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Solidarité - Page 105

  • A Gaza, le blocus se renforce et les prix s’envolent (Afps)

    Les prix flambent à Gaza.

    Les Gazaouis subis­saient déjà le blocus israélien. Dans les décombres de la guerre, ils font désormais les frais de la zone-​​tampon créée par l’Egypte le long de la fron­tière avec l’enclave palestinienne.

    Avant, Jihad Ahmed payait son paquet de ciga­rettes 10 shekels, soit deux euros. Aujourd’hui, le prix en a qua­siment triplé : 28 shekels ! Ce Gazaoui de 18 ans en est réduit à acheter ses ciga­rettes au détail. Trois shekels pour trois ciga­rettes qu’il fumera avec par­ci­monie tant son budget est maigre.

    Imed Chalbiya, qui lui tend ses ciga­rettes, explique la hausse des prix par le chantier en cours du côté égyptien de la fron­tière, au sud de la bande de Gaza. Les Egyp­tiens construisent un glacis pour contrer la menace d’attentats jiha­distes qui se mul­ti­plient car ils soup­çonnent des acti­vistes pales­ti­niens de prêter main forte à leurs auteurs. Les tunnels qui reliaient Gaza et l’Egypte "ont été fermés et, d’un coup, la réserve de ciga­rettes à Gaza a fondu, faisant monter en flèche les prix", dit Imed Chalbiya à l’AFP. En plus, "les pro­prié­taires des rares tunnels encore en fonc­tion­nement exigent 650 euros pour le transport de chaque carton de cin­quante car­touches de ciga­rettes". Les mêmes causes pro­duisent les mêmes effets sur les pro­duits de pre­mière nécessité ou l’électronique.

    Fini, le fromage égyptien

    Ter­ri­toire exigu et sur­peuplé coincé entre Israël, l’Egypte et la Médi­ter­ranée, la bande de Gaza est depuis 2006 étouffée par un strict blocus israélien. La seule bouffée d’oxygène venait des tunnels de contre­bande d’où se déver­saient toutes sortes de pro­duits venus d’Egypte. Après la des­ti­tution du pré­sident isla­miste Mohamed Morsi en juillet 2013, le nouveau pouvoir égyptien a radi­ca­lement changé de poli­tique à l’égard des 1,8 million de voisins gazaouis, détruisant 1.600 tunnels et coupant quasi-​​totalement leurs voies d’approvisionnement.

    La guerre de juillet-​​août déclenchée par Israël, l’ampleur de la dévas­tation et des besoins et la rareté des mar­chan­dises fai­saient déjà redouter aux habi­tants de Gaza une envolée des prix. Mais le ren­for­cement du blocus égyptien alourdit les fac­tures. "On vendait du fromage égyptien pour 10 ou 11 shekels, raconte Abou Mohammed, qui possède un petit super­marché à l’ouest de la ville de Gaza. Il est à plus de 23 shekels main­tenant. Je n’en vends plus. Plus per­sonne ne l’achète à ce prix".

    Dans son magasin d’électronique, Mohammed Safi abonde : "L’iPhone 5 coûtait 2.200 shekels. Main­tenant, c’est 2.600".

    La bande de Gaza est plus que jamais un marché captif pour Israël. Hanine Youssef, 27 ans, achetait "seulement des pro­duits égyp­tiens, ils étaient moins chers et je ne voulais pas sou­tenir l’économie israé­lienne". A présent, "il n’y a plus le choix : les seuls pro­duits dis­po­nibles sont israéliens".

    Situation "catastrophique"

    Quand les tunnels fonc­tion­naient à plein régime, les maté­riaux de construction repré­sen­taient un business de plus d’un mil­liard d’euros par an, selon Ayman Abed, du ministère de l’Economie. Sans ciment ni gra­viers, ce sont 35.000 Gazaouis qui se sont retrouvés au chômage - fléau qui touche désormais 63% des jeunes - alors que des dizaines de mil­liers de maisons ont été détruites ou endom­magées par la der­nière guerre, dit-​​il.

    Les maté­riaux de recons­truction rentrent par char­ge­ments limités, en raison de l’inquiétude d’Israël qu’ils ne soient détournés contre lui. Dis­tribués via l’agence de l’ONU pour l’aide aux réfugiés pales­ti­niens (UNRWA), les sacs de 50 kilos de ciment sont revendus aux par­ti­cu­liers 5,5 euros pièce, mais 42 sur le marché noir. "A l’époque des tunnels, la tonne de ciment se vendait 380 shekels (80 euros). Main­tenant, elle est à 3.800 shekels au marché noir", affirme Souheil Touman, qui vend des maté­riaux de construction.

    A Gaza, où selon l’ONG Oxfam 80% de la popu­lation vit de l’aide huma­ni­taire, les prix étaient tra­di­tion­nel­lement bien moins élevés qu’en Cis­jor­danie occupée a for­tiori à Jéru­salem. Aujourd’hui, les étals gazaouis pro­posent "des pro­duits d’exportation israé­liens, au prix initial plus élevé, et aux­quels ont été ajoutées de fortes taxes" imposées à leur entrée dans l’enclave, dit l’économiste Amr Chaabane. Pour lui, "la situation éco­no­mique est lit­té­ra­lement catas­tro­phique. Elle n’a jamais été aussi mau­vaise à Gaza depuis des décennies".

    OLJ/​AFP, dimanche 30 novembre 2014

    http://www.france-palestine.org/A-Gaza-le-blocus-se-renforce-et

  • Nouveautés sur AFPS

     

  • RECONNAISSANCE DE LA PALESTINE ? OUI, MAIS PAS SANS SANCTIONS EFFICACES CONTRE ISRAEL ! (UJFP)

    An Israeli border police officer fires tear gas towards Palestinian stone-throwers

    Aujourd’hui l’actualité est marquée notamment par une mobilisation médiatique sur la question de la reconnaissance de la Palestine.


    Cette reconnaissance, tous les amis de la Palestine soutiennent son principe.


    Elle ne peut que contribuer à un plus grand isolement de l’Etat d’Israël, et la Palestine deviendrait alors non plus un « territoire occupé » mais un Etat occupé.


    Mais pousser à la reconnaissance de la Palestine sans créer un rapport de force qui impose des sanctions efficaces contre Israël ne peut que contribuer à préserver le statu quo, à soutenir ou cautionner de fait la continuation du blocus de Gaza, la politique de colonisation de la Cisjordanie, de judaïsation de Jérusalem et d’exclusion des Palestiniens d’Israël, lesquels sont traités comme des sous-citoyens chez eux.

    Souvenons-nous.


    L’Avis émis en juillet 2004 par la Cour Internationale de Justice contre le Mur et le régime qui lui est associé est resté sans en effet, ce qui a conduit un an plus tard au lancement par plus de 170 associations de la société civile palestinienne de la Campagne BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions), à l’image de la campagne qui avait contribué à mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud.

    Autre exemple : faute de sanctions contre Israël, la reconnaissance de la Palestine par l’UNESCO n’a pas empêché Israël d’imposer la floraison de « parcs nationaux » israéliens en territoire occupé, le contrôle de hauts lieux patrimoniaux palestiniens comme par exemple à Hébron, et les provocations actuelles sur l’Esplanade des Mosquées.

    Sans sanctions, la reconnaissance purement de principe de la Palestine peut aboutir à des conséquences catastrophiques : Israël peut en prendre prétexte pour considérer que la question des réfugiés ne la concerne plus et pour estimer que les Palestiniens d’Israël peuvent ne plus être considérés comme citoyens de ce pays.


    Un Etat virtuel désarmé composé de bantoustans contrôlés par la puissance sur-armée qu’est Israël : cette perspective est un risque réel.


    Elle serait le prolongement du projet de loi que le gouvernement Netanyahou veut présenter à la Knesset (parlement israélien) et qui consisterait à faire d’Israël « l’Etat-nation du peuple juif ». Les ambiguïtés de la formule « Etat juif et démocratique » ne suffisaient pas : là ce serait encore plus clair !

    Les sanctions qui s’imposent sont connues :


    - la poursuite des criminels de guerre israéliens par la Cour Pénale Internationale, ce qui d’ailleurs aurait déjà pu se produire même si la Palestine restait simplement « Etat observateur » à l’ONU
    - la rupture de l’Accord d’association (tarifs douaniers préférentiels) entre l’Union européenne et Israël
    - l’embargo sur tout commerce d’armes avec Israël
    - la poursuite du mouvement citoyen BDS.

    L’UJFP participe aux rassemblements pour la reconnaissance de la Palestine, mais tient à souligner que cette reconnaissance n’aura pas une portée réelle sans sanctions énergiques contre l’Etat d’Israël jusqu’à ce que les droits des Palestiniens soient réalisés : fin du blocus de Gaza, fin de l’occupation, de la colonisation, démantèlement du Mur d’apartheid, égalité des droits des Palestiniens d’Israël, droit au retour des réfugiés.

    L’élargissement de la campagne BDS, qui remporte des succès importants, est un moyen de pression citoyen particulièrement crucial face à Israël et à ses alliés ou complices. Elle construit un rapport de force pour mettre fin aux violations constantes du droit international par un Etat voyou qui cherche à écraser la résistance du peuple autochtone palestinien.

    Le bureau national de l’UJFP, le 26 novembre 2014

    http://www.ujfp.org/spip.php?article3662

  • A quoi servira la reconnaissance par la France de la Palestine ? (Ujfp)

    Ne nous y trompons pas.

    Les récentes « fuites » sur d’éventuelles sanctions contre Israël — organisées par Israël lui-même à travers les Etats membres de l’Union européenne qui le soutiennent inconditionnellement — ne sont que de la poudre aux yeux.

    Il s’agit d’un simple projet que les pays membres n’ont pas vraiment discuté et qui n’a, dans le contexte actuel, aucune chance d’être appliqué. Quant à la reconnaissance de l’Etat de Palestine, elle perd beaucoup de sa signification si elle ne s’accompagne pas de mesures coercitives contre la partie qui refuse la paix depuis longtemps, le gouvernement israélien.

     

    A plusieurs reprises, le ministre des affaires étrangères français Laurent Fabius a déclaré que, le moment venu, Paris reconnaîtrait l’Etat palestinien.

    Ces déclarations se sont faites plus insistantes après que le Parlement britannique a voté une résolution (symbolique) en ce sens et que le gouvernement suédois a officiellement reconnu la Palestine. Selon Libération du 8 novembre, M. Fabius affirme : il y aura « à un moment — c’est une évidence — reconnaissance de l’Etat palestinien par la France », avant d’expliquer : « La question, c’est quand et comment ? Car il faut que cette reconnaissance soit utile aux efforts pour sortir de l’impasse et contribuer à un règlement définitif du conflit. » « Jusqu’à présent l’idée qui a prévalu, c’est que la reconnaissance devait être liée à la négociation. Mais si la négociation ne se produit pas, ou si elle n’aboutit pas, alors la France doit prendre ses responsabilités », a-t-il ajouté. Combien de temps faudra-t-il à Paris pour comprendre que la négociation n’a aucune chance d’aboutir dans le cadre actuel ?

    Le moins que l’on puisse dire, c’est que la France ne fait pas preuve d’un très grand courage.

    Rappelons que ces déclarations sur la reconnaissance de l’Etat palestinien ont d’abord été formulées durant la récente agression israélienne contre Gaza, quand Paris essayait de faire oublier les propos honteux du président François Hollande.

    Il est vrai que les crimes commis à Gaza par l’armée israélienne et la situation intolérable de ce territoire ont poussé les parlements à travers l’Europe à mettre sur la table cette question de la reconnaissance.

    Dans quelques jours, l’Assemblée nationale (le 28 novembre) et le Sénat (le 11 décembre) examineront une résolution peu contraignante en ce sens. Bien sûr, personne ne peut le regretter (même s’il faudra examiner le contenu des textes adoptés). Et si la France reconnaît officiellement l’Etat palestinien, on ne pourra que s’en réjouir, mais modérément. L’acte aura pour conséquence de confirmer la présence de la Palestine sur la carte politique et diplomatique. Mais au-delà ? Même en supposant que la solution à deux Etats soit encore possible malgré la colonisation, la question est de savoir si la reconnaissance la rend plus proche. Or, elle ne met un coup d’arrêt ni à l’extension des colonies, ni à la judaïsation de Jérusalem, tandis que les Palestiniens subissent une répression quotidienne. Et que dire de la situation à Gaza, où la reconstruction est bloquée par le siège israélien, auquel l’Egypte du maréchal Sissi apporte sa contribution ?

    Dans les conclusions de sa réunion du 17 novembre, le Conseil des affaires étrangères de Bruxelles, malgré un ton un peu plus ferme à l’égard d’Israël, renvoie les deux parties dos à dos et, surtout, n’envisage aucune mesure alors même que le blocus de Gaza par Israël (soutenu par l’Egypte) se poursuit et que le texte attribue à Israël toutes les décisions hostiles à la paix [1], il ne prend aucune mesure et renvoie les parties dos à dos. Lire aussi « Pourquoi les négociations au Proche-Orient échouent toujours », Le Monde diplomatique, juin 2014Et il salue encore une fois les « efforts » du secrétaire d’Etat américain John Kerry, qui a pourtant un bilan déplorable, dû largement au fait que, loin d’être un intermédiaire équitable entre les deux parties, il partage pour l’essentiel la vision israélienne de la « sécurité » et de la « paix ». Et si les conclusions du Conseil stipulent qu’il ne doit pas y avoir de retour au statu quo et que le blocus de Gaza doit être levé, le mécanisme d’entrée des matériaux dans Gaza négocié par l’ONU, et mentionné comme « un pas important », n’est en définitive ni plus ni moins qu’un retour à ce statu quo — sachant que l’entrée des matériaux pour les projets de l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) et de l’aide internationale humanitaire était déjà possible.

    Les révélations des projets européens de sanctions par le quotidien Haaretz, le 17 novembre (Barak Ravid, « Haaretz obtains full document of EU-proposed sanctions against Israel »), auraient pu faire naître certains espoirs. Des mesures y sont proposées qui vont jusqu’à demander aux compagnies européennes de ne pas travailler dans les colonies (il est étrange que ces investissements, totalement illégaux du point de vue du droit international, soient encore autorisés !), le boycott des figures israélienne hostiles à la solution à deux Etats (mais il faudrait dans ce cas boycotter le gouvernement israélien lui-même...), etc.

    Or, contrairement à ce que laisse supposer l’article de Haaretz, écrit par un journaliste connu pour ses excellents contacts avec les services de renseignement israéliens, ce texte ne reflète que la volonté de quelques Etats (Suède, Irlande, Pays-Bas, Autriche) et n’a été rédigé que par une poignée de personnes. Il n’a aucune chance de passer les différents groupes de travail au sein du Conseil européen (et donc d’être avalisé par les instances décisionnelles de l’Union européenne, comme le Conseil des affaires étrangères). Mais sa divulgation (à travers les alliés européens d’Israël — République tchèque et Allemagne —, sans doute) sert surtout à la propagande de Tel-Aviv, qui ne va pas manquer de dénoncer l’« antisémitisme européen », ce qui obligera, une fois de plus, l’Europe à se coucher.
    Par Alain Gresh

     

    [1« Actions which call into question stated commitments to a negotiated solution must be avoided. The EU deeply deplores and strongly opposes the recent expropriation of land near Bethlehem, recent announcements of plans for new settlement construction, in particular in Givat Hamatos, Ramat Shlomo, Har Homa and Ramot, as well as plans to displace Bedouins in the West Bank and the continued demolitions, including of EU and Member States funded projects. It urges Israel to reverse these decisions which run counter to international law and directly threaten the two state solution. Recent settlement activity in East Jerusalem seriously jeopardizes the possibility of Jerusalem serving as the future capital of both states. Recalling that settlements are illegal under international law, the EU and its Member States remain committed to ensure continued, full and effective implementation of existing EU legislation and bilateral arrangements applicable to settlement products. The EU closely monitors the situation and its broader implications and remains ready to take further action in order to protect the viability of the two state solution. »

     

     
  • Face aux provocations du gouvernement israélien, reconnaître la Palestine et sanctionner enfin l’occupant ! (Ujfp)

    L’OAS est au pouvoir en Israël et le rouleau compresseur colonial s’emballe. Nétanyahou, Lieberman et Bennet estiment que la situation régionale et l’absence de sanctions internationales leur laissent les mains libres pour consolider le fait accompli.

     

    Jérusalem

    C’est à Jérusalem que nos apprentis sorciers allument le feu. Quand l’armée israélienne a conquis Jérusalem Est en 1967, il y avait eu consensus pour que la mosquée al-Aqsa reste un des lieux saints de l’islam et que les Juifs ne viennent pas prier sur l’esplanade des mosquées. Pourtant, depuis des années, les provocations se multiplient : des tunnels sont construits sous le « Mont du Temple » et des sectes intégristes menacent de détruire les mosquées pour y « reconstruire » le « Temple de Salomon » (temple présumé, à cette époque, Jérusalem n’était qu’un village de l’Âge de Fer). C’est sur l’esplanade des mosquées qu’Ariel Sharon a fait, le 28 septembre 2000, la provocation qui l’a conduit au pouvoir et qui a déclanché la « deuxième Intifada ».

    Aujourd’hui la police protège les sectes intégristes et on parle de transformer une moitié de la mosquée en synagogue comme cela s’est déjà fait avec le Caveau des Patriarches à Hébron. Si un jour, Nétanyahou « cède » à ces intégristes, le Proche-Orient sera à feu et à sang et il sera bien difficile de rappeler que cette guerre est avant tout une guerre coloniale et pas un choc religieux.

    Dans le reste de Jérusalem, chaque jour, de nouvelles constructions de colonies ou d’appartements sont annoncées. Dans les quartiers palestiniens de Sheikh Jarrah et Silwan, des colons protégés par la police occupent des appartements et rendent la vie impossible aux autochtones. Tout cela au nom de la Bible : le légendaire roi David aurait vécu à Silwan.

    C’est contre la judaïsation à marche forcée de Jérusalem que la ville s’embrase. Les attentats suicides traduisent la colère et le désarroi d’une population palestinienne abandonnée et progressivement marginalisée. De façon symbolique, l’attentat contre la synagogue de Har Nof a eu lieu dans un quartier situé sur l’ancien territoire de Deir Yassin, le village palestinien où toute la population a été massacrée en avril 1948 par les milices terroristes de l’Irgoun et du Lehi.

    Gaza, la cage

    Les médias ne parlent plus de Gaza, on n’y meurt plus comme cet été. Pourtant tout est fait pour que Gaza explose à nouveau. Le blocus est impitoyable, tant du côté israélien que du côté égyptien. Les entrées et sorties du territoire se font au compte-goutte. Des milliers d’habitantEs de Gaza sont bloquéEs en Égypte sans pouvoir rentrer chez eux/elles. La pénurie et l’étouffement sont tels à Gaza que tout le monde s’attend à un nouvel embrasement alors que des centaines de milliers de personnes ont dû quitter définitivement leurs appartements détruits. La jeune afghane Malala, Prix Nobel de la Paix, a décidé de faire don du montant du prix des « Enfants du Monde » à la reconstruction des écoles à Gaza. Reconstruction qui attendra : seul le ciment israélien parvient, en quantité très insuffisante, à Gaza.

    La fuite en avant

    Le gouvernement Nétanyahou attaque de tous les côtés. Dans le désert du Néguev, les expulsions s’amplifient contre la population Bédouine (pourtant de nationalité israélienne) et le village d’al-Araqib a subi une nouvelle destruction.

    Par 14 voix contre 5, le cabinet israélien a décidé de faire d’Israël « l’État-nation du peuple juif ». Autrement dit, les 6 millions de Palestinien-ne-s qui vivent entre Méditerranée et Jourdain deviennent officiellement des sous-citoyenNEs et les 60% de Juifs/ves qui vivent hors d’Israël se voient signifier qu’ils/elles sont des touristes n’ayant pas compris qu’Israël est leur mère patrie.

    Il faut noter que Tzipi Livni et Yair Lapid ont voté contre, ce qui traduit les premières fractures dans l’extrême droite israélienne.

    De même un des principaux partis religieux de la coalition au pouvoir, le Shas (environ 10% des voix), désapprouve clairement l’attaque menée contre l’esplanade des mosquées.

    Fragilisé, le gouvernement Nétanyahou lance sa propagande, toujours aussi peu imaginative : la reconnaissance de l’État de Palestine serait un « acte antisémite » !

    Un État oui, mais pas hors sol.

    Bien sûr, une reconnaissance de l’État de Palestine par la France et par tous les pays de l’Union Européenne serait vécue en Palestine comme une grande victoire, comme une reconnaissance des droits et de la dignité du peuple palestinien. Elle mettrait incontestablement en difficulté Israël transformé ainsi, juridiquement, en un État colonial occupant le territoire d’un autre pays. Elle donnerait à cet État palestinien des armes juridiques dans les instances internationales. Elle mettrait en exergue « l’illégalité » de l’occupation des territoires conquis en 1967. Elle donnerait aux PalestinienNEs une citoyenneté dont ils/elles sont de fait privéEs. Elle permettrait à l’État palestinien de porter plainte contre Israël devant la justice internationale pour les crimes de guerre, crimes contre l’humanité et incitation au génocide commis.

    Interrogeons-nous : qu’est-ce qui est en train d’être reconnu par les pays européens ?
    Les initiateurs/trices de la « reconnaissance » demandent des « négociations » alors que toutes celles qui ont eu lieu et qui ont été soutenues par l’Union Européenne étaient des demandes de capitulation des PalestinienNEs sur leurs revendications.
    Pour l’instant, la Palestine serait un État hors-sol, un territoire non-viable, un bantoustan constitué de cantons éclatés.

    La question des sanctions

    Il est illusoire de penser qu’à froid et sans sanctions, la « communauté internationale » puisse changer le cours des choses. Il y a le précédent du jugement de la Cour Internationale de Justice de la Haye (9 juillet 2004) condamnant Israël pour la construction du mur (de l’apartheid) en Cisjordanie. À l’époque, ce mur mesurait 250 Km, il en fait 3 fois plus aujourd’hui. Israël a bafoué cette décision défavorable comme ce pays en a bafoué des dizaines.

    En 120 ans d’existence, le sionisme a toujours fonctionné de la même manière : on crée le fait accompli puis on le consolide, on le légalise et on poursuit le rouleau compresseur colonial. Deux fois dans son existence, l’Erat d’Israël a été (très légèrement) sanctionné : en 1957 sur l’évacuation du Sinaï et en 1991 sur l’ouverture de négociations. Les deux fois, ce pays très mondialisé, qui dépend totalement de ses échanges avec l’Occident et de l’aide américaine, a cédé instantanément.

    La Suède vient de reconnaître la Palestine. En même temps, elle maintient sa coopération militaire avec Israël et ne s’oppose pas à l’accord qui permet aux produits israéliens (même ceux des colonies) d’inonder les marchés européens. Ça ne crée aucune véritable pression sur Nétanyahou.

    La reconnaissance de l’Etat palestinien doit donc impérativement s’accompagner de sanctions. Et elle doit s’accompagner d’un véritable changement de la politique européenne. Jusqu’à présent, les dirigeants européens sont complices de l’occupant à l’image du gouvernement français qui refuse de libérer le militant du FPLP Georges Ibrahim Abdallah, en prison depuis plus de 30 ans pour un crime imaginaire.

    Un agenda dépassé

    À l’occasion de la bataille sur la reconnaissance de la Palestine, on voit ressurgir la revendication « d’un État palestinien » sur l’ensemble des territoires conquis par Israël en 1967 ayant Jérusalem-Est comme capitale et vivant en paix avec Israël. Charles Enderlin lui-même vient d’expliquer que ce n’est plus possible et la quasi-totalité des internationaux qui vont en Palestine le disent depuis longtemps. La majorité des Palestiniens n’y croit pas ou ne le souhaite pas. Plus de 10% de la population juive israélienne (650000 personnes) vit au-delà de la ligne verte (la frontière internationalement reconnue). 40% des militaires (professionnelLEs ou conscritEs) sont des colons. Les n°2 et 3 du gouvernement sont des colons. Évacuer les colons coûterait 30% du PIB israélien.

    Bien sûr l’État unique est pour l’instant également utopique.

    Il faut comprendre que le projet historique du sionisme (un État juif homogène) est loin d’être réalisé et que la situation est ouverte.

    Il serait navrant que la reconnaissance de l’État de Palestine fasse apparaître comme unique revendication la solution à deux États. Cela solution est irréaliste et elle n’est ni juste, ni souhaitable. Elle abandonne les Palestiniens d’Israël et les réfugiés, entérinant l’apartheid israélien et la fragmentation de la Palestine. Elle fait croire que l’Autorité Palestinienne est la seule représentante du peuple palestinien, ce qui est manifestement inexact.

    Le BDS

    La voie diplomatique toute seule ne changera pas le rapport de forces. C’est la capacité de résistance des PalestinienNEs et l’ampleur du soutien international qui seront déterminants et qui auront des conséquences diplomatiques.

    La campagne mondiale BDS multiplie les succès. Les pressions pour empêcher la publicité pour Téva se multiplient. Orange est interpellé par ses syndicats pour sa participation à la téléphonie mobile dans les territoires occupés.

    La campagne BDS a provoqué l’écroulement de l’action « Sodastream ». Cette firme envisage de déménager son usine depuis la colonie de Maale Adoumim vers le Néguev (là où on expulse les Bédouins, ce qui est tout aussi immoral). En Californie, les dockers ont refusé à plusieurs reprises de débarquer des cargos de la compagnie israélienne Zim. L’image d’Israël est sérieusement atteinte. Cette campagne doit s’amplifier et accompagner la reconnaissance de l’État de Palestine.

    Pierre Stambul (25 novembre 2014)

    Article de Pierre Stambul à paraître dans la revue "Emancipation"

    http://www.ujfp.org/spip.php?article3664

  • Les Palestiniens exigent de l’ONU l’arrêt de sa complicité dans le siège de Gaza (Agence Médias Palestine)

     

    « Ne récompensez pas Israël pour le massacre de Gaza ».

    C’est le message que les Palestiniens demandent aux peuples du monde de transmettre aux autorités des Nations Unies pour qu’elles cessent d’être complices du siège israélien de Gaza qui continue.

    Cet appel intervient alors qu’il est de plus en plus clair que le soi-disant Mécanisme de Reconstruction de Gaza négocié entre Israël et l’ONU a échoué.

    La fermeture du territoire, qui abrite près d’1,8 millions de Palestiniens, imposée en 2007, est restée aussi stricte que jamais en dépit de promesses de 5,4 milliards de dollars pour l‘aide à la reconstruction à la suite de l’attaque israélienne de l’été qui a tué plus de 2 200 personnes et laissé Gaza presque totalement dévasté.

    La complicité de l’ONU et des entreprises criminelles

    Alerte par mail du BNC (comité national du boycott) aujourd’hui : « il est temps que l’ONU se rende compte de l’ampleur de l’indignation au moment où des précisions se font jour sur la complicité de l’ONU dans le maintien de Gaza en état de siège et sur la façon dont les entreprises israéliennes vont profiter de la reconstruction de Gaza »

    Le BNC, le groupe dirigeant de la campagne palestinienne de boycott, désinvestissement, sanctions, a prévenu que « les entreprises qui sont prêtes à empocher des profits par la fourniture de matériaux de reconstruction sont des entreprises criminelles ».

    Cela comprend des entreprises telles que les cimentiers Nesher & ReadyMix qui « pillent les ressources naturelles palestiniennes et participent à la constructions des colonies illégales » a déclaré le BNC.

    Pas de reconstruction

    En Octobre, l’Intifada électronique a révélé les détails du Mécanisme de Reconstruction de Gaza, négocié avec Israël par Robert Serry, le coordinateur spécial de l’ONU pour le Processus de Paix au Moyen Orient (UNSCO).

    L’Intifada électronique a révélé que l’arrangement secret met effectivement l’ONU en position d’autorité sur la poursuite du siège de Gaza.

    Sous couvert de la reconstruction, l’ONU pilote et rassemble des informations précises d’ordre privé sur les familles palestiniennes à prendre en charge par Israël qui a un droit de veto sur le choix des familles qui peuvent obtenir de l’aide pour la reconstruction de leur maison.

    Et, en dépit des promesses selon lesquelles l’accord permettrait au moins aux Palestiniens devenus sans abri à cause des bombardements israéliens de reconstruire rapidement, le mécanisme ne marche pas.

    Les 28 camions de ciment entrés aujourd’hui à Gaza ne sont que la deuxième livraison de matériaux de construction pour le secteur privé depuis l’assaut de l’été, selon l’agence de presse Ma’an News.

    C’est une petite goutte d’eau dans le seau, qui suit une précédente livraison, petite également, de 75 camions il y a plus d’un mois.

    L’ONU estime que plus de 100 000 maisons ont été endommagées ou détruites dans les attaques israéliennes, ce qui a touché plus de 600 000 personnes – un tiers de la population de Gaza.

    Raes Fattuh, un responsable de l’autorité palestinienne basée à Gaza, a dit à l’agence Ma’an que les livraisons ont été interrompues par Israël depuis octobre.

    Le coup de sifflet de l’UNWRA

    Même l’UNWRA, l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens, qui a au départ accueilli avec précaution le Mécanisme de reconstruction de Gaza, y va maintenant de son coup de sifflet.

    Pierre Kräkenbuhl, commissaire général de l’UNWRA, a dit la semaine dernière que « malgré de premiers résultats, le processus de reconstruction s’avère beaucoup trop lent et particulièrement inefficace ».

    « Si cela continue, nous arriverons à l’hiver sans progrès dans la reconstruction des maisons de ceux, nombreux, qui sont encore déplacés, dont ceux qui se trouvent encore dans les écoles de l’UNWRA. Les habitants de Gaza méritent plus et mieux que cela » a-t-il ajouté.

    La patate chaude

    L’accord négocié par Serry pour l’ONU a nourri la colère parmi les Palestiniens et le trouble dans les organisations internationales d’aide. Mais ces dernières ont largement échoué à se faire entendre.

    Au cour des dernières semaines, les grandes organisations d’aide ont gardé le silence sur la critique du Mécanisme de Reconstruction de Gaza.

    Par exemple, Oxfam, l’une des plus grosses ONG d’aide qui travaillent dans les territoires occupés de Cisjordanie et à Gaza, a, à plusieurs reprises, décliné les demandes de commentaires consistants de la part de l’Intifada électronique sur le Mécanisme de Reconstruction de Gaza.

    Un représentant d’Oxfam a donné une réponse dans ces termes : « nous n’estimons pas être les mieux placés pour donner des commentaires sur le mécanisme ».

    « Pour des informations plus précises » a-t-il ajouté, « nous suggérons de contacter AIDA ou UNSCO qui ont négocié l’accord ».

    Mais lorsque l‘Intifada électronique a contacté AIDA, l’association des agences de développement international basée à Jérusalem occupée, il lui a été dit qu’AIDA n’est qu’un organe de coordination qui n’a pas à faire de commentaires. La suggestion était de s’adresser à ses membres, dont Oxfam fait partie.

    Joint par téléphone, Nick O’Reagan, directeur régional de l’UNOPS, le bureau de l’ONU pour les services d’appui aux projets qui est le responsable opérationnel pour le plan de Gaza, s’est refusé à parler de ce sujet avec l’Intifada électronique.

    Il semble que les agences d’aide rivalisent dans l’art de se passer la patate chaude et sont – pour quelle raison ? – réticentes à critiquer l’échec d’un mécanisme qui a été facturé par l’ONU comme étant le salut pour les victimes palestiniennes du dernier spasme de violence d’Israël.

    L’ONU reconnaît des défaillances

    Nicole Ganz, porte-parole de l’UNSCO, a refusé de s’exprimer directement sur les critiques du BNC mais a orienté l’Intifada électronique vers les deux déclarations précédentes de Robert Serry ce mois-ci.

    Dans une déclaration du 21 novembre, Serry a reconnu – bien que de façon allusive – l’échec de son mécanisme à relancer la reconstruction à Gaza.

    Serry a aussi annoncé que l’ONU, Israël et les services de Ramallah de l’Autorité palestinienne, étaient arrivés à une « meilleure compréhension » en vue de commencer à débloquer le flux de matériaux de construction.

    C’est ce qui a sans doute abouti à la petite livraison de ciment d’aujourd’hui, mais même Fattuh de l’AP a dit à l’agence de presse Ma’an qu’il ne savait absolument pas si cette livraison n’était pas faite une fois pour toutes.

    Serry a aussi déclaré que « des précautions spéciales ont été prises pour éviter l’utilisation abusive de renseignements personnels sur ceux qui souhaitent accéder au mécanisme ». C’est une réponse vague à l’indignation palestinienne face à la possibilité pour Israël d’utiliser des informations obtenues via l’établissement par l’ONU des besoins sur des familles palestiniennes dans le but d’opposer son veto sur qui obtient de l’aide.

    Le manque de transparence de l’ONU sur le mécanisme signifie qu’il est impossible d’évaluer les allégations de Serry sur les « précautions ».

    Mais Serry a aussi admis que les « ressources existantes » ne suffisent pas et a exhorté les États donateurs à « mettre à disposition d’urgence » les fonds sur lesquels ils s’étaient préalablement engagés.

    Ce responsable de l’ONU a également fait appel « à toutes les parties concernées à apporter leur plein soutien pour rendre le mécanisme opérationnel à l’échelle nécessaire » – suggérant ainsi qu’on en est loin.

    Serry continue à présenter l’ONU comme simple soutien de l’Autorité palestinienne dans la mise en place d’un accord dont l’AP serait responsable en dernière analyse. Mais en réalité, c’est Serry lui-même qui a négocié et promu le Mécanisme de Reconstruction de Gaza ; c’est pourquoi la colère palestinienne est dirigée de façon croissante contre l’ONU.

    Serry dit qu’il « continue à croire que s’il est mis en œuvre de bonne foi, (le Mécanisme de Reconstruction de Gaza) serait un pas en avant vers la possibilité de lever les fermetures qui demeurent ».

    C’est une croyance que peu de Palestiniens partagent. Nombre d’entre eux croient plutôt, avec le désespoir croissant à Gaza tandis que la température hivernale baisse, que l’ONU aide Israël à donner une couverture internationale à son siège et aussi bien à en tirer des profits.

    Agir maintenant

    Le message du BNC est que les Palestiniens de Gaza ne peuvent plus attendre et qu’ils ne vont certainement pas compter sur la « bonne foi » d’Israël.

    Le BNC propose, sur son site internet, un formulaire simple permettant d’envoyer des messages aux plus hauts responsables de l’ONU, Serry compris.

    « Agissez tout de suite en envoyant un message aux responsables clef de l’ONU, les pressant d’empêcher Israël de tirer profit de la destruction de Gaza et d’adopter une politique d’achats excluant les entreprises criminelles des appels d’offres pour la reconstruction de Gaza » c’est la demande du BNC.

    Le BNC en appelle aussi aux Européens pour qu’ils exigent la suspension de l’accord d’association UE-Israël, l’accord de libre-échange qui permet à Israël l’accès aux marchés et aux financements européens.

    Traduction SF pour l’Agence Media Palestine

    Par Ali Abunimah, mardi 25 novembre 2014

    http://www.agencemediapalestine.fr/blog/2014/11/27/les-palestiniens-exigent-de-lonu-larret-de-sa-complicite-dans-le-siege-de-gaza/

    Source: Electronic Intifada

  • “Faire passer l’apartheid par la porte de derrière”, par Naaman Hirschfeld (Agence Médias Palestine)

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    Les conditions sont remplies pour que l’apartheid racial qu’Israël a graduellement imposé sur les territoires depuis 1967 se montre au grand jour.

    Le 5 novembre 2014, Naftali Bennet a publié un article d’opinion intitulé « Pour Israël, deux États, ce n’est pas la solution » dans le New York Times, affirmant qu’ « Israël ne peut pas se retirer de plus de territoire et qu’il ne peut pas autoriser la création d’un État palestinien en Cisjordanie ». À la place, selon Bennet, Israël doit contrôler toute la Cisjordanie, en créant des fragments d’une Autonomie palestinienne améliorée, à qui il « manquera un État », qui ne sera pas autorisée « à contrôler ses propres frontières ni… à avoir une armée. » Même si en Israël, cette publication est passée relativement inaperçue, elle fut un acte capital, où commence à se lever publiquement le masque de la solution unilatérale israélienne ; où s’étale au grand jour un système d’apartheid qui a évolué pendant une longue période, mais qui l’a fait en incrémentant et d’une manière qui a permis à ceux au pouvoir de nier sa réalité.

    En Afrique du Sud, l’apartheid a été publiquement visible dès son début, en tant qu’idéologie officielle de l’État, à la base de sa législation, de sa politique et de son action. En Israël par contre, l’apartheid a été développé d’une manière qui a masqué sa nature, utilisant l’imposition de la loi martiale et du contrôle militaire sur la population palestinienne, pour créer une séparation géo-sociale et physique entre Israéliens et Palestiniens, tout en facilitant simultanément la saisie et la colonisation de la terre palestinienne.

    Pour la plupart des Israéliens, comme pour de nombreux observateurs internationaux, cet apartheid est invisible, et cela parce que le premier et principal but de ce système est de réduire la présence palestinienne à l’intérieur de l’espace israélien – géographiquement, socialement, juridiquement, économiquement et culturellement. Ses répercussions sont, de par leur nature, presque transparentes en Israël : elles se produisent ailleurs : en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, dans des zones à l’intérieur desquelles la plupart des Israéliens ne s’aventurent jamais et où, en fait, ils ne sont pas souvent autorisés à pénétrer. Les colons israéliens qui habitent dans ces zones, que ce soit par engagement idéologique ou sur incitations économiques du gouvernement, de même que les forces militaires, le personnel gouvernemental, les organisations à but non lucratif, et les firmes commerciales qui y opèrent, tous sont en train, activement et agressivement, d’imposer cet apartheid comme une « réalité sur le terrain ».

    C’est effectivement la caractéristique propre à cet apartheid : plutôt que d’être une idéologie fondatrice de l’État, c’est un appareil qui apparemment lui est extérieur – un système de facto d’oppression et de ségrégation qui est totalement non exprimé dans une rhétorique officielle et dans presque tous les médias israéliens. Bien que cet apartheid se soit développé et ait été structuré par la politique de pratiquement tous les gouvernements israéliens depuis 1967, il se manifeste principalement dans la praxis. Ceci permet aux citoyens, et pareillement aux politiciens, de nier son existence (même pour eux-mêmes). Après tout, aucun gouvernement israélien n’a jamais affirmé publiquement avoir opté pour un « apartheid », et le système qui le fait exister est décousu, composé de nombreux éléments différents qui agissent à l’unisson mais pas sous l’égide d’une directive officielle d’une quelconque entité, ou du gouvernement.

    C’est maintenant en train de changer. Deux jours après que Bennet eut publié son article, le gouvernement approuvait un projet de loi qui étend le droit civil israélien automatiquement aux colonies (les colons sont déjà soumis au droit civil) et ainsi, il étend officiellement la compétence civile de l’État sur la Cisjordanie, laquelle, en tant que territoire occupé, est actuellement régie par la loi martiale. Parallèlement à cette action de territorialisation, qui vise à abolir la distinction entre occupé et non occupé, les bases démocratiques et laïques de l’État se trouvent menacées par la « loi fondamentale pour un État-nation juif », que le Premier ministre Netanyahu a juré de faire passer le plus tôt possible.

    La première clause de cette loi stipule : « a) L’État d’Israël est le foyer national du peuple juif dans lequel celui-ci réalise son aspiration à une autodétermination conformément à son patrimoine culturel et historique ; b) La réalisation de son auto-détermination nationale dans l’État d’Israël est un droit exclusif du peuple juif ; c) La Terre d’Israël est la patrie historique du peuple juif et le lieu de l’établissement de l’État d’Israël ». Elle affirme en outre l’importance de « la tradition juive en tant que source d’inspiration » dans la législation, elle rétrograde la langue arabe de langue officielle à langue de second ordre, et elle fixe les « bases de la liberté, de la justice et de la paix envisagées par les prophètes d’Israël » comme une caractéristique déterminante de l’État à côté de la démocratie.

    Éradication des Palestiniens

    Si ce projet devient loi, celle-ci obligera la Cour suprême à accorder dans ses décisions jurisprudentielles plus de poids à l’élément juif qu’à l’élément démocratique dans tous les cas où il y aura conflit entre les deux, en réduisant le pouvoir judiciaire et en supprimant les principaux contrôles et équilibres qui ont efficacement empêché la promulgation d’un apartheid de droit à travers des actions législatives et exécutives. La partialité contre les Palestiniens citoyens d’Israël serait ainsi exacerbée radicalement (Palestiniens désignés par euphémisme en Israël sous le nom d’ « Arabes israéliens »), tout en introduisant le déni de la revendication des Palestiniens à une patrie et de leur droit à l’autodétermination dans le fondement juridique de l’État d’Israël lui-même ; en insérant l’éradication de la Palestine et des Palestiniens dans la législation du pays, tout en rendant possible d’étendre l’État sur l’ensemble du territoire de la terre d’Israël/Palestine.

    Il y a peu d’espoir pour ceux qui souhaitent bloquer ce processus. Le discours politique en Israël est si puissamment contrôlé par le droit, que ce gouvernement – qui est le plus à droite de l’histoire israélienne – est souvent critiqué, publiquement, pour être de gauche. Même si la coalition au pouvoir devait s’effondrer, ce qui semble vraiment possible, le nouveau gouvernement serait, très probablement, encore plus à la droite extrême, avec les deux prétendants réels à la fonction de Premier ministre, Netanyahu et Bennet.

    Bien que la montée de l’extrême droite en Israël soit restée en gestation pendant de nombreuses années, un développement qui s’est notablement accéléré depuis l’Opération Plomb durci, l’année passée a vu un glissement à droite de la politique israélienne et de la société dans son ensemble. Ce ne fut pas simplement le résultat d’évènements qui s’étaient produits, ni de conditions qui avaient mûri, mais plutôt celui d’actions intentionnelles visant à introduire cette réalité même.

    Si l’initiative israélienne pour mettre fin aux négociations de paix en avril fut importante, elle fut surtout symbolique car, dès le départ, ces négociations furent une imposture. La politique de colonisation qui a été initiée par le premier gouvernement Netanyahu (1996-99), et poursuivie depuis, a rendu la solution à deux États non viable. Le seul examen de la répartition géographique des colonies fait comprendre de manière tout à fait claire que sans l’évacuation forcée d’un nombre énorme de colons de Cisjordanie, la formation d’un réel État palestinien est impossible, et une telle évacuation est devenue une impossibilité une fois qu’Ariel Sharon n’a plus été Premier ministre (2006).

    La façade du « processus de paix » s’est finalement effondrée il y a cinq mois, quand l’enlèvement de trois adolescents juifs israéliens a été cyniquement utilisé par le gouvernement pour fabriquer une guerre. Alors que les services de sécurité israéliens savaient parfaitement que les adolescents étaient décédés, le gouvernement a prétendu faussement qu’ils étaient en vie. Ceci pour justifier la transformation des recherches en une opération militaire à grande échelle contre le Hamas, générant une spirale d’escalades qui finalement servirent de cause officielle à la guerre. Cela fut aussi utilisé en même temps comme une excuse afin de conduire une véritable campagne de propagande destinée à façonner l’opinion publique et l’expérience collective en instillant un faux sentiment d’espoir et de solidarité avec les familles des jeunes enlevés – une campagne à laquelle les médias israéliens participèrent de leur plein gré. Comme prévu, quand les corps furent finalement trouvés, ce faux espoir se trouva anéanti, transformé en une douleur et une indignation collectives, et donnant naissance à une vague de haine raciale sans précédent qui balaya Israël. La mise à mort de Mohammad Abu Khdeir, brûlé vif, et les grandes manifestations palestiniennes à Jérusalem-Est et en Cisjordanie qui en résultèrent dans le contexte de l’escalade des bombardements des FDI de Gaza et des tirs de missiles par le Hamas, tout cela servit à galvaniser l’opinion, canalisant le désir public des Israéliens de se venger en justification de guerre.

    Bien que la guerre se soit terminée mi-août, fin septembre il devenait évident que le gouvernement israélien était en train d’essayer de provoquer une Intifada à grande échelle avec des mesures agressives à Jérusalem-Est, au Mont du Temple et en Cisjordanie. Dans le même temps, une guerre médiatique d’envergure était lancée contre l’Autorité palestinienne – attribuant la responsabilité de l’escalade de violence à Mahmoud Abbas, tout en provoquant, en réalité, plus d’agitation pour plus de violence encore. C’est une manœuvre de fin de match : le gouvernement israélien a fermé la porte aux négociations et finalement, il a fait la preuve qu’il n’y avait vraiment « aucun partenaire pour la paix », provoquant une situation où n’existe plus de solution, seulement une résolution.

    Une course a démarré : alors que l’Autorité palestinienne tente de parvenir à un État, au moins sur le papier, avec la reconnaissance des Nations-Unies qu’elle est un État – un effort qui a déjà acquis une forte impulsion, le gouvernement israélien est en train de manœuvrer pour créer une réalité qui videra tous ces efforts de leur signification, dissolvant au bout du compte les derniers vestiges des Accords d’Oslo, en amenant dans son intégralité la Cisjordanie sous le contrôle israélien, en reléguant les Palestiniens dans des territoires semi-autonomes qui ressembleront en tout aux « bantoustans » d’Afrique du Sud, sans en avoir le nom.

    Bien qu’il y ait une chance que cette manœuvre échoue, il y a aussi une bonne chance pour qu’elle réussisse. Depuis que les gouvernements israéliens ont prouvé à maintes reprises que « les faits sur le terrain » sont très difficiles à changer, et étant donné la possibilité distincte que l’équilibre changeant des puissances mondiales fortifiera Israël de façon spectaculaire en tant qu’allié irremplaçable de l’Occident, la promulgation réussie de l’apartheid reportera indéfiniment la création d’un État palestinien, et elle déplacera le lieu du conflit et de l’oppression, depuis les territoires occupés, jusqu’au cœur même de la société israélienne. Ceci est la fin du sionisme, son résultat ultime – un État juif qui incarne la logique de l’antisémitisme.

    Source: Haaretz 
    Na’aman Hirschfeld – Ha’aretz – 20 novembre 2014

    Traduction : JPP pour l’Agence Média Palestine

    http://www.agencemediapalestine.fr/blog/2014/11/25/faire-passer-lapartheid-par-la-porte-de-derriere-par-naaman-hirschfeld/

  • Ras­sem­blement Paris 28 novembre 18h30 pour la recon­nais­sance de l’Etat de Palestine

     

     

     

     

     

     

     

    Le  Col­lectif National appelle à un ras­sem­blement à Paris ven­dredi 28 novembre à 18h30 Place des Inno­cents, pour la recon­nais­sance par la France de l’Etat de Palestine.

    Le 28 novembre pro­chain, l’Assemblée Nationale votera sur la recon­nais­sance d’un Etat pales­tinien. 135 pays ont déjà reconnu offi­ciel­lement l’Etat de Palestine.

    Dans le contexte actuel où cer­tains dans les milieux diri­geants israé­liens tentent d’amener le conflit sur le terrain reli­gieux, il est urgent d’affirmer avec force qu’il n’y aura de solution que poli­tique et fondée sur le droit.

    Les asso­cia­tions sous­si­gnées du Col­lectif National pour une Paix Juste et Durable entre Pales­ti­niens et Israé­liens (CNPJDPI) qui militent depuis plus de 10 ans pour l’existence de deux Etats, un Etat pales­tinien dans les fron­tières de 67 avec Jéru­salem Est comme capitale à côté de l’Etat israélien, appellent solen­nel­lement les députés français à voter en faveur de cette recon­nais­sance, comme viennent de le faire plu­sieurs par­le­ments européens.

    Certes, cela ne sera qu’un premier pas, mais ce premier pas aura des consé­quences non négli­geables puisque Israël sera alors reconnu offi­ciel­lement comme occupant le ter­ri­toire d’un Etat sou­verain. Ce vote sera l’affirmation que le respect du droit inter­na­tional par Israël est le seul moyen d’avancer vers une paix juste et durable.

    Nous appelons au ras­sem­blement du ven­dredi 28 novembre à 18h30 Place des Inno­cents à Paris ainsi qu’à ceux orga­nisés dans dif­fé­rentes villes – à l’appel des orga­ni­sa­tions du CNPJDPI pour la recon­nais­sance par la France de l’Etat de Palestine.

    Signa­taires du CNPJDPI : Agir Contre le Colo­nia­lisme Aujourd’hui (ACCA) – AFD Inter­na­tional - Alter­native Liber­taire (AL) - Amé­ri­cains contre la guerre (AAW) - Asso­ciation des Tra­vailleurs Magh­rébins de France (ATMF) - Asso­ciation des Tuni­siens en France (ATF) - Asso­ciation France Palestine Soli­darité (AFPS) - Asso­ciation Nationale des Elus Com­mu­nistes et Répu­bli­cains (ANECR) - Asso­ciation pour la Taxation des Tran­sac­tions finan­cières et pour l’Action Citoyenne (ATTAC) - Asso­ciation pour les Jume­lages entre les camps de réfugiés Pales­ti­niens et les villes Fran­çaises (AJPF) - Asso­ciation Répu­bli­caine des Anciens Com­bat­tants (ARAC) - Asso­ciation Uni­ver­si­taire pour le Respect du Droit Inter­na­tional en Palestine (AURDIP) - Cam­pagne Civile Inter­na­tionale pour la Pro­tection du Peuple Pales­tinien (CCIPPP) - Cedetim /​ IPAM - Col­lectif des Musulmans de France (CMF) - Col­lectif Faty Koumba - Col­lectif inter­uni­ver­si­taire pour la coopé­ration avec les Uni­ver­sités Pales­ti­niennes (CICUP) - Col­lectif Judéo-​​Arabe et Citoyen pour la Palestine (CJACP) - Col­lectif Paix Palestine Israël (CPPI Saint-​​Denis) - Comité de Vigi­lance pour une Paix Réelle au Proche-​​Orient (CVPR PO) - Comité Justice et Paix en Palestine et au Proche-​​Orient du 5e arrt (CJPP5) – Confé­dé­ration Générale du Travail (CGT) – Confé­dé­ration pay­sanne - Droit-​​Solidarité – Ensemble - Europe Eco­logie les Verts (EELV) – Fédé­ration des Tuni­siens pour une Citoyenneté des deux Rives (FTCR) - Fédé­ration Syn­dicale Uni­taire (FSU) – Forum Palestine Citoyenneté - Gauche Uni­taire (GU) - Géné­ration Palestine - La Courneuve-​​Palestine - le Mou­vement de la Paix - les Femmes en noir - Ligue des Droits de l’Homme (LDH) - Ligue Inter­na­tionale des Femmes pour la Paix et la Liberté, section fran­çaise de la Women’s Inter­na­tional League for Peace and Freedom (WILPF) (LIFPL) - Mou­vement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples (MRAP) - Mou­vement Jeunes Com­mu­nistes de France (MJCF) - Mou­vement Poli­tique d’Emancipation popu­laire (M’PEP) - Orga­ni­sation de Femmes Egalité – Nouveau Parti Anti­ca­pi­ta­liste (NPA) - Parti Com­mu­niste des Ouvriers de France (PCOF) - Parti Com­mu­niste Français (PCF) - Parti de Gauche (PG) - Par­ti­ci­pation et Spi­ri­tualité Musul­manes (PSM) - Une Autre Voix Juive (UAVJ) - Union des Tra­vailleurs Immigrés Tuni­siens (UTIT) - Union Générale des Etu­diants de Palestine (GUPS-​​France) - Union Juive Fran­çaise pour la Paix (UJFP) - Union Nationale des Etu­diants de France (UNEF) - Union syn­dicale Solidaires

  • Marseille Palestine

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  • Turquie. Les violences aux frontières et le dénuement aggravent le sort des réfugiés syriens (Amnesty)

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    La passivité de la communauté internationale face au nombre croissant de réfugiés syriens gagnant la Turquie est à l’origine d’une crise sans précédent, écrit Amnesty International dans un nouveau rapport rendu public jeudi 20 novembre. Certains réfugiés sont refoulés et visés par des tirs à balles réelles à la frontière, tandis que plusieurs centaines de milliers d’autres vivent dans la misère.

    Dans son rapport, intitulé Struggling to Survive: Refugees from Syria in Turkey, Amnesty International met en évidence les risques graves en matière de droits humains que courent 1,6 million de personnes venues trouver refuge dans le pays au cours des trois dernières années et demi. L’organisation insiste également sur la réticence de la communauté internationale à assumer une responsabilité financière face à cette crise des réfugiés syriens.

    « La Turquie éprouve beaucoup de difficultés pour répondre aux besoins élémentaires de plusieurs centaines de milliers de réfugiés syriens. En conséquence, nombre de ceux qui ont réussi à passer la frontière vivent aujourd’hui dans le dénuement le plus total. L’aide humanitaire internationale est très faible, mais la Turquie doit elle aussi se mobiliser davantage pour se voir octroyer cette aide,a déclaré Andrew Gardner, chercheur d’Amnesty International sur la Turquie.

    « Le pays a officiellement ouvert ses postes-frontières aux réfugiés syriens, mais la réalité est tout autre pour ceux qui tentent d’échapper aux ravages de la guerre. Nombre d’entre eux sont refoulés vers la zone de conflit, et certains sont même la cible de tirs à balles réelles. »

    La Turquie accueille la moitié des 3,2 millions de femmes, d’hommes et d’enfants qui ont fui les violences, les persécutions et d’autres violations des droits humains en Syrie. À ce jour, le pays a dépensé quatre milliards de dollars pour faire face à cet afflux massif de réfugiés. Et, parallèlement, seuls 28 % des 497 millions de dollars assignés à la Turquie dans le cadre de l’appel de fonds régional 2014 des Nations unies en faveur des Syriens avaient été versés par les donateurs internationaux à la fin du mois d’octobre.

    La Turquie et les États voisins (Égypte, Irak, Jordanie et Liban) abritent 97 % des réfugiés en provenance de Syrie.

    « La Turquie a pris à sa charge une partie substantielle du poids financier de la crise. Le manque d’empressement des pays riches à assumer une plus grande responsabilité financière dans cette crise et à offrir un nombre décent de places de réinstallation est déplorable », a déclaré Andrew Gardner.

    Des réfugiés visés par des tirs à la frontière
    Aux postes-frontières officiels, la Turquie applique une politique d’ouverture des frontières pour les Syriens, mais seuls deux postes sont entièrement ouverts sur une bande frontalière de 900 kilomètres. Or, même à ces deux postes, les personnes qui n’ont pas de passeport se voient régulièrement refuser le passage, à moins qu’elles n’aient besoin d’une aide médicale ou humanitaire d’urgence.


    En outre, rejoindre ces postes-frontières représente un périple long et risqué pour la plupart des réfugiés. Nombre d’entre eux n’ont d’autre choix que de tenter de franchir la frontière à des points de passage non officiels, d’accès difficile et souvent dangereux, situés dans des zones de conflit, avec l’appui de passeurs dans bien des cas. Ils se heurtent alors fréquemment à des violences.

    Selon les informations recueillies par Amnesty International, au moins 17 personnes ont été abattues par des gardes-frontières, qui ont tiré à balles réelles, à des points de passage non reconnus entre décembre 2013 et août 2014. Beaucoup ont été rouées de coups ou ont subi d’autres mauvais traitements avant d’être refoulées vers la Syrie, en proie au conflit.

    Ali Özdemir (14 ans) a reçu une balle dans la tête dans la nuit du 18 au 19 mai alors qu’il se dirigeait vers la frontière turque. Son père a raconté à Amnesty International qu’Ali se trouvait avec neuf autres réfugiés. À une dizaine de mètres de la frontière, ils ont entendu parler turc. Ali a eu peur et, alors qu’il avait décidé de faire demi-tour, il a reçu une balle sur un côté de la tête. Aucun avertissement, ni oral, ni par le biais de tirs en l’air, n’avait été donné. Ali est maintenant aveugle.

    « Tirer sur des gens qui fuient un conflit et cherchent un refuge est ignoble. C’est une violation manifeste du droit international qui ne doit pas rester impunie, a déclaré Andrew Gardner.

    « Les États ont pour obligation fondamentale d’ouvrir leurs portes aux personnes qui fuient des persécutions ou une guerre. Les autorités turques doivent prendre toutes les mesures qui s’imposent pour garantir la sécurité de celles et ceux qui fuient le conflit syrien et leur permettre de rejoindre la Turquie. »

    La situation sur le territoire turc
    Sur les 1,6 million de Syriens réfugiés en Turquie, seuls 220 000 personnes vivent dans les 22 camps bien équipés, qui ont atteint les limites de leur capacité d’accueil. Plus de 1,3 million de réfugiés sont livrés à eux-mêmes. D’après des sources gouvernementales turques, seuls 15 % des réfugiés syriens vivant en dehors des camps officiels reçoivent une aide de la part d’organismes humanitaires.


    Pour se nourrir et se loger, les familles prennent des mesures désespérées, faisant même parfois travailler leurs enfants.

    « Ibrahim » (10 ans) et sa famille ont fui Alep il y a deux ans. Ils se sont installés à Kilis, ville frontalière turque, où ils vivent dans une casemate de béton. Pour survivre, le jeune Ibrahim récupère avec son père le plastique dans les poubelles, gagnant 1 livre turque (0,40 dollar) pour 500 g de plastique. Il a raconté à Amnesty International qu’il se levait tous les jours à 6 heures et terminait sa journée de travail vers 16 heures. Certains jours, il a le temps d’apprendre à lire et à écrire auprès d’un imam local. Les neuf autres enfants de la famille ne vont pas à l’école.

    « La situation de la plupart des réfugiés syriens après qu’ils ont échappé aux ravages de la guerre est sombre. Ils sont abandonnés par la communauté internationale. Les États les plus riches renâclent à apporter une aide financière et à offrir des places de réinstallation, a déclaré Andrew Gardner.

    « La Turquie n’a précisé le statut juridique et les droits des réfugiés syriens qu’en octobre, avec l’adoption par le Parlement d’une directive relative à l’octroi d’une protection temporaire. Ce texte doit être pleinement mis en œuvre et porté à la connaissance des réfugiés syriens comme des fonctionnaires de l’État. »

    http://www.amnesty.org/fr/for-media/press-releases/turkey-border-abuses-and-destitution-aggravating-plight-syria-refugees-2014