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Les pertes de l’armée syrienne créent des remous au sein du camp pro-Assad (France 24)
Où sont-ils?
Les pertes récentes de bases militaires syriennes au profit des jihadistes ont provoqué une vague de critiques sans précédent dans les rangs des inconditionnels du clan Assad. Au point d’être réprimés à leur tour.
"Où sont-ils ?" En intitulant ainsi une campagne lancée sur les réseaux sociaux, Moudar Hassan Khaddour, un activiste pro-Assad, semble avoir posé la question de trop. Il demande en fait au régime syrien de faire la lumière sur la mort de centaines de soldats loyalistes.
Selon des proches et des militants, cet avocat issu de la communauté alaouite, celle du président Bachar al-Assad, a été arrêté le 29 août à Damas par les services secrets les plus redoutés par la population, à savoir ceux de l’armée de l’air syrienne. Ces derniers lui auraient tendu un piège : ils l'auraient convoqué en lui promettant de fournir des informations sur les soldats disparus pour les transmettre à leurs parents.
Les pro-Assad somment le régime de s’expliquer
En réclamant des comptes, Moudar Hassan Khaddour a donc fini par irriter les caciques du régime. Il les avait déjà interpellé sur sa page Facebook "Les aigles de Tabqa", créée le 17 août en hommage aux soldats de la base aérienne de Tabqa (nord), tombée depuis le 24 août aux mains de l’organisation de l’État islamique (EI). La grande majorité des ces soldats avait alors été exécutée sommairement.
Moudar Hassan Khaddour s’était notamment indigné de la légèreté des explications officielles sur les pertes élevées subies depuis plus d’un mois par l’armée syrienne. Il avait même qualifié le ministre de la Défense, le général Fahd al-Freij, de "ministre de la mort". Entre juillet et août, au moins 2 350 soldats ont ainsi péri dans les combats en Syrie, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), une ONG basée à Londres et proche de l’opposition. L'activiste avait notamment laissé entendre que la base stratégique de Tabqa avait été abandonnée par le régime.
De leur côté, les médias du régime avaient évoqué un repli tactique. Mais cette version a ensuite été mise à mal avec la publication par les jihadistes de vidéos montrant l’humiliation puis l’exécution des soldats de la base aérienne.
Depuis, les messages de soutien réclamant la libération de l’avocat pro-régime s’accumulent sur sa page Facebook. "Moudar Khaddour n’est pas un traître. Ni un collaborateur. Ni un terroriste", est-il notamment écrit sur le réseau social. Les militants qui ont pris le relais de l’avocat pour alimenter la page en question ont même appelé le président syrien à intervenir et à le faire libérer.
Parallèlement, toujours sur les réseaux sociaux, les opposants du régime ironisent sur le "réveil tardif" des partisans du pouvoir, qui découvrent ses mensonges et ses arrestations arbitraires. "Enfin vous voyez que votre régime arrête les gens à cause de leurs opinions", écrit l’un deux sur la page "Les aigles de Tabqa".
Les critiques se multiplient
Cette affaire a de quoi inquiéter le régime syrien, peu friand des critiques internes, et qui tolère encore moins celles venues des rangs de ces inconditionnels, censés lui être les plus fidèles. Outre Moudar Hassan Khaddour, quatre autres partisans alaouites du régime ont ainsi été arrêtés après avoir critiqué le pouvoir et tenté d’organiser des manifestations pour réclamer la démission du ministre de la Défense, a rapporté mardi l'OSDH. Trois d'entre eux ont été arrêtés à Lattaquié et un à Tartous, deux fiefs du président Assad situés dans l'ouest de la Syrie.
Pis, la semaine dernière, Douraid al-Assad, le propre cousin du président syrien, a lui aussi publiquement critiqué sur sa page Facebook la perte de la base de Tabqa. "Je demande la démission du ministre de la Défense, du chef d’État-major, du commandant des forces aériennes, du ministre de l’Information et de quiconque est responsable de la chute de l’aéroport militaire de Tabqa et porte la responsabilité de la capture et de l'assassinat de centaines de soldats de l'armée arabe syrienne", a écrit le fils de Rifaat al-Assad, frère cadet de l’ancien président syrien Hafez al-Assad (1930-2000), banni par le régime et qui vit désormais en exil.
Cette vague de critiques coïncide avec la montée en puissance de l’EI en Syrie, qui inquiète les fidèles du régime, sur lesquels s’appuie pourtant le président pour s’accrocher au pouvoir et se fournir en soldats. Et si la responsabilité de Bachar al-Assad n’a jamais été pointée du doigt directement, nul n’ignore dans le pays que dans les faits, le ministre de la Défense ou le chef d’État-major n’ont aucun pouvoir réel. Finalement, ces critiques, qui émanent du propre camp du président syrien, visent directement le sommet du régime. Dernière modification : 03/09/2014
Première publication : 03/09/2014
http://www.france24.com/fr/20140903-syrie-pro-assad-alaouites
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Code du travail: l’UGTA dit “non” (Liberté Algérie)
Caricature: L'UGTA n'est pas considérée comme très virulente!Libertés syndicales, CCD, Travail des enfants
Les syndicalistes considèrent que le nouveau projet portant sur le code du travail est en recul en termes de droits des travailleurs.
Les fédérations syndicales, affiliées à l’UGTA, s’opposent au projet de code du travail proposé par le gouvernement.Lors d’une rencontre tenue hier à la Maison du peuple, les responsables des fédérations, en l’absence du patron de la Centrale syndicale, ont jugé ce nouveau code liberticide, voire contre-révolutionnaire, dans la mesure où il remet en cause la participation des travailleurs, notamment dans les conseils d’administration où la parole leur serait interdite, selon le projet de code.
L’introduction des CDD est jugée comme un recul consacre la précarité du travail. Les responsables des fédérations UGTA ont estimé que les futurs détenteurs de CDD auront du mal à bénéficier de nombreux avantages, à l’image des crédits à la consommation. Selon eux, les banques hésiteraient à donner des crédits aux détenteurs de contrats de travail à durée limitée. Autre recul relevé par les fédérations : le projet de code du travail mentionne le travail des enfants dans certains secteurs.
Les fédérations ont présenté leurs propositions et exprimé leur opposition au projet de code tel que présenté et qui contient quelque 660 articles. Trois commissions spécialisées (juristes, universitaires et syndicalistes) ont été mises en place pour décortiquer le projet. Une mouture de synthèse devrait être adoptée prochainement.
Par ailleurs, les fédérations ont débattu de la question de l’abrogation de l’article 87 bis. Pour Achour Felli, l’incidence financière de cette application se situerait autour de 2 400 milliards de dinars. Son application devrait toucher les travailleurs aux bas salaires, ceux situés entre les échelles 1 et 5. Mais, selon lui, tous les travailleurs de la Fonction publique devraient être touchés. Il dira que l’application de cet article induira une augmentation de la masse salariale de l’ordre de 10 à 15%.
Cette réunion, pour rappel, se tient à la veille de la tenue du congrès de l’UGTA où Abdelmadjid Sidi-Saïd s’apprête à briguer un troisième mandat, malgré l’opposition de certains anciens cadres syndicaux, emmenés par Ahmed Badaoui. Ces derniers reprochent au patron de la Centrale syndicale, non seulement la gestion des très convoités fonds sociaux, mais aussi l’argent des cotisations des syndicalistes.Par : Azzeddine Bensouiah Actualité Jeudi, 04 Septembre 2014 09:50
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Vous ne pouvez pas comprendre l'État islamique sans connaître l'histoire du Wahhabisme en Arabie saoudite (Le Huffington Post)
L'irruption spectaculaire de l'Etat islamique (EI) sur le devant de la scène irakienne a surpris nombre d'observateurs occidentaux.
Sa violence et son pouvoir d'attraction chez les jeunes Sunnites en déconcertent et en horrifient plus d'un. L'ambivalence de l'Arabie saoudite face à ce phénomène, d'autant plus inquiétante et inexplicable, pose la question de savoir si les Saoudiens comprennent que l'EI est également une menace pour eux.
Même aujourd'hui, les dirigeants du royaume semblent divisés. Certains se réjouissent que EI combatte le "feu" des Chiites iraniens par celui des Sunnites, qu'un nouvel Etat sunnite prenne forme au cœur de ce qu'ils tiennent pour des terres historiquement sunnites, et que la stricte adhérence à l'idéologie salafiste de l'EI s'apparente à celle que pratiquent les Saoudiens.
D'autres, plus pessimistes, gardent en mémoire la révolte des Wahhabites de l'Ikhwan contre Abd-al Aziz (précisons que l'Ikhwan en question n'a aucun lien avec l'organisation éponyme des Frères musulmans, et que cet article fait exclusivement référence à la milice wahhabite, N.d.a.) qui a failli marquer la fin de ce mouvement et celui de la dynastie saoudienne à la fin des années 1920.
D'autres encore s'inquiètent des doctrines radicales de l'EI, et commencent à remettre en question certains aspects de la politique et du discours saoudiens.
LA DUALITÉ SAOUDIENNE
Les dissensions internes et les tensions saoudiennes autour de l'EI ne se comprennent qu'à travers le prisme de la dualité historique inhérente (et tenace) au cœur de la doctrine du royaume.
Un élément dominant de l'identité saoudienne est directement lié à Muhammad ibn ʿAbd al-Wahhab (fondateur du wahhabisme), et à l'application de sa doctrine radicale puritaine d'exclusion par Ibn Saud (qui n'était alors qu'un chef de tribu parmi d'autres quand les Bédouins se faisaient continuellement la guerre dans le désert impitoyable du Nejd).
Le deuxième élément de cette dualité étonnante est incontestablement dû à la création d'un État souverain par le roi Abd-al Aziz dans les années 1920 : il a réprimé la violence de l'Ikhwan (afin de pouvoir instaurer des relations diplomatiques avec la Grande-Bretagne et les Etats-Unis) et institutionnalisé l'élan initial wahhabite - en prenant opportunément le contrôle du robinet à pétrodollars dans les années 1970 afin de rediriger les excès de l'Ikhwan vers les pays étrangers - par le biais d'une révolution culturelle, plutôt que par une révolution violente de l'ensemble du monde arabe.
Cette "révolution culturelle" n'avait rien d'un mouvement réformiste bénin. C'était une révolution fondée sur la haine quasi-jacobine d'Abd al-Wahhab envers la putrescence et le déviationnisme qu'il percevait autour de lui, ce qui explique ses appels à purger l'Islam de toutes ses hérésies et idolâtries.
LES IMPOSTEURS MUSULMANS
L'écrivain et journaliste américain Steven Coll a expliqué comment Abd al-Wahhab, disciple austère et dogmatique du savant Ibn Taymiyyah (XIVe siècle), méprisait "la noblesse égyptienne et ottomane bien comme il faut, prétentieuse, fumeuse de tabac et de haschisch, qui traversait l'Arabie en jouant du tambour pour aller prier à La Mecque".
Aux yeux d'Abd al-Wahhab, ces gens-là n'étaient pas des Musulmans, mais des imposteurs. Il ne portait pas non plus les Bédouins du coin en très haute estime. Ils l'agaçaient en honorant des saints, en érigeant des pierres tombales, et en se montrant "superstitieux" (ils allaient notamment se recueillir sur des tombes ou des lieux qu'ils estimaient sacrés).
Pour Abd al-Wahhab, ce genre de comportement était "bida", une hérésie.
Comme Taymiyyah avant lui, Abd al-Wahhab pensait que le séjour du prophète Mohammed à Médine correspondait à un idéal de société musulmane (la "meilleure de tous les temps") que tous les Musulmans devraient s'efforcer de retrouver (c'est, à peu de choses près, la définition du salafisme).
Taymiyyah avait déclaré la guerre aux Chiites, aux Soufis et aux philosophes grecs. Il avait également condamné les pèlerinages sur la tombe du prophète et les festivités liées au jour de sa naissance, estimant qu'ils ne faisaient qu'imiter les rites idolâtres chrétiens. Abd al-Wahhab s'était emparé de ces théories initiales, déclarant que quiconque ne respecterait pas à la lettre cette interprétation de l'Islam devrait "craindre pour ses biens et pour sa vie".
L'un des principes fondamentaux de la doctrine d'Abd al-Wahhab se retrouve dans le takfîr. Ce texte permettait à Abd al-Wahhab et ses disciples de décider qui, parmi leurs coreligionnaires, méritaient d'être considérés comme des infidèles s'ils empiétaient de quelque manière que ce soit sur la souveraineté absolue du roi. Abd al-Wahhab dénonçait les Musulmans qui vénéraient les morts, les saints ou les anges. Il estimait que ces croyances les détournaient de l'indispensable soumission totale envers Dieu, et Lui seul. L'Islam wahhabite interdisait donc les prières aux saints et aux morts, les pèlerinages sur les tombes et les mosquées, les festivals religieux qui honoraient les saints, la célébration de la naissance du prophète Mohammed, et même l'utilisation de pierres tombales.
"Ceux qui ne se conforment pas à cette interprétation doivent être tués, leurs femmes et leurs filles, violées, et leurs biens, confisqués".
Abd al-Wahhab exigeait que l'on se conformât, de manière physique et tangible. Il pensait que chaque Musulman était tenu de faire serment d'allégeance à un chef unique (un calife, le cas échéant). "Ceux qui ne se conforment pas à cette interprétation doivent être tués, leurs femmes et leurs filles, violées, et leurs biens, confisqués", écrivait-il. La liste des apostats condamnés à mort incluait des Chiites, des Soufis et des Musulmans d'autres confessions, qu'Abd al-Wahhab ne considérait pas comme des vrais musulmans.
De ce point de vue, il n'y a aucune différence entre le wahhabisme et l'EI. La rupture ne s'est faite que plus tard, au moment de l'institutionnalisation de la doctrine de Muhammad ibn ʿAbd al-Wahhab ("Un seul chef, un seul pouvoir, une seule mosquée", les trois piliers du wahhabisme dans lesquels on s'accorde à voir le roi d'Arabie saoudite, le pouvoir absolu de la religion d'Etat, et son contrôle sur "le verbe", c'est-à-dire la mosquée).
C'est cette rupture - le refus de reconnaître ces trois piliers, sur lesquels repose entièrement le pouvoir sunnite - qui fait de l'EI une grave menace pour l'Arabie saoudite, bien que l'organisation se conforme par ailleurs en tout point au wahhabisme.
PETIT COURS D'HISTOIRE (1741-1818)
Les positions extrémistes d'Abd al-Wahhab finirent par le condamner à l'exil et, en 1741, après une longue errance, il trouva refuge auprès d'Ibn Saud et de sa tribu. Dans le discours novateur d'Abd al-Wahhab, Ibn Saud percevait un moyen de rejeter les traditions et conventions arabes, et de s'emparer du pouvoir.
"Leur stratégie - comme l'EI aujourd'hui - était d'asservir les peuples des territoires conquis, de préférence par la terreur."
Le clan d'Ibn Saud, paré de la doctrine d'Abd al-Wahhab, pouvait désormais se livrer à ce qu'il avait toujours fait, c'est-à-dire au pillage des villages alentour. Affranchi du cadre de la tradition arabe, il se revendiquait à présent du jihad. Ibn Saud et Abd al-Wahhab avaient également réintroduit le concept du martyr dans le jihad, puisqu'il leur assurait l'accès immédiat au Paradis.
Dans les premiers temps, ils s'emparèrent de quelques communautés et y imposèrent leur loi (les habitants avaient un choix - des plus limités - entre la conversion au wahhabisme ou la mort). Dès 1790, l'Alliance contrôlait la quasi-totalité de la péninsule arabe et menait des expéditions répétées contre Médine, la Syrie et l'Irak.
Leur stratégie - comme l'EI aujourd'hui - était d'asservir les peuples des territoires conquis, de préférence par la terreur. En 1801, ils attaquèrent la ville sainte de Karbala, en Irak, et se livrèrent aux massacre de milliers de Chiites, hommes, femmes et enfants. De nombreux sanctuaires chiites furent détruits, y compris celui de l'imam Hussein, le petit-fils assassiné du prophète Mohammed.
Décrivant la situation, le lieutenant britannique Francis Warden écrivit : "Ils ont totalement dévasté Karbala, pillé la tombe d'Hussein (...) et massacré plus de cinq mille personnes en une seule journée, avec une cruauté extraordinaire..."
Osman Ibn Bishr Najdi, l'historien du premier Etat saoudien, détailla les circonstances de ce massacre : "Nous nous sommes emparé de Karbala, dont nous avons massacré les habitants. Les survivants ont été réduits en esclavage, à la grâce d'Allah, Seigneur de l'univers. Nous sommes fiers de ce que nous avons accompli, et nous disons aux infidèles qu'ils subiront le même sort."
En 1803, Abdul Aziz entra dans la ville sainte de La Mecque, dont les habitants, cédant à la terreur et à la panique, s'étaient rendus (la même chose allait se produire à Médine). Les partisans d'Abd al-Wahhab détruisirent plusieurs monuments historiques, ainsi que toutes les tombes et sanctuaires qu'ils contenaient. A l'issue des combats, des siècles d'architecture islamique avaient été réduits en poussière près de la Grande Mosquée.
Mais, en novembre de la même année, un Chiite assassina le roi Abdul Aziz pour se venger du massacre de Karbala. Le fils de la victime, Saud bin Abd al Aziz, lui succéda et poursuivit sa conquête de l'Arabie. Les chefs ottomans ne pouvaient cependant plus se contenter de voir leur Empire grignoté peu à peu. En 1812, l'armée ottomane, composée d'Egyptiens, reprit Médine, Djeddah et La Mecque. En 1814, Saud bin Abd al Aziz mourut des suites d'une forte fièvre. Son malheureux fils, Abdullah bin Saud, fut emmené de force à Istanbul, où il fut exécuté d'une manière particulièrement horrible : un visiteur de passage explique l'avoir vu traîné dans les rues d'Istanbul trois jours durant, avant d'être pendu puis décapité. Sa tête fut ensuite tirée par un canon, tandis que son cœur était extirpé et planté sur sa dépouille.
En 1815, les forces wahhabites furent écrasées par les Egyptiens (sous les ordres des Ottomans) lors d'une bataille décisive. Trois ans plus tard, les Ottomans s'emparèrent de la capitale wahhabite, Dariya, qu'ils détruisirent entièrement. Le premier Etat saoudien avait vécu. Les quelques survivants se retirèrent dans le désert, où ils ne firent plus parler d'eux jusqu'au XXe siècle.
L'HISTOIRE SE RÉPÈTE AVEC L'EI
Il est aisé d'imaginer la façon dont la création d'un Etat islamique dans les frontières de l'Irak contemporaine peut être perçue par ceux qui connaissent de l'Histoire de cette région. La philosophie du wahhabisme du XVIIIe siècle, loin de s'éteindre à Nejd, a ressurgi dans les décombres de l'Empire ottoman suite au chaos de la Première guerre mondiale.
La dynastie Al Saud - sous sa forme contemporaine - était conduite par le laconique Abd-al Aziz, habile politicien, qui sut unir les différentes tribus bédouines et instauré l'Ikhwan saoudien, dans l'esprit des combattants prosélytes d'Abd-al Wahhab et Ibn Saud.
L'Ikhwan était une réincarnation de l'ancienne mouvance cruelle et semi-indépendante, composée de fervents "moralistes" wahhabites armés, qui avaient réussi à conquérir l'Arabie au début du XVIIIe siècle. Encore une fois, les militants réussirent à s'emparer de La Mecque, Médine et Djeddah entre 1914 et 1926. Mais Abd-al Aziz comprit rapidement que ses intérêts étaient incompatibles avec le jacobinisme révolutionnaire de l'Ikhwan. Les rebelles se révoltèrent, faisant plonger la région dans une guerre civile qui dura jusque dans les années 1930, quand le roi les fit passer par les armes.
Pour Abd-al Aziz, les vérités simples des précédentes décennies n'étaient plus d'actualité. Du pétrole venait d'être découvert dans la péninsule. La Grande-Bretagne et les Etats-Unis le courtisaient, mais continuaient à soutenir Sharif Husain, seul souverain légitime. Les Saoudiens avaient besoin d'élaborer une nouvelle approche diplomatique.
Le wahhabisme, mouvement djihadiste révolutionnaire empreint de pureté théologique, fut donc contraint de devenir un mouvement socialement, politiquement, théologiquement et religieusement conservateur, justifiant de faire allégeance à la famille royale saoudienne et au pouvoir absolu du roi.
LA FORTUNE PÉTROLIÈRE RÉPAND LE WAHHABISME
L'aubaine pétrolière permit aux Saoudiens, selon les termes du politologue français Gilles Kepel, de répandre le wahhabisme à travers le monde musulman, de "wahhabiser" l'Islam, et de réduire ainsi la multitude des courants de cette religion à un principe unique transcendant les divisions nationales. Des milliards de dollars furent -- et continuent à être -- investis dans cette forme de puissance par cooptation.
Ce sont ces sommes étourdissantes -- et l'enthousiasme des Saoudiens à faire coïncider les intérêts de l'Islam sunnite avec ceux des Etats-Unis, tout en répandant le wahhabisme dans les sphères éducatives, sociales et culturelles islamiques -- qui ont créé les conditions d'une dépendance de l'occident envers l'Arabie saoudite, dépendance qui perdure depuis la rencontre entre Abd-al Aziz et Roosevelt sur un navire de guerre américain ramenant le président de la conférence de Yalta.
Les Occidentaux ont regardé le Royaume, et ils ont vu des richesses innombrables, une apparente modernité et une influence autoproclamée sur l'ensemble du monde musulman. Ils ont choisi de croire que le Royaume allait succomber aux impératifs du monde moderne, et que la gestion de l'Islam sunnite aurait également un effet positif.
"D'un côté, l'EI est profondément wahhabite. De l'autre, son ultraradicalisme ne s'apparente pas à ce mouvement. On pourrait l'envisager comme un retour de balancier face au wahhabisme moderne."
Mais l'idéal religieux de l'Ikhwan saoudien ne s'est pas éteint dans les années 1930. Il a battu en retraite tout en maintenant son emprise sur certains des rouages du système, ce qui explique la dualité que nous observons aujourd'hui dans l'attitude des Saoudiens envers l'EI.
D'un côté, l'EI est profondément wahhabite. De l'autre, son ultraradicalisme ne s'apparente pas à ce mouvement. On pourrait l'envisager comme un retour de balancier face au wahhabisme moderne.
L'EI est un mouvement "post-médinien" : il cherche à imiter les deux premiers califes, plutôt que le prophète Mohammed, et il refuse de reconnaître la légitimité du régime saoudien.
Pendant que la monarchie saoudienne se boursouflait à l'ère du pétrole, le message de l'Ikhwan a gagné du terrain (en dépit de la campagne de modernisation du roi Faisal). La "méthode Ikhwan" a bénéficié -- et bénéficie encore -- du soutien d'hommes et femmes influents, et de cheikhs. D'une certaine façon, Oussama ben Laden était l'incarnation parfaite de cette méthode.
Aujourd'hui, le travail de sape de l'EI contre le royaume saoudien n'est pas perçu comme un problème, mais comme un retour aux véritables origines du projet wahhabite saoudien.
En laissant les Saoudiens gérer la région avec eux tandis qu'ils s'adonnaient à leur nombreux projets (contrer les influences socialistes, ba'athistes, nasséristes, soviétiques et iraniennes), les Occidentaux ont révélé leur vision de l'Arabie saoudite -- richesse, modernisation et position dominante -- mais choisi d'ignorer l'élan wahhabite.
Car, pour les services de renseignement occidentaux, les mouvements islamistes les plus radicaux étaient les mieux placés pour éreinter l'URSS en Afghanistan, et renverser les chefs d'Etat et les pays de la région qui n'avaient plus les faveurs de l'Occident.
Au regard de ces éléments, pourquoi sommes-nous étonnés de voir émerger un mouvement révolutionnaire ultraviolent sur les ruines du corps expéditionnaire du Prince Bandar, mandaté par l'Occident et l'Arabie saoudite pour porter secours aux rebelles syriens dans leur combat contre le président Assad ? Et pourquoi sommes-nous étonnés -- quand on connaît un peu le wahhabisme -- de constater que les rebelles "modérés" en Syrie sont une denrée inexistante ? Comment a-t-on pu penser que le wahhabisme radical engendrerait un mouvement modéré ? Ou que la doctrine "Un seul chef, un seul pouvoir, une seule mosquée : soumettez-vous ou préparez-vous à mourir" pourrait conduire à la modération et à la tolérance ? A moins que nous n'ayons tout simplement pas réfléchi.
Publication: 04/09/2014 06h10 CEST Mis à jour: il y a 5 heures
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Syrie. Un «accord» qui traduirait un mépris continu pour ceux et celles qui luttent contre Da’ech et Bachar (A l'Encontre)
La menace que l’Etat islamique (Da’ech) fait aujourd’hui peser en Irak et en Syrie a finalement contraint les Etats-Unis et les Etats démocratiques à prendre la mesure des dangers auxquels les exposait leur indifférence prolongée pour les souffrances du peuple syrien.
Alors qu’ils pourraient être obligés de sortir bientôt de leur indécision, principale raison de leur immobilisme, il est cocasse de lire ou d’entendre des hommes politiques, des députés, des chercheurs et des experts suggérer à ces mêmes Etats de faire confiance, s’ils devaient intervenir en Syrie, au… Costa Concordia!
Comme cet ex-fleuron de la marine de plaisance, Bachar al-Assad, au profit duquel ils plaident explicitement ou implicitement en dressant de lui un tableau flatteur déconnecté de la réalité, ne se maintient à la surface depuis la fin de l’année 2012 que grâce aux énormes flotteurs qu’ont constitué pour lui les milliers de mercenaires recrutés du Liban à l’Afghanistan, avec l’aide de l’Iran dans l’ensemble du monde chiite [1]. En dépit de leur taille, ces adjuvants inélégants risquent d’être bientôt insuffisants pour empêcher le navire de sombrer, les défaites militaires consécutives subies par les forces du pouvoir provoquant des remous et des critiques contre le capitaine du bateau, dont les compétences sont mises en doute à haute voix par des membres mêmes de son équipage.
Brefs rappels adressés aux «chantres de la victoire» de Bachar
A ceux qui, pour influencer les arbitres de la situation en faveur de leur poulain, affirment que les forces de Bachar al-Assad sont dans «une dynamique de victoire» et qui se déplacent d’une chaîne de radio à l’autre en chantant sur l’air des lampions «Bachar il a gagné, Bachar il a gagné», on rappellera brièvement que:
1°désignée objectif prioritaire après la reconquête de Qousseir, au début du mois de juin 2013, la ville d’Alep reste en majorité entre les mains de l’Armée syrienne libre et de ses alliés;
2° la prise de Yabroud n’a nullement mis fin à la résistance du Qalamoun, dans lequel les groupes armés font subir au Hizbollah et à l’armée régulière de lourdes pertes, les morts seuls se comptant par centaines;
3° en dépit de bombardements quotidiens et du recours à des gaz asphyxiants, les forces pro-régimes ne sont pas encore parvenues à s’emparer de certains quartiers de Damas et de quelques agglomérations du gouvernorat de Damas campagne, auxquelles elles n’ont d’autre solution que de proposer des trêves;
4° les «rebelles» ont progressé ces dernières semaines dans le gouvernorat de Daraa, en dépit des difficultés qu’ils rencontrent dans leurs relations avec le Front de Soutien (Front Al-Nosra);
5° Le régime est en passe d’être chassé de celui de Qouneitra et en particulier de la zone tampon avec les forces israéliennes;
6° après la prise de Morek, les révolutionnaires avancent aujourd’hui dans le gouvernorat de Hama en direction de son aéroport militaire;
7° l’aéroport de Deïr al-Zor est désormais sous la menace directe d’une opération de l’Etat islamique qui mettrait fin à toute présence du régime dans ce gouvernorat aussi…
Au cours des mois de juillet et d’août 2014, l’Etat islamique s’est emparé des dernières implantations de l’armée régulière dans le gouvernorat de Raqqa, capturant et exécutant dans la foulée plus d’un millier de soldats et d’officiers, dans une stratégie de terreur destinée à démontrer tout à la fois sa force, sa résolution et son impunité. Or, si la cruauté manifestée à cette occasion par le groupe radical a choqué l’ensemble des Syriens, elle est aussi à l’origine de critiques extrêmement sévères de partisans inconditionnels du pouvoir en place contre les plus hauts responsables de l’Etat-major et de la Défense.
Elles visent en réalité, sans pouvoir la nommer, la personne même de Bachar al-Assad, commandant en chef de l’Armée et des Forces armées syriennes, qui porte la responsabilité de toutes les décisions politiques, sécuritaires et militaires en Syrie. Elles témoignent d’une perte de confiance dans les rangs des soutiens traditionnels du régime, qui prennent enfin conscience que leur vie et celle de leurs proches comptent peu pour celui dont la seule préoccupation, en dépit de l’accumulation des morts et de l’aggravation quotidienne des destructions, est de se cramponner ad vitam aeternam à son poste et à ses privilèges.
La cousine de Bachar, Falak al-Assad, s’interroge publiquement
La première salve de critiques ou du moins la plus bruyante a été tirée après la chute du camp de la 17e division entre les mains de Da’ech, le 24 juillet. Ce qui a particulièrement attiré l’attention, c’est qu’elle était l’œuvre d’une parente du chef de l’Etat, sa cousine Falak al-Assad, fille de Jamil al-Assad et d’Amina Aslan. Mariée à un autre cousin, Qousaï Ali Aslan, elle a laissé libre cours à sa colère le 26 juillet, au lendemain de la diffusion par Da’ech d’une photo montrant le cadavre décapité du colonel Samir Aslan, l’un de ses cousins par alliance, qui était à la fois le chef de la Sécurité militaire à Raqqa et l’officier responsable de la 17e Division.
Elle écrivait: «A quelques jours de distance, chute du champ pétrolier d’al-Cha’er et désastre de la 17ème Division… Ces jours ont suffi pour mettre en lumière l’extrême faiblesse des responsables militaires, sécuritaires et médiatiques, qui ne pensent à rien d’autre qu’à se remplir les poches, fut-ce au détriment du sang des martyrs… Où sont les grands chefs militaires? Cela faisait 2 ans que la division était encerclée. Da’ech avait annoncé qu’elle s’en emparerait avant la fête… Où sont passés le soutien, les avions, les armes stratégiques? A moins que leur rôle se réduise à récupérer et à voler? La sécurité n’a-t-elle pour mission que de rechercher ceux qui ont fait l’objet de rapports, de poursuivre les détenteurs de dollars et de les rançonner, à inventer des histoires et à terroriser les simples citoyens et les commerçants, à faire du business et de la contrebande dans les ports et les aéroports? Si les fils de responsables se trouvaient avec leurs camarades au service de la Patrie, nous l’aurions certainement déjà emporté… Il n’y aura de victoire que lorsque des hommes honorables seront installés aux postes de décision».
Son exaspération envers les responsables militaires, dont l’incompétence ou la corruption avaient contribué à l’issue dramatique des combats pour la possession du camp, était justifiée par les interrogations sur les circonstances exactes de sa capture et le sort de ses occupants.
Pourquoi le régime n’avait-il pas répondu aux appels à l’aide lancés par les officiers qui savaient l’attaque imminente? Pourquoi les bombardiers du régime avaient-ils interrompu leurs vols de soutien après quelques passages, au cours de la journée du 24 juillet, tirant davantage sur la ville de Raqqa que sur les forces de Da’ech? Comment une petite centaine d’officiers et de soldats étaient-ils parvenus à gagner à pied le casernement du 93ème régiment, à près de 45 kilomètres, alors que la région est tenue et quadrillée par le groupe radical? Le camp abritant quelque 1500 militaires au moment de sa capture, qu’était-il advenu de ceux dont les noms ne figuraient ni parmi les victimes (105), ni parmi les rescapés (97) ?
Malaise dans la famille: le silence s’impose
Une autre salve est venue d’un autre cousin du chef de l’Etat, Douraïd al-Assad, dont le père n’est autre que Rifaat al-Assad et dont la mère appartient à la famille Makhlouf. Il a lui aussi laissé éclater son irritation en réclamant sur sa page Facebook, le 28 août 2014, au lendemain de la chute de la base de Tabqa, dernière emprise du régime dans le gouvernorat, «la mise à pied du ministre de la défense, celle du chef d’état-major, celle du commandant des forces aériennes, celle du ministre de l’Information, et celle de tous ceux qui sont impliqués dans la chute de l’aéroport militaire de Tabqa et qui portent la responsabilité de la capture et de l’assassinat de centaines de soldats de l’armée arabe syrienne. Ils doivent être déférés devant une cour spéciale».
Le nom même de Bachar al-Assad n’a évidemment été mentionné ni par l’un, ni par l’autre de ses cousins. Mais le destinataire ultime de leurs messages d’insatisfaction ne fait aucun doute. Lorsqu’ils demandent le limogeage du général Fahd al-Freij, le ministre de la Défense surnommé par les partisans du régime «ministre de la Mort», et le renvoi du général Ali Abdallah Ayyoub, le chef d’état-major, ils sont bien placés pour savoir que les intéressés n’ont «aucun pouvoir et ne peuvent prendre une décision de quelque importance sans en référer au chef suprême des Armées, Bachar al-Assad, qui détient seul, avec les chefs des services de renseignements, la capacité de décider». (All4Syria). La personne du chef de l’Etat étant sacrée et celle de ses collaborateurs devant être au minimum ménagée, ils ne peuvent faire plus, pour exprimer leur désarroi ou leur colère, que de s’en prendre à ceux qui sont là pour prendre les coups et servir de «décor».
Bachar al-Assad n’étant disposé à entendre aucune critique sur ses décisions, une telle dénonciation n’est malgré tout pas sans danger… quand elle provient d’ailleurs que du sein de sa famille. On l’a vu ces tout derniers jours avec le sort réservé à l’un des initiateurs d’une campagne destinée à demander aux responsables du pays, sous le titre #waïnoun (Où sont-ils?), de répondre aux légitimes interrogations des parents sur le sort de leurs proches, présents dans le gouvernorat de Raqqa, lors de la chute des derniers bastions gouvernementaux. Ils avaient envisagé d’organiser une marche de soutien aux disparus et à leurs familles, mardi 26 août, mais ils y ont finalement renoncé sous la pression des moukhabarat. Ceux-ci n’en ont pas moins sanctionné l’un d’entre eux, un dénommé Moudarr Hassan Khaddour, un chabbiha connu pour son attachement au régime, qui a été enlevé vendredi 29 août 2014 par les services de renseignements de l’armée de l’air et qui a depuis lors disparu…
Et, pour montrer qu’il n’entend se laisser guider sa conduite par personne, et surtout pas par le fils d’un oncle dont il craint également les ambitions et le retour, Bachar al-Assad a reconduit à son poste le ministre de la Défense contesté, en bonne position dans l’ordre protocolaire dans le nouveau gouvernement du Dr Wa’el al-Halqi !
Sa gestion est visée, dans les rangs de ses partisans
Il n’y a pas lieu de douter que c’est bien la gestion du successeur de Hafez al-Assad qui est aujourd’hui en cause, au sein même de ses partisans les plus résolus, parce que c’est à lui qu’ils imputent, in fine, l’accumulation des «pertes inutiles» dans les rangs de l’armée et que c’est son action en tant que chef suprême des forces armées qui est aujourd’hui l’objet de leur défiance.
Un exemple
Le 27 août, les habitants du village d’al-Hounadi, dans le gouvernorat de Lattaquié, ont chassé de chez eux un membre du Commandement régional du Parti Baath, Yousef al-Ahmed. Il n’est pas inutile de savoir qu’il est parent par alliance du chef de l’Etat dont il a épousé l’une des cousines, Raw’a al-Assad, une autre fille de Jamil al-Assad. Tant qu’il s’est contenté de leur présenter les condoléances des autorités pour la mort au combat d’un membre d’une famille locale tué par Da’ech lors de la «livraison» de Raqqa au groupe extrémiste, et aussi longtemps qu’il a disserté sur les thèmes de la résistance et du nationalisme chers à la propagande du régime, ils l’ont écouté en silence. Mais lorsqu’il a observé que «8000 jeunes réservistes de Lattaquié s’étaient abstenus de répondre à l’appel, en plus des réfractaires au service militaire obligatoire», et quand il leur a demandé de «coopérer avec le régime en envoyant leurs enfants à l’armée», un vieillard est intervenu pour déclarer: «Lorsque tu enverras ton fils comme réserviste, nous ferons de même. Je souhaite que les prochaines condoléances nous réunissent autour de l’un de tes enfants ou de tes frères, de manière à ce que tu puisses bénéficier toi aussi des mérites attachés au martyre»! Pour échapper à la colère des assistants que ces propos avaient déclenchée et pour ne pas entendre les insultes proférées contre lui-même et la famille Al-Assad tout entière, Yousef al-Ahmed a préféré s’éclipser sous la protection de ses gardes du corps…
Alors que le nombre exact des militaires disparus au combat – 70 000? 100 000? – est soigneusement dissimulé par la hiérarchie militaire, que celle-ci hésite ou temporise avant de rendre à leurs familles les dépouilles des soldats décédés, et qu’elle préfère parfois enterrer les victimes dans des fosses communes pour bénéficier temporairement du bénéfice du doute, les partisans du régime s’étonnent de plus en plus souvent du grand nombre de décès intervenus dans certaines familles depuis le début de la répression du mouvement de protestation, comparativement à d’autres. Ils estiment que la mort de Hilal al-Assad, disparu à Lattaquié le 23 mars 2014 dans des circonstances jamais vraiment élucidées, ne suffira pas à démontrer que la famille Al-Assad dans son ensemble a payé le «prix du sang» et donné des gages de son patriotisme, alors que d’autres familles alaouites, comme les Moalla par exemple, se passeraient bien de pleurer la disparition de plusieurs dizaines de morts entre officiers et soldats du rang.
Les partisans du régime se gaussent ou s’irritent aussi du peu de considération de Bachar al-Assad pour les familles de victime. Tandis qu’il prétend les «dédommager», tantôt en leur offrant deux têtes de chèvres, tantôt en leur octroyant un petit Suzuki, tantôt en leur distribuant du riz et du bourghoul, tantôt en leur proposant une kolaba, un kiosque ou une échoppe, Asma al-Akhras son épouse paraît soucieuse de profiter de sa réception des mères de martyrs pour soigner son image. Toujours vêtue à la dernière mode de la tête aux pieds et soigneusement manucurée, elle semble afficher des sentiments de compassion artificielle et donne à penser que «les soldats de la Patrie se sacrifient chaque jour pour défendre son élégance et son apparence et pour lui offrir l’occasion de montrer toutes les chaussures qu’elle possède». Mais «les membres de la communauté alaouite ne savent sans doute pas que ses chaussures valent 1000 dollars et plus, soit 147 000 livres syriennes, pour ne rien dire de ses habits qui dépassent allègrement cette somme».
Un autre exemple
Les habitants des villages de Qamhaneh et Erza, considérés comme de véritables «repaires de chabbiha», ont récemment accueilli le colonel des services de renseignements de l’armée de l’air Souheïl al-Hassan surnommé le «Tigre», nouveau responsable des opérations militaires dans le gouvernorat de Hama, au cri de «notre vie, notre sang, nous le donnerons pour toi ô Souheïl».
Cette formule est totalement iconoclaste en Syrie pour tout autre que le chef de l’Etat, auquel elle est strictement réservée, et où elle peut mettre en danger immédiat de mort celui qui ne peut manquer d’être dès lors considéré comme un concurrent… Surtout quand elle inspire l’ouverture de pages Facebook destinées à susciter des amis à celui qu’elles présentent comme «le Tigre de Syrie»… dans une allusion évidente à Bachar al-Assad, «le Lion de Syrie». Pour avoir laissé percer ses ambitions de devenir président à la place du président, Rifaat al-Assad a été banni de son pays par son frère Hafez en 1985. Pour avoir mal dissimulé les siennes, Asef Chawkat, qui n’était qu’une pièce rapportée et n’était pas suffisamment protégé par son mariage avec Bouchra al-Assad, a été supprimé par son beau-frère, Bachar al-Assad, dans l’attentat du siège du Bureau de la Sécurité nationale, en juillet 2012…
Aigreur dans la «communauté alaouite»
D’autres problèmes que le nombre croissant des morts irritent aujourd’hui la communauté alaouite.
Le premier est celui que pose la prolifération des armes dans la région côtière. Certes, les alaouites avaient besoin d’être protégés contre les raids éventuels de groupes combattants, nationalistes et surtout islamistes. Mais, au lieu de confier cette mission aux militaires, traditionnellement qualifiés en Syrie de «Protecteurs des maisons» – avant le soulèvement – le pouvoir a opté pour la distribution massive de fusils, voire de fusils d’assaut, à ses fidèles. Mais, en équipant inconsidérément des civils de tous âges, auxquels l’Association caritative al-Bustan de Rami Makhlouf et les branches locales du Parti Baath ont distribué plus de 100 000 armes dans les villes et un nombre encore supérieur dans les villages, le pouvoir a favorisé l’anarchie. Il leur a donné les moyens de se dresser les uns contre les autres avec violence à la moindre occasion, par exemple pour le vol d’une tresse d’ail, et il a facilité la multiplication dans la région des crimes, des agressions, des enlèvements et des exactions en tout genre.
Il est aujourd’hui incapable de maîtriser une situation qui se traduit par l’apparition d’une quantité de «nouveaux chabbiha», lesquels profitent de la place laissée vacante par leurs prédécesseurs dans le métier, incorporés dans les Forces de défense nationale et mobilisés sur d’autres terrains d’action. Il a ouvert une boîte de pandore dont feront les frais ceux dont il prétendait assurer la sécurité, puisque certaines de ces armes ont été vendues et revendues, d’autres «perdues» et d’autres enfin dissimulées par leurs détenteurs, pour éviter de devoir les restituer quand elles leur seront réclamées.
Un second problème est l’indifférence manifestée par le régime pour le sort des familles de ses partisans prises en otage. Dans le nord du pays, seule une partie des femmes enlevées avec leurs enfants lors des opérations menées sur les hauteurs de Lattaquié, au début du mois d’août 2013 ont été aujourd’hui libérées. Une vingtaine d’entre elles, avec plus de trente enfant, restent à ce jour détenuespar le Front islamique. A Adraa, dans la grande banlieue de Damas, les femmes parentes de militaires ou de membre des Comités populaires enlevées à la mi-décembre 2013, n’ont toujours pas été concernées par des négociations, le régime espérant récupérer cette ville soit par un siège, soit par des bombardements. Dans les deux cas, les ravisseurs avaient proposé au pouvoir un échange de prisonnières, mais cette offre a été à chaque fois ignorée ou refusée.
Les menhebbakjis, les adorateurs de Bachar al-Assad, sont d’autant plus exaspérés par le pourrissement de cette situation qu’ils ont eu l’opportunité d’observer la différence de traitement par le régime de situations similaires.
1° Une solution a en effet été trouvée qui a permis, le 9 mars 2014, la libération des 13 religieuses du couvent orthodoxe de Mar Taqla, enlevées à Maaloula quelques mois plus tôt. Elles ont été remises aux autorités syriennes en échange de la libération de 153 femmes détenues à la prison civile d’Adra.
2° Un officier répondant au nom de Ghadir Youssef a été échangé, en avril 2014, contre une famille entière (un couple et ses deux enfants de moins de 2 ans), parce que son père, officier en poste à la Présidence, était parvenu à convaincre Salem al-Ali, conseiller du chef de l’Etat, d’obtenir une décision en ce sens du président ou du Conseil de Sécurité nationale.
3° Des Iraniens qui combattaient à Alep avec les forces du régime ont également été libérés par leurs ravisseurs en échange de la sortie de Homs de ses derniers défenseurs, au début du mois de mai 2014…
Mieux vaut donc, en Syrie, pour voir son sort pris en considération par les responsables, être chrétien ou Iranien, ou appartenir à une famille disposant d’accès au plus haut niveau. Ces éléments conduisent les alaouites à penser et à dire à présent de plus en plus ouvertement que, pour Bachar al-Assad, qui les recrute pour les envoyer au combat et pour protéger son pouvoir dans des affrontements dont il tient éloignés les membres de sa famille, ils ne sont guère plus que de la chair à canon.
Se résoudre à penser que c’est sur un tel chef qu’il faudrait s’appuyer pour lutter contre Da’ech et à un dirigeant aussi contesté que devrait profiter une intervention des Occidentaux en Syrie contre cette organisation, traduirait un manque singulier d’imagination. Elle serait surtout la preuve d’un immense mépris pour les milliers de Syriens qui, en ce moment, continuent de lutter à la fois contre le radicalisme de l’Etat islamique et le jusqu’au-boutisme de Bachar al-Assad.
(3 septembre 2014, publié sur le blog d’Ignace Leverrier; titre et intertitres de la rédaction A l’Encontre)
[1] The Fighting shiite militias in Syria. http://sn4hr.org/public_html/wp-content/pdf/english/shia’a-en.pdf
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Nouveautés sur "Lutte Ouvrière"
Israël-Palestine : l'annexion lente de la Cisjordanie
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Droit de grève : ce qui va changer (Liberté Algérie)
Le nouveau projet de Code du travail prévoit des restrictions
Le nouveau code du travail est finalement dévoilé. Le projet de loi élaboré par le département du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale risque de provoquer un bras de fer, notamment concernant le droit de grève.
Dans la loi soumise à débat, “le droit de grève” n’est pas clairement remis en cause, mais le législateur a mis des balises qui rendent compliqué l’exercice de ce droit. Dans le volet obligations des travailleurs, outre celles déjà prévues par la législation en vigueur, l’accent est particulièrement mis, dans le texte, sur l’exercice du droit de grève qui devient de plus en plus canalisé.Ainsi, il sera désormais fait obligation aux travailleurs observant un mouvement de grève d’assurer le service minimum, de se soumettre à toute réquisition des autorités compétentes, de ne pas entraver la liberté de travail (qui sera considérée comme une faute professionnelle grave).
Selon le nouveau projet, les travailleurs sont désormais soumis “à l’obligation de se soumettre à la réquisition des autorités compétentes” en cas de grève.
Selon l’article 352, le refus d’exécuter un ordre de réquisition constitue une faute professionnelle grave. Les rédacteurs du document ajoutent un nouveau concept qui peut prêter à confusion, à savoir “le droit au travail”. Selon l’article 344, l’entrave à la liberté de travail est punie par la loi. Dans l’article qui suit, soit le 345, il est dit que “l’occupation par des travailleurs en grève de locaux professionnels de l’employeur est interdite quand elle a pour objet de constituer une entrave à la liberté du travail”. Est-ce à dire que le piquet de grève est interdit sur le lieu du travail ? Cette “entrave à la liberté du travail” fait partie des motifs justifiant le licenciement.
Le nouveau texte élargit également le champ d’application des domaines touchés par “le service minimum”.Ainsi, les enseignants “qui dispensent des programmes pédagogiques des examens à caractère national” sont touchés par l’obligation d’observer le service minimum (article 348). Le refus par un travailleur concerné d’assurer le service minimum auquel il est astreint constitue une faute professionnelle grave.
Par ailleurs, il est clairement stipulé que durant les journées de grève, le salarié “n’a pas droit à une rémunération”.Un article susceptible de dissuader les salariés qui auront recours à la grève. À signaler aussi l’article 353 qui précise les domaines d’activité où le recours à la grève est interdit, à l’instar des agents actifs des douanes.
Les entraves aux libertés syndicales ont de tout temps été dénoncées par les syndicalistes.Les dispositions contenues dans le nouveau projet de loi de code du travail risquent encore d’exacerber les tentions entre les syndicats et les pouvoirs publiques.
Par : Said SMATI
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Maroc: Amnesty international condamne l'interdiction d'un camp de jeunesse (Al Huff')
Un Camp de jeunesse d’Amnesty International est organisé chaque année au Complexe Moulay Rachid de la Jeunesse et de l’enfance à Bouznika. Cependant, les autorités marocaines ont décidé d'interdire la 16e édition de cet évènement. Une décision qu'Amnesty International regrette.
L'information a été confirmée par une dépêche de l'agence Maghreb Arabe Presse. Amnesty n'aurait pas respecté les démarches adéquates à l'organisation du Camp de jeunesse. Une déclaration que l'ONG dément et dénonce.
En effet, dans un communiqué publié mardi, Amnesty International indique avoir procédé à toutes les démarches prévues par la loi marocaine dans la préparation de cet évènement, et plus particulièrement l’article 3 du décret royal relatif aux rassemblements publics qui prévoit que toute réunion publique soit notifiée aux autorités locales, et non une autorisation préalable.
Amnesty a indiqué que le camp se proposait de débattre des moyens d’enrayer la torture et les mauvais traitements ainsi que les restrictions sur la liberté d’expression et la capacité des défenseurs des droits humains à entreprendre leurs activités pacifiques et légitimes.
La décision des autorités marocaines serait donc contraire aux lois du pays. Elle représenterait, dans ce cas, une violation des libertés de réunion et d'association, ce qui est contraire aux engagements internationaux du Maroc, rappelle l'ONG.
L'interdiction du Camp de jeunesse ne trouve donc aucune justification légale. Amnesty International a décidé de solliciter des autorités compétentes. Par ailleurs, les jeunes participants ont décidé de lancé le 'camp de jeunesse virtuel ouvert' pour "coordonner la mobilisation face aux défis de violations des droits de l'homme dans la région et dans le monde", pour contourner la "censure". HuffPost Maghreb | Par Sarah Ben Romdane
Publication: 03/09/2014 13h09 -
Les Palestiniens demandent à l’ONU la fin de l’occupation israélienne d’ici 3 ans (Afps)
La direction palestinienne veut faire adopter par le Conseil de sécurité de l’ONU une résolution demandant la fin, d’ici trois ans, de l’occupation israélienne des territoires palestiniens, une initiative qui a toutefois peu de chances d’aboutir, a indiqué mardi une responsable de l’OLP.
"Nous allons rechercher une résolution au Conseil de sécurité avec une date précise pour la fin de l’occupation israélienne", a déclaré lors d’une conférence de presse à l’ONU à New York, Hanane Achraoui, membre de la direction de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP).
Interrogée sur le calendrier, elle a précisé que cette occupation devrait prendre fin "disons dans trois ans". Mais elle a reconnu que les Etats-Unis mettraient immédiatement leur veto à un tel texte. "Nous savons que les Etats-Unis peuvent utiliser leur veto au Conseil de sécurité et nous essayons de les convaincre d’entendre la voix de la raison", a-t-elle souligné. Elle a aussi évoqué la possibilité de faire adopter une résolution, qui serait non contraignante, à l’Assemblée générale de l’ONU.
Par ailleurs, Mme Achraoui a une nouvelle fois brandi la menace d’une saisine de la Cour pénale internationale (CPI), à laquelle les Palestiniens ont désormais accès, compte tenu de leur statut d’Etat observateur non membre à l’ONU, obtenu en 2012.
Cette initiative permettrait d’engager une action légale contre des responsables israéliens à propos de l’offensive menée par Israël dans la bande de Gaza.
Mme Achraoui n’a cependant pas donné de date pour une telle initiative. "Nous voulons traduire Israël devant la CPI", a-t-elle déclaré. "Nous n’avons pas de délai précis, nous avons un programme d’action".
L’Orient le Jour avec AFP, mercredi 3 septembre 2014
http://www.france-palestine.org/Les-Palestiniens-demandent-a-l-ONU