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  • Les palestiniens luttent pour leurs vies (A l’Encontre.ch)

    Protesters mark anniversary of Israeli occupation

    Israël se bat pour l’occupation

    Oui, c’est une guerre et le Premier ministre Benjamin Netanyahou, ayant reçu son mandat du peuple, a ordonné son intensification. S’il n’écoute pas les messages de conciliation et de tolérance du président palestinien Mahmoud Abbas lors de temps plus calmes, pourquoi devrait-il les écouter maintenant?

    Netanyahou intensifie la guerre principalement à Jérusalem-Est, avec une débauche de punitions collectives contre les Palestiniens. Il révèle ainsi le succès d’Israël à déconnecter physiquement Jérusalem de la plus grande partie de la population palestinienne, accentuant l’absence de la direction palestinienne à Jérusalem-Est et la faiblesse du gouvernement à Ramallah, qui tente d’empêcher que les choses ne partent à la dérive dans le reste de la Cisjordanie.

    La guerre n’a pas commencé jeudi dernier [1er octobre], elle n’a pas commencé avec des victimes juives et ne se termine pas lorsqu’aucun Juif n’est tué. Les Palestiniens luttent pour leur existence, dans le sens entier de ce mot. Nous, Juifs israéliens, nous battons pour nos privilèges en tant que nation de maîtres, dans l’entière laideur que possède ce terme.

    Le fait que l’on remarque qu’il y a une guerre uniquement lorsque des Juifs sont assas- sinés n’enlève rien au fait que les Palestiniens sont tués tout le temps, et que nous faisons toujours ce qui est en notre pouvoir pour rendre leurs existences insupportables. La plupart du temps il s’agit d’une guerre unilatérale, menée par nous, afin de faire en sorte qu’ils disent «oui» au maître, merci beaucoup de nous laisser en vie dans nos réserves [au sens de bantoustan]. Lorsque quelque chose cloche dans la guerre unilatérale et que des Juifs sont assassinés, c’est alors que notre attention s’éveille.

    Certains jeunes Palestiniens ne partent pas tuer des Juifs parce qu’ils sont Juifs, mais parce que nous sommes leurs occupants, leurs tortionnaires, leurs geôliers, ceux qui ont spolié leur terre et leur eau, ceux qui les ont fait s’exiler, ceux qui ont démoli leurs maisons, obstrué leur horizon. Certains jeunes Palestiniens, vengeurs et désespérés, sont prêts à perdre leur vie et à causer à leurs familles une grande douleur parce que l’ennemi auquel ils font face leur prouve, chaque jour, que son animosité n’a pas de limites.

    Même le langage est perfide. Les Juifs sont assassinés, les Palestiniens sont tués et meurent. En est-il ainsi? Le problème ne commence pas avec le fait que nous ne sommes pas autorisés à écrire qu’un soldat ou qu’un agent de police a assassiné des Palestiniens, à bout portant, lorsque sa vie n’était pas en danger, ou au moyen d’un système télécommandé ou encore à partir d’un avion ou d’un drone.

    Mais c’est une partie du problème. Notre compréhension est captive d’un langage censu- ré rétroactif qui distord la réalité. Dans notre langage, les Juifs sont assassinés parce qu’ils sont Juifs et les Palestiniens trouvent leur mort et leur souffrance, probablement parce que c’est ce qu’ils recherchent.

    Notre vue du monde est façonnée par la trahison constante des publications médiatiques israéliennes devant leur devoir de rapporter les événements, ou par leur manque de capacité technique et émotionnelle de contenir tous les détails de la guerre complète que nous menons afin de préserver notre supériorité sur la terre entre la rivière [le Jourdain] et la mer.

    Même ce quotidien [Haaretz] n’a pas les ressources économiques d’employer 10 journa- listes et de remplir 20 pages avec des rapports de toutes les attaques dans les moments d’escalade et de toutes les attaques de l’occupation durant les périodes de calme, de tirer lors de la construction d’une route qui détruit un village, et ce jusqu’à la légalisation d’un avant-poste de colonie; sans mentionner un million d’autres attaques. Chaque jour. Les exemples pris au hasard dont nous parvenons à rendre compte ne sont rien de plus qu’une goutte dans l’océan. Ils n’ont aucun impact sur la compréhension de la situation pour une ample majorité d’Israéliens.

    L’objectif de cette guerre unilatérale est de contraindre les Palestiniens à abandonner leurs revendications nationales à leur propre patrie. Netanyahou souhaite une escalade parce que l’expérience jusqu’ici a prouvé que les périodes de calme, après que le sang a coulé, ne nous ramènent pas au point de départ, mais plutôt à une nouvelle descente au plus bas du système politique palestinien tout en ajoutant des privilèges aux Juifs dans le Grand Israël.

    Les privilèges sont le facteur principal qui déforme notre compréhension de la réalité dans laquelle nous vivons. Ils nous aveuglent. A cause d’eux, nous échouons à concevoir que même avec une direction faible, «présente-absente», le peuple palestinien – éparpillé dans ses réserves d’Indiens – n’abandonnera pas et qu’il continuera de puiser la force nécessaire pour résister à notre domination. (7 octobre 2015) Par Amira Hass

    Article publié le 7 octobre 2015 sur le site du quotidien israélien Haaretz. Amira Hass est journaliste pour ce quotidien, elle a longtemps été correspondante à Gaza et dans les terri- toires occupés. Deux de ses livres ont été traduit en français, aux Editions La Fabrique, retraçant les conditions d’existence et les questions politiques des Palestiniens à Gaza et en Cisjordanie dans les années 1990 et le début des années 2000: Boire la mer à Gaza (2001) et Correspondante à Ramallah: 1997-2003 (2004)

    http://alencontre.org/moyenorient/palestine/israelpalestine-les-palestiniens-luttent-pour-leurs-vies-israel-se-bat-pour-loccupation.html

  • Pouvoir et société en Algérie Un tour d’horizon (Essf)

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    Pour les observateurs de la scène politique nationale, la guerre de succession qui n’en finit pas, polarise l’attention et annonce le crépuscule d’un système à bout de souffle.

    Le règne de Bouteflika, tire à sa fin. Une fin émaillée par des scandales qui éclaboussent pratiquement, toute la classe politique au pouvoir. Ce qui inaugure semble-t-il, tous les scénarios possibles, « d’une succession à haut risque ». Le statu-quo est devenu intenable et entre les clans en présence, il y a divergence sur les rythmes du changement et le choix des hommes.

    Le récent remaniement du gouvernement et le mélimélo qui en a suivi, a montré l’ampleur des désaccords. La stabilité est devenue le credo de toute la classe politique, justifiée par plus d’une décennie de violence et près de 200 000 morts. C’est cette quête obsessionnelle, qui est en fait génératrice de statu quo. Le pouvoir, assure ainsi sa pérennité. Il le fait, avec l’aide d’une opposition au garde-à-vous, une classe politique aphone et sans élites et qui ne cesse pas de faire amende honorable et un semblant de société civile sorti ex-nihilo et véritable pseudopode des associations officielles.

    L’idéologie, est consubstantielle à la référence religieuse et toute aspiration sociale au changement, soumet inévitablement le politique au religieux. La société, est complètement prise dans une ambiance religieuse surfaite et enveloppée d’ultra conservatisme et la création culturelle, est inhibée par les arrières pensées du discours politique officiel.

    La société, est régentée par un Etat Léviathan qui s’appuie sur une administration tentaculaire, une armée hyper équipée et des services de sécurité (et de renseignements), omnipotents et omniprésents dans la vie politique et sociale. Le pays, est entrain de payer le prix de son immobilisme, en fonçant droit dans le mur. Toutes les tentatives de réformes qui avait un caractère de véritable saupoudrage superficiel sur un système économique et politique devenu complètement obsolète, ont fait chou blanc. Le vrai problème, est dans l’acceptabilité sociale et politique des réformes qui sont décidées, en vase clos et sans associer les couches sociales concernées au premier abord. C’est toujours le pouvoir qui cherche à imposer les termes du consensus national.

    Le pouvoir en reste là, il a d’ores et déjà rejeté ou ignoré toutes les propositions émanant de la classe politique ou du moins celles susceptibles de construire un tel consensus. Brusquement, le pays est rattrapé par ses démons passés. La situation actuelle, a déjà poussé le gouvernement à envisager des coupes budgétaires et à gérer la situation au jour le jour. La solution à laquelle recourt le pouvoir, pour désamorcer relativement la situation, est apparemment celle du lifting de l’équipe gouvernementale. Les solutions ou les parties de la solution, ne sont plus détenues par le seul pouvoir.

    1. Le président conforte sa mainmise sur l’appareil du FLN, pour imposer une succession consensuelle.

    Le congrès du FLN, marque une nouvelle étape dans la réappropriation de l’appareil, par le clan présidentiel. Ceci, n’est pas nouveau, ces affrontements en son sein, se sont toujours exacerbés à l’approche d’une échéance importante. Le congrès, est une sorte de révélateur des rapports de force en présence. Les instances de direction issues de ses travaux (comité central, BP) laissent augurer d’une sorte de glissement droitier. Tout cela, a commencé du temps de Belkhadem (S’hab ech chkara)1 et cela continue avec Sâadani.

    Au-delà du grenouillage qui a dominé la préparation de ce dixième congrès et la volonté d’une aile de ce parti de « redresser » le clan Sâadani, l’actuel secrétaire général du FLN, cette droitisation marque une ouverture sur les classes moyennes et les milieux d’affaires qui consacre la tendance dominante du moment qui s’exprime par un glissement apparent mais pas décisif, du centre de gravité du pouvoir absolu de l’armée, vers le pouvoir de « l’argent ».

    Cette droitisation n’est par ailleurs pas propre à l’Algérie. Elle est un phénomène planétaire qui s’exprime par l’émergence des classes moyennes et supérieures, dans les mouvements protestataires, dans la participation aux élections et dans l’exercice du pouvoir. La participation de l’élément populaire, de ce point de vue, chiffres à l’appui,2 s’est de plus en plus amenuisée.

    Le triomphe de Sâadani, au 10e congrès, a confirmé l’emprise du clan présidentiel sur le pouvoir. Cela jette une lumière particulière, sur les mœurs d’une nomenklatura, complètement coupée de la société. Nul mieux que Sâadani, ne peut exprimer la promiscuité malsaine, unissant le monde de la politique à celui des affaires. Ce mélange inattendu de puissance et d’argent, est entrain de provoquer des reclassements, dont les dinosaures du parti en ont fait les frais3.

    C’est bel et bien, la fin de toute une époque pour le FLN, dépositaire du populisme national. Les délégués se sont accommodés de l’absence de tout débat contradictoire et de tout courant critique. Une seule ligne politique a prévalu, celle du secrétaire général sortant, dont la reconduction dès le premier jour, n’était un mystère pour personne. Comme pour le 9e congrès, le président, devant l’urgence de s’assurer un espace pour peser sur l’avenir immédiat et compte tenu des nouveaux rapports de force qui se dessinent autour des enjeux de pouvoir, ne veut plus s’embarrasser d’apparaître comme le président de tous les Algériens, au-dessus des luttes partisanes. Il est décidé de prendre part au débat qui concerne son propre avenir politique et de peser de toutes ses forces, en se réappropriant l’appareil du FLN.

    Le président par son message fort au congrès, a tenté de prendre date dans le débat désormais public, sur sa succession. Le 10e congrès, comme les congrès précédents (le 8e et le 9e), préfigure une longue et chaotique marche des dinosaures du parti, pour consacrer le retour nostalgique à l’ère du parti unique. Les luttes intestines entre apparatchiks, les affrontements violents qui ont vu le jour avant les assises, inaugurent un processus de déliquescence avancé où le vieux a servi à faire du neuf, pour faire taire au sein de l’appareil et en dehors, toutes les voix discordantes et en faire un instrument efficient, dans la guerre de position qui se déroule, en quête d’un nouveau consensus au sein du pouvoir.

    Pour Abdelhamid Mehri, figure charismatique du courant rénovateur du FLN, aujourd’hui disparue, le parti ne serait qu’ « un instrument de caution de la politique du pouvoir ». Il a à son actif, dans un passé récent depuis le 8e congrès, avec Abdelâaziz Belkhadem, la prise en charge de l’amendement de la constitution qui a mis fin à la limitation des mandats présidentiels et a inauguré l’ère de la présidence à vie. L’histoire récente et lointaine du pouvoir algérien, montre que le FLN, n’est qu’un appareil qui sert à mettre de l’ordre au sein des différentes fractions du pouvoir et à garantir des transitions en douceur. Dans l’ère Bouteflika, il est le cadre qui permet de donner une cohérence et de construire une assise, pour réaffirmer l’hégémonie d’une fraction sur une autre. A ce stade de la mutation du pouvoir, les catégories populaires « s’en sont écartés ou sont écartés ».

    Pour M. Harbi, même du temps de la guerre de libération, « si le FLN adopte une plate-forme qui consacre la primauté du politique, il la révise une année plus tard (1957 au Caire), sous la pression des « militaires ». Dans le cas du Vietminh, au Vietnam, ajoute-t-il, le politique est au premier plan. Dès le départ, « l’option d’une vision unitaire unanimiste, annonçait un néo autoritarisme, mélange d’archaïsme et de modernité, forcément répressif ». Pour M. Harbi, « les concepteurs de l’insurrection armée en novembre 1954, avaient une conception militaire de l’organisation politique et prêchaient à la fois, la prééminence absolue des dirigeants sur les dirigés et une vision unitariste de la société, pour restaurer l’Etat-nation »4.

    Dans le cadre de ce congrès, le commis de l’Etat, le chef du gouvernement Abdelmalek Sellal, qui garde encore la main, est adoubé par le FLN néo-affairiste. Il sort, selon beaucoup d’observateurs paradoxalement renforcé. De façon concomitante, presque synchronisée, il y a ce retour inattendu de l’homme par qui, tout arrive. Le retour triomphal d’Ahmed Ouyahya, intronisé à la tête du Parti du rassemblement démocratique (RND). L’homme n’est pas un inconnu. Il est, comme il le dit lui-même, « l’homme des sales besognes ». Sera-t-il l’homme du consensus, rien n’est moins sûr. Pour les clans en présence, c’est l’heure de la mise en ordre, pour préparer la succession. Un deal semble trouver entre les différentes factions, pour régler tout cela dans la cohérence et la discipline. Il s’agit d’abord, de sauver le système et de le pérenniser.

    Par petites touches, un nouveau dispositif, est mis en place. Un nouveau compromis, est né entre les sociétés économiques et le FLN, entre la présidence et le DRS, en vue d’échéances décisives. D’abord, cela donne à travers le 10e congrès du FLN qui marque une véritable normalisation et représente tout un symbole, presque une configuration nouvelle pour la période présente. Les assises du congrès, sans le soutien du DRS, ont été réglées « comme du papier à musique »5 et le président Bouteflika en sort renforcé, avec des prérogatives de président du Parti (et non de président d’honneur). Ces prérogatives laissent-elles, les coudées franches, aux membres du clan présidentiel, tel le nouveau militant du FLN, le chef du gouvernement Abdelmalek Sellal, le frère-conseiller ou son ami Ali Haddad ?

    Ce qui est clair, c’est que les résultats du congrès, s’inscrivent dans l’au-delà de 2019. Dans la foulée de ce congrès, est annoncée une réunion du conseil national du RND, un autre parti de l’alliance présidentielle où le secrétaire général Ahmed Bensalah, avec la sagesse qu’il arbore, a remis le tablier. C’est le tonitruant Ahmed Ouyahya, actuel directeur du cabinet du Président, qui reprend le flambeau, dans une opération là aussi, réglée de façon synchronisée. Les deux pôles de l’ancienne alliance présidentielle (FLN, RND), préconisent chacun à sa manière qui, une nouvelle alliance avec peut-être le MSP d’un hamas (islamistes modérés) rénové, de TAJ (rassemblement pour la justice) et du MPA (mouvement pour l’Algérie), pour Ouyahya, qui, un front le plus large possible, avec l’opposition qui apporte son soutien au Président, pour Sâadani. Au bout du compte à l’arrivée, on a un président plus fort que jamais, malgré sa maladie. Après 16 ans de règne, il devient un président entier (4/4). Il contrôle le gouvernement, les deux chambres du parlement, le conseil constitutionnel et même l’armée. Même les redresseurs du FLN, se réclament du président qui lui, bénéficie du soutien sans faille de l’UGTA et d’autres syndicats.

    En quinze ans de règne, Bouteflika, s’est adjugé le soutien sans faille du FLN et la docilité de tout l’appareil de l’administration. Il a développé avec beaucoup de rouerie, ses réseaux d’influence dans la société dite civile mais qui ne sont en fait, que les associations irriguées par l’aide publique et au sein des confréries religieuses qui apportent caution et dévotion à l’image d’un président qui se veut enraciné, dans l’humus de l’islam populaire. C’est se tromper, que de croire que le seul pouvoir dont dispose le président, est le contrôle exercé sur la machinerie électorale. Si une bonne partie des élites s’est opposée avec virulence à sa réélection, il reste que malade ou pas, sa côte de popularité, est restée élevée. Le président, incarne le confort du statu quo, le rempart contre l’aventure ou contre un scénario à la syrienne. Avec l’argent de la rente, des couches modestes de la société, ont été irriguées (logement, emploi-jeunes, accès à la consommation de masse etc.).

    On en est arrivé, à une situation des plus surréalistes. Des émeutes, ont lieu presque tous les jours (10 000 et plus par an), dans tout le pays, pour des revendications diverses (revendications salariales, logements, coupure d’électricité etc.) et cela n’affecte en aucune manière, la stabilité du régime. Cette perception, est très répandue dans la société et transcende les classes sociales. Affaibli, quasiment absent de la scène politique, le président reste maître du jeu et du temps. C’est, comble de paradoxe, lui qui paraît donner le ton.

    Le projet de nouveau texte fondamental (la nouvelle constitution), devrait donner des indices, sur ses intentions et celles du pouvoir. Le 15 avril 2011, au moment où les vents révolutionnaires du printemps arabe, soufflaient sur la région. Bouteflika sortait d’un long mutisme, pour annoncer son intention d’introduire de profondes réformes politiques, à travers l’élaboration d’une nouvelle constitution. Quatre années plus tard, c’est le flou artistique. L’avenir du pays et les grands défis auxquels il fait face, sont vécus en dehors du monde extérieur. Tout est vécu, comme si le monde extérieur n’existe pas et ce dernier, est presque assimilé à une menace5. Après la décennie sanglante et la « déconvenue du printemps arabe », la manière dont l’armée a fermé la parenthèse islamiste, en Egypte, la dynamique inquiétante et en apparence régressive en Tunisie, le changement est vécu comme le « chaos ».

    La société, sous les coups de boutoir de la bigoterie ambiante, s’est parée d’une religiosité ostentatoire. Le vocabulaire du quotidien, les pratiques sociales, l’habillement, tout cela est désormais marqué par les codes musulmans, mais sans aucune signification politique. L’islamisme, n’est plus un recours à la crise de la société, mais un refuge au mal-être social. Les barbus, se sont normalisés, en se recyclant dans le commerce à tout venant. La dominante du discours nationaliste-chauvin, qui prolifère, fait que tout débat critique de rupture, n’est pas audible.

    Le bilan du président, qui en est à son quatrième mandat, n’est pas abordé dans le débat public et les médias, alors que le pays a besoin d’une profonde remise en cause politique et économique. La facture alimentaire atteint les 10 milliards de dollars et en 2014, la dépense publique frise les 100 milliards de dollars, ce qui est un record en Afrique. Le retour d’Ahmed Ouyahya, va dans ce sens. L’enfant du système, développe sans cesse, une démarche de proximité avec le président et ses chances de présidentiable, se sont amenuisées avec le dernier chamboulement du FLN. Le RND, ne peut pas être majoritaire et les caciques, veulent un président et un gouvernement FLN. Sur ces questions, l’unanimité semble de mise. Les décideurs, dans les échéances à venir ne peuvent pas se passer d’un appareil structuré, dans tous les coins du pays. D’autre part, le patrimoine historique de ce parti, est seul à même de suppléer à la crise de représentativité de l’élite gouvernante. Le grand absent de tout ce grenouillage-déballage, c’est un débat de fond lié à l’avenir du pays, un projet de société en fait.

    2. Des scandales récurrents et des procès réglés comme du papier à musique.

    Il y a dans l’air, comme le parfum d’une troisième voie qui serait porté par Gaïd Salah, qui serait favorable à une solution à l’égyptienne. C’est un scénario couteux ? Risqué ? Un homme nouveau et inconnu qui se poserait en recours. La presse nationale a évoqué un Chadli bis. L’homme se déploie en ce sens. De nouvelles prérogatives du DRS (sécurité militaire), lui ont été attribuées, semble-t-il, dans le cadre d’une réorganisation concertée, entre lui et le patron du DRS6. On a vu, qu’une telle solution autoritaire, n’a pas beaucoup gênée les Occidentaux et surtout les Etats-Unis, en Egypte.

    Tout laisse entendre, que les tenants du système se préparent à une succession en douceur, malgré les scandales récurrents qui ont éclaboussé l’ère Bouteflika. Le projet du siècle, de l’autoroute est-ouest, est devenu l’une des plus grosses affaires de corruption. C’est l’un des plus gros scandales, avec celui de Sonatrach et l’affaire Khalifa, qui ont marqué fortement les mandats successifs de Bouteflika. L’autoroute est-ouest, a officiellement coûté au trésor public 11,4 milliards/dollars. Elle devait être achevée en 2009, mais d’importants travaux de réfection et de rénovation, sont engagés dans diverses régions. Son coût, a été revu à la hausse, à 13 milliards/dollars. Avec le scandale, on a essayé de quantifier les commissions occultes versées. La presse a cité le chiffre de 900 millions de dollars de pots de vin, mais rien ne permet de le prouver. Officiers de l’armée, enfants de dignitaires, responsables de l’agence ANA (Agence nationale des autoroutes), cadres du ministère des travaux publics, entrepreneurs algériens et étrangers, c’est une flopée d’acteurs qui sont liés à cette affaire. Le ministre des Travaux publics, est lui-même impliqué7.

    Le grand nettoyage a commencé et « tout sera soldé avant la rentrée », pour organiser la succession dans un climat apaisé8. Les grands procès, celui de l’autoroute est-ouest, de Sonatrach 2, de l’affaire Khalifa, s’inscrivent dans le cadre de cette grande lessive. Ces procès, lancés au printemps 2015 et qui ont vu la dilapidation de milliards de dollars, sont les premiers signes de ce toilettage qui marque une volonté de classer les dossiers qui ont éclaboussé le régime, pendant l’ère Bouteflika. Le pouvoir, veut clôturer les dossiers brûlants de la corruption pour la prochaine étape. Tout est fait, pour juger les lampistes et préserver les véritables instigateurs de ces scandales, dans le cadre de procès préfabriqués, pour leurrer l’opinion publique et redorer le blason de la lutte contre la corruption, aux yeux de l’opinion internationale. Les jugements retenus, lors des procès de l’autoroute est-ouest et de l’affaire Khalifa, suintaient la décision politique. Le dossier Khalifa, est clôturé, sans que les véritables responsables, soient connus. Effacer, les traces du crime et prendre toutes les garanties, pour l’avenir, en cas de changement de rapports de force. Le système a ainsi un lien organique avec la corruption et les jugements sont l’expression d’une option politique pour frayer la voie à une quête d’un nouveau consensus, entre les différentes fractions du pouvoir et parier sur l’avenir.

    3. Le président conforte sa position hégémonique.

    Le rôle de l’armée, dans le système politique algérien a toujours été mis en évidence par la place que cette dernière a prise, dans la construction de ce dernier. Depuis novembre 1954, la priorité a toujours été donnée aux armes sur le débat politique. Au lendemain de l’indépendance, le noyau de l’armée des frontières, sous la houlette du colonel Boumediene, va constituer le socle de la cristallisation du pouvoir en Algérie. L’avènement du pouvoir Chadli, va consacrer l’émergence de la sécurité militaire comme instrument premier de pouvoir. C’est Kasdi Merbah, commandant de la sécurité militaire qui va imposer Chadli Bendjedid à ses pairs et éliminer le dauphin désigné Abdelaziz Bouteflika, candidat de l’aile libéral et Mohamed Salah Yahyaoui, responsable de l’appareil du parti et candidat de l’Union Nationale de la Jeunesse Algérienne (UNJA) et du courant boumediéniste.

    De même que l’appareil de la sécurité a parrainé la candidature de Bouteflika, lors des trois premiers mandats et parfois contre l’Etat-major de l’armée (en 2004, ce dernier a soutenu la candidature d’Ali Benflis). Le deal entre Bouteflika et les généraux, est rompu le13 septembre 2015, avec le départ du général Toufik. Il avait pour objet de donner une couverture politique à l’accord passé entre l’armée et les islamistes, pour mettre fin à la guerre civile. Le vide sidéral du champ politique, depuis les années 1990 a mis en avant les structures de l’institution militaire.

    Définissant les caractéristiques principales de l’Etat, Engels plaçait « l’institution d’une force publique qui ne coïncide plus avec la population et s’organisant elle-même en force armée. Elle se renforce à mesure que les contradictions de classes s’accentuent, à l’intérieur de l’Etat. » La dynamique de l’Etat algérien, est de ce point de vue caractéristique. Elle porte, les marques de transformation de ce dernier « par hypertrophie de sa structure force publique militaro-policière »9 Les révoltes populaires menaçantes et les rivalités de pouvoir, ont fait croître à tel point la force publique qu’elle a dévoré la société toute entière et même l’Etat10. Parce qu’elle s’est présentée comme l’héritière de l’armée de libération nationale (ALN), l’armée a savamment joué de la confusion entre armée et nation, fortement entretenue par les médias et les thuriféraires du régime11*. Le rôle de police qu’elle a assumé pendant la décennie sanglante (les milliers de morts et de disparus, des milliers de blessés et d’handicapés et trois millions de déplacés), la disqualifie pour incarner la nation. Elle est désormais appelée à jouer le rôle d’une armée classique, au service d’une bourgeoisie rentière dont elle est la gardienne attitrée. Le général Gaïd Salah, a rappelé en décembre 2014 l’opposition, en mettent le holà au débat sur une éventuelle élection présidentielle anticipée.

    En entrant par effraction dans le débat politique, le général vice-ministre de la défense, ne réaffirme-t-il pas la pérennité de l’armée, dans la gestion de l’Etat et des affaires du pays ? Ce qui est sûr, c’est qu’il y a une guerre sans merci entre des forces opaques, qui ne concerne pas le pays utile. Dans cette guerre implacable, le président semble avoir remporté la première manche, avec l’élimination du général Mèdiène Toufik, figure de proue des services de sécurité et homme jusque-là indéboulonnable du régime algérien. Mais, selon le site « Mondafrique », ce n’est pas encore la dernière ligne droite, menant à la fin du système politique algérien. L’hyper-président malade et âgé, préparerait sa succession en neutralisant les services de sécurité omnipotents, après avoir pris le contrôle du gouvernement, de l’armée, de l’Assemblée nationale et du milieu des affaires. De ce point de vue, rien n’est laissé au hasard. Et pour faire bonne mesure, il a appelé l’opposition et la majorité présidentielle à un « pacte moral », pour sortir le pays de la crise et « renforcer la démocratie »12.

    Cette situation politique de forte opacité, prend des allures surréalistes, marquées par l’arrestation d’un général de la lutte antiterroriste, jusque là intouchable et « facilitateur d’affaires », un prétendu dirigeant de l’aile armée du FIS (AIS) qui a négocié une trêve avec le DRS (Direction de la Recherche et de la Sécurité) et qui annonce qu’il va créer un parti, à l’issue d’un grand rassemblement toléré par les autorités, dans les monts de Jijel, une ministre de l’éducation nationale qui a alimenté la chronique de l’été, en annonçant vouloir « remplacer l’arabe classique qu’elle ne maîtrise pas, par l’arabe dialectal à l’école » et le prix du pétrole qui continue sa chute abyssale face à un gouvernement sidéré qui s’interroge s’il y a crise ou pas et qui improvise un discours où chaque ministre affirme que son secteur n’est pas concerné par les restrictions.

    Pour ne pas être en reste, le ministre des finances développe un discours incantatoire, pour attirer l’argent suspect du marché informel, vers les circuits officiels. Pendant ce temps, le premier ministre essaie de vendre l’austérité qu’il veut tailler pour les classes populaires et les coupes drastiques, dans les investissements publics. Ce qui donne une idée de l’émiettement du pouvoir et de l’absence inquiétante de centre. Le spectacle, est celui d’un pouvoir aux abois, qui a perdu les quatre points cardinaux.

    4. Une manne pétrolière, à l’origine d’une économie désastreuse.

    Les remaniements successifs, qui ont marqué l’été, n’ont pas éclairé l’opinion et les travailleurs sur la politique économique du gouvernement Sellal. Le moins qu’on puisse dire, est que les changements opérés soulignent, on ne peut mieux, le maintien d’un cap c’est-à-dire plus que jamais, la continuité. Face à la chute des prix du pétrole, la mission du nouvel exécutif, est à haut risque, dans un contexte délicat, marqué à la fois par des enjeux politico-sécuritaires régionaux et la crise économique. Le plan anticrise concocté par un conseil des ministres restreint, n’a pas révélé le détail des mesures arrêtées. Le volet social, jusque là maintenu relativement à l’abri des contre coup du prix du baril risque d’être touché, avec toutes les conséquences qu’on imagine.

    La loi de finances 2015, celle initiale, est élaborée avec un baril de pétrole de référence, côté à 100 dollars. Elle n’a pas pris en compte la baisse du prix enregistrée en 2014 et notamment au cours du dernier trimestre. Le budget de l’Etat pour 2015, comme tous ceux qui l’ont précédé depuis 2008, est inscrit sous le signe d’une importante croissance des dépenses publiques. Un rythme d’augmentation, selon les données disponibles, 5 fois supérieur à celui du PIB, avec des dépenses de fonctionnement qui atteindraient la barre de 5 000 milliards de dinars.

    Le premier ministre Abdelmalek Sellal qui a toujours péroré sur les atouts du pays et qui a distribué l’argent de la manne pétrolière, dans ses visites dans toutes les wilayates13 du pays pendant la campagne présidentielle, a mis un bémol et a donné un tableau sombre des finances du pays, qui prévoit des coupes sombres dans le budget, lors de la loi de finances complémentaires 2015 (LFC 2015), notamment dans le secteur de l’emploi. Il affirme qu’ « au rythme des dépenses actuelles, les caisses de l’Etat seront presque vides en 2019 ». Au cours du premier trimestre 2015, le pays a enregistré une baisse de 50 %, de ces recettes pétrolières. Les prévisions des recettes pétrolières de la loi de finances initiale 2015, étaient de 66 milliards de dollars, parce que basées sur un baril de pétrole de référence, de 100 dollars. L’Etat, a recours régulièrement au FRR, pour couvrir les déficits budgétaires.

    Le ministère des finances, a annoncé une baisse de flux vers ce fonds de 60,7 %. Les recettes qui seront engrangées, seront d’à peine 33,8 milliards de dollars. Des pertes de 32 milliards de dollars, sont prévues d’ici la fin de l’année, avec une réduction des réserves de change (151,5 milliards de dollars). En 2015, les dépenses du fonds, vont atteindre 2037,4 milliards de dinars et les recettes escomptées ne seront que de 710,8 milliards de dinars, soit 34,9 %. Les plus pessimistes aujourd’hui, n’écartent plus, un scénario catastrophe, en cas d’échec du plan anticrise qui est tout simplement la loi de finances complémentaires. Les orientations principales, demandent aux experts du ministère des finances, de procéder à des coupes dans les dépenses et à chercher des ressources de substitution, pour le budget de l’Etat. Malgré les mesures d’arbitrage et la volonté de réduire les importations, ces dernières avoisineront les 57,3 milliards de dollars et le déficit commercial prévu, sera de 24,5 milliards de dollars. C’est énorme ! Ce qui sous-entend, la fonte totale des réserves de change, à la fin du quinquennat 2015-2019. Le pays va y puiser entre 35 et 40 milliards de dollars par an. La banqueroute, ne serait pas loin.

    Les injonctions du FMI et du patronat, sont discrètement prises en compte. Le gouvernement d’Abdelmalek Sellal, table sur la loi de finances complémentaire (LFC 2015) et les recettes fiscales (près de 150 milliards/dinars), pour couvrir les pertes consécutives au reflux des recettes pétrolières. Dans le projet adopté par le gouvernement et qui est signé par ordonnance présidentielle, entre deux sessions, les dépenses enregistrent une baisse de 5 %. Ce qui entraine une coupe sombre dans les projets publics, dans tous les secteurs et notamment dans ceux de l’éducation nationale et de la formation (- 9 %) et le soutien pour l’accès au logement enregistre une baisse de 36,6 milliards de dinars (-12,4 %)14. Les dépenses publiques, vont baisser par rapport à la loi de finances initiale, de 2015 de 438,5 milliards de dinars, soit 4,9 %. Cela augure d’une volonté, de procéder à des coupes sombres, dans les secteurs sociaux et d’imposer l’austérité, aux couches les plus fragilisées du système Bouteflika. Un train de mesures d’austérité, est concocté par les experts du pouvoir et la facture au fil du temps, sera lourde pour les couches populaires.

    La crise, va imposer l’austérité aux travailleurs, malgré le discours rassurant du chef du gouvernement, Sellal, après des années d’opulence et de gabegie ostentatoire, des dignitaires du régime. Cela montre surtout, l’ampleur des retombées négatives sur le plan économique et sociale, du recul des recettes pétrolières. Sur le budget d’équipement (le fameux programme du président) qui baisse de 11,3 %, l’impact sera très important et tous les projets publics, vont connaître une baisse, dans tous les secteurs. Le projet de LFC 2015, affirme dans ses orientations, le souci de préserver le FRR (Fonds de régulation des recettes) des recettes pétrolières, créé en 2006 pour compenser les déficits publics. Avec le recul des recettes pétrolières (près de 50 %, au 1er semestre 2015), beaucoup d’experts économiques, prédisent sa disparition. L’Etat, va de plus en plus puiser dans ce fonds de régulation des recettes, pour financer le déficit budgétaire.

    Pour ce qui est des retombées éventuelles, du plan anticrise du gouvernement Sellal, dans le cadre de la LFC 2015, certaines dispositions adoptées, sont tenues confidentielles. Le nouveau gouvernement, présente l’inconvénient lié à de nouvelles nominations, sans changement aucun au niveau de la manière de faire et l’approche des problèmes fondamentaux, reste la même. Ainsi, la révision de l’impôt, est liée au problème des situations de rente et le problème des subventions généralisées qui génèrent l’excès de consommation et le gaspillage, est intimement lié à la peur d’ébranler le front social. A ce jour, l’Etat n’a pas encore décidé de réduire son train de vie et les coupes dans les projets importants du programme du président, n’ont pas concerné le chantier de la grande mosquée qui à peine à 50 %, de sa réalisation a consommé toute l’enveloppe qui lui a été allouée (1 milliards de dollars).

    Le lien occulte de certains ministres avec des milieux d’affaires influents laisse augurer de conflits d’intérêt qui vont obérer l’effort prétendu, pour éliminer les effets de la crise. Le nouveau ministre des finances Abderahmane Benkhalfa, présenté comme libéral convaincu, était parmi les négociateurs des clauses du rééchelonnement, des années 1990, qui ont mis le pays en coupe réglée. C’est un orthodoxe qui fera fi des besoins sociaux. Il est l’une des chevilles ouvrières, avec le ministre de l’énergie, du chantier le plus important du nouveau gouvernement Sellal, qui sera la mise en œuvre du plan anticrise. Celui-ci, vise la rationalisation des importations, l’arbitrage entre les dépenses, pour le gel ou le report de certains projets d’investissements publics, le gel du recrutement dans la fonction publique (à l’exception des secteurs de l’éducation, de l’enseignement supérieur et de la recherche et de la santé) et la relance de la production nationale. Mais maintenant que les recettes des exportations des hydrocarbures accusent un net fléchissement, il y a danger sur les importations des produits alimentaires. C’est dans l’agriculture, que les experts planchent pour la mise en place d’un plan de substitution aux importations alimentaires.

    La valeur de la production agricole, serait de 29 milliards de dollars. Et c’est à ce niveau que tous les programmes mis en place, ont échoué. Les améliorations des rendements, dans l’agriculture sont gommées par la pression démographique, l’urbanisation et le mode de consommation. Le lait et les céréales, occupent 50 % des importations alimentaires. A elles seules, selon le ministre du commerce, ces filières absorbent 80 % des subventions. Leur facture, plafonne à plus de 5 milliards de dollars. La consommation de lait par an et par habitant, est de 147 litres alors que la production est de 80 litres/an /habitant. Le subventionnement tel que pratiqué actuellement, n’est pas de nature à aider le développement de la production locale. Les efforts, pour développer les filières lait et les céréales et renforcer la connectivité de l’amont agricole, avec les filières industrielles et de transformation, peinent à trouver la voie. L’amélioration des rendements, serait au cœur de la problématique de la sécurité alimentaire (itinéraire technique et irrigation d’appoint). Selon la prospective officielle, la production céréalière doit passer du simple au double entre 2015 et 2019 et atteindre 70 millions de quintaux (contre 34 millions de quintaux actuellement). La production de pomme de terre, pour la même période passera de 46,8 millions de quintaux à 67,7 millions de quintaux et celle des dattes, de 9,34 millions de quintaux à 12,57 quintaux. La production de lait, doit passer de 3,57 milliards de litres à 4,25 milliards de litres de lait frais. Les conditions pour atteindre ces objectifs, sont l’augmentation des superficies irriguées d’un million d’hectares et l’amélioration de la qualité des semences. Pour ce dernier aspect le pays, reste stratégiquement dépendant de la semence importée de l’étranger.

    La nomination du ministre de l’énergie, intervient dans un contexte difficile, marqué par la baisse des recettes des hydrocarbures et un déclin de la production, consécutif à la baisse des réserves au moment ou la demande en produits énergétiques, est entrain d’exploser. Le nouveau ministre, est attendu, sur le dossier du gaz de schiste et la redynamisation du secteur. Il doit dit-on, absolument augmenter la production de pétrole et de gaz et augmenter de façon significative les réserves d’hydrocarbures, pour préserver et consolider les parts de marché, sur les marchés internationaux.

    5. L’opposition populaire, doit arracher son autonomie politique.

    La vie politique dans le pays, est complètement plombée et l’économie est en état de dégradation avancée. De larges pans de la société, sont jetés dans la précarité. La prédation au sommet de l’Etat, précipite le pays dans le chaos, « le pays va droit dans le mur »15 Le bilan politique de l’ère Bouteflika (1999/2015), est dominé par le fait du prince qui voit un net recul des acquits des luttes des années 1980 et l’émergence d’un jeu clanique aux relents fortement passéistes. C’est une dérive césariste, marquée parfois de répression sanglante du mouvement de masse (le cas du printemps noir, en Kabylie, en 2001) et le verrouillage du champ politique et médiatique, par des lois liberticides (viol du droit de grève, interdiction des marches, des rassemblements et manifestations pacifiques) et implosion des formations politiques d’opposition.

    C’est à un véritable retour de l’ère des prétoriens, des années 1960/1970 auquel on a assisté, marqué par l’image d’un président omnipotent distillée par les médias et les institutions officielles, ne sont que le reflet de sa volonté. Le pouvoir, a évité autant qu’il peut grâce à la manne pétrolière, le choc avec le mouvement populaire. Il a adopté le style de faire assimiler ses objectifs, par le matraquage quotidien d’une presse aux ordres et une partitocratie complètement intégrée aux jeux du pouvoir. C’est une logique de normalisation par les élections truquées et les institutions contrôlées. C’est une variante qui se caractérise par la réalisation, par en haut des revendications accumulées, par en bas, au cours de ces dernières années. C’est un mécanisme qui a fait école en Amérique latine, qui permet de récupérer de la rue les matières inflammables et de réorienter la vie publique, vers le cœur des institutions et de démobiliser la dynamique de la revendication sociale. L’effet de démobilisation, est plus grand grâce au niveau des disponibilités de la rente pétrolière. L’emploi, a augmenté même si c’est dans le cadre précaire.

    La duplicité des pouvoirs autoritaires, va jusqu’à coopter des partis politiques, des syndicats et des associations des droits de l’homme qui, d’une certaine manière contribuent à exclure la gauche et le mouvement syndical, par rapport à des enjeux qui lui étaient familier (le programme historique de la gauche)16. D’aucuns pensent que la position de principe, du repli sur le quant-à-soi pour déployer le drapeau et gérer « une parcelle idéologique et organisationnelle inamovible »17, fait le lit de la marginalité. Elle évacue, « l’art politique de conquérir, dans des circonstances concrètes, une audience et une influence en fonction des changements de circonstances »18.

    Pour le reste, la morosité a gagné tous les secteurs de la vie politique et économique. Il y a une désaffection profonde à l’égard de la classe politique et ses dernières années, les taux d’abstention aux élections, sont les plus forts depuis l’indépendance. Lors des deux derniers scrutins, moins d’un algérien sur trois, a accompli son devoir électoral. La soi-disant élite, « reprend en boucle des idées surannées et le concept d’indépendance nationale, s’est décliné dans le mal développement »19.

    Le phénomène récurrent de désagrégation sociale, s’accompagne pendant les périodes électorales, d’une percée des opportunistes qui engrangent les voix des sans-partis. Un mouvement social balbutiant, émerge des profondeurs d’une société fragmentée et atomisée et qui a largement intégrée les codes d’une « démocratie autoritaire ». Ce mouvement social, fait ses premières armes dans des expériences syndicales qui demeurent en marge des bastions historiques de la lutte sociale. C’est un contexte qui potentialise énormément les explosions sociales à contenu émancipateur limité. Mais, il y a bel et bien un réveil des mouvements sociaux, après près de deux décennies de léthargie et de violence aveugle.

    Août-septembre 2015, Mahdi Sâad-Eddine

    Notes

    1. Ceux qui convoient l’argent sale, dans des sacs poubelles : les milliardaires.

    2. Voir le Monde diplomatique, sur Droitisation, mode d’emploi. Serge Halimi, n°735 juin 2015.

    3. Les redresseurs du clan Belayat et consorts.

    4. M. Harbi. Lettre aux citoyennes et citoyens algériens. La Tribune d’octobre n°6/7 du 22 avril 1989.

    5. Editorial. Le Quotidien d’Oran, « pour l’Algérien, la menace est l’extérieur ». K. Sélim.

    6. Le quotidien francophone El Watan, 2 juin 2015. H. Ouali.

    7. Source : Jeune Afrique n° 2813, du 7 au 13 décembre 2014.

    8. Le Quotidien d’Oran, jeudi 4 juin 2015. A. Charef.

    9. Cette armée qui dévore l’Etat. Michel Lequenne.

    10. Origine de la famille, de la propriété privée et de l’Etat. F. Engels.

    11. Voir l’ouvrage L’INSTANCE, l’Etat algérien 50 ans après. El Hadi Chalabi.

    12. Le Quotidien d’Oran, 3 septembre 2015.

    13. Découpage administratif qui correspond aux anciennes préfectures.

    14. Le quotidien arabophone Ech-Chorouk, 27 juin 2015.

    15. Hadj Nacer, ancien gouverneur de la Banque d’Algérie.

    16. Inprécor novembre-décembre 2007 n°532/533. Argentine : la gauche dans son labyrinthe. G. San Martino.

    17. Idem.

    18. Idem.

    19. Le Quotidien d’Oran, 3 septembre 2015. A. Cherif.

    * « Algérie : Les solutions musclées sont devant nous ». Jeudi 8 octobre 2015, mise à jour Jeudi 8 octobre 2015, 10:23 :
    http://www.npa2009.org/idees/algerie-les-solutions-musclees-sont-devant-nous

    jeudi 8 octobre 2015, par SAAD-EDDINE Mahdi

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article36041

  • L’isolement croissant (Ujfp)

    http://revolutionsarabes.hautetfort.com/media/02/00/629564481.jpeg

    Il y a quelques jours on célébrait le Nouvel An juif, ce qui donnait l’occasion aux chroniqueurs ainsi qu’aux politiciens de faire un bilan de l’année qui venait de s’achever.

    Il n’est pas difficile de deviner le dénominateur commun à tout ce qui s’est dit et écrit d’intelligent dans les différents médias israéliens, tellement cela crève les yeux : l’isolement grandissant d’Israël sur la scène internationale, et son corollaire, la comparaison avec l’Afrique du Sud de l’apartheid.

    Il n’y a finalement que Benjamin Netanyahou qui s’obstine à fermer les yeux, obnubilé par le nouveau nazisme que serait la République Islamique d’Iran. Le fait qu’un accord historique ait été conclu entre Téhéran et les grandes puissances ne fait que conforter le Premier ministre israélien dans son délire obsessionnel pour qui il s’agit d’un second Munich, Barak Obama n’étant rien d’autre qu’un nouveau Chamberlain.

    Allant à contre-courant du monde entier, Netanyahou marque encore davantage l’isolement d’Israël.

    Certes, l’alliance stratégique avec les États-Unis est solide, et pour longtemps encore, mais entre la Maison Blanche et le chef du gouvernement israélien les relations sont exécrables, et l’auto-invitation de Netanyahou à parler devant le Congrès pour y dénoncer la politique d’Obama a confirmé une vraie rupture [au niveau personnel il s’entend], unique dans l’histoire des relations entre les deux États depuis près d’un demi siècle. Parallèlement, une partie des pays européens ne cachent pas ce qu’ils appellent dans leur jargon diplomatique leur "incompréhension" de la politique israélienne, alors qu’à leurs yeux la priorité devrait être le front uni contre la menace que représente Daesh.

    Isolement aussi d’une révolution arabe qui chamboule l’ordre établi il y a exactement un siècle par les puissances coloniales, et a constitué des États qui sont aujourd’hui en pleine décomposition (Syrie, Irak). Les dirigeants israéliens semblent ne s’être pas encore remis de la chute de Ben Ali et de Hosni Mubarak…

    Isolement surtout des opinions publiques à travers le monde qui identifient de plus en plus le régime colonial israélien à l’apartheid sud-africain. Le succès croissant de la campagne BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) et son élargissement à des entreprises étatiques ou multinationales (la Compagnie des Eaux néerlandaise, Orange) ne laissent plus indifferénte une partie importante de l’opinion publique locale.

    Certes, tant qu’Israël continuera à bénéficier du soutien états-unien et de l’amitié des partis socialistes (sic) européens, Netanyahou poursuivra sa politique de fuite en avant, y compris les provocations scandaleuses sur l’Esplanade des Mosquées qui risquent d’allumer un feu incontrôlable dans l’ensemble du monde musulman.

    À moins qu’une nouvelle Intifada n’explose dans une Cisjordanie de plus en plus lasse d’attendre la "reprise d’un processus de paix" dont Netanyahou reconnait qu’elle n’est pas à l’ordre du jour. Les confrontations de plus en plus violentes à Jérusalem laissent présager que cette Intifada est en train de prendre forme, même si la direction palestinienne fait encore de son mieux pour la freiner.

    jeudi 8 octobre 2015 par Michel Warschawski

    Publie dans Sine Mensuel, Octobre 2015

    http://www.ujfp.org/spip.php?article4428

  • Israël et la Palestine au bord du gouffre (Politis)

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    L’Europe doit enfin prendre ses responsabilités, estime le président de l’Association France Palestine solidarité, Taoufiq Tahani.

    La politique de Benyamin Netanyahou a un mérite : elle produit des résultats. Au fil des semaines, les colonies s’agrandissent, ancrant toujours davantage dans le paysage la marque de la domination d’un peuple sur un autre. Rien à négocier, et Tzipi Hotovely, la vice-ministre des Affaires étrangères, l’a dit tranquillement sur le ton de l’évidence : « Le monde doit réaliser que la Judée-Samarie restera sous la souveraineté de facto d’Israël. Ceci n’est pas une monnaie d’échange et ne dépend pas de la bonne volonté des Palestiniens. C’est la terre de nos ancêtres. »

    Et voilà que de nouveaux résultats nous arrivent, eux aussi malheureusement annoncés. Après l’autorisation donnée à l’armée israélienne de tirer à balles réelles, une série de meurtres a été commise contre de jeunes Palestiniens, sans sommations ni explications. Il y a obligation de résultat : briser la résistance d’un peuple en multipliant les punitions collectives, avec toujours cette même devise : « Ce qu’on ne peut obtenir par la force, on peut l’obtenir par plus de force. » Sauf qu’arrive le retour de bâton. Jeudi, un couple de colons, dont le mari est officier de réserve dans l’armée israélienne, a été tué à la kalachnikov près de Ramallah (leurs quatre enfants ont heureusement été épargnés). À leurs obsèques, le président d’Israël, Reuven Rivlin, qui a la réputation d’être un « colon libéral », déclare à la famille : « Je vous ai répondu. Je vous ai dit que cette terre est à nous dans sa totalité, et sous notre souveraineté, il est de notre responsabilité d’assurer sa sécurité et celle de nos citoyens. »

    Dans la nuit de samedi à dimanche, ce sont deux autres Israéliens qui sont tués et deux blessés au couteau dans deux attaques à Jérusalem. Les auteurs supposés sont abattus par la police. Au petit matin, le jeune Fadi Elwan, du quartier Issawaya, est abattu par les soldats auxquels il allait demander protection pour échapper aux colons qui le pourchassaient. Version contestée ? Il suffit à la police de communiquer, comme le demande la famille de la victime, les enregistrements des nombreuses caméras disposées dans le quartier.

    Dans toute la Cisjordanie, les jeunes poussés à bout retrouvent les gestes de l’Intifada des pierres d’il y a vingt-huit ans. Ils estiment n’avoir rien à perdre. Qui oserait leur donner tort ? On attend la suite. Depuis le début des fêtes juives, c’est au nom de la « liberté de culte » évoquée par Mme Hotovely à l’ONU que les provocations s’ajoutent aux provocations pour en finir avec le statu quo qui garantit le culte dans la mosquée Al-Aqsa, sous responsabilité jordanienne. Tout est prêt pour l’explosion. Tout semble prêt pour qu’elle revête une dimension religieuse. Qui peut dire ce que sera alors l’onde de choc dans le monde musulman ?

    Voilà où nous ont menés des années de tergiversations et de complaisance face à une politique israélienne qui n’a d’autre but que de rendre impossible la solution à deux États. Cette fois, la France et les pays européens doivent choisir. Ils ne peuvent plus dire qu’ils sont pour la solution à deux États tout en continuant à n’en reconnaître qu’un, dont les dirigeants répètent qu’ils font et feront tout pour qu’il n’y ait pas d’État palestinien. C’est maintenant et d’urgence qu’il faut oser reconnaître l’État de Palestine et enfin prendre des sanctions contre les saboteurs de la paix. Si vous ne faites rien, Mesdames et Messieurs les dirigeant européens, vous serez coresponsables de la catastrophe vers laquelle nous poussent les apprentis sorciers de Tel-Aviv.

    http://www.politis.fr/

  • Nouveautés sur Association France Palestine Solidarité

    Journée nationale "reconnaissance de la Palestine" - Liste des évènements

    Collectif National pour une Paix Juste et Durable en Palestine (CNPJDPI), mercredi 7 octobre 2015
  • Les dynamiques de l’expansion militaire russe en Syrie (Essf)

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    Ou la volonté de sauver et consolider le régime Assad

    A la fin de l’été 2015, la Russie a considérablement élargi son implication militaire au côté du régime Assad, notamment en fournissant des formations et du soutien logistique à l’armée du régime syrien [1]. Le 17 Septembre, 2015, l’armée du régime a commencé à utiliser de nouvelles types d’armes aériennes et terrestres fournis par la Russie, tandis que des photos satellites prises à la mi-Septembre montraient le développement de deux installations militaires supplémentaires de forces russes à proximité de Lattakiyya [2].

    L’engagement militaire de la Russie a dépassé un nouveau niveau le 30 septembre, 2015, lorsque l’aviation militaire russe a mené ses premiers raids en Syrie. En plus de cela, des centaines de soldats iraniens sont arrivés en Syrie le 21 septembre et ils vont rejoindre les forces du régime Assad et leurs alliés du Hezbollah libanais dans une offensive terrestre majeure à venir et soutenue par les frappes aériennes russes. L’opération militaire serait destinée à récupérer les territoires perdus par le régime Assad à diverses forces de l’opposition. Très probablement, les opérations terrestres à venir se concentreront sur la ville d’Idlib et la campagne de Hama [3].

    Pour rappel, tous ces acteurs ont été des acteurs clés dans la survie du régime Assad. La Russie est depuis longtemps le fournisseur de la grande majorité de l’armement des forces armées du régime Assad. L’Etat russe a continué à expédier des volumes importants d’armes, munitions, des pièces détachées et du matériel remis à neuf à des forces pro-régime. En Janvier 2014, la Russie a intensifié des fournitures de matériels militaires pour le régime syrien, y compris des véhicules blindés, des drones et des bombes guidées. [4]

     La campagne de la « guerre contre le terrorisme »

    La propagande autour de la campagne de la « guerre contre le terrorisme » lancée par l’Etat russe est un moyen de soutenir le régime d’Assad politiquement et militairement et écraser toute forme d’opposition en Syrie. Poutine souhaite que les différents acteurs internationaux impérialistes occidentaux considèrent Assad comme le seul acteur qui peut les aider dans leur lutte contre le « terrorisme ».

    On peut constater cela dans les cibles des raids de l’aviation russe. Le 30 Septembre, 2015, les raids des avions militaires russes ont mené leurs premiers raids en Syrie contre le village de Zafarana au nord de Homs, ainsi que près de la ville de Lataminah nord-ouest de Hama, qui ne sont pas en l’occurrence des bastions de l’État Islamique (EI). Dans la ville voisine de Hama, un groupe ciblé par les raids, Tajammu al-Izzah, est considéré comme un membre important de l’armée syrienne libre (ASL) dans la région. Il était l’un des rares groupes en Syrie à avoir reçu des roquettes anti-chars et les avait régulièrement utilisé contre les chars syriens et des véhicules blindés dans les régions centrales de la Syrie. Le même jour, la Russie a également bombardé Talbiseh, al-Mukarama, Reef Homs al-Shamali. Toutes ces régions sont principalement sous le contrôle de l’ASL et avec aussi une certaine présence de Jabhat Al Nusra (la branche d’Al-Qaida en Syrie) et Ahrar Sham. Selon les forces de défense civiles syriennes, une organisation de bénévoles d’interventions d’urgence, il y a eu plus de 35 victimes civiles en conséquence des frappes aériennes russe sur Homs et Hama.

    Les jours suivants, les objectifs de l’aviation militaire russe comprenaient un poste de commandement et des bunkers souterrains d’armes près de Raqqa, ainsi qu’un dépôt d’armes dans la ville de Maarat al-Numan. Maarat al-Numan, dans la province d’Idlib du nord de la Syrie, n’est pas connu comme une base de l’Etat Islamique (EI). La plupart des combattants dans la région sont de coalition de Jaysh al-Fatah dirigé par Jabhat Al-Nusra et Ahrar Al-Sham.

    L’Observatoire Syrien des Droits de l’Homme a d’ailleurs enregistré la mort de plus de 40 civils, et de 14 combattants, la plupart étant des djihadistes de l’Etat Islamique, mais aussi des membres de Jabhat Al-Nusra, Ahrar Sham et des bataillons de l’ASL, depuis le début des raids de l’aviation russe le 30 septembre, 2015. Le ministre de la défense britannique a indiqué que seulement une frappe sur 20 de l’aviation militaire russe visait des forces de l’Etat Islamique. Les bombardements de l’aviation militaire russe ont visé au moins quatre factions opérant sous le label de l’ASL. [5]

    Les officiels russes ont d’ailleurs déclaré que les bombardements russes dureront environ 3 à 4 mois.

    Les objectifs des bombardements russes sont clairs : sauver et consolider la puissance militaire et politique du régime Assad. Le président russe Vladimir Putin a dit le 28 septembre, avant le début des opérations : « Il n’y a pas d’autres manières de mettre fin au conflit syrien autre qu’en renforçant les institutions de l’actuel gouvernement légitime dans leur combat contre le terrorisme ».

    En d’autres termes écraser toutes les formes d’opposition, démocratiques ou réactionnaires, au régime d’Assad dans le cadre de cette soi-disant « guerre contre le terrorisme”. Tous les régimes autoritaires ont utilisé ce même genre de propagande pour réprimer les mouvements populaires et / ou des groupes d’opposition à leurs pouvoirs : Assad contre le mouvement populaire depuis le premier jour du soulèvement populaire, le dictateur Sissi en Egypte pour réprimer notamment les Frères musulmans, mais aussi la gauche progressiste et les mouvements démocratiques tels que les Socialistes révolutionnaires, le mouvement du 6 Avril, etc … Erdogan contre le PKK et divers mouvements de gauche, les monarchies du Bahreïn et de l’Arabie saoudite contre les manifestant-es et les mouvements populaires qui s’opposaient à leurs régimes, etc …

    Les puissances impérialistes internationales ont agi de manière similaire, de l’état russe qui a réprimé toute forme de résistance en Tchétchénie à son occupation aux diverses interventions militaires des Etats Unis à travers le monde. Les deux prétendaient et prétendent lutter contre le terrorisme.

    Cette expansion militaire des alliés du régime d’Assad, dirigée par la Russie, est menée pour deux raisons principales : 1) la faiblesse politique et militaire croissante du régime d’Assad et 2) l’absence ou le manque de politique claire des puissances occidentales pour aider les révolutionnaires en Syrie.

     Faiblesse politique et militaire du régime Assad

    Tout d’abord sur le plan militaire, l’armée syrienne a été considérablement affaiblie, diverses analyses estiment que le nombre de soldats a chuté de 300.000 à environ 80 000, et a subi diverses défaites importantes ces derniers mois, notamment après la chute des villes de Idlib et à proximité de Jisr al-Shughour en mai 2015, qui sont tombées dans les mains de la coalition de la Jaish al-Fatah, dirigée par Jabhat al Nusra et Ahrar Sham.

    Les désertions et le manque de volonté de la jeunesse syrienne à mourir pour un régime corrompu et autoritaire expliquent principalement l’impossibilité de l’armée du régime de recruter de nouveaux soldats. Un grand nombre de jeunes hommes ont fui pour l’Europe souvent après avoir reçu leurs convocations militaires. La propagande pour l’armée du régime dans les médias étatiques, les posters et affiches de recrutements partout dans Damas et les récentes amnisties pour les déserteurs et les conscrits réfractaires n’y ont rien changé.

    Le dictateur Assad a d’ailleurs reconnu en Juillet 2015 que l’armée du régime avait une pénurie d’effectifs et avait dû abandonner certaines régions afin de mieux défendre ce qu’on appelle la Syrie utile – Damas à Homs et la zone côtière autour de Lattakiyya.

    La faiblesse de l’armée du régime a conduit à la création d’une force de 125.000 miliciens des Forces de la Défense Nationale, qui ont été formé et financé par la République Islamique d’Iran, qui favorisent également l’utilisation de miliciens shiites de l’Irak, du Pakistan et de l’Afghanistan ainsi que du Hezbollah. Pour les partisans du régime Assad, affirmant qu’ Assad défend l’état et ses institutions, ces informations sont plutôt embarrassantes … sans oublier que grande majorité des destructions des institutions de l’état, y compris des écoles, des hôpitaux, etc .. sont le résultat des bombardements des forces du régime.

    Sur le plan politique, des frustrations croissantes et grandissantes ont été exprimées dans les régions dite “loyaliste” contre le régime Assad, en particulier dans les derniers mois.

    Au début du mois de septembre, des manifestations ont eu lieu dans les deux villages chiites de Fuaa et Kafriyeh dans la province d’Idlib, pour crier leur colère face à l’inaction du régime syrien qui a échoué à les aider à repousser les attaques et les bombardements de Jabhat Al Nusra et Ahrar Sham. Selon plusieurs médias, les manifestants se seraient rendus à Homs et à Damas où ils ont bloqué la route de l’aéroport de Damas pendant plusieurs heures le lundi 31 août.

    En août, plus d’un millier de personnes ont effectué un sit-in au rond-point d’al-Ziraa dans la ville de Lattakiyya pour protester contre le meurtre du colonel Hassan al-Cheikh qui a été tué par Sulaiman Al-Assad – le fils du cousin de Bachar Al-Assad, Hilal Al-Assad, qui était le chef des Forces de Défense Nationale et qui a été tué le 23 mars, 2014. Ces personnes ne soutiennent pas la révolution, pour l’instant, mais il faut pouvoir les gagner à notre cause parce qu’ils sont fatigués de la guerre, fatigués de la situation socio-économique difficile, et fatigués de la corruption de la famille Assad qui contrôle encore et agit comme si la Syrie était leur propriété et volant ses richesses. D’autres manifestations ont eu lieu dans la ville de Tartus par les membres des familles des soldats pour dénoncer la façon dont le régime traite leurs soldats et demande leur retour.

    Dans la région de la ville de Sweida, en grande majorité habitée par des populations de confession druze, plusieurs manifestations ont eu lieu pour dénoncer les politiques du régime et le faible service des institutions. Cet été, des manifestations et résistances ont éclaté contre le régime après l’assassinat du Sheikh Wahid Bal’ous, qui est un sheikh druze et qui est connu pour son opposition contre le régime Assad et les forces islamiques fondamentalistes, dans une explosion dans la région Dahret al- Jabal tuant au moins personnes. Des manifestant-es ont manifesté devant plusieurs bâtiments officiels étatiques et ont démonté une statue de l’ancien dictateur Hafez Al-Assad à Sweida [6]. Sheikh Wahid Bal’ous était une figure populaire au sein des populations de confession druze et menait le mouvement des « Sheikhs de la dignité », un mouvement qui luttait pour la protection des druzes dans la province et qui combattait aussi l’Etat Islamique et Jabhat Al-Nusra. Sheikh Wahid Bal’ous était aussi opposé au recrutement de jeunes hommes originaire de la province de Sweida dans l’armée du régime pour être envoyé en dehors de la province, qui est sous le contrôle du régime, vers d’autres régions. Quelque jours avant la mort de Sheikh Wahid Bal’ous, les habitants de Sweida, avaient manifesté pour demander plus de services de bases du régime, y compris l’eau et l’électricité. Sheikh Wahid Bal’ous les avait soutenues.

     L’absence ou le manque de toute politique claire des états occidentaux pour assister les révolutionnaires en Syrie

    Cette deuxième raison n’est pas quelque chose de fondamentalement nouveau, les politiques des puissances occidentales ont été caractérisés par leurs inactions et l’absence de clarté depuis le début de la révolution pour aider les révolutionnaires syriens.

    Les alliés du régime Assad ont bien compris cette situation et c’est la raison principale pourquoi leur soutien politique, militaire et économique à la dictature de Damas a été constant et a même augmenté dans les moments. Cette réalité se reflète dans les paroles de Alaeddin Boroujerdi, président de la commission pour la politique étrangère et la sécurité nationale au parlement iranien, qui a déclaré en Juin 2015 lors d’une visite à Damas que le soutien de l’Iran au régime syrien est “stable et constant » et a souligné qu’il n’y avait pas de restrictions ou de limites à la coopération avec la Syrie et dans son soutien à cette dernière.

    Le président iranien Hassan Rouhani dans les couloirs des nations unies a d’ailleurs continuellement défendu que le régime Assad ne doit pas être affaibli si les états occidentaux étaient sérieux dans leur lutte contre le terrorisme. Rouhani a aussi déclaré dans un interview à la CNN que « tout le monde avait accepté que le président Assad soit maintenu pour pouvoir lutter contre le terrorisme ».

    Cette situation est malheureusement la triste réalité.

    Le président états-unien a publiquement déclaré dans son discours le 28 septembre à l’Assemblée Générale des Nations Unies sa volonté de travailler avec la Russie et l’Iran pour trouver une solution en Syrie tout en mettant en avant l’impossibilité en même temps de revenir à une statu quo similaire à celui avant le début de la guerre [7]. Sur les premiers raids de l’aviation russe, le porte parole du département d’état des Etats Unis, John Kirby a déclaré que les officiels russes avaient informé l’ambassade états-unienne à Baghdad sur les bombardements et avaient demandé à l’aviation militaire états-unienne d’éviter l’espace aérien syrien durant les opérations russes. Des officiels israéliens ont aussi annoncé publiquement avoir été informé par la Russie une heure avant le début des frappes. Les officiels du gouvernement russe ont contacté avec le conseiller de la sécurité nationale israélienne, Yossi Cohen, ainsi qu’avec d’autres officiels importants dans l’establishment de la défense israélienne. Cette information avait pour but d’éviter toute confrontation entre l’aviation israélienne et russe [8].

    Le premier ministre britannique David Cameron a déclaré qu’il ne fallait pas exclure un rôle pour Assad dans une période de transition en Syrie, tout en assurant qu’Assad ne pouvait pas faire partie de l’avenir de la Syrie sur le long terme”. La Chancelière allemande Angela Merkel a été dans le même sens en disant qu’il était nécessaire de discuter avec “de nombreux acteurs, et parmi eux Assad”. Les responsables turcs ont également déclaré qu’Assad pourrait jouer un rôle dans une période de transition.

    Des sources militaires israéliennes ont de leur côté confirmé l’existence d’un consensus au sein des cercles des prises de décision de Tel-Aviv sur l’importance du maintien du régime d’Assad. Un analyste sur les affaires militaires Alon Ben-David, a cité une source au sein du état major israélien qui disait : “Bien que personne en Israël ne puisse le dire publiquement et explicitement, la meilleure option pour Israël serait le maintien du régime d’Assad et la continuation de la guerre civile aussi longtemps que possible “.

    Ces positions ont été renforcées avec la crise des réfugiés de ces dernières semaines. La grande majorité des programmes de télévision, des articles et des soi-disant experts qui parlent des millions de réfugiés en provenance de Syrie avaient le même discours : le problème est l’EI. Divers officiels de nombreux pays n’ont pas hésité à déclarer que les Etats européens devraient coordonner avec le régime d’Assad et ses alliés de la Russie et de la République islamique d’Iran pour résoudre et mettre fin au problème de l’EI et donc dans leur esprit des réfugiés. C’est bien sûr oublier que la racine des problèmes en Syrie est le régime d’Assad et que ce dernier est responsable de plus de 90% des réfugiés qui ont quitté le pays. [9]

    Le 2 Octobre, 2015, 70 factions rebelles et la Coalition nationale Syrienne, à une réunion d’urgence après le début des frappes aériennes russes, ont décidé de mettre fin à la coopération avec l’initiative de l’envoyé spécial de l’ONU Staffan de Mistura des “groupes de travail” pour étudier une résolution du conflit. Ces groupes ont complètement refusé une place pour Assad dans une période de transition et ils ont également rejeté les derniers appels effectués par les officiels du régime pour des pourparlers de négociation sous l’égide de l’organisation des Nations Unies. Ils ont également condamné les frappes aériennes russes et ont accusé la Russie de participer à la guerre contre le peuple syrien.

    Les objectifs des Etats-Unis et des puissances occidentales depuis le début du soulèvement en Syrie n’ont jamais été d’assister et d’aider les révolutionnaires syriens ou de renverser le régime d’Assad. Les Etats Unis ont essayé à l’opposé de parvenir à un accord entre le régime Assad (ou une section de celui-ci) et l’opposition liée à des régimes occidentaux et des monarchies du Golfe, qui ne sont pas représentatif du mouvement populaire et sont complètement corrompu.

    Pour rappel, selon les lignes directrices de Genève du 30 Juin 2012, adoptée à l’unanimité par les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l’ONU, il serait admissible pour Assad d’être à la tête d’un gouvernement d’administration de transition. Tout ce qui était nécessaire était le consentement de la délégation de l’opposition. De même, les délégués représentant le régime Assad pourraient refuser de consentir à des personnes désignées par l’opposition.

    De plus, l’absence ou le manque de toute organisation et d’assistance militaire décisive des Etats-Unis et / ou des pays occidentaux aux révolutionnaires syriens est une autre preuve de ce manque de volonté pour tout changement radical en Syrie. Le Wall Street Journal a publié un article en Janvier 2015 sur cette soi disant aide de la CIA qui disait notamment :

    “Certaines cargaisons d’armes étaient si petites que les commandants ont dû rationner les munitions. Un des commandants de confiance des Etats Unis a obtenu l’équivalent de 16 balles par mois par combattant. Les chefs rebelles devaient remettre les vieux lanceurs de missiles antichars pour en obtenir des nouveaux-et n’ont pas pu obtenir des obus pour les tanks capturés. Quand ils ont fait appel l’été dernier pour des munitions pour combattre des soldats liés à Al-Qaïda, les Etats-Unis ont dit non “.

    Le plan de Barack Obama, qui a été approuvé par le Congrès américain de 500 millions $ pour armer et équiper 5.000-10.000 rebelles syriens, mais qui n’a jamais été mis en œuvre, ne visait pas à renverser le régime Assad, comme nous pouvons le lire dans le texte de la résolution :

    “Le secrétaire à la Défense est autorisé, en coordination avec le Secrétaire d’Etat, à fournir une assistance, y compris la formation, des équipements, et des approvisionnements, à des éléments de l’opposition syrienne et d’autres groupes syriens sélectionnés de manière appropriée pour les objectifs suivants :

    1 Défendre le peuple syrien contre les attaques de l’État Islamique et sécuriser les territoires contrôlés par l’opposition syrienne.

    2 Protéger les Etats-Unis, ses amis et alliés, et le peuple syrien contre les menaces posées par des terroristes en Syrie.

    3 Promouvoir les conditions d’un règlement négocié pour mettre fin au conflit en Syrie ”

    Jusqu’à aujourd’hui, ce programme est un échec. « Le programme est beaucoup plus petit que ce que nous espérions », a reconnu le chef de la politique du Pentagone, Christine Wormuth, disant qu’il y avait entre 100 et 120 combattants en cours de formation, tout en ajoutant qu’ils recevaient une formation catastrophique. [10] Un général états unien a déclaré au Congrès que les Etats-Unis avait formé avec succès seulement “quatre ou cinq” soldats de l’opposition.

    Le chef d’état-major du groupe rebelle syrien, la Division 30, entrainé par les Etats Unis a d’ailleurs démissionné de son poste et s’est retiré du programme le 19 Septembre, 2015. Il a notamment parlé des problèmes comme « l’absence d’un nombre suffisant de recrues” et “le manque de sérieux dans la mise en œuvre du projet pour établir la division 30”. [11] L’autre problème rencontré par les États-Unis en Syrie a été et est de constituer des groupes armés fidèles à leurs intérêts à cause de la réalité sur le terrain. Ceci est dû à la décision d’une grande majorité des groupes de l’opposition à coopérer avec Washington que si ils sont en mesure de maintenir leur indépendance et leur autonomie, et si la collaboration comprend un plan clair pour le renversement du régime Assad. [12]

    Les Etats de la région comme la Turquie, l’Arabie Saoudite et le Qatar ont de leur côté financé divers groupes, dans leurs grandes majorité des mouvements islamiques fondamentalistes qui s’opposent aux objectifs de la révolution, pour leurs propres intérêts politiques. Le Qatar a par exemple un soutien clé de Jabhat Al Nusra, tandis que la Turquie a soutenu directement ou de manière passive divers mouvements islamiques fondamentalistes, comme la coalition Jaysh al-Fatah, mené par Jabhat al Nusra et Ahrar Sham, et de l’EI en leur permettant une totale liberté d’action des deux côtés de la frontière pour une longue période, au nord de la Syrie contre les groupes démocratiques de l’ASL et particulièrement pour s’opposer contre toute forme d’autonomie des régions kurdes sous la direction du PKK. Les réseaux privés des monarchies du Golf ont de leurs côtés agi et financés avec l’assentiment de leurs classes régnantes de divers mouvements islamiques fondamentalistes dans la perspective de transformer cette révolution populaire en guerre confessionnelle.

     Conclusion

    De nombreuses manifestations ont eu lieu dans le régions libérées de Syrie ces derniers jours pour condamner les bombardements russes en Syrie, ciblant dans leur grande majorité des civils et divers groupes d’oppositions armées, et non principalement l’EI. Plusieurs mouvements sur le terrain se sont également opposés aux bombardements russes [13]. Les comités de coordination locaux (CCL) en Syrie ont condamné les bombardements russes qui sont « de garantir la survie du régime Assad » et ils ont appelé « toutes les forces révolutionnaires à s’unir par tous les moyens et agir contre l’agression militaire russe » [14]. Le groupe du Front Sud de l’ASL a également condamné les bombardements russes et a caractérisé la présence russe et iranienne dans le pays comme une occupation. Ces deux derniers groupes ont appelé à une Syrie démocratique.

    Des forces de l’ASL ont également affirmé avoir abattu un avion militaire russe dans la province Lattakiyya le 3 octobre, 2015, et d’avoir arrêté le pilote après que ce dernier se soit éjecté de l’appareil. À confirmer.

    L’expansion militaire russe, en plus de l’expansion iranienne, est une offensive claire pour mettre fin complètement au soulèvement populaire syrien en voulant sauver et consolider politiquement et militairement le régime Assad et écraser toutes les formes d’opposition à ce dernier. Cette évolution se déroule avec la passivité et une certain assentiment des puissances occidentales, qui veulent à tout prix stabiliser la région et dès lors le départ d’Assad n’est plus une pré-condition à une période de transition.

    Les différentes puissances impérialistes mondiales et les régimes bourgeois régionaux, en dépit de leur rivalité, ont un intérêt commun dans la défaite des révolutions populaires de la région, et l’exemple le plus évident est celui de la Syrie. Les multiples initiatives de paix pour la Syrie, soutenues par toutes les puissances mondiales et régionales sans exception, avaient les mêmes objectifs depuis le début du processus révolutionnaire en 2011 : parvenir à un accord entre le régime Assad et une faction opportuniste – liée aux états occidentaux, la Turquie et les monarchies du Golfe – de l’opposition réunis au sein de la Coalition Syrienne.

    Il ne s’agit pas de refuser toutes les solutions à la fin de la guerre, oui le peuple syrien a trop souffert et la plupart d’entre eux veulent une forme de période de transition vers une Syrie démocratique, mais tout type de « solution réaliste », tel que les officiels et les analystes aiment présenter les choses, sur un moyen et long terme ne peut pas inclure Assad et d’autres criminels du régime qui ont du sang sur les mains, sinon il y aura une poursuite du conflit militaire en Syrie. Assad et ses différents partenaires dans le régime doivent être condamnés pour leurs crimes, et un processus similaire pourrait être mis en place pour les crimes des forces islamiques fondamentalistes et d’autres groupes. De plus, un quelconque changement minimum ne doit pas se limiter à la chute d’Assad mais à toute l’équipe des responsables de contrôlant les services de sécurité, l’armée et les différents appareils de l’Etat. Le caractère patrimonial du régime syrien doit être inclus dans toute compréhension pour un vrai changement.

    Tous les révolutionnaires doivent s’opposer à cette nouvelle intervention militaire impérialiste en Syrie pour sauver une dictature et qui se traduit par de nouvelles victimes civiles et souffrances. Les interventions de la Russie, l’Iran, le Hezbollah et divers groupes fondamentalistes irakiens shiites ont causé encore plus de morts en Syrie, en plus d’écraser un soulèvement populaire. En même temps, même si de manière relativement moins importante, nous nous opposons également aux interventions des monarchies du Golfe et de la Turquie dans le passé, qui étaient pour leurs propres intérêts et pour changer la nature de la révolution dans une guerre confessionnelle et pour leurs soutiens à des mouvements fondamentalistes islamiques qui ont attaqué, et continue de le faire dans de nombreuses régions, les révolutionnaires, des civils et des soldats de l’ASL.

    Nous devons également soutenir la livraison d’armes sans pré-condition politique de l’Occident vers les sections démocratiques de l’ASL et des forces kurdes pour se battre et lutter contre le régime d’Assad et les forces fondamentalistes islamiques.

    Enfin et surtout, les internationalistes du monde entier devraient continuer à soutenir les poches d’espoirs qui existent encore et résistent en Syrie composée de divers groupes et mouvements démocratiques et progressistes opposés à tous les acteurs de la contre-révolution : le régime d’Assad et les groupes fondamentalistes islamiques. Ce sont eux qui maintiennent encore les rêves du début de la révolution et de ses objectifs : la démocratie, la justice sociale, l’égalité et contre le confessionalisme.

    Comme écrit sur une pancarte par un révolutionnaire dans la ville de Zabadani : “” Les révolutions ne meurent pas, même si réprimé férocement. Elles sont l’engrais de la terre et donnent vie même après un certain temps ”

    Joseph Daher 4 octobre 2015

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article36019#nh1

  • Syrie : "Impossible de négocier avec Bachar" (JDD)

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    Pour Geneviève Garrigos, présidente d'Amnesty International, "la racine de la crise syrienne, c'est Bachar el-Assad". 

    Qu'avez-vous ressenti à la lecture du livre Opération César*, qui détaille les crimes du régime syrien entre 2011 et 2013?
    Ce que ce livre donne à percevoir, c'est la dimension de la machine à tuer du régime syrien. Je n'avais pu m'en rendre compte jusqu'à présent qu'en allant visiter les camps de réfugiés, notamment en Jordanie, et en interrogeant des victimes qui avaient pu fuir Dera ou Yarmouk. En lisant le livre de Garance Le Caisne, on prend conscience que ce ne sont pas des cas isolés mais des individus aux prises avec un système impitoyable et que leur seul salut pour y échapper est dans la fuite.

    Quand vous parlez de système, cela veut dire que la répression est dans l'ADN du régime syrien?
    Il y a en effet dans la mémoire de la société syrienne quelque chose de très fort et que l'on retrouve en Amérique latine : de nombreux Syriens revivent aujourd'hui ce qu'ont vécu leurs parents ou d'autres proches du temps de Hafez El-Assad. C'est le cas précisément pour le terrible massacre de Hama, qui a fait entre 10.000 et 20.000 morts en février 1982, lors de la répression de l'insurrection des Frères musulmans. Et donc, tous ceux qui croient qu'en tournant la page on finit par oublier s'aperçoivent que ce n'est pas possible. Le silence n'est pas l'oubli.

    La France veut judiciariser le dossier César pour poursuivre les auteurs syriens de crimes contre l'humanité. Est-ce vain ou trop tard?
    Ce n'est jamais vain ni trop tard. Ne serait-ce que pour participer à un combat contre la désinformation ambiante. Trop de doutes ont été entretenus pour que l'opinion change de vision sur ce régime. Le rapport César décrit minutieusement des faits qui se sont passés entre 2011 et 2013. Mais croyez-vous que la torture se soit arrêtée depuis? Rien n'a changé. Les réfugiés que l'on croise aujourd'hui sur les routes d'Europe ou dans les camps de réfugiés ne fuient pas seulement la guerre, les bombardements et la faim mais l'horreur de la répression menée par ce régime.

    Ils fuient également les exactions de Daech…
    Personne ne le nie. Mais si l'on veut régler aujourd'hui la crise syrienne, il faut s'attaquer à sa racine, et c'est le régime de Bachar el-Assad. Ce que fait Daech est évidemment atroce mais beaucoup plus visible. Tandis que le régime ne s'est jamais vanté de ses crimes, bien plus discrets. Mais vu la façon dont les soldats du renseignement militaire traitent les cadavres et méprisent chaque être humain, on imagine le travail de reconstruction psychologique gigantesque qui sera nécessaire au peuple syrien.

    Doutez-vous de la possibilité de voir un jour Bachar el-Assad se retrouver dans le box des accusés de la Cour pénale internationale, comme ce fut le cas pour Slobodan Milosevic bien des années après les accords de Dayton, qui mirent fin à la guerre en Bosnie-Herzégovine?
    Quand on lit le rapport César avec ses milliers de photos de cadavres, quand on lit les rapports d'Amnesty et de Human Rights Watch, on se dit qu'il est impossible de négocier avec Bachar. Tout traité de paix signé de la main des bourreaux ne fait qu'effrayer les victimes davantage et consacre un système d'impunité. Cette guerre est extrêmement complexe mais je suis convaincue que l'on ne peut pas se permettre de dire "on négocie, on signe et puis après on verra". Pour des millions de réfugiés, ce serait épouvantable, l'impossibilité de rentrer chez eux et d'obtenir justice. Si, en plus, des États s'allient avec Bachar pour faire la guerre contre Daech, tous ceux qui ont vécu l'horreur de ce régime avant 2012 se sentiront trahis. C'est pourquoi beaucoup nous disent : "Que Bachar parte, et nous, on s'occupera de Daech ensuite."

    *Opération César, au cœur de la machine de mort syrienne, de Garance Le Caisne (Stock), en librairies le 7 octobre.

    François Clemenceau - Le Journal du Dimanche dimanche 04 octobre 20

    http://www.lejdd.fr/International/Moyen-Orient/Syrie-Impossible-de-negocier-avec-Bachar

  • Communiqué de presse (Ujfp)

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    LA VIOLENCE ANTICOLONIALE PALESTINIENNE N’EST QUE LA CONSÉQUENCE DE LA VIOLENCE COLONIALE ISRAÉLIENNE

    Depuis plusieurs semaines, les violences entre l’État d’Israël et les résistants palestiniens s’intensifient à Jérusalem et dans toute la Cisjordanie.
    La politique israélienne visant à détruire la résistance palestinienne est bien calculée, rien n’est laissé au hasard. Le partage criminel des rôles entre les colons, en particulier religieux, et d’autres représentants du gouvernement israélien, est bien huilé.

    Dans un premier temps il s’agit de tester jusqu’où la conquête de l’Esplanade des Mosquées peut être poussée. Des colons l’envahissent, essaient d’imposer un partage de ce lieu saint, puis quand les manifestations palestiniennes contre cette situation s’amplifient, l’armée israélienne intervient brutalement.
    De même en Cisjordanie des colons commettent des crimes atroces, ainsi contre la famille Dawabsha dont le bébé et les parents ont été brûlés vifs près d’Hébron. Le gouvernement israélien fait mine de protester, les Palestiniens se révoltent, et l’armée intervient « en représailles » tout en cherchant à convaincre que la résistance palestinienne n’est qu’une branche d’un "terrorisme islamique" contre lequel il ferait rempart.

    L’État d’Israël calcule que face à la poursuite concomitante de la colonisation , les États-Unis, occupés par l’approche des prochaines élections et par Daesh, se contenteront de quelques protestations et les pays européens, occupés par l’afflux de centaines de milliers de réfugiés cherchant à échapper au chaos que ces mêmes pays ont contribué à créer par leur pillage et leur soutien aux pires dictatures et également par Daesh, persisteront à ne pas le sanctionner.

    Une nouvelle génération de résistants, des jeunes qui n’ont connu d’Israël que les forces militaires et les colons, se lève, mains nues et avec pour seules armes des pierres ou des cocktails Molotov. Constamment humiliée, sans espoir à l’égard d’une « autorité » palestinienne muselée par l’occupant, elle n’a plus rien à perdre. Sa résistance est un droit, un droit inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme de décembre 1948.

    Est-ce le commencement d’une troisième intifada : c’est la question que posent les médias, espérant parfois qu’aborder ainsi ces événements leur permettra de faire du buzz. Mais est-il besoin de nommer cette révolte, ou insurrection ? Nous savons que l’avenir du Proche et du Moyen Orient, voire du monde entier, sont indécis. Nous savons aussi que le peuple palestinien continue de résister dans sa vie quotidienne et qu’un grand élan de solidarité internationale continue à se développer, qu’il s’agisse du soutien à de multiple projets permettant au peuple palestinien de survivre dignement ou qu’il s’agisse de la Campagne BDS (Boycott - Désinvestissement - Sanctions) pour mettre fin à l’impunité d’Israël.

    Notre responsabilité est de poursuivre dans cette voie et d’appeler à une mobilisation d’ampleur pour imposer à nos gouvernants de cesser de soutenir le gouvernement israélien. Il ne s’agit pas seulement de reconnaître l’État de Palestine - toutes les reconnaissances antérieures n’ont pas fait bouger Israël d’un iota. Il s’agit de passer aux sanctions concrètes, la suspension de l’accord d’association de l’Union européenne avec Israël, la mise en œuvre des « lignes directrices » proscrivant tout financement qui profite aux colonies, l’expulsion d’Israël hors des fédérations sportives européennes, la traduction des dirigeants politiques et militaires israéliens devant la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

    Israël et ses amis essaieront toujours de faire passer leurs opposants pour des antisémites. Mais ils n’arrivent plus à imposer cet ignoble leitmotiv.
    L’opposition juive à la politique israélienne grandit, et contribue à mettre en échec la prétention d’Israël à représenter les Juifs du monde entier.
    Cette opposition souligne qu’en définitive la poursuite de cette politique est aussi criminelle envers les Palestiniens que suicidaire envers les Juifs qu’elle assimile à des colons racistes.

    Mobilisons-nous pour que cesse l’impunité d’Israël !

    Soutenons la résistance du peuple palestinien !

    Le Bureau national de l’UJFP, le 6 octobre 2015

     
  • Brest Afps

    pal
     
    Vous avez sans doute suivi  le regain de tension en Palestine ces derniers jours, résultat d’une politique de colonisation sans cesse accentuée de la part du gouvernement israélien.
     
    Face à cette situation, nous appelons à un
     
    Rassemblement à Brest
    ce samedi  15 h
    Place de la Liberté
     
    L’AFPS du Nord Finistère-Brest appelle à un rassemblement samedi 10 octobre à 15 h place de la Liberté. Au vu des événements graves qui se déroulent en Palestine occupée depuis plusieurs jours: 5 morts palestiniens, des centaines de blessés, des dizaines d’arrestations et 4 colons israéliens tués, le risque d’un embrasement général est réel.
     
    Pour l’éviter il est indispensable d’arrêter les colons, leurs provocations insensées et leur violence systématique. Protégés par l’armée israélienne, sûrs de l’impunité que leur accorde le gouvernement Netanyahou, ces colons armés jusqu’aux dents sont en train de créer délibérément une situation qui amènera chaos et dévastation en Palestine et dans toute la région.
     
    Nous apportons notre pleine solidarité au peuple palestinien sous occupation, soumis à la violence coloniale, mais nous disons aussi aux autorités françaises qu’elles doivent peser de tout leur poids pour faire entendre raison à Israël et pour faire appliquer le droit, en particulier le droit des palestiniens à leur autodétermination et à un Etat. »
     
    Et aussi: