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Syndicats - Page 7

  • Menaces de licenciement collectif à la société Honda-Seat à Rabat (Afriques en lutte)

    L’Odt dénonce toute attaque à la liberté syndicale et appel à une solidarité nationale et internationale

    Après le licenciement arbitraire du secrétaire général du bureau syndical de la Société Honda–Seat à Rabat M. Naime Abdelmadjid. La direction de la société affiche des menaces de licenciement à l’encontre de tous les membres du bureau syndical affilié à l’Organisation démocratique du travail Odt/Maroc. Elle a décidé d’engager des procédures de licenciement collectif en convoquant deux autres membres à l’inspection du travail à Rabat.

    Les deux militants, MM. Fenan Youssef, SG adjoint et Abdelghafour Bia, rapporteur ont été reçus, hier jeudi 2 juillet 2015 par l’inspecteur du travail en présence du patron de la société et de Mr Ennahili Med, membre du bureau exécutif de l’Odt pour un entretien préalable à un éventuel licenciement.

    Le rapport d’écoute porte sur des accusations infondées et fabriquées de toutes pièces par la direction de la société Honda contre les deux militants qui ont contesté toutes ses allégations. Ils sont actuellement en mise à pied conservatoire, prémices d’un licenciement pour faute grave(…). Tous les membres du bureau et adhérents sont actuellement en sit- in dans les locaux de la société et sont prêts à soutenir leurs camarades par tous les moyens nécessaires.

    La direction de la Société Honda-Seat à Rabat affiche une animosité contre l’Odt et refuse toute discussion ou dialogue. Aujourd’hui à cause de comportements illégales, abusifs et arbitraires de la direction de la société, les jeunes syndicalistes payent pour leur engagement syndical auprès de l’Odt et pour leur revendication des droits légitimes. La direction de la société cherche de cacher une réalité amère dans la société Rabat.

    Les salariés travaillent dans conditions qui sont extrêmement pénibles, avec des salaires dérisoires ne dépassant pas 2000 à 2500 dh par mois moins de 250 euro. Ils sont obligés d’acheter leurs propres matériels et outil du travail. Cultive la précarité ce qui dévalorise l’image qualité des produits et des services de la société Honda–Seat.

    L’Odt appel à une mobilisation de tous ses membres à la région de Rabat-Salé-Gharb pour protester contre la menace de licenciement qui pèse sur tous les membres du bureau syndical de l’Odt à la société Honda-Seat à Rabat. Pour un nouveau sit-in de solidarité et être nombreux à la porte de la société

    L’Odt appelle à la solidarité pour protester contre la répression syndicale féroce organisée par la direction de la société Honda–Seat à Rabat Maroc contre les membres du bureau syndical dans cette entreprise.

    L’Odt appel les centrales syndicales au niveau international à une mobilisation de solidarité et l’envoi de lettres de protestation au Ministre de l’Emploi marocain.

    Monsieur le Ministre de l’Emploi du Maroc

    Rue Al Jommayz Hay Riad Rabat Maroc

    Tél. +212 537760521/25

    email : communication@emploi.gov.ma

    Source : Labourstart 22 juillet 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/maroc/article/menaces-de-licenciement-collectif

  • Tunisie: Gratuité des soins dans tous les hôpitaux pendant une semaine (Afriques en lutte)

    Le bureau exécutif de la fédération générale de la santé relevant de l’UGTT a indiqué, vendredi 19 juin 2015, que tous les patients bénéficieront de la gratuité des consultations et des soins, tout le long de la grève administrative décrétée par les agents de la santé du 22 au 27 juin courant.

    Le bureau exécutif a ajouté, lors d’un communiqué rendu public aujourd’hui, que tant que le ministère de la Santé n’aura pas satisfait les revendications des agents de la santé, cette action pourrait se prolonger.

    Par ailleurs, la fédération générale de la santé a expliqué cette action par l’indifférence totale des autorités concernées quant aux répercussions d’un tel acte.

    Sporce : Jawhara FM 23 juin 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/tunisie/article/tunisie-gratuite-des-soins-dans

  • Tunisie : Soutien à la lutte des instituteurs/trices et à leur syndicat UGTT (Essf)

    Une nouvelle fois, nous réaffirmons le soutien de l’Union syndicale Solidaires et de la fédération Sud Education à la lutte menée depuis des mois par le personnel de « l’Enseignement de base » en Tunisie.
    A cause des choix politiques du gouvernement tunisien, l’année scolaire 2014/2015 a été marquée par de nombreuses journées de grèves ; pour s’en tenir seulement au dernier trimestre : 15 avril, 12 et 13 mai, 26, 27 et 28 mai.

    Toutes ces grèves ont été très massivement suivies, marquant l’engagement massif des instituteurs et des institutrices dans l’action collective menée par le syndicat de l’UGTT.

    Au lieu d’accepter des négociations, le gouvernement a « joué la montre », multipliant les réunions et parfois les engagements non suivis d’effet. Pourtant, les revendications sont légitimes :


    * Abaissement de l’âge du départ volontaire à la retraite à 55 ans pour les enseignants et enseignantes ayant achevé 35 ans de service.
    * Octroi d’une promotion exceptionnelle aux instituteurs et institutrices, trois ans avant leur départ à la retraite.
    * Homologation des diplômes délivrés par les instituts supérieurs de formation des instituteurs et institutrices, avec le diplôme de fin d’études du premier cycle de l’enseignement supérieur, en l’occurrence la licence.
    * Création d’une indemnité de travail administratif et d’une indemnité de fin de service, conformément au statut des instituteurs déjà paru dans le journal officiel de la République tunisienne
    * Régularisation de la situation professionnelle des instituteurs et institutrices suppléant-es.
    * Doublement des montants de la prime d’affectation et de l’indemnité de la rentrée scolaire ainsi que la révision à la hausse du nombre des bourses universitaires accordées aux descendant-es des enseignant-es.
    * Ouverture d’un « dialogue national responsable et sérieux » sur la réforme du système éducatif afin d’améliorer le niveau des élèves et la crédibilité des diplômes nationaux.

    Face au blocage du ministère, le syndicat a du recourir à une « grève administrative » et donc à la non-organisation des examens de fin d’année ; mouvement, lui aussi, très suivi.
    Après cette nouvelle étape dans la lutte massive et résolue des instituteurs et institutrices, le gouvernement répond encore une fois par la répression : annonce du retrait de 5 jours de salaires, menaces de les priver de salaires en juillet et août si le travail ne reprend pas d’ici le 28 juin, et tentatives de détournement des lois et règlements en vigueur pour essayer d’annuler les effets du boycott !

    En solidarité, le Syndicat général de l’enseignement secondaire de l’UGTT a annoncé sa décision de boycotter toutes les étapes du concours d’accès aux collèges. Le syndicat a appelé les directeurs de collège et lycée, les professeurs de l’enseignement secondaire et de l’éducation physique et tout le corps administratif des délégations régionales et des directions centrales relevant des ministères de l’Education, de la Jeunesse et du Sport, à boycotter toutes les étapes du concours de la sixième. En effet, la mesure du ministère relative au déroulement des épreuves écrites de ce concours dans les collèges et les lycées vise à saper la décision de la commission administrative sectorielle de l’enseignement de base de boycott du concours de la sixième année. Le syndicat de l’enseignement secondaire a réitéré son refus absolu de cette mesure « non conforme aux textes régissant l’organisation des concours nationaux ».

    Nous faisons connaître en France mais aussi à travers le Réseau syndical international de solidarité et de luttes, le combat mené par le syndicat de l’Enseignement de base de l’UGTT et notamment les décisions prises lors de sa Commission administrative du dimanche 14 juin :


    * Poursuite de la grève administrative selon les dispositions annoncées le 29 mai 2015.
    * Suspension de la participation aux commissions de la réforme éducative.
    * Boycott de la rentrée scolaire 2015-2016 selon des dispositions qui seront communiquées ultérieurement.

    L’Union syndicale Solidaires et la fédération Sud Education apportent tout leur soutien à la lutte des instituteurs et institutrices de Tunisie, réaffirment la nécessité d’une solidarité syndicale internationaliste et restent à disposition des camarades du syndicat de l’Enseignement de base de l’UGTT pour toutes initiatives permettant de renforcer le rapport de forces face au gouvernement.

    Pour l’Union syndicale Solidaires et la fédération Sud Education :
    * Stéphane Enjalran, secrétariat national de l’Union syndicale Solidaires
    * Nara Cladera, commissions internationales de Sud Education et Solidaires.

    Union syndicale Solidaires 15 juin 2015
     
  • Algérie : Les cheminots reviennent à la charge (Afriques en lutte)

     

    Le trafic ferroviaire a été paralysé hier par les travailleurs du service exploitation trains de la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF) qui ont mis leurs menaces à exécution en entamant une grève illimitée.

    « Nous avons entamé une grève illimitée jusqu’à satisfaction de nos revendications », nous a affirmé au téléphone Abdelhak Boumansour, chef de la section syndicale des cheminots d’Alger. Ainsi trois mois après la grève nationale, en mars dernier, les travailleurs de la Société nationale du transport ferroviaire reviennent à la charge pour revendiquer à nouveau, selon toujours Abdelhak Boumansour, « la révision du tableau des filières qui définit l’évolution de carrière ».

    Il a fait état d’un litige entre la SNTF, la Caisse nationale des assurances sociales (CNAS) et la Caisse nationale de retraite (CNR). « Des salariés et des retraités se trouvent balancés d’une direction à une autre », a-t-il déploré.

    Pour rappel, la direction de la SNTF s’était engagée à réviser, en mars dernier, le tableau des filières en question, mais l’absence d’un partenaire social légal empêche pour l’instant la signature d’un accord.

    La section syndicale de la Fédération des cheminots (UGTA) étant gelée depuis janvier 2015, ce secteur névralgique reste visiblement otage de conflits syndicaux. C’est aussi l’une des raisons qui ont poussé au débrayage, puisque Abdelhak Boumansour dénonce « une réunion tenue le 10 juin entre le ministre des Transports, le DG de la SNTF et des syndicalistes non représentatifs ».

    Cette grève intervient après un premier débrayage de trois jours observé par les travailleurs le 23 mai dernier. Le service exploitation trains compte dans ses rangs quelque 1200 employés à travers le territoire national. Selon le syndicaliste, les travailleurs sont décidés à faire valoir leurs droits par tous les moyens.

    Selon lui, les travailleurs sont exaspérés par le « mépris de la direction de l’entreprise », précisant que la revendication principale des travailleurs relative à la promotion à l’échelon supérieur est attendue par certains travailleurs depuis 20 ans.

    « Nous faisons face à la provocation de la direction depuis longtemps, mais celle de mercredi et jeudi derniers étaient de trop », explique le syndicaliste.

    « A chaque réunion avec la direction, le directeur général nous promet de régler notre problème, mais rien de concret n’a été fait jusque-là », précise-t-il.

    Source : Le Temps d’Algérie  17 juin 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/algerie/article/algerie-les-cheminots-reviennent-a

  • Jeudi 11 Juin 2015 : « Le sionisme en questions » Pierre Stambul

    palestine1900-2000

    Le 11 juin 2015 à 20:00

    Amphi 2 

    29 Boulevard Gergovia, U.F.R. Lettres, Langues et Sciences Humaines,

    Clermont-Ferrand, France

    La guerre qu’Israël mène contre le peuple palestinien avec son cortège de nettoyages ethniques et de crimes de guerre n’a commencé ni en 1967, ni même en 1948. Elle remonte au début du XXe siècle quand les sionistes ont commencé leur conquête coloniale. Les « solutions » comme les accords d’Oslo qui ont voulu éviter d’aborder les questions vives (occupation, colonisation, apartheid, racisme …) ont définitivement échoué. Il est clair aujourd’hui qu’il s’agissait alors d’une grande illusion.

    La question du sionisme est centrale comme l’était celle de l’apartheid quand il a fallu imaginer un autre avenir pour l’Afrique du Sud.

    Le sionisme est à la fois une fausse réponse à l’antisémitisme, un nationalisme, un colonialisme et une manipulation de l’histoire, de la mémoire et des identités juives. Il est aussi une idéologie prétendant transformer les anciens parias de l’Europe jugés inassimilables en colons européens en Asie. Parce qu’il a gommé les différences idéologiques, le sionisme a abouti au gouvernement de type OAS qui gouverne aujourd’hui Israël.

    Cette idéologie n’est pas seulement criminelle pour les Palestiniens, elle n’offre aucune issue pour les Juifs qu’elle met sciemment en danger et qu’elle voudrait pousser à être traitres ou complices.

    Sans dépassement ou rupture avec le sionisme, aucune paix juste n’est envisageable.

    Pierre Stambul est membre de l’Union Juive Française pour la Paix dans laquelle il exerce ou a exercé de nombreuses responsabilités. Il est l’auteur de « Israël/Palestine, du refus d’être complice à l’engagement » (ed. Acratie, 2012).

    https://amistempsdescerises.wordpress.com/2015/04/03/jeudi-11-juin-2015-le-sionisme-en-questions-pierre-stambul/

  • Orange doit vite rompre son contrat avec Partner communication ! (Sud Ptt)

     

     

    Communiqué de la fédération SUD PTT

    Stéphane Richard, le PDG d’Orange a annoncé hier son intention de revoir les liens de sa compagnie avec l’opérateur israélien Partner.  La fédération Sud dénonce depuis plusieurs années les atteintes aux droits humains commises par Partner. Elle a interpellé à plusieurs reprises la direction du groupe à ce sujet pour lui demander de rompre son contrat avec Partner.

    Nous constatons avec satisfaction que pour la première fois, la direction d’Orange exprime une volonté de mettre fin à ce partenariat. Maintenant, il est temps de passer aux actes. La marque et l’image d’Orange ne peuvent plus rester associées à une société qui officie en dehors des règles du droit international.

    La fédération SUD suivra attentivement les suites que réservera Orange à cette affaire. Jusqu’à sa fin, on ne lâchera rien.

    jeudi 4 juin 2015, par Philippe Crottet

    http://iphonespip.sudptt.org/spip.php?article3

  • Femmes au travail : «Nous sommes loin de l’égalité promise par la Constitution» (El Watan)

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    La législation algérienne est en train d’accompagner l’évolution du travail féminin, «mais nous sommes encore loin de l’égalité promise par la Constitution», constate Soumeya Salhi, syndicaliste et militante.

    Les syndicats doivent se réapproprier le terrain de la lutte pour l’égalité homme-femme en milieu professionnel», plaide Soumeya Salhi, syndicaliste et militante, lors de son intervention à une rencontre animée hier à Alger sur le travail des femmes. Cette rencontre a été organisée par le Syndicat national autonome des professeurs de l’enseignement secondaire et technique (Snapest), à l’occasion du 70e anniversaire de la création de la Fédération mondiale des syndicats.

    La précarisation des emplois à travers la généralisation de la contractualisation et autres formes d’emploi temporaire constitue la plus grande menace pour les droits des travailleurs de manière générale et la précarisation chez les femmes, qui sont les plus vulnérables, estime Mme Salhi, qui rappelle que plus de 70% des travailleurs ne sont pas déclarés à la Sécurité sociale. «L’informel représente un pan important des emplois non déclarés à la sécurité sociale.

    Ces effectifs féminins ne peuvent prétendre à des congés de maternité ni à des remboursements de médicaments et représentent une menace pour le financement de notre système de sécurité sociale», soutient la syndicaliste, qui prévient contre «les manœuvres misogynes qui activent sous de nouveaux drapeaux, profitant de l’espace inoccupé par les femmes travailleuses». Pourtant, souligne Mme Salhi, une enquête de l’Office national des statistiques en 2014 affirme la présence acquise des femmes en milieu professionnel. Les chiffres indiquent même une surqualification des diplômées par rapport aux postes occupés.

    La moitié des femmes travailleuses sont titulaires de diplômes universitaires, explique la conférencière, qui rappelle que 38% des magistrats sont des femmes.

    Cependant, regrette l’intervenante, la précarité de l’emploi à travers les différentes formes de travail contractuel font que 84% des femmes occupant des postes de préemploi sont des universitaires. La précarité ouvre donc la brèche à toutes les formes de chantage et de harcèlement.

    La législation algérienne est en train d’accompagner l’évolution du travail féminin, «mais nous sommes encore loin de l’égalité promise par la Constitution», constate la conférencière, qui rappelle, à titre d’exemple, l’abrogation de l’article du code de la famille relatif à la déchéance de la femme travailleuse du droit de garde de ses enfants en cas de divorce. Le code pénal s’est vu renforcé par plusieurs articles incriminant le harcèlement sexuel en milieu professionnel et luttant contre les violences faites aux femmes.

    «C’est le fruit d’un long combat mené par des militantes qui n’ont pas été découragées par la folie meurtrière des années 1990», rappelle Mme Salhi, qui appelle les travailleuses à se mobiliser pour protéger leurs acquis et arracher d’autres droits. «Nous sommes actuellement en train de nous battre pour l’égalité d’accès aux postes de responsabilité.»

    Soumeya Salhi évoque également la charte de la femme travailleuse – projet du ministère de la Solidarité – qui proposera que le congé de maternité soit de 18 semaines au lieu de 14 et instaurera un congé parental et des mécanismes d’amélioration des conditions de travail permettant aux femmes de maintenir leur productivité professionnelle sans avoir à sacrifier leurs enfants.

    La conférencière regrette que les travailleuses soient toujours si peu motivées pour intégrer les organisations syndicales et se faire entendre. «Les femmes sont des milliers à militer à la base, mais sont de plus en plus discrètes dans la hiérarchie. Elles ne sont qu’une dizaine dans la représentation nationale», regrette la syndicaliste.

    Fatima Arab le 04.06.15 | 10h00 

    http://www.elwatan.com/actualite/femmes-au-travail-nous-sommes-loin-de-l-egalite-promise-par-la-constitution-04-06-2015-296488_109.php

  • Notes sur le livre d’Hèla Yousfi « L’UGTT une passion tunisienne » (Essf)

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    Cet ouvrage a été publié en mars 2015 en Tunisie, avec le sous-titre « Enquête sur les syndicalistes en révolution 2011-2014 ».

    Une des principales différences entre la Tunisie et les autres pays de la région arabe tient à l’existence de l’UGTT.

    Mieux connaître cette organisation est d’autant plus nécessaire que l’UGTT fait souvent l’objet de jugements et affirmations péremptoires. D’où le parti pris de l’auteure : « Pour sortir de l’incantation, il nous faut délaisser quelque peu le monde des spéculations et redescendre sur terre en choisissant à cet effet un objet d’observation : l’UGTT elle-même » (p 12).

    Pour tenter d’y parvenir Hèla Yousfi s’est appuyée non seulement sur des sources écrites, mais avant tout sur plusieurs dizaines de témoignages de militant-e-s. Ceux-ci sont en général membres de l’UGTT et appartiennent à différents secteurs et régions de cette organisation. Son livre permet une déconstruction des discours ne prenant en compte que certaines des multiples facettes de l’UGTT. Il débouche sur la vision d’une organisation multidimensionnelle, à la recherche permanente d’un équilibre instable entre ses aspects contradictoires.

    Chercher à rendre compte en quelques pages d’un ouvrage en comportant 250 pages, nécessite de faire des choix laissant nécessairement dans l’ombre certains aspects. A chacun-e de compléter en lisant directement l’ouvrage.


    La présentation qui en est faite ci-dessous est constituée de deux grandes parties que chacun-e pourra lire dans l’ordre qui le convient le mieux :

    * L’une est avant tout historique ;
    * L’autre cherche à présenter le caractère contradictoire de certaines des facettes de l’UGTT. Elle est surtout basée sur le début du livre et le dernier chapitre.

    A propos de l’histoire de l’UGTT

    L’UGTT avant l’Indépendance

    Depuis sa fondation en 1946, l’UGTT ne s’est pas contenté d’une seule fonction revendicative mais s’est toujours simultanément « nettement engagée dans l’action politique » pour l’Indépendance, où elle a joué un rôle de premier plan (p11).

    L’UGTT entre 1956 et 2011

    Pendant toute cette période ont existé au sein de l’UGTT :
    * d’une part « un courant de soumission au pouvoir pouvant aller jusqu’à la quasi-intégration dans l’appareil d’Etat »,
    * d’autre part « un courant de résistance au pouvoir » contrôlant certaines structures intermédiaires et « qui prend le dessus en temps de crise » (p 56).
    Cette dualité a rendu possible « aux différents mouvements sociaux, malgré la proximité que la bureaucratie syndicale a entretenu avec le parti unique, de régulièrement trouver un appui structurel et politique auprès de l’UGTT ».
    La permanence de cet équilibre instable explique en grande partie pourquoi les crises internes de l’UGTT n’ont pas débouché sur de réelles scissions.

    Du 17 décembre 2010 au 14 janvier 2011

    Ce chapitre est étayé par un grand nombre d’entretiens généralement réalisés en janvier et février 2011. Il ressort de ce ceux-ci les éléments suivants :
    * « le mouvement protestataire est à ses débuts complètement spontané et sans leadership » (p 62),
    * « l’UGTT a accueilli et protégé le mouvement » (pp 62-64),
    * les syndicalistes ont « encadré » le mouvement (pp 65-70).
    Le soulèvement du bassin minier en 2008 est vu comme une « répétition générale » de celui de 2010-2011 (pp 77-79).

    L’auteure se livre ensuite à une analyse fouillée des débats ayant traversé l’UGTT pendant cette période (pp 79-97). Si nombre de syndicalistes « se sont empressés de rejoindre le mouvement populaire, les bureaux régionaux et le Bureau exécutif ont adopté une attitude attentiste, voire hostile au soutien du soulèvement » en se démarquant clairement des slogans dénonçant le pouvoir. (p81)

    La « tendance radicale » de l’UGTT anticipe sur le fait que :
    * d’une part la « tendance réformiste » représentée par le Bureau exécutif « allait éviter la confrontation avec le pouvoir » et rechercher un compromis avec lui,
    * d’autre part que si il existe « la pression nécessaire » pour faire basculer les rapports de forces en faveur du peuple, « la centrale finira par se plier aux revendications populaires » (p90).
    Progressivement, une série de structures intermédiaires de l’UGTT s’émancipent de la direction centrale. Elles appellent notamment à la grève sans son accord préalable et sans respecter l’obligation légale d’un préavis de 10 jours (p86). Pour tenter de sauvegarder sa « capacité de dialogue avec le pouvoir », le Bureau exécutif n’a pas d’autre choix que de couvrir « toutes les décisions prises à une échelle locale et/ou régionale » (pp88-89).
    Après des dizaines d’années d’omnipotence de la direction centrale de l’UGTT, on assiste à la préfiguration de nouvelles relations entre celle-ci et les structures intermédiaires (p98).

    Du 14 janvier 2011 aux élections d’octobre 2011

    Le 17 janvier, la direction de l’UGTT désigne trois représentants au gouvernement. Celui-ci est présidé par l’ancien Premier ministre de Ben Ali (p 102), ce qui provoque la colère de la population et de la base de l’UGTT.
    Soucieuse de « préserver le consensus et de protéger l’unité de l’organisation » (p107), l’UGTT « fait volte-face » (p106) : elle fait démissionner ses trois ministres dès le lendemain, et soutient désormais les mobilisations (pp102, 106 et 108).
    Simultanément, l’UGTT joue un rôle clé dans la mise en place d’un « Conseil national de protection de la révolution (CNPR) » (pp102, 110-112). Le CNPR s’appuie sur des comités locaux dans tout le territoire tunisien dans lesquels certains militants voient le possible embryon d’un « parlement représentatif des forces révolutionnaires » (p116).
    Mais le CNPR ne se transforme pas en un pouvoir alternatif : contestant la légitimité démocratique du gouvernement, c’est néanmoins à ce dernier que le CNPR demande de lui reconnaître légalement un pouvoir décisionnel. Mais « le gouvernement s’oppose vivement à cette demande et ne veut concéder au CNPR qu’un rôle consultatif » (p111).

    Le 27 février, l’ancien Premier ministre de Ben Ali quitte enfin le pouvoir. Son remplaçant, Beji Caïd Essebsi, crée une « Haute instance » qui « a pour objectif de dépasser l’opposition entre le CNPR et le gouvernement » (p113) :
    * La Haute instance n’a qu’un pouvoir consultatif et propositionnel en matière de loi électorale et d’organisation des élections.
    * « Le gouvernement reste ainsi le seul pouvoir exécutif et décisionnel ».
    Aux côtés de l’UGTT, sont représentées dans la « Haute instance » les principales organisations politiques et associatives du pays (p103). Ne revendiquant pas le pouvoir pour elle-même, l’UGTT joue néanmoins « un rôle politique de premier plan » (p103) consistant à « construire des consensus entre les différentes forces politiques et sociales » (p 105).
    Dans les témoignages recueillis, le rôle de l’UGTT était auparavant souvent présenté comme celui d’un « pouvoir » ou d’un « contre-pouvoir » (p108). L’accent est désormais mis sur la notion « d’autonomie » ou de « distance égale de tous les partis politiques et surtout du pouvoir, (...) de force d’équilibre, de superviseur qui contrôle l’action du gouvernement » (pp 108-109).
    Pour certains militants, la perception de l’UGTT a évolué « d’un acteur clé de la révolution à celle d’un acteur central du maintien du régime politique et économique » (p116).

    Au final, la direction de l’UGTT a poursuivi simultanément ou successivement de multiples objectifs parfois contradictoires (pp118-119) :
    * assurer simultanément la démocratisation du pays et la continuité des institutions,
    * refuser un choc frontal avec le pouvoir en place dans le but de conserver son propre pouvoir de négociation avec celui-ci,
    * utiliser sa proximité avec les mouvements sociaux pour faire pression sur le gouvernement et les grands choix politiques,
    * ne pas jouer pour autant un rôle de parti politique mais favoriser la négociation et la construction de consensus entre les différentes forces politiques et sociales.

    Depuis son origine, le rôle syndical de l’UGTT a toujours été entremêlé avec son rôle politique (p141).
    Du temps de la dictature, l’UGTT était même « le seul espace où les opposants politiques pouvaient s’exprimer » (p142). C’est notamment pour cette raison que la plupart des militants estimaient que l’UGTT devait s’interdire « d’entrer dans la bataille politicienne, car il y a toutes les tendances politiques au sein de l’UGTT, et que cela pourrait être dangereux » (p143).
    La grande différence depuis 2011 est que désormais les partis politiques « n’ont en principe plus besoin de l’espace syndical pour exister » (p145).

    Les principaux enjeux du congrès national de décembre 2011

    L’héritage de la période passée comporte notamment :
    * la compromission du Bureau exécutif avec le régime de Ben Ali au sujet de laquelle le Secrétaire général sortant fera une autocritique lors du congrès (pp167-168),
    * la corruption et le clientélisme interne (pp153-155, 171-172),
    * une tradition de votes dans les congrès reposant non pas sur les programmes mais sur des alliances entre réseaux sectoriels ou régionaux et courants politiques (170-171).

    La volonté d’un grand nombre de militant-e-s de l’UGTT est de remettre en cause le caractère hiérarchisé et centralisé de la centrale syndicale, se traduisant par le pouvoir hégémonique du Secrétaire général et du Bureau exécutif. C’est notamment sur ce dernier que repose le droit de signer le préavis de 10 jours rendant légale une grève, ainsi que la nomination des permanents syndicaux (pp 151-152). Cette préoccupation prend appui sur « l’épisode révolutionnaire qui a poussé certaines Unions régionales et Fédérations à prendre leurs décisions de manière autonome sans attendre l’approbation du BE » (p155).

    En sens inverse, deux mois après la victoire électorale d’Ennahdha, « le contexte de crise politique et les différentes campagnes qui ont pris l’UGTT pour cible ont renforcé les réactions les plus défensives afin de préserver l’organisation au dépens des impératifs de restructuration interne et/ou les défis socio-économiques » (p184).

    A l’intersection de ces deux préoccupations, il avait été décidé dans la foulée dans la foulée du 14 janvier que le non-renouvellement du mandat des membres du BE qui s’étaient compromis avec le pouvoir de Ben Ali s’opèrerait en douceur. Il suffisait pour cela de ne pas remettre en cause les dispositions statutaires interdisant plus de deux mandats successifs au BE (article 10), contrairement à ce que cherchait à faire le BE sortant juste un an auparavant (pp 131-138, 155, 172-173, 179). (1)

    En final, un peu moins d’un an après le 14 janvier 2011, "deux préoccupations majeures animent la plupart des congressistes interviewés :

    * Quel rôle l’UGTT doit-elle jouer dans la transition politique et quelle place doit-elle occuper dans le nouveau champ politique et syndical post-électoral ?
    * Sera-t-elle capable de faire évoluer ses structures, ses formes historiques de lutte pour s’adapter aux nouvelles réalités économiques et soutenir la processus démocratique dans le pays ?"
    (p152).

    Un des enjeux politiques est le refus que l’UGTT soit « instrumentalisée » par les partis politiques. « Même si notre mission est autant politique que sociale, on doit rester à égale distance de tous les partis politiques » expliquent nombre de syndicalistes (pp159-162 et 169). Parmi les défis organisationnels à relever figurent l’implantation dans le secteur privé (p156), la participation des femmes dans les instances de décision (p157-158) et la faible syndicalisation des jeunes (p158).

    Les principales décisions du congrès de décembre 2011

    Le congrès a été polarisé par l’élection du Bureau exécutif (pp 175-178).
    La principale différence avec le passé a été que la volonté politique de maintenir l’unité de la centrale a été « omniprésente » dans la constitution des listes en compétition. Elle l’a emporté sur « les considérations régionalistes et clientélistes qui avaient souvent pris le pas sur les autres enjeux » dans les congrès précédents (p178).
    Aucun membre du nouveau BE ne représente un courant politique en tant que tel. (2)

    Dans la continuité avec le passé figurent :
    * le poids prépondérant du BE sortant sur le déroulement du congrès (p181),
    * l’élection de la liste reposant sur le consensus entre le plus grand nombre de régions, de secteurs et de sensibilités politiques,
    * la présence dans cette liste de trois des quatre membres du BE sortant ayant le droit de se représenter,
    * la consécration du « pouvoir des grands secteurs de la fonction publique au sein de l’UGTT, et notamment l’Enseignement et la Santé » (p179),
    * le fait qu’aucune femme n’ait élue élue au BE (pp157-158, 178, 180).


    L’UGTT face au pouvoir islamiste (2012-2013)

    Ennahdha, qui commence à diriger le gouvernement au moment même où se tient le congrès de l’UGTT, se lance dès la mi-février 2012 dans une attaque frontale contre la centrale syndicale. Cherchant à « coopter les différents réseaux de l’ancien régime au niveau de l’appareil étatique » (p216), Ennahdha se retrouve par ailleurs en concurrence directe sur ce terrain avec Nidaa Tounes que Beji Caïd Essebsi met en place au premier semestre 2012 dans le but de revenir au pouvoir lors des élections suivantes.
    Face à cette « bipolarisation de la vie politique et les polémiques visant l’UGTT, sa direction n’a pas voulu participer à la mise en place d’une alternative politique aux deux pôles dominants. En revanche, elle a lancé le 18 juin 2012 une ’’initiative politique’’ visant à recréer un consensus entre les forces politiques, le gouvernement et la société civile pour s’entendre sur les grandes questions suscitant des divergences » (p217).
    Le rôle de « médiateur politique » (p218) que cherche à jouer la direction de l’UGTT contribue à « reléguer la question sociale au second plan » (p204).

    Au deuxième semestre 2012, la tentative de l’UGTT de trouver une solution consensuelle échoue, et l’offensive des hommes de main islamistes continue de plus belle avec notamment :

    * l’attaque du siège national de l’UGTT le 4 décembre 2012 (p188),
    * l’assassinat d’un premier dirigeant du Front populaire le 6 février 2013, puis d’un second le 25 juillet qui plonge la Tunisie « dans une crise politique grave ouvrant la voie à une nouvelle période de contestation de la légitimité des institutions » (p219).

    Dans ce cadre, « l’UGTT multiplie les rencontres pour chercher une issue à la crise.

    Elle ne se présente plus exclusivement comme une plateforme de dialogue mais comme une force de proposition ». En compagnie de la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’Homme, l’Ordre national des avocats et le syndicat patronal (UTICA), l’UGTT lance le 25 octobre un cadre de dialogue national auquel participent 21 des partis représentés à l’Assemblée. Un consensus se dégage entre les participants au dialogue pour le remplacement du gouvernement en place par un gouvernement provisoire ne dépendant pas des différents partis. Chargé de gérer les affaires courantes, celui-ci doit avant tout faire voter par l’Assemblée la nouvelle Constitution, puis organiser des élections législatives et présidentielles (pp 220-231).


    * En acceptant de démissionner du gouvernement, Ennahdha a évité d’en être éjecté durablement comme en Egypte.
    * Nidaa Tounès de son côté estime avoir toutes les chances de parvenir au pouvoir après les élections prévues en 2014.
    * L’UGTT a « renforcé sa place d’acteur incontournable du champ politique tunisien » (p231).

    Mais « le fait que le dialogue national ait concentré le débat exclusivement sur les enjeux politiques » entraine un clivage « qui traverse toutes les structures de l’UGTT autour de la place à accorder aux questions sociales ». La distance se creuse d’après l’auteure entre :
    * « les partisans d’une action limitée, négociée à petits pas, faisant reculer progressivement le pouvoir politique sans pour autant le renverser »,
    * « ceux qui, parce que la crise économique s’approfondit, parce qu’ils ont confiance dans le mouvement social, parce qu’ils croient de moins en moins qu’on peut négocier avec le pouvoir en place, veulent une attitude plus ferme qui peut mener à des actes de rupture » (p232).

     Le caractère contradictoire de chacune des facettes de l’UGTT

    Pour des raisons qui sont explicitées dans en note (3), je me suis autorisé à ajouter entre parenthèses le terme « revendicatif » à celui de « syndical » dans deux des extraits présentés dans le sous-paragraphe qui suit.

    Rôle revendicatif et rôle politique

    « L’UGTT ne mobilise pas les syndicalistes seulement pour la défense de leurs intérêts professionnels. Elle a toujours été et continue à être le lieu d’une action politique beaucoup plus large qui vise à articuler revendications socio-économiques, et libertés politiques individuelles et collectives » (p 233).

    Cette double fonction remonte à l’époque coloniale où l’UGTT était « nettement engagée dans l’action politique » pour l’Indépendance (p11).
    Après celle-ci, l’UGTT a été de plus pendant plus d’un demi-siècle « le seul espace d’action collective organisée en Tunisie qui a réussi tant bien que mal à résister aux tentatives du régime autoritaire de réduire à néant toute résistance dans le pays ». (p 16)
    Pour ces raisons, « l’UGTT est à la fois, et de manière indissociable, un mouvement syndical (revendicatif) et une organisation qui prétend à une mission politique et nationale » (pp 233-234).
    « Par moments ce sont les considérations politiques nationales qui s’expriment, et à d’autres moments, c’est l’aspect syndical (revendicatif) qui est mis en avant » (p234).
    Pour une partie au moins de ses membres, l’UGTT doit jouer un rôle de « contre-pouvoir » (p16) mais « ne vise pas la prise de pouvoir » (p11).

    En final, l’UGTT se comporte « ni comme une force politique destinée à prendre le pouvoir, ni comme un syndicat révolutionnaire capable de remettre radicalement en cause les choix économiques et sociaux adoptés par les élites au pouvoir. L’ampleur de son action politique lui échappe parfois, mais elle a montré qu’elle n’est pas et ne veut pas devenir un parti politique » (p235).

    Entre résistance et soumission

    Il a toujours existé dans l’UGTT « un courant de soumission au pouvoir pouvant aller jusqu’à la quasi-intégration dans l’appareil d’Etat », mais simultanément on y a toujours trouvé « un courant de résistance au pouvoir qui prend le dessus en temps de crise ». (p15)
    Dans ce cadre, l’UGTT a été avant 2011 à la fois « un refuge pour les mouvements sociaux, un espace de résistance (...) contre l’hégémonie exercée par le parti unique » et « un lieu de négociation permanente de l’équilibre tant politique que social ». (p 16)

    Entre affrontement et volonté de négociation

    « Tantôt ce sont des réactions offensives qui s’expriment et qui vont jusqu’à l’affrontement et parfois c’est la logique de médiations et de négociation qui l’emporte » (p234).

    L’action de l’UGTT repose sur « sa capacité à construire des compromis entre les défenseurs d’une rupture radicale avec l’ancien régime et les partisans d’une orientation réformatrice » (p235).
    « L’UGTT, en arrachant quelques concessions de la classe dirigeante au profit du mouvement protestataire, évite le risque d’un affrontement directe entre les anciennes et les nouvelles forces politiques et neutralise, selon les plus critiques, le potentiel d’une rupture radicale avec le régime » (p235).
    L’UGTT revendique une identité de «  »force d’équilibre« entendue dans le sens d’une force à la fois de pression et de négociation » dont une des constantes est « le refus de l’affrontement direct avec le gouvernement » (p235).
    « Dès lors, il n’est pas étonnant de voir l’UGTT affirmer de plus en plus nettement que seules des solutions consensuelles entre les différentes forces politiques et sociales peuvent sortir le pays de la crise » (p235).
    « L’UGTT affirme sa défense des revendications sociales, mais sans jamais oublier de faire pression pour établir un calendrier électoral » (p234). « Sa proximité des mouvements sociaux lui donne les moyens d’exercer une pression sur les choix électoraux et les grandes décisions politique » (p235).

    « Dialogue national » et base sociale de l’UGTT

    Pendant le deuxième semestre 2013, l’UGTT a joué un rôle décisif dans la mise en place d’une structure de dialogue incluant notamment le syndicat patronal.
    « L’UGT, qui accepte de faire un un front uni avec le patronat pour pouvoir trouver un équilibre négocié avec les différentes forces politiques et sociales, prend le risque de voir sa capacité d’action sociale s’affaiblir. Pire encore, elle se montre disposée comme par le passé à accepter une nouvelle vague de libéralisation économique proposée par les bailleurs de fonds moyennant des augmentations salariales dérisoires pour ses membres » (p237).
    Pour l’auteure le risque existe pour l’UGTT de se couper de forces attendant « une attitude plus ferme de la part de l’UGTT ». Celles-ci estiment qu’avec l’approfondissement de la crise économique, il est « de moins en moins possible de négocier avec les élites économiques et politiques en place » et placent leur confiance dans les mouvements sociaux (p238).

    Entre mode pyramidal de décision et système de pressions sur la direction

    * Aux lendemains de l’Indépendance, un « rapport organique » existait entre l’Etat et l’UGTT : le Président Bourguiba pouvait changer les secrétaires généraux, « les appeler aux commandes et les renvoyer comme il le fait pour ses ministres » (p37). Ce type de fonctionnement a été calqué par la direction nationale de l’UGTT sur les structures intermédiaires. Il se traduit par l’hégémonie du Bureau exécutif et du secrétaire général sur l’ensemble de l’organisation (p152).

    * Tout un système de pression sur la direction s’est mis en place pour faire contrepoids à la concentration du pouvoir entre les mains de la direction centrale de l’UGTT.
    Il s’est notamment affirmé à partir de 2008 dans le cadre de la lutte bassin minier. Il a fini par imposer sa volonté dans les semaines qui ont précédé le 14 janvier.
    Dans le chapitre centré sur ces deux épisodes, le mot « pression » revient à très nombreuses reprises dans les entretiens réalisés.

    Lors de la lutte du bassin minier, « les syndicalistes ont (...) fait pression sur les instances régionales de l’UGTT pour intervenir dans la libération des prisonniers ». « Nous avons fait pression sur le Bureau exécutif pour intervenir auprès du gouverneur » (p69). « Les syndicalistes de base ont imposé, grâce à leur pression, à certaines Unions régionales (...) ou à des secteurs (...) de soutenir le mouvement du bassin minier » (p77). A Redeyef, « il y a eu un changement grâce à la pression syndicale à l’intérieur des syndicats de base et aussi grâce à la pression qui vient de l’étranger, des délégations étrangères. Cette pression qui vient de l’intérieur et de l’extérieur a permis enfin de changer la position officielle de la direction syndicale... » (p78). Le secrétaire général Jrad « qui n’a pas l’habitude de céder a enfin cédé pour éviter l’implosion de l’UGTT (...) sous la pression intérieure » (p79).
    « Nous faisions des rassemblements devant l’UGTT pour faire pression, et le Bureau régional a négocié avec le gouverneur pour les prisonniers » (p82).


    Il en va de même après le 17 décembre 2010. Hélà Yousfi écrit à ce propos : « Cette pression engendre une crise au sein de l’organisation qui a pour résultat immédiat une rupture dans les circuits de décision formels classiques et une transgression de la hiérarchie syndicale », comme par exemple l’accord préalable du Bureau exécutif pour qu’une grève soit légale (p86).
    « Ce genre de décision n’aurait pas eu lieu » si préalablement « les structures de base et intermédiaires n’avaient pas fait pression » (p87) explique une militante.
    La direction de la centrale agit de façon comparable.. mais dans le sens inverse : elle « exerce une pression forte sur toutes les structures de manière à réduire leur souffle militant » (p87).
    « Cette dynamique de pression/négociation (...) a largement influencé aussi bien l’issue du mouvement de Redeyef en 2008 que celui de Sidi Bouzid ... » (p90).
    « Généralement quand la direction de la centrale voit que les différentes structures régionales et sectorielles adoptent (des) revendications, il y a une sorte de pression qui s’exerce sur le Bureau exécutif qui va finalement les adopter » (p94). « Sous la pression de ses structures, elle est obligée de suivre le mouvement » (p95).

    Entre clientélisme et résistance à la direction

    * Le clientélisme en vigueur au niveau de l’Etat avant 2011 avait trouvé son prolongement au sein de l’UGTT. « Le cadre syndical détaché auprès de la Centrale échappait aux contraintes du travail et accédait à un statut social qui lui procurait une certaine reconnaissance. Il devait alors agir en fonction de ce que le Bureau exécutif attendait de lui ». « Ce détachement pouvait être retiré au cours du mandat si le cadre décevait ou entrait en conflit avec la direction » (p153). Plusieurs témoignages figurant dans le livre donnent des exemples d’avantages matériels attribués aux permanents syndicaux (pp 153-155).

    * Au sein de l’UGTT, ont toujours existé des militant-e-s refusant de prêter allégeance à la direction. Cette situation s’est notamment exprimée par l’opposition à la suppression de l’article 10 des statuts interdisant plus de deux mandats successifs au Bureau exécutif.
    Cette volonté s’est accentuée lors du processus ayant précédé le 14 janvier 2011. « L’épisode révolutionnaire qui a poussé certaines Unions régionales et Fédérations à prendre leurs décisions de manière autonome sans attendre l’approbation du Bureau exécutif constitue un précédent intéressant qui préfigure de nouvelles relations entre les structures intermédiaires et et la direction central pouvant neutraliser la dérive hégémonique du Bureau exécutif » (p155).

    Entre attachement formel aux règles et arrangements de couloirs

    * « Tout est conçu au Congrès pour qu’aucun manquement à la procédure démocratique ne soit possible. Cette démocratie formelle et pointilleuse est la garantie d’une légitimité, rend incontestables les décisions prises par le Congrès et assure une marge de crédibilité au Bureau exécutif » (p173).

    * Mais simultanément « les votes ne sont pas orientés par les programmes proposés mais plutôt par les tractations politiques et les alliances » (pp 170-171). « Tous les moyens sont bons, de la cooptation des délégués moyennant des privilèges, à la manipulation des adhésions pour conquérir le pouvoir » (p171).

    Entre syndicalisation massive des femmes, et masculinité des structures

    « Si les femmes sont bien présentes à hauteur de 47 % dans les structures de base et dans les luttes syndicales, elles demeurent absentes des postes de direction syndicale. En effet, le fait de devenir membre du BE est verrouillé par des conditions de nombre de mandats antérieurs réalisés aux différents niveaux (local, régional, fédéral) de l’organisation. Une condition qui réduit le nombre de femmes éligibles et empêche leur arrivée au niveau de la direction centrale » (p157).
    Un débat est en cours qui pourrait déboucher sur un système de quotas au sein de l’UGTT, y compris au Bureau exécutif.

    Multiplicité des forces centrifuges et maintien d’un cadre collectif

    Une des explications proposée au fait que l’UGTT est parvenue à ne pas exploser en vol malgré les multiples contradictions qui la traverse est la volonté partagée de construire des consensus internes sur la base des rapports de forces existant à un moment donné :
    « L’UGTT, par sa composition et sa sociologie, a toujours été tributaire d’un équilibre souvent précaire entre des intérêts sectoriels, de considérations régionales et des enjeux politiques. De ce fait, ce n’est pas tant le clivage idéologique ou partisan qui oriente les décisions de la Centrale que sa capacité à construire des consensus entre des groupes aux intérêts divergents ». « C’est grâce à l’institutionnalisation du consensus comme mécanisme privilégié de régulation du conflit que l’UGTT a pu maintenir sa cohésion interne tout en conservant son pouvoir. Dès lors, les tergiversations et les tensions qui ont marqué la trajectoire de l’UGTT prennent tout leur sens » (p236).

    Notes :

    1. Note AB : Un responsable intermédiaire de l’UGTT me confie à l’époque « Le secrétaire général reste en place jusqu’au prochain congrès, mais nous l’avons mis sous camisole ».

    2. Note AB : Les membres du nouveau BE ont des affinités politiques diverses, actuelles ou passées, réelles ou supposées. Seule une minorité d’entre eux est actuellement membre d’un parti politique, mais aucun d’entre eux ne représente celui-ci en tant que tel.
    Jilani Hammami, dirigeant connu du PCOT n’ayant plus de responsabilités syndicales depuis des années, revendiquait une place dans le nouveau BE au nom de son parti (p176). Il a été écarté de la liste en situation de l’emporter. Hfaiedh Hfaiedh, pourtant tête de liste du même parti aux législatives deux mois plus tôt, a par contre été inclus sans aucun problème en tant que secrétaire général du syndicat de l’enseignement primaire.

    3. Note AB : Pour moi, le fait que l’UGTT ne se limite pas à la seule action revendicative ne constitue pas réellement une spécificité tunisienne. Nombreux sont les syndicalistes de part le monde qui considèrent qu’ils sont chargés d’une « double besogne » : la défense des intérêts immédiats des travailleurs ET « la transformation sociale ».
    Ce débat traverse périodiquement le syndicalisme depuis ses origines. Il se conjugue avec celui, tout aussi passionné, de savoir si cette deuxième dimension doit s’effectuer graduellement au sein du capitalisme, ou dans le cadre d’une rupture avec celui-ci.

  • Mobilisations téméraires des employées de maison au Liban (Orient 21)

    Face à l’exploitation et au mépris

    Elles sont des dizaines, voire des centaines de milliers à travailler au Liban comme domestiques. On peut les voir quelquefois accompagner des enfants à l’école, porter les courses de leurs employeurs. Soumises la plupart du temps à l’exploitation, en butte au mépris, elles ont commencé à s’organiser envers et contre tous, notamment contre le gouvernement qui refuse de reconnaître le syndicat qu’elles ont créé.

    Des femmes privées de protection sociale se réveillent dans nos maisons, sans qu’on sache comment elles vont. Silencieuses et travailleuses, à longueur de journée elles lavent, sèchent, repassent, cuisinent, pressent, cisèlent, hachent, épongent, gardent nos enfants et répondent «  ça va  » parce qu’elles n’ont pas d’autre réponse à donner, qu’on ignore tout de leur passé et de leur histoire, de leurs enfants qu’elles ont abandonnés au pays pour venir travailler au Liban. Elles sont un peu plus de deux cent mille, d’origine diverse : Philippines, Sri Lanka, Cameroun, Éthiopie, Népal…

    «  Si vous ouvrez tous ces étages maintenant  », nous dit Rose en indiquant un haut et large édifice, «  vous pouvez voir qu’il y a des filles dedans qui n’ont même pas le droit de se mettre devant les fenêtres et regarder ce qui se passe. C’est nous, qui pouvons être dehors, qui pouvons lutter pour elles. Sinon, qui va le faire  ? C’est pour cela que j’ai rejoint ce mouvement  ».

    Un syndicat pour les travailleuses domestiques

    Cette année, la célébration du 1er mai par les employées de maison au Liban a un goût particulier. Elle marque la formation — inédite dans le monde arabe — de leur syndicat le 25 janvier dernier, avec le soutien de l’Organisation internationale du travail (OIT), de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Fédération nationale des syndicats, des ouvriers et des employés au Liban (Fenasol). Les employées de maison sont, pour la première fois dans l’histoire du pays, les porte-paroles de leurs propres revendications, que transmettaient jusqu’alors des ONG libanaises.

    Rose est la vice-secrétaire de ce tout jeune syndicat.

    Arrivée du Cameroun il y a une quinzaine d’années, âgée de 45 ans, elle a eu la chance de tomber sur une «  dame très correcte  » qui lui a accordé beaucoup de liberté. «  Je suis privilégiée par rapport aux autres, et cette liberté me permet d’être à l’écoute de mes camarades. De les recevoir chez moi. Ainsi suis-je devenue le leader de ma communauté. Avant la création de ce syndicat, je ne savais pas à qui ni où transmettre les multiples plaintes que je recueillais. C’est bien d’assurer un espace d’écoute, ça aide les employées à évacuer leurs souffrances, mais la loi est plus que nécessaire. C’est le seul garant de nos droits. Si la loi existe, je ne suis pas sûre que les gens se permettront de se comporter comme ils le font. La plupart des femmes arrivent au Liban sans savoir vraiment ce qui les attend. On nous promet du travail au Liban et on découvre les conditions ici. On tombe dans le bain. Tout ce qui nous souhaitons dans la création de ce syndicat c’est de nous rendre visible, de montrer que nous existons. Le Liban doit ratifier la convention de L’OIT1  !  »

    Cependant, en l’absence de reconnaissance institutionnelle, la souffrance que crée la servitude reste une plaie ouverte. Le ministère du travail refuse de légaliser le syndicat, ignorant la demande envoyée en janvier. Farah Salka, la coordinatrice générale de l’Anti-racism Movement (ARM) condamne le mépris du ministre actuel, Sejaan Azzi qui, dit-elle «   nous reçoit avec des insultes et des agressions verbales alors qu’il est censé, en tant que ministre, défendre les droits des employées… Il les terrorise  ! Je ne comprends pas sa réticence. C’est dans son intérêt de répondre à leurs réclamations parce que le syndicat existe, qu’il le veuille ou non.  »

    Lutter contre l’isolement du plus grand nombre

    Mais cette minorité de travailleuses domestiques cache difficilement la majorité silencieuse qui souffre d’un isolement parfois poussé à l’extrême, qui ruine leur santé mentale. Les suicides se multiplient. Les ambassades des pays fournisseurs de main d’œuvre ne soutiennent pas leurs ressortissantes. Certaines femmes sont privées de nourriture, battues, agressées sexuellement pendant des mois par leur patron2. Une jeune femme sauvée par l’association Kafa a ainsi été exploitée sexuellement par sa patronne qui l’a vendue à plusieurs hommes. Certaines se font traiter injustement de voleuses pour éviter à la fin du contrat de payer à l’employée le billet d’avion de son retour. Et quand elles souffrent de problèmes de santé graves, elles ne peuvent bénéficier d’aucun soin.

    De toutes les histoires recensées et subies, c’est la xénophobie qui fait le plus souffrir. Certaines femmes subissent des humiliations totalement gratuites, une surcharge de travail parfois inutile et épuisante. Privées d’intimité, il arrive qu’elles n’aient pas de chambre à elles  ; elles couchent alors dans la cuisine, le séjour, sur des lits pliants ou dans des balcons minuscules transformés en «  chambres de bonne  ». Les toilettes sont le seul lieu où il existe une porte qu’elles peuvent fermer. Rose a d’ailleurs refusé mon invitation à aller prendre un café sur la terrasse en face. Nous sommes restées debout sur le trottoir. «  Vous savez pourquoi j’évite d’aller dans des cafés  ?  », me dit-elle à la fin de l’entretien. «  Quand j’entends “hiye chou badda”, c’est-à-dire “qu’est-ce qu’elle veut commander  ?”, ça m’énerve  ! Le reste je m’en fous, on peut me cracher dessus dans la rue. Je lave à l’eau et ça part. Mais quand on parle de moi à la troisième personne, ça m’énerve  ! Je ne peux plus entendre ce mot de “hiye”.

    Dépersonnalisées et chosifiées, elles sont interdites de vie privée. L’argument qui revient souvent quand on interroge les familles qui défendent à leur employée de sortir seule est la peur «  qu’elle se lie à des hommes et qu’elle ramène des maladies  ». Le mépris social se superpose au mépris raciste. En marge des clichés les plus éculés (la laideur et la saleté), on interdit à l’employée toute sexualité afin d’éviter un contact avec une classe sociale inférieure et par conséquent jugée malsaine et porteuse de maladies.

    Autre interdit raciste et paradoxal : l’accès aux piscines et aux plages privées, de peur qu’elles ne «  salissent l’eau  » alors que par ailleurs ce sont elles qui cuisinent et qui donnent à manger aux enfants.

    La kafala infantilisante et esclavagiste

    La kafala3 légalise ce système esclavagiste qui déshumanise les employées. «  Il ne peut plus être maintenu, réplique Farah Salka. Ce “garant”, s’il devient l’agresseur, l’agressée ne peut pas porter plainte contre lui. Il faut trouver un autre moyen  ! La législation du travail au Liban — qui n’a pas bougé depuis l’indépendance en 1943 et qui nécessite des soins intensifs en grande urgence — ne prend pas en compte ces deux cent mille travailleuses immigrées. Le modèle libanais datant du mandat n’est pas le meilleur droit du travail au monde, mais au moins il comporte quelques bases essentielles, parmi lesquelles la limitation des heures de travail, les congés annuels, le congé de maternité, la possibilité de démissionner.  »

    Plus on s’éloigne de Beyrouth, plus ces personnes sont isolées, voire séquestrées. Les réseaux sociaux ont beaucoup contribué à sociabiliser les plus isolées et les plus vulnérables quand elles bénéficient du «  luxe  » d’y accéder. C’est ainsi que Tabel, atteinte de tuberculose, enfermée dans le local à poubelle de l’agence de recrutement alors qu’elle crachait du sang a pu alerter une amie grâce à des textos envoyés via un téléphone portable. C’est pour répondre à cet isolement que le Migrant Community Center (MCC) prépare l’ouverture d’une antenne à Jounieh et une autre à Saida.

    Face au désintérêt total et à l’abandon par les ambassades de leur ressortissants, le MCC, créé il y a trois ans en collaboration avec ARM assure un espace de formation, des cours de langues, des ateliers de toutes sortes (musique, yoga, couture), organise des rencontres, des réunions, des fêtes d’anniversaire, de mariage... Le centre met sur pied également des excursions, et certaines émigrées vivant au Liban depuis dix à vingt ans découvrent pour la première fois de leur vie d’autres villes que la capitale où elles résident.

    Reproduction des inégalités de genre

    Je demande à Rose de me parler de ses projets d’avenir. Elle respire profondément et me répond sans hésiter : «  rentrer chez moi et voir grandir mes petits-enfants.  ». Au sacrifice de leur propre vie de famille qu’elles ont quittée en abandonnant leurs enfants pour partir élever ceux des autres, ces travailleuses assurent d’une certaine façon un équilibre au sein des couples libanais. Le poids des traditions est en effet lourd pour une génération «  mondialisée  » et voyageuse et les repères difficiles à trouver.

    Les Libanaises refusent à présent de reproduire le schéma maternel et d’assurer les tâches domestiques, mais les hommes se croient «  dévirilisés  » quand ils sont sollicités. L’employée de maison est le remède contre les tensions que peuvent générer dans un couple les tâches ménagères. Dans la mesure où c’est un domaine classiquement réservé aux femmes et confondu avec le travail gratuit que nécessite l’épuisant et contraignant entretien des maisons, les choses se gèrent entre femmes. La violence que les femmes employeuses font subir à leurs employées égale en puissance celles qu’exercent les hommes sur leurs femmes au Liban.

    La reproduction des inégalités de genre est de ce fait déléguée aux femmes dans le secret des foyers, au sein de ce «  triplet  » partageant le même toit (les travailleurs immigrés de sexe masculin, pour leur part, ne sont jamais séquestrés à l’intérieur des maisons malgré des conditions de vie précaires). Les femmes libanaises n’ont en général pas accès à la politique  ; ou alors il s’agit de remplaçantes d’hommes absents, d’épouses, de filles ou de sœurs de personnalités politiques assassinées. Elles ne peuvent pas transmettre leur nationalité à leurs époux et à leurs enfants, elles ne peuvent pas léguer leurs biens en héritage. Quand elles sont victimes de viols ou de violences conjugales, elles ne sont pas protégées par la loi. Que dire dès lors du sort réservé à des étrangères n’appartenant à aucune des communautés composant le pays, coupées de leur famille, abandonnées par leurs ambassades et non reconnues par l’État du pays qu’elle habite  ?

    Rita Bassil 13 mai 2015
     
     
    Voir aussi:
     
  • Mauritanie, la grève de la SNIM dans tous les esprits (Afriques en lutte)

    Mauritanie, la grève de la SNIM dans tous les esprits En Mauritanie, ce 1er-Mai avait un goût particulier, surtout à Zouérate et à Nouadhibou au nord du pays, là où les travailleurs de la société nationale industrielle et minière (SNIM) ont fait grève pendant 63 jours. Cette grève s’est terminée il y a à peine un mois. Des négociations ont débuté mardi avec la direction de la SNIM mais les travailleurs n’ont toujours pas eu gain de cause. Naturellement, les revendications et ce mouvement sans précédent étai

    En Mauritanie, ce 1er-Mai avait un goût particulier, surtout à Zouérate et à Nouadhibou au nord du pays, là où les travailleurs de la société nationale industrielle et minière (SNIM) ont fait grève pendant 63 jours.

    Cette grève s’est terminée il y a à peine un mois. Des négociations ont débuté mardi avec la direction de la SNIM mais les travailleurs n’ont toujours pas eu gain de cause. Naturellement, les revendications et ce mouvement sans précédent étaient vendredi au cœur du défilé à Zouérate.

    Trois centrales syndicales (la CLTMN, la CGTM et la CMTM) représentant la grande majorité des travailleurs de la SNIM ont défilé ensemble vendredi à Zouérate. Une marche sans incident, au cours de laquelle, les syndicalistes ont vanté plus que jamais les bienfaits de l’unité qui a conduit à la grève historique menée par les travailleurs de la SNIM en début d’année.

    Parmi les personnes qui ont pris la parole figure Ahmed Vall ould Cheibany. Il est le seul employé que la SNIM ne souhaitait pas réintégrer depuis la fin de la grève il y a un moins, mais qui finalement vient d’obtenir le droit de reprendre le travail ce lundi. L’annonce de sa réintégration cette semaine a d’ailleurs ouvert la voie à la réouverture des négociations sur les doléances des travailleurs, négociations qui étaient bloquées depuis plusieurs jours.

    Les discussions ont repris mardi et mercredi dernier et doivent se poursuivre cette semaine. Pour l’heure, aucune avancée sur les augmentations de salaire, la couverture sanitaire ou encore l’attribution de logements de fonction n’a été obtenue assure un délégué des travailleurs.

    S’ils ont reçu l’équivalent de deux mois de salaire, sous forme d’avance sur prime et de prêt, pour compenser les deux mois de grève, les salariés attendent disent aussi encore attendre le versement d’un troisième mois de salaire promis par le chef de l’Etat.

    Source RFI 4 mai 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/mauritanie-55/article/mauritanie-la-greve-de-la-snim