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Yemen - Page 5

  • Yémen. A qui appartient la victoire contre les houthistes à Aden ? (Courrier International)

    Les milices houthistes sont en voie de perdre le contrôle de la deuxième ville du pays. La presse saoudienne parle du succès de son intervention militaire, mais, à Aden, on y voit surtout la victoire du mouvement sécessionniste sudiste.

    “Que signifie la libération d’Aden ?” s’interroge l’éditorial du journal saoudien Al-Riyadh. Dans la deuxième ville du pays, les milices houthistes reculent en effet face à une offensive lancée par les forces progouvernementales, des milices locales et la coalition arabe menée par l’Arabie Saoudite.

    “Cette avancée stratégique s’étendra progressivement aux autres provinces actuellement contrôlées par les houthistes, poursuit le journal. Dans quelques jours, le gouvernement légitime [actuellement en exil en Arabie Saoudite] pourra tenir son premier Conseil des ministres à Aden, qui sera [la capitale provisoire] du Yémen en attendant la reconquête de Sanaa.”

    “D’ores et déjà, un hélicoptère de l’armée [saoudienne] a ramené à Aden les ministres de l’Intérieur, des Transports [...] ainsi que le chef du service de la sécurité nationale”, rapporte pour sa part la chaîne saoudienne Al-Arabiya. “Et cela alors que les forces progouvernementales poursuivent les opérations d’épuration de plusieurs quartiers d’Aden.”

    Vue d’Aden, un pas vers la sécession du Yémen du Sud

    Alors que la presse saoudienne fête ainsi une victoire censée rétablir le statu quo ante, la presse d’Aden parle au contraire d’une “victoire des forces sudistes”. A l’en croire, les événements en cours à Aden constituent un nouveau pas vers la sécession du Yémen du Sud.

    Brandissant le drapeau du Sud, les héros de la résistance sudiste affirment qu’ils ne se battent pas pour le rétablissement de la ‘légitimité’ et le retour du président Hadi, mais pour libérer le Sud et rétablir un Etat indépendant”, rapporte par exemple Aden Al-Ghad

    “Je ne peux que féliciter les Yéménites du Sud”, écrit Ali Al-Boukhayti, journaliste yéménite du Nord, ancien sympathisant des houthistes.” Ils doivent maintenant faire un choix, quel qu’il soit, fût-ce la sécession. Même s’ils devaient tomber sous le contrôle de Daech ou se mettre sous la tutelle d’Israël, cela leur appartiendrait. Ce n’est pas au Nord de leur dicter ce qu’ils doivent faire.”

    Et d’ajouter : “Je crains seulement que d’autres tirent opportunément avantage de la victoire à Aden, que ce soit le président en titre Hadi,  [les Saoudiens] ou encore la vieille classe politique du Sud. De même, je crains que les forces sudistes se divisent et finissent par se combattre entre elles. Et que des organisations terroristes en profitent pour établir leur domination.”

    http://www.courrierinternational.com/article/yemen-qui-appartient-la-victoire-contre-les-houthistes-aden

    Lire aussi:

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34728

    http://rue89.nouvelobs.com/2015/04/11/non-tous-les-houthis-yemen-sont-chiites-autres-erreurs-258615

    Commentaire: D'après Wikipédia:

    Contexte historico-politique

    La monarchie zaydite yéménite a été abolie à la suite d'un coup d'état républicain en 1962, soutenu par l'Égypte de Nasser, ( monarchie soutenue par l'Arabie Saoudite! NDBlog) conduisant à la mise en place du Yémen du Nord.

    À la suite de la Réunification du Yémen en 1990, les Zaydites sont devenus minoritaires dans un Yémen majoritairement sunnite entre le Nord et le Sud. Les Zaydites ont obtenu des garanties du président Ali Abdallah Saleh dans le cadre de la Guerre civile de 1994 au Yémen (avec la tentative avortée de sécession du Yémen du Sud). S'estimant insatisfaits, ils ont pris les armes en 2004 contre le gouvernement.

  • Nouveautés sur "Amnesty"

    Justice pour les victimes des crimes de guerre commis pendant le conflit de Gaza

    https://www.amnesty.org/fr/latest/campaigns/2015/07/justice-victims-war-crimes-gaza-conflict/

    Un outil numérique innovant permet de discerner les violations relevant de pratiques bien établies commises par Israël à Gaza

    https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2015/07/launch-of-innovative-digital-tool-gaza/

    Yémen. L'analyse de plusieurs frappes et d'armes montre que la coalition a tué des dizaines de civils avec des bombes puissantes

    https://www.amnesty.org/fr/latest/news/2015/07/yemen-airstrike-analysis-shows-saudi-arabia-killed-scores-of-civilians/

  • Le Yémen abandonné par les grandes puissances aux ambitions saoudiennes (Orient 21)

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    … et à ses propres démons

    Comment expliquer la situation du Yémen où la population civile subit une guerre sans merci ? Appartenant à l’arrière-cour du royaume saoudien, ce pays, l’un des plus pauvres au monde, connait actuellement de profonds bouleversements. C’est l’heure du bilan et des questionnements pour une de ses anciennes ministres, Amat Al Alim Alsoswa.

    Le Yémen paie cher son positionnement géographique. Les grandes puissances considèrent en effet ce pays comme une chasse gardée de l’Arabie saoudite et ont donc de manière totalement décomplexée confié son sort à Riyad. Les déclarations politiques de la communauté internationale ne montrent ainsi nulle considération pour le peuple du Yémen ou pour sa souveraineté nationale. Ce positionnement constitue un bon indicateur de la nature des relations et des intérêts entretenus avec le royaume saoudien par les États du monde entier d’une manière générale, et plus particulièrement par les grandes puissances. Le pétrole et les contrats d’armement offrent au royaume des leviers importants. Et cet état de fait ne s’est qu’accentué dans un contexte de recul de l’influence de l’Égypte, de l’Irak et de la Syrie.

    Échec des idéologies

    Le Yémen occupe une place hybride dans l’espace géographique, économique et politique arabe. Il n’est souvent appréhendé qu’à travers sa proximité et son rattachement au Golfe  ; et il est exclu de l’espace africain dont il est pourtant proche et auquel il est fortement lié, tant économiquement que par les flux migratoires. Son rôle est négligeable dans les décisions prises par la Ligue arabe et son influence est qualifiée de négligeable.

    Le conflit actuel qui voit une coalition menée par l’Arabie saoudite bombarder le pays et de multiples factions se combattre sur le terrain est le résultat d’un échec local, régional et international :


    - Le socialisme n’avait pas réussi à forger un modèle alternatif dans le sud du Yémen  ;
    - la République populaire et démocratique du Yémen a cessé d’exister en 1990 et a été absorbée par le Nord, où le modèle qualifié de capitaliste n’a pas davantage fonctionné  ;
    - le pays est resté englué dans la pauvreté, la dépendance et le sous-développement  ;
    - les idées nationalistes, nassériennes et baasistes n’ont pas davantage réussi à proposer une alternative  ;
    - quant au mouvement des Frères musulmans, il a connu un échec historique et particulièrement cuisant à partir de la révolution manquée de 1948 au cours de laquelle différentes forces politiques avaient tenté d’établir une monarchie constitutionnelle au Yémen du Nord.

    L’implication des Frères musulmans dans ce soulèvement contre l’imam zaydite Yahya Hamid Al-Din et son assassinat en 1948 ont ouvert la voix à une forme de violence politique qui reste encore très présente et marque le conflit qui se déroule actuellement. Les Frères musulmans ont aussi eu à assumer la responsabilité de l’échec de la Révolution des hommes libres (Thawrat Al-ahrar) qui a instauré le régime républicain à compter du 26 septembre 1962. Ils ont enfin, à travers le parti Al-Islah, joué un rôle direct dans la faillite du processus révolutionnaire entamé en 2011 et qui avait conduit à la chute d’Ali Abdallah Saleh. C’est ainsi que les élites yéménites, dans leurs engagements et dans leur ralliement à ces diverses idéologies, n’ont pas permis la construction d’une expérience nationale réussie.

    Un déclin ancien

    Le problème du Yémen, depuis l‘invasion perse par les Sassanides au VI ème siècle de notre ère1 est lié à sa perte de son rôle dans le commerce régional et à la chute de sa production — agricole mais aussi industrielle — induisant le déclin progressif d’un pays qualifié dans l’antiquité d’«  Arabie heureuse  ». Les biens produits au Yémen ou transitant par ses différents royaumes avaient alors une importance capitale pour Rome, la Grèce et l’Égypte. La relégation du Yémen avant même les débuts de l’islam explique ainsi une part de son retard économique, social, culturel et politique.

    Avec l’arrivée de l’islam au VII e siècle, nombreux sont les Yéménites qui ont émigré afin de répandre la foi musulmane à travers le monde. Ils se sont installés dans le nord de l’Afrique, en Andalousie et en Asie Mineure. Cet exil important a sans nul doute contribué au déclin du Yémen, privant le pays de compétences et de savoirs. La société actuelle s’est bâtie pour l’essentiel entre les X e et XV e siècles et a pour une large part rompu avec les héritages antiques. Les élites se sont construites via le commerce, les ports ont joué un rôle central dans les processus d’accumulation — tout en accentuant la relégation du pays. C’est ainsi que le Yémen n’a pas réellement profité de la production du café, il s’est d’une certaine manière contenté de l’offrir au monde.

    Au XIX e siècle, les invasions ottomane au Nord et britannique au Sud n’ont pas provoqué des dynamiques de modernisation. Une fois les Ottomans défaits en 1918 et les Britanniques partis d’Aden en 1967, il n’est plus rien resté de leur présence et les élites yéménites économiques, intellectuelles et sociales, au Nord comme au Sud, semblent être restées en marge et incapable de réactiver la splendeur passée.

    Mentalité tribalo-rurale reposant sur la vengeance

    Les deux révolutions du Nord, en 1962, et du Sud, à compter de 1963, puis l’indépendance du Sud en 1967 ont ruralisé les villes. Le phénomène d’affaiblissement de groupes qui s’étaient constitués sur des interactions avec le monde extérieur apparaît comme une source essentielle des divers conflits dont souffre le Yémen. À travers cette relégation des élites, à Aden comme à Sanaa, Taëz ou Hodeida — y compris sous le régime socialiste qualifié de progressiste — les principes de cohabitation pacifique ont été très largement remplacés par une mentalité tribalo-rurale reposant sur la vengeance et la violence physique.

    Les mouvements du printemps arabe dans le Nord de l’Afrique (en Tunisie et en Égypte) et le printemps yéménite se sont révélés très différents. Alors que les premiers sont parvenus à faire tomber les régimes de Zine El Abbidine Ben Ali et de Hosni Moubarak, le mouvement au Yémen n’est parvenu qu’à secouer le régime et a conduit à une aggravation des tensions entre les différents mouvements politiques et les élites les représentant. Les forces en conflit apparaissent comme un héritage direct du régime Saleh : le président Abd Rabbo Mansour Hadi, les houthistes, Al-Islah, le général Ali Mohsen Al Ahmar, les forces religieuses salafistes et djihadistes — sans parler des membres de l’armée qui étaient restés loyaux à Saleh lui-même et qui ont tous à un moment où à un autre été des incarnations du régime constitué autour de ce dernier. Le mouvement sudiste n’a pour sa part pu se développer qu’à la faveur de la domination qu’il a exercée.

    Les luttes qui se déroulent sur le terrain sont non seulement un héritage direct de l’ère Saleh mais aussi l’incarnation des rivalités entre élites pour la prorogation d’un système. Elles ne sont aucunement liées à une volonté de changement ou de réforme. Les acteurs impliqués sont engagés dans le but de préserver leur pouvoir, construit sous la présidence Saleh et avec la bénédiction de celui-ci. Dans le Sud même, la division entre leaders donne lieu à une constatation identique. Qu’est-ce qui différencie Ali Salem Al-Bid, Ali Nasser Mohamed, Haydar al Attas et Abdelrahman Ali Al-Jifri  ? Comment ces anciens dirigeants de la République du Yémen du Sud recyclés en leaders du mouvement sécessionniste sudiste parviennent-ils à légitimer les tensions qui existent entre eux  ? Sur quelles bases idéologiques ou de programmes reposent les conflits entre le président Hadi, le président Saleh, le général Al-Ahmar et les enfants du cheikh Abdallah Al-Ahmar  ? Chaque Yéménite, sous les bombes, se pose la question.

    Des occasions manquées

    Les forces régionales concurrentes ont profité de ces rivalités pour utiliser le Yémen et le transformer en champ de batailles régionales. Une guerre par procuration s’est établie, impliquant notamment l’Arabie saoudite et l’Iran.D ans les coulisses, et en dépit du soutien exprimé à des processus de négociation sous l’égide des Nations unies, plusieurs puissances ont œuvré pour empêcher une solution pacifique. C’est ainsi que l’initiative du Golfe, signée en 2011 pour encadrer le processus de transition vers la démocratie, n’a pas reçu le soutien nécessaire. Elle aurait pu aboutir si elle avait mieux tenté de prendre en compte les équilibres entre les différentes régions du pays et veillé à assurer l’égale représentation de chacune d’elles. Le fait que dans le cadre du processus de transition, les postes de président, de premier ministre et de ministre de la défense aient été occupés par des individus originaires du Sud a généré de la frustration et a mis en danger l’ensemble de l’édifice constitutionnel en construction. La popularité croissante des houthistes en a été l’expression.

    La dégradation de la situation économique et le sentiment d’une détérioration par rapport à l’ère Saleh aurait pu être contrés par une aide internationale plus conséquente et mieux organisée.

    Enfin, l’initiative du Golfe manquait d’outils de contrôle et la situation n’a fait qu’empirer à mesure que le processus de transition prenait du retard. Le conflit s’est noué notamment autour de la prolongation du mandat de Hadi qui avait initialement été élu pour deux ans en février 2012, puis a été renouvelé pour une année en février 2014 par simple décision de la «  communauté internationale  » et sans que les parties yéménites aient été consultées ni que son mandat ait été précisé. Une nouvelle prolongation se profilait avant le coup de force des houthistes en janvier 2015. Dans ce contexte, les grandes puissances internationales et régionales ont joué un rôle trouble et contreproductif. Hadi a été appuyé sans succès et sans tenir compte des frustrations qui montaient.

    En résumé, l’échec de la transition au Yémen n’est pas seulement l’échec de ses élites politiques. C’est aussi d’une expérience qui se fondait sur le dialogue, la modération et une volonté de changement pacifique. Au-delà d’une situation humanitaire catastrophique, la situation de guerre au Yémen n’est pas sans implication pour ses voisins. Elle met en danger la stabilité de la navigation en Mer Rouge et dans le Golfe d’Aden et conduit à une augmentation des flux de migrants. Dans un contexte d’effondrement de l’État, il est à craindre qu’Al-Qaïda et l’organisation de l’État islamique soient les grands bénéficiaires du conflit et augmentent leur capacité de nuisance à l’intérieur comme à l’extérieur du Yémen.

    Le conflit entre houthistes (alliés à Saleh) et Hadi (alliés aux sudistes et aux milices islamistes sunnites) a provoqué le déchirement des derniers signes d’union nationale entre le Nord et le Sud. Les houthistes, à Taëz par exemple, poursuivent leur combat dans des régions et villes qui leur sont très hostiles, notamment pour des raisons confessionnelles. Quoi qu’il arrive, le pays est déjà soumis à une fragmentation en petites régions. Les conséquences de cette évolution et d’une partition restent impossibles à évaluer. Enfin, l’usage excessif de la force de la part de la coalition dirigée par l’Arabie saoudite depuis fin mars 2015 apparaît comme manifeste. Des armes non conventionnelles (telles des bombes à fragmentation) ont été utilisées, le bombardement par les avions de la coalition d’entrepôts d’armes situés au cœur des villes et près des quartiers d’habitations ainsi que la destruction de centrales électriques et d’infrastructures illustrent un mépris pour les civils.

    Dans ce contexte, la stabilisation du Yémen apparaît comme bien peu probable et exigera non seulement du temps et l’implication constructive de la communauté internationale mais aussi une réévaluation par les Yéménites de leur histoire et de leur place dans le monde.

    1L’histoire du Yémen pré-islamique est marquée par la présence de nombreux royaumes prospères, bénéficiant notamment du commerce de l’encens. La mythologie nationale rappelle qu’en 620, dans le contexte de l’invasion sassanide du Yémen pour contrer l’occupation chrétienne abyssine, le barrage de Mareb rompt, induisant une chute brutale de la production et du commerce. L’imposant barrage, dont subsistent des vestiges, servait notamment à l’irrigation des plaines fertiles du centre du pays.

    Amat Al Alim Alsoswa
    Première femme ministre du Yémen (aux droits humains), elle a fondé le Comité national des femmes du Yémen. Elle a aussi été membre de la Conférence de dialogue national ; a occupé des fonctions à l’ONU, notamment en tant que directrice régionale du Bureau des Etats arabes pendant plus de six ans. Ambassadrice aux Pays-Bas, Danemark et en Suède, elle a reçu plusieurs prix régionaux et internationaux pour sa lutte pour la démocratie, les droits humains et la liberté d’expression.
     
      Amat Al Alim Alsoswa  1er juillet 2015

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    http://orientxxi.info/magazine/les-contradictions-de-la-question-yemenite,0952


    Lire aussi:

  • Répression au Maroc (Afriques en lutte)

    Au nom du Comité Exécutif du Forum du Réseau de la Gauche Africaine (ALNEF) et de tous les partis politiques et organisations qu’il regroupe je condamne avec la dernière énergie la répression sauvage que les forces de l’ordre de l’Etat du Maroc ont fait subir à de nombreux(euses)manifestant(es) lors du sit-in pacifique du samedi 18/04/2014 pour protester contre l’agression du peuple yéménite par la coalition réactionnaire dirigée par l’Arabie saoudite et à laquelle le Maroc participe

    ALNEF considère que c’est un déni de droit que les militants et militantes du Réseau Démocratique Marocain de Solidarité avec les Peuples ont pour exprimer dans des formes légales et civilisées leur désapprobation par rapport à des agressions aussi barbares qu’injustifiées que celles qu’une coalition au service de l’impérialisme porte sur le peuple yéménite innocent qui est aujourd’hui réduit à l’errance dans la souffrance. Surtout quand leur pays, le Maroc, y est engagé.

    ALNEF dénonce avec force le traitement cruel, inhumain et dégradant pratiqué par l’Etat sur les marocain(e)s habitué(e)s des commissariats de police pour militantisme et autres manifestations de solidarité à l’endroit des peuples martyrs.

    ALNEF exprime sa sympathie et son soutien au Réseau Démocratique Marocain de Solidarité avec les peuples et l’exhorte à poursuivre le combat pour cette cause juste.

    Fait à Thiès, Sénégal le 21/04/2015

    LE Coordonnateur du Forum du Réseau de la Gauche Africaine

    Amath CAMARA 26 avril 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/maroc/article/repression-au-maroc

  • Yémen: de la révolution confisquée à la guerre américano-saoudienne (Npa)

    À la tête d’une coalition militaire sunnite, le nouveau roi d’Arabie saoudite, Salmane ben Abdelaziz al-Saoud, s’est lancé dans une opération militaire à haut risque au Yémen...


    Àl’heure où les USA et l’Iran semblent parvenir à un accord sur le nucléaire, il veut ainsi réaffirmer le rôle clef de son pays comme gendarme du monde arabe face à l’Iran, accusé de déstabilisation en Syrie et en Irak, et maintenant à sa porte au Yémen, avec la prise de Sanaa par les Houthis et la fuite du président Hadi. Un Yémen qui contrôle le détroit de Bab-el-­Mandeb qui mène au canal de Suez, un passage stratégique sur la route des tankers Asie-Europe, gardé par les flottes américaines et la base française de Djibouti. Un Yémen où se développent Al-Qaïda, et maintenant Daesh.

    2011, le printemps yéménite
    L’opération « Tempête de fermeté » a reçu le soutien de l’impérialisme US, qui ravitaille en vol les avions saoudiens ou égyptiens et organise les frappes de la coalition, mais aussi de la France, à travers notamment le renseignement militaire. Mais la grille de lecture simpliste « sunnites contre chiites » ne doit pas faire oublier que la racine de l’explosion de l’État yéménite plonge surtout dans la manière dont la révolution de 2011 a été confisquée par les élites militaro-tribales qui s’affrontent aujourd’hui pour le pouvoir au Yémen. L’échec d’une transition pilotée par l’axe américano-saoudien.


    En 2011, prenant modèle sur les printemps tunisien et égyptien, la jeunesse yéménite s’empare des places de Sanaa, Taez ou Aden. Elle veut « dégager » Saleh, qui monopolise le pouvoir depuis 32 ans, elle dit « non à la corruption, non aux tribus, non aux militaires », et porte à sa tête une femme, Tawakkul Karman, dans un des pays les plus rétrogrades au monde pour les femmes. Mais la révolution yéménite fut aussi une convergence de forces hétérogènes derrière la jeunesse progressiste et démocratique : les forces d’opposition, dont les Frères musulmans, les forces tribales, les Houthis de Saada, les régionalistes du Sud-Yémen, et jusqu’à certains secteurs de l’armée, jetant dans la rue jusqu’à un million de personnes.


    L’assise sociale de Saleh s’effondre
    En haut, la monopolisation familiale du pouvoir ébranle le fragile équilibre au sein du complexe militaro-tribal qui l’a porté au pouvoir, et lui interdit au sud d’intégrer les élites du parti socialiste yéménite, issues de l’expérience nassérienne de gauche qu’a connue le Sud-Yémen, avant la réunification de 1990. L’agression des anciennes élites religieuses zaydites houthis de Saada au Nord réactive le conflit sunnite-chiite. Ce passage d’un pouvoir militaro-tribal à un pouvoir militaro-familial va même rompre l’alliance de Saleh avec la puissante tribu des Al-Ahmar, qui vertèbre la branche yéménite des Frères musulmans, le parti Al-Islah.
    En bas, les étudiants ne trouvent pas de travail. Les pauvres sont victimes de l’arrêt des subventions des produits essentiels, le gaz, le fuel. Les paysans, comme à Jahachine, sont victimes de l’accaparement des terres par les chefs tribaux. Rien ne bouge, si ce n’est la richesse accumulée par le clan Saleh, qui accapare les postes clefs, à l’armée et dans l’économie.


    Les USA et l’Arabie saoudite essayent d’organiser une « transition pacifique »... qui fit cependant plus de 2 000 morts. Ils s’appuient sur les Frères musulmans de al-Islah et les membres de l’appareil militaire pour négocier la formation d’un gouvernement d’union nationale où les proches de Saleh gardent beaucoup de places, notamment dans l’appareil militaire, source de futurs affrontements.

    Pour le peuple, rien n’a changé
    En échange de l’impunité et de quelques millions de dollars, Saleh quitte la présidence. Son vice-ministre, Abd Rabo Mansour Hadi, devient président à la suite d’une élection à un candidat, dénoncée par les révolutionnaires. Mais surtout les Houthis au nord et les forces d’opposition indépendantistes du sud sont écartés de ce fragile compromis. 


    Bien plus fondamentalement, rien ne change pour le peuple yéménite, d’autant que la rente pétrolière s’effondre et que le nouveau régime refuse d’en renégocier les termes, comme le dénoncent les manifestations début 2014 contre Total et la France, qui selon Tawakkul Karman « ne paient le pétrole yéménite qu’à 10 % du prix du marché mondial et ne reversent que 21 % de la somme à l’État ». Profitant de l’arrêt des subventions aux produits pétroliers en septembre 2014, qui alimente la colère sociale contre le nouveau pouvoir de Hadi et des Frères musulmans, les Houthis s’emparent facilement de Sanaa, avec la complicité des unités de l’armée de l’air favorables à l’ancien président Saleh, celui-là même qui les bombardait depuis 2004 !


    Les premières victimes des bombardements massifs sont les populations civiles. Contre cette guerre qui oppose différentes fractions du complexe militaro-tribal et qui risque de favoriser le développement d’Al-Qaïda, notre solidarité va à la jeunesse révolutionnaire yéménite et aux associations de la société civile, qui depuis le début refusent un Yémen aux mains des tribus ou des militaires, alliés ou pas, hier ou aujourd’hui, de l’axe Arabie saoudite-USA.

    Frank Cantaloup

  • Guerre d’influence régionale: Interventions militaires réactionnaires au Yémen (Essf)

    *

    Fin Mars 2015, neuf pays arabes et le Pakistan ont commencé une intervention militaire massive contre le Yémen, sous le leadership de l’Arabie Saoudite, au prétexte de s’opposer à la milice confessionnelle des Houthis (d’obédience zaïdite, un courant minoritaire du chiisme) ; cette dernière a pris le contrôle total de la capitale Sanaa en janvier 2015 et elle s’étend maintenant vers le sud du pays.

    Les forces houthistes seraient soutenues par la République Islamique d’Iran (RII) et recevraient l’assistance de ses relais dans la région, dont le Hezbollah, qui aurait fourni une aide militaire logistique. La RII n’a en effet cessé d’intervenir dans la région (Syrie, Liban, Irak et Yémen) pour étendre son influence politique.

    Le labyrinthe yéménite

    Le gouvernement yéménite du Président Abed Rabbo Mansour Hadi, proche de l’Arabie Saoudite, pays dans lequel il réside maintenant, et des monarchies du Golfe, a été défait par les avancées des forces militaires houthistes, alliées pour la circonstance à leur ancien ennemi, l’ex-dictateur Ali Abdullah Saleh. Ce dernier les avait combattues et accusées, de 2004 à 2009, d’être inféodés à la RII. Il est aussi l’ex-allié des monarchies du Golfe et des Etats-Unis, avant d’avoir été poussé vers la sortie par une solution négociée sous la houlette de Riyad et de Washington, en 2011, après le début d’un soulèvement populaire dans le pays.

    La recomposition politique plébiscitée par l’Arabie Saoudite et les USA maintenait le régime en place en y incluant quelques forces, dont le mouvement Al-Islah, composé de la branche yéménite des Frères musulmans, de salafistes et de leaders tribaux du nord. Mais Saleh continue de bénéficier de l’allégeance d’une partie significative de l’appareil de sécurité et de l’armée. Les conquêtes territoriales des houthistes ont été ainsi facilitées par la faiblesse de l’État, depuis le soulèvement de 2011, et par les problèmes sociaux et économiques profonds qui affectent le Yémen, Etat le plus pauvre de la région.

    Parallèlement, quatre provinces du sud du pays, dont celle de Aden, ont décidé de refuser les ordres venant de la capitale Sanaa, adressés aux unités militaires et aux forces de sécurité de ces régions. De son côté, le président Obama a autorisé la fourniture de soutien logistique et de renseignements pour appuyer les opérations militaires du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), tandis qu’une cellule commune de planification avec l’Arabie saoudite a été mise en place.

    Une intervention contre-révolutionnaire

    La campagne militaire menée par l’Arabie Saoudite a reçu le soutien des gouvernements occidentaux impérialistes, de la Turquie, et d’une grande majorité des régimes arabes de la région. Les interventions de la monarchie réactionnaire des Saoud au Yémen ne sont pas nouvelles. Dans les années 1960 déjà, elle avait appuyé par tous les moyens les forces royalistes du Yémen Nord contre la révolution yéménite, soutenue alors par le régime de Nasser.

    L’Arabie Saoudite avec l’appui des monarchies du Golfe est intervenue dans les divers processus révolutionnaires de la région pour les combattre par tous les moyens, soutenant les anciens régimes (Tunisie et Egypte) ou les forces confessionnelles les plus réactionnaires (Syrie). De son côté, le Qatar se singularisait en appuyant un autre secteur de la contre-révolution, porté par les Frères Musulmans.

    Ces divergences sont à nouveau dépassées dans le cadre de l’intervention au Yémen, où l’on voit toutes ces forces contre-­révolutionnaires coopérer dans le soutien à la campagne militaire contre les houthistes. Cela rappelle que les oppositions tactiques entre l’Arabie Saoudite et le Qatar peuvent être surmontées facilement quand leurs intérêts communs sont menacés, comme ce fut le cas lors de l’intervention militaire des armées du CCG au Bahreïn, en mars 2011, pour écraser un soulèvement populaire contre un régime ami.

    Cette intervention militaire, soi-disant pour « secourir un pays voisin et ses autorités légitimes », a bien sûr d’autres objectifs : défendre la sphère d’influence des monarchies du Golfe, particulièrement de l’Arabie Saoudite, et empêcher les houthistes d’atteindre Aden et Bab el-Mandeb qui, avec le détroit d’Ormuz, constituent un point de passage névralgique du pétrole (près de trois millions de barils de brut par jour) et du gaz du Golfe.

    Une guerre contre le terrorisme ?

    Depuis le 11 Septembre, le Yémen était devenu un maillon central de la « guerre contre le terrorisme » pour les forces spéciales états-uniennes qui y étaient stationnées, coordonnant les actions contre Al-Qaida dans la Péninsule Arabique (AQPA) (notamment le déploiement des drones). Or, les USA viennent d’évacuer leur base d’Al-Anad, suite à l’avancée des houthistes vers Aden.

    Cette campagne militaire se fait aussi dans le cadre d’une guerre d’influence régionale avec la RII.

    Cette intervention se déroule sur fond d’une baisse d’hégémonie relative de l’impérialisme US depuis 2003, permettant aux sous-impérialismes régionaux de jouer un plus grand rôle et de jouir d’une autonomie croissante.

    Cette campagne militaire n’a donc évidemment pas pour objectif de défendre l’auto-détermination du peuple yéménite, et de lui permettre de reprendre les objectifs du soulèvement populaire initié en 2011, bien au contraire. Les premières victimes des bombardements de cette coalition contre-révolutionnaire ne sont-ils pas les nombreux civils yéménites ?

    Les organisations progressistes du monde entier doivent s’opposer à cette intervention militaire menée par une coalition contre-­révolutionnaire régionale, appuyée par les régimes occidentaux, de même qu’aux intrigues de la RII, qui appuie le coup de force militaire houthiste avec l’aide de l’ancien dictateur Saleh. Aucune de ces deux forces ne soutient la volonté de changements politiques et sociaux portés par les classes populaires du Yémen et de la région.

    Joe Daher

    * « Interventions militaires réactionnaires au Yémen ». Paru dans « solidaritéS » (Suisse) n°266 (09/04/2015) p. 7.

    http://www.solidarites.ch/journal/

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34728

  • Non, tous les Houthis du Yémen ne sont pas chiites (et autres erreurs) (Rue 89)

    *

    Durant la dernière décennie, et depuis plus longtemps encore, les Houthis ont fait les gros titres depuis leur soulèvement contre le gouvernement du Yémen.

    Depuis 2004, les forces armées gouvernementales se sont battues contre cette milice tribale du nord du pays, qui dit se défendre de l’oppression.

    Ce conflit long d’une décennie s’est envenimé ces derniers mois quand les Houthis n’ont pas respecté leur partie d’un accord appelé « Accord de paix et de partenariat national » et ont pénétré dans la capitale, Sana’a. Aujourd’hui, alors que l’Arabie saoudite a lancé une offensive militaire au Yémen pour repousser les Houthis, l’attention des médias s’est tournée vers la situation au Yémen.

    Les Houthis ont pris des villes telle qu’Amran et ont avancé vers Sana’a, violant leurs engagements pris lors de l’Accord national, où ils ont occupé les ministères et le palais présidentiel, retenant le président Hadi en otage, aux arrêts dans la résidence présidentielle.

    Chiites contre Sunnites ?

    Avec d’un côté l’Iran, à majorité chiite, soutenant les Houthis, tandis que l’Arabie saoudite, à majorité sunnite, les bombardent, les médias ont adopté une vue simpliste d’un conflit qui se réduirait à des conflits inter-religieux entre les deux plus grandes communautés de l’islam. Jusqu’à la chaine en ligne, AJ+, qui a décrit les Houthis comme étant chiites.

    La réalité est cependant plus complexe que 42 secondes de reportage peuvent le laisser croire.

    Tous les Houthis ne sont pas chiites

    Houthi était à l’origine le nom d’un clan du Yémen, et non d’une appartenance ou mouvance religieuse.

    Plus tard, un mouvement rebelle armé, appelé Ansar Allah (signifiant les aides de Dieu ou les soutiens de Dieu), ont adopté ce nom, d’après leur fondateur et principal leader Hussein Badreddin al-Houthi, tué en 2004, ce qui a d’une certaine façon provoqué ce qui a été appelé le « soulèvement des Houthis’.

    Des controverses existent sur leur nombre effectif ou sur l’origine des personnes qui se battent à leurs côtés.

    La blogueuse yéménite Atiaf Al Wazir dans un post titré “Ce n’est pas un conflit entre sunnites et chiites, idiot !” souligne que tous les Houthis n’appartiennent pas aux Zaïdites, une mouvance de l’islam chiite, comme on a pu le dire.

    Bien qu’aucune statistique n’ait été faite sur la composition de Ansarullah, couramment connu sous le nom de Houthis, on pense que beaucoup de leurs membres sont zaïdites, mais qu’ils proviennent également de différentes écoles de pensée chiites et sunnites, ainsi que des Ismaïlites, Shafi’i et Jaafari.

    Beaucoup de tribus sunnites et de soldats ont également rejoint les Houthis pour combattre à leurs côtés. Des dirigeants de premier plan comme Saad Bin Aqeel, un moufti de la ville de Taiz, sont parmi les leaders des Houthis : il a fait le prêche du vendredi durant l’un de leurs sit-ins, avant leur avance dans la capitale.

    Badreddin al-Houthi, mort en 2004, appartenait aux Zaïdites. Tout comme l’ancien président yéménite Ali Abdullah Saleh, au pouvoir quand les Houthis se sont soulevés pour la première fois en 2004. Al Wazir précise aussi que “tous les Zaidïtes ne sont pas Houthis. La position d’érudits zaïdites et de leurs centres d’études religieuses diverge.”

    Qu’est-ce que le zaïdisme ?

    Le journaliste britannique-yéménite Abubakr al-Shamahi explique plus en détails ce qu’est le zaïdisme.

    “Le zaïdisme (de Zaydiyyah) est une école de pensée au sein de l’islam chiite. Il tient son nom de l’Imam zaïdite Bin Ali, tué dans un soulèvement contre les Omeyyades. Bien qu’il ait été pratiqué autrefois dans des endroits comme l’Iran et l’Afrique du Nord, on trouve aujourd’hui des zaïdites en nombre important uniquement au Yémen.Un imamat zaïdite a gouverné de nombreuses régions du nord du Yémen pendant 1000 ans, jusqu’au dernier Imam, renversé en 1962.

    Traditionnellement, des endroits comme Sana’a, Dhamar, Hajja et Amran sont zaïdites, et le cœur du zaïdisme se trouve dans la région de Saada. Un dicton se référant aux zaïdites dit qu’ils sont ‘les sunnites des chiites, et les chiites des sunnites’, indiquant par là qu’il n’y a pas une énorme différence de doctrine entre les zaïdites et les sunnites (ou du moins, c’est ainsi qu’ils sont perçus).”

    Arab News Blog donne davantage de contexte, sur la proximité du zaïdisme et du sunnisme.

    “Ils sont appelés en anglais les ‘Fivers’ (cinq) parce qu’ils reconnaissent les quatre premiers imams reconnus par les duodécimains et les Ismaéliens ainsi que Zayd comme le successeur légitime de son père ‘Ali Zayn al-Abidin, tandis que d’autres groupes reconnaissent son frère Muhammad al-Baqir.

    Ils n’exigent pas que tous les imams légitimes descendent de Zayd. En fait, la doctrine de l’Imamat zaïdite diffère énormément de celles des autres chiites.

    L’école juridique zaïdite est très similaire à celle d’Abou Hanifa dans le sunnisme, et certains ont décrit la loi zaïdite comme une cinquième école’ du sunnisme (sauf pour la doctrine de l’Imamat).”

    Tribus, ou mouvances religieuses ?

    L’ancien président Ali Abdullah Saleh, contre lequel la rebellion des Houthis a commencé, appartient à une tribu appelée Al Ahmar. La tribu Al Ahmar compte parmi ses membres des chiites et des sunnites. Ceci dit, feu l’ex-leader des Houthis Badreddin al-Houthi comme le président Saleh sont techniquement des chiites. Ce qui signifie que les conflits tribaux ont beaucoup à voir avec ce conflit. Michael Collins Dunn, rédacteur en chef du Middle East Journal, explique sur son blog :

    Le Président Ali Abdullah Salih est lui-même zaïdite, comme l’est une partie importante de sa base de partisans. Il vient d’une petite tribu de la plus grande confédération tribale, le Hached. Le Hached et l’autre grande confédération zaïdite, le Bakil, étaient désignées comme les “ailes de l’Imamat”, quand les imams zaïdites statuaient encore dans ce qui était alors le Yémen du Nord.

    Al-Shamahi semble aller lui aussi dans ce sens :

    “D’abord, les al-Ahmars sont traditionnellement zaïdites, comme les Houthis. Je ne peux pas garantir la confession religieuse de chaque Ahmar individuellement, mais je dirais que beaucoup de leurs combattants tribaux s’identifieraient, tout au moins vaguement, comme zaïdites. Ali Abdullah Saleh, qui a fait six guerres contre les Houthis, était aussi zaïdite. Donc, s’agit-il d’un conflit entre zaïdites ? D’une guerre civile entre zaidïtes ?”

    Al Wazir explique :

    “[...] si c’était un problème religieux, le président Saleh (qui est techniquement zaïdite) n’aurait pas fait six guerres contre les Houthis entre 2004 et 2010. Il semble que les anciens ennemis aient forgé une alliance temporaire. Ceci indique que ces conflits sont de nature politique.”

    Al Wazir fait allusion au fait que l’ex président Saleh, qui a été démis après plus de trois décennies au pouvoir durant la révolution de 2011 au Yémen, est soupçonné d’appuyer ses anciens adversaires dans leur campagne pour renverser le gouvernement actuel.

    Il se trouve que Al-Houthi a des liens personnels avec la République islamique d’Iran, ce qui a rajouté un angle religieux au conflit au Yémen.

    En résumé...

    Voici ce que l’on peut retenir. Une partie du conflit au Yémen est un conflit entre les Houthis, une tribu et non une mouvance religieuse, et la tribu Ahmar. Les deux comprennent des membres et alliés sunnites tout comme chiites.

    Deux des dirigeants de premier plan de ces tribus sont chiites, la différence étant que l’un a des liens étroits avec l’Iran tandis que l’autre a des liens étroits avec l’Arabie saoudite.

    Idéologiquement, les chiites du Yémen sont plus proches du sunnisme d’Arabie que du chiisme iranien.

    Aujourd’hui, l’ex président Saleh et les Houthis dirigés par Abdul-Malik al-Houthi semblent agir d’un commun accord, ce qui fait apparaitre des alliances entre différentes tribus et obédiences religieuses, pour le moment.

    Et pour le moment, le sang des Yéménites, de toutes confessions et tribus, coule.

    http://rue89.nouvelobs.com/2015/04/11/non-tous-les-houthis-yemen-sont-chiites-autres-erreurs-258615

  • Au Yémen, un enchevêtrement de conflits et d’ambitions géopolitiques (Orient 21)

    L’Arabie saoudite et l’Iran face à face

    Le sommet arabe du Caire a décidé la création d’une force commune destinée, même si cela n’est pas clairement affirmé, à faire face à la montée en puissance de l’Iran – plus qu’à celle de l’Organisation de l’Etat islamique. L’intervention de l’Arabie saoudite et de ses alliés au Yémen répond à la même préoccupation, alors même que Téhéran négocie sur son programme nucléaire et que l’issue de ces pourparlers aura des conséquences majeures sur les relations régionales.

    Dans la nuit du 25 au 26 mars, l’Arabie saoudite a lancé l’opération «  Tempête décisive  » au Yémen et entamé le bombardement des positions des milices houthistes qui s’étaient emparées de la capitale Sanaa, avaient renversé le président Abd Rabbo Mansour Hadi et progressaient vers le sud et le grand port d’Aden. Dix pays participent, plus ou moins intensément et plus ou moins directement à la coalition qui s’est mise en place sous l’égide de Riyad : cinq des six pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) (en plus de l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Koweït, le Qatar et à l’exception d’Oman), auxquels il faut ajouter l’Égypte, le Maroc, la Jordanie, le Soudan et le Pakistan.

    Cette coalition a obtenu le soutien des États-Unis  ; la porte-parole du Conseil national de sécurité a déclaré que le président Barack Obama «  avait autorisé la fourniture de soutien logistique et de renseignement pour appuyer les opérations militaires du CCG  »1. Une cellule commune de planification avec l’Arabie saoudite a été mise en place. Pourtant, si l’on en croit Jamal Khashogji, un journaliste saoudien très introduit dans les cercles dirigeants de son pays, selon un article intitulé «  The Salman principle  » (La doctrine Salman), Riyad aurait mis Washington devant un fait accompli : «  Nous avons décidé d’intervenir au Yémen, auraient dit les responsables saoudiens en substance. Etes-vous avec nous ou non  ?  ». Si cela était confirmé, ce serait un changement important dans la politique saoudienne qui reste pourtant toujours très dépendante des États-Unis, y compris en termes militaires.

    Le Pakistan, tout en assurant sa détermination à assurer la sécurité et l’intégrité territoriale du royaume wahhabite a exprimé quelques réserves. Intervenant devant le Parlement, le ministre de la défense Khawaja Asif a déclaré : «  Nous ne participerons à aucun conflit qui provoquerait des différences entre pays musulmans, aggravant les lignes de fracture qui sont aussi présentes chez nous et dont nous devrons supporter les conséquences  », faisant ainsi allusion aux tensions persistantes entre la minorité chiite et la majorité sunnite2.

    Chiites contre sunnites  ?

    Cette référence aux divisions confessionnelles conforte tous ceux qui lisent l’affrontement actuel à travers le prisme d’un choc entre sunnisme et chiisme, dont l’antagonisme remonterait aux origines même de l’islam, aux guerres de succession après la mort du prophète Mohammed en 632. C’est cette vision qu’illustre une carte du Monde publiée le 27 mars. Tous les clichés abstraits et a-historiques ressortent dans nombre de commentaires — affrontement millénaire, haines inextinguibles, querelles théologiques — pour expliquer les événements, au détriment des analyses politiques et géopolitiques.

    Toute la difficulté de dépasser la lecture confessionnelle et de déceler les enjeux de pouvoir qui structurent réellement les conflits de la région provient du fait que les acteurs engagés sur le terrain donnent eux-mêmes du crédit à l’opposition sunnite-chiite et agissent en conséquence. La lecture confessionnelle conduit à une simplification objective de la confrontation et écrase la complexité dans l’esprit des analystes que nous sommes comme dans celui des combattants.

    Les houthistes, nous explique-t-on, sont des chiites et leur progression indisposerait le puissant voisin saoudien. Pourtant, en septembre 1962, quand un coup d’État républicain mit fin à l’imamat millénaire zaydite installé à Sanaa, une longue guerre civile s’ensuivit. Et Riyad appuya, finança, arma les tribus zaydites que l’on qualifie aujourd’hui de «  chiites  ». Les zaydites sont une branche de l’islam rattachée au chiisme  ; contrairement aux chiites iraniens, ils ne reconnaissent que cinq imams et non douze. Longtemps considérés comme «  modérés  » — dans leurs mosquées, ils prient fréquemment aux côtés des sunnites —, ils ont subi ces dernières années l’influence de Téhéran.

    Mais, comme le reconnaît Simon Henderson, un analyste appartenant à un think tank américain dépendant du puissant lobby pro-israélien, et peu susceptible de sympathie envers les mollahs : «  Nous ne connaissons pas l’ampleur du soutien de l’Iran aux houthistes — et nous ne savons pas si les Iraniens considèrent leur prise de pouvoir comme un objectif stratégique majeur ou une conséquence d’événements fortuits.  » Et la déclaration d’un député iranien l’an dernier affirmant que trois capitales arabes — Damas, Bagdad et Beyrouth — étaient déjà sous contrôle de Téhéran n’a pas suffi pour y voir un grand dessein iranien3. D’ailleurs, dans les années 2000, durant les présidences de Hachemi Rafsandjani (1989-1997) et Mohammad Khatami, (1997-2005), un rapprochement s’était produit entre Téhéran et Riyad.

    Quatre forces sur le terrain

    Le Yémen ne saurait être réduit à une grille d’analyse confessionnelle. D’abord, il fait partie des quatre pays où le «  printemps arabe  » a débouché sur le départ du président, après une longue lutte marquée par des affrontements armés, mais aussi par un rôle actif de la jeunesse qui n’a pas renoncé à cette place, même si la militarisation des affrontements entre élites l’affaiblit. Au moins quatre forces occupent le terrain au gré d’alliances instables :

    - en premier lieu, l’ancien président Ali Abdallah Saleh, auquel une partie importante de l’armée est restée fidèle. Il est aussi zaydite, mais il s’est opposé pendant de nombreuses années aux houthistes  ;

    - les houthistes, entre 2004 et 2009. Saleh les a longtemps combattus (en s’appuyant alors sur les islamistes sunnites) avant de s’allier à eux en espérant regagner son pouvoir. Leur alliance paraît fragile et le Congrès général populaire de l’ancien président a critiqué leur offensive contre le sud  ;

    - les sudistes, qui regrettent leur indépendance du temps de la République démocratie et populaire du Yémen (RPDY), le Yémen du Sud. Depuis l’unification des deux Yémen en 1990, ils se sont plusieurs fois soulevés contre l’autorité centrale et réclament à nouveau l’indépendance. Alliés de circonstance aujourd’hui à Hadi et au parti Al-Islah proche des Frères musulmans dans leur combat contre les houthistes, ils n’oublient pas que ces deux derniers ont mené une répression violente contre eux, notamment en 1994  ;

    - enfin, Al-Qaida dans la péninsule Arabique (AQPA), la seule filiale d’Al-Qaida disposant d’une base territoriale. Elle s’oppose certes aux houthistes, mais n’a aucune sympathie pour le président Saleh ni pour l’Arabie saoudite où elle est implantée et poursuit son action clandestine et ses attentats. Pour sa part, l’organisation de l’État islamique (OEI) a revendiqué sa première action au Yémen, un attentat dans une mosquée de Sanaa qui a fait environ 150 morts le 20 mars dernier. Mais ces développements ne semblent pas inquiéter la coalition créée par l’Arabie saoudite.

    L’implication de Riyad

    L’enjeu de cette guerre dépasse bien évidemment le Yémen, qui n’est qu’un des fronts dans une région qui sombre dans le chaos et se décompose sous les coups de boutoir des interventions étrangères, des régimes dictatoriaux agrippés au pouvoir et des milices non-étatiques.

    L’une des interrogations porte sur le sens de l’implication saoudienne. La monarchie prétend aligner une centaine d’avions de combats et aurait massé 150 000 soldats sur sa frontière avec le Yémen : un déploiement impressionnant. S’agit-il de montrer que, face à l’Iran et alors que les États-Unis se désengagent en partie, le pays veut reconquérir un rôle central dans toute la région  ?

    Cette mobilisation marque-t-elle un infléchissement politique impulsé par le nouveau roi Salman et les jeunes princes qui l’entourent  ? C’est ce que pense Nawaf Obeid, un intellectuel saoudien proche du pouvoir : «  La nouvelle direction saoudienne, organisée autour de jeunes princes dynamiques et de technocrates, développe une doctrine de politique étrangère pour relever les défis lancés par les tensions régionales. Cette doctrine est fondée sur la légitimité de la monarchie et le rôle central du royaume pour le monde musulman. Comme gardienne des deux Lieux saints de La Mecque et Médine, l’Arabie est dans une position unique pour s’élever au-dessus de la mêlée de la dernière décennie et de combler les divisions entre les principaux pays sunnites  »4.

    Pourtant, l’armée saoudienne a-t-elle les moyens de cette stratégie  ? Elle a déjà subi une défaite face aux milices houthistes, pourtant mal armées mais en pleine maitrise de leur territoire, en 2009. Peut-elle engager des troupes au sol, au risque de l’enlisement de ses soldats, et cela malgré le soutien du maréchal Abdel Fattah Al-Sissi, qui semble oublier que le Yémen fut un Vietnam pour l’armée égyptienne entre 1962 et 1967  ? De nombreux commentateurs égyptiens s’interrogent sur la durée d’une telle intervention et sur ses buts politiques5.

    Car si les cartes sont en partie rebattues dans la région, l’alliance dite «  sunnite  » n’est pas sans fissures et «  le danger perse  » n’est pas suffisant pour colmater toutes les brèches. L’Arabie saoudite semble un peu plus conciliante qu’en 2014 à l’égard des Frères musulmans, s’est rapprochée du Qatar et de la Turquie, alors que cette dernière est régulièrement dénoncés par Le Caire. Même les organisations islamistes semblent en partie réservées par rapport à une intervention qui divise le monde musulman. Le Front salafiste égyptien, dont la figure de proue est le cheikh charismatique Abou Ismaïl (aujourd’hui en prison), analyse le conflit comme «  un affrontement entre l’Occident et l’islam  », dans lequel «  les régimes arabes qui appuient la cause américano-sioniste cherchent à mettre en échec les soulèvements des peuples arabes  ». Tout en stigmatisant le «  complot iranien  », il a condamné les bombardements saoudiens, rappelant qu’aucune coalition ne s’était créée pour sauver les musulmans de Syrie et d’Irak6. Quant aux Frères musulmans égyptiens, tout en soutenant Riyad qui prétend vouloir rétablir «  le pouvoir légitime  » au Yémen, ils ont beau jeu de rappeler que ce même pouvoir légitime au Caire est celui de Mohamed Morsi.

    L’enjeu des négociations sur le nucléaire

    On ne saurait négliger l’importance géopolitique du Yémen. Le pays contrôle l’entrée de la mer Rouge (vers le canal de Suez) et le détroit de Bab El-Mandeb, certes moins important que celui d’Ormuz, mais par lequel passe une partie du pétrole et du gaz à destination de l’Europe. D’autre part, depuis le 11-Septembre, le Yémen est un maillon central de la «  guerre contre le terrorisme  » et des forces spéciales américaines y étaient stationnées, coordonnant les actions contre AQPA (notamment les tirs de drones). Or, les États-Unis viennent d’évacuer leur base d’Al-Anad suite à l’avancée des houthistes vers Aden. Et AQPA et Américains se retrouvent côté à côté dans le combat contre les houthistes.

    Washington est confronté à un dilemme similaire en Irak, alors que les milices chiites encadrées et entraînées par Téhéran mènent l’offensive contre l’OEI. Lors de l’offensive en cours des troupes de Bagdad contre la ville de Tikrit contrôlée par cette dernière, les États-Unis ont conditionné leur aide aérienne au retrait des conseillers iraniens.

    À la veille de la conclusion des négociations sur le nucléaire iranien, l’Arabie saoudite a renforcé sa main. Quelle que soit l’issue, il s’agit d’affirmer sa place face à Téhéran et de se préparer aux deux scénarios : un accord et le réintégration de l’Iran dans le jeu régional par les Occidentaux  ; un échec avec toutes les escalades militaires envisageables.

    Alain Gresh
     
  • Vu d’Algérie. Désormais, “être arabe, c’est être sunnite et contre l’Iran” (Courrier Inter)

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    La Ligue arabe a approuvé, le 28 mars, la création d’une force arabe de défense et décidé de soutenir la coalition dirigée par l’Arabie Saoudite qui mène une offensive au Yémen contre les milices houthistes. L’arabité est ainsi assimilée au sunnisme, déplore le quotidien Liberté.

    Le monde arabo-musulman du Moyen-Orient est entré en guerre avec lui-même. Déjà précarisée par le conflit israélo-palestinien, la déstabilisation de l’Irak et de la Syrie, la fragilité du Liban, le terrorisme latent en Egypte et la révolte sourde à Bahreïn, la région est entrée dans un état d’instabilité sécuritaire qui devrait se prolonger. A force d’être manipulées, les contradictions confessionnelles, jusqu’ici étouffées par la force, se sont réveillées.

    Composé de dictatures résiduelles, dans un univers converti à la démocratie et régnant sur des Etats aux frontières artificiellement délimitées par les anciennes puissances occupantes, le monde “arabe”, dans sa partie orientale, endure de récurrentes contestations ethniques, territoriales ou confessionnelles.

    Une “guerre mondiale arabe”

    Pour des besoins de stratégie, l’arabité est ici assimilée au sunnisme. Une identité ethnoculturelle est apparentée à une doctrine religieuse. Et, par glissement, l’on plonge dans une confrontation stratégique entre “monde arabe” et Iran. Etre arabe, c’est être sunnite, du côté du roi de Riyad et contre l’ayatollah de Téhéran : voici la fatalité de notre “identité”, “constante” et irrécusable, paraît-il, celle que nos dirigeants nous ont imposée, si ce n’était cet argument [inscrit dans la Constitution] de non-intervention de l’ANP [Armée nationale populaire algérienne] à l’extérieur de nos frontières !

    Sans sous-estimer l’hégémonisme iranien et l’usage belliqueux qu’il fait de ses têtes de pont confessionnelles, le constat s’impose : toute une “guerre mondiale arabe” pour défendre un régime (yéménite) et un autre (saoudien) qui risque de pâtir de la chute du premier ! L’“unité arabe” n’est sollicitée que pour la défense de régimes politiques menacés. Car, enfin, ce n’est pas la question de la légitimité de leurs pairs qui étouffe les dictateurs “arabes” ! Et les troupes iraniennes n’ont pas envahi le Yémen.

    Modèles politiques les plus rétrogrades

    Quand il s’est agi de contenir l’offensive brutale de Daech [acronyme arabe de l’organisation Etat islamique (EI)], les Arabes y sont allés en traînant la patte, contraints et forcés par leurs alliés occidentaux. Quant à Al-Qaida en Syrie, le Qatar et l’Arabie Saoudite ont préféré d’abord l’armer et la financer ! Est-ce le “sunnisme” de ces armées terroristes qui en fait des entités tolérables pour les dirigeants arabes ?

    Etrange que même le conflit “israélo-arabe”, comme on l’appelait jadis avant d’abandonner les Palestiniens à “leur” cause, n’ait jamais suscité l’idée d’une armée “arabe” qu’un soulèvement d’une tribu yéménite – arabe – a inspirée !

    Est-ce pour hériter de telles causes – comme le confort politique et sécuritaire des Al-Saoud [famille régnante en Arabie Saoudite] – que nos dirigeants ont voulu, avant notre indépendance, nous imposer cette parenté identitaire ? Est-ce pour nous détourner des idéaux de liberté et de développement qu’ils nous ont amarrés aux modèles politiques les plus rétrogrades et les plus anachroniques des temps modernes ?

    http://www.courrierinternational.com/article/vu-dalgerie-desormais-etre-arabe-cest-etre-sunnite-et-contre-liran

  • Stop la guerre!

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    Yémen. Six enfants comptent parmi les dizaines de victimes des frappes aériennes lancées par l’Arabie saoudite (Amnesty)

     

    Au moins six enfants âgés de moins de 10 ans figurent parmi les 25 victimes des frappes aériennes menées par l’Arabie saoudite contre la capitale yéménite Sanaa dans la matinée du 26 mars, a déclaré Amnesty International après s’être entretenue avec des responsables hospitaliers et des témoins.

    L’organisation s’est en effet entretenue avec du personnel médical de quatre hôpitaux différents, où les corps ont été conduits après avoir été extraits des décombres de 14 maisons touchées par les raids aériens, dans un quartier d’habitation près de l’aéroport international de Sanaa. Les autres victimes étaient des hommes, pour la plupart âgés de 30 à 50 ans.

    On pense que d’autres personnes sont encore ensevelies sous les décombres et au moins 20 blessés, dont quatre femmes, ont été admis à l’hôpital, présentant surtout des blessures par éclats d’obus.Ce lourd bilan de victimes civiles touchées par ces raids pose des questions quant au respect des règles du droit international humanitaire. Toutes les forces armées, notamment saoudiennes, qui procèdent à des frappes aériennes au Yémen doivent prendre toutes les précautions nécessaires en vue d’épargner les civils.

    Said Boumedouha, directeur adjoint du programme Afrique du Nord et Moyen-Orient d’Amnesty International

    « Cela suppose de vérifier que les cibles sont réellement des objectifs militaires et d’avertir les civils à l’avance lorsque les circonstances le permettent.

    « Les groupes armés houthis et les forces armées yéménites sont également tenus, au titre du droit international humanitaire, de protéger contre les conséquences des attaques les civils se trouvant dans les zones qu’ils contrôlent, notamment en évitant dans la mesure du possible d’installer leurs combattants et leurs armements dans des zones résidentielles », a déclaré Said Boumedouha.

    Étant donné le bilan des victimes civiles, l’Arabie saoudite et les États impliqués dans ces frappes aériennes doivent enquêter afin d’établir s’il y a eu violation du droit international humanitaire. Si des éléments de preuve indiquent que des crimes de guerre ont été commis, les suspects doivent être poursuivis dans le cadre de procès équitables.

    Des responsables du ministère de la Santé du Yémen ont indiqué jeudi 26 mars que les raids aériens avaient fait 25 morts et une quarantaine de blessés. On ignore encore si des combattants figurent parmi les victimes.

    Selon un urgentiste qui a été témoin des événements, la frappe aérienne près de l’aéroport a eu lieu peu avant 3 heures du matin (heure locale), dans le quartier résidentiel de Beni Hawat. Les groupes armés houthis avaient semble-t-il installé un poste de contrôle à 100 mètres de là, et contrôlaient la base d’al Daïlami à 500 mètres environ.

    Les responsables saoudiens ont déclaré le 26 mars qu’ils avaient détruit « toutes les défenses aériennes des Houthis » sur la base d’al Daïlami, attenante à l’aéroport international de Sanaa.

    Beni Hawat est l’un des sites aux alentours de la ville qui ont été frappés par les raids aériens dans la nuit. L’Arabie saoudite a annoncé qu’elle lançait une intervention militaire dans le cadre d’une coalition de 10 pays, notamment de cinq États du Conseil de coopération du Golfe, contre les groupes armés houthistes. Le gouvernement américain a annoncé le 26 mars qu’il allait fournir « un soutien en logistique et en renseignement » à la coalition ; d’autres gouvernements, notamment ceux du Royaume-Uni et de la Turquie, ont approuvé cette initiative. 26 mars 2015, 17:05

    https://www.amnesty.org/fr/articles/news/2015/03/yemen-six-children-killed-in-saudi-arabian-airstrikes/