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Par Marie Bourreau (New York) et Benjamin Barthe (Beyrouth) La première trêve en Syrie, au mois de mars 2016, avait duré environ un mois. La deuxième ne tiendra-t-elle qu’une semaine? Lundi 19 septembre au matin, six jours après son entrée en vigueur, ce cessez-le-feu, négocié à Genève par le secrétaire d’Etat américain, John Kerry, et son homologue […]
Par Phoebe Braithwaite La réunion de haut niveau sur les réfugiés et les migrants devait aider à replacer une personne sur dix se trouvant dans cette situation. En échange les Etats membres devaient à peine assumer de vagues engagements, comme une campagne pour en finir avec la xénophobie.
Par Delphine Minoui Ainsi s’est vidée Daraya. Sans baïonnette sur la tempe ni perquisitions dans les maisons. «La ville était à genoux. Nous sommes partis sans résister», souffle Hussam Ayash. Le 26 août, le jeune activiste de 25 ans était parmi les quelque 8000 derniers habitants à quitter cette banlieue rebelle de Damas, assiégée et bombardée depuis […]
Par Daho Djerbal Le site alencontre.org a consacré quelques articles – trop rares, certes – à l’histoire de la «guerre d’Algérie». Parmi eux une transcription (en 2012) d’interventions faites par Benjamin Stora pour France Culture. Dans l’introduction de cette transcription sont cités ses ouvrages et ceux de Mohammed Harbi. La bibliographie s’est enrichie depuis lors.
Des vidéos et des images satellites montrant des cimetières et des tumulus improvisés donnent un rare aperçu de ce qui se passe dans la zone désertique située entre la Jordanie et la Syrie, où sont piégés des dizaines de milliers de réfugiés pratiquement coupés de toute aide humanitaire depuis deux mois, a déclaré Amnesty International.
Des témoignages récents recueillis par l’organisation auprès de personnes se trouvant dans cette zone appelée « la berme » (du nom du mur de sable marquant la frontière côté jordanien) décrivent une situation désespérée marquée par la souffrance humaine, et soulignent les conséquences tragiques de l’incapacité de la communauté internationale à s’entendre sur le partage des responsabilités en ce qui concerne la crise mondiale des réfugiés. La semaine du 19 septembre 2016, les dirigeants du monde entier vont se réunir à New York pour deux sommets de haut niveau sur la question des réfugiés.
« La situation dans la berme donne un triste aperçu des conséquences que peut avoir l’incapacité lamentable des États à partager les responsabilité dans la crise mondiale des réfugiés. Cette absence de partage des responsabilités a amené de nombreux pays voisins de la Syrie à fermer leurs frontières aux réfugiés », a déclaré Tirana Hassan, directrice en charge de la réaction aux crises au sein d’Amnesty International.
« Les personnes piégées dans la zone de la berme se trouvent dans une situation désespérée, caractérisée par une pénurie de nourriture et une propagation des maladies. Certains réfugiés souffrent, voire meurent, de maladies faciles à prévenir, simplement parce que les autorités ne les autorisent pas à entrer en Jordanie et ont bloqué tout accès aux secours, aux soins médicaux et à une aide humanitaire digne de ce nom. »
Les voisins de la Syrie, dont la Jordanie, où vivent 650 000 réfugiés, accueillent la grande majorité des personnes qui fuient le conflit, ce qui pèse lourdement sur leurs ressources. À l’approche des deux sommets sur les réfugiés, Amnesty International appelle les dirigeants mondiaux à passer des discours aux actes et à s’engager concrètement à accueillir une part équitable des réfugiés, afin de soulager la pression sur les pays qui les hébergent en nombre. L’organisation demande également à la Jordanie d’autoriser immédiatement les réfugiés de la berme à entrer sur son territoire.
Famine, maladies et décès
L’aide humanitaire aux réfugiés de la berme, déjà limitée par le passé, est totalement interrompue depuis que les autorités jordaniennes ont fermé les points de passage de Rukban et Hadalat à la suite d’un attentat qui a fait sept morts parmi les gardes-frontières le 21 juin 2016. Depuis, une seule distribution de nourriture a eu lieu début août à destination des plus de 75 000 personnes piégées dans cette zone. Les autorités jordaniennes interdisent aux organisations humanitaires de se rendre dans cette zone désertique, les contraignant à larguer de la nourriture par-dessus le mur de sable au moyen de grues.
Abu Mohamed, qui vit dans le camp informel de Rukban depuis cinq mois, a indiqué que la situation s’y était fortement détériorée depuis l’attentat du 21 juin.
« La situation humanitaire est catastrophique, en particulier pour les enfants. Nous avons de l’eau potable mais pratiquement pas de nourriture ni de lait […] C’est terrible », a-t-il déclaré.
« Beaucoup de personnes sont mortes […] Ils ont juste distribué du riz et des lentilles, et un kilo de dattes séchées, mais c’est tout de que nous avons eu depuis un mois. Le moral est extrêmement bas chez les habitants du camp. »
Des images vidéo qu’Amnesty International s’est procurées montrent deux cimetières improvisés à Rukban, avec des dizaines de tumulus, situés à proximité des tentes des réfugiés.
L’impossibilité de bénéficier de véritables soins médicaux et les conditions de vie effroyables forment un cocktail mortel. Le manque d’hygiène, les mauvaises conditions sanitaires et l’accès limité à l’eau potable auraient entraîné une multiplication des cas d’hépatite, qui serait la principale cause de mortalité chez les enfants à Rukban.
De source humanitaire, depuis juin 2016, au moins 10 personnes sont mortes d’hépatite. Des réfugiés de Rukban ont indiqué que beaucoup des victimes étaient des enfants souffrant de jaunisse – une des conséquences de l’hépatite.
Des travailleurs humanitaires ont également signalé au moins neuf décès survenus lors d’accouchements depuis le 21 juin. De nombreuses femmes enceintes figurent parmi les réfugiés, et elles n’ont pas accès aux soins médicaux.
Le nombre exact de décès est difficile à vérifier car l’accès à la zone est très restreint.
Déplacez le curseur pour visualiser les changements intervenus à Rukban.
Selon des personnes vivant à Rukban, fin août 2016, un jeune homme de 20 ans est mort de la jaunisse, probablement à la suite d’une hépatite. Il serait décédé d’une hémorragie gastro-intestinale. En l’absence de médicaments, rien n’a pu être tenté pour lui sauver la vie.
Les autres maladies les plus courantes dans le camp sont les infections respiratoires, la déshydratation, la leishmaniose et la diarrhée.
Des images satellite qu’Amnesty International s’est procurées montrent que, depuis fin 2015, la densité de population à proximité des deux camps frontaliers informels de Rukban et Hadalat a fortement augmenté.
Bien que les réfugiés soient un peu moins nombreux à Hadalat depuis l’interruption de l’aide humanitaire en juin et les frappes aériennes russes survenues dans la région en juillet, globalement le nombre de réfugiés ne cesse d’augmenter dans la zone de la berme.
À Rukban, le nombre total d’abris est passé de seulement 368 en septembre 2015 à 6 563 fin juillet 2016, pour atteindre plus de 8 295 en septembre 2016. Cette augmentation spectaculaire s’explique par le fait que, ces derniers mois, des milliers de personnes ont continué de fuir le conflit en Syrie, où les crimes de guerre et autres graves violations sont quotidiens.
Renforcement des restrictions pour des raisons de sécurité
Les autorités jordaniennes ont évoqué à maintes reprises leurs craintes en matière de sécurité pour justifier la fermeture de la frontière – ayant eu pour conséquence l’arrêt de l’aide humanitaire dans la zone de la berme. Mohammed al Momani, ministre d’État pour les Affaires médiatiques, a déclaré à Amnesty International que la zone de la berme était en train de « devenir une enclave de Daesh » (c’est-à-dire une zone contrôlée par le groupe armé se désignant sous le nom d’État islamique). Il a reconnu que la situation humanitaire était mauvaise et a affirmé que la Jordanie était prête à assumer sa part de responsabilité, mais il a aussi appelé les Nations unies et la communauté internationale à prendre une part équitable des responsabilités concernant les réfugiés de la berme.
« Il ne fait aucun doute que la sécurité est un élément important à prendre en compte, mais la protection des Jordaniens ne doit pas se faire aux dépends de l’aide humanitaire et de la protection de ceux qui en ont désespérément besoin », a déclaré Tirana Hassan.
Par le passé, la Jordanie a soumis les réfugiés syriens à des procédures rigoureuses de contrôle et d’enregistrement avant de les laisser entrer sur son territoire. Rien ne l’empêche de remettre en place ces procédures afin d’ouvrir ses portes aux réfugiés qui fuient le conflit en Syrie tout en assurant sa sécurité.
L’ONU est en train de négocier une reprise de l’aide humanitaire avec les autorités jordaniennes. Le projet consisterait à déplacer les points de distribution à deux kilomètres à l’intérieur de la zone désertique, à distance de la frontière jordanienne, afin de créer une zone tampon.
« Que l’aide soit distribuée au niveau de la berme ou deux kilomètres plus loin ne change rien au fait que des dizaines de milliers de personnes attendent une protection internationale aux portes de la Jordanie, et ne dispense en aucun cas les autorités d’offrir un abri sûr aux personnes qui fuient le conflit et les persécutions », a déclaré Tirana Hassan.
« Forcer directement ou indirectement les réfugiés à retourner en Syrie en leur refusant l’entrée dans le pays et en leur imposant des conditions de vie intolérables constitue une violation flagrante des obligations internationales de la Jordanie. Les autorités doivent permettre à l’aide humanitaire de parvenir sans entrave aux réfugiés qui sont piégés dans cette zone. Elles doivent renoncer à toute tentative de les contraindre ou de les inviter à partir. »
Quoi qu’il en soit, la solution à plus long terme devra être mondiale. À l’échelle internationale, le nombre de places de réinstallation offertes aux réfugiés syriens reste terriblement insuffisant. Le poids de la crise des réfugiés continue de reposer principalement sur les pays de la région, trois d’entre eux accueillant à eux seuls plus quatre millions de personnes.
« Sans réels engagements suivis des faits en matière d’augmentation des réinstallations, les deux sommets prévus sur les réfugiés resteront purement symboliques », a déclaré Tirana Hassan.
« L’absence de solution à long terme pour les réfugiés piégés dans la zone de la berme sera révélatrice non seulement de l’échec de la communauté internationale à cet endroit, mais aussi de son manquement à ses obligations à l’égard des réfugiés du monde entier. »
Viyan Qamislo: Cette milicienne YPJ est tombée face à Daech, sur le front de Manbij.
Ça devait bien finir par arriver : les impérialistes occidentaux lâchent les YPG pour complaire à Ankara. La parenthèse ouverte il y a deux ans à Kobanê se referme. Mais il n’y a pas le choix : la lutte continue.
Avec l’entrée de l’armée turque en Syrie le 24 août, la guerre civile entre dans une nouvelle phase. Ce pays martyr est, plus que jamais, le jouet des rivalités entre puissances impérialistes – iraniennes, turques, russes, américaines, françaises, britanniques, saoudien- nes, émiraties, qataries…
Dans ce bourbier cruel, Alternative libertaire soutient, depuis 2014, les forces de la gauche kurde – le PYD et les milices YPG-YPJ, aujourd’hui fer de lance de la coalition arabo-kurde Forces démocratiques syriennes (FDS). Si AL soutient la gauche kurde, ce n’est pas seule- ment parce qu’elle est « notre meilleur rempart contre Daech » comme on l’entend trop souvent dans la bouche de certains Occidentaux, mais surtout parce qu’elle est la seule force politique à proposer un projet fédéraliste, démocratique, féministe et, d’une certaine façon, laïque, pour le Moyen-Orient.
Un projet où toutes les composantes culturelles de la région – arabes, kurdes, turkmènes, sunnites, chiites, chrétiennes, yézidies… – puissent vivre à égalité. En ce sens, elle est le rempart de toutes et tous les amis de la liberté et de l’émancipation.
Pour tout le monde, c’est une évidence : l’armée turque n’est pas entrée en Syrie pour combattre Daech ; et pas vraiment non plus pour combattre Bachar ; elle n’a occupé la région de Djarabulus que pour empêcher la jonction des cantons d’Afrin et de Kobanê, et donc l’unifi- cation territoriale du Rojava (Kurdistan syrien). Ankara amorce ainsi la constitution de la « zone tampon » qu’elle annonce depuis des années, et qui lui permettra de continuer à contrôler les filières djihadistes qui partent de son territoire pour rejoindre Raqqa, la capitale du « califat ». Au passage, l’armée turque a pilonné les positions des FDS, et bombardé plusieurs villages sous leur contrôle, faisant des dizaines de morts.
Le Rojava, un pion sur l’échiquier impérialiste
Depuis la bataille de Kobanê (septembre 2014-juin 2015), la gauche kurde a accepté le sou- tien financier et matériel de certaines puissances étrangères (Russie, États-Unis, France…) pour ne pas rester isolée face à d’autres (Iran, Turquie, régime de Damas…). Si on veut voir le verre à moitié plein, on peut dire qu’elle a joué, avec une habileté certaine, un impérialisme contre un autre. Si on veut voir le verre à moitié vide, on peut dire qu’elle a joué un jeu dange- reux. Car évidemment les impérialistes ne voient dans le Rojava (Kurdistan syrien) qu’un pion sur leur échiquier. Et c’est ce pion qu’ils sont en train de sacrifier.
Lâchage de Washington, Moscou et Paris
Mis devant le fait accompli, les États-Unis essaient, en vain, de limiter les affrontements entre leur allié historique dans l’Otan (la Turquie) et leur allié de circonstance (les FDS). Mais, fonda- mentalement, John Kerry s’est empressé d’assurer Ankara de sa loyauté et de prendre ses distances avec les FDS. Dès le 26 août, il déclarait à Genève :
« Nous sommes pour une Syrie unie. Nous ne soutiendrons aucune initiative kurde indépen- dante. Il y a eu un certain engagement limité, comme chacun le sait, avec une composante de combattants kurdes, sur une base limitée, et nous avons coopéré très étroitement avec la Turquie pour bien s’assurer qu’il y ait une meilleure compréhension des règles régissant cet engagement. »
Comme en écho, son homologue russe Segueï Lavrov, a aussitôt ajouté :
« Je suis convaincu que les Kurdes doivent rester une partie de l’État syrien, et faire partie de la solution, plutôt que d’être un acteur instrumentalisé pour atomiser et fragmenter le pays ». La Russie, marraine de Bachar el Assad, et en plein rapprochement avec la Turquie depuis la rencontre Erdogan-Poutine du 10 août, fixe ainsi les limites auxquelles elles souhaite que les FDS se conforment. Elle s’est en revanche bien gardé de condamner l’attaque turque [1].
La France est servilement alignée sur Ankara. François Hollande, a signalé, dès le 25 août, « comprendre » l’intervention turque, laissant échapper quelques paroles de regret pour les bombardements turcs sur les positions des FDS [2].
« Les Kurdes n’ont pour amies que leurs montagnes »
Il ne faut pas imaginer que la gauche kurde est surprise de ce lâchage. Depuis le début, elle savait fort bien que cette bienveillance de la part des impérialistes occidentaux n’était que temporaire. « Les Kurdes n’ont pour amies que leurs montagnes » dit un proverbe local, signi- fiant par là que ce peuple ne doit compter que sur lui-même.
Dans les semaines qui viennent, si ce lâchage se poursuit, la gauche kurde risque de se retrouver de nouveau bien seule. Pour notre part, nous continuerons à soutenir son action. Car face aux potentats sanglants d’Ankara, de Damas ou de Raqqa, elle incarne la seule possibilité d’une alternative démocratique, fédéraliste et populaire.
The Canary has previously reported on Turkey’s invasion of Syria on 24 August, and on how this attack wasn’t aimed at Daesh (Isis/Isil) but at the very people who have been most effectively pushing the jihadi group back in recent months and years. And now, Turkish-backed fighters in northern (...)
‘Daraya: the spirit of the Syrian revolution, and the heartbeat of every rebel’ Four years following its liberation, the predominantly agricultural town of Daraya, strategically located near the capital, has fallen to the regime. A deal was reached to evacuate the 4,000-8,000 civilians remaining (...)
Rationnement de l’eau, déficit pluviométrique et nappes phréatiques saumâtres, insalubrité de l’eau potable, problèmes d’assainissement des puits et des barrages, inégalité de l’accès à l’eau, les Tunisiens résidents dans les zones rurales sont confrontés, depuis trop longtemps, à cette problématique majeure. (...)
Alors que le Conseil d’Etat vient d’invalider l’interdiction du burkini, il faut mettre fin au développement de la « laïcité identitaire ». Cette conception, obsédée par le communautarisme en vient à construire un « communautarisme d’Etat ». Grâce à l’ordonnance du Conseil d’Etat, on évitera de voir en (...)
In the last few hours reports have emerged that the Turkish army is bombing the Til-Emarne (al-Amarne) village of Jarablus with artillery fire and jets and also attacking YPG targets in Ain Diwar (eastern Rojava) and Afrin (western Rojava). Kurdish sources have reported dozens of civilian (...)
Of course, banning women from wearing what they want is illegal in France. The establishment claim they want Muslim women to achieve independence yet are depriving them the means to do so. While the burkini debate has stoked considerable coverage and discussion abroad, the debate is nothing (...)
L’évacuation ce vendredi des derniers habitants de Daraya, en périphérie de Damas, a été obtenue à l’issue d’un accord entre le régime Assad et les insurgés syriens qui lui tenaient tête après quatre ans de siège. Traînant d’une main une valise à roulettes et de l’autre un enfant en bas âge, des centaines de (...)
Turkey’s incursion into northern Syria on 24 August was flagged up as a move to drive the so-called Islamic State (ISIS) out of the border town of Jarabulus. But that is just a cover: Turkey’s not very secret major objective is to crush the 50,000-strong Kurdish YPG (people’s Protection Unit) (...)
In the wake of the failed military coup in Turkey, and the massive wave of state repression that has followed, building solidarity with the progressive resistance in Turkey and Kurdistan is even more vital. The attention of socialists and democrats worldwide will be turned towards the (...)
The battle over Kobanê, which began in the summer of 2014, has brought to the world’s attention the Kurdish resistance to the brutal forces that call themselves Islamic State (IS or ISIS). Contrary to the expectations of many, the defense forces have succeeded in fending off the attacks not only (...)
La Turquie bombarde les Kurdes, le gouvernement syrien aussi.
Le 17 août dernier, les chasseurs-bombardiers du gouvernement syrien ont frappé plusieurs positions des « unités de protection populaires » kurdes (YPG) dans la province d’Al-Hasaka. Les engagements militaires épisodiques entre et les forces armées syriennes et les milices kurdes sont révélateurs de la position stratégique difficile du régime de Bachar Al-Assad, qui veut limiter l’extension du territoire sous le contrôle des unités YPG, malgré le rôle de plus en plus important de celles-ci dans le combat contre leur ennemi commun qu’est l’« État Islamique ».
En 2012 et 2013, les troupes loyalistes syriennes, souffrant d’une trop grande dispersion, se sont largement retirées des zones kurdes.
Lorsque les troupes loyalistes ont perdu la province de Raqqa à Daesh, les YPG ont saisi le secteur nord de la province. Un développement similaire s’est produit à Al-Hasaka. Daesh y avait repoussé les forces loyalistes, avant d’être repoussé à son tour par les YPG, qui ont gardé le secteur sous son propre contrôle. Damas ne pouvait qu’accepter la situation, mais ses frappes aériennes récentes contre les Kurdes servent tout de même d’avertissement. Les YPG doivent consolider leurs positions pour faire face à de nouvelles attaques syriennes, mais surtout à celles de l’armée turque, dont l’incursion récente en territoire syrien vise davantage à contenir les forces kurdes que de s’attaquer à Daesh.
L’intervention militaire de la Turquie en Syrie a été préparée par une série d’initiatives diplomatiques récentes.
Les accords entre la Turquie, la Russie et l’Iran concernaient des dossiers économiques, mais avaient aussi une dimension militaire. La guerre que mène la Turquie – par milices « rebelles » interposées – contre Moscou, Téhéran et Damas se poursuivra, mais au fur et à mesure que la perspective d’une défaite militaire de Daesh se rapproche, les grandes puissances régionales et mondiales pensent à sécuriser leurs positions respectives. Poutine a mis de côté sa menace de détruire immédiatement tout avion militaire turc entrant dans l’espace aérien syrien. Ceci permet à la Turquie de déployer désormais ses bombardiers contre les positions de Daesh mais surtout contre celles des YPD. Malgré le fait qu’ils se font la guerre sur d’autres fronts, les régimes de Damas et d’Ankara sont d’accord sur la nécessité de contenir, et dès de possible réduire, l’implantation des YPD. La prise de Manbij par une force majoritairement kurde était une bonne nouvelle dans la guerre contre Daesh, mais une source d’inquiétude profonde pour Damas et Ankara, et donc, par extension, pour Moscou et Washington.
La guerre syrienne est une guerre à facettes multiples et tous les intervenants jouent un double jeu.
La Russie soutient les milices kurdes dans une certaine mesure. Cela lui donne un moyen de pression contre la Turquie. Pour la même raison, elle fournit des armes au PKK. Mais pour Poutine, il importe avant tout de consolider le pouvoir du régime syrien et assurer sa propre emprise sur celui-ci. En conséquence, le moment venu, il trahira les Kurdes.
Les États-Unis, pour leur part, sont le principal soutien extérieur des YPG, leur fournissement des armements et des centaines de cadres militaires issus des Special Operations Forces. L’aviation américaine intervient en appui des opérations kurdes au sol. Les Kurdes sont utiles et efficaces contre Daesh – et un levier dont Washington espère se servir plus tard contre le régime de Damas – mais ce n’est pas dans l’intérêt des États-Unis de laisser les Kurdes conserver les terres qu’ils ont conquises au cours du conflit. Ceci créerait des problèmes majeurs pour son allié régional principal, à savoir la Turquie, qui est également membre de l’OTAN.
Quelques développements récents illustrent bien la primauté des rapports entre Washington et Ankara. Erdogan avait fait pression sur les États-Unis pour limiter le déploiement des forces kurdes à proximité d’Alep. Les États-Unis ont donc décidé de détourner les Forces Démocratiques Syriennes (dont les YPD forment l’élément prépondérant) vers Raqqa et de s’appuyer sur des troupes sous commandement pro-turc pour les opérations au nord d’Alep. Cependant, ces derniers ont lamentablement échoué, et les États-Unis, passant outre les objections d’Ankara, n’avaient d’autre choix que de refaire appel aux Forces Démocratiques Syriennes pour assurer la relève.
Les États-Unis ne peuvent pas toujours faire ce qu’ils veulent, comme on le voit, mais il est clair qu’ils trahiront les Kurdes dès lors que la situation sur le terrain le permettra, tout comme les Russes de leur côté. En visite officielle en Turquie, le vice-président américain Joe Biden a lancé un avertissement aux YPG, leur disant que les États-Unis retireraient leur soutien si les YPG ne quittent pas les zones à l’ouest de l’Euphrate. Les grandes puissances cherchent à manipuler les YPG pour atteindre leurs propres fins, mais demeurent implacablement hostiles à tout ce qui pourrait durablement favoriser l’émancipation nationale et sociale des Kurdes.
Les YPG essaient, eux, de jouer leurs soutiens les uns contre les autres pour faire avancer leur propre position sur le terrain. Ils ont remporté quelques succès, de ce point de vue, et ne sont pas loin de pouvoir relier les trois zones sous leur contrôle en un seul territoire, qu’ils appellent Rojava. C’est un objectif qu’aucun de leurs « alliés » ne voudrait voir se réaliser, car il renforcerait la position des Kurdes dans leur lutte pour la création d’un État de Kurdistan. Cette perspective est une menace bien plus dangereuse, pour l’État turc, que celle de Daesh. Le besoin de contenir les YPG constitue la motivation principale de l’engagement militaire direct de la Turquie dans la guerre syrienne. Malgré l’affaiblissement de ses capacités militaires engendré par la tentative de coup d’État et les purges des forces armées en cours, elle ne pouvait plus attendre.
Des organisations proches de Bachar el-Assad ont reçu des millions de dollars d’aides humanitaires, selon le Guardian. L’ONU se défend en affirmant «travailler avec toutes les parties du conflit».
Selon une enquête menée par le journal britannique The Guardian, l’Organisation des Nations Unies (ONU) a octroyé des contrats humanitaires à plusieurs organisations et personnes proches du président syrien. Des aides reçues malgré les sanctions prises par l’Union européenne et les États-Unis à l’encontre de ces bénéficiaires. Le quotidien indique avoir passé au crible des centaines de contrats passés par l’ONU depuis 2011 et le début du conflit qui a fait plus de 290.000 morts. La globalité des aides humanitaires reçues dépassent les 20 millons de dollars.
Ainsi le gouvernement d’Assad a reçu 13 millions de dollars pour le développement de l’agriculture bien que l’UE ait interdit le commerce avec les ministères concernés par ces aides. La raison de ces interdictions est le manque de confiance dans le régime syrien et à la façon dont l’argent pourrait être dépensé.
Les organisations de la femme et du cousin de Bachar el-Assad bénéficiaires
Deux agences de l’ONU sont également partenaires, à hauteur de 8,5 millions de dollars, du Syria Trust charity, une organisation présidée par l’épouse du président Assad, Asma. L’Unicef a versé pour sa part 268.000 dollars à Al-Bustan Association, une organisation caritative contrôlée par Rami Makhlouf, ami et cousin d’Assad. Il est considéré comme l’homme le plus riche de Syrie et se trouve être le symbole de la détestation du pouvoir par les opposants du régime. Il est sur la liste des «sanctionnés» de l’UE car il est fortement soupçonné de corruption, notamment par la diplomatie américaine. 700.000 dollars d’aides de l’ONU ont aussi été distribués à sa société de réseau de téléphonie mobile Syriatel.
L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a de son côté dépensé plus de 5 millions de dollars pour soutenir la banque de sang nationale syrienne, contrôlée par le ministère de la Défense syrien. À ce propos, le porte-parole de l’OMS à Genève a affirmé que l’agence ne «travaille pas directement avec le ministère de la Défense».
«L’OMS a distribué des poches de sang à la banque de sang syrienne, par l’intermédiaire du ministère de la Santé et du ministère de l’Éducation supérieure», a-t-il déclaré.
L’ONU assume et se défend
Un responsable onusien a bien souligné que la situation a créé un certain embarras au sein de plusieurs agences internes préoccupées par l’emprise du régime syrien sur le fonctionnement de l’aide humanitaire. Mais l’organisation serre les coudes et assume son action en Syrie. À Genève, des porte-paroles de l’ONU ont indiqué mardi «travailler avec toutes les parties du conflit», parce que l’organisation internationale agit ainsi «dans toutes les crises». Selon Jens Laerke, porte-parole de l’Agence de l’ONU pour les affaires humanitaires (OCHA), si l’on n’accepte pas le fait que le gouvernement syrien décide avec quelles ONG l’ONU peut travailler, «les agences de l’ONU ne pourraient pas sauver autant de vies, comme elles le font actuellement en acheminant des aides» cruciales pour la population du pays.
Interrogés par le Guardian, d’autres responsables de l’ONU soulignent que le choix des partenaires pour répondre aux besoins humanitaires urgents de la population est nécessairement «limité» dans cette zone. La raison principale invoquée est la complexité et la particularité du conflit syrien.
«Quand il s’agit de choisir entre fournir des biens ou des services via des entreprises qui pourraient être affiliées au gouvernement ou laisser des civils sans l’aide vitale dont ils ont besoin, le choix est clair: notre devoir est d’aider les civils».