliqués dans des crimes de guerre.

    Nous devons créer des campagnes de solidarité avec les opposants à Assad qui luttent pour la démocratie. La base de telles campagnes est une décision tactique selon les circonstances locales et les forces politiques présentes. Nous devrons agir pour qu'un mouvement large, incluant les syndicats, le mouvement pour la paix et les campagnes anti-guerre, vienne au secours du peuple syrien. ■

    * Cette résolution a été adoptée par le Comité international de la IVe Internationale le 25 février 2014 à la quasi-unanimité des présents (1 contre et 2 abstentions).

    Synthèse

    Lire aussi:

    https://www.opendemocracy.net/arab-awakening/joseph-daher/roots-and-grassroots-of-syrian-revolution-part-1-of-4

    https://dl.dropboxusercontent.com/u/66541942/inprecor/1626.html