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Yemen - Page 4

  • Des écoles bombardées : la coalition menée par l’Arabie saoudite met gravement en péril l’avenir des enfants au Yémen (Amnesty)

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    Les forces de la coalition conduite par l’Arabie saoudite se sont livrées à plusieurs frappes aériennes qui ont visé des établissements scolaires toujours utilisés, en violation du droit international humanitaire, et ont ainsi entravé l’accès à l’éducation de milliers d’enfants du Yémen, écrit Amnesty International dans une synthèse rendue publique vendredi 11 décembre. Les forces de la coalition sont armées par des États, dont les États-Unis et le Royaume-Uni.

    Dans ce document intitulé ‘Our kids are bombed’: Schools under attack in Yemen, Amnesty International enquête sur cinq frappes aériennes contre des écoles qui se sont déroulées entre les mois d’août et d’octobre 2015. D’après les recherches menées par l’organisation au Yémen, celles-ci ont fait cinq morts et au moins 14 blessés, dont quatre enfants, dans la population civile. Les élèves ne se trouvaient pas dans les établissements lors des attaques, mais celles-ci ont gravement endommagé ou détruit les locaux, ce qui va avoir des conséquences durables pour les élèves.

    « La coalition dirigée par l’Arabie Saoudite a lancé plusieurs frappes aériennes illégales contre des établissements utilisés à des fins pédagogiques – et non militaires –, ce qui constitue une violation flagrante des lois de la guerre, a déclaré Lama Fakih, conseillère pour les situations de crise à Amnesty International, qui vient de rentrer du Yémen.

    « Les écoles sont des lieux de vie très importants pour la population civile, elles sont supposées être des espaces sûrs pour les enfants. Les jeunes élèves du Yémen sont contraints de faire les frais de ces attaques. Déjà durement touchés par le conflit, ils voient leur éducation bouleversée, ce qui pourrait constituer un handicap qui les suivra toute leur vie. »

    Certains établissements scolaires ont été bombardés à plusieurs reprises, ce qui porte à croire qu’ils ont été délibérément pris pour cibles.

    « Attaquer délibérément des écoles qui ne sont pas des objectifs militaires et s’en prendre directement à des civils qui ne participent pas aux hostilités sont des crimes de guerre », a déclaré Lama Fakih.

    Les dégâts ont gravement perturbé la scolarité des plus de 6 500 enfants inscrits dans les écoles des gouvernorats de Hajjah, d’Al Hudaydah et de Sanaa. Il s’agissait parfois des seuls établissements scolaires de la région. Rien ne donnait à penser que l’un des cinq établissements bombardés aurait pu être utilisé à des fins militaires.

    En octobre 2015, l’école Science et foi du village de Magreesh (district de Bani Hushaysh, gouvernorat de Sanaa), a été bombardée à quatre reprises en quelques semaines. La troisième frappe a tué trois civils et fait plus de 10 blessés. Mille deux cents enfants étaient scolarisés dans cette école, la seule du village.

    Dans le secteur de Hadhran (district de Bani Hushaysh), l’école Kheir a également été la cible de plusieurs frappes aériennes, qui ont gravement endommagé les locaux les rendant inutilisables. Lors de ces attaques, deux habitations civiles et une mosquée ont également été touchées : dans l’une de ces habitations, deux enfants ont été tués et leur mère a été blessée tandis qu’un homme est mort et un autre a été blessé alors qu’ils priaient dans la mosquée.

    Amnesty International demande qu’une enquête indépendante et impartiale soit ouverte sur les cinq attaques présentées dans sa synthèse, et que les auteurs présumés de ces attaques soient tenus de répondre de leurs actes. L’organisation engage également la coalition à accorder des réparations pleines et entières aux victimes de ces attaques illégales et à leurs familles.

    « Les attaques illégales présumées, dont la liste ne cesse de s’allonger, ne font l’objet d’aucune enquête de la part de la coalition saoudienne ni des États qui lui fournissent un soutien, notamment des armes. Cette situation dénote une impassibilité inquiétante à l’égard des conséquences dévastatrices de cette guerre sur les civils au Yémen, a déclaré Lama Fakih.

    « Quelle que soit l’issue des négociations de paix qui doivent se tenir la semaine du 14 décembre, il est essentiel que des enquêtes indépendantes soient menées sur ces attaques et d’autres frappes aériennes illégales, et que les responsables présumés aient à rendre des comptes. »

    C’est tout le système éducatif yéménite qui pâtit du conflit. D’après l’UNICEF, au moins 34 % des enfants ne vont plus à l’école depuis les premières frappes aériennes, en mars 2015.  D’après les chiffres communiqués à Amnesty International par le ministère de l’Éducation, installé à Sanaa, plus de 1 000 établissements scolaires ne fonctionnent plus : 254 ont été entièrement détruits, 608 l’ont été partiellement, et 421 servent d’abri aux personnes déplacées dans le pays par le conflit.

    Ces frappes aériennes ont également terrifié la population civile et ont été traumatisantes sur le plan psychologique pour les élèves.

    « Nous vivons dans la peur. Aujourd’hui, j’ai vu un avion, j’étais terrifiée », a déclaré une enfant de 12 ans scolarisée à l’école d’Al Asma, dans le village de Mansouriya (Al Hudaydah), détruite en août par un bombardement de la coalition.

    La directrice d’un autre établissement de la ville de Hodeida, le campus Al Shaymeh réservé aux filles où sont inscrites quelque 3 200 étudiantes, a fait part de son émotion après que l’établissement eut été bombardé à deux reprises en l’espace de quelques jours, en août 2015. Aucune étudiante ne se trouvait sur le campus, mais un homme et une femme ont été tués.

    « Pour moi, toute humanité avait disparu. Attaquer, sans sommation, un établissement d’enseignement… Où se trouve l’humanité ? […] S’en prendre à ce type de lieu est censé être illégal en temps de guerre », a-t-elle déclaré.

    Des rumeurs, selon lesquelles l’établissement servait de cache d’armes, avaient été colportées, notamment sur les réseaux sociaux, avant les bombardements, mais la directrice a expliqué à Amnesty International qu’elles étaient infondées. L’établissement avait été fouillé à la suite de ces rumeurs : aucune arme n’avait été trouvée.

    Même si des établissements scolaires yéménites ont parfois été utilisés à des fins militaires par les différentes parties au conflit, dans les cinq attaques évoquées dans sa synthèse, Amnesty International n’a trouvé aucun élément (fragments d’armes, débris d’explosions secondaires, etc.) tendant à prouver que ces établissements l’avaient été.

    Les groupes armés étatiques et non étatiques ne doivent pas se servir d’établissements scolaires à des fins militaires, ni se livrer à des opérations à proximité de ces établissements, car ils risquent alors de devenir des cibles militaires légitimes, exposées à des attaques, ce qui met en danger la population civile et peut avoir des effets négatifs à long terme sur l’accès des enfants à l’éducation.

    Dans sa résolution 2225 sur le sort des enfants en temps de conflit armé, adoptée cet été, le Conseil de sécurité des Nations unies a exhorté toutes les parties au conflit à « respecter le caractère civil des écoles » et s’est dit préoccupé par le fait que l’utilisation d’écoles à des fins militaires puisse en faire des cibles légitimes au regard du droit international et mettre en danger la sécurité des enfants.

    La synthèse d’Amnesty International insiste également sur la nécessité pour tous les États qui fournissent des armes à la coalition saoudienne, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, de suspendre de toute urgence tous les transferts d’armements utilisés pour commettre des violations du droit international, y compris des crimes de guerre. Il convient notamment pour les États fournisseurs d’armes de suspendre les transferts de bombes d’emploi général, d’avions de chasse, d’hélicoptères de combat et de pièces et composants associés.

    En novembre, le ministère des Affaires étrangères des États-Unis a approuvé un transfert d’armes (dont des bombes d’emploi général MK89) d’un montant de 1,29 milliard de dollars à destination de l’Arabie saoudite, alors qu’Amnesty International avait recueilli des informations établissant leur utilisation lors de frappes aériennes illégales qui avaient fait plusieurs dizaines de morts dans la population civile.

    « Il est inacceptable que les États-Unis, entre autres alliés de la coalition conduite par l’Arabie saoudite, continuent d’autoriser des transferts d’armements à destination de membres de cette coalition en dépit d’éléments attestant de toute évidence qu’ils ne respectent pas les lois de la guerre ni le droit international humanitaire. Ces transferts doivent cesser immédiatement, a déclaré Lama Fakih.

    « Les États qui approvisionnent la coalition en armes doivent également user de leur influence pour presser les membres de celle-ci de respecter leurs obligations internationales et d’enquêter sur les violations du droit international humanitaire. »

    Il est interdit aux États parties au Traité sur le commerce des armes, dont le Royaume-Uni, de donner leur aval à un transfert d’armes dès lors qu’ils savent que les armes en question serviront à commettre des attaques dirigées contre des civils ou des biens de caractère civil, ou d’autres violations du droit international humanitaire. 11 décembre 2015

    https://www.amnesty.org/fr/bombing-of-schools-by-saudi-arabia-led-coalition-in-yemen/

  • Yémen. Quand les alliés saoudiens des Occidentaux font un carnage, on appelle ça une guerre. (CCR)

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    Selon un rapport des Nations Unies, depuis le début des bombardements de la coalition dirigée par l’Arabie Saoudite contre la rébellion houthiste en mars dernier, plus de 5700 personnes ont perdu la vie au Yémen. Le nombre de civils n’a pas été divulgué par l’ONU mais on parle de 830 femmes et enfants décédés. En octobre dernier Amnesty International estimait le nombre de morts à 4000, dont la moitié serait des civils. En tout cas, les ONG et organismes de défense des Droits de l’Homme s’accordent pour dire que les principaux responsables de ces vies perdues sont les pays de la coalition alliée des pays occidentaux.

    On estime également que 21,2 millions de personnes (82% de la population totale) ont besoin d’assistance humanitaire ; 3 millions d’enfants et des femmes enceintes ou allaitant se trouvent dans une situation de malnutrition. Près de 2 millions d’enfants ne peuvent pas aller à l’école non plus depuis mars.

    A cela il faudrait ajouter la pénurie de produits de base et d’aliments due en grande partie au blocus économique imposé par l’Arabie Saoudite.

    Depuis la mi-mars, également, on a près de 9000 cas de violation des Droits de l’Homme. D’ailleurs, en septembre dernier les pays du Golfe ont bloqué la mise en place d’une enquête indépendante des Nation Unies à ce propos.

    Les puissances impérialistes sont responsables et complices de ce drame qu’est en train de vivre le peuple yéménite. Non seulement elles soutiennent leur allié saoudien, qui intervient pour essayer d’éviter la progression des Houtistes chiites alliés de l’Iran, mais elles arment le royaume saoudien.

    En effet, lors de bombardements délibérés contre des populations civiles, Amnesty International affirme avoir trouvé des bombes de type MK 80, fabriquées par l’entreprise états-unienne General Dynamics. Amnesty accuse aussi la coalition menée par l’Arabie Saoudite d’utiliser des bombes à sous-munitions, également fabriquées par une firme états-unienne, Aerojet et Honeywell. Il faut rappeler que l’utilisation des armes à sous-munitions est interdite par une convention de l’ONU depuis 2010.

    Parmi les principaux fournisseurs d’armements à l’Arabie Saoudite et ses alliés on trouve les Etats-Unis, l’Allemagne, la Grande-Bretagne mais aussi la France, comme le « voyage d’affaires » de la mi-octobre de Valls dans la région pour vendre le savoir-faire belliciste français le démontre.

    Alors que les dirigeants des différentes puissances impérialistes ont exprimé leur indignation hypocrite face aux attentats de Paris la semaine dernière, au Yémen il ne s’agit pas simplement du connu « deux poids, deux mesures » face à la mort de civils dans des pays dominés par l’impérialisme, mais de la complicité explicite avec les bourreaux du peuple.

    Si nous dénonçons la responsabilité du gouvernement français avec ses guerres qui sont la source du terrorisme islamiste qui a débouché sur l’assassinat de dizaines de personnes à Paris, nous affirmons qu’en Syrie, au Mali, en Centrafrique, en Libye et au Yémen ce sont aussi avec « nos morts » qu’ils sont en train de payer « leurs guerres ». Philippe Alcoy

    http://www.revolutionpermanente.fr/Yemen-les-allies-saoudiens-des-Occidentaux-font-un-carnage

  • Yémen. Des armes à fragmentation brésiliennes auraient été utilisées dans une attaque lancée par l'Arabie saoudite et ses alliés (Amnesty)

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    Les forces de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite ont recouru à un modèle brésilien de munitions à fragmentation, interdites au niveau international, lors d'une attaque contre un quartier résidentiel d’Ahma à Sada (nord du Yémen) cette semaine, blessant au moins quatre personnes et répandant de dangereuses sous-munitions non explosées sur des terres agricoles des alentours, a déclaré Amnesty International vendredi 30 octobre.  

    L’organisation a recueilli les propos d’un certain nombre de résidents locaux, dont deux victimes, les professionnels de santé qui les soignent, un témoin et un militant local qui s’est rendu sur place peu après l’attaque. Les projectiles non explosés retrouvés sur les lieux de l’attaque sont similaires à des bombes à sous-munitions de fabrication brésilienne dont on sait que l’Arabie saoudite les a utilisées par le passé.

    « Parce que les armes à sous-munitions sont par nature non discriminantes, leur utilisation est interdite par le droit international humanitaire coutumier. En fait, près de 100 États interdisent leur fabrication, leur stockage, leur transfert et leur utilisation, compte tenu des dégâts uniques et durables qu’elles causent », a déclaré Philip Luther, directeur du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

    « Outre le fait de tuer et blesser des civils lors de leur utilisation initiale, de nombreuses sous-munitions n’explosent pas à l’impact et continuent à présenter pendant des années un risque mortel pour toutes les personnes qui sont à proximité. La coalition dirigée par l’Arabie saoudite doit immédiatement cesser de les utiliser, et tous les camps doivent publiquement s’engager à ne jamais déployer d’armes à sous-munitions et envisager de devenir parties à la Convention mondiale sur les armes à sous-munitions. »

    Témoignages

    L’attaque a eu lieu vers midi mardi 27 octobre 2015, dans une zone résidentielle d’Ahma, à environ 10 kilomètres au nord-ouest d’al Talh dans le district de Sahar, près de la ville de Sada. Ahma se trouve à une quarantaine de kilomètres de la frontière avec l’Arabie saoudite. 

    Un militant local qui s’est rendu sur le site plusieurs heures après l’attaque a trouvé trois sous-munitions non explosées situées à une vingtaine de mètres les unes des autres - une dans un champ d’une ferme locale, une autre près d’une serre et une troisième près d’une mosquée. À la connaissance d’Amnesty International, l’objectif militaire le plus proche est un marché à al Talh, à une dizaine de kilomètres au sud-est, où il est établi que des armes sont vendues et qui a été visé par des frappes aériennes à au moins cinq occasions distinctes depuis le début, en mars, de la campagne de bombardements menée par l’Arabie saoudite et ses alliés. 

    Des témoins ont décrit comment, malgré l’absence d’aéronefs militaires, une série de roquettes ont sifflé dans le ciel et explosé en vol, suivies de dizaines d’explosions au sol. Ces témoignages et les éléments retrouvés sur le terrain confirment l’utilisation de munitions à fragmentation tirées par le biais de roquettes sol-sol, elles-mêmes propulsées par un système de lance-roquettes multiple.  

    Salah al Zara, 35 ans, agriculteur local, se trouvait sur la route principale à 50 mètres, lorsque la frappe est survenue. « J’étais à moto avec un ami et nous allions dans la direction de Dhahyan, lorsque j’ai vu [...] quatre roquettes en pleine descente [...]

    Chacune a pris une direction différente ; il y avait deux minutes d’intervalle entre les roquettes. Il y a d’abord eu quatre explosions dans le ciel, et puis cinquante au moment de l’impact au sol. Les munitions ont atterri sur un groupement de 30 maisons et commerces. »

    Saleh al Muawadh, 48 ans, un agriculteur père de 10 enfants, a parlé à Amnesty International au téléphone depuis son lit à l’hôpital d’al Jamhouri, dans la ville de Sada : « Je passais à moto sur la route principale près du lieu de l’attaque quand j’ai senti plein d’éclats de métal. L’impact de la frappe s’est ressenti jusque dans des fermes situées à deux kilomètres du site. »

    Des blessures causées par des éclats

    Selon des professionnels de la santé ayant soigné les victimes de cette attaque, un des blessés, Abdelaziz Abd Rabbu, 25 ans, atteint au torse et à l’abdomen, est dans un état critique.

    Abdelbari Hussein, 22 ans, un autre civil blessé lors de la frappe, a déclaré à Amnesty International : « J’étais assis dans mon magasin quand l’attaque s’est produite. Je n’ai pas entendu d’avion, seulement des explosions. » Il a été blessé à l’abdomen par des éclats métalliques.

    Même si l’attaque a pu viser des Houthis et d’autres membres de groupes armés parmi la population civile, le recours à des armes frappant sans discrimination comme les munitions à fragmentation est interdit par le droit international humanitaire. Tout recours à des armes à dispersion est contraire à cette règle.

    Interdiction des bombes à sous-munitions

    Les armes et munitions à fragmentation contiennent entre des dizaines et des centaines de sous-munitions, qui sont libérées dans l’air, et se répandent sans discrimination sur une large surface pouvant mesurer des centaines de mètres carrés. Elles peuvent être larguées ou tirées depuis un avion ou, comme dans ce cas, projetées depuis des roquettes sol-sol.  

    Les sous-munitions ont par ailleurs un taux de non explosion élevé - ce qui signifie qu’un fort pourcentage d’entre elles n’explosent pas à l’impact, et deviennent de fait des mines antipersonnel qui représentent une menace pour les civils, des années après leur déploiement. La fabrication, la vente, le transfert et l’utilisation de munitions à fragmentation sont prohibés par la Convention de 2008 sur les armes à sous-munitions, signée par plus de 100 États. 

    Bien que le Brésil, le Yémen, l’Arabie saoudite et les autres membres de la coalition menée par cette dernière qui prennent part au conflit au Yémen ne soient pas parties à la Convention, elles sont tenues, en vertu des règles du droit international humanitaire coutumier, de s’abstenir d’utiliser des armes qui par nature frappent sans discrimination et représentent invariablement un danger pour les civils. 

    L’ASTROS II brésilien

    Amnesty International, Human Rights Watch et la Coalition contre les sous-munitions ont recueilli des informations sur le recours de l’Arabie saoudite et ses alliés à quatre modèles de munitions à fragmentation dans le cadre du conflit au Yémen à ce jour, dont trois de fabrication américaine.  

    Mais cette attaque récente semble marquer la première utilisation de munitions à fragmentation brésiliennes dans ce conflit.

    Plusieurs entreprises brésiliennes produisent ce type de munitions. Si Amnesty International n’a pas été en mesure de confirmer de manière indépendante la marque et le modèle des sous-munitions larguées sur Ahma, celles-ci présentent des similitudes avec des dispositifs fabriqués par une entreprise brésilienne nommée Avibrás Indústria Aeroespacial SA.

    L’ASTROS II, un système de lance-roquettes multiple monté sur un camion, est fabriqué par Avibrás. L’ASTROS II peut tirer plusieurs roquettes de suite à brefs intervalles, et trois de ses roquettes peuvent être équipées d’un nombre de sous-munitions pouvant aller jusqu’à 65, et possèdent un rayon d’action pouvant atteindre les 80 km, selon le type de roquette. Le site Internet de l’entreprise le dit « capable de tirer des roquettes longue portée et conçu comme un système d’armement stratégique ayant un fort pouvoir dissuasif. »

    Selon le Landmine and Cluster Munition Monitor, qui effectue un suivi sur les mines terrestres et les munitions à fragmentation, Avibrás a vendu ce type de munitions à l’Arabie saoudite par le passé, et Human Rights Watch a recueilli des informations sur leur utilisation par les forces saoudiennes à Khafji en 1991, « laissant derrière elles un nombre élevé de sous-munitions non explosées. »

    « Le Brésil doit immédiatement préciser quelle est l’étendue de ses transferts internationaux de munitions à fragmentation interdites, qui remontent à des décennies. Le Brésil et les autres États continuant à permettre la production et le transfert de ces armes ne peuvent prétendre qu’ils n'ont pas conscience de l’impact qu’elles ont sur les civils au Yémen et ailleurs. Le Brésil doit immédiatement mettre un terme à leur fabrication, détruire ses stocks et adhérer à la Convention sur les armes à sous-munitions sans plus attendre », a déclaré Átila Roque, directeur exécutif d’Amnesty International Brésil.  

    Vendredi 30 octobre, Amnesty International a parlé avec un haut responsable d’Avibrás qui avait vu les images en provenance du Yémen. Il a déclaré que la forme « ressemble » à certains des modèles d’Avibrás et n’a pas exclu qu’il s’agissait d’un de leurs produits, mais a ajouté que cela était assez improbable compte tenu du calibre. Il a toutefois reconnu que l’entreprise a fabriqué des calibres du même type au début des années 90, et a déclaré qu’il mènerait une enquête plus approfondie. 30 octobre 2015

    https://www.amnesty.org/fr/press-releases/2015/10/yemen-brazilian-cluster-munitions-suspected-in-saudi-arabia-led-coalition-attack/

  • Nouveautés sur "Amnesty"

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  • La prochaine vague de réfugiés viendra du Yémen (CI)

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    La guerre entre les armées du Golfe et leurs alliés locaux contre la rébellion houthiste frappe un des pays les plus pauvres de la planète.

    Désormais, c’est la famine qui guette, poussant des dizaines de milliers de personnes à quitter le pays par la mer.

    “La prochaine crise de réfugiés, ce sera le Yémen”, prédit le spécialiste du Moyen-Orient Juan Cole dans le magazine américain The Nation. Il rappelle que “depuis le début de l’intervention militaire [saoudienne, en mars 2015], le nombre de personnes déplacées à l’intérieur du pays est en forte hausse, avec 1,5 million de personnes”.

    De même, “quelque six millions de personnes ne sont plus très loin de connaître la famine”. Car la coalition arabe dirigée par les Saoudiens a imposé un blocus aérien, maritime et terrestre, arguant qu’il fallait empêcher d’éventuelles livraisons d’armes iraniennes à la rébellion houthistes. Or avant la guerre, le Yémen dépendait à quatre-vingt-dix pour cent des importations pour couvrir ses besoins alimentaires.

    Aussi, selon The Nation, “plus de 125 000 personnes ont déjà quitté le pays, et des milliers d’autres suivent chaque semaine, embarquant sur des cargos vers Djibouti et la Somalie, pour ensuite essayer de rejoindre l’Egypte, [puis l’Europe]. Et, si la coalition arabe dirigée par l’Arabie Saoudite devait réussir à conquérir [la capitale du Yémen] Sanaa, comme elle s’y est engagée, les zaïdites [base sociale des houthistes, nombreux dans la ville] se mettraient eux aussi à fuir par milliers.”

    L’Arabie Saoudite abandonne le Yémen au chaos

    http://www.courrierinternational.com/-la-prochaine-vague-de-refugies-viendra-du-yemen

  • Nouveautés sur "Amnesty"

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  • La mort et la destruction semées chez les civils dans le sud du Yémen (Amnesty)

    An armed member of Houthi militia (R) keeps watch as people gather beside vehicles which were allegedly destroyed by a Saudi air strike

    Font craindre que des crimes de guerre n’aient été commis

    Les frappes aériennes de la coalition dirigée par lArabie saoudite et les attaques lancées par des groupes armés pro et anti-Houthis à Taizz et Aden, au Yémen, ont tué de très nombreux civils - parmi lesquels des dizaines de mineurs - et pourraient constituer des crimes de guerre, écrit Amnesty International dans une nouvelle synthèse rendue publique mardi 18 août.

    Ce document, intitulé Nowhere safe for civilians: Airstrikes and ground attacks in Yemen, met en relief les conséquences des frappes aériennes illégales effectuées par la coalition contre des zones résidentielles densément peuplées, ainsi que celles des attaques menées au sol par des groupes armés loyaux aux Houthis comme hostiles à ceux-ci, qui ont lancé des assauts dune ampleur disproportionnée contre des zones civiles.

    « Les civils du sud du Yémen se retrouvent pris sous les feux croisés meurtriers des groupes houthis et anti-houthis, tout en vivant sous la menace constante des frappes aériennes de la coalition. Toutes les parties au conflit font délibérément preuve dun mépris impitoyable pour la sécurité des civils », a déclaré Donatella Rovera, conseillère principale à Amnesty International pour les situations de crise.

    « Le rapport décrit avec force détails poignants la mort et la destruction semées à Taizz et Aden par des attaques illégales imputées à tous les camps, et qui sont susceptibles de constituer des crimes de guerre. »

    Les attaques de la coalition dirigée par l’Arabie Saoudite

    Lors dune mission de recherche au Yémen en juin et juillet 2015, Amnesty International a enquêté sur huit frappes aériennes attribuées à la coalition dirigée par lArabie saoudite, qui a coûté la vie à au moins 141 civils et en a blessé 101 autres, pour la plupart des femmes et des enfants. Les éléments recueillis montrent que des zones densément peuplées comprenant des logements civils, une école, un marché et une mosquée ont été délibérément visées par des frappes. Dans la majorité des cas, aucune cible militaire na pu être identifiée à proximité.

    « Les forces de la coalition ont failli de manière flagrante à leur devoir consistant à limiter le nombre de victimes civiles, quelles sont pourtant tenues de respecter aux termes du droit international humanitaire. Lorsque des attaques aveugles tuent ou blessent des civils, elles constituent des crimes de guerre », a déclaré Donatella Rovera.

    Un résident, décrivant les répercussions dune attaque menée contre une zone résidentielle où habitaient des employés dune centrale électrique, à Mokha le 24 juillet, a dit que « des corps et des têtes » étaient éparpillés partout, « engloutis par le feu et les cendres », comparant ce quil avait vu à une scène du « Jugement dernier ». Un autre résident a déclaré à Amnesty International quil continuait à être hanté par le souvenir de ce jour où il avait traversé des « mares de sang où surnageaient les membres sectionnés » de plus de 20 victimes.

    Une attaque menée par la coalition le 9 juillet a tué 10 membres - dont quatre enfants - dune famille qui sétait réfugiée dans une école du nord dAden après avoir été déplacée par les combats. « Nous sommes venus ici pour échapper à la guerre », a déclaré à Amnesty International le père de trois jeunes femmes tuées lors de la frappe. « Nous navions nulle part où aller. »

    Une autre frappe illégale, datant du 7 juillet, a fait 11 morts parmi les fidèles dune mosquée de Waht, dans le nord dAden. Les témoins dune frappe aérienne survenue la veille lors dun marché au bétail, également dans le nord dAden, ont décrit les effusions de sang à Amnesty International. Un rescapé a expliqué quun éclat dobus lui a lacéré labdomen, endommageant ses organes internes. Un autre témoin a qualifié la scène de « massacre ». « Des restes humains et animaux et le sang des uns et des autres étaient mêlés. Cétait vraiment dur à regarder », a-t-il dit.

    Attaques menées par des groupes armés lors de combats au sol

    Amnesty International a également enquêté sur 30 attaques perpétrées à Aden et Taizz par des Houthis, soutenus par les forces armés et forces de sécurité loyales à lancien président Ali Abdullah Saleh, et par des groupes armés anti-Houthis, qui saffrontaient sur place, tuant au moins 68 civils et en blessant 99 autres.

    Des combattants des deux camps ont régulièrement utilisé des armes imprécises, dont des roquettes de type Grad, des mortiers et de lartillerie, contre des zones densément peuplées, faisant ainsi preuve dun mépris total pour la sécurité des civils. Les attaques aveugles de ce type sont susceptibles de constituer des crimes de guerre.

    Lors dune de ces attaques, des roquettes tirées contre le quartier dal Mansoura, à Aden, le 1er juillet, ont atteint deux hôtels où sétaient réfugiées des familles déplacées. Parmi les civils les plus grièvement blessés figuraient Amal Ali et son bébé de 18 mois. « Des éclats métalliques lui sont entrés dans la tête et sont ressortis par lœil gauche, causant des lésions internes », a-t-elle dit à propos de son enfant. « Il a perdu un œil et est dans le coma. » Quatre autres membres de sa famille, dont son fils de trois mois, ont eux aussi été blessés. Cette même attaque a laissé une femme de 55 ans totalement paralysée.

    Une des attaques les plus meurtrières, le 19 juillet, a été menée par des Houthis et leurs alliés contre Dar Saad, à Aden ; 45 personnes, pour la plupart des civils, ont alors perdu la vie.

    De nombreuses attaques semblent avoir été lancées depuis des quartiers civils densément peuplés, en violation du droit international humanitaire. Un résident a expliqué que les civils se retrouvent pris au piège des affrontements : « Ils se battent et nous sommes pris au milieu, mais nous navons nulle part dautre où aller. »

    Dans plusieurs des cas recensés, des enfants ont été tués ou blessés alors quils jouaient dans la rue ou près de chez eux. La synthèse contient en outre plusieurs récits choquants livrés par des témoins et des rescapés ayant vu des corps coupés en deux et des membres sectionnés.

    Un homme ayant été témoin dune attaque a évoqué lenfant qui a couru vers lui avec le cou ensanglanté et un trou dans la tête causé par des éclats dobus, ainsi que les « bouts de cerveau maculant murs et fenêtres ».

    Commission d’enquête des Nations unies

    Amnesty International demande au Conseil des droits de lhomme des Nations unies de créer une commission denquête internationale chargée de mener une investigation indépendante et impartiale sur les crimes de guerre présumés commis dans le cadre du conflit.

    Au 4 août, les combats au Yémen avaient fait au moins 1 916 morts parmi les civils, selon le Haut-commissariat aux droits de l’homme des Nations unies. Au moins 207 biens de caractère civil, dont des biens immobiliers et des infrastructures, ont été complètement ou partiellement détruits par le conflit armé.

    « Les auteurs des attaques cruelles contre les civils au Yémen doivent savoir quil y aura un prix à payer, et quils auront à répondre de crimes de guerre. Si la communauté internationale sabstient denquêter et damener les auteurs présumés à rendre des comptes, alors il est fort probable que ce type dattaques et les nombreux décès et blessures quelles causent chez les civils continueront », a déclaré Donatella Rovera.

    Les souffrances des civils dans le sud du Yémen sont par ailleurs intensifiées par une crise humanitaire aiguë. Au moins 80 % de la population requiert une assistance humanitaire. Des services essentiels comme laccès à leau potable et à lélectricité ont été suspendus, et le prix des denrées alimentaires a flambé.

    Les dégâts infligés à des infrastructures logistiques cruciales telles que des ponts, des aéroports et des ports maritimes entravent par ailleurs fortement lacheminement déquipements humanitaires indispensables. Laccès à des soins de santé est également limité en raison de la fermeture de centres médicaux, des agressions fréquentes dont sont victimes les professionnels de la santé et de lamenuisement des réserves délectricité, de carburant, de médicaments et déquipements chirurgicaux. 18 août 2015, 18:25

    https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2015/08/yemen-bloody-trail-of-civilian-death-and-destruction-paved-with-evidence-of-war-crimes/

  • Chiites contre sunnites ? Yémen: pays au bord du chaos (CCR)

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    Le 26 mars dernier, une coalition de pays du Golfe conduite par l’Arabie Saoudite à lancé une attaque sur le Yémen pour « arrêter l’avancée de forces houthis », répondant à la branche zaïdite du chiisme et qui seraient soutenues par l’Iran. A priori, selon la presse, il s’agirait d’une guerre entre les sunnites et les chiites.

    L’opération militaire de la coalition arabe au Yémen baptisée « Tempête Décisive » a été remplacée par la nouvelle mission « Restaurer l’Espoir ».

    Elle réunit les pays du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), à l’exception du Sultanat d’Oman, en plus du Maroc, de l’Egypte, de la Jordanie, du Soudan et du Pakistan. L’un des enjeux serait d’empêcher « l’encerclement » de l’Arabie Saoudite par le chiisme dominant déjà à Bagdad, Damas et Beyrouth par le Nord et donc, le Yémen, par le Sud. Il s’agit, surtout, de remettre en place le président Abd Rabo Mansour Hadi, successeur d’Ali Abdallah Saleh, passé dans l’ombre du pouvoir à la suite du soulèvement qu’a connu le Yémen dans le sillage des « Printemps arabes », mais également d’empêcher que les Houthis, dont le fief historique se situe au Nord-ouest du pays, ne domine le détroit de Bab el-Mandeb, la mer Rouge et du canal de Suez et par lequel transite 10% du commerce maritime international et le 30% du pétrole brut mondial et aussi d’interférer dans les négociations en cours entre les Etats-Unis et l’Iran .

    L’ensemble des médias occidentaux répète à l’envie qu’il s’agirait d’un affrontement entre sunnites et chiite, comme l’enjeu était celui d’un conflit uniquement interreligieux, sans autres causes. En réalité ce n’est que l’une des expressions régionales de la crise de l’impérialisme et du déclin de l’hégémonie étatsunienne dans ce qui compose une pièce à part de ce puzzle nommé « Géopolitique du chaos moyen-oriental ».

    Un peu d’histoire pour mieux comprendre….

    Le Yémen a été pendant des siècles gouverné par un imam auquel se soumettaient les tribus. Au lendemain de l’effondrement de l’Empire ottoman, l’imam Yahya Al-Muttewakil doit combattre l’armée du roi Abdelaziz d’Arabie Saoudite qui cherche à annexer la principauté zaïdite. Tout en réussissant à maintenir son indépendance, cette dernière perdra néanmoins la région de l’Asir, ce qui laissera de profonds antagonismes dans les relations entre les deux pays.

    Au Sud, en revanche, les imams se sont tenus aux frontières qui les séparent du protectorat britannique d’Aden, établi en 1839.

    Ce système d’imanat va perdurer jusqu’à la « Révolution républicaine » de 1962, un putsch militaire mené par le colonel Sallal qui met fin au règne des imams. A l’époque, soit dit au passage, craignant comme la peste la contagion nassérienne ou baassiste ou tout simplement nationaliste arabe, Riyad appuie l’imamat comme rempart réactionnaire contre la poussée populaire sur laquelle s’appuient les jeunes officiers républicains.

    D’autre part, le 30 novembre 1967, Aden accède à l’indépendance et dans ce même contexte de secousses populaires, sur fond de décolonisation et de poussée du nationalisme arabe, c’est la naissance de la République populaire du Yémen du Sud, proche de Moscou jusque dans les années 1980, face à la République arabe du Yémen ou Yémen Nord, qui se réaligne rapidement sur l’Occident. Ces contradictions mèneront au déclenchement de plusieurs guerres civiles, en février 1979, suivie d’autres affrontements en 1981 et 1982. Il faudra attendre 1990 pour que la réunification mette fin aux affrontements, au profit du Yémen Nord et qui sert de tremplin au coup d’Etat de Saleh, devenu le nouvel homme fort du pays et homme-lige de l’impérialisme sur place.

    Dans la foulée des révolutions arabes en 2011, le pays connaît un processus de contesta- tions et de soulèvements urbains, notamment à Aden et à Sanaa, qui aboutissent à la démission du président Saleh en 2012 et au début d’un « processus de transition », qui canalise partiellement la situation et tente de stabiliser le pays en remettant le pouvoir à un ancien militaire, Abd Rabbo Mansour Hadi.

    Sur fond de contradictions régionales yéménites entre Nord et Sud, réouvertes après le processus de 2011-2012 et qui se sont accentuées, à mesure que le processus révolutionnaire arabe s’enlisait, en 2014 les zaïdites, dirigées par Abdel Malek al-Houthi, s’opposent au plan de fédération proposé par le président Hadi, estimant que leur pouvoir serait redimensionné, et ils marchent sur la capitale Sanaa. En 2015 les milices houthies lancent une offensive vers le Sud du pays obligeant le président Hadi à fuir la capitale et à se refugier à Aden, conquise dans la foulée par les Houthis, alliés aux forces fidèles à l’ancien dictateur. Bientôt, l’Arabie Saoudite intervient pour stopper cette poussée. Prise en étau entre des forces absolument réactionnaires, c’est la population yéménite qui supporte par contrecoup le fardeau de la guerre, avec plusieurs milliers de morts, des centaines de milliers de déplacés et autant qui se trouvent en situation de crise humanitaire, privés d’accès aux denrées de base.

    Entrecroisements d’intérêts internationaux

    Lors de la destitution de MohamedMorsi, en Egypte, sur fond d’immenses manifestations populaires au cours de l’été 2013, l’Arabie Saoudite avait déjà dévoilé ses velléités à prendre de la distance à l’égard des Etats Unis, davantage favorables à des solutions de type « transition démocratique » pour mieux en finir avec le processus révolutionnaire ouvert par les « Printemps arabes ». Riyad, en revanche, n’a pas douté et a choisi la dictature d’Al-Sissi en appuyant et finançant le coup d’état de ce dernier, mettant les Etats-Unis devant le fait accompli.

    L’intervention de la coalition au Yémen, a pour objectif de s’opposer à la montée en puis- sance de l’Iran (même si cela n’est pas spécifiquement déclaré), alors que Washington a choisi la voie du rapprochement avec Téhéran, après plus d’un quart de siècle de brouille complète. Un accord définitif sur le nucléaire aurait des conséquences majeures sur l’ordre régional. C’est bien ce que craignent tant Israël que l’Arabie Saoudite. Le conflit au Yémen est donc une façon, pour Riyad, de faire obstacle à ce rapprochement. D’après un journaliste saoudien très bien informé auprès des cercles dirigeants saoudiens, Ryad aurait placé le gouvernement américain devant le fait accompli « Nous avons décidé d’intervenir au Yémen. Etes-vous avec nous ou non ? ». Si cela s’avérait être juste, cela signifierait un tournant important dans la politique extérieure de Riyad et illustrerait, une fois de plus, la difficulté des Etats-Unis à maintenir leur hégémonie.

    Quoi qu’il en soit, Washington s’est vu in fine contraint d’exprimer son soutien à l’opération de la coalition, tout en continuant à maintenir les pourparlers sur le nucléaire iranien et à collaborer étroitement avec Téhéran sur les dossiers irakien et syrien, de façon à juguler l’avancée de l’Etat islamique. Enchevêtrement d’intérêts parfois contradictoires, disions-nous.

    Cette manifestation d’indépendance sur un dossier sensible de politique extérieure peut s’expliquer par le fait de l’accession au pouvoir du nouveau roi Salman Ben Abdelaziz Al Saoud, et d’un profond remaniement de l’Etat avec l’arrivée d’une myriade de jeunes princes et de technocrates. Ces derniers ont décidé que le royaume wahhabite devait continuer à être le principal allié des Etats Unis dans la région, mais ils craignent en effet qu’un accord définitif sur le nucléaire iranien ne signifie une montée en puissance de Téhéran qui pourrait aspirer à redevenir l’un des interlocuteurs principaux des Etats Unis dans la région, comme avant la Révolution islamique de 1979.

    C’est dans ce cadre également qu’il faut comprendre la récente visite du prince Muhamad bin Salman en Russie et la signature de l’accord de coopération sur l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire. Ce rapprochement ponctuel de l’Arabie Saoudite et de la Russie ne fait que confirmer toute la complexité et l’imbrication des intérêts dans cette portion du Moyen Orient. A mesure où les Etats-Unis rétablissent les contacts avec l’Iran, les anciens alliés « privilégiés » que sont la Turquie et l’Arabie Saoudite commencent, chacun à leur façon, à manœuvrer pour ne pas perdre leur condition d’interlocuteur privilégié.

    Le pétrole a aussi ses raisons

    D’autre part les Etats-Unis sont passés du rang d’importateur net de pétrole, comptant parmi les clients les plus importants des pays du Golfe, à l’autosuffisance, avec l’exploitation du pétrole et gaz de schiste. Ils envisagent même de commencer à exporter, c’est-à-dire à concurrencer les pays exportateurs ce qui c’est traduit par une chute des prix du pétrole de près de 50%. Cela nuit aux pays exportateurs « ennemis » comme la Russie, le Venezuela et l’Iran, mais également aux « alliés de toujours », qui voient fondre leurs rentes liées aux volumes d’exportation. Comme mesure de rétorsion, l’Arabie Saoudite, a décidé de ne pas réduire son niveau de production, une façon de contrer la production américaine de pétrole de schiste qui, aux prix actuels de vente sur le marché, n’est plus rentable. Il est évident que ce bras de fer va continuer, rajoutant du chaos au chaos.

    Un pays au bord de la fragmentation

    Le plan des néoconservateurs américains d’un « Grand Moyen-Orient », concocté pendant la présidence Bush, a échoué. A sa façon, l’administration Obama a poursuivi, sous un angle différent, cette politique. On connaît la suite, avec la situation actuelle en Lybie, en Syrie ou en Irak, l’apparition d’organisations comme Al-Qaïda dans la Péninsule Arabique, seule branche d’Al-Qaïda à avoir une base territoriale, l’Etat Islamique et ses ramifications, y compris au Yémen, où Daech appuie, objectivement, par ses attentats anti-chiites, la coalition saoudienne soutenue par les Etats-Unis. Autant d’organisations, crées ou financés par les puissances régionales ou directement par les services secrets américains, ou qui sont, au bas mot, des créatures monstrueuses de la politique impérialiste dans la région et qui en font une poudrière qui risque d’éclater à tout moment.

    Le coût en vies humaines, les souffrances infligées à des populations déjà fragilisées par la pauvreté, voilà le lourd tribut payé par les Yéménites à cette guerre régionale par procuration. Les combats pour le contrôle de la grande ville du Sud, Aden, entre loyalistes, appuyés par l’aviation saoudienne, et « rebelles » continuent, même si l’aéroport international est repassé, entre temps, aux mains des troupes fidèles au président Hadi. Pendant ce temps, la guerre a déjà fait plus de 4000 morts et 20000 blessés en quatre mois, pour un pays qui compte pas moins de 1,2 millions de déplacés, alors que 80% de la population manque de tout : c’est le résultat de l’embargo sur les ports yéménites mis en place par l’Arabie Saoudite, aggravé par la résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU, officiellement pour contrer sur les livraisons d’armes aux troupes houthies. Voilà donc ce qu’offrent l’impérialisme et ses alliés régionaux, plus ou moins turbulents, aux peuples de la région. Publié le 14 août 2015 Michel Rosso

    http://www.revolutionpermanente.fr/Yemen-Pays-au-bord-du-chaos
     
  • Hassan Boucenine, chef de mission MSF au Yémen (France Inter)

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    "La plupart des ONG n'interviennent pas au Yémen. C'est un scandale"

    Alors que la situation au Yémen empire et que l'urgence humanitaire a été déclarée maximale par les Nations Unies, Hassan Boucenine, le chef de mission pour Médecins sans frontières au Yémen, intervient depuis Sana'a.

    Il décrit une capitale yéménite quasiment rayée de la carte, ressemblant aux villages bombardés pendant la Seconde Guerre Mondiale. Le travail de Médecins Sans Frontières y est très difficile, très risqué. A Sana'a, les bombardements quotidiens, et parfois en plein centre-ville à l'heure de pointe. Hassan Boucenine déplore que la majorité des ONG refuse d'intervenir au Yémen, préférant rester à Amman en Jordanie. Il dénonce un "scandale".

    Ecouter:

    (ré)écouter cette émission disponible jusqu'au 18/04/2018 06h50

    http://www.franceinter.fr/emission-invite-de-7h50-hassan-boucenine-chef-de-mission-msf-au-yemen-la-plupart-des-ong-nintervienn

    Commentaire: C'est bien plus compliqué que Houtis= Chiites= Iran

    Voir nos articles "Yemen":

    http://revolutionsarabes.hautetfort.com/yemen/

  • Nouveautés sur "Lutte Ouvrière"

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