Révolutions Arabes - Page 49
-
Alep (Anti-k)
-
Syrie: pour en finir avec cette histoire de gazoduc (Anti-k)
L’histoire est entendue, la guerre civile qui ensanglante depuis plus de 5 ans la Syrie ne peut avoir que des origines secrètes – cachées par les médias occidentaux – et qu’il faudrait chercher dans les tréfonds de ces âmes avilies par l’argent et le vice que l’on rencontrerait à foison sous les turbans arabes ou les chapeaux de cow-boys texans.
Ultime avatar des complots judéo-maçonniques qui ont agité les esprits névrosés du début du XXème siècle (jusqu’aux horreurs que l’on sait), tout ne serait aujourd’hui que conjuration pour le pétrole et le gaz, qu’affaire de « gros sous » et de géopolitique de ressources énergétiques en voie d’épuisement[1].
C’est ainsi que le printemps arabe de 2011, qui a touché la Syrie mais aussi la Tunisie, le Bahrein, l’Egypte…, serait réductible à une banale « vengeance » d’émirs qatariens et d’islamistes turcs, secondés évidemment par la CIA, et animés par l’appât du gain qui leur aurait échappé du fait de la résistance de Bachar el-Assad le président « légalement élu » de la Syrie.
L’histoire continue de se répandre, facile à comprendre, et surtout bénéficiant de tous les avantages d’une post-vérité cachée par les dirigeants et médias occidentaux, et que les esprits éclairés et « libres » se chargent de révéler à tous.
Cela ne mériterait que dédain et amusement, si des esprits sérieux, et surtout des dirigeants politiques briguant les plus hautes fonctions du pays, n’y succombaient avec une facilité déconcertante et surtout inquiétante sur l’avenir de pays dirigés par des personnes aussi crédules.
Nous nous proposons d’analyser cette histoire, son évolution dans le temps, pour ensuite constater qu’elle est non seulement fausse mais encore dangereuse pour la compréhension des évènements en Syrie et plus largement dans le monde.
La légende syrienne du Gazoduc dans ses différents avatars :
Au plus loin que nous puissions remonter, cette histoire de gazoducs semble trouver son origine (mais nous n’avons pas de certitudes là-dessus) dans un billet de Pepe Escobar, un correspondant du Asia Times, auteur de livres polémiques sur Obama et les USA, publié par Al Jazeera le 6 août 2012 et intitulé « Syria’s Pipelineistan War »[2].
A l’origine, l’histoire, confuse et peu étayée, consiste à expliquer l’origine du soulèvement de 2011 en Syrie par une opération de déstabilisation de la Turquie contre Assad pour faire échouer des projets de gazoducs concurrents au projet Nabucco, même si la Turquie est intégrée dans certains des projets en question.
L’histoire va se compliquer pour intégrer un projet de gazoduc conçu par le Qatar (le projet « arabe ») qui serait en Syrie en conflit avec le projet de gazoduc mené par l’Iran. Ce dernier ayant été préféré par Assad au projet qatarien, la CIA et les Monarchies du Golfe auraient alors déclenché des manœuvres téléguidées depuis l’extérieur pour faire chuter le régime d’Assad, et le remplacer par un dirigeant sunnite « ami », avec le succès que l’on sait.
L’histoire se cristallise donc autour de la rivalité de deux projets de gazoducs, l’un porté par le Qatar et l’autre par l’Iran. Le premier ayant été refusé par Damas qui aurait privilégié l’autre, déclenchant en réaction une vengeance turco-américano-qatarienne[3] qui va aboutir aux manifestations de 2011, qui ne seraient donc ni spontanées, ni d’origine interne[4].
Analyser la véracité de cette histoire, fournie comme explication unique ou souterraine de la guerre en Syrie impose de revenir aux faits, c’est à dire aux différents projets de Gazoducs, à leur chronologie, puis de relever les invraisemblances de ce récit, avant d’aborder la place de ce récit dans la propagande du régime d’Assad et enfin de conclure sur le danger de cette explication, non seulement inefficace mais trompeuse sur la complexité de la situation en Syrie en 2016.
Un gazoduc peut en cacher un autre : les projets de Gazoducs dans la région en mars 2011[5]
Il faut rappeler qu’avant 1999, la Syrie était le principal producteur de gaz du Levant, à partir de champs on-shore à l’est de Homs et au nord de Palmyre (pour la plupart aux mains de l’EI au 31 décembre 2016). C’est ce qui explique que le gaz naturel est une composante importante de la consommation énergétique syrienne (25,6 % en 2009)[6], le Gaz naturel produisant 63,5% de l’électricité consommée dans le pays[7]. Ainsi la Syrie est en 2010 l’un des principaux producteurs et consommateurs de gaz naturel du secteur[8]. Les autres pays du Levant n’ont identifié que récemment d’importants champs gaziers off-shore au large de la Palestine et de Chypre (découverts à partir de 1999[9], les découvertes vont porter sur des champs à forts potentiels à partir de 2009).
Le développement du gaz naturel dans l’économie syrienne commence timidement dans les années 1980, pour porter ses fruits à partir des années 2000. Malgré les investissements et les réserves de gaz du pays, la production ne parvient pas à couvrir les besoins d’un pays en plein développement démographique et économique, et dès 2008, les importations de gaz naturel augmentent, principalement en provenance d’Egypte par le Gazoduc AGP[10].
Les besoins en gaz naturel de la région, et particulièrement de la Syrie vont continuer à augmenter et depuis 2009, Damas réfléchit à plusieurs pistes pour augmenter ses importations, ce qui l’amène à engager des pourparlers avec la Turquie (pour y faire transiter le gaz azéri), l’Iran, et même l’Irak.
Pour ce qui est des projets de Gazoducs, il faut d’abord définir la date à laquelle on doit se placer pour établir si des projets « concurrents » ont pu jouer un rôle dans le déclenchement de la guerre en Syrie.
Le « printemps arabe » syrien a débuté en mars 2011 (les Syriens eux-mêmes ne sont pas d’accord sur la date exacte entre le 15 et le 18 mars 2011[11]).
A cette date, il existe dans la région un Gazoduc important, l’AGP qui relie l’Egypte à la Syrie à Israël et au Liban[12], et 2 grands projets de Gazoducs connus, tous au point mort pour différentes raisons :
–le projet qatarien[13] :
ce projet a été conçu sur la base d’une étude de faisabilité de la Commission européenne en 2005[14], afin d’augmenter les importations depuis le Qatar, effectuées jusque-là par navires méthaniers. Deux routes ont été envisagées : une par l’Arabie Saoudite, le Koweit, l’Irak vers la Turquie et l’autre par l’Arabie Saoudite, la Jordanie, la Syrie vers la Turquie. La première route est la plus économique (Plan B sur la carte) mais suppose une stabilisation de la situation en Irak, la seconde (Plan A sur la carte) est donc envisagée en 2008 mais se heurte aux refus de la Syrie et l’Arabie Saoudite.
– le projet Nabucco (Iran et Transcaucasie) : c’est un projet plus ancien et plus vaste, puisque datant de 2002. Il a connu plusieurs versions. D’abord destiné à amener le gaz d’Iran vers l’Europe, la tension liée au programme nucléaire iranien amène l’Europe à réorienter le projet vers le gaz d’Azerbaïdjan et du Turkménistan. Une fois le consortium international constitué[15], les pourparlers sont menés régulièrement avant que des projets concurrents portés par la Russie ne viennent court-circuiter l’avance et bloquer toute avancée dès 2010[16].
Il convient d’y ajouter un projet de gazoduc à partir de l’Iran, le projet Islamic Gas Pipeline (IGP)[17] qui sera officialisé lors d’un accord tripartite entre l’Iran, la Syrie et l’Irak en juillet 2011. Bien que postérieur au début de la Révolution syrienne, il semble être le fruit de négociations entamées avant – sans que cela soit certain – aussi convient-il par soucis d’exhaustivité de l’intégrer dans les projets à prendre en compte.
Tous ces projets ont un objectif principal :
diversifier l’approvisionnement en gaz de l’Europe, pour rompre sa dépendance énergétique à Moscou[18], notamment en favorisant les importations provenant du Qatar, ou des champs gaziers iraniens[19] ou azéris.
Il convient de relever immédiatement qu’au-delà de cet objectif principal, la Syrie doit aussi couvrir ses propres besoins en gaz naturel. Les projets de Gazoducs étudiés ne feront pas que transiter mais approvisionneront aussi le pays.
Quand ça ne colle définitivement pas :
La simple chronologie des faits montre que rien ne peut rattacher le sort de ces différents projets – tous arrêtés aujourd’hui – avec les évènements qui vont commencer en Syrie en 2011.
Printemps 2009 : Refus de Damas (sous la pression russe[20]) du projet qatarien proposé avec l’appui de la Turquie malgré des conditions avantageuses pour la Syrie, ce qui amène à privilégier un autre tracé par le Koweit et l’Irak[21].
Juin 2009 : L’Azerbaïdjan donne un accès à ses ressources à la Russie[22], et au projet South Stream[23] au détriment du projet Nabucco qui perd une grande partie de sa faisabilité.
Juin 2009 : le Turkménistan signe un accord de fourniture de gaz avec la Chine qui écarte de facto la possibilité d’approvisionner le projet Nabucco[24]
Mars 2011 : début des manifestations dans toute la Syrie, violemment réprimées et qui vont déboucher dès le mois de juin 2011 sur les premiers affrontements armés à Deraa[25], débuts de la guerre civile
Juillet 2011 : annonce de la signature de l’accord entre l’Iran, l’Irak et la Syrie pour le projet IGP[26]
On ajoutera à cette chronologie qu’en 2013, pour ses exportations vers l’Europe, l’Azerbaïdjan écarte définitivement le projet Nabucco qui est suspendu.
Lier le déclenchement des manifestations en mars 2011 à des manœuvres de déstabilisation étrangères destinées à faire chuter la dictature d’Assad dans le double but de débloquer le refus de Damas d’accéder au projet qatarien refusé deux ans avant, et bloquer un accord donné en juillet 2011, n’est donc pas sérieux du strict point de vue des dates.
Les invraisemblances de l’explication gazière de la guerre en Syrie
Au-delà des questions de date, difficilement contestables, il faut aussi analyser les enchaînements qui mènent vers ces 3 projets, dont aucun n’a été à ce jour concrétisé.
D’abord, il faut rappeler que l’annonce par l’Iran d’un accord de principe sur un projet de gazoduc IGP passant par l’Irak et la Syrie en juillet 2011 ne peut être considérée sérieusement. Ce projet implique de construire un pipeline dans un pays en guerre civile (Irak) et un pays en proie alors à une forte instabilité (Syrie), et même à travers des zones qui échappent alors à l’autorité de Bagdad, les territoires contrôlés par l’Etat Islamique et les Kurdes.
Et surtout, au-delà des aspects de faisabilité technique qui n’ont jamais été sérieusement étudiés – même en 2016 – le projet IGP n’a aucun financement alors que 2 des 3 pays signataires sont frappés de sanctions financières internationales qui rendent impossible son financement par l’étranger[27].
Ce projet n’est donc pas un « concurrent » ni du projet Nabucco, ni du projet qatarien mais seulement une annonce permettant d’exercer une pression sur la communauté internationale. Tout montre qu’aucun des signataires n’a cru sérieusement à ce projet qui n’a connu aucun avancement, même du strict point de vue juridique depuis 2011.
On ajoutera enfin que si ce projet devait être mis en oeuvre, c’est avant tout avec la Russie que l’Iran se placerait en concurrence frontale.
Le projet Nabucco se heurte au contexte international, qui a amené l’Europe à refuser de poursuivre le projet avec l’Iran, puis aux manœuvres russes qui ont réussi à capter les autres sources d’approvisionnement envisagées (Azerbaïdjan), dont certaines sont aussi fortement mobilisées vers l’Est et la Chine (Turkménistan).
Rien dans la non mise en œuvre du projet Nabucco ne peut raisonnablement être attribué à Bachar al-Assad et expliquer une manœuvre de déstabilisation de sa dictature.
Le projet qatarien serait en théorie le mobile idéal d’une déstabilisation du régime d’Assad, mais la théorie ne résiste pas à l’examen des faits et des détails.
Ce projet a été rejeté par Damas en 2009, soit 2 ans avant le début des manifestations. Rien ne permet donc de lier les deux évènements historiques aussi éloignés l’un de l’autre surtout lorsque le second s’inscrit dans une dynamique qui touche en 2011 plusieurs pays arabes très différents et bien éloignés des contingences de la géopolitique du gaz naturel.
En réalité, il faut rappeler que le projet qatarien a 2 routes optionnelles :
l’option 1 : la plus courte (2900 km) et la plus économique : Qatar / Bahrein / Arabie Saoudite / Koweit/ Irak / Turquie
l’option 2 : la plus longue et la moins rentable : Qatar / Bahrein / Arabie Saoudite / Jordanie / Syrie / Turquie
Le coût du projet oscille selon les options entre 8 et 10 Milliards de $.
Dans tous les cas il se heurte à plusieurs obstacles politiques majeurs, devant lesquels le refus de Damas de 2008 pèse peu.
D’abord, la route la plus courte traverse l’Irak du Sud au Nord, de Bassorah (zone chiite) jusqu’au Kurdistan, dans des régions où justement la situation est très instable et le pouvoir de Bagdad contesté.
Voici d’ailleurs la carte la plus sérieuse sur cette route, qui a toujours été privilégiée par la Turquie pour ce projet, et qui ne concerne pas la Syrie :
Ensuite, et c’est l’obstacle essentiel, quelle que soit la route choisie, le gazoduc doit passer soit par les eaux territoriales, soit par le territoire saoudien.
Or, l’Arabie Saoudite est aujourd’hui en rivalité directe avec le Qatar, et s’oppose à tous les projets qui augmenteraient les exportations qatariennes. Par exemple, le projet de gazoduc Al Khaleej entre le Qatar et le Koweit a été bloqué dès 2002 par Ryad.
Ainsi, même si Damas avait accepté le projet qatarien (et turc), il n’aurait pas été mis en œuvre du fait du blocage saoudien.
Il n’est donc pas soutenable d’avancer qu’un renversement de Bachar al-Assad aurait pu débloquer un projet, objet d’un véto de l’Arabie Saoudite constant depuis plusieurs années.
On pourrait ajouter que la situation de la Turquie, impliquée dans la plupart des projets et elle-même intéressée par une prolongation du gazoduc AGP de Homs jusqu’à Kilis, contractualisée avec Damas dès 2000, exclut toute déstabilisation du régime d’Assad pour des motifs gaziers[28], sans même se pencher sur la question kurde.
Il est intéressant de développer également que cette théorie méconnaît la réalité des processus de décision particulièrement complexes en matière d’investissement en infrastructures gazières ou pétrolières, qui place les critères de faisabilité technique, de financement et de rentabilité du projet de pipeline bien avant ceux liés au contexte géopolitique[29].
Enfin, il n’échappera à personne que la situation actuelle de la Syrie, comme celle de l’Irak, ne permettent pas d’envisager la construction d’un gazoduc, dont le projet a été abandonné dès 2009.
Certains des détails donnés ci-dessus sur les différents projets, tirés d’études techniques ou spécialisées, ne se retrouvent pas dans la présentation « grand public » de ces projets, notamment des notices Wikipédia en français[30] ou en anglais[31], signe de l’enjeu pour la propagande du régime et de ses alliés russes et iraniens de la construction de cette histoire et de sa diffusion au plus grand nombre.
La « main de l’étranger » : un marronnier de la propagande d’Assad
Toutes les dictatures ont une tendance naturelle à essayer de disqualifier la contestation politique, qui ne serait que manœuvre de déstabilisation menée par l’étranger.
Mais la dictature d’Assad, qui dure depuis plus de 40 ans, porte cette propension à la hauteur d’un habitus fondamental et structurant de sa propagande : un « vrai » Syrien ne peut remettre en cause la domination du clan Assad-Makhlouf sur tout le pays sans être un agent de l’étranger.
C’est ainsi que dès le mois de mars 2011, confronté à une contestation politique générale, dans tous le pays et dans toutes les communautés (y compris les Alaouites, Druzes et Chrétiens), Bachar al-Assad va voir dans cette agitation une manœuvre d’un ennemi étranger[32].
L’histoire du conflit des gazoducs irano-qatariens, née en 2012, ne viendra que donner un mobile « plausible » à un discours déjà bien formaté dès le début de la contestation populaire.
Pourtant, l’ampleur de la contestation ne peut résulter d’une manœuvre de déstabilisation orchestrée par un service secret, aussi puissant soit-il. Les manifestations vont toucher toutes les villes du pays, se répéter avec une remarquable constance, et avec des slogans intimement liés à des questions internes à la Société syrienne, à ses aspirations et ses besoins quotidiens.
La pérennité du mouvement tient à la fois à la profondeur des aspirations des Syriens, et aux maladresses du régime qui a mêlé répression violente, arbitraire et concessions ciblées, provoquant même des critiques au sein de son appareil de sécurité[33].
Certes, la Syrie par ses actions de soutien des terroristes, y compris jihadistes en Irak par exemple, est depuis longtemps (comme la Corée du Nord et l’Iran) sur la liste des pays considérés comme hostiles par l’administration américaine. Plus même, dès 2006, les États-Unis assument ouvertement cette hostilité, qui n’est pas exempte de collaborations ponctuelles dans la lutte contre le terrorisme, et s’engage à soutenir toutes les initiatives permettant de changer le régime et de mettre fin à la dictature.
Les télégrammes confidentiels révélés par Wikileaks sont clairs sur le sujet, et relèvent de positions classiques d’une grande puissance soucieuse de défendre ses intérêts[34].
Pour autant, cette posture, adoptée en 2006[35], et révisée ensuite par l’administration américaine, et surtout elle est loin d’être suivie d’effets. Il n’y a aucun lien avéré entre ces intentions de 2006, remises en cause postérieurement, avec les évènements de mars 2011.
La mobilisation des Syriens repose d’abord sur des causes endogènes et non manipulables depuis l’étranger :
crise économique liée à la succession de sécheresses qui frappe le pays de 2006 à 2011[36], et aux échecs de la libéralisation de Bachar, associée à une énorme pression démographique (la population passe de presque 13 millions d’habitants en 1990 à plus de 22 millions en 2011), avec une forte représentation de la jeunesse (âge médian de 21,7 an en 2010 pour les hommes et de 22,1 pour les femmes).
En 2011, la situation sociale syrienne est explosive depuis plusieurs années, avec un important exode rural, une communautarisation confessionnelle croissante[37], une forte hausse des inégalités, et un décalage entre les attentes d’une jeunesse nombreuse et des capacités d’intégration économique qui se réduisent. Et les maladresses d’une répression violente particulièrement à l’égard des jeunes et même des enfants, comme Hamza al-Khateeb[38] vont pousser au déclenchement d’une révolution.
L’étude des révolutions dans l’Histoire montre que ces facteurs sont largement suffisants pour expliquer une crise politique et une contestation des dirigeants. Des opérations de déstabilisation ne peuvent agir sur des tendances aussi lourdes, notamment du point de vue démographique et économique.
Il n’y a donc aucune raison de donner du crédit à la propagande du régime qui n’a cessé depuis le début de dénoncer un complot étranger.
Pire même, l’enchaînement des évènements montre qu’en réalité, le mouvement de contestation est bien né en Syrie, et émane de Syriens vivant dans leur pays et non d’exilés ou de groupes extérieurs.
En effet, profitant des évènements du printemps arabe[39], des groupes de Syriens vont tenter à plusieurs reprises de mobiliser des manifestations hostiles au régime depuis l’étranger, notamment via les réseaux sociaux. Ce seront à chaque fois, des échecs complets, comme début février 2011 où l’appel à manifester lancé sur facebook[40] ne débouchera sur AUCUNE manifestation[41].
La thèse du complot étranger comme explication de la guerre en Syrie n’est tout simplement pas sérieuse, en tout cas dans le cadre d’une démarche scientifique. Dès lors, la question d’un hypothétique mobile à ce complot, lié à des projets de gazoducs devient sans objet.
Conclusion : le danger des explications capillotractées
Face à ces arguments, dont certains ne nécessitent pas une analyse ni une recherche très profonde[42], on reste étonné de la prospérité de l’explication gazière de la guerre en Syrie, pourtant au moins relativisée, dans toutes les publications sérieuses[43].
Cette thèse fausse et farfelue en dit beaucoup sur les carences cognitives de ses défenseurs que sur la réalité d’évènements historiques bien documentés, et accessoirement sur les désastres collectifs auxquels amène cette période où surmédiatisation rime avec désintellectualisation.
Les enjeux et choix énergétiques, l’accès aux ressources pétrolières rares sont évidemment des éléments essentiels de compréhension des évènements géopolitiques et historiques.
Il n’est bien évidemment pas question de le nier ici.
Il suffit de rappeler que le partenariat américano-saoudien symbolisé par l’entrevue Roosevelt / Roi Ibn-Saoud sur le Quincy le 14 février 1944 est un élément structurant pour tout le Moyen-Orient[44].
On peut aussi évoquer les tensions entre la Russie et l’Ukraine pour la Crimée puis pour le reste du pays, dont le lien avec les projets de gazoducs est évident[45], ou les tensions dans le Caucase entre Russie et Azerbaïdjan[46].
Il est intéressant de relever que ces ingérences russes, motivées par des projets de gazoducs, sont ignorées par les mêmes qui dénoncent une prétendue action de la CIA téléguidée par le Qatar en Syrie en 2011.
Mais force est de constater que les enjeux de la guerre en Syrie sont d’abord syriens, et la régionalisation du conflit ne va intervenir que plus tard. Les interventions des soutiens étrangers du régime sont aussi anciennes (2012) et bien plus importantes que celles des soutiens de la rébellion[47].
Le danger de propager l’histoire des gazoducs comme explication de la guerre en Syrie réside aussi bien dans la méconnaissance des origines et raisons de la contestation politique du régime, que dans la négation des interventions étrangères sans lesquelles Bachar al-Assad ne serait plus au pouvoir.
Elle dénote une vision particulièrement dénigrante du peuple syrien, incapable de revendiquer par lui-même, et sans être manipulé par des services étrangers, plus de liberté et un meilleur partage des richesses du pays.
Enfin, chercher un complot pour le gaz ou le pétrole dans toute crise politique est un moyen facile d’éviter pour des dirigeants en difficulté, d’assumer leurs responsabilités et de tirer les conséquences de leurs échecs, deux aspects essentiels d’un mandat politique dans une démocratie, déjà trop souvent oubliés par nos dirigeants actuels.
[1] Rappelons que les histoires de gazoduc existent aussi pour une explication complotiste de la guerre en Afghanistan de 2001 : http://www.liberation.fr/planete/2002/01/05/sous-le-conflit-afghan-des-pipelines_389449
[3] Un exemple des délires complotistes : http://yournewswire.com/wikileaks-cables-reveal-usa-signed-death-warrant-for-assad/
[4] La « cristallisation » de cette histoire découle d’une série d’articles à l’automne 2012, voir : ANSAMED 01/10/2012 http://www.ansamed.info/ansamed/en/news/nations/turkey/2012/10/01/Syria-new-markets-Qatarien-gas-Al-Assad-analyst_7560833.html
[5] On se reportera à l’excellente étude Hakim Darbouche, Laura El-Katiri & Bassam Fattouh, East Mediterranean Gas : What Kind of Game Changer ?, NG71, December 2012, Oxford Institute For Energy Studies, disponible ici : https://www.oxfordenergy.org/publications/east-mediterranean-gas-what-kind-of-a-game-changer/
[6] A comparer à 15% pour Israël ou 0,6% pour le Liban (chiffres de 2010)
[7] A comparer à 36,6% pour Israël et 0% pour le Liban (chiffres de 2010)
[8] La Syrie consommait en 2010 9,63 Bcm sur 14 consommés sur la zone Chypre-Liban-Israel-Syrie dont 8,94 Bcm tirés de ses ressources locales et 0,7 Bcm importés
[9] Le premier champ gazier off-shore découvert est Noa au large d’Israël en 1999, puis en 2000 d’autres champs au large des côtes israéliennes et de Gaza.
[10] Arab Gazoduc Pipeline, Gazoduc qui relie l’Egypte à la Syrie « utile » sur un axe du Sud au Nord de Deraa à Alep en passant par Damas et s’arrête à Homs.
[11] Le 15 mars 2011 est le début des manifestations à deraa après l’arrestation d’adolescents le 13 mars, le 18 mars 2011 est le premier vendredi de manifestations dans tout le pays, appelé « vendredi de la dignité », qui sera violemment réprimé dans plusieurs villes, avec les 4 premiers morts et des centaines d’arrestations.
[12] Ce Gazoduc de capacité limitée est la cible de nombreuses attaques terroristes de l’EI dans la Sinaï et a cessé de fonctionner régulièrement depuis 2011.
[13] Is the Qatar-Iraq-Turkey-Europe Natural Gas Pipeline Project Feasible ? Report Nr. 23 – January 2011, ORSAM – Ankara 2011.
[14] Le projet est porté par la Qatar Petroleum et Exxon-Mobile East Marketing Limited Company.
[15] Le consortium est formé de la Société Nabucco International et de 5 compagnies nationales.
[16] Quelles perspectives pour Nabucco et South Stream?, Rapport réalisé pour le CONSEIL FRANÇAIS DE L’ÉNERGIE, Sous la direction de Zaki Laïdi, IEP Paris – juillet 2010
http://www.wec-france.org/DocumentsPDF/RECHERCHE/Contrat56_Rapportfinal.pdf
[17] Appelé curieusement « gazoduc de l’amitié » dans la page Wikipédia française de présentation : ………..
[18] En 2011, la taille des réserves de gaz naturel réparties entre de nombreux pays concerne 3 acteurs majeurs : la Russie (1ère réserve de gaz naturel), l’Iran (2ème) puis le Qatar (3ème).
[19] C’est ainsi que sur la question du gaz naturel, l’Iran, qui développe ses champs gaziers de Fars, se place ainsi clairement en rivalité avec la Russie.
[20] Le refus est officiellement motivé par la volontiers de préserver l’amitié entre la Syrie et la Russie et donc les intérêts de Moscou, voir ici : https://www.rt.com/op-edge/syria-russia-war-oil-528/
[21] http://www.thenational.ae/business/energy/qatar-seeks-gas-pipeline-to-turkey#full
[22] accord signé avec Gazprom le 25 juin 2009
[23] le projet de gazoduc South Stream est lui-même arrêté en décembre 2014 et remplacé par un projet commun russo-turc le Turkish Stream.
[24] China, Turkmenistan seal long-term energy deal , AP 25 juin 2009, https://www.highbeam.com/doc/1A1-D991I3P80.html
[25] Ces affrontements à Deraa ne sont pas le fait de mercenaires étrangers mais d’abord de déserteurs de l’armée syrienne, qui font défection par unités entières et s’opposent aux forces fidèles au régime chargées de la répression de la contestation à Deraa.
[26] La date de conclusion de l’accord de juillet est opportunément avancée à mars 2011, ce qui est faux, dans certaines sources russes https://www.rt.com/op-edge/syria-russia-war-oil-528/
[27] Voir à ce sujet Hakim Darbouche, Laura El-Katiri & Bassam Fattouh, East Mediterranean Gas : What Kind of Game Changer ?, déjà citée p. 17.
[28] Pour la stratégie de la Turquie en matière de gaz en 2011 : Ahmet K. Han, Turkey’s Energy Strategy and the Middle East: Between a Rock and a Hard Place, in Turkish Studies, 12:4, 2011, http://acikerisim.khas.edu.tr:8080/xmlui/bitstream/handle/123456789/909/IISBF_2011_A_Han_Makale.pdf?sequence=1
[29] http://www.jacobs-university.de/sites/default/files/downloads/decision-making_for_supplying_energy_projects_a_four-dimensional_model.pdf
[30] Notice Wikipedia en français sur le projet Qatar : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gazoduc_Qatar-Turquie et sur le projet iranien : https://fr.wikipedia.org/wiki/Gazoduc_Iran-Irak-Syrie
[31] Notice Wikipédia en anglais sur le projet Qatar : https://en.wikipedia.org/wiki/Qatar-Turkey_pipeline et sur le projet iranien : https://en.wikipedia.org/wiki/Iran-Iraq-Syria_pipeline
[32] Discours du 30 mars 2011 : https://www.theguardian.com/world/2011/mar/30/syrian-protests-assad-blames-conspirators
[33] http://mobile.lemonde.fr/syrie/article/2016/12/01/le-chef-du-renseignement-syrien-regrette-un-manque-de-fermete-au-debut-du-soulevement_5041756_1618247.html?xtref=https://www.google.fr/
[34] La Russie adopte ouvertement les mêmes postures à l’égard des régimes hostiles sans que cela ne pose de problème à ceux qui dénoncent sans barguigner l’interventionnisme US ou de la CIA.
[35] Le texte généralement cité date de décembre 2006 et est ici : https://wikileaks.org/plusd/cables/06DAMASCUS5399_a.html
[36] En réalité la situation de l’eau en Syrie s’est dégradée de manière continue depuis la fin des années 90 et c’est dans une situation très fragile que 5 années de sécheresse consécutives vont se succéder à partir de 2005.
[37] La confessionnalisation de la Syrie est à la fois la conséquence des choix du régime, des influences iraniennes, mais aussi de la perte des liens sociaux traditionnels du fait de la crise économique et de l’exode rural.
[39] Le printemps arabe débute en décembre 2010 en Tunisie et en janvier 2011 en Egypte.
[40] voir ici : http://www.france24.com/fr/20110204-syrie-facebook-mobilisation-manifestation-appel-calme-damas et http://www.rtl.be/info/monde/international/en-syrie-un-appel-a-manifester-contre-la-monocratie-pas-suivi-212868.aspx
[41] d’une manière plus générale et contrairement aux autres printemps arabes, le rôle des réseaux sociaux et d’internet – très surveillé et insuffisamment répandu – est mineur dans le début de la contestation syrienne de 2011, voir XXXXXX
[42] Les articles sont pourtant nombreux qui démontent ce mythe des gazoducs, sans rencontrer le succès des articles propageant cette légende fausse, voir par exemple : http://www.thenational.ae/business/energy/robin-mills-syrias-gas-pipeline-theory-is-a-low-budget-drama ou : http://www.lecommercedulevant.com/economie/petrole-et-gaz-liban/le-conflit-syrien-serait-il-lie-des-projets-de-gazoducs-regionaux/2349 ou encore : http://www.truth-out.org/news/item/37685-the-war-against-the-assad-regime-is-not-a-pipeline-war
[43] voir l’excellent article de David Rigoulet-Roze « La variable énergétique dans la crise syrienne – La question stratégique du contrôle d’un futur gazoduc méditerranéen » in Confluences Méditerranée, 2014/4, N° 91, pp. 95-106 : http://www.cairn.info/revue-confluences-mediterranee-2014-4-page-95.htm
[44] Même si les Historiens savent qu’en réalité la question du pétrole et du pacte Arabie Saoudite / USA est scellée bien avant cette entrevue qui n’ont été évoqués que la question de la Palestine : http://orientxxi.info/magazine/la-legende-du-pacte-du-quincy,1213
[45] Pasquale DE MICCO, IN-DEPTH ANALYSIS : Changing pipelines, shifting strategies: Gas in south-eastern Europe, and the implications for Ukraine, Policy Department, Directorate-General for External Policies, UE, 2015
http://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/IDAN/2015/549053/EXPO_IDA(2015)549053_EN.pdf
[47] sur le soutien inconditionnel de la Russie à Assad dès 2011 : « La Russie face aux révoltes libyenne et syrienne – des enjeux jugés majeurs, une politique défensive » de Anne de Tinguy, in LES ONDES DE CHOC DES RÉVOLUTIONS ARABES, Presses de l’IFOP – 2014, Chapitres 4 pp. 85-103 : http://books.openedition.org/ifpo/6930?lang=fr
Cédric Mas- Blog Paul Jorion 6 janvier 2017
-
Tuer pour civiliser : au cœur du colonialisme (Anti-k)
« Halte à la repentance ! » piaffent-ils en chœur de leurs perchoirs. « Les Français » n’auraient qu’une passion : « la haine de soi » pour mieux expier un passé dont ils ne sont plus fiers. Le siècle dernier fut celui des luttes d’indépendance ; l’affaire, puisqu’entendue, serait donc à classer — à l’heure où Eric Zemmour, jurant à qui veut l’entendre de l’évidence du « rôle positif » de la colonisation, caracole sur les étals des librairies ; à l’heure où Alain Finkielkraut, assurant que les autorités hexagonales ne firent « que du bien aux Africains », est sacré à l’Académie ; à l’heure où l’auteur de Vive l’Algérie française !, nous nommons Robert Ménard, a transformé la ville de Béziers en sujet d’actualité, les « vieilles lunes » n’ont-elles pas encore certaines choses à dire ? L’historien Alain Ruscio remonte le temps pour nous faire entendre ces voix qui, de gauche à droite, appelèrent à la guerre par souci, cela va de soi, de « pacification ».
Par Alain Ruscio
« Quelle drôle façon de civiliser : pour apprendre
aux gens à bien vivre, on commence par les tuer. »
Hô Chi Minh, 1925Commençons en 1580. Un penseur français, des plus fameux, écrit ces lignes, devenues célèbres, que les plus intransigeants anticolonialistes du XXe siècle n’auraient sans nul doute pas désavouées : « Tant de villes rasées, tant de nations exterminées, tant de millions de peuples passés au fil de l’épée, et la plus riche et belle partie du monde bouleversée pour la négociation des perles et du poivre ! […] Jamais l’ambition, jamais les inimitiés publiques ne poussèrent les hommes les uns contre les autres à si horribles hostilités et calamités si misérables. » On aura reconnu Michel de Montaigne, l’auteur des Essais. Combien, depuis cette époque et ces lignes, à l’ombre des drapeaux des puissances colonisatrices, d’autres « villes rasées », de « nations exterminées », de « peuples passés au fil de l’épée » ? On pourrait se contenter de cette question, sans crainte d’être contredit, et entrer dans les détails et les descriptions, pour le moins horrible, des fusillades, des razzias, des décapitations, des corvées de bois, des tortures, des viols, de l’utilisation de l’aviation, des armes chimiques, du napalm… On pourrait citer mille auteurs qui protestèrent, de Victor Hugo (« L’armée faite féroce par l’Algérie ») à Anatole France, en passant par Albert Londres, André Gide, Malraux, Aragon, Sartre ou encore François Mauriac… On pourrait, certes. Mais nous resterions dans le comment ; nous devons plutôt tenter de comprendre le pourquoi.
« Cette matrice a un nom : l’idéologie coloniale. La violence n’est pas fortuite, mais nécessaire. Obligatoire. »
Les violences coloniales sont le fruit de la rencontre conflictuelle entre, de la part des hommes « blancs », un esprit de conquête et de suffisance, porté par un racisme, alternativement agressif ou paternaliste (mais qui se voulait en tout état de cause constatation de l’évidence), et, de la part des hommes « de couleur », un refus de cette conquête, puis une résistance, basés sur un sentiment national ou, tout simplement, sur l’instinct de survie. Prenons, pour asseoir cette proposition, la première expédition coloniale de l’ère moderne : la campagne d’Égypte, lancée en mai 1798 et conduite par le général Bonaparte. Deux ans après, Jacques de Menou de Boussay, commandant en chef du Corps expéditionnaire en Égypte (il succédait à Bonaparte et à Kléber), proclama au peuple égyptien : « J’ai reçu l’ordre de la République Française et du consul Bonaparte, de vous rendre heureux : je ne cesserai d’y travailler. Mais je vous avertis aussi que si vous n’êtes fidèles aux Français, que s’il vous arrivait encore, pressés par de mauvais conseils, de vous élever contre nous, notre vengeance serait terrible, et j’en atteste ici Dieu et son Prophète, tous les maux retomberaient sur vos têtes. Rappelez-vous ce qui est arrivé au Caire, à Boulaq, à Mahalat-el-Kabira, et autres villes de l’Égypte ? Le sang de vos pères, de vos frères, de vos enfants, de vos femmes, de vos amis, a coulé comme les flots de la mer ; vos maisons ont été détruites ; vos propriétés ravagées et consumées par le feu. Quelle a été la cause de tout cela ? Les mauvais conseils que vous avez écoutés, les hommes qui vous avaient trompés. Que cette leçon vous serve pour toujours1 ! »
Un demi-siècle plus tard, un médecin militaire séjournant en Algérie fit savoir : « La force a été employée, non point cruelle et barbare, mais tacticienne et protectrice. » Puis l’homme, Audouard de son patronyme, de poursuivre : « On est conduit bien souvent à corriger des inhumains en leur faisant éprouver les rigueurs de l’inhumanité même2. » Une formule qui pourrait figurer au fronton de toutes les expéditions coloniales. Mais que l’on ne s’y méprenne pas : nous ne sommes pas ici dans une absence de logique, dans un paradoxe qui pourrait presque prêter, a posteriori, à sourire, mais dans la matrice même de l’esprit de la conquête puis de la pacification. Cette matrice a un nom : l’idéologie coloniale. La violence n’est pas fortuite, mais nécessaire. Obligatoire. Les propos avancés par de Menou de Boussay sont emblématiques en ce qu’ils mettent en évidence le lien logique qui existe entre ledit esprit et la violence qu’il induit : 1/ Nous vous libérons (« J’ai reçu l’ordre […] de vous rendre heureux »), 2/ Mais si vous refusez, nous vous tuons (« S’il vous arrivait […] de vous élever contre nous, notre vengeance serait terrible »).
L’idéologie coloniale se structure sur une notion clé : la hiérarchie. Celle, plus précisément, des « races », des cultures, des civilisations et des hommes. Sans cela, l’expansion impériale n’eût pu être possible. Sans la certitude que la « race blanche » possédait, dans tous les domaines de l’existence, une supériorité absolue. L’ouvrage phare du comte de Gobineau, Essai sur l’inégalité des races humaines, qui prétendait expliquer l’histoire des peuples et des civilisations, date de 1853 — soit quelques années après l’achèvement de la conquête de l’Algérie et à l’orée des autres grandes conquêtes. Cette idéologie est manichéenne, binaire : nous (= notre « race », notre culture, notre civilisation — d’ailleurs la seule qui soit) représentons le degré supérieur d’évolution de l’Humanité, tandis que les autres (en particulier les « races de couleur ») sont incapables de s’élever par elles-mêmes jusqu’à nos conceptions. Nous devons dès lors les « élever », autant que faire se pourra, jusqu’à un certain degré de civilisation.
« Nous sommes chargés (soit par l’évolution, soit par la Providence) de porter nos valeurs bien au-delà de nos frontières. »
Ce nous procède d’une généalogie double : nous sommes, d’une part, porteurs des valeurs de libération inhérentes à la République et aux Lumières, et, d’autre part, les représentants de la vraie religion, celle du Christ. Ces deux conceptions, a priori en opposition, s’avèrent souvent complémentaires aux colonies — on se souvient du mot de Léon Gambetta, président du Conseil sous la Troisième République : « L’anticléricalisme n’est pas un produit d’exportation. » Nous sommes chargés (soit par l’évolution, soit par la Providence) de porter nos valeurs bien au-delà de nos frontières. Nous avons une mission sur terre — un autre mot-clé. Il ne s’agit pas d’un choix ni d’une hypothèse à envisager parmi d’autres : l’homme blanc ne peut pas faire autrement qu’exporter ses valeurs, puis veiller, naturellement, à leur respect. C’est le fameux « fardeau de l’homme blanc » énoncé par Rudyard Kipling dans un poème publié en 1899. Si l’écrivain était britannique, ce caractère fut particulièrement marqué en France.
Hommes politiques, intellectuels et hommes de terrain eurent la certitude sincère d’être les détenteurs de la Raison — majuscule ! — et possédaient de ce fait la tâche historique d’en faire profiter les autres nations, pays, « races », etc. Prenons quelques exemples. Un poète, aujourd’hui oublié, qui eut jadis son heure de gloire : « Toutesfois l’Immortel voulut que nostre race / De ce vaste Univers couvrist toute la face3 » (Du Bartas, « Les Colonies », 1584). Une chanson enthousiaste, signée Salle en pleine apogée révolutionnaire, dédiée au légendaire bonnet phrygien. Les couplets se suivent et, à chaque étape, dans le monde entier, ce dernier libère un à un les pays… Voyons celui qui est consacré aux pays musulmans : « L’esclave, enfant de Mahomet / Libre en recevant ce bonnet / Va frapper ses despotes / Déjà sous les yeux du Sultan / Il bénit le nouveau turban / Des Français sans-culottes4 » Près de quatre décennies plus tard, le lieutenant-général Louis de Bourmont proclamait à Toulon, à la veille d’appareiller pour Alger : « La cause de la France est celle de l’humanité. Montrez-vous digne de votre belle mission5. » Tout est dit en deux phrases et en trois mots : France = humanité, donc mission. On pourrait de toute évidence multiplier à l’envi ce type de citations.
D’aucuns s’en étonnèrent : ces Français, qui pensaient arriver en libérateurs, furent le plus souvent accueillis à coups de fusils, de pierres ou de flèches ! La résistance fut obstinée : il fallut dix-sept années pour mettre au pas l’Algérie, jusqu’à la reddition d’Abd el-Kader en 1847 ; il fallut un demi-siècle pour s’emparer de l’Indochine, avec la mort, en 1913, du leader nationaliste De Tham. Quelle conclusion fallait-il en tirer ? L’ingratitude des populations conquises, sans doute… Puis, la conquête achevée, la pacification assurée, la France coloniale, imprégnée dans toutes ses fibres de sa mission, est persuadée qu’elle est en train de réussir. Elle roule des mécaniques, fière de son bilan. Les « masses indigènes » lui sont reconnaissantes : elles profitent de la « paix française », qu’elles peuvent comparer aux misères et aux injustices qu’elles enduraient par le passé. Si, malgré tout, mouvements de protestation il y a, ils sont provoqués par des « meneurs » manipulés par « l’étranger », trouvant quelque intérêt inavouable à menacer l’harmonie qui règne désormais dans les territoires pacifiés.
« Le colonisateur est le chirurgien qui va se charger d’extirper la gangrène. Quitte à, en chemin, couper çà et là quelques membres… »
Ces fauteurs de troubles ne représentent, par définition, qu’une infime minorité. Pour les tenants du système colonial, le doute n’est pas permis : les populations nous sont fidèles, il ne peut y avoir, pour récuser notre présence, que des minorités qui ne représentent qu’elles-mêmes. Ainsi, lors des grandes révoltes paysannes du centre Viêtnam de 1931, le ministre Paul Reynaud évoqua « quelques centaines ou quelques milliers de révoltés6 ». Au début de la guerre d’Indochine, le député Marius Moutet glosa, dans la Revue de l’Union française : « Une minorité entreprenante, audacieuse, téméraire, fanatique, s’est donné figure de représenter l’unanimité du peuple annamite7 ». Même son de cloche au Nord de l’Afrique : lors de la déposition du Sultan du Maroc, Eugène Guernier — porte-parole du Parti colonial, historien, professeur à Sciences-Po et membre de l’Académie des sciences d’Outre-mer — affirma pour sa part : « Plus de 85 % de la population du Maroc sont à nos côtés contre un sultan qui a failli à sa parole. » Et François Mitterrand de renchérir, à l’Assemblé nationale, lorsqu’éclate en Algérie une guerre qui ne dit pas son nom : « Tandis que quelques fanatiques multipliaient les attentats, un immense peuple de huit à neuf millions d’hommes se refuse à s’y associer et parfois, au contraire, s’élève contre eux. » Le maire d’Alger, par ailleurs secrétaire d’État à la Guerre, entérina, sûr de ses chiffres : « 99 % de la population algérienne réprouvent les récents troubles8. »
Ce « 99 % » est en tout point éloquent. Les organismes sont fondamentalement sains (autrement dit : fidèles à la métropole) mais ils sont attaqués par une maladie qui risque de les emporter. On songe à la conférence qui inaugure le film Z, réalisé par Costa-Gavras : le général, interprété par Pierre Dux, assimile la gauche grecque à un « mildiou idéologique » — c’est-à-dire une maladie fongique, causée par un parasite, qui provoque flétrissure et moisissure. Le colonisateur est le chirurgien qui va se charger d’extirper la gangrène. Quitte à, en chemin, couper çà et là quelques membres…
Mais qui sont donc, aux yeux des autorités, ces minoritaires enragés et mus par le seul désir de provoquer le chaos ? La lie de la population, les anciennes couches dirigeantes, les « races » ou les « ethnies » malsaines ou encore les éléments révolutionnaires, ennemis par nature de la « paix française » (et parfois d’ailleurs tout cela à la fois…). La lie ? Les expressions fusent pour désigner les prétendus délinquants, les bandes de pavillons noirs du Tonkin et autres coupeurs de route (les fameux fellaghas) d’Algérie… Les anciennes couches dirigeantes ? Les caïds d’Algérie, les mandarins d’Indochine, les rois nègres d’Afrique subsaharienne… Les « races » et les ethnies « mauvaises » ? Les Hovas de Madagascar, les Khroumirs de Tunisie, les « Tonkinois » d’Indochine, les Arabes du Maghreb, toutes opposées aux « bonnes races » : les Berbères du Maghreb, les Cambodgiens d’Indochine, etc. Une certaine ethnographie coloniale a toujours été utilisée, parfois — mais pas toujours — au corps défendant des spécialistes, comme une arme de division massive… Les éléments révolutionnaires ? Il n’est guère besoin d’insister : tous les mouvements insurrectionnels du xxe siècle, sans exception, ont été taxés de « communistes » — même lorsqu’ils étaient déclenchés au nom de la fidélité à un sultan présenté, par ailleurs, comme moyenâgeux (au Maroc : Mohammed ben Youssef), à un leader charismatique plutôt pro-occidental (en Tunisie : Bourguiba), même lorsqu’il se réclamait d’une nation arabe et musulmane (en Algérie, le FLN), même lorsqu’il s’agissait de rivaux des communistes (au Viêt Nam, le VNQDD)…
« Le colon met sur la réalité (une nation rebelle) un masque opaque (le grand mythe de la minorité agissante). »
La répression n’est donc pas une manifestation de brutalité à l’encontre d’un peuple mais un acte d’autodéfense contre des éléments malsains, le rebut (politique et social) de la population. Tout — c’est-à-dire la violence — est permis pour isoler les germes menaçants. Parlant ainsi, le colonisateur construit lui-même le piège dans lequel il va s’enfermer : il met sur la réalité (une nation rebelle) un masque opaque (le grand mythe de la minorité agissante). Pourtant, la réalité se montra rétive : les organismes gangrenés que le chirurgien venu d’Occident voulait amputer semblaient aimer leur maladie et préférer leur gangrène indigène à la santé étrangère.
Un des grands intellectuels des années 1920, Lucien Lévy-Bruhl, se fendit d’un ouvrage qui va quintessencier cet esprit (son titre, La mentalité primitive, est déjà un programme). Lévy-Bruhl partait d’un constat : « Les sociétés primitives, en général, se montrent hostiles à tout ce qui vient du dehors. » Si les peuples conquis ont l’inconscience ou le culot de ne pas apprécier notre bienfaitrice présence, voire s’ils se révoltent au nom de fumeux et incertains principes nationalistes, ne font-ils pas la preuve qu’ils sont barbares ? Donc : « Il faut que les changements, même si ce sont incontestablement des progrès, leur soient imposés. » Mais les indigènes résistent… « De là, chez les primitifs, des signes de crainte et de défiance que les Blancs interprètent souvent comme de l’hostilité, puis du sang versé, des représailles, et parfois l’extermination du groupe. » Rappelons-nous le général Menou, en 1800 : « J’ai reçu l’ordre […] de vous rendre heureux » mais si vous refusez « notre vengeance serait terrible ». Un siècle plus plus tard, Lévy Bruhl, qui n’était ni un militaire ivre de sang, ni un pré-fasciste (l’homme, membre de la Ligue des droits de l’homme et partisan de la SFIO, écrivit un temps dans L’Humanité, avant 1914), ne dit rien d’autre : « sang versé », « représailles », avant d’employer le mot suprême : « extermination » !
Or rien ne s’est passé comme le voulaient les théoriciens de l’expansion coloniale. Il y eut des oppositions, des résistances. Nul besoin, pour les expliquer, de « meneurs » venus « de l’étranger ». Car, contrairement aux tableaux idylliques de l’époque sur la mise en valeur (que l’on se reporte aux travaux d’Albert Sarraut) de l’Empire au bénéfice de tous, qu’a signifié l’arrivée des Européens pour les colonisés ? D’abord, la perte de leurs terres. Pour ces sociétés alors rurales, partout, à plus de 90 %, c’était évidemment là l’essentiel. Puis le travail, plus ou moins forcé, sur ces mêmes terres. Une mise en valeur faite certes selon des schémas imaginés à Paris, par des cerveaux français, mais appliquée par des bras — et, souvent de la sueur et du sang — des « indigènes », au profit, finalement, des colons et de la métropole. Une fiscalité galopante : il fallait bien que ces travaux fussent financés. Il ne le furent, dans leur masse, ni par les impôts des métropolitains, ni par ceux des colons. Enfin, la subordination au quotidien aux nouveaux maîtres, avec le lot de vexations (le vocabulaire de l’époque est d’une violence raciste que l’on a du mal à imaginer aujourd’hui) et de « petites » brutalités que mille témoignages rapportent.
« Rien ne s’est passé comme le voulaient les théoriciens de l’expansion coloniale. Il y eut des oppositions, des résistances. »
Dans ces conditions, nul besoin d’imaginer des meneurs greffés artificiellement sur des sociétés calmes et sereines pour comprendre l’agitation. Meneurs, certes, il y eut, du De Tham à Hô Chi Minh en Indochine, d’Abd el-Kader à Messali Hadj en Algérie, d’Abd el Krim à Ben Barka au Maroc, mais ils furent des révélateurs. Car le pire était que ces soit-disant minoritaires, malgré les ablations successives, réapparaissaient et… devenaient de plus en plus nombreux. Tout le mécanisme qui allait entraîner la violence de masse était en place : si, comme l’affirmait Jacques Chevallier, 99 % des Algériens étaient avec nous, il suffisait d’éliminer 1 %… mais ces 99 % se transformaient, avec l’emprise croissante du FLN sur les populations, en 90 %… Éliminons donc 10 %… etc., etc. Et, s’il s’avérait qu’ils étaient plus nombreux encore, l’extermination de pans entiers de la société colonisée fut, sinon une réalité toujours et partout, du moins une réalité bornée dans l’espace et située dans le temps. Autrement dit : la colonisation ne fut pas une extermination par nature, mais il y eut bel et bien des exterminations.
Cette période, on l’a vu, avait théorisé l’inégalité des races. De la proclamation de cette inégalité à la négation de l’humanité des Noirs, des Jaunes ou des « basanés », il n’y avait qu’un pas. De cette négation à leur suppression, ensuite, un autre pas, vite franchi. Les récits de l’ère des conquêtes, de celle des diverses pacifications, puis des guerres de décolonisation, d’Indochine au Cameroun en passant par l’Algérie, fourmillent de terribles anecdotes sur des exactions commises par des braves petits soldats de France qui, certes, en d’autres circonstances, n’auraient pas fait de mal à une mouche… Pas à une mouche, non ; mais à un bicot, un nègre, un canaque ou un niaquoué… Ils étaient couverts, encouragés, justifiés, par leurs gouvernants et par leurs chefs militaires. François Guizot ne déclarait-il pas, à la Chambre des députés, le 10 juin 1846 : « N’oubliez jamais que quand on a affaire avec des peuples à demi sauvages, avec des populations accoutumées à la dévastation, au meurtre, à se faire la guerre entre elles d’une manière cruelle, n’oubliez jamais qu’on est obligé, pour se défendre, d’employer des moyens plus vicieux, et quelquefois plus durs que ne le voudrait le sentiment naturel des hommes qui commandent nos soldats » ?
L’inhumanité, de l’aveu même de ceux qui décidèrent, entreprirent ou justifièrent les conquêtes coloniales, était donc consubstantielle au système. S’il fallait une vérification expérimentale de cette affirmation, on la trouverait dans la décolonisation tragique, à la française : de 1945 à 1962, et même aux années 1970, si l’on prend en compte l’extermination des derniers maquis de l’UPC au Cameroun, l’oligarchie française a guerroyé contre des mouvements de libération nationale qu’elle s’obstinait à prétendre minoritaires.
« Le colonialisme était-il réformable ? »
Le colonialisme était-il réformable ? Né dans la violence, pouvait-il s’amender et s’autodétruire pacifiquement ? C’est une question spécieuse pour un historien : il lui suffit de constater que cela ne s’est pas passé ainsi. Pourtant il y eut, du temps même des guerres de décolonisation, des hommes qui répondirent à cette question : nous emprunterons sa conclusion à Sartre, lors de sa célèbre conférence de 1956 : « Le colonialisme est un système9 ». Répondant à une question posée par un interlocuteur fictif, qu’il nomme un « réaliste au cœur tendre qui proposait des réformes » (et on ne peut que penser que Sartre visait Albert Camus), réformes qualifiées de « mystification néo-colonialiste », il ironisait : « Les néo-colonialistes pensent qu’il y a de bons colons et des colons très méchants. C’est par la faute de ceux-ci que la situation des colonies s’est dégradée ». Non, disait Sartre, il n’y a pas de « bons colons » qui pourraient racheter les fautes et les crimes des « méchants », il y a des colons tout court qui, tels les bourgeois de Marx, ont créé leurs propres fossoyeurs : « Les colons ont formé eux-mêmes leurs adversaires ; ils ont montré aux hésitants qu’aucune solution n’était possible en dehors d’une solution de force. L’unique bienfait du colonialisme, c’est qu’il doit se montrer intransigeant pour durer et qu’il prépare sa perte par son intransigeance ». Même si ce n’est plus à la mode, je me range pour ma part à cette conclusion de Sartre.
Texte inédit pour le site de Ballast – Publié le 11 novembre 2014
NOTES
1. Dans Kléber et Menou en Egypte depuis le départ de Bonaparte (août 1799-septembre 1801), Paris, Société d’histoire contemporaine, F. Rousseau, Ed. Picard & fils, 1900 (Gallica).
2. Un moyen d’assurer la conquête de l’Algérie auquel on n’a pas encore pensé, Brochure, Paris, Imprimerie d’Édouard Bautruche (Gallica).
3. Dans La Seconde Semaine, cité par Yvonne Bellenger, « Sur “Les Colonies“ de Du Bartas », dans Michel Balard (dir.), État et colonisation au Moyen-Age, Lyon, Ed. La Manufacture, 1989.
4. Cité par Ginette & Georges Marty, Dictionnaire des chansons de la Révolution, Paris, Tallandier, 1988.
5. Cité par le colonel-marquis de Bartillat, Coup d’œil sur la campagne d’Afrique en 1830 et sur les négociations qui l’ont précédée, avec les pièces officielles dont la moitié était inédite, Paris, chez Delaunay & Dentu, Libraires au Palais-Royal, juin 1831 (ouvrage paru sans nom d’auteur. Le même Bartillat publiera en 1832, sous son nom, une Relation de la campagne d’Afrique).
6. Le Temps, 18 novembre 1931.
7. « Résister, et aussi retrouver la voie qui, par l’accord, mène à la paix », Revue de l’Union française, mai 19471.
8. Cité par Zahir Ihaddaden, « La désinformation pendant la guerre d’Algérie », dans Jean-Charles Jauffret & Maurice Vaïsse (dir.), Militaires et guérilla dans la guerre d’Algérie, Bruxelles, Ed. Complexe, 2001.
9. Discours, Paris, Salle Wagram, 27 janvier 1956, repris sous le titre « Le colonialisme est un système », Les Temps Modernes, mars-avril, in Situations, Vol. V, Colonialisme et néo-colonialisme, Paris, Gallimard, NRF, 1964.Publié le 11 novembre 2014 -
We must understand Syria as a popular struggle despite its complications (Socialist Resistance)
Joseph Daher reports: The popular uprising in Syria approaches its sixth year, but the debate among the networks, associations, political parties, and individuals that make up the political left is ongoing.Alarmingly, some sections of leftist discourse on the Syrian revolution often emulate the rhetoric offered by the mainstream bourgeois, media, and even extreme right-wing groups. For example, writing for The Guardian in September 2013, Slovenian philosopher Slavoj Žižek characterized the Syrian uprising as a “pseudo struggle.” As he wrote: “there are no clear political stakes, no signs of a broad emancipatory-democratic coalition, just a complex network of religious and ethnic alliances over-determined by the influence of superpowers.”In an interview with RT a year earlier, journalist Tariq Ali similarly declared that what we are witnessing in Syria is “a new form of re-colonization by the West, like we have already seen in Iraq and in Libya.” In Ali’s view, Many of the people who first rose against the Assad regime in Syria have been sidelined, leaving the Syrian people with limited choices, neither of which they want: either a Western imposed regime, composed of sundry Syrians who work for the western intelligence agencies, or the Assad regime.
Others, like veteran journalist Seymour Hersh, described the uprising in overly-simplistic terms as a near conspiracy to “destabilize Syria” that was planned at the time of George W. Bush’s presidency and continued into President Barack Obama’s term.
Political figures like former British Member of Parliament, George Galloway, have supported anti-war movements like Stop the War Coalition, but have also defended Bashar Al-Assad’s criminal regime on many occasions. In 2013, for instance, Galloway declared that Assad is “quite a man” because “he opposes Israel, Britain, America and Qatar.“
These are only a sampling of the many left-wing figures who analyze the Syrian revolutionary process using a “top-down” approach. They characterize the popular Syrian uprising in Manichean terms as an opposition between two camps: the Western states, the Gulf monarchies, and Turkey (the “aggressors”) on one side, and Iran, Russia, and Hezbollah (the “resistance”) on the other. In so doing, they ignore the popular political and socio-economic dynamics at the grassroots level. Moreover, they often focus disproportionately on the dangers of ISIS while ignoring the role the Assad regime played in its rise. These discrepancies must be addressed within leftist circles and movements.
Authoritarianism and Popular Resistance
Citing the expansion of ISIS and other extremist forces, some sections of the left claim Syria is no longer experiencing a revolution, but, rather, is in the grips of a war of conspiratorial proportions. Because of this, they argue, we must “choose a camp,” in order to find a concrete solution to the conflict. In effect, this means we must throw our support behind Assad and his allied Iranian and Russian forces. Tareq Ali declared, for example, at a rally in 2015 that “If you want to fight ISIS, you should be going in and fighting alongside Russia and alongside Assad.”
Sadly, baseless discourse like this became particularly prominent after the Paris attack in November 2015, when ISIS affiliates killed nearly 140 Parisians in an act of terrorism. After the attack, many in the West began advocating for a “global war against ISIS.” Those on the left and right alike argued for the need to collaborate with the Assad regime, or at least seek a solution in which the Assad dynasty remains in control of the country.
Those, like myself, who oppose this outlook are charged with being idealistic. Our critics tell us we must take “more realistic” approaches toward Syria, in order to save lives.
What these individuals fail to appreciate, however, is that it is not enough to destroy ISIS. Brute military force alone only ensures that other militant groups will take its place, as al-Qaida in Iraq demonstrates. Real solutions to the crisis in Syria must address the socio-economic and political conditions that have enabled the growth of ISIS and other extremist organizations.
We have to understand that ISIS’s expansion is a fundamental element of the counter-revolution in the Middle East that emerged as the result of authoritarian regimes crushing popular movements linked to the 2011 Arab Spring. The interventions of regional and international states have contributed to ISIS’s development as well. Finally, neo-liberal policies that have impoverished the popular class, together with the repression of democratic and trade union forces, have been key in helping ISIS and Islamic fundamentalist forces grow.
The left must understand that only by ridding the region of the conditions that allowed ISIS and other Islamic fundamentalist groups to develop can we resolve the crisis. At the same time, empowering those on the ground who are fighting to overthrow authoritarian regime and face reactionary groups is part and parcel of this approach.
Complex Dynamics
The revolutionaries in Syria who are struggling for freedom are not unlike the revolutionaries in Tunisia, Bahrain, Libya, Egypt, and elsewhere, who oppose both the authoritarian regimes that brutalize them and the fundamentalists who reject meaningful notions of freedom and liberty.
This popular resistance has been the most neglected aspect of the Syrian uprising. Since the revolution began, Syria has witnessed remarkable levels of self-organization—more than any other country in the region faced with similar circumstances.
It is true that the uprising’s militarization has impacted this self-organization. Indeed, the war’s evolution has stifled the space for mass demonstrations and civic engagement, which was common during the uprising’s early years. Remnants of the original revolution still exist, however, in the form of democratic and progressive movements, which have consistently opposed all counter-revolutionary elements, including the Assad regime and extremist forces. Far from being dead, these popular forces made themselves and their democratic aspirations known in February 2016. Following the partial cessation of Russian and regime airstrikes, hundreds of civil demonstrations occurred throughout liberated areas of Syria. The chants and flags of extremist forces were notably absent from these protests.
Among the civic initiatives in Syria, citizen-driven local councils, elected or established on consensus, exist in some regions and provide services to the local population. It is not a coincidence that the free regions of Aleppo and Douma, both run by local councils, are among the most brutalized targets of regime and Russian bombing. That these areas represent democratic alternatives, apart from the regime and fundamentalist movements, is something Assad and his allies fear.
Local councils are not the only civic organizations that have been established during the conflict. The Syrian Civil Defense, commonly known as the White Helmets, works to save victims of airstrikes and deliver public services to nearly 7 million people. Other popular organizations have also undertaken a range of activities and campaigns around education, health, human rights, and empowering women, to name a few. These include Women Now For Development, Keshk, The Day After Tomorrow, the Fraternity Center, and Raqqa Is Being Slaughtered Silently, among others.
There has also been a surge of free and democratic newspapers and radio stations in the country, especially in liberated areas. Examples of these include Arta FM, Syrian Media Action Revolution Team (SMART), ANA Press, Enab Baladi, and Souriatna.
It is imperative for leftists to appreciate these realities, and separate the aspirations of besieged Syrians from those of international and imperialist actors. Approaching Syria from a “bottom-up” rather than “top-down” perspective can help with this.
Imperialism at Work
It is important to remember that, even though conflicting interests exist between international and regional powers that are intervening in Syria, none of these actors care about the uprising or the revolutionaries. Instead, they have attempted to undermine the popular movement against Assad and successfully worked to strengthen sectarian and ethnic tensions in the country. These intervening forces have, for example, helped stabilize the Assad regime in order to oppose Kurdish autonomy (in Turkey’s case) and to defeat extremist groups such as ISIS (in the case of the United States).
The intervening powers are united in their opposition to popular struggle. They seek to impose the status quo at the expense of the interests of the working and popular classes. This is precisely why viewing the Syrian revolution only through the lens of imperialist competition and geo-political dynamics will not suffice. This lens inherently obscures the political and socio-economic frustrations endured by the Syrian population that sparked the uprising.
The Enemy at Home
Some sections of the left and anti-war movements, especially in the UK and the United States, have refused to act in solidarity with the Syrian uprising under the pretext that“the main enemy is at home.” In other words, it is more important to defeat the imperialists and bourgeoisie in our own societies, even if that means implicitly supporting the Assad regime or Russian state.
Among these sections of the left, communist thinker Karl Liebknecht is frequently cited. Liebknecht is famous for his 1915 declaration that “the enemy is at home,” a statement made in condemnation of imperialist aggression against Russia led by his native Austria–Germany. In quoting Liebknecht, many have decontextualized his views. From his perspective, fighting against the enemy at home did not mean ignoring foreign regimes repressing their own people or failing to show solidarity with the oppressed. Indeed, Liebknecht believed we must oppose our own ruling class’s push for war by “cooperating with the proletariat of other countries whose struggle is against their own imperialists.”
Among many Western leftists, there has been neither cooperation with the Syrian people nor collaboration with like-minded anti-war movements. They also have failed to oppose the policies of their own bourgeois states in crushing the revolution in Syria.
The left must do better. Solidarity with the international proletariat means supporting Syrian revolutionaries against various international and regional imperialists forces, as well as the Assad regime, all of which are trying to put an end to a popular revolution for freedom and dignity. No leftist organizations or anti-war movements today can ignore the necessity of supporting people in struggle, while opposing all foreign interventions (international and regional), especially from our own governments.
Re-Orienting the Left
The role of progressives and leftists today is not, contrary to suggestions from figures like Ali and Higgins, to choose between two imperialist or “sub-imperialist” forces that compete for political gains and the exploitation of resources and peoples. It is, instead, to support the popular struggle, which very obviously exists in Syria. To do otherwise not only undermines that struggle, but also ignores the fact that progressive forces must always support the interests of the working and popular classes. To choose one kind of imperialism or authoritarianism over another is to guarantee the stability of the capitalist system and the exploitation and oppression of peoples.
This is why, when activists demonstrate in front of Russian embassies throughout the world to demand an end to Russian bombing of the Syrian people, we should not problematize or refer to their actions as “fuelling anti-Russian sentiment.” As argued by Alex Kokcharov, principal Russia analyst at the research center IHS Country Risk, “Russia’s priority is to provide military support to the Assad government and, most likely, transform the Syrian civil war from a multi-party conflict into a binary one between the Syrian government and jihadist groups like the Islamic State.” This means, the vast majority of Russia’s air strikes do not target ISIS at all.
In Solidarity
As leftists, our support must go to the revolutionary people struggling for freedom and emancipation. Only through their own collective action can the Syrian people achieve their goals. This concept, which is at the heart of revolutionary politics, faces profound skepticism from some sections of the left. This should not prevent us, however, from building our solidarity on this basis.
As Liebknecht said: “Ally yourselves to the international class struggle against the conspiracies of secret diplomacy, against imperialism, against war, for peace within the socialist spirit.” We can exclude none of these elements from our struggle to build a progressive leftist platform on the Syrian conflict.
-
For a genuine anti-imperialism (ISO)
-
PST (Algérie)
Kamel Aissat, de
Kamel Aissat, de la direction nationale du Parti Socialiste des Travailleurs (PST) est l'invité de l’émission Tamoughli W-Assa (KBC)
Le débat portera essentiellement sur les derniers événements qui ont touché le centre du pays, notamment la wilaya de Béjaia. L’émission sera diffusé jeudi 5 janvier 2017,a partir de 20H15,soyez au rendez-vous!
Parti Socialiste Des Travailleurs
-
Retraite, éducation, pouvoir d’achat, santé… Les attentes du front social (Algeria Watch)
Implications de la loi de finances, projet de code du travail, retraite... l’année qui s’ouvre sera l’occasion pour les syndicats de réitérer les revendications restées en suspens.
Une réunion de l’intersyndicale autonome est prévue pour le 7 janvier avec à l’ordre du jour la loi sur la retraite principalement. Le Conseil des lycées d’Algérie (CLA), partenaire du groupement d’une quinzaine de syndicats autonomes, s’attend à «un bras de fer entre le mouvement social et le gouvernement».
«Chacun tient à ses positions. Le gouvernement veut faire passer une politique antisociale et les syndicalistes la rejettent énergiquement. Si nous acceptons la loi sur la retraite, le gouvernement voudra sûrement faire passer son projet de code du travail», prédit Idir Achour. Selon le porte-parole du CLA, «la médiation n’a plus de sens». «Les Algériens se rendront vite compte dès le premier mois de 2017 qu’il leur est impossible de boucler sereinement leur budget malgré les sacrifices. On ira à terme vers l’explosion sociale, sauf si le gouvernement décide de réviser ses positions», affirme-t-il.
Le gouvernement compte reprendre langue avec le partenaire social. Une réunion est ainsi programmée demain entre la ministre de l’Education nationale et les syndicats de son secteur. «La réunion vient en application de l’instruction du Premier ministre envoyé à Mme Benghabrit pour associer dans la prise de décision les syndicalistes du secteur social. Mais il y a là un dilemme. En juillet 2016, nous avons appelé le Premier ministre à un dialogue, dans le cadre de l’intersyndicale, sans l’obtenir.
Ce même responsable instruit sa ministre de nous recevoir», s’étonne Boualem Amoura, secrétaire général du Syndicat autonome des travailleurs de l’éducation et de la formation (Satef). Le syndicaliste regrette les reculades de Mme Benghabrit sur les réformes promises (enseignement du secondaire et baccalauréat, rythme scolaire). «La ministre est venue pleine de bonne volonté pour engager des réformes. Elle a subi des pressions qui l’ont contrainte à s’adapter.
Elle aurait pu engager la réforme du secondaire avant celle de l’examen du baccalauréat. Le dossier du rythme scolaire finalisé et remis le 22 mai 2011 aurait pu aussi être adopté pour nous éviter les problèmes des congés», détaille le syndicaliste. M. Amoura reproche aussi à la ministre de passer leurs «caprices» aux élèves. «Il ne faudra pas s’étonner de voir les élèves sortir pour exiger le ‘seuil’ et de ne pas passer l’examen durant le Ramadhan», craint-il. Le Satef appréhende, par ailleurs, la rentrée scolaire prochaine, avec le départ massif des personnels, tous corps confondus, principalement les enseignants.
«Il y aura un déficit de 70 000 enseignants à la rentrée scolaires 2017-2018. Actuellement, le ministère puise dans les listes d’attente. Il y aura une catastrophe, si le ministère et le gouvernement ne prennent pas leurs dispositions à temps. Les pouvoirs publics doivent anticiper et faire des projections», relève-t-il.
Revendications maintenues, solutions reportées
Le président du Syndicat national des praticiens de santé publique (SNPSP) réitère, lui aussi pour cette année, les mêmes revendications formulées par son syndicat, qui vient de tenir son congrès. Le Dr Lyes Merabet annonce la tenue de la réunion du bureau national pour discuter de la situation professionnelle et débattre des dossiers en suspens ; il assure que «la relation avec la tutelle n’est pas au beau fixe». Plusieurs dossiers sont en suspens à cause du refus de l’administration de répondre aux revendications du SNPSP.
Le syndicat réclame ainsi l’amendement de certains articles du décret exécutif 09-393 de 2009 portant statut particulier des praticiens médicaux généralistes de santé publique. Il exige la classification des nouveaux diplômes (dentistes et pharmaciens) sur la grille des salaires de la Fonction publique. «Les étudiants en chirurgie dentaire et pharmacie sont en grève depuis deux mois. Ils sont en pourparlers avec le ministère mais il semble que les discussions n’ont pas abouti. Depuis 2012, le cursus de ces étudiants a été allongé de cinq à six ans. Il y a eu aussi la création d’un nouveau diplôme, le doctorat de pharmacie et de médecine dentaire. Les anciens praticiens sont toujours dans la catégorie 13.
On se retrouve ainsi avec deux diplômes pour une même spécialité», regrette Dr Merabet. Le syndicat réitère sa position concernant le projet de la loi sur la santé reporté en appelant à la prise en charge des propositions du SNPSP à travers un débat sérieux. Tout en réaffirmant sa solidarité avec l’intersyndicale pour l’abrogation de la loi sur la retraite, le syndicaliste dénonce l’entrave au droit syndical et au droit de grève par la menace et les pressions exercées sur les délégués syndicaux.
Ferguenis Nabil, chargé de communication à la fédération éducation du Snapap, regrette que les relations avec les partenaires sociaux soient tendues, surtout après l’adoption de la loi de finances. «La situation s’aggrave de jour en jour avec cette loi de finances qui s’attaque directement à la poche des travailleurs et du citoyen algériens avec une augmentation des prix. Dommage dans notre pays, on a que lutte et résistance», regrette M. Ferguenis, dont le syndicat est intégré à la Confédération générale des travailleurs (CGTA), initiatrice d’une action de protestation des communaux prévue le 4 janvier.
Nadir IddirEl Watan, 2 janvier 2017
-
Tunisie: Plusieurs mouvements de protestations prévus dans différentes régions à partir de 03 janvier ( El Huff')
Des mouvements de protestation seront organisés dans toutes les régions et tous les secteurs à partir du 3 janvier, a annoncé lundi la coordination des mouvements sociaux dans un communiqué.
La forme et la date de chaque protestation sera fixée en fonction de la nature du mouvement et de la région, précise-t-on de même source.
Contacté par l’agence TAP, un représentant de la coordination, Abdelhalim Hamdi, détenteur d’une maitrise en Histoire et au chômage depuis 17 ans, a affirmé que ces mouvements interviennent à la suite d’autres formes de protestation et à de multiples grèves de la faim, sit-in et manifestations. Le dernier en date est, a-t-il rappelé, est le rassemblement observé devant l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP), le 10 décembre dernier, pour contester le projet de budget de l’Etat jugé “austère” et “inéquitable” vis-à-vis des opprimés et des régions marginalisées.
Il s’agit, a-t-il dit, d’une nouvelle escalade des protestations qui se poursuivent depuis près d’un an dans les régions, devant les délégations et les mairies, et qui seront réunies sous forme de journées de protestation à partir du 3 janvier.
Une imposante marche sera organisée, mardi, à Menzel Bouzayane (Sidi Bouzid), et s’étendra aux autres gouvernorats qui choisiront, chacun, une date symbolique pour revendiquer ses droits, a-t-il encore expliqué.
La coordination appelle les acteurs sociaux, la population et les politiques à la mobilisation pour dénoncer le “feuilleton des procès” intentés à l’encontre des mouvements sociaux au cours de ce mois de janvier, et défendre les objectifs de la Révolution, à savoir la dignité, l’emploi et le développement.
02/01/2017
-
Béjaia (PST)
Les émeutes d'aujourd'hui à Béjaia, et dans d'autres localités, à l'instar de Ain Beniane et Bainem à Alger, répondent à des rumeurs et à des appels anonymes, s'adressant particulièrement aux commerçants et non pas aux travailleurs, aux étudiants et les autres forces sociales organisées.
Ainsi, ce ne sont pas les syndicats,les partis, les associations et autres organisations du mouvement social qui sont à la tête de ce mouvement. C'est un mouvement sans organisation, donc inorganisé. Aussi, ces appels anonymes ne proposent pas des revendications concrètes et précises. La dénonciation de la vie chère est vague. Il n'est pas proposé par exemple le retrait de telle ou telle disposition de la loi de finances 2017. C'est un mouvement sans programme concret.
UN MOUVEMENT SANS ORGANISATION ET SANS REVENDICATIONS CLAIRES NE PEUT PAS REUSSIR.
Certes, la situation est explosive. La cascade des attaques contre le pouvoir d'achat des travailleurs et des pauvres gens est inacceptable. L'explosion du chômage et de la précarité sociale est inacceptable. Leur loi de finances, leur futur code du travail, leur projet de loi sanitaire sont inacceptables. Et la liste est longue. Mais, on ne peut pas se passer de l'organisation et de la clarté du projet.
Les jeunes émeutiers de Béjaia et d'ailleurs dénoncent le mal de vivre, la misère et l'autoritarisme du pouvoir.
Leur violence exprime avant tout leur raz le bol et leur désespoir face à la violence économique et sociale de la politique libérale. Bien sur, on est contre la destruction de nos biens publics, on est contre toutes les violences et toutes les oppressions.
Mais, les jeunes qui se battent aujourd'hui, quelques soient les manipulations réelles ou supposées, ont besoin de nous tous.
Nous les militants pour les libertés démocratiques et la justice sociale, nous les militants contre la dictature libérale d'une minorité de riches, nous les militants pour l'égalité et la fraternité entre les êtres humains. Alors, construisons une convergence entre ces jeunes révoltés contre l'oppression et le mouvement des luttes des travailleurs et des syndicats, des chômeurs et des femmes. Construisons l'organisation et le projet politique unitaires qui nous manquent.
Parti Socialiste Des Travailleurs
-
Syrie Les femmes de la Révolution
Ajoutée le 3 janv. 2017Zein Al sham is one of the women documented in the Syria Rebellious Women series. She was forced to evacuate her sieged city Aleppo at the end of last year, she was one of the latest to leave.
زين واحدة من النساء اللواتي تتناول سلسلة "الثائرات" حكايتها٫ بقيت زين في حلب حتى آخر قافلات التهجير لتجبر أخيراً علي مغادرتها لإدلب.
www.zaina-erhaim.com