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Révolutions Arabes - Page 253

  • Un homme, une double Révolution et des zones d’ombre (El Watan, Alger)

     

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	Samy Allam (au centre) dans le rôle de Krim Belkacem

    Samy Allam (au centre) dans le rôle de Krim Belkacem

    Le film d’Ahmed Rachedi sur Krim Belkacem aborde avec prudence l’assassinat de Abane Ramdane en 1957.

    Mission accomplie.» Krim Belkacem, le négociateur en chef des Accords d’Evian, aurait eu ces mots à la conclusion de l’accord avec Louis Joxe, en mars 1962. Le film d’Ahmed Rachedi consacré à ce grand homme de la Guerre de Libération nationale, présenté jeudi en avant-première à la salle El Mouggar d’Alger, n’est pas allé au-delà de l’indépendance de l’Algérie, n’a pas suivi l’itinéraire de celui qui allait s’opposer au régime militaire de Boumediène.

    Une opposition qui le conduira à la condamnation à mort en 1967, puis à l’assassinat en 1972. «Il faudrait faire un autre film, avoir tous les éléments constitutifs d’un scénario sur Krim Belkacem après 1962», a expliqué Ahmed Rachedi lors de la conférence de presse qui a suivi la projection.

    «Nous avions peur de soulever encore une fois les polémiques», a confié, pour sa part, le commandant Azzeddine qui a co-écrit le scénario avec Boukhalfa Amazit. L’histoire contemporaine de l’Algérie a retenu, même si cela n’est pas encore visible, que Houari Boumediène, qui gérait le pays sous un pseudonyme, avait éliminé, neutralisé, éloigné et marginalisé toutes les grandes personnalités de la guerre de libération : Ahmed Ben Bella, Hocine Aït Ahmed, Mohamed Boudiaf, Benyoucef Ben Khedda, Ferhat Abbas, Krim Belkacem, Saâd Dahlab, Kaïd Ahmed...

    Un hasard ? Krim Belkacem (Samy Allam), nommé vice-président au gouvernement provisoire (GPRA) en 1958 derrière Ferhat Abbas, s’étonnait, dans le film d’Ahmed Rachedi, de la volonté de Abdelhafid Boussouf (Kamel Rouini) de «nommer» Houari Boumediène à la tête de l’état-major de l’armée. Le cinéaste et les deux scénaristes ne sont pas allés loin. Le commandant Azzedine, qui était au cœur de l’action durant la guerre, a confier, lors de la conférence de presse, que Abdelhafid Boussouf et Lakhdar Bentobbal (Younès M’rabet) refusaient que Krim Belkacem prenne le ministère de la Défense et l’armée.

    «Ils ne voulaient pas que l’armée leur échappe», a-t-il dit. Le rapport ambigu entre Krim Belkacem et Abane Ramdane (Mustapha Laribi) est montré dans le film mais pas assez pour savoir ce qui se passait réellement. Jalousie ? Guerre de leadership ? On comprend bien que Abane Ramdane se battait pour la primauté du politique sur le militaire et l’intérieur sur l’extérieur, mais la position de Krim Belkacem était restée assez floue.

    Se comportait-il comme un chef de guerre ? Il est vrai qu’Ahmed Rachedi a osé évoquer l’assassinat de Abane Ramdane au Maroc, en 1957, à travers le personnage de Frantz Fanon qui en faisait le reproche à Krim Belkacem. «Il était notre ami», lui dit-il. Frantz Fanon montrait la une honteuse d’El Moudjahid du 28 mai 1958 : «Abane Ramdane est mort au champ d’honneur».

    C’est le mensonge le plus célèbre de la Guerre de Libération nationale ! «Il est vaste le champ d’honneur !», a répliqué Frantz Fanon. «Il n’existe aucun document qui confirme que tel ou tel était présent lors de l’assassinat de Abane Ramdane. On ne sait pas quand cela a eu lieu et où», a soutenu Ahmed Rachedi, qui a tenté de mener sa petite enquête à Tétouan, au nord du Maroc.

    Abdelhafid Boussouf, Lakhdar Bentobbal, Mahmoud Cherif et Krim Belkacem avaient fait le déplacement au Maroc avec Abane Ramdane à la fin de l’automne 1957. Arrivés à l’aéroport, les hommes se sont séparés. Ce voyage et les questionnements qui l’entourent ne figurent pas dans le film d’Ahmed Rachedi. «Abane Ramdane n’était pas opposé à un ou deux chefs, il avait un projet de société différent des autres.

    Le premier à avoir condamné le Congrès de la Soummam était Ben Bella, parce qu’il avait son propre projet», a souligné Boukhalfa Amazit, évoquant le souci de redonner à la Révolution algérienne une dimension humaine. Le commandant Azzedine a rappelé que Krim Belkacem était présent à tous les rendez-vous de la lutte d’indépendance. «J’ai connu tous ces hommes. Ils se sont sacrifiés pour le pays. Lorsqu’ils arrivaient à des postes, à un moment donné, chacun voulait devenir chef de la Révolution. C’est humain. Un homme politique doit avoir une ambition nationale.

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    Les trois B étaient les piliers de la Guerre de Libération nationale. A chaque fois que la Révolution allait exploser, la cohésion revenait», a-t-il noté, rappelant la fameuse réunion des dix colonels pendant cent jours à Tunis pour «sauver» la Révolution (les maquis étouffaient en raison du manque d’armement et de ravitaillement). «Il y a parfois des personnalités qui cachent l’histoire du pays. Krim Belkacem était de ceux là. Il fallait donc faire le choix, parler de ce personnage passionnant mais également de l’histoire de l’Algérie. C’est une fiction.

    Il y a la vie et l’œuvre de Krim Belkacem, mais il y a aussi l’apport de ceux qui ont écrit le film et surtout celui qui l’a réalisé», a précisé Boukhalfa Amazit. «Krim Belkacem a commencé la Révolution sept avant le déclenchement de celle de 1954. Il avait précédé tout le monde. Après 1954, il a accompagné toutes les périodes de la Guerre de Libération nationale. Les impératifs cinématographiques imposent de se limiter à certaines choses. Nous avons axé sur les aspects politiques parce qu’ils sont importants», a estimé Ahmed Rachedi. Selon lui, le cinéma pose des questions, mais ne peut pas apporter de réponses.

    «Nous nous attendons à un grand débat sur ce film. Krim Belkacem est lui-même une double Révolution. Il a été de toutes les étapes de la guerre de libération jusqu’à la signature des Accords d’Evian. Il y a des questions qui suscitent encore la polémique. C’est tout à fait normal. Après tout, c’était une action menée par des hommes», a souligné Djamel Yahiaoui, directeur du Centre national d’études et de recherches sur le mouvement national et la Révolution du 1er Novembre 1954, qui a produit le film (la production exécutive a été assurée par Arfilm Télécinex).

    Ahmed Rachedi, qui a relevé qu’il était tenu par le respect du scénario, a survolé «la crise berbère» et n’a pas beaucoup insisté sur les fissures au sein du PPA-MTLD. Messali Hadj, qui avait rencontré Krim Belkacem, n’a été montré qu’une seule fois dans un long métrage de 153 minutes.

    L’action militante de Benyoucef Ben Khedda, de Ferhat Abbas et de Tayeb Boulahrouf a été mise de côté dans le film. Il y a donc des blancs. Mais également des zones d’ombre, peu éclaircies donc. Le cinéaste a choisi la langue médiane pour élaborer ses dialogues, chargés parfois d’un surdosage idéologique. Les scènes de bataille, qui sont difficiles à tourner du propre aveu du réalisateur, ne sont pas toutes réussies. Le recours aux effets spéciaux n’a parfois pas servi la construction de l’image.

    Le cinéaste aurait pu mieux utiliser les moyens aériens, convoqués pour la reproduction des scènes de bombardements notamment lors du Congrès de la Soummam, en 1956. L’exploitation des archives a été minimaliste. Pour les Accords d’Evian, Ahmed Rachedi n’a utilisé que la célèbre image de Krim Belkacem avec les autres négociateurs algériens entrant dans le bâtiment abritant les discussions. Un effort a été toutefois fourni pour représenter la salle où étaient réunis les négociateurs d’Evian, un lieu désormais historique.

    Le casting est à moitié réussi. Samy Allam a fait tout ce qu’il pouvait pour camper le personnage complexe de Krim Belkacem. Il en est de même pour Mustapha Laribi qui n’a pas totalement réussi à jouer le rôle de Abane Ramdane, contrairement à Ahmed Rezzak qui a su rendre à l’écran la détermination patriotique de Amar Ouamrane. Ferhat Abbas a été maigrement représenté par Djamel Hamouda, alors que Djamel Dekkar a sombré dans les gestes inutiles dans l’interprétation du rôle de Saâd Dahlab aux négociations d’Evian.

    Même s’il s’agit d’une fiction, ce n’est pas du tout une raison pour en rajouter des couches qui cachent la peinture fraîche ! Le jeune Younes M’rabet est resté effacé dans l’incarnation du personnage, pourtant important, de Lakhdar Bentobbal. Farid Aouamer, qui a composé la musique originale, a su créer une certaine ambiance historique alors que Hamid Aktouf, directeur de la photographie, a été quelque peu avare en images montrant les décors naturels de Kabylie et de l’Est algérien.

    Djamel Yahiaoui a précisé que le ministère des Moudjahidine a décidé de réaliser une série de films sur les personnalités qui ont marqué la Guerre de Libération nationale. Après Mustapha Ben Boulaïd et Krim Belkacem, un film sera bientôt consacré à la vie du colonel Lotfi. Le lancement du tournage d’un long métrage sur Ben M’hidi est également prévu, il sera suivi par d’autres sur Si El Haouès, Zighout Youcef et M’hamed Bouguerra. 

     

    Fayçal Métaoui

    http://www.elwatan.com/actualite/un-homme-une-double-revolution-et-des-zones-d-ombre-17-01-2015-285186_109.php

  • L’on ne peut pas être Charlie sans être Raif Badawi" ( Liberté Alger)

    Des manifestants demandent la liberté pour le blogueur saoudien Raif Badawi, lors d'un rassemblement à Montréal, le 9 janvier 2015 - AFP/Clément Sabournin

       Des manifestants demandent la liberté pour le blogueur saoudien Raif Badawi, lors d'un rassemblement à Montréal, le 9 janvier 2015 - AFP/Clément Sabournin

    Le commentaire du chroniqueur algérien Mustapha Hammouche sur la peine écopée par le jeune blogueur saoudien Raif Badawi et l'hypocrisie des démocraties occidentales qui permettent la présence du numéro deux de la diplomatie saoudienne à la marche républicaine.
    Un jeune Saoudien, Raif Badawi, animait un blog militant pour un régime politique plus libéral et un rigorisme religieux atténué. Le 7 mai dernier, la "justice" du roi a condamné Badawi à dix ans de prison, une amende de 226 000 dollars et mille coups de fouet pour avoir créé ce site de débat. Il devra subir vingt séances de bastonnade réparties sur vingt vendredis à raison de cinquante coups par séance. La première lui a été infligée vendredi dernier [9 janvier].

    Un témoin décrit ainsi "l'événement" : "Lorsque les fidèles ont vu le fourgon de police devant la mosquée, ils ont su que quelqu'un allait être flagellé aujourd'hui. Ils ont formé un cercle. Des passants les ont rejoints et la foule s'est agrandie (...). Mais personne ne savait pourquoi l'homme amené là allait être puni." C'est que l'Arabie saoudite n'est pas le paradis de la liberté d'information, et peu de gens étaient au courant de l'affaire Raif Badawi. Entravé aux pieds et menotté, Raif "était silencieux, mais on voyait à son visage et son corps qu'il souffrait terriblement" pendant que l'agent des forces de sécurité lui assénait les coups de bâton en comptant jusqu'à 50. Après quoi, la foule a crié : "Allahou Akbar !" Et Raif Badawi a été traîné vers le fourgon qui devait le ramener en prison en attendant la séance suivante de supplice, vendredi prochain.

    Un intégrisme qui terrorise les consciences

    Le surlendemain, Nizar Al-Madani, ministre d'Etat aux affaires étrangères (numéro deux de la diplomatie saoudienne), était à Paris pour prendre part à la "marche républicaine" contre le terrorisme islamiste et pour la liberté d'expression !

    Des chefs d'Etats démocratiques, Obama notamment, ont bien tenté d'intercéder auprès du roi d'Arabie. Comme ils le font souvent auprès de despotes protégés par leurs "justices" barbares et... leur utilité pour le commerce mondial. Ces démarches ne vont jamais jusqu'à faire de cette brutalité d'Etat un enjeu de relations internationales. Les démocraties savent bien que ce genre de "partenaires" survit par la terreur qu'ils instillent en leurs sujets. Mais pas question de compromettre des débouchés potentiels pour les Awacs, Rafale et autres centrales EPR...

    Y aurait-il une différence entre un intégrisme qui terrorise les consciences et assassine la liberté d'expression parce qu'ici, il est pratiqué par un Etat et là par un groupe armé ? Puisque les droits de l'Homme constituent un attribut de l'être humain, de l'individu, pourquoi y aurait-il une différence entre un crime commis contre des citoyens que la république défend et un autre commis contre des sujets otages de leurs despotes ? Ce n'est que chimère d'espérer réduire le terrorisme porté par les forces disparates de l'obscurantisme tout en admettant la légitimité de pouvoirs sévissant contre leurs peuples par la terreur rigoriste.

    Les tragédies que l'islamisme a infligées aux démocraties ont invariablement suscité en elles le même réflexe : renforcer la frontière. Mais, à l'ère numérique, il n'y a plus de frontières qui puissent contenir le message ! Et c'est le message du wahhabisme, relayé par Farid Benyettou du côté des Buttes-Chaumont, qui a engendré les frères Kouachi ! Et c'est la source du mal et son relais qui s'en tirent à bon compte. Et s'offrent le luxe de condamner le crime de leurs disciples !

    Liberté Mustapha Hammouche  15 janvier 2015

    http://www.courrierinternational.com/article/2015/01/15/l-on-ne-peut-pas-etre-charlie-sans-etre-raif-badawi

  • L'Arabie saoudite prévoit de reprendre la flagellation de Raif Badawi vendredi 16 janvier (Amnesty)


    Les autorités saoudiennes ont l’occasion d’améliorer leur bilan catastrophique en matière de droits humains en tenant compte de l’indignation internationale suscitée par la flagellation publique de Raif Badawi et en mettant immédiatement fin à celle-ci, a déclaré Amnesty International.

    Selon les informations reçues par l’organisation, le militant emprisonné, qui a été condamné à 10 ans de prison et 1 000 coups de fouet pour avoir créé le site « Libérez les libéraux saoudiens », va être flagellé une deuxième fois vendredi 16 janvier. L’application de sa peine de flagellation a commencé la semaine dernière après la prière du vendredi, lorsqu’il a reçu 50 coups de fouet devant la mosquée d’Al Jafali à Djedda.

    « Tous les regards sont tournés vers l’Arabie saoudite. Si ses autorités ignorent les très nombreuses critiques et poursuivent sans complexe la flagellation de Raif Badawi, ce pays fera alors preuve d’un grand mépris du droit international et de l’opinion mondiale, a déclaré Saïd Boumedouha, directeur adjoint du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

    « La flagellation et les autres formes de châtiments corporels violent l’interdiction de la torture et des autres mauvais traitements. En continuant d’appliquer cette peine inhumaine, les autorités saoudiennes bafouent de façon flagrante les principes fondamentaux des droits humains. »

    Les gouvernements des États-Unis, du Canada, de l’Allemagne et de la Norvège, notamment, ont condamné la flagellation de Raif Badawi. Des milliers de personnes à travers le monde ont exprimé leur indignation concernant cette affaire sur les réseaux sociaux et plusieurs centaines de militants ont organisé des manifestations devant les ambassades d’Arabie saoudite dans divers pays.

    « La communauté internationale doit maintenir la pression sur les autorités saoudiennes. La peine cruelle et injuste de Raif Badawi doit être arrêtée immédiatement », a déclaré Saïd Boumedouha.

    L’épouse de Raif Badawi, Ensaf Haidar, a indiqué à Amnesty International qu’elle craignait que son mari ne puisse pas supporter physiquement une deuxième série de coups de fouet.

    « Raif m’a dit qu’il souffrait beaucoup à la suite de sa flagellation, son état de santé n’est pas bon et je suis certaine qu’il ne pourra pas résister à une nouvelle série de coups de fouet, a-t-elle déclaré.

    « J’ai annoncé la nouvelle à nos enfants la semaine dernière pour éviter qu’ils ne l’apprennent par des amis à l’école. Ils sont extrêmement choqués. La pression internationale est essentielle ; je suis convaincue que si nous maintenons notre soutien, il finira par payer. Nous devons continuer de nous battre. »

    Dans une autre affaire révélatrice de l’intolérance absolue de l’Arabie saoudite à l’égard de l’opposition pacifique, lundi 12 janvier, l’avocat de Raif Badawi, le défenseur des droits humains Waleed Abu al Khair, a vu sa condamnation confirmée en appel. Initialement condamné à 15 ans d’emprisonnement, il ne devait en purger que 10. Cependant, le juge a ordonné lundi qu’il purge l’intégralité de sa peine car il a refusé de présenter des excuses pour les faits qu’on lui reproche. Le tribunal pénal spécial l’avait reconnu coupable de divers chefs d’accusation, notamment « déloyauté envers le souverain », « atteinte au pouvoir judiciaire » et « création d’une organisation non autorisée ».

    http://www.amnesty.org/fr/for-media/press-releases/saudi-arabia-set-resume-flogging-raif-badawi-friday-2015-01-14

  • Mauritanie. Il faut libérer l’ancien candidat présidentiel et les militants anti-esclavagistes (Amnesty)

    Les autorités mauritaniennes doivent libérer trois militants, dont un opposant bien connu, incarcérés jeudi 15 janvier pour avoir organisé des réunions contre l’esclavage, a déclaré Amnesty International.

    La police a utilisé des gaz lacrymogènes et des matraques pour disperser les manifestants qui protestaient devant le tribunal contre le jugement.

    Le tribunal de la ville de Rosso, dans le sud du pays, a condamné à deux ans de prison trois militants anti-esclavagistes et défenseurs des droits humains ; il s’agit de Brahim Bilal, Djiby Sow et Biram Ould Dah Ould Abeid, ancien candidat à la présidence. Ils ont été inculpés d’appartenance à une organisation non reconnue et de participation à une réunion non autorisée. Sept autres militants ont été acquittés.

    « La condamnation de ces militants qui ont participé à des manifestations pacifiques, sur la base de charges vagues et ouvertes aux abus, bafoue leurs droits à la liberté d’expression et à la liberté de réunion pacifique, a déclaré Gaetan Mootoo, chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International.

    « Le fait de se réunir pacifiquement sans autorisation ne doit jamais conduire à une incarcération. Leur condamnation semble fondée sur des motivations politiques, des membres de l’association étant ciblés en raison de leurs activités pacifiques. Les autorités doivent prendre les mesures qui s’imposent pour les libérer dans l’attente de leur jugement en appel. »

    Biram Ould Dah Ould Abeid, président de l’Initiative pour la résurgence du mouvement abolitionniste (IRA), était arrivé en deuxième position à l’élection présidentielle de juin. Il a également été lauréat du Prix des droits humains de l’ONU en 2013.

    Il a été arrêté à Rosso le 11 novembre, en compagnie de 10 autres membres de l’IRA, durant leur campagne pacifique visant à sensibiliser la population au sujet des droits à la terre des descendants d’esclaves. En Mauritanie, les descendants d’esclaves qui travaillent sur des terres sans aucun droit sont contraints de donner une partie de leurs récoltes à leurs maîtres traditionnels.

    La police a interrompu la réunion, invoquant l’absence de documents l’autorisant, alors que l’IRA en avait fait la demande.

    Ces militants ont été inculpés le 15 novembre et placés en détention à Rosso, sans être autorisés à recevoir des visites de leurs familles.

    « La répression croissante contre les militants anti-esclavagistes en Mauritanie n’a pas de fondement légal et témoigne de l’absence de respect du gouvernement envers les droits humains, a déclaré Gaetan Mootoo, chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International.

    « Les autorités doivent respecter le droit de tous les citoyens à manifester pacifiquement. »

    5 janvier 2015

    http://www.amnesty.org/fr/for-media/press-releases/mauritania-jailed-presidential-candidate-and-anti-slavery-activists-must-be

  • Naji...

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    Naji al-Ali, créateur de caricaturiste palestinien de Handala. Assassiné par le Mossad en 1987 à Londres.

    Il n'y a aucun marches contre le terrorisme et pour la liberté d'expression pour Naji.

  • Humour...

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  • Le budget 2015 de la Tunisie condamne le peuple tunisien à payer la dette de Ben Ali (Cadtm)

    La loi de finances 2015 qui vient d’être adoptée par la nouvelle assemblée de parlementaires tunisiens donne, une fois encore, la primauté au remboursement de la dette et à l’application de recettes néo-libérales sous la houlette des institutions financières internationales comme sous la dictature de Ben Ali.

    Le réseau CADTM soutient le peuple tunisien en lutte contre ces mesures injustes qui aggravent ses conditions de vie.

    Les élections législatives (octobre 2014) et présidentielles (novembre-décembre 2014) en Tunisie ont été remportées par le parti Nidaa Tounes. Fondé en mars 2012 par Beji Caïd Essebsi, l’un des dirigeants de la dictature, ce parti est une refondation de l’ancien parti de Ben Ali. Nidaa Tounes a obtenu 86 sièges (sur 217) au sein de la nouvelle Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) et son candidat, Beji Caïd Essebsi, a remporté les élections présidentielles. Le parti islamiste Ennahdha, grand gagnant des élections de l’Assemblée constituante de 2011, n’en a obtenu que 69. Ennahdha garde, néanmoins, une place importante dans le paysage politique. Quant au Front Populaire, regroupement de partis « progressistes », il a obtenu seulement 15 sièges et son candidat aux élections présidentielles n’a obtenu qu’environ 8% des voix. Fathi Chamkhi (militant anti-dette, membre des réseaux CADTM et ATTAC) compte parmi les députés nouvellement élus.

    Nidaa Tounes compte manifestement poursuivre la politique économique et sociale imposée à la Tunisie dans le cadre de l’ajustement structurel dicté par les institutions financières internationales (avec le FMI en tête) et des politiques de libre échange imposées par l’Union européenne. Il ne diffère pas en cela du parti islamiste, qui a été un élève docile des créanciers étrangers. Cela a été bien clair lors du vote du budget de l’État de 2015 qui a été voté en décembre 2014 par tous les députés de Nidaa Tounes et d’Ennahdha. La loi de finances ainsi adoptée prévoit la privatisation des trois banques publiques, la poursuite du gel des salaires dans la fonction publique pour la troisième année consécutive, la baisse des budgets de plusieurs ministères sociaux (emploi, formation professionnelle, affaires sociales et développement régional) en parfaite concordance avec les mesures dictées par le FMI.

    Quant au service de la dette, première dépense de l’État, il atteindra cette année des niveaux records. Le remboursement prévu de la dette externe et interne de l’État s’élève à 5 130 000 dinars tunisiens (2,3 milliards d’euros) : soit l’équivalent des dix budgets suivants cumulés : santé, affaires sociales, emploi et formation professionnelle, développement, environnement, transport, culture, affaires sociales, recherche scientifique, tourisme !

    Les besoins sociaux des Tunisiens ne sont absolument pas pris en compte, y compris les plus élémentaires. Ainsi la vague de froid qui s’est abattue sur tout l’Ouest tunisien a, une nouvelle fois, montré la défaillance grave de l’État puisqu’une partie de la population a durement souffert du froid et de la faim. Dans la foulée, le Bassin minier de Gafsa-Redeyef est de nouveau en ébullition en réaction aux conditions sociales abominables dans lesquelles est condamnée la majorité de ses habitants.

    Le réseau international CADTM soutient ces mobilisations populaires ainsi que toute initiative de parlementaires visant à suspendre, auditer et annuler sans condition les dettes odieuses et illégitimes de la Tunisie.

    La Tunisie dispose de plusieurs arguments juridiques de taille pour remettre en cause le paiement de ces dettes. La doctrine de la dette odieuse s’applique parfaitement aux dettes contractées sous la dictature de Ben Ali. Selon cette doctrine de droit international : « Si un pouvoir despotique contracte une dette non pas pour les besoins et dans les intérêts de l’État, mais pour fortifier son régime despotique, pour réprimer la population qui le combat, etc., cette dette est odieuse pour la population de l’État entier (…). Cette dette n’est pas obligatoire pour la nation ; c’est une dette de régime, dette personnelle du pouvoir qui l’a contractée, par conséquent elle tombe avec la chute de ce pouvoir ».

    En dépit de la nature odieuse des dettes léguées par le régime de Ben Ali, reconnue d’ailleurs explicitement dans plusieurs résolutions parlementaires comme celle du Parlement européen adoptée en mai 2011, ces dettes odieuses continuent encore en 2015 à être remboursées par le peuple tunisien.

    L’article 103 de la Charte des Nations-Unies peut également être utilisé afin de fonder juridiquement une suspension unilatérale du paiement de la dette afin de donner la priorité aux services de base pour la population. En effet, cet article consacre la supériorité des droits humains sur tout autre engagement de l’État comme ceux à l’égard des créanciers.

    Soulignons, enfin, que le réseau CADTM participera au prochain Forum Social Mondial qui se déroulera à Tunis du 24 au 28 mars. L’Assemblée du CADTM Afrique et le Conseil International du réseau CADTM se tiendront respectivement avant et après ce Forum ainsi que plusieurs autres réunions avec les mouvements sociaux. 14 janvier par CADTM international

    http://cadtm.org/Le-budget-2015-de-la-Tunisie

     

  • Tunisie : Grève des des agents de la TRANSTU (Afriques en lutte)

    http://revolutionsarabes.hautetfort.com/media/00/01/1873927152.jpeg

    La grève générale des bus et tramways dans la capitale se poursuit pour la deuxième journée consécutive en paralysant les services de transport.

    La grève inopinée observée par les agents du transport, de Société des Transports de Tunis (Transtu) a démarré hier dans les gouvernorats de Tunis, Ben Arouss, Ariana, Mannouba.

    Dans un communiqué publié, lundi, la TRANSTU a appelé les parties concernées à éviter le blocage du transport public. Le même communiqué précise que « les négociations entre le ministère de tutelle et la partie syndicale sont en cours actuellement à l’effet de la reprise de l’activité du transport dans les plus brefs délais ».

    Une réunion se tiendra, aujourd’hui, mardi 13 janvier 2015 à 9h, entre le ministère de tutelle et les représentants de l’Union Générale tunisienne du Travail (UGTT) afin de parvenir à une solution entre les deux parties.

    Source : Shem FM 15 janvier 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/tunisie/article/tunisie-greve-des-des-agents-de-la

  • Point sur la répression en Egypte ces derniers mois (A l'Encontre)

    Le président Sissi

    Le président Sissi entouré de ses généraux

    Selon Michel Camau [1], l’autoritarisme consolidé «réunit deux caractéristiques apparemment contradictoires». Premièrement, «il affiche une capacité et un niveau de répression sans commune mesure avec leur état antérieur». Deuxièmement, le régime marque simultanément «la distance avec le passé en se prévalant de l’Etat de droit, du pluralisme et de la démocratie». Michel Camau explique que «la logique de justification de cette ambivalence est bien connue. C’est celle de l’état d’exception: prétendre à la sauvegarde d’un dispositif normatif de liberté en restreignant le champ d’application de ses procédures, au nom de la lutte contre ses ennemis putatifs».

    Il me semble que cette définition de l’autoritarisme consolidé correspond extrêmement bien au cas égyptien actuel: le régime se prévaut de la réforme démocratique et de la poursuite des objectifs de la révolution du 25 janvier 2011, mais la répression est à son plus haut niveau depuis longtemps. Le tout sous le thème de la guerre contre le terrorisme et l’islamisme, qui permet au passage de mettre au pas les récalcitrants de tout acabit.

    Je tiens dans cet article à faire le point sur cette répression multi-facettes, tout en insistant sur la manière dont différents individus et groupes sociaux se font les relais de cette répression et de cette consolidation autoritaire, en actes et en paroles, et donc en dehors du schéma classique (et caricatural bien entendu) qui voudrait que l’autoritarisme se caractérise par un Etat et une société strictement opposés l’un à l’autre.

    Les Frères musulmans

    Depuis le renversement du Président Morsi le 3 juillet 2013, les actes de répression contre les Frères musulmans se sont multipliés. La liste est longue et je n’en proposerai ici qu’un survol. Les estimations des conséquences de la répression à ce stade tournent autour de 2500 morts et 17’000 blessés, quelque 16’000 arrestations, et plus de 1000 condamnations à mort au terme de procès expéditifs. Le 26 juillet 2013, le général Sissi a appelé les Egyptiens à manifester en masse pour lui donner un mandat afin d’en finir avec le terrorisme. Cette rhétorique de la guerre contre le terrorisme est devenue depuis le principal argument du régime actuel et le prétexte à des appels réguliers à l’union nationale et à la multiplication de lois répressives.

    Après l’annonce de la condamnation à mort de centaines de partisans de Morsi à Minya

    Après l’annonce de la condamnation à mort de centaines de partisans de Morsi à Minya

    Le 14 août 2013, les forces de sécurité ont dispersé le sit-in des partisans du président Morsi déchu dans le sang. Human Rights Watch, au terme d’une longue enquête ayant conduit à l’écriture d’un rapport sur le sujet, a qualifié cette dispersion d’«attaque préméditée», de «massacre» et de «crime contre l’humanité», estimant le nombre de morts à 817. Les autorités ont d’ailleurs empêché l’organisation de venir présenter les conclusions du rapport sur le territoire égyptien. En septembre 2013, l’organisation des Frères musulmans a été déclarée organisation terroriste par les autorités. La chasse aux sorcières entamée immédiatement après la destitution de Morsi se poursuit encore aujourd’hui. Des condamnations à mort collectives ont été prononcées à plusieurs reprises contre des membres ou des partisans de la Confrérie (1212 personnes d’un coup à Minya en mars et avril 2014, 183 dont l’ancien guide suprême des Frères Mohammed Badie en juin, ou encore 188 en décembre).

    Le discours dominant, relayé par les autorités, les intellectuels et une partie de la population continue à dénoncer pêle-mêle le projet totalitaire des frères, leur volonté d’établir un nouveau califat islamique en Egypte et de transformer la société en imposant des lois réactionnaires, la nature intrinsèquement violente et terroriste de la Confrérie, l’intransigeance des leaders poussant leur base militante à se sacrifier comme des «moutons». Ce discours favorise la polarisation de la société et une forme d’irrationalité et de paranoïa qui atteint des degrés très élevés. Ainsi en octobre dernier, un étudiant (Abdel Rahman Zaidan) racontait sur sa page Facebook [2] la scène à laquelle il avait assisté dans un minibus: une femme critiquait le gouvernement en prenant à parti les autres passagers. Lorsque l’un d’entre eux s’est décidé à prendre part à la conversation et à émettre également des critiques, la femme a fait arrêter le minibus et a dénoncé l’homme à deux policiers qui gardaient une église en criant «Au secours ! Il y a un frère musulman terroriste dans le bus».

    Les ONG et les activistes

    La répression s’exerce également contre les activistes et les représentants de la société civile, en tête desquels se trouvent les ONG.

    Peu de temps après l’élection de Sissi, le 18 juillet, le ministère égyptien des Affaires sociales a publié une annonce dans le journal Al-Ahram demandant à toutes les entités civiles concernées de s’enregistrer comme ONG dans un délai de 45 jours, en vertu de la loi 84 de 2002. Cette loi oblige toutes les ONG à s’enregistrer auprès des autorités. Elle permet au gouvernement de surveiller de très près les activités des ONG, et d’imposer leur fermeture, de geler leurs avoirs et de confisquer leurs financements s’il estime que ces activités nuisent aux intérêts du pays [3]. Cette annonce, et les pressions répétées du gouvernement sur les ONG, en particulier celles travaillant pour les droits de l’homme, ont conduit plusieurs d’entre elles à fermer leurs portes ou à délocaliser, à l’image par exemple du Cairo Institute for Human Rights Studies, qui a annoncé son installation en Tunisie du fait des «menaces actuelles contre les organisations de droits de l’homme».

    Le militant politique et fondateur du Mouvement du 6 avril, Ahmed Maher, a été condamné en décembre 2013 au Caire à trois ans de prison

    Le militant politique et fondateur du Mouvement du 6 avril, Ahmed Maher, a été condamné en décembre 2013 au Caire à trois ans de prison

    Les activistes, au départ noyés dans la masse de la grande «union nationale» anti-Morsi et anti-Frères du 30 juin 2013, ont également commencé à faire les frais de la répression à partir du moment où ils ont tenté de reprendre leur indépendance et de poursuivre les revendications de la révolution. Un des principaux instruments de cette répression est la loi sur les manifestations de novembre 2013, qui accorde au ministère de l’Intérieur de larges pouvoirs discrétionnaires sur les manifestations (notamment en matière d’interdiction et de dispersion) et expose de manière vague les circonstances dans lesquelles des manifestants peuvent être considérés comme enfreignant la loi.

    Le ton est donné dès novembre 2013: après une manifestation devant le Parlement contre la nouvelle Constitution, les activistes révolutionnaires Ahmed Maher (fondateur du Mouvement du 6 avril), Mohammed Adel, Ahmed Douma et Alaa Abd El Fattah sont arrêtés. Les trois premiers sont condamnés à trois ans de prison en décembre 2013, le dernier à 15 ans en juin 2014, de même que 25 autres accusés. La manifestation de soutien aux prisonniers politiques du 21 juin 2014 pour protester contre ces peines conduit à une nouvelle vague d’arrestations de militants, dont Sanaa Seif, la sœur de Alaa Abd El Fattah, et Yara Sallam, activiste féministe. L’activiste et avocate des droits de l’homme Mahienour el Masry a également passé six moix en prison pour avoir participé à une manifestation interdite jusqu’à ce que sa peine soit suspendue en septembre dernier.

    Actuellement, Sanaa Seif, Yara Sallam et les autres activistes condamnés en même temps qu’elles sont toujours en prison. Leur peine a été réduite de trois à deux ans en décembre. Alaa Abd El Fattah a été libéré sous caution en septembre puis emprisonné à nouveau. Un nouveau procès est en cours. Ahmed Douma a lui été condamné à trois ans supplémentaires en décembre dernier pour outrage au tribunal après un vif échange de mots avec le juge en charge de son procès.

    Il ne s’agit là que de quelques exemples d’activistes emprisonnés, mais qui soulignent les méthodes et les objectifs du régime actuel. Il s’agit surtout d’empêcher que les voix des révolutionnaires soient entendues, de faire taire la dissidence et d’empêcher tout mouvement alternatif de se structurer, ainsi que d’établir un monopole d’Etat sur les revendications de la révolution du 25 janvier 2011 et du 30 juin 2013.

    Les journalistes et la liberté d’expression

    En 2014, le Comité de Protection des Journalistes a classé l’Egypte parmi les 10 pays ayant emprisonné le plus de journalistes, dénombrant 12 d’entre eux détenus dans les prisons du pays [4]. L’Association pour la Liberté de Pensée et d’Expression se demandait en décembre dans son dernier rapport sur les journalistes emprisonnés si le journalisme était devenu un crime en Egypte [5].

    Les journalistes Mohamed Fahmy (à g.) et Peter Greste (à d.), le 2 janvier 2015, un nouveau procès, dont la date n'a pas été fixée, doit avoir lieu

    Les journalistes d’Al-Jazeera Mohamed Fahmy (à g.) et Peter Greste (à d.), le 2 janvier 2015. Un nouveau procès, dont la date n’a pas été fixée, doit avoir lieu

    Le but de la répression contre les journalistes et les médias est simple: imposer le discours du pouvoir en place comme discours dominant et éliminer tout discours alternatif. Cette répression commence dès la destitution de Morsi, avec l’ordre donné par le gouvernement intérimaire de faire fermer les locaux de 6 chaînes de télévision pro-Frères. L’après juin 2013 voit aussi la fin du programme satirique de l’humoriste Bassem Youssef, symbole de la liberté d’expression et de la critique depuis le 25 janvier 2011. Plus tard, en juin 2014, c’est au tour de trois journalistes d’Al-Jazeera arrêtés 6 mois plus tôt d’être condamnés à des peines de 7 à 10 ans de prison, accusés d’avoir diffusé de fausses informations (un nouveau procès leur a été accordé le 1er janvier 2015).

    Début novembre, le département législatif du Conseil d’Etat a reçu un projet de loi visant à interdire la publication d’information concernant l’armée, dont l’un des articles stipule la nécessité de demander l’autorisation préalable des forces armées avant de diffuser des nouvelles concernant ses troupes, ses mouvements et ses équipements, et impose des sanctions de 6 mois à 5 ans de prison et 100 à 500 livres égyptiennes d’amende en cas de non-respect. Il semble cependant que la loi n’ait toujours pas été promulguée à ce stade.

    D’une manière générale, les journalistes dénoncent les difficultés qu’ils ont à travailler dans un contexte de peur, de paranoïa et de surveillance accrue. Témoignent par exemple de cette atmosphère les mésaventures du journaliste français Alain Gresh le 11 novembre 2014 au Caire, dénoncé aux renseignements puis à la police par une cliente du café dans lequel il parlait politique avec des journalistes égyptiennes. Ces phénomènes de délation et d’entraves à la liberté d’expression ne touchent pas seulement les journalistes cela dit: deux hommes égypto-britanniques et leur cousin égyptien ont été dénoncés et arrêtés dans le métro alors qu’ils parlaient d’un risque de manifestations importantes lors de l’anniversaire à venir de la révolution du 25 janvier.

    L’autocensure, elle aussi, s’est renforcée. La presse se ferme progressivement aux voix dissidentes et même la presse privée tend à renoncer à la critique, comme en témoigne par exemple l’évolution du quotidien Al Masry Al Youm, quotidien de référence de beaucoup d’intellectuels libéraux avant et après la chute de Moubarak pour ses positions distantes du régime et critiques, devenus après 2013 bien plus proche de la presse officielle symbolisée par le quotidien Al-Ahram. Autre manifestation importante de cette auto-censure, à la fin du mois d’octobre 2014, les rédacteurs en chef des plus importants quotidiens du pays se sont ainsi réunis, sous la présidence de Diaa Rashwan, le patron du syndicat des journalistes, pour rédiger une déclaration rappelant leur volonté commune d’«affronter les éléments terroristes et de protéger l’équilibre des forces dans le pays dans le cadre de la Constitution et de la loi». Concrètement, cela signifie qu’en soutien à la révolution du 25 janvier 2011 et du 30 juin 2013, ces rédacteurs en chef se sont engagés à ne plus rien publier qui puisse aider les terroristes et saper les institutions de l’Etat.

    Evacuation du campus de l'université du Caire  par des agents de sécurité lors de la manifestation  du 12 octobre 2014

    Evacuation du campus de l’université du Caire
    par des agents de sécurité lors de la manifestation
    du 12 octobre 2014

    Les étudiants

    Depuis la rentrée universitaire le 12 octobre 2014, étudiants et universités sont une cible privilégiée de la répression et de la violence. Dès cette rentrée, du fait de la crainte de la reprise des manifestations qui avaient marqué l’année universitaire 2013-2014, en particulier après la destitution de Morsi, l’accès aux campus était largement régulé par les forces de sécurité et des compagnies de sécurité privées (dont la compagnie Falcon) obligeant les étudiants à faire la queue pour passer des portiques de sécurité et pénétrer dans le campus. Les étudiants participant alors à des manifestations sont immédiatement réprimés dans plusieurs universités du pays. Le 21 octobre, un étudiant d’Alexandrie meurt des suites de blessure aux tirs de grenaille. Plusieurs centaines d’étudiants ont été arrêtés.

    Autre mesure de renforcement du contrôle des universités, le nouveau système électoral qui devait permettre la désignation des présidents d’université a été abandonné (en juin 2013): c’est donc le président de la république qui continue à nommer les présidents. Par ailleurs, un amendement du règlement disciplinaire des universités datant de février dernier permet aux présidents d’université de décider d’expulser des étudiants sans réunir de conseil de discipline. A l’Université du Caire, toute activité politique est interdite sur le campus depuis la rentrée. En octobre 2014, une nouvelle loi a confié à l’armée la protection des installations et institutions publiques incluant les universités. La loi prévoit aussi que toute atteinte à la sécurité et au fonctionnement de ces installations publiques peut être jugée devant un tribunal militaire, rouvrant allègrement la porte au jugement de civils par les tribunaux militaires, en dépit des dispositions de la Constitution.

    D’une manière générale, le positionnement de Sissi et du régime actuel vis-à-vis de la jeunesse est ambivalent: il alterne entre des excuses (pour le manque de prise en compte des revendications de la jeunesse), crainte des mouvements de jeune organisés et autonomes, exclusion politique et encouragements à participer à la vie sociale et économique égyptienne pour assurer le futur du pays.

    Les homosexuels

    La persécution des homosexuels n’est pas nouvelle en Egypte. Elle est cependant nettement renforcée ces derniers temps. Ce renforcement est à interpréter comme relevant d’une volonté du gouvernement de se présenter comme gardien de l’ordre moral pour satisfaire aux exigences d’une population largement conservatrice, qui condamne l’homosexualité au nom des principes de l’islam. Dans le contexte de l’après Frères musulmans, l’Etat tente de se montrer plus islamique que les islamistes. Par ailleurs, se concentrer sur la lutte contre les minorités sexuelles est un excellent moyen de détourner l’attention d’une série d’autres domaines dans lesquels l’Etat échoue ou avance avec difficultés. L’homosexualité n’est pas condamnée en tant que telle en Egypte, mais les autorités se servent allègrement de l’article 9 (c) de la loi n° 10/1961 sur la lutte contre la prostitution qui fait de la «pratique de la débauche», expression on ne peut plus vague, un délit.

    Acquittés après avoir été humiliés

    Acquittés après avoir été humiliés

    La dernière opération de grande envergure anti-homosexuels s’est déroulée le 7 décembre dernier: Mona Iraqi, une présentatrice de télévision sur la chaîne Al-Qahira wa al-nas s’en est prise à un hammam (établissement de bain traditionnel) qu’elle a qualifié de «plus grand repaire de perversion homosexuelle» dans la capitale égyptienne. Elle a ainsi suivi la police dans l’opération qui a conduit à l’arrestation de 26 hommes, que Mona Iraqi ne s’est pas privée de photographier avec son téléphone portable alors que les policiers les faisaient rentrer à demi-nus et humiliés dans leurs camions, accompagnant le tout de commentaires sarcastiques et sensationnalistes. Dans le cadre de l’enquête, ces hommes ont eu à subir des examens rectaux, pratique exécrable largement répandue dans le pays et utilisée afin de déterminer si une personne a eu ou non des rapports anaux récents. Les experts médico-légaux ont conclu qu’aucun des hommes interpellés n’avait eu de rapports homosexuels et que trois d’entre eux présentaient des stigmates de viol. Le procès a eu lieu et les 26 hommes ont finalement été acquittés, ce qui n’efface malgré tout en rien les humiliations qu’ils ont eu à subir.

    Ce procès n’est pas un cas isolé: à la fin du mois de décembre, huit hommes ont été condamnés à trois ans de prison (peine réduite à un an récemment) à la suite d’accusations de débauche après avoir organisé un simulacre de mariage gay et posté la vidéo sur Youtube. Certains chiffres évoquent jusqu’à plus de 150 arrestations de personnes soupçonnées d’être homosexuelles, sous couvert de la loi sur la débauche.

    Les athées

    Toujours dans l’optique de se présenter comme les gardiennes de l’ordre moral, les autorités s’en prennent également aux athées. Selon un rapport publié par Dar Al-Ifta (centre de recherche islamique et principale autorité en charge de l’émission de fatwas), il y aurait 866 athées en Egypte. Un chiffre étonnamment précis et fortement débattu, qui place l’Egypte en tête des pays arabes en matière d’athéisme. Etant donné le conservatisme de la société, les athées font généralement profil bas et évitent la publicité quant à leur athéisme. Il semble donc très difficile d’estimer leur nombre. Mais l’enquête a pourtant tiré une sonnette d’alarme et fait réagir les autorités religieuses et politiques.

    En novembre 2014, une grande réunion de deux jours a eu lieu entre représentants d’Al-Azhar et de l’Eglise afin de proposer des solutions à la diffusion du «phénomène» de l’athéisme. Ces représentants religieux se sont également exprimés régulièrement de façon publique dans les médias pour dénoncer les dangers de l’athéisme, souvent décrit comme une importation depuis l’Occident, un produit du matérialisme mais aussi un résultat de la mauvaise image donnée de l’islam par les groupes extrémistes.

    Le 10 novembre, un café du centre-ville (quartier de Abdeen) a été fermé par les autorités, après saisie de ses biens. Un mois plus tard, les autorités municipales ont déclaré que le café avait été fermé car des athées s’y rassemblaient régulièrement, entre autres pour pratiquer le «culte de Satan» (sic).

    Le fait d’être athée n’est pas criminalisé par la loi égyptienne, et la liberté de pensée est inscrite dans la Constitution. Cependant l’article 98 (f) du Code pénal stipule que les personnes jugées coupables de diffamation ou d’insultes envers les trois religions peuvent être condamnées à des peines de 6 mois à 5 ans de prison et des amendes de 500 à 1000 livres égyptiennes. L’écrivaine et journaliste Fatima Naout risque ainsi de faire les frais de cette loi dans les jours à venir: elle comparaîtra le 28 janvier devant un tribunal pour insulte à l’islam après avoir écrit sur sa page Facebook que l’Aïd el-Kebir est «le plus grand massacre commis par les êtres humains» et que «ce massacre annuel est basé sur le cauchemar passé d’un des prophètes, un jour, à propos de son fils, et bien que ce cauchemar sacré soit terminé pour le bonhomme et son fils, le mouton en paie encore le prix aujourd’hui». Autre verdict marquant: le 11 janvier 2015, un jeune homme de 21 ans a été condamné à 3 ans de prison et 1000 livres d’amende pour insulte à l’islam après avoir révélé son athéisme sur Facebook. Il a été arrêté en novembre 2014 après être allé déposer plainte au poste de police pour harcèlement (notamment par un journal local). Son propre père a témoigné contre lui. (Article paru sur le site Actu Egypte, 12 janvier 2015)

    Publié par Alencontre le 13 - janvier - 2015
    Par Mathilde du Pradel

    [1] «Remarques sur la consolidation autoritaire et ses limites» in A. Boutaleb, J.-N. Ferrié, B. Rey (coord.), L’Autoritarisme dans le monde arabe. Autour de Michel Camau, Luis Martinez, Le Caire, Cedej, coll. Débats, mai 2005

    [2] http://www.madamasr.com/opinion/politics/egypt-nation-snitches-makes-comeback

    [3] Voir l’article d’Actu Egypte du 30 octobre 2014 à propos des ONG https://actuegypte.wordpress.com/2014/10/30/le-projet-de-loi-sur-les-ong/

    [4] https://www.cpj.org/reports/2014/12/journalists-in-prison-china-is-worlds-worst-jailer.php

    [5] http://afteegypt.org/media_freedom/2014/12/10/8868-afteegypt.html

    http://alencontre.org/moyenorient/egypte/point-sur-la-repression-en-egypte-ces-derniers-mois.html