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Amel Zenoune jeune étudiante en droit quitte Alger dans un bus de l’université pour rentrer chez elle à Sidi Moussa, environ une heure avant la rupture du jeune.
En ce dimanche 26 janvier 1997, 17e jour du ramadan. Sur le chemin le bus est arrêté par ce que les algériens appelleront « un faux barrage » pour le distinguer des barrages de contrôle assuré par les militaires.
L’embuscade est mise en place par des terroristes du Groupe Islamiste armé GIA au lieu dit Benedja commune de Bentalha de triste mémoire pour avoir subit un des massacres les plus terrifiants des années 90.
Les passagers du bus tremblent de peur et voient leur dernière heure arrivée. Mais les terroristes ne semblent pas se soucier d’eux. Une seule personne les intéresse : Amel Zenoune. On lui intime l’ordre de descendre du bus et la jeune fille s’exécute avec courage.
L’un des hommes armés aiguise son couteau sur une pierre et, sans le moindre état d’âme, égorge la jeune fille sous le regard des autres passagers terrifiés. Il leur dira en substance qu’elle servira d’exemple à toutes celles qui fréquentent les universités et qui vont au travail sans être voilées. Un message terrifiant pour celles qui refusent d’abdiquer à leur ordre moral inique.
Elle avait tout juste 22 ans.
Elle devait servir de modèle pour terrifier toutes les femmes et jeunes filles qui en Algerie, résistaient au diktat du FIS, Front Islamique du Salut et ses différents bras armés.
Dans d’autres contrées du Monde, en terre d islam, des millions de femmes à l’image d’amal Zanoune continuent de résister, par tous les moyens, à l intégrisme islamiste et son ambition démesurée de soumettre les femmes et les sociétés à leur projet théocratique moyenâgeux.
C’est à Paris, capitale de la France laïque, héritière des siècles des Lumières et de la République, promoteur des droits de l’Homme et de l’égalité des droits entre les femmes et les hommes qu’une initiative dite ’Hidjab day’ est lancée. Initiative mondiale lancée en 2013 par un réseau qui réussit parfaitement son marketing politique en Europe. La preuve est là sous nos yeux : c’est précisément à Sciences Po Paris , prestigieuse école où la raison est enseignée pour éclairer l’esprit que l’action démarre !
Quelque soit les motivations des jeunes étudiantes « solidaires » qui se sont mobilisées pour « soutenir leurs copines voilées », qu’elles n’oublient pas que des centaines de milliers – non des millions – de femmes musulmanes occupent l’espace public tête nue dans leurs pays au péril de leur vie. Résister par tous les moyens pour dire leur aspiration à être libres et insoumises à l’ordre moral qui veut les cacher parce qu’objet sexuel ! Combien d’entre elles ont payé par le viol et la mort le tribut de « butin de guerre » ?
Que ces jeunes étudiantes, sûrement laïques et émancipées, n’oublient pas que ce combat autour du « voile » cache avant tout l’ambition de forces politico religieuses violentes, déterminées à conquérir le monde pour transformer « le citoyen » en communauté de simples croyants soumis à un ordre totalitaire où les femmes sont appelées à se cacher, s’effacer, obéir, disparaître ...
Que toutes les jeunes filles voilées à qui les prêcheurs et « dealers de paradis » courtisent par un faux discours de tolérance et de bienveillance fassent l’effort d’interroger cette pratique imposée hors contexte et qui est à des années lumières de l’islam le plus lumineux qu’elles pensent représenter ! Lisez IBN SINA , IBN ROCHD , Mohamed ARKOUN , Fatima MERNISSI pour porter un autre esprit de l’islam que celui qui s affiche en uniforme.
Par cette expression qui ne fera surement pas l’unanimité, je crie ma rage de militante féministe algérienne ayant vécu comme des centaines de milliers de mes concitoyennes l’ordre intégriste en marche. Sans la résistance des femmes et tous les citoyens acquis à l’idée de la démocratie dans son sens plein d’humanité le visage de l’Algérie aurait été radicalement transformé.
Certes la France n’est ni l’Algérie, ni la Tunisie, ni l’Irak, ni l’Égypte. Seulement n’oublions pas le credo unique des mouvements conquérants, intégristes d’extrême droite. Quelque soit l’habit sous lequel ils se présentent les premières victimes sont d’abord les femmes. C’est la leçon de notre histoire quotidienne.
Porter le voile est-ce une question de Liberté garantie par l’exercice de la démocratie ? Je ne le pense pas. La bataille « du voile » est l’ expression la plus visible de la volonté des intégristes de soumettre les femmes. L’ évocation des principes de démocratie et de liberté sont seulement le moyen d’y arriver...
N’oublions pas le sacrifice d’Amel l’étudiante, de Rachida l’agronome, de Khadidja la vétérinaire, de Lila l’enseignante, de Rabéa mère au foyer et de cette très longue liste de résistantes ...
La section centre-bretonne de France-Palestine solidarité propose pour la 2e fois un cycle d’animations.
Entre films, débats, concerts et expositions, il s’étendra du 1er au 29 mai.L’an dernier, il s’agis- sait d’une semaine. Cette année, on prend le modèle au-dessus : ce sera un mois. Pour la deuxième fois, l’Association France-Palestine solidarité (AFPS) en Centre-Bretagne organise son printemps de la Palestine, qui s’étendra donc cette année du 1er au 29 mai.
Le fil conducteur de cette deuxième édition sera l’agriculture en Palestine. « Le fait que les Palestiniens soient surtout des cultivateurs est un aspect méconnu, souligne Nazim Khalfa, président d’honneur de l’AFPS Centre-Bretagne. Les exploitations sont souvent de toutes petites parcelles, qui sont laissées en friche et confisquées par les colons, en vertu d’une loi qui date de l’Empire ottoman. »
Autre problème, qui touche l’agriculture palestinienne, selon lui : le mur de protection érigé en Cisjordanie. « Ce mur a été réalisé en englobant dans les territoires contrôlés par Israël, des oliveraies qui appartiennent aux Palestiniens. Du coup, le passage des agriculteurs dépend de l’humeur des soldats. » L’agriculture sera notamment évoquée dans l’exposition Palestine, l’eau confisquée, qui sera inaugurée le 2 mai à 18 h à Ti ar Vro et qui restera en place durant tout le mois.
«L’eau est un enjeu important non seulement en Palestine, mais dans toute la région », insiste Jean-Pierre Jeudy, président de l’association dans le Kreiz-Breizh. Sur un registre plus ludique, des séances d’initiation à la cuisine palestinienne se tiendront, toujours à Ti ar Vro, les jeudi 5 et vendredi 20 mai à 17 h. Ce Printemps se conclura le 20 mai à 17 h 30 à la salle polyvalente de Motreff, par le concert du groupe Safara Safar (concert et buffet : 10 €).
Les films au programme
Plusieurs films sont au programme, suivis chacun d’un débat après la projection.
Dimanche 1er mai, à 16 h à la Maison des syndicats de Carhaix :
L’Eau de chez nous, l’eau de chez eux, de Frédéric Vigné.
Mercredi 4 mai, au cinéma Arthus d’Huelgoat à 20 h 30 :
Just Play, de Dimitri Chimenti (prix d’une place de cinéma, débat ensuite à l’Autre rive).
Vendredi 6 mai, à 20 h 30 au Foyer du chêne de Carhaix,
La Résistance des agriculteurs, de Dominique Le Duff.
Mardi 10 mai à 20 h 30 au Grand Bleu de Carhaix :
Dégradé, des frères Nasser.
Jeudi 12 mai, à 18 h à la médiathèque de Rostrenen :
2000 ans d’histoire, diaporama sur la Palestine.
Lundi 16 mai, à 20 h 30 au Ciné Breizh de Rostrenen :
Les 18 fugitives, d’Amer Shomali et Paul Cowan (tarif cinéma).
Mercredi 18 mai, à 20 h à la salle multifonctions du collège de Landeleau :
Dans les collines au sud d’Hébron, de François-Xavier Gilles.
Jeudi 19 mai, à la médiathèque de Carhaix à 18 h :
Cultivons la paix, de Denys Piningre.
Lundi 23 mai, au cinéma L’Argoat de Callac à 20 h 30 :
La Mauritanie doit annuler la condamnation à mort prononcée contre un blogueur déclaré coupable d’apostasie, et le libérer sans condition, a déclaré Amnesty International mardi 19 avril, avant son audience d’appel prévue pour le 21 avril dans la ville de Nouadhibou (sud-ouest du pays).
Mohamed Mkhaïtir, 33 ans, a été condamné à la peine de mort en décembre 2014, après avoir passé un an en détention provisoire, pour avoir écrit un billet de blog critiquant ceux qui utilisent l’islam pour introduire des discriminations à l’égard de certains groupes de la société. Mohamed Mkhaïtir est la première personne condamnée à mort pour apostasie depuis que la Mauritanie a accédé à l'indépendance en 1960.l
« La peine capitale ne doit être utilisée sous aucune circonstance.
La condamnation de Mohamed Mkhaïtir à ce châtiment, pour avoir écrit un billet de blog critiquant ceux qui utilisent la religion à des fins de discrimination, est injuste et montre jusqu’où les autorités mauritaniennes sont prêtes à aller pour essayer d’écraser la dissidence », a déclaré Gaëtan Mootoo, spécialiste de l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International.
« Les autorités mauritaniennes doivent annuler cette condamnation et libérer cet homme immédiatement et sans condition. »
Mohamed Mkhaïtir est un prisonnier d'opinion, uniquement emprisonné pour avoir exercé de manière pacifique son droit à la liberté d'expression. Amnesty International estime que le recours à des sanctions pénales dans le but d’imposer des convictions religieuses est une atteinte au droit international relatif aux droits humains, et en particulier à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, à laquelle la Mauritanie est partie.
L’organisation s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances, quelles que soient la nature ou les circonstances du crime commis. Ce châtiment viole le droit à la vie tel qu’il est proclamé par la Déclaration universelle des droits de l’homme et constitue le châtiment le plus cruel, inhumain et dégradant qui soit.
Munir Nuseibah – 12 avril 2016 – Al-Shabaka Israël est un expert pour créer de nouveaux réfugiés palestiniens et personnes déplacées internes, saisissant toute occasion pour cela et exploitant les crises temporaires afin de promouvoir des mesures permanentes. Aujourd’hui, il se sert de la récente violence dans le Territoire palestinien occupée (TPO) pour donner un...
Sarah Irving – The Electronic Intifada – 28 mars 2016 Nizar Rohana(Mohamed Badarne) Furat par le Trio de Nizar Rohana Le deuxième album du joueur de oud Nizar Rohana, Furat (l’Euphrate) offre à la fois une vision rafraîchissante et engageante de son instrument bien connu et une vue large sur le Moyen Orient...
Par Ali Abunimah , 19 avril 2016 À Tel-Aviv, mardi soir, sur la place Yitzhak Rabin, des milliers d’Israéliens se sont rassemblés pour soutenir Elor Azarya, le soldat qui a été filmé exécutant le mois dernier un Palestinien gravement blessé. Les participants ont crié des slogans anti-arabes et ont attaqué des gens considérés de gauche...
Hamza Abu Eltarabesh, The Electronic Intifada, Camp de réfugiés, 19 avril 2016 Nafez Abed dans son atelier sur un toit à Gaza. (Momen Faiz) Une petite pièce sur un toit dans le camp surpeuplé de la Plage dans la Bande de Gaza occupée ressemble à un musée archéologique en miniature. C’est l’atelier de Nafez Abed, 55 ans,...
Ahmad Diab, le 5 juin 2014 Si Joseph Conrad avait raison de dire que nous vivons comme nous rêvons, seuls, alors le contraire de cette déclaration pourrait aussi bien comporter une part de vérité. A la différence de la vie et des rêves, la mort et les cauchemars peuvent être partagés, comme l’ont découvert les Palestiniens...
Tous les ans le 17 avril, en Palestine et à travers le monde, les Palestiniens et les membres du mouvement de solidarité choisissent la Journée des Prisonniers Palestiniens pour faire le point sur la situation des prisonniers palestiniens et exiger leur libération. Depuis 1967, le gouvernement israélien a emprisonné plus de 800.000 Palestiniens. Actuellement, plus...
Conférence-débat organisée par l’AURDIP et l’EHESS-IISMM : « Être jeune aujourd’hui en Palestine » Mercredi 18 mai 2016 de 17h à 20h, EHESS-IISMM, salle Lombard, 96 boulevard Raspail, 75006 Paris En collaboration avec le séminaire Palestine de l’Institut d’études de l’Islam et des Sociétés du Monde Musulman (IISMM) l’Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en...
Isra Saleh el-Namey – The Electronic Intifada – 13 avril 2016 Février 2013, un ouvrier palestinien prépare des œillets pour l’exportation, dans une ferme à Rafah, au sud de la bande de Gaza. (Eyad Al Baba APA/Images) L’exploitation des fleurs d’Ayman Awkal se réduit chaque année. Cet horticulteur âgé de 56 ans cultivait...
Michal Shaeffer Omer-Man – +972 – 12 avril 2016 Seules, 16 % des maisons familiales détruites ou gravement endommagées ont été rendues habitables, constate une nouvelle enquête des Nations-Unies. Des enfants de la famille d’Abu Darouj dans les ruines de leur maison détruite, à Zawaydeh, dans la bande de Gaza, le 17 mars 2015. Cinq...
Un chômeur de 28 ans, Ridha Yahyaoui, s’est suicidé devant le bâtiment du gouvernorat de Kasserine le 16 janvier dernier. Depuis cet événement qui rappelle immanquablement l’immolation de Mohamed Bouazizi à Sidi Bouzid, prélude à la révolution de 2011, la contestation menée par des jeunes sans emploi est montée du sud jusqu’à la capitale. Ils attendent depuis deux mois des réponses du gouvernement à leurs revendications, mais celui-ci semble n’en avoir aucune et s’en tient à la rhétorique éculée de « l’atteinte à la sûreté de l’État ».
« Nous sommes le 9 avril 2016, il est une heure du matin, la pluie tombe, voici comment vivent ceux qui demandent du travail et de la dignité à Tunis », commente Wajdi Khadhraoui tandis qu’il filme avec son téléphone portable les jeunes repliés sur les marches du ministère du travail. Comme chaque jour, il raconte à travers sa caméra les conditions de vie des participants du sit-in des chômeurs, contraints de dormir à même le sol en affrontant le froid, la pluie et les regards des passants. Leur quotidien : l’attente. L’attente allégée par des discussions nocturnes sans fin, de la dérision et des fous-rires, des poèmes, une vraie solidarité et beaucoup de cigarettes. Comme tous les jours depuis deux mois, Khadhraoui enverra sa vidéo sur les réseaux sociaux afin d’en informer Kasserine, la Tunisie et le monde, devant l’absence quasi totale de relais médiatique national de leur revendication sociale.
Cette revendication pour le droit au travail est pourtant l’une des plus fortes jamais connues en Tunisie. Elle est née à Kasserine, dans le centre-ouest, le 16 janvier dernier à la suite du suicide d’un habitant. Ridha Yahyaoui, 28 ans, s’est jeté du haut d’un poteau électrique en apprenant que son nom avait été radié sans raison valable de la liste de recrutement de la fonction publique. Corruption, clientélisme : ces pratiques indignes d’un pays en transition démocratique blessent encore plus dans ces régions qui ont initié les premiers pas de la révolution et qui possèdent un fort sens de la justice. Après ce suicide protestataire, des affrontements avec les forces de l’ordre ont embrasé le pays, gouvernorat par gouvernorat1, avec le même effet boule de neige que l’hiver 2010 menant à la révolution le 14 janvier 2011. Depuis le 22 janvier dernier, une forte répression et l’instauration d’un couvre-feu sur tout le pays ont endigué les manifestations et contraint les contestataires à adopter de nouvelles formes de protestations.
« Le prix Nobel pour quoi faire ? »
Nous sommes pourtant bien dans le pays qui a été célébré dans le monde entier lors de l’attribution du prix Nobel de la paix en octobre 2015. Il a été décerné à quatre organisations de la société civile pour leur rôle dans le « dialogue national », présenté comme une des clés centrales du modèle de réussite de la transition démocratique tunisienne. L’idée d’une success-story de la Tunisie se base sur la vision internationale d’une « Révolution du jasmin » et d’une mentalité du compromis2 qui caractériserait les échanges politiques dans le pays. Si les participants à l’actuel mouvement social préfèrent parler de « révolution de la mort » (thawra al mawt) ou « révolution du sang » (thawra addem), l’inclination au compromis porte en lui des effets pervers, comme celui de neutraliser tout jeu politique et de taire les sujets brûlants comme la justice transitionnelle ou la réforme législative. La logique du compromis dénature le champ politique naissant et, renforcé par la chasse au terrorisme, peut potentiellement laisser libre cours au retour de pratiques autoritaristes tout comme mettre en péril l’avenir démocratique du pays.
Réclamer ses droits
Pour les jeunes contestataires, la révolution a été confisquée et détournée de ses objectifs premiers — dont le principal était le droit au travail. Elle a été dérobée par l’élite des côtes enracinée au pouvoir depuis l’indépendance. Preuve en est, la rhétorique de l’ancien régime s’est remise en place insidieusement. Pour elle, réclamer ses droits est une attaque contre l’État, une attitude ennemie contre le bien général et l’intérêt du pays. L’« atteinte à la sûreté de l’État » était en effet invoquée sous les règnes de Habib Bourguiba et de Zine El-Abidine Ben Ali pour réprimer légalement tout mouvement d’opposition politique.
Malgré le retour de l’appréhension des luttes sociales en tant que dissidence et atteinte à l’intérêt du pays, dès janvier dernier, des sit-in permanents sont mis en place dans plusieurs gouvernorats, principalement Kasserine, Gafsa et Sidi Bouzid. Mobilisés contre la pauvreté, la marginalité, la répression et pour le droit au travail, entre cent et deux cents jeunes chômeurs organisent un sit-in, par exemple au siège de la wilaya de Kasserine. Treize d’entre eux suivront également pendant plusieurs semaines une grève de la faim ponctuée de tentatives de suicide régulières.
Face à l’absence totale de prise en considération de l’État, des groupes de plusieurs gouvernorats (Kasserine, Gafsa, Kairouan, Jendouba, etc.) ont décidé, début février 2016, de venir directement faire valoir leur droit au travail devant les institutions étatiques à Tunis. Des groupes ont rejoint symboliquement la capitale à pied. D’autres ont été stoppés aux portes de la ville et contraints de s’installer dans un jardin public (El Mourouj). Le groupe d’une trentaine de protestataires venus de Kasserine, après un rendez-vous raté avec le ministre du travail, s’assied devant son ministère. Leurs revendications sont essentiellement l’obtention immédiate d’un emploi pour au moins un membre de chaque famille, la discrimination positive pour les régions et les villes marginalisées, la mise en place des projets de développement promis par l’État, la construction des infrastructures routières afin d’atteindre les régions, la lutte contre la corruption de l’administration et la transparence des procédures de recrutement dans les services publics.
« Un citoyen qui cherche sa citoyenneté »
Ces citoyens luttent contre la relégation régionale, Kasserine faisant l’effet d’être située dans une autre Tunisie. Infrastructures routières et publiques à leur strict minimum comme ces « maisons de la culture sans culture », pauvreté et pollution3 criantes participent de la relégation ancestrale de ce gouvernorat. Victimes d’un régionalisme atavique qui privilégie les régions côtières soutenues par un racisme de classes, les citoyens dénoncent le mépris de l’État et des habitants du nord qui perçoivent cette partie du pays comme rebelle, sauvage et dissidente. Pour Abdellah M., un des protestataires, les régions du nord, dont la capitale, perçoivent les gens du centre et du sud comme des sous-développés (raja’i). Ils méprisent et occultent tout symbole de la révolution, de Mohamed Bouazizi aux martyrs.
Depuis deux ans, le stigmate du terrorisme vient accentuer cette considération négative. Kasserine se situe au pied du mont Chaambi, nouvellement médiatisé pour les assassinats liés à des actes terroristes. Dans cette région hors-sol, l’État est considéré comme voleur des richesses locales, et ce depuis l’indépendance. Ce qui amène certains habitants à déclarer vouloir renier leur citoyenneté réduite, selon eux, à de simples papiers d’identité : « je suis un citoyen qui cherche sa citoyenneté », déplore Khadhraoui. Certains partiront à pied aux frontières algérienne ou libyenne afin de demander symboliquement le statut de réfugié politique. Les protestataires du sit-in du ministère font les frais de cette extranéité depuis leur poste de Tunis. Des passants leur jettent des « Laissez-nous notre Tunisie » (sayibouna tounisna) ou encore « Retournez dans votre pays » (bara arj’ou bledkoum).
« Notre point de vue doit être pris au sérieux. L’État doit être plus responsable. Pendant les élections, l’emploi était brandi comme un slogan politique puis évoquer ce sujet est apparu comme un crime », affirme Abdellah M.. Au chômage depuis la fin de ses études de mathématiques il y a huit ans, il « se débrouille » en vendant des fruits et des légumes afin de subvenir aux besoins de sa famille. Dans la région de Kasserine, beaucoup de jeunes sont contraints d’arrêter leurs études dans ces conditions. C’est aussi un sacrifice que font ceux qui siègent sur le trottoir du ministère du travail à Tunis depuis deux mois : ils disent lutter pour la nouvelle génération et plus pour eux.
Un mouvement social hétéroclite
Ce mouvement social défie toute catégorie en vigueur. Abdellah M. se veut également indépendant de l’Union des diplômés chômeurs (UDC) fondée en 2008. Il refuse aussi toute récupération politique, jusqu’à décliner l’offre d’une tente qui arborait un sigle de parti. Toute hiérarchie interne au mouvement est aussi évincée : pas de porte-parole ou de leader, et pas de distinction entre les chômeurs diplômés et ceux qui ne le sont pas. « On est un seul homme et c’est pour cela qu’on va gagner », assure Wajdi Khadhraoui.
En ce qui concerne le militantisme ou les sensibilités politiques, le groupe est hétéroclite : un premier engagement pour certains, de longs parcours militants pour d’autres. Islamistes, syndicalistes, gauchistes… se fondent dans une lutte commune : celle de l’emploi et du développement social et économique des régions défavorisées. Abdellah M. se définit comme un militant des causes sociales et politiques, toutes appartenances politiques confondues. Arrêté en mai 2010, c’est un ancien militant à l’UDC, et auparavant à l’Union générale des étudiants tunisiens (UGET), durant ses études. Il a participé aux sit-in de la casbah dans les jours suivant la révolution, il a assisté aux funérailles de Chokri Belaïd et de Mohamed Brahmi, assassinés pour leur engagement politique, et il rejoint chaque année Tunis le 14 janvier pour la célébration de la révolution. Sa seule appartenance revendiquée : celle au club de football le Club africain, l’« équipe du peuple » selon lui, contrairement à la deuxième grande équipe nationale L’Espérance tenue par des hommes d’affaires et de pouvoir issus des régions développées. Au-delà de toute affiliation politique, seuls des mots d’ordre fédèrent le mouvement social : le travail, la dignité et la citoyenneté (shoughl, hourriya, karama watanya).
De leur côté, les ONG de la « société civile » tant vantées par les observateurs internationaux sont peu loquaces, si ce n’est l’appel du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FSDES) et ses communiqués de presse réguliers. Les médias, eux, sont peu intéressés ou lassés4. Face à cette absence criante, ce sont les partcipants qui organisent la logistique au quotidien et communiquent sur leur cause, avec des photos, des vidéos et des communiqués publiés chaque jour sur les réseaux sociaux.
Le silence de l’État
Mais le principal absent reste l’État. Jusque-là, il n’a donné aucune réponse concrète — si ce n’est des promesses — des propositions reçues comme insultantes comme celle du recrutement de jeunes des régions défavorisées dans l’armée ou la mise en place d’un « dialogue national pour l’emploi » en mars dernier, auquel répondra ironiquement Wajdi Khadhraoui : « comment un gouvernement qui a raté le dialogue au niveau régional pourrait-il réussir un dialogue national pour l’emploi ? » Le gouvernement joue sur le sentiment d’usure de ces jeunes qui résistent aux conditions climatiques, à l’épuisement et à l’indifférence de l’État. Comment un État démocratique peut-il abandonner ainsi ses citoyens, ses « enfants », comme aime à répéter le président ? Qu’attend-il de dizaines de jeunes livrés à eux-mêmes depuis deux mois, à qui il n’a pas daigné adresser la parole, eux qui ne demandent que le dialogue et la considération et qui, en réclamant leurs droits, clament fondamentalement leur citoyenneté ?
Après Manuel Valls en octobre dernier, c’est donc François Hollande qui a « rendu visite » au dictateur mégalomane égyptien Abdel-Fattah al-Sissi.
Une visite qui, à en croire la presse, aurait été marquée par « l’omniprésence de la question des droits de l’homme ». On ne sait si l’on doit rire ou pleurer devant de telles absurdités. Car ce qui ressort de la visite de Hollande, qui était accompagné d’une trentaine de chefs d’entreprise français (sans doute pour parler des droits de l’homme), c’est avant tout la signature de nouveaux contrats avec le régime dictatorial de Sissi.
Après les 24 Rafale et les deux frégates vendues à l’Égypte l’année dernière, ce sont donc de nouveaux marchés juteux qui ont été obtenus par Hollande, qui a lui-même expliqué que « ce qui est en jeu, ce sont les échanges, la croissance, le commerce, l’investissement, mais aussi la stabilité, la sécurité, le développement ». Voilà qui ne peut que ravir le régime de Sissi, qui n’en demandait pas tant, alors que depuis le sanglant coup d’État de juillet 2013, les rapports d’associations et d’ONG égyptiennes et internationales n’ont eu de cesse de dénoncer les pratiques autoritaires du maréchal devenu président.
Nicolas Krameyer d’Amnesty international a rappelé à l’occasion de la visite de Hollande que « la répression en Égypte n’a jamais atteint les sommets actuels au cours des soixante dernières années [et qu’]elle peut être comparée à celle des anciennes dictatures militaires latino-américaines ».
Depuis un an, on estime que ce sont environ une centaine de personnes qui « disparaissent » chaque mois, tandis que des dizaines de milliers d’opposants (réels ou supposés) ont été arrêtés depuis juillet 2013 et que la « justice » égyptienne, pour la seule année 2015, a prononcé 538 condamnations à mort lors de parodies de procès.
Alors que la réprobation internationale contre le régime Sissi s’étend (l’Italie vient même de rappeler son ambassadeur au Caire), la France renforce son « partenariat économique et stratégique » avec le bourreau du peuple égyptien. Une ligne supplémentaire au lamentable CV de Hollande et de son gouvernement qui, non contents de mener une politique antisociale et répressive en France, se font les complices des assassins des soulèvements démocratiques de 2011 pour les seuls intérêts du capitalisme français.