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Syrie - Page 34

  • Nouveautés sur A l'Encontre.ch

    Libye. Une intervention militaire renforcerait l’organisation de l’Etat islamique

    8 - février - 2016 Publié par: Alencontre

    Par Patrick Haimzadeh Evoquée depuis deux ans par les dirigeants français, britanniques et italiens, leurs états-majors et les disciples de l’idéologie néoconservatrice américaine des années George W. Bush, la perspective d’une deuxième intervention militaire en Libye est à nouveau à l’ordre du jour. L’objectif affiché serait l’éradication de l’organisation de l’État islamique en Libye, dont […]

    Syrie. Un «processus de négociations» frère jumeau de celui Israël-Palestine

    7 - février - 2016 Publié par: Alencontre

    Par Sharif Nashashibi  Le président syrien Bachar al-Assad s’est inspiré des manœuvres de diversion israéliennes en matière de négociation: rien que du processus et pas de paix Jusqu’ici, rien de remarquable n’est ressorti de la dernière conférence sur la Syrie qui se déroule actuellement à Genève [article écrit le 3 février 2016, avant que l’ineffable Staffan […]

     

    Syrie. L’offensive syro-russe & alii sur Alep. Quid des négociations de Genève?

    7 - février - 2016 Publié par: Alencontre

    Par Bullent Kilic et entretien avec Mohamed Allouche En deux jours, ce sont plus de 40’000 personnes qui ont fui les combats dans la province d’Alep et qui se sont dirigées vers le nord et vers la Turquie. Vendredi soir, le 5 février, la plus grande partie de ces déplacé·e·s se trouvaient soit sur la route, […]

     

    Syrie. Quelle aide au peuple syrien? Une aide à des «zones économiques spéciales», afin de transformer des camps de réfugiés temporaires en structures permanentes

    7 - février - 2016 Publié par: Alencontre

    Par Myriam François La conférence des donateurs pour la Syrie organisée le jeudi 4 février à Londres visait à répondre aux besoins des près de six millions de personnes déplacées en Syrie et des plus de quatre millions de réfugiés présents dans d’autres pays en obtenant des engagements de la «communauté internationale» à hauteur de 9 milliards […]

     

    Algérie. Du droit du tamazight de s’émanciper de «son» académie…

    6 - février - 2016 Publié par: Alencontre

    Par Nadir Djermoune Pour l’auteur de cette contribution, les choix culturels et linguistiques des Algériens doivent se fonder sur leurs réalités et leurs besoins actuels plus que sur une «essence» difficilement définissable. «Sommes-nous obligés de convoquer les morts pour légitimer les revendications d’aujourd’hui?», s’interroge-t-il. Et de répondre que «l’identité culturelle collective, politique ou sociale n’est […]

  • Syrie. Un «processus de négociations» frère jumeau de celui Israël-Palestine (A l'Encontre.ch)

    Les «premières négociations de paix», en janvier 2014, à Montreux-Genève, sous l'égide Lakhdar Brahimi et Ban Ki-moon

    Les «premières négociations de paix», en janvier 2014, à Montreux-Genève, sous l’égide Lakhdar Brahimi et Ban Ki-moon

    Par Sharif Nashashibi 

    Le président syrien Bachar al-Assad s’est inspiré des manœuvres de diversion israéliennes en matière de négociation: rien que du processus et pas de paix

    Jusqu’ici, rien de remarquable n’est ressorti de la dernière conférence sur la Syrie qui se déroule actuellement à Genève [article écrit le 3 février 2016, avant que l’ineffable Staffan de Mistura n’annonce la suspension jusqu’au 25 février 2016]. Ce n’est pas surprenant, non seulement en raison des conditions spécifiques de ces négociations, mais parce que celles-ci sont l’extension d’un «processus de paix» redondant qui partage des caractéristiques significatives avec son pendant israélo-palestinien.

    Le cadre du «processus de paix» syrien est resté sensiblement le même depuis son lancement en 2012. En dépit de ses défaillances évidentes et prévisibles, à Genève et à Vienne, la conférence actuelle en Suisse s’obstine à réinventer une roue qui n’a jamais fonctionné. On est alors en droit de se demander si le processus est conçu pour gérer le conflit plutôt que de le résoudre.

    Voilà comment le «processus de paix» israélo-palestinien moribond a longtemps été considéré, étant donné qu’il en reste à ces recettes qui échouent depuis son début il y a un quart de siècle. Israël l’utilise comme couverture pour ancrer encore davantage son occupation et la colonisation de la Palestine, fidèlement assisté et encouragé par les Etats-Unis qui sont censés jouer les intermédiaires entre les deux parties.

    En ce qui concerne la Syrie, c’est la Russie qui soutient activement le régime par le massacre et l’assujettissement des Syriens tout en prétendant être un médiateur en quête de paix. Dans les deux cas, cette duplicité sert à soutenir leurs alliés respectifs et les protéger de la critique dans un Conseil de sécurité de l’ONU paralysé principalement par les droits de veto américain et russe.

    Les Syriens connaissent ce que les Palestiniens endurent depuis longtemps: du processus et pas de paix; négocier pour négocier, pas pour trouver une solution juste et durable à leur détresse. Dans les deux cas, il s’agit pour certains protagonistes de ces conflits, et la communauté internationale dans son ensemble, d’être vus en train de faire quelque chose, peu importe la sincérité et l’efficacité de ces efforts – en d’autres termes, les relations publiques et l’apparence priment sur le fond.

    Fin de l’occupation israélienne/du règne d’Assad

    Lorsque les Palestiniens disent que les discussions doivent aboutir à la fin de l’occupation israélienne, ou lorsque les Syriens disent que les discussions doivent aboutir à la démission du président Bachar al-Assad, ils sont raillés comme obstructionnistes pour ces conditions préalables. Toutefois, les négociations doivent avoir un objectif final clairement défini, sinon elles se perdent indéfiniment dans les méandres et donnent le temps et la possibilité de remettre à plus tard, de duper et d’avorter.

    Israël et le régime d’Assad sont les causes de leurs conflits respectifs, quoi qu’on puisse penser des méthodes utilisées pour leur résister et des groupes impliqués dans la résistance. Quel est l’intérêt de négocier pour les Palestiniens si Israël ne s’engage pas à mettre fin à son occupation, ou pour les Syriens si Assad refuse de démissionner?

    La belligérance d’Israël et du régime d’Assad repose sur un déséquilibre fondamental du pouvoir vis-à-vis de leurs ennemis, ce qui rend les négociations vides de sens sans la pression nécessaire parce que la partie la plus forte n’a ainsi aucune raison de chercher une solution juste – et donc viable.

    Staffan Mistura annonce, le 2 février 2016 «l'ouverture officielle des négociations de Genève»

    Staffan Mistura annonce, le 2 février 2016 «l’ouverture officielle des négociations de Genève»

    Le régime d’Assad a détruit le pays, a commis des crimes de guerre et contre l’humanité et il est responsable de la grande majorité des centaines de milliers de victimes civiles à ce jour – rien que pour conserver son monopole brutal sur le pouvoir. Pourtant, comme dans l’ensemble du «processus de paix» syrien, le sort d’Assad ne sera pas discuté à Genève.

    «Il est inacceptable que l’ensemble de la crise syrienne et la solution à cette crise doivent dépendre du sort d’un seul homme» (17 décembre 2015), déclarait le secrétaire général de l’ONU Ban Ki-Moon en décembre, comme si une solution pouvait être trouvée en balayant tout simplement cette question capitale sous le tapis taché de sang.

    Au lieu de cela, la première phase des négociations (qui sont censées durer six mois) se concentrera uniquement sur la conclusion d’un cessez-le-feu (qui exclura certaines des forces au sol les plus redoutables), la fourniture d’une aide humanitaire et la lutte contre l’Etat islamique. Cependant, régler tout ou partie de ces questions – qui sont des effets du conflit, non sa cause – ne mènera pas à une transition du pouvoir qui n’est pas encore matière à discussion et n’apportera donc pas la paix en Syrie.

    L’utilisation des tactiques israéliennes par Assad

    Au contraire, le régime continuera à qualifier toute opposition de terrorisme, de sympathie terroriste ou d’ingérence étrangère, tout comme le fait Israël. La semaine dernière, le Premier ministre Benjamin Netanyahou a accusé le secrétaire général de l’ONU d’«encourager le terrorisme» (BBC 27 janvier 2016) après que ce dernier a déclaré qu’«il est dans la nature humaine de réagir à l’occupation» (The Guardian, 26 janvier 2016),

    Le régime d’Assad continuera à utiliser les négociations comme une plate-forme pour amplifier son discours déformé et veillera à ce qu’elles s’enlisent sur les questions de «sécurité» plutôt que sur le traitement de la cause du conflit et donc de sa solution – encore une fois, comme le fait Israël.

    Les deux parties et leurs alliés respectifs mettent la futilité des négociations sur le compte de la désunion de leurs adversaires, disant qu’il leur manque un «partenaire pour la paix», mais font tout leur possible pour maintenir et exacerber les divisions.

    Israël a longtemps attisé les flammes de la rivalité entre le Hamas et l’Autorité palestinienne. En parallèle, les discussions à Riyad en fin d’année dernière qui ont conduit à une unité diplomatique sans précédent entre les groupes de l’opposition syrienne se sont heurtées à des efforts extérieurs visant à dicter quels sont ceux qui sont autorisés à participer à des négociations – une tentative évidente de créer de nouvelles divisions.

    Le président syrien Bachar al-Assad s’est inspiré des manœuvres de diversion israéliennes en matière de négociation. Cela n’a rien de surprenant, car cette tactique est très familière, ayant été utilisée efficacement pour maintenir l’occupation par Israël du plateau du Golan syrien depuis un demi-siècle. N’est-ce pas cruel que les Syriens soient une fois de plus la cible de telles tactiques – cette fois par leur propre gouvernement? (Publié par MEE, le 3 février 2016)

    Publié par Alencontre le 7 - février - 2016

    Sharif Nashashibi collabore régulièrement avec Al-Arabiya News, Al-Jazeera English, The National et The Middle East Magazine. En 2008, il a reçu une distinction de la part du Conseil international des médias «pour avoir réalisé et contribué à des reportages systématiquement objectifs» sur le Moyen-Orient.

    http://alencontre.org/syrie-un-processus-de-negociations-frere-jumeau-de-celui-israel-palestine

  • Syrie, Turquie, Russie, Genève... (Essf)

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    Orateur: Ghayath Naisse

    Un rapport récent de l’ONU confirme l’existence de vingt « points » en Syrie qui souffrent du blocus complet et de la famine de la population civile.

    Cela concerne 400 000 personnes, dont des enfants, femmes et vieillards. Des dizaines meurent de faim au quotidien. Ce rapport chiffre également à environ quatre millions le nombre de personnes qui ne bénéficient que de peu d’aide humanitaire pour leur survie...

    La plupart de ces régions sont encerclées par les forces armées du régime et de ses alliés. Les villes de Kifraya, Alfoua, Nibil et Alzahra, sont, elles, encerclées par les factions djihadistes et réactionnaire comme Daesh (l’État islamique), Jabhat al-Nosra, Jaish al-Islam et Ahrar al-Sham.

    Le déploiement russe au service du régime syrien

    Depuis l’annonce de l’intervention militaire directe de la Russie en Syrie le 30 septembre dernier, la situation militaire et politique a connu un changement et une accélération. Sur le plan militaire, une offensive sur plusieurs fronts de l’armée régulière et des milices alliées a été enregistrée. Et le régime a pu récupérer le contrôle sur une étendue plus importante de territoires.

    En effet, lorsque l’armée turque a abattu un avion militaire russe le 24 novembre, cela n’a pas eu l’effet de dissuasion escompté par le gouvernement turc AKP. Au contraire, la Russie de Poutine a considéré cet acte comme « hostile » et a décidé de déployer une armada impressionnante en mer, sur terre et dans l’air, officialisant la mise en place de son système de défense aérienne le plus sophistiqué (le S400). Le gouvernement russe, pour bien afficher sa volonté de domination en Syrie, déclare que toute « menace » à ses forces présentes en Syrie sera désormais détruite immédiatement.

    De ce fait, en Syrie, la zone d’exclusion aérienne, ou zone tampon, demandée par le gouvernement turc, tombe à l’eau. Si une zone d’exclusion existe ce jour, c’est du côté turc de la frontière. Aujourd’hui, presque toute la zone nord-ouest de la Syrie, qui connaissait la présence des factions « turkmènes » proches du gouvernement turc, a été récupérée par le régime (dont récemment les fiefs de Salma et Rabia), avec des protestations turques à peine audibles...

    Quelles négociations ? Quel accord ?

    Sur le plan politique, il apparaît de plus en plus qu’un accord-cadre entre les États-Unis et la Russie se fait concernant la Syrie : la déclaration de Genève le 30 juin 2012, puis celle de Vienne en novembre 2015, transformée en résolution du conseil de sécurité de l’ONU fin décembre 2015 (sous le numéro 2254). Dans tous ces documents, il n’est pas question de « changement de régime », ni de départ « forcé » ou obligatoire du dictateur. En effet, ils parlent de négociations pour arriver à un gouvernement de transition par acceptation mutuelle.

    Dans cette approche, l’Arabie saoudite a parrainé une réunion de « l’opposition » syrienne début décembre, pour former une « haute commission de négociations » qui comprend en particulier les personnes qui lui sont proches. Cette commission s’est déclarée la seule légitime à négocier, en exigeant l’arrêt des combats, la libération des prisonniers et la confirmation que Bachar el-Assad n’a pas sa place dans la période de transition, comme conditions préalables pour participer aux négociations de Genève III en cours.

    A Genève, aucune légitimité populaire

    Mais, en réalité les choses sont différentes, le ministre saoudien des Affaires étrangères ne parle plus de départ de Bachar à court terme : dans sa dernière déclaration cette semaine, il précise qu’« il n’y a pas d’avenir pour Bachar dans l’avenir de la Syrie ». En même temps, Staffan de Mistura, le représentant de l’ONU pour la Syrie, a invité plusieurs délégations de « l’opposition » pour participer cette semaine aux négociations. L’une proche de l’Arabie saoudite et de la Turquie, une autre le « Conseil de la Syrie démocratique » – dont la composante la plus importante, le parti kurde PYD, n’a pas été invitée –, une délégation de « l’opposition intérieure » proche de la Russie, et une délégation de la « société civile » qui ne représente rien... excepté le régime.

    Il est prévu six mois de négociations avant de former un gouvernement d’« union nationale » ou de transition selon l’interprétation des parties présentes. Et le fait est que ce sont les combats sur le terrain qui vont orienter l’issue de ces négociations. La Russie, le régime et ses alliés accélèrent leurs offensives, en particulier contre l’Armée syrienne libre pour la détruire ou l’affaiblir au maximum. Ainsi ne restera que Daesh et les djhadistes sur la scène pour justifier un minimum de concession politique.

    Le drame est qu’aucune des parties présentes à Genève III n’a de légitimité populaire. Les premières demandes des masses syriennes aujourd’hui sont la paix, l’arrêt des combats, des bombardements, du blocus, la libération des prisonniers et le retour des déplacéEs. Mais les revendications de la révolution demeurent : la liberté, le pain et l’emploi, et la dignité.

    Ghayath Naisse « Syrie : Tous les chemins mènent à Genève ? » ». Paru dans l’Hebdo L’Anticapitaliste - 322 (04/02/2016) :Retour ligne automatique

    , par NAISSE Ghayath

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    https://npa2009.org/actualite/international/syrie-tous-les-chemins-menent-geneve

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article37115

  • Liban. Les femmes réfugiées en provenance de Syrie sont exposées à l'exploitation et au harcèlement sexuel (Amnesty)

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    Le manque d'aide internationale et les politiques discriminatoires mises en œuvre par les autorités libanaises créent des conditions propices aux atteintes aux droits humains et à l'exploitation des femmes réfugiées au Liban, écrit Amnesty International dans un nouveau rapport rendu public à la veille de la Conférence des donateurs pour la Syrie, prévue à Londres le 4 février.

    Intitulé «Je veux un endroit sûr». Les réfugiées de Syrie déracinées et sans protection au Liban ce rapport dénonce le fait que le refus du gouvernement libanais de renouveler les permis de séjour des réfugiés et la pénurie de fonds internationaux aggravent la situation précaire des femmes réfugiées et les exposent à l'exploitation aux mains de personnes en position de pouvoir, notamment des propriétaires, des employeurs et même des policiers.

    « La pénurie de fonds internationaux alloués à la crise des réfugiés, alliée aux restrictions imposées aux réfugiés par les autorités libanaises, sont synonymes pour les femmes réfugiées en provenance de Syrie de risque de harcèlement et d'exploitation, et d’incapacité à demander la protection des autorités », a déclaré Kathryn Ramsay, chercheuse sur les questions de genre à Amnesty International.

    En 2015, le Liban a interdit au Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) d'enregistrer de nouveaux réfugiés syriens et a promulgué des réglementations qui durcissent les conditions de renouvellement de leur statut de résident. Sans véritable statut légal, ils risquent l'arrestation arbitraire, la détention et même l'expulsion, et beaucoup ont peur de dénoncer des abus à la police.

    Vingt pour cent des foyers de réfugiés syriens au Liban sont dirigés par des femmes. Dans certains cas, elles sont la première source de revenus de la famille, leurs époux ayant été tués, détenus, enlevés ou ayant disparu de force en Syrie.

    « La majorité des réfugiés syriens au Liban luttent pour survivre dans des conditions désespérées. Ils se heurtent à une discrimination généralisée et à de grandes difficultés pour se nourrir, se loger et obtenir un travail. C’est d’autant plus vrai pour les femmes réfugiées. Beaucoup – notamment celles qui dirigent leur foyer – se retrouvent exposées au harcèlement, à l'exploitation et aux violations des droits humains, au travail et dans la rue », a déclaré Kathryn Ramsay.

    Pauvreté et exploitation aux mains des employeurs et des propriétaires

    Environ 70 % des familles réfugiées syriennes vivent très en-dessous du seuil de pauvreté au Liban.La réponse humanitaire de l'ONU à la crise des réfugiés syriens est systématiquement sous-financée. En 2015, l'ONU n'a reçu que 57 % des fonds requis pour son action au Liban. Cette grave pénurie a contraint le Programme alimentaire mondial (PAM) à réduire l'allocation alimentaire mensuelle fournie aux réfugiés les plus vulnérables – elle est passée de 27 euros à 12,50 euros à la mi-2015. Après une injection de fonds fin 2015, cette allocation a été augmentée à 20 euros – soit 0,66 euros par jour. Un quart des femmes avec lesquelles Amnesty International s'est entretenue avaient cessé de recevoir des versements pour l'alimentation au cours de l'année 2015.

    De nombreuses réfugiées ont déclaré lutter pour faire face au coût élevé de la vie au Liban et se procurer des vivres ou payer le loyer, ce qui les rend plus vulnérables à l'exploitation. Selon le témoignage de certaines femmes, des hommes leur ont fait des avances sexuelles déplacées ou leur ont proposé de l'aide ou de l'argent en échange de sexe.

    Dans un contexte de discrimination généralisée à l'égard des réfugiés au Liban, les réfugiées qui ont réussi à trouver un emploi pour subvenir à leurs besoins sont exploitées par leurs employeurs, qui leur versent des salaires excessivement bas. « Ils savent que nous accepterons même le plus bas salaire parce que nous en avons besoin », a déclaré « Hanan », une réfugiée palestinienne venue de Syrie dont le nom a été modifié pour protéger son identité.

    « Asmaa », 56 ans, réfugiée palestinienne venue de Syrie qui vit à Chatila, un camp de réfugiés situé dans la banlieue sud de Beyrouth, a déclaré qu'elle interdisait à ses filles de travailler, de peur qu'elles ne soient harcelées : « Ma fille a travaillé dans un magasin. Le responsable l'a harcelée et l'a pelotée. C'est pour cette raison que je ne laisse plus mes filles travailler. »

    Plusieurs femmes ont raconté qu'elles avaient quitté un travail ou renoncé à en prendre un parce que le comportement de l'employeur était indécent.

    Trouver assez d'argent pour se loger est un autre défi de taille. Au moins 58 % des réfugiés syriens vivent dans des appartements ou des maisons de location, d'autres dans des bâtiments délabrés et des quartiers informels. De nombreuses femmes ne sont pas en mesure de régler les loyers exorbitants et se retrouvent dans des logements sordides.

    « Qu'elles soient sous-payées au travail ou qu'elles vivent dans des logements sales, infestés de rats et délabrés, elles n'ont pas de stabilité financière, ce qui est source d'énormes difficultés et incite les personnes en position de pouvoir à profiter d'elles », a déclaré Kathryn Ramsay. 

    L'absence de statut juridique accroît les risques

    En raison des procédures bureaucratiques pesantes et des coûts élevés de renouvellement de leurs permis de séjour mis en place par le gouvernement libanais en janvier 2015, de nombreux réfugiés ne peuvent pas renouveler ces documents. Sans permis valide, les réfugiés syriens craignent d'être arrêtés et ne signalent pas les violences à la police.

    La majorité des réfugiées avec lesquelles s'est entretenue Amnesty International ont expliqué que l'absence de permis de résidence les empêche de dénoncer les abus aux autorités libanaises. « Hanan », réfugiée palestinienne de Syrie qui vit dans un camp de réfugiés près de Beyrouth avec ses trois filles, s'est rendue au poste de police pour porter plainte contre un chauffeur de bus qui la harcelait. Les policiers l'ont renvoyée sans enregistrer sa plainte, au motif qu'elle n'avait pas de « statut juridique ».

    « Ces femmes ont bien conscience que le harcèlement et l'exploitation qu'elles subissent sont aggravés par le fait que, n'ayant pas de permis de résidence valides, elles n'ont nulle part où demander aide et protection », a déclaré Kathryn Ramsay.

    Une autre femme syrienne a raconté qu'elle était devenue la cible de harcèlement après s'être rendue à la police :

    « Au bout d'un certain temps, les policiers passaient devant notre maison ou nous appelaient, et nous demandaient de sortir les rejoindre. Il s'agissait des trois policiers qui avaient pris notre déposition. Parce que nous n'avons pas de permis [de résidence], ils nous ont menacées. Ils ont dit qu'ils nous mettraient en prison si nous ne sortions pas avec eux. »         

    Le Liban accueille un plus grand nombre de réfugiés par habitant que tout autre pays au monde, et il n'est guère soutenu par la communauté internationale. Toutefois, cela ne saurait justifier le fait de ne pas protéger les réfugiées contre l'exploitation et les violences.

    « L'afflux de réfugiés exerce une pression considérable sur le Liban, mais ce n'est pas une excuse pour leur imposer des restrictions aussi sévères et les mettre en danger, a déclaré Kathryn Ramsay.

    « Au lieu de favoriser un climat de peur et d'intimidation, les autorités libanaises doivent modifier leur politique en vue de protéger les femmes réfugiées et de faciliter le renouvellement des permis de résidence, sans restriction, de tous les réfugiés. »

    Un soutien international crucial

     Le manque d'aide et de fonds internationaux destinés aux réfugiés au Liban contribue directement à la pauvreté et à la précarité des réfugiées, les exposant à des risques accrus.

    Selon le HCR, au moins 10 % des réfugiés syriens dans les pays d'accueil, soit 450 000 personnes, sont vulnérables et ont besoin d'être réinstallés de toute urgence dans un autre pays en dehors de la région. Le HCR considère que les femmes et les jeunes filles qui sont en danger entrent dans la catégorie des réfugiés « les plus vulnérables ».

    Amnesty International demande à la communauté internationale d'augmenter le nombre de places de réinstallation et le nombre d'itinéraires sûrs permettant aux réfugiés venus de Syrie de quitter la région.

    En outre, elle doit accroître nettement l'aide financière et mettre à profit la conférence des donateurs du 4 février pour s'engager à satisfaire les demandes de financement de l'ONU destinés à faire face à la crise en Syrie pour 2016-2017.

    « Les pays les plus riches du monde – l'Union européenne dont le Royaume-Uni, les États du Golfe et les États-Unis notamment – doivent se mobiliser davantage en vue de remédier à cette crise. Ils doivent accroître l'aide humanitaire pour les personnes en Syrie et les réfugiés dans la région, et partager la responsabilité de la crise en réinstallant un plus grand nombre de réfugiés, a déclaré Kathryn Ramsay.

    « Enfin, ils doivent collaborer avec les pays d'accueil comme le Liban pour lever les obstacles à l'enregistrement légal des réfugiés et faciliter l'accès à des services vitaux, afin de protéger tous les réfugiés, et notamment les femmes, contre les violations des droits humains. »

    2 février 2016

    https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2016/02/lebanon-refugee-women-from-syria-face-heightened-risk-of-exploitation-and-sexual-harassment/

  • Syrie Paris

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  • Syrie Liban : La déclaration de Madaya (Essf)

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    « L’horreur de la politique du meurtre et du siège imposée par le régime et ses acolytes »

    Face à l’ampleur de la crise en Syrie, au danger qui menace son devenir et ses habitants, à l’horreur de la politique du meurtre et du siège imposée par le régime et ses acolytes, et partant d’un sentiment humanitaire, de la responsabilité arabe, de la fraternité islamique et historique, nous élevons notre voix, soutenons les habitants de Madaya et refusons le fait d’affamer, de tuer et d’assiéger.

    1. Nous condamnons le siège de Madaya qui a pris des proportions dramatiques avec un embargo sur la nourriture, l’eau et les médicaments. Nous considérons que ceci est une violation de toutes les valeurs humanitaires et des droits de l’homme.

    2. Nous refusons que des Libanais prennent part au meurtre et au siège de nos parents en Syrie sous prétexte de « combattre les terroristes ». Il s’agit de la même logique appliquée par Israël aux militants libanais et palestiniens.

    3. Nous considérons que l’approbation puis le refus par le régime syrien de faire entrer des denrées alimentaires à Madaya sont la preuve que les gens meurent de faim dans la ville, conformément à ce que les médias et réseaux sociaux ont montré. Le Hezbollah avait également indiqué dans un communiqué son implication dans le siège de Madaya.

    4. Nous refusons que l’ensemble de la communauté chiite soit considérée comme responsable de ce qui se passe à Madaya et faisons porter la responsabilité exclusivement à ceux qui sont en train de perpétrer ces crimes. Nous proclamons l’innocence des chiites face à l’« holocauste » syrien et ses résultats.

    5. Nous demandons le retrait immédiat des éléments armés libanais en Syrie qui combattent aux côtés du régime, et surtout dans les régions proches du Liban telles que Zabadani ou Qalamoun. Nous considérons que les habitants de ces régions sont soumis à des changements démographiques qui brisent le tissu social et historique commun aux peuples libanais et syrien et qui marqueront le vivre-ensemble pour les dix prochaines années.

    6. Nous demandons la mise en place d’une solution politique qui garantirait l’union du peuple syrien et le retrait de toutes les forces impliquées dans le conflit. Nous demandons de laisser le peuple syrien décider de son sort.

    lundi 11 janvier 2016

    Voici la liste des signataires de la « déclaration de Madaya » :

    Malek Mroué, Ali el-Amine, Moustapha Fahs, Harès Sleiman, Hanine Ghaddar, Hussein Choubassi, Badia Fahs, Souhair Khalifé, Roulana Achraf, Waël Wehbé, Ali Noun, Marwan el-Amine, Khalil Jaber, Ahmad Hariri, Ali Ezzeddine, Abbas Jawhari, Jad el-Akhaoui, Salwa Oneissi, Tarek Malaëb, Shirine Abdallah, Rifaat Halabi, Mouna Tibi, Abbas Mtairik, Ali Mrad, Ali Haïdar Cheaïb, Tony Abi Najm, Hassane Abou Nayef, Abdel Mouttaleb Bakri, Adel Taher, Hatem Darak el-Sibaï, Nada Mhanna, Rachad Rifi, Samia Aoun, Fadia Choucair, Saad Faour, Talal Tohmé, Nafeh Saad, Eddie Salamé, Rima Masri, Hassan Mrad, Michel Hajji Georgiou, Hassan Jaber el-Chamri, Marcelle Noujeim, Roula Hussein, Ghandi el-Mohtar, Sakhr Arab, Tammam el-Ali, Thouria Bakour, Leila Salamé, Fayad Makki, Joumana Merhi, Paul Jeïtani, Walid Fakhreddine, Mohammad Moqdad, Antoine Courban, Carole Faddoul, Amer Abazid et Rayan Daher.

    http://www.lorientlejour.com/article/964159/le-texte-de-la-declaration-de-madaya.html

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article37076

  • Peut-on être contre la guerre en Syrie en se taisant sur le régime de Damas, l’Iran, le Hezbollah, la Russie... ? (Essf)

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    Le 15 janvier dernier, Christine Delphy ouvrait un meeting [1] qui se tenait à la Bourse du travail et faisait suite à un appel d’intellectuels [2] paru le 24 novembre dernier dans la presse, appel se voulant une réponse non seulement à l’Etat d’urgence institué par le gouvernement mais aussi « à la guerre » proclamée par ce même gouvernement. C’est ce second aspect que je vais aborder.

    Assad ? Connais pas...

    Le discours de Delphy et l’Appel présentent bien des points communs avec toutefois des nuances.

    Le problème avec cet appel et d’autres assez proches, ce n’est pas tant ce qu’ils disent, nous y reviendrons... que ce qu’ils ne disent pas.

    Car enfin, de quoi parlons-nous ? De la guerre en Irak et en Syrie où la France intervient par des frappes aériennes. Or, il semblerait qu’un certain nombre d’acteurs de premier plan dans ces guerres ont disparu des radars de nos signataires.

    - Quid de Bachar el Assad qui, depuis bientôt cinq ans, torture, emprisonne, bombarde, affame son peuple et qui a provoqué la mort de plus de 250 000 personnes en Syrie et le départ de millions de réfugiés ? [3]

    - Quid de l’Iran qui a formé les terribles milices paramilitaires chiites dont les exactions et tueries répétées en Irak, ne sont pas pour rien dans la « protection » qu’on cherchée les tribus sunnites dans l’Etat islamique ? L’Iran qui depuis le début de la révolte des Syriens contre le dictateur Assad soutient implacablement ce dernier envoyant armes et troupes contre les insurgés ?

    - Quid du Hezbollah dont le tragique siège de Madaya, ville affamée depuis plus de 7 mois par le groupe libanais, vient de révéler au grand jour son rôle de fer de lance dans la contre-révolution syrienne ? [4]

    - Quid de la Russie qui, après avoir armé et instruit l’armée syrienne, soutenu inflexiblement Assad dans toutes les instances internationales, déverse depuis le mois de septembre 2015 ses tapis de bombes sur les insurgés ?

    Aucun de nos anti-guerre n’a visiblement entendu parler de l’Iran, du Hezbollah, de la Russie ou d’Assad.

    Est-ce à dire que l’Iran, le Hezbollah, la Russie interviennent en catimini, sous faux drapeau ? On peut leur reprocher bien des choses, mais pas cela.

    C’est avec tous les honneurs que l’Iran a enterré à Téhéran, le brigadier général Hamid Taghavi, tombé « en martyr en Irak » en décembre 2014 et dont le corps fut veillé au siège des gardiens de la Révolution.

    Tout comme Hassan Nasrallah, le chef du Hezbollah libanais présentait les honneurs en octobre 2015 à l’un des plus hauts responsables militaires du mouvement, Hassan Hussein al-Hage tué également dans les combats en Syrie.

    Quant aux Russes, à l’inverse de la stratégie des petits hommes verts sans identification menée en Crimée et dans le Donbass, ils n’ont eu de cesse de mettre en scène de façon outrancière leur intervention directe, le déploiement de leurs navires, de leurs avions, de leurs forces spéciales. On a pu voir des photos du métropolite de Moscou bénir les avions qui partaient en Syrie [5] et les communiqués de victoire se succéder, couvrant les protestations des ONG qui pointent les bombardements indiscriminés de civils, d’écoles, d’hôpitaux.

    L’Etat islamique n’est pas la principale préoccupation de l’Iran, du Hezbollah et de la Russie. Leurs cibles prioritaires ce sont les insurgés anti-Assad, leur but est de sauvegarder le régime, quel que soit le prix final que devra payer le peuple syrien.

    Mais de tout cela, nos « anti-guerre » n’ont visiblement jamais entendu parler. Delphy se plaint de ne pas avoir de photos de morts ou de chiffres des civils tués ? [6] Eh bien qu’elle suive un peu les organisations de droits de l’homme syriennes, elle aura des images, des vidéos, des chiffres, des schémas, des témoignages. [7] Quant au Hezbollah, n’est-il pas le héros de la guerre contre Israël ? C’est d’ailleurs cette expertise qui fait de lui la cheville ouvrière du soutien à Bachar et nous vaut sans doute ce silence.

    Intervention ou non-intervention ?

    Comment juger cette apparente cécité ?

    Prenons une comparaison : si pendant la Première Guerre mondiale, les militants ouvriers et les révolutionnaires réunis à Zimmervald avait fait une déclaration dénonçant vigoureusement les pays de l’Entente, la France, la Grande-Bretagne, la Russie... tout en « oubliant » de mentionner (je dis bien de mentionner, même pas de condamner !) l’Allemagne, l’Autriche et la Turquie ? Auraient-on pu décemment taxer ces militants « d’anti-guerre » ? Non, bien évidemment. Le titre de soutiers de la Triplice aurait été plus adapté à de tels « pacifistes ». [8]

    Alors entendons-nous bien, l’intervention aérienne des Occidentaux, dont la France, contre l’Etat islamique, soulève une question importante : ses effets positifs compensent-ils les effets négatifs ? Il est indéniable que les bombardements sur la zone contrôlée par l’EI et notamment sur ses infrastructures pétrolières ont eu un effet d’attrition sur le groupe jihadiste. De même, le soutien aérien occidental a permis la reconquête de Ramadi par l’armée irakienne et de Sinjar par les Kurdes. Mais outre les inévitables victimes civiles, surtout dans un contexte d’utilisation systématique par l’EI de boucliers humains, le rejet de toute intervention étrangère par les tribus sunnites n’est pas à négliger.

    Les Occidentaux devraient-ils se contenter d’armer, de former et d’entraîner les groupes locaux qui luttent contre l’EI mais aussi contre Assad ? Il est indubitable que le credo de l’EI « tous contre nous » qui s’est encore trouvé renforcé par l’intervention des Russes est un argument de poids dans le recrutement international qui caractérise ce groupe. On doit d’ailleurs discuter l’intérêt militaire même de la participation de la France aux frappes. En effet, contrairement à la vision apocalyptique de Christine Delphy, les frappes françaises comptent pour... 5% des frappes de la coalition contre l’EI. Bien des observateurs sérieux n’ont d’ailleurs pas manqué de railler le décalage entre la posture martiale de Hollande et la réalité militaire sur le terrain.

    Mais quoiqu’il en soit, cette discussion, difficile, ne peut avoir lieu qu’avec ceux qui dénoncent les crimes d’Assad et de ses soutiens. Car que signifie aujourd’hui se focaliser sur l’intervention occidentale en « oubliant » les interventions russes et iraniennes sinon un soutien hypocrite au boucher de Damas dont l’EI est le « meilleur ennemi du monde ».

    Les doux liens du commerce

    Il en va de même pour les ventes d’armes. L’EI sont d’immondes salauds nous disent les signataires de l’appel, mais l’Arabie Saoudite à qui nous vendons des armes ne vaut guère mieux. On ne peut qu’approuver à 100% la définition des Saoudiens comme fieffés salauds. Mais là encore, nous rappelons à nos « pacifistes » que l’Iran, sur lequel ils ne pipent mot, a à son actif plus 966 exécutions en 2015, numéro 2 mondial derrière la Chine et le « modéré » Rohani en a plus de 2000 depuis son accession au pouvoir. [9] La pantalonnade des statues capitoliennes en Italie vient nous rappeler que grands principes et commerce sont deux choses bien distinctes. Gageons que le futur accord sur la centaine d’Airbus n’est que l’apéro d’un repas qui s’annonce copieux et où la morale ne sera guère invitée.

    En passant, je trouve assez curieux de condamner vigoureusement l’idéologie portée et exportée par, disons pour faire court, l’Arabie Saoudite... sauf quand elle est exportée dans nos banlieues où elle se convertit en réaction contre le « colonialisme d’Etat ».

    Quant à la guerre-pour-vendre des armes, la réalité est bien entendu un peu plus complexe. Bien sur que rien ne vaut une bonne expérience réelle pour booster les ventes. Le meilleur exemple reste la guerre des Malouines en 1982 où l’Exocet (fabrication française) des Argentins coula le Sheffield anglais. Et bien que déplorant vraiment-au-fond-du-cœur la mort des marins anglais, nos alliés quand même, ce touché-coulé fit beaucoup pour les ventes du missile.

    Mais si les monarchies du Golfe ont changé de fournisseur, tournant le dos au traditionnel ami américain en la matière, ce n’est pas parce qu’ils ont découvert tout à coup les vertus du meilleur-avion-de-chasse-du-monde (dixit Dassault) mais pour envoyer un signal à Barack Obama dont le dégel avec l’Iran est considéré par les régimes sunnites comme une véritable trahison. Le même jeu de billard à trois bandes est d’ailleurs valable pour l’Inde.

    Alors quelle se fournissait chez les Russes depuis des décennies, elle a soudainement décidé d’acheter des Rafale après que le Pakistan, l’ennemi par excellence, a annoncé qu’il venait d’acquérir... des Sukkhoi auprès des Russes, rompant ainsi lui aussi avec son fournisseur habituel, les USA. [10] Il faut dire que les relations entre les deux pays ne sont plus au beau fixe depuis quelque temps : outre que les Américains ont peu apprécié de découvrir que Ben Laden coulait des jours tranquilles au Pakistan, le double jeu de ce pays avec les talibans afghans a fait monter l’exaspération. Mais les Pakistanais commencent à se mordre les doigts de ce petit jeu depuis que lesdits Talibans mènent de sanglants attentats sur leur sol. [11] Ces deux exemples juste pour montrer qu’une fois de plus, aller vers l’Orient compliqué avec des idées simplettes, ça n’aide pas.

    Cela étant dit, c’est bien évidemment toute la politique d’armement d’un « vrai » gouvernement de gauche, qui devrait être revue, tout comme sa politique étrangère et son commerce extérieur, même s’il faut reconnaître que le juste milieu entre angélisme niais (on ne commerce et on n’a de relation qu’avec les gentils) et cynisme affirmé (si c’est pas nous c’est les autres qui le feront, donc autant que cela aille dans nos poches) n’est pas chose aisée dans les faits, tout du moins quand on est au pouvoir. Ainsi saluer l’accord avec l’Iran qui met fin aux sanctions ne devrait pas empêcher la critique du régime.

    Et pourtant ils existent...

    Pour conclure, non le terrorisme n’est pas une simple réponse aux méfaits des Occidentaux. C’est une arme qui vise par des moyens limités à effet de levier, à déstabiliser les sociétés dans un but politique bien défini. C’est pourquoi il frappe toute une série de pays d’Afrique et d’Asie, citons en vrac, la Tunisie, la Belgique, l’Indonésie, l’Inde, le Pakistan, le Kenya, la Somalie, le Cameroun, le Nigeria, l’Algérie, la Turquie, l’Egypte, l’Afghanistan, l’Irak, le Yemen, la Syrie, et ... l’Arabie Saoudite.

    Si l’on est un tant soit peu attentif, on verra qu’il n’est pas de jour, je dis bien de jour, où les organisations liées soit à Al Qaida soit à l’Etat islamique [12], ne commettent une ou plusieurs attaques contre un ou plusieurs pays. La France n’est donc qu’une des cibles. Une cible importante idéologiquement, comme l’a bien montré la violente dénonciation par l’EI des enseignants et de l’Education nationale.

    Certains des pays touchés par ce terrorisme sont impliqués dans les guerres du Moyen-Orient, d’autres non, montrant ainsi que faire des attentats une « réponse » aux Occidentaux, qui chez Delphy prend l’allure d’une véritable légitime défense, c’est refuser de se colleter avec la signification politique de ces mouvements. Avec leur dimension et vocations internationales affirmées, ils sont porteurs d’un projet de société dont le califat de l’EI est une vitrine. Et bien entendu, aucune réponse militaire seule ne viendra à bout du phénomène. [13] Toutefois, je trouve plaisant que ceux qui n’ont que le racisme post-colonial à la bouche pour tout expliquer, dénient à ces « ex-colonisés » la découverte que firent les Européens au XIXe siècle, à savoir l’intérêt d’une Internationale.

    Contrairement au assertions de Delphy, à qui nous devons quand même ce magnifique oxymore « panique calme » bien à sa place aux côtés des catholiques zombies chers à Todd, les Français n’ont pas paniqué après les attentats. Car ils ne furent pas une « surprise » comme elle le prétend. Faut-il lui rappeler qu’ils venaient après d’autres attentats, ceux de janvier 2015, qui mirent plusieurs millions de personnes dans la rue ? On peut sourire des « Tous en terrasse » et autres « Même pas peur », mais cela n’est pas un signe de panique. Jusqu’à présent, la résilience de la société a très largement prévalu. Mais qui sait ce qui se passerait si se produisait un autre attentat majeur, en France ou en Europe, ou bien une succession d’attentats même « faibles » ? Or, chacun le sait, il ne s’agit pas là d’une hypothèse d’école mais d’une réalité tout à fait possible.

    Paris, le 28 janvier 2016

    Ariane Perez

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article37075

  • Syrie : « Les bombardements ne changent rien, seuls les civils paient » (Basta)

     Homs, tenu par les rebelles syriens, en juin 2014. Depuis, la cité a aussi subi des bombardements de l’aviation russe / CC Pan Chaoyue

    Quelques jours après les attentats du 13-Novembre, l’armée française intensifiait ses frappes militaires en Irak et en Syrie, contre des sites contrôlés par Daech.

    Pendant ce temps, 4,5 millions de Syriens ont fui leur pays, et la France n’accueille des réfugiés qu’en nombre très limité. Que pensent les premiers concernés de l’intervention militaire française ? Basta ! a recueilli le point de vue de deux Syriennes installées en France, depuis plusieurs années. Elles donnent leurs avis sur la réponse militaire française aux attaques, l’accueil des réfugiés, et la situation politique en Syrie.

    Des pourparlers de paix sur la Syrie doivent commencer ce 29 janvier 2016 à Genève, alors que les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France, avec l’appui de l’Allemagne, et la Russie participent aujourd’hui aux opérations militaires en Syrie [1]. La France avait commencé à frapper des cibles de l’État islamique en Irak en 2014, puis en Syrie à partir de septembre 2015. Après les attentats du 13-Novembre, le gouvernement français a décidé d’y intensifier son intervention militaire. Et d’en modifier la base juridique, en passant d’un régime de défense de l’État irakien – face aux attaques de Daech – à un régime plus ambigu de « légitime défense individuelle », selon l’expression du ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian [2]. Au cours des mois de décembre et de janvier, la France aurait opéré 140 bombardements, selon le ministère de la Défense, soit deux par jour en moyenne [3].

    La Russie, qui a entamé une intervention militaire juste après l’été, ne s’attaque pas seulement à des cibles de l’État islamique. Moscou, qui soutient le régime de Bachar el-Assad, cible aussi largement l’opposition et les rebelles non djihadistes. Ces frappes auraient déjà fait des centaines de victimes civiles, selon Amnesty International. L’ONG accuse la Russie de bombarder des zones d’habitations, et même des structures médicales.

    Pendant ce temps, les Syriens continuent de fuir massivement leur pays. 4,5 millions se sont exilés à l’étranger, dont 2,5 millions en Turquie, 1 million au Liban, plus de 600 000 en Jordanie, 250 000 en Irak, plus de 100 000 en Égypte [4]. Plus de la moitié des 850 000 réfugiés qui ont rejoint l’Europe par les côtes grecques en 2015 sont syriens [5]. La plupart d’entre eux sont venus trouver refuge en Allemagne, où un million de personnes ont déposé une demande d’asile l’année dernière, dont 400 000 Syriens et plus de 100 000 Irakiens. La France n’accueille des réfugiés syriens qu’en nombre très limité : 3 553 demandes d’asile ont été déposées par des Syriens en 2015, selon les chiffres du ministère de l’Intérieur. Ces chiffres ne prennent pas en compte les personnes qui ont pu arriver en France avec un visa.

    Quant aux Syriens qui vivent en France, que pensent-ils de l’intervention militaire ? Comment observent-ils la crise migratoire ? Comment analysent-ils la situation dans leur pays ? Basta ! est allé posé ces questions à deux Syriennes installées en France [6].

    « On a l’argent pour faire la guerre, mais pas pour accueillir les réfugiés politiques ? »

    Jasmine [7] a la trentaine. Elle est arrivée en France en 2011, après avoir terminé ses études dans un autre pays européen :

    « Quand je suis partie de Syrie, ce n’était pas encore un conflit. Il y avait l’oppression, mais ce n’était pas encore la guerre. C’était la révolution. C’était beau. Mais j’ai essayé de partir rapidement, parce que, pour moi, c’était un peu évident que ça allait se transformer en quelque chose de moche. J’ai vécu presque toute ma vie avec ce régime-là, je le connais bien. Ils sont vraiment très durs.

    Je pense que les interventions militaires, dans l’histoire, ont parfois été nécessaires, pendant la guerre des Balkans, en Bosnie, par exemple. En Syrie aussi, il y avait un moment où c’était nécessaire. En 2013, après les attaques chimiques, je ne voyais pas d’autres solutions pour régler ce conflit que l’intervention militaire. À l’époque, il n’y avait pas encore Daech. Mais l’Union européenne n’a rien dit. Obama a d’abord dit que les armes chimiques constituaient une ligne rouge. Puis il a changé d’avis, car la Russie a déclaré que le régime syrien allait rendre ses armes chimiques. Puis tout le monde a oublié. Mais le régime a continué la violence avec toutes sortes d’armes non chimiques, conventionnelles. C’était scandaleux. Il fallait intervenir à ce moment-là. Maintenant, on intervient juste contre Daech.

    Cette intervention militaire française me déçoit. Et c’est triste que les Français ne réagissent pas. J’ai l’impression qu’ils ne savent rien. Que si l’État dit qu’il faut aller faire la guerre, on va y aller. Mais c’est la guerre, il y a aussi des innocents derrière. Et comment fait-on la guerre contre Daech ? Où est Daech ? Parmi les civils, comme à Rakka [Syrie, Ndlr], où vivent un demi-million d’habitants [8]. Pour l’instant, on n’a pas vu de victimes civiles des frappes françaises. Mais de celles de la Russie, oui. Et les Russes bombardent des villes aux mains de l’opposition, de l’armée libre.

    C’est une question très grave que de faire la guerre en Syrie. Je pense qu’il faut la poser aussi aux Français eux-mêmes. Personne ne leur a demandé. Cela représente aussi beaucoup d’argent. On a l’argent pour faire la guerre, mais pas pour accueillir les réfugiés politiques ? La France a joué un rôle très important dans les débuts de la révolution. Elle a accueilli des opposants, elle a rapidement rompu ses relations diplomatiques avec le régime. Mais là, j’ai l’impression que la France a été entraînée dans cette guerre par les attentats. Et je n’aurais pas imaginé que l’Allemagne décide, elle aussi, d’aller faire la guerre en Syrie.

    Je connais beaucoup de Syriens qui sont partis en Allemagne. Je n’aurais jamais imaginé cette vague de migration avant. Bien sûr, je ne pensais pas que les Syriens allaient continuer à supporter ce régime. Je pensais que beaucoup allaient émigrer pour chercher un peu de dignité. Mais pas dans cette proportion. Là, on est en train de vider un pays entier. Les Syriens qui sont en Allemagne, je ne pense pas qu’ils vont rentrer. Et après leur avoir offert une éducation et la protection, l’Allemagne ne va pas les laisser partir si facilement. Mais la crise migratoire, ce n’est pas seulement la crise syrienne, c’est la crise de ce tiers-monde qui est vraiment désespéré et qui veut faire partie du monde. Je me demande pourquoi la France rejette cette migration ? » 

    « Nous voulions négocier avec Assad, c’était naïf »

    Samar Diab [9] est activiste au sein d’une association humanitaire franco-syrienne. Elle vit en France depuis plus de vingt ans :

    « L’Ouest a encouragé la révolution, mais a fait très peu pour l’aider. Les gens sur le terrain, ils s’en fichaient de ce que Hollande disait ici. Là-bas, ce qu’ils veulent, c’est ne pas mourir, ils veulent quelqu’un qui les aide. Aucun Syrien n’a demandé une intervention militaire au début. Moi, au début du conflit, j’étais aussi contre l’envoi d’armes à l’opposition démocratique. Nous voulions négocier avec Assad pour qu’il parte. C’était naïf.

    En 2013, il y a eu les armes chimiques. C’est la deuxième fois que l’Ouest n’a rien fait. Les États-Unis ont dit que l’emploi d’armes chimiques par le régime était une ligne rouge. Mais quand Assad l’a dépassée, personne n’a rien fait.

    Après les attentats du 13-Novembre, Hollande devait faire quelque chose, c’est sûr. Mais il a choisi quelque chose qui n’a pas de sens. L’existence de Daech est liée à l’existence d’Assad. L’Ouest n’a pas aidé l’opposition modérée à se rassembler et à avoir un relais sur le terrain. Maintenant, vu la situation, on ne peut plus dire qu’il n’y aura pas d’intervention militaire. Mais l’intervention aérienne n’apporte rien. Ou alors il faut apporter un soutien logistique militaire aux brigades de l’armée libre. Les bombardements ne changent rien. Seuls les civils paient. Surtout avec les bombardements russes. S’il n’y a pas de stratégie pour résoudre le conflit, ce n’est pas avec des bombardements qu’on le résoudra. Il faut le départ de Bachar el-Assad et une intervention sur le terrain. Ou bien aider ce qui reste de l’armée libre.

    Sur la question kurde, moi, en tant que Syrienne, j’aimerais que nous trouvions un terrain d’entente avec les Kurdes syriens. Il faut qu’on leur donne l’assurance d’être des citoyens à part entière. Ce qui n’était pas le cas avant. Le problème, c’est que nous, les Syriens arabes, nous ne connaissions pas toutes les discriminations que les Kurdes subissaient.

    Dans notre association, nous sommes de générations, de milieux sociaux, de communautés très différentes. Il y a des musulmans, des Druzes, des alaouites, des chrétiens… Mais l’engagement est dur, parce que la situation en Syrie descend toujours plus bas. Quand on voit les Français qui nous aident, ça nous fait tenir. Même si nous voyons que les gens ont peur des réfugiés. Moi, j’ai la nationalité française, j’ai fait venir ma mère, qui a plus de 75 ans. Ça a pris quatre mois de démarches pour qu’elle obtienne un visa de visiteur, de seulement six mois, sans droit à aucune aide. »

     Rachel Knaebel