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  • La santé du gréviste de la faim palestinien se dégrade : LIBEREZ BILAL KAYED ! (UJFP)

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    #Freedom4Bilal

    L’état de santé de Bilal Kayed palestinien en grève de la faim depuis un mois pour protester contre sa détention administrative en Israël s’est dégradé jeudi, selon un officiel palestinien et des membres de sa famille.

    Bilal Kayed a débuté le mois dernier une grève de la faim pour protester contre sa détention administrative par Israël, une mesure permettant l’emprisonnement d’une personne sans procès ni charge !

    Après avoir purgé une peine de 14 ans et demi de prison pour ses activités au sein du FPLP (Front populaire de libération de la Palestine), il devait être libéré le 15 juin.


    - Téléphonez, écrivez aux bureaux de la commissaire européenne Federica Mogherini +32 (0) 2 29 53516 , federica.mogherini@ec.europa.eu comme le propose le réseau de solidarité avec les prisonniers palestiniens samidoun.

    - Dans les réseaux sociaux utilisez le mot clé #Freedom4Bilal


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    La famille du gréviste de la faim Bilal Kayed lance un appel au monde

    dimanche 17 juillet 2016 - 06h:32 - Addameer - Traduction Info-Palestine

    Pour tous ceux qui ont une conscience vivante dans ce monde, pour tous ceux qui croient et se battent pour l’humanité – qui est bafouée aux yeux du monde entier – nous crions de toutes nos forces pour que l’on nous rejoigne, en disant : ASSEZ !

    Nous, la famille du prisonnier Bilal Wajeeh Mohammad Kayed, appelons à la justice. Bilal a passé quatorze ans et demi à purger sa peine injuste dans les prisons israéliennes. Il a passé quatorze ans et demi loin de sa famille et de ses amis – qui se sont languis chaque seconde pour lui, priant pour qu’il retrouve sa liberté bien méritée. Une liberté dont il avait rêvé à chaque instant tout au long de ces années, voulant se remettre debout et continuer sa vie comme une personne et rattraper le temps perdu derrière les barreaux sionistes, où les meilleures années de sa jeunesse lui ont été volées.

    Bilal a perdu son emploi, un certain nombre de ses amis, et n’a même pas eu la possibilité d’entendre les dernières paroles de son père ni n’a-t-il pu lui dire adieu – tout cela alors qu’il était maintenu dans l’isolement dans la prison sioniste, subissant une grande oppression et une grande souffrance dans la dernière année de sa peine. Bilal a été isolé de tout contact avec d’autres prisonniers et de toutes les visites de sa mère malade ; une mère qui rêvait du moment de sa libération, le moment de leur réunion et le moment de la paix, en sachant qu’il aurait la chance de revenir dans le monde et de reconstruire une vie qui lui avait été volée.

    Le 13 juin 2016, le même jour où il était censé respirer sa liberté, Israël a détruit ce rêve. Il a effacé les sourires sur les visages de la famille et des amis de Bilal. Israël a placé Bilal en détention administrative pour six mois ; une détention sans inculpation ni jugement. Où est l’humanité dans la détention d’un être humain le jour de sa libération après quatorze ans et demi ? Quel gouvernement dans le monde permettrait de priver un être humain de ses droits les plus élémentaires ? N’est-ce pas un crime d’ampleur internationale que de tolérer cette peine inhumaine pour un prisonnier devant être libéré ?

    Nous implorons la communauté internationale de se dresser contre un tel crime : la détention d’une personne pour aucune raison. Si cet acte est toléré, des centaines d’autres prisonniers palestiniens comme Bilal en seront les victimes et Israël continuera de violer les lois internationales, et sous le nez du monde entier. Bilal avait purgé sa sentence injuste longue de 174 mois ; il a passé ce qui aurait été les plus beaux jours de sa vie en prison purgé une peine pour des crimes dont un tribunal sioniste l’a accusé sans preuves.

    La liberté de Bilal a été effacée et une nouvelle peine de six mois d’obscurité lui a été infligée ! Bilal s’est révolté contre cette décision cruelle et il a immédiatement commencé une grève de la faim. Il ne prend que de l’eau depuis 30 jours, refusant tout aliment et tout substitut alimentaire, et rejetant toute intervention médicale. Son corps est en souffrance. Il a perdu plus de 30 kilos et a commencé à souffrir de graves évanouissements. Mettant en danger sa propre vie, Bilal insiste sur le fait qu’il n’assistera pas aux audiences du tribunal et il refuse de mettre fin à sa grève, lui qui a toujours été prêt à se sacrifier pour les droits de chacun. En réponse, Israël lui a proposé quatre ans d’exil, ce qu’il refusé. Après quoi l’administration pénitentiaire israélienne l’a remis en isolement et à l’écart de ses camarades.

    Nous croyons encore à l’humanité, et donc nous implorons la communauté internationale d’adopter la posture nécessaire et de se rassembler pour soutenir le droit de Bilal à sa liberté.


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    Bilal Kayed, un prisonnier palestinien dont la libération était prévue, doit poursuivre sa détention sans accusation

    source Samidoun traduit par Pour la Palestine

    Le matin du 13 juin, le prisonnier palestinien Bilal Kayed, dont il était prévu qu’il soit libéré ce jour-là après avoir séjourné quatorze ans et demi dans les prisons israéliennes, s’est vu brusquement infliger en lieu et place six mois de détention administrative, c’est-à-dire une incarcération sans accusation ni procès.

    Kayed, 34 ans, originaire d’Asira al-Shamaliya, près de Naplouse, a été privé à de très nombreuses reprises des visites de sa famille et il a effectué plusieurs séjours en enfermement solitaire, durant ses années de détention. Il a participé à de multiples grèves de la faim, notamment en février dernier, pour protester contre sa mise en isolement à la prison d’Ashkelon.

    Avant d’être transféré en cellule d’isolement à Ashkelon, Kayed avait été le représentant des prisonniers du Front populaire de libération de la Palestine, le parti politique palestinien de gauche, à la prison de Megiddo. Il faisait partie des douzaines de prisonniers transférés de Megiddo, en septembre 2015, dans le cadre d’une campagne de répression, répression consistant en autres en transferts, raids et agressions contre les prisonniers.

    Kayed a été emprisonné le 14 décembre 2001. Il avait 19 ans, à l’époque. Durant son séjour en prison, il a travaillé d’arrache-pied pour parfaire son éducation et son rôle de représentant de ses compagnons prisonniers.

    Kayed fait partie des 750 Palestiniens emprisonnés en détention administrative, c’est-à-dire sans accusation ni procès. Les ordonnances de détention administrative, délivrées au nom du commandant militaire de l’occupation israélienne de la Cisjordanie, valent pour des périodes allant de un à six mois, et ce, sur base de preuves tenues secrètes. Elles sont renouvelables à l’infini.

    La détention administrative de Bilal Kayed est manifestement une tentative d’éviter arbitrairement de libérer un prisonnier et combattant palestinien qui a passé plus de 14 ans dans les prisons israéliennes. Depuis son adolescence, Kayed est connu comme un organisateur hors pair et un dirigeant de la jeunesse palestinienne. Ceci illustre une fois de plus le recours à la détention administrative en tant que méthode de ciblage des meneurs de la communauté et société palestinienne, et en tant que pratique coloniale systématique censée dépouiller le peuple palestinien de ses organisateurs efficaces et d’isoler du peuple les dirigeants palestiniens en devenir.

    Le Réseau Samidoun de solidarité avec les détenus palestiniens réclame la libération immédiate de Bilal Kayed et de tous les prisonniers palestiniens détenus dans les prisons israéliennes et il invite instamment tous les amis du peuple palestinien à s’organiser, à protester et à agir pour réclamer sa liberté et celle des 7 000 Palestiniens qui se trouvent actuellement en prison.

     
    mercredi 20 juillet 2016
     
  • Ces arabes, héros perdus de la Guerre d'Espagne (1936-1939)

    Ci-dessus, en décembre 1936, André Malraux avec Julien Segnaire (à droite) et Mohamed Belaïdi (à gauche), membres des Brigades internationales, mort le 27 décembre 1936 lors d’un combat aérien.
     
     
    Même si les historiens ont préféré insister sur les Maures qui ont servi Franco, des centaines de volontaires arabes ont combattu aux côtés des républicains espagnols entre 1936 et 1938. On a commencé à le dire à Lausanne, lors d’un colloque consacré aux Brigades internationales [1].
     
    Ce dossier, Abdelatif Ben Salem, sociologue de formation, Tunisien hispanophile, Parisien passionné d’histoire, le connaît bien. Voila des années qu’il est sur les traces de ces combattants inconnus. Et qu’il est certain que Said Mohamed, l’ouvrier anar de la banlieue parisienne devenu le responsable politique des étrangers de la colonne Durruti, n’était pas le seul Arabe à se battre aux côtés des antifranquistes.
    Dans une première intervention sur ce sujet à Valence en 1988, il a montré que de nombreux Algériens et Tunisiens et que des Palestiniens avaient rejoint les Brigades internationales. Ils l’avaient fait, parfois, pour prouver que contrairement à ce que proclamait la propagande républicaine, les Arabes n’étaient pas tous des fascistes. Et parfois par devoir militant

    Belaïdi et l’escadre España.

    Depuis, Ben Salem a approfondi ses recherches. Jean Belaïdi est toujours en tête de sa liste. Le vrai prénom de ce brigadiste, connu des lecteurs de L’Espoir d’ André Malraux sous le nom de Saïdi, est Mohamed. Dans la véritable histoire Mohamed Belaïdi, ouvrier mécanicien, s’engage pour montrer qu’on peut vaincre le fascisme les armes à la main. À 25 ans, ce volontaire d’origine algérienne arrive à Albacete, lieu de rassemblement et de formation des interbrigadistes. C’est là que Malraux, qui a besoin de mécaniciens pour l’escadre aérienne España, le recrute. Ben Salem explique que Malraux était très attaché à Belaïdi, qu’il considérait comme l’exemple même du volontaire courageux et convaincu.

    Au début, Belaïdi n’est qu’un « rampant » : son travail est au sol. Mais, le 27 décembre 1936, il embarque à bord d’un Potez 540 comme mitrailleur. Au retour de mission, l’avion est intercepté et abattu par des Heinkel allemands près de Teruel. La plupârt des membres de l’équipage s’en sortent , mais pas Belaïdi, qui a été criblé de balles. Quand la nouvelle parvient à Malraux, il organise les secours. Cet épisode, il l’a raconté, notamment dans la dernière séquence de son film Espoir, Sierra de Teruel. Où l’on voit passer un cercueil surmonté d’une mitrailleuse tordue, comme l’était cellede Belaïdi.

    Autre personnage emblématique : Rabah Oussidhum.

    D’après sa biographie officielle, sans doute un peu arrangée pour la bolcheviser, ce soldat français, né en Algérie a participé, dans les années 20, à la guerre du Rif [2] et il a déserté pour rejoindre les Rifains. Ce qui est sûr, en tout cas, c’est qu’il est ensuite revenu en France, où il a adhéré au Parti communiste. Il a ensuite appartenu au comité « affaires coloniales » de ce parti. C’est en tant que cadre militaire qu’il rejoint les Brigades internationales en Espagne. Bombardé capitaine, il commande la compagnie Ralph Fox, qui dépend de la 14ème brigade. Il est mort au combat le 17 mars 1938, à Rio Guadalupe, en Aragon.
     
    Sidqi, du PC palestinien.
     
    Parmi tous ces volontaires, le Palestinien Nadjati Sidiqi est l’un des personnages les plus passionnants. Né en 1905 à Jérusalem d’un père turc et d’une mère arabe, Sidiqi adhère, dans les années 20, à la Hisadrout, le syndicat fondé par les juifs, et au Poalé Zion, un groupe sioniste d’extrême gauche. Il participe ensuite à la fondation du Parti communiste palestinien, où cohabitent militants juifs et arabes. Activiste remarqué, il est appelé à suivre une formation politique à Moscou.
     
    Il revient en 1929 à Jérusalem et participe au travail d’arabisation du PCP. En 1930, il est arrêté par les Anglais et condamné à trois ans de prison. Après quoi il part en France.
    Ben Salem explique que c’est sur la suggestion de Manouilski, président de la section orientale de l’Internationale communiste, que Sidqi passe en Espagne en août 1936. Dans ses mémoires, malheureusement non publiées, Sidqi décrit son séjour en Espagne. Il commence par être enthousiasmé par le courage du peuple espagnol.
     
    Prenant contact avec la direction du PSUC (le Parti socialiste unifié de Catalogne, union des socialistes et des staliniens mais contrôlée par ces derniers), il décide de s’occuper de la propagande dirigée vers les soldats marocains de Franco. Il part pour Madrid, rencontre les leaders du PCE et commence à rédiger des appels dans Mundo Obrero, qu’il signe du pseudo de « Mustapha Ibnu Jala ». Il anime aussi l’association hispano-marocaine fraîchement créée.
     
    Mais, rapidement, il se trouve face à une double contradiction. D’une part il a du mal à faire comprendre à la gauche espagnole (sauf aux indépendantistes catalans, aux anarchistes et aux poumistes, tous favorables aux autonomies) la nécessité de la décolonisation. Ensuite il appelle les Marocains à la désertion, leur promet un bon accueil, mais s’aperçoit vite que s’ils sont pris par les troupes républicaines, ces mêmes Marocains risquent leur vie.
     
    Racisme côté républicain.
     
    Il découvre ainsi que la propagande gouvernementale et celle du PCE ne s’embarrassent pas de nuances. Ce sont tous des Marocains qui sont dénoncés comme envahisseurs.  Dolores Ibarruri, dirigeante stalinienne plus connue sous son nom de Pasionaria, n’a-t-elle pas qualifié les soldats marocains de Franco de « horde mauresque, sauvage, ivre de sensualité, qui se répand en violant atrocement [les] filles et [les] femmes » ?
    « Le mythe du Moro assoiffé de sang devint un abcès de fixation, explique Ben Salem. Jusqu’à nos jours il a détourné l’opinion des erreurs tragiques que la République a commise en rejetant l’alliance avec un mouvement nationaliste marocain qui aurait pu soulever le Rif sur les arrières de Franco. »
     
    Sidqi, lassé par les mots d’ordre racistes de ses camarades, se révolte quand il entend parler d’assassinats de prisonniers marocains.
     
    La coupe déborde lorsque, pendant la bataille de Madrid en novembre 1936, la junte de défense fait rafler des musulmans dans les rues pour les incorporer de force dans l’armée et les jeter en première ligne. Pratiquement tous périssent dans ces combats, à l’exception de quelques-uns qui sont fusillés pour abandon de poste. En décembre 1936, Sidqi quitte l’Espagne : « Je sentais au fond de mon cœur que ma mission était en train d’échouer, écrira-t-il. Je devais chercher un autre chemin plus utile… »
    Il tente de partir pour l’Algérie afin de monter une radio en dialecte marocain. Il échoue. Il veut retourner en Espagne, mais le PCF, en raison des désaccords politiques que désormais il ne cache plus, le lui interdit. En 1940, il revient en Palestine et travaille pour une radio. En 1948, lors du conflit israélo-arabe, il part pour Chypre. 
    Il meurt à Athènes le 17 novembre 1979.
     
    Edouard Waintrop, 13 janvier 1998
     

    Publié par Saoudi Abdelaziz

    Source : Socialgerie.net

    NOTES

    [1“Libération” du 27 et 28 décembre 1997

    [2Guerre menée par les français contre Abd-el-Krim qui réclamait l’indépendance du Maroc.

    http://www.algerieinfos-saoudi.com/2016/07/ces-arabes-heros-perdus-de-la-guerre-d'espagne

  • Nouveautés sur Association France Palestine Solidarité

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  • Alep: appel urgent (Al'Encontre.ch)

    Des habitants d'Alep à la recherche de survivants dans les décombres de l'attaque aérienne du 8 juillet 2016

    Des habitants d’Alep à la recherche de survivants dans les
    décombres de l’attaque aérienne du 8 juillet 2016

    Le Conseil local de la ville d’Alep, élu démocratiquement pour représenter plus de 400 000 personnes vivant à Alep, tient à informer les partenaires politiques sur la scène internationale, ainsi que les organisations civiles, les ONG et les médias que les civils vivent sous la menace d’une catastrophe. Elle coïncide avec le siège imposé par le régime d’Assad, fort de l’appui des mercenaires iraniens et des miliciens de Hezbollah, soutenu par l’aviation russe ; siège qui se renforce puisque a été coupée l’unique voie de ravitaillement en nourriture et en carburant pour les civils. Ce siège constitue une forme de punition collective.

    Actuellement, les civils souffrent d’un manque de nourriture, manque en eau à la suite d’une pénurie grave d’alimentation [il manque aussi bien de l’eau que de la farine pour faire du pain, ainsi que du mazout pour les fours] alors qu’on fait face à un été chaud, et de carburant. A long terme, les femmes, les enfants et les hommes souffriront d’une situation catastrophique conduisant même à une situation pire que celle actuelle et à des conséquences plus désastreuses.

    Celui qui assassine enfants et parents actuellement n’hésitera pas à détruire toute la ville sur les têtes de ses habitats qui sont restés. Faut-il rappeler que protéger les civils par toutes les parties impliquées lors des opérations militaires est un devoir consacré dans les pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme et aux conventions ratifiées par le gouvernement syrien.

    Le Bureau exécutif demande l’intervention des organisations internationales, des gouvernements régionaux et internationaux impliqués dans la situation en Syrie ainsi que des organisations non gouvernementales pour faire respecter un cessez-le-feu et obliger les forces du régime, ses mercenaires et l’aviation russe à lever le siège imposé de facto aux civils de la ville, empêcher une catastrophe humanitaire et assurer une vie décente aux citoyens tel que stipulé dans les lois célestes et dans les chartes des droits de l’homme.

    Brita Hagi Hasan
    Président du Conseil local d’Alep, le 11 juillet 2016

    (Article publié sur le site Souria Houria  le 13 juillet 2016)

    Publié par Alencontre le 18 - juillet - 2016
     
  • 18 jours dans la cage de Gaza (UJFP)

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    Sortir de Gaza pour un Palestinien, c’est en général impossible. La quasi-totalité des moins de 20 ans ne sont jamais sortis de la cage et ils ont connu trois guerres qui ont tué plus de 4000 personnes et dévasté ce petit territoire. Pour des militant-e-s français-e-s, aller là-bas relève de la course d’obstacles, il nous a fallu presque deux ans d’efforts pour y parvenir.

    • Quand on sait que Gaza c’est 2 millions de personnes sur 360 km2 (à peine plus grand que Marseille qui compte deux fois moins d’habitants) on peut s’imaginer un tissu urbain très serré et on a du mal à imaginer des zones agricoles avec animaux et cultures. Et pourtant elles existent.

    Le Syndicat des comités de travailleurs agricoles (UAWC) semble très actif à Gaza. Pouvez-vous nous préciser ses activités, ses positions par rapport au développement. Des échanges agricoles existent-ils avec les territoires palestiniens ? La question de la pêche est-elle liée à celle de l’agriculture ?

    La superficie cultivée est passée en quelques années de 130 Km2 à 73 à cause des destructions et de la pression démographique (la population augmente de 3,9% par an). Sauf sur la « zone tampon », le long de ce que l’occupant appelle par euphémisme la « barrière de sécurité », ce n’est pas une grande zone agricole continue mais plutôt des petits champs, des lopins de terre avec parfois des serres au milieu de zones habitées. Gaza produit des fruits et légumes, mais aussi du blé. Les Israéliens ont parfois imposé cette culture pour mieux surveiller la population.

    Il y a 4000 vaches et 65 000 moutons à Gaza. Beaucoup de volailles et quand on mange de la viande, c’est presque toujours du poulet. Mais les Gazaouis savent en faire quelque chose de succulent. La quasi-totalité de la production agricole est destinée au marché intérieur et elle est insuffisante, il faut importer. Il y a des cultures traditionnelles à Gaza comme les fraises qui sont particulièrement goûteuses. Elles sont parfois exportées, mais si la frontière se ferme, on fait de la confiture.
    L’agriculture a un gros problème d’eau. Dans la ville de Gaza, celle-ci est salée et impropre pour l’agriculture. Là où elle est de meilleure qualité, il manque des puits et des châteaux d’eau. Faute d’électricité (7-8 heures par jour en moyenne), les pompages sont insuffisants, pour les melons par exemple. Il faut savoir que, pendant la guerre de 2014, l’armée israélienne a pulvérisé en priorité l’appareil productif : les champs ravagés par les tanks, les puits, les usines, les serres. Les reconstructions sont loin d’être achevées, faute de ciment notamment.

    Le commerce extérieur de Gaza est presque totalement contrôlé par Israël. La frontière de Rafah avec l’Égypte n’est ouverte que très rarement par volonté délibérée du régime du Maréchal Sissi de punir collectivement le peuple de Gaza. Alors, au poste frontière (des camions) d’Abou Salem (Keren Shalom), il y a des dizaines de semi-remorques et un trafic incessant. Tout est fait par l’occupant pour que Gaza soit un « marché captif ». C’est Israël qui décide ce qui peut entrer et ce qui peut sortir. Le commerce avec la Cisjordanie, des pays arabes ou la Turquie existe, mais il est moins important que le commerce avec Israël. La stratégie de l’occupant, c’est de priver Gaza de produits indispensables pour l’obliger à importer des produits israéliens. Du coup, le BDS de Gaza ne prône le boycott que quand il existe une alternative.

    L’UAWC (Union des Comités de Travailleurs de l’Agriculture) est avec le PCHR (Centre Palestinien des Droits de l’Homme).une de ces très grosses associations palestiniennes. Elle a été fondée en 1986 et fait partie de Via Campesina. Ses fondateurs font partie de la gauche (membres ou anciens membres du FPLP, Front Populaire de Libération de la Palestine, parti marxiste fondé par Georges Habache). Son dirigeant actuel Mohamed al Bakri a, comme beaucoup de nos interlocuteurs, connu les geôles israéliennes. L’UAWC a mis tous ses moyens en œoeuvre pour que, le plus vite possible, les agriculteurs puissent recommencer à produire, après les destructions de 2014. L’idée est que Gaza doit produire et ne pas vivre d’assistance et de charité. Cette volonté d’indépendance s’accompagne d’une réflexion écologique impressionnante. Nous avons pu voir des fraises « hors sol » poussant dans un peu de tourbe (achetée). L’économie d’eau est de 95%. Dans les bassins d’eau, tout est prévu : il y a des poissons, on utilise les déjections pour fertiliser. Et ils mangent les larves de moustiques. Aucun pesticide, aucun produit chimique. On récupère ce qu’il faut pour semer et une pépinière permet aux agriculteurs une indépendance certaine. L’UAWC, grâce à ses liens internationaux, a pu se procurer des panneaux solaires ou des serres.

    Les pêcheurs constituent une des catégories sociales les plus sinistrées à Gaza. Ils sont organisés en syndicat ou dans l’UAWC. La pêche a toujours été, depuis l’Antiquité, une activité traditionnelle à Gaza. Elle a été florissante quand le Sinaï était occupé par Israël et que les pêcheurs gazaouis pouvaient pêcher jusqu’au canal de Suez. Ils sont 4500 aujourd’hui à Gaza ville mais aussi à Khan Younis et Rafah. Les Israéliens ont édicté des règles terribles : interdiction de pêcher dans les zones frontières (avec Israël ou l’Égypte), limitation presque partout à 11 Km). Les vedettes israéliennes violent leur propre « légalité » en attaquant les pêcheurs beaucoup plus près de la côte. Ces attaques sont violentes. Des pêcheurs ont été tués. Tous les jours, des bateaux sont arraisonnés ou abandonnés en mer après l’arrestation des occupants (qu’on emmène en Israël à Ashdod). Les canons à eau envoient de l’eau fétide. Et puis, il y a très peu de poissons près de la côte. Un exemple de l’abandon que subissent les pêcheurs (à Khan Younis) : quand les Israéliens décident qu’un bateau pêche en eaux interdites, ils envoient son identification à l’Autorité Palestinienne (à Ramallah) qui la transmet au ministère à Gaza (donc au Hamas) et la police de ce parti arrête les pêcheurs. Pourquoi cet acharnement de l’occupant ? Pour détruire l’économie traditionnelle de Gaza mais aussi pour obliger Gaza à importer du poisson israélien (parfois pêché dans leurs eaux).

    • On s’aperçoit, à vous lire, qu’il existe à Gaza une forte activité associative de genres divers. Que la société dite « civile » est très active et que se mélangent des structures traditionnelles encore très fortes qui soudent cette société, avec des formes plus actuelles créées par la situation politique et militaire. Pouvez-vous nous en dire plus et si cette impression est bonne ?

    La Palestine n’a pas d’État, mais elle a deux gouvernements irréconciliables. Tous nos interlocuteurs nous ont affirmé que les deux problèmes les plus graves sont l’occupation (le blocus) et la division palestinienne. Celle-ci a des conséquences dans tous les domaines. Jusqu’à la caricature : à l’université al Aqsa, il y a deux doyens. Il y a à Gaza des milliers de fonctionnaires payés par Ramallah et ne travaillant pas (s’ils travaillent pour le Hamas, ils ne seront plus payés) et des milliers de fonctionnaires recrutés sur base clientéliste par le Hamas et très peu payés. Les ressources du Hamas viennent de taxes diverses et de ce que beaucoup de nos interlocuteurs ont qualifié de trafic.

    Du coup, il y a à Gaza un chômage plus que massif avec un paradoxe. La population de Gaza est massivement éduquée et souvent diplômée. Plus de 90% des diplômés ne trouvent aucun travail. Et des tâches indispensables à la société ne sont assumées par aucun des deux gouvernements, à la fois faute d’argent et de volonté politique.

    Alors, on assiste à un phénomène incroyable : des milliers, des dizaines de milliers de chômeurs acceptent gratuitement, parfois même en payant de leur poche, de pallier les carences. Nul doute que leur action est décisive pour permettre que la société ne s’écroule pas.

    Quelques exemples : dans les hôpitaux, médecins et infirmières sont payé-e-s. Mais il n’y a quasiment pas de psychologues alors que les besoins en aide psychologique sont énormes, aussi bien pour les patients (surtout les enfants) que pour le personnel soignant, en stress permanent. Alors la psychologue de l’hôpital Shifa a fait un appel via Facebook. 1000 personnes ont répondu. Elle a fait un examen et pris les 26 « meilleur-e-s ». Tou-te-s sont diplomé-e-s, souvent en psychologie. Ils/elles paient leurs transports et leurs uniformes. Ils/elles préfèrent travailler plutôt que ne rien faire avec l’espoir que l’expérience acquise leur permettra d’avoir un emploi.

    Autre exemple : les deux gouvernements se renvoient la balle pour expliquer le manque d’électricité. Pour le Hamas, c’est parce que l’Autorité Palestinienne prélève des taxes énormes sur le fuel nécessaire à la centrale électrique. Pour le Fatah, c’est parce que le Hamas détourne de l’électricité sans la payer. En attendant, si les plus riches ont des systèmes (générateurs, groupes électrogènes) pour toujours avoir du courant, les plus pauvres ont des bougies et les incendies accidentels sont fréquents. Alors une petite association de bénévoles réussit à procurer aux plus pauvres des générateurs.

    Dernier exemple : des associations communautaires musulmanes étrangères (notamment françaises) donnent de l’argent (pour le ramadan) aux déshérités. L’argent peut être viré, mais comment le transformer en colis de première nécessité et distribuer ces colis ? Là encore le bénévolat permet de trouver un organisateur et des petites mains pour la distribution. Nous avons accompagné deux fois une distribution dans le bidonville sordide (peuplé de Bédouins exclus de toute aide officielle) d’al Mugraga. Il ne fait pas de doute, que sans ce réseau associatif, la vie quotidienne deviendrait très difficile.

    Il faut y ajouter la famille. La société de Gaza est très traditionnelle. Les familles sont très nombreuses et dans une famille, on ne laisse personne sur le bord de la route. Il y a proportionnellement moins de mendiants à Gaza qu’en France. Les familles se saignent pour pousser les enfants le plus loin possible dans les études. Il existe aussi dans la partie rurale du territoire d’autres structures traditionnelles (les mokhtars par exemple) qui permettent aux agriculteurs de faire front ensemble aux difficultés. Quelque part, la « tradition » qui bien souvent brime les libertés individuelles, aide à Gaza, à une résistance collective. Ce sont les mokhtars qui pilotent la reconstruction, l’irrigation, la commercialisation. Ils ont la confiance de la population.

    • Vous avez rencontré les représentants de plusieurs partis politiques. Pouvez-vous nous dresser un tableau, forcément succinct, de ces partis, de leurs positions et de leur force ? Par exemple le Front populaire de lutte pèse-t-il par rapport au Hamas ?

    Nous avons rencontré des dirigeants du FPLP, du PPP (le parti communiste), de FIDA, du Front Populaire de lutte (ces deux partis de gauche défendent Oslo), du Fatah, du Jihad Islamique et du Hamas.

    Les 4 premiers sont des partis de gauche, mais, même si tous souhaitent une unité de la gauche (certains préfèrent dire les partis démocratiques) pour incarner une troisième voie, ils n’y arrivent pas. Les plus optimistes disent que la gauche unie représenterait 18% des voix. Dans les associations, on retrouve souvent des militants ou ex-militants de gauche. Le FPLP est contre Oslo et pour « un seul État », à la différence des trois autres. Pour ces partis, puisque « le monde est mauvais », il faut s’accrocher à ce que la communauté internationale a promis aux Palestiniens, même s’ils reconnaissent qu’elle n’a jamais cherché à faire appliquer ce qu’elle a promis.

    Au Fatah, nous avons rencontré deux dirigeant-e-s. Une sincère et l’autre un parfait bureaucrate pratiquant la langue de bois. Le Fatah a tendance à nier la corruption qui est pourtant une des raisons de leur défaite électorale en 2006. Tous les partis favorables à Oslo et aux deux États sont en pleine contradiction dès qu’on parle du droit au retour des réfugiés. Aucun parti palestinien ne peut transiger sur cette question fondatrice et incontournable pour les Palestiniens. Mais comment envisager le droit au retour dans un État palestinien réduit aux territoires conquis par Israël en 1967 ? Les faire « revenir » à Gaza ? Ils y forment déjà les 3/4 de la population. Alors tous admettent quelque part que même l’établissement d’un État palestinien sur les territoires occupés ne serait pas la fin du conflit.

    Le Jihad Islamique est un parti politique peu connu. On ne peut que recommander pour le comprendre le livre « De la théologie à la libération » dont un des auteurs Wissam al Haj est originaire de Gaza. Le secrétaire général de ce parti a un fils qui est en prison depuis 14 ans et, bien sûr, il ne peut pas le visiter. Ce parti, en s’inspirant à la fois du droit islamique et du droit international, est pour une libération complète de la Palestine. Les Juifs pourront rester, mais le drapeau sera palestinien. Le Jihad a payé un très lourd tribut à la lutte armée qu’il mène (dirigeants assassinés, prisonniers de très longue durée). Il est pour l’unité palestinienne, servant parfois de médiateur entre les deux grands partis antagonistes. Le Jihad (comme le Hamas) voudrait adhérer à l’OLP et accuse le Fatah de s’y opposer pour ne pas y perdre la majorité.

    Nous avons été reçu-e-s au Parlement par deux députés du Hamas. Comme devant tous nous interlocuteurs, nous nous sommes présenté-e-s sans dissimulation : BDS, mouvement de solidarité français, UJFP … Comme partout, nous avons été reçu-e-s avec chaleur et curiosité. Juste une petite tentative de nous convertir à l’Islam et un brin de stupéfaction en entendant une explication sur ce qu’est un Juif athée. Le Hamas, en exerçant un pouvoir, parfois intolérant, est souvent très impopulaire. Nous n’avons pas senti de peur chez celles et ceux qui le critiquent ou le haïssent. Comme l’Autorité Palestinienne en Cisjordanie, le Hamas est victime de ce qui est inéluctable dans un pays qui n’a pas d’État mais qui a deux gouvernements rivaux. Il est accusé, probablement à juste titre, de clanisme, de corruption et de diriger une économie souterraine. Lui aussi essaie d’empêcher les tirs de roquettes sur Israël. Nous avons interrogé les deux députés sur la peine de mort. Les yeux dans les yeux, ils nous ont affirmé qu’elle était dans la loi et qu’elle n’était pas appliquée. Le lendemain, trois condamnés de droit commun étaient exécutés. Les précédentes exécutions (de personnes réputées être des espions) avaient eu lieu pendant le massacre de 2014. Le communiqué du Hamas approuvant l’attentat de Tel-Aviv a été très critiqué dans une population lasse de subir les bombardements aveugles israéliens.

    En ayant rencontré tous les partis, nous ne voyons pas d’issue à ce qui est une grande victoire de l’occupant : la division palestinienne. Les deux partis rivaux ont trop intérêt, malgré leurs dires, à ce qu’elle continue.

    • Vous dites que Gaza est puni par Israël parce qu’il a voté Hamas. Et en même temps qu’Israël se fiche de qui a le pouvoir pourvu qu’il y ait la « tranquillité ». Les forces islamistes comme Daesh progressent-elles à Gaza ? Quel est l’intérêt d’Israël ?

    Le but des dirigeants israéliens est surtout, de ne pas avoir de partenaire pour la paix. S’ils en ont un, ils l’emprisonnent, l’humilient, l’exilent ou l’assassinent.

    Donc le Hamas au pouvoir à Gaza, ça convient parfaitement aux dirigeants sionistes. Dès la prise du pouvoir du Hamas en 2007, l’Union Européenne, de sa propre initiative et avant toute demande israélienne, a déclaré le blocus de Gaza. Neuf ans plus tard, le Hamas est toujours sur la liste noire des organisations terroristes et la « communauté internationale » s’accommode parfaitement de cette punition collective. La peur des militaires putschistes égyptiens vis-à-vis de tout ce qui ressemble aux « Frères Musulmans » est telle qu’Israël n’a rien à demander au Maréchal Sissi. De sa propre initiative, celui-ci referme la cage et la frontière de Rafah est encore plus hermétique que celles d’Erez ou de Keren Shalom qui séparent Gaza d’Israël.

    Pour les Frères Musulmans, Gaza est la première « expérience » de micro-État islamique et ils s’y accrochent. Les Israéliens ont montré volontairement une férocité et une barbarie totales chaque fois que des roquettes sont parties de Gaza (pour atterrir le plus souvent en plein désert). Il y avait un double but dans ces destructions totales et ces crimes contre l’humanité : signifier au peuple palestinien que personne ne viendrait les secourir et que tout était permis. Et aussi obliger le Hamas à « assurer la sécurité de l’occupant » comme l’Autorité Palestinienne le fait depuis longtemps à Ramallah.

    Donc le Hamas au pouvoir à Gaza, c’est parfait pour l’occupant.

    • Y a-t-il un danger de progression des djihadistes à Gaza ?

    Tout d’abord, il faut savoir que Hamas et Daesh se haïssent. Des militants du Hamas ont été massacrés avec férocité dans le Sinaï et dans le camp de Yarmouk (banlieue de Damas) par Daesh.

    On nous a raconté ce qui s’est passé en 2014. Deux attentats contre l’Institut Français à Gaza. Puis en janvier 2015 après la tuerie de Charlie Hebdo et la reparution du journal avec la caricature du prophète disant « tout est pardonné », des manifestations salafistes avec drapeau de Daesh ont eu lieu à Gaza. La réaction du Hamas a été terrible et efficace : arrestations massives, traque systématique.
    A priori, il ne semble pas qu’il existe une importante base sociale pour les Salafistes à Gaza. Parce que la population est très éduquée mais surtout parce que la question nationale reste la question centrale en Palestine.

    Quasiment tout le monde (sauf les marxistes et les Chrétiens) est musulman pratiquant à Gaza. Nous avons entendu de nombreuses fois s’exprimer une conception assez ouverte de l’Islam. Un hadith dit « je préfère que La Mecque soit détruite pierre par pierre plutôt qu’on tue un homme ». Beaucoup ont rappelé qu’avant l’occupation, musulmans, chrétiens et juifs ont vécu ensemble dans la tolérance. Cet islam met en avant la solidarité et le fait de ne pas abandonner les pauvres ou les laissés pour compte. Bien sûr, la prolongation de l’enfermement à Gaza pourrait faire évoluer les choses mais à notre sens, pas dans un avenir proche.

    Pour l’occupant, peu importe qui dirige Gaza. L’important est de parachever ce qu’avait imaginé Sharon en évacuant les colonies de Gaza : séparer ce territoire du reste de la Palestine et en faire un laboratoire.

    • Où en sommes-nous avec BDS et ce mouvement est-il vécu comme essentiel à Gaza ?

    Nous avons rencontré les animateurs du BDS à Gaza. Il faut comprendre que, Gaza étant un marché captif, le boycott des produits israéliens n’a de sens que quand il y a une alternative avec des produits locaux ou des produits importés des pays arabes et de Turquie. La volonté des Gazaouis de reconstruire en priorité après la guerre de 2014 l’appareil productif pour être le plus possible indépendants et ne vivant pas de la charité est significative.

    Les animateurs du BDS à Gaza parlent essentiellement de boycott universitaire et culturel. Ils sont parfaitement au courant de l’offensive mondiale lancée par les sionistes pour criminaliser le BDS.

    Il est impossible d’imaginer qu’aujourd’hui, tous les Palestiniens parlent d’une même voix. Des courants politiques sont prêts à accepter des compromis défavorables aux Palestiniens, tout simplement parce qu’ils ne voient pas d’alternative.

    Le BDS représente à Gaza un renouveau du discours politique. Ne pas mettre en avant la diplomatie et l’ONU mais affirmer le droit international et ses principes (liberté, égalité, justice).

    Devant l’absence de toute solution politique, l’idée que celle-ci viendra d’une conjonction de la résistance de la société palestinienne et des sociétés civiles à l’étranger poussant leurs gouvernements à sanctionner Israël est parfois le seul espoir. Aucun des partis que nous avons rencontrés n’a critiqué le BDS.

    • Accessoirement pourquoi Sand est-il contre le retour des réfugiés ?

    Shlomo Sand a fait un grand travail de déconstruction du sionisme. S’il nie avec force l’existence d’un peuple juif descendant des Judéens de l’Antiquité, il est défenseur de l’existence d’un peuple israélien. Il reconnaît la Nakba comme crime fondateur mais ajoute aussitôt à propos d’Israël : « Même un enfant né d’un crime a droit à l’existence ». Après s’être opposé longtemps au boycott d’Israël, il s’y est rallié récemment (« comment j’ai appris à aimer les sanctions »).

    Sur la question des réfugiés, il donne l’exemple des millions d’Allemands qui ont quitté des territoires de l’Est (Prusse-Orientale, Sudètes, Pologne) après des centaines d’années de présence. Il dit à leur sujet qu’il faut admettre que des événements historiques sont parfois définitifs et que vouloir inverser le cours de l’histoire peut avoir des conséquences dramatiques.

    Il a fait un travail historique sur la Nakba. Il est pour sa reconnaissance et l’indemnisation des victimes et de leurs descendants. Mais il pense que la « menace » de leur retour est un ciment puissant pour que la société juive israélienne refuse toute forme de paix.

    Nous avons entendu à Gaza plusieurs histoires détaillées de ce qu’a été la Nakba de celles et ceux qui sont arrivé-e-s à Gaza. Nier leur droit au retour, c’est nier le crime fondateur. Et ce que disait Ben Gourion : « les vieux mourront, les jeunes oublieront » n’est tout simplement ni souhaitable, ni possible.

    • La "bien pensance" occidentale s’émeut de la montée de l’extrême droite en Europe, mais au moment où un néo-nazi ou presque manquait de peu d’accéder au pouvoir, Lieberman, lui, entrait au gouvernement israélien sans que cela suscite la même inquiétude. Deux (ou trois !) mots sur la société israélienne et les conséquences pour les Palestiniens.
    Autrement dit s’oriente-t-on vers une radicalisation des deux côtés qui se donne des allures religieuses, ou d’autres possibilités sur des bases plus laïques et sociales (socialisante) existent-t-elles encore ?

    En Israël comme ailleurs, les électeurs ont préféré l’original à la copie. Le sionisme, théorie coloniale de la séparation, affirmant il y a 120 ans que Juifs et non Juifs ne peuvent pas vivre ensemble, ne pouvait conduire qu’à une société d’apartheid. La « gauche » sioniste a participé sans exception à tous les crimes contre les Palestiniens : la Nakba en 1948, la guerre des six jours (1967), la décision de coloniser (Plan Allon), la répression de l’Intifada, les attaques contre Gaza ou le Liban ... Il était logique que ça aboutisse à un gouvernement d’apartheid de type OAS affirmant sans complexe son racisme et son mépris de la vie de l’autre.
    En 2008-2009, Tzipi Livni et Ehud Barak avaient provoqué un grand massacre à Gaza (« Plomb Durci ») et ils ont été laminés par Nétanyahou, Lieberman et Bennet aux élections qui ont suivi.

    En France, ce sera pareil. Qui va profiter de l’acharnement de Valls à détruire le droit du travail ou à légitimer par avance les violences policières ?

    En Israël, l’idée simple que « Israël ne sera pas en sécurité tant que les Palestiniens ne le seront pas » est en voie de disparition. L’opinion s’est persuadée qu’il n’y aura jamais de paix. Alors, il faut être éternellement les plus fort et tout est permis contre « l’ennemi ». Ça laisse les mains libres aux plus extrémistes.

    Michel Warschawski que nous avons rencontré nous a dit que la droite a un programme, un projet, une éthique. Elle l’applique. L’idée, c’est de réaliser un des rêves initiaux du sionisme. Faire des Palestiniens les Indiens du Proche-Orient, cantonnés dans leurs réserves, leurs camps ou leurs Bantoustans. Cette droite ne représente qu’une moitié de la société israélienne. Mais en face d’elle, il n’y a ni projet, ni volonté politique. Ceux qui ne supportent plus cette société avec ses guerres et sa violence incessantes la quittent (15% des Juifs israéliens vivent hors d’Israël).

    La fin définitive d’Oslo a fait rentrer totalement cette région dans l’apartheid le plus accompli. Comme l’avait dit le cinéaste Eyal Sivan « on est entré dans une lutte anti-apartheid dans un espace unique ».

    La gauche anticolonialiste israélienne est très affaiblie. En même temps, elle jouit d’un grand respect chez beaucoup de Palestiniens.

    Cette guerre n’est pas religieuse, mais sa prolongation sans fin est très dangereuse. En Israël, les colons représentent aujourd’hui 10% de la population juive, 40% de l’armée, 50% du gouvernement. On ne voit plus de force désireuse ou capable de les affronter. Le courant national-religieux est de plus en plus puissant. Il est totalement dans une logique d’écrasement de la Palestine.

    Côté palestinien, une certaine mémoire disparaît avec le temps. Nous avons très souvent posé la question : « pourriez-vous vivre avec les Juifs ». Les plus âgés qui ont travaillé en Israël et qui en ont parfois ramené des relations humaines importantes disent : « oui, mais sans l’occupation ». Les plus jeunes qui n’ont connu que la cage et les crimes contre l’humanité répondent : « non, comment pouvez-vous poser une question pareille ? » Le temps presse.

    • Les souterrains entre Gaza et l’Egypte fonctionnent-ils encore ? Quelles sont les relations entre Gaza et l’Egypte ?

    Les autorités françaises nous avaient déconseillé d’aller à Rafah, zone jugée dangereuse. Nous avons pu nous y promener sans problème. Plus loin, dans la zone des tunnels, nous avons été reçus chez un habitant. Qu’apprend-on ? Qu’à Rafah, la frontière a arbitrairement divisé une ville. Mais des deux côtés de la frontière, c’est le même peuple et parfois les mêmes familles. Les tunnels vont d’une maison palestinienne à celle d’un cousin vivant côté égyptien. Il semblerait que, malgré les annonces de l’armée de Sissi, 70% des tunnels existent encore et 1/3 sont toujours en activité. Tout le monde profite de ce « commerce ». Les familles qui ont creusé les tunnels, le Hamas et l’armée égyptienne qui perçoivent les taxes.

    Comme partout la clandestinité de ce trafic provoque dans la société gazaouie l’apparition de profiteurs rapidement enrichis et peu aimés.

    Sur la politique égyptienne et plus généralement celle des dirigeants arabes, Gaza se sent trahie et abandonnée. Beaucoup de nos interlocuteurs ont parlé de collaboration de ces dirigeants avec l’occupant. Il y a aussi une grande colère contre l’Arabie Saoudite qualifiée de « Daesh qui a réussi ».

    Le régime égyptien prétend qu’il a exigé que l’Autorité Palestinienne prenne le contrôle du poste frontière de Rafah et que c’est le refus du Hamas qui explique la fermeture quasi permanente du poste frontière. En vérité, les militaires égyptiens défendent par dessus tout l’accord de paix de 1978 avec Israël.

  • Nouveautés sur Agence Médias Palestine

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  • Le Capital contre l'Islam (Algerie-Info)

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    L’adjonction de l’Islam et du lexique islamique au vocabulaire marchand s’est accélérée ces dernières années. Nous avons vu l’apparition de produits comme les sodas, les agences de voyages, les fast-foods, les assurances, les vêtements, avec des marques de streetwear « islamiques », les banques, les bonbons, tous estampillés du sceaux de l’Islam. On a même vu de l’eau estampée « halal » et agréé par telle ou telle mosquée.

    Par Abdelaziz Chaambi, Nadjib Achour, Youssef Girard,  juillet 2012

    Ces temples dédiés à la consommation que sont les grandes surfaces possèdent bien souvent un rayon « halal » pour attirer le consommateur musulman.

    Le mois de ramadan, est l’occasion pour ces sanctuaires du marché d’organiser des semaines « spéciales », alliant un folklore orientaliste à une « islamité » consumériste et superficielle, permettant de dégager des profits subsidiaires. Tout devient prétexte à un démarchage «islamique».

    L’Islam est ainsi transformé en argument publicitaire et s’apparente à un produit, une griffe, donnant une valeur ajoutée à des produits de consommation. Intégré par la civilisation capitaliste dans sa logique marchande, l’Islam est utilisé pour créer de nouveaux marchés et attirer une nouvelle clientèle puisqu’il est dans la logique du capital de générer sans cesse de nouveaux « besoins ».

    Cette utilisation de l’Islam comme un « argument publicitaire » permettant de promouvoir un produit et de lui donner une plus value, pose le problème de la réification, telle que le philosophe hongrois Georg Lukacs l’a expliqué dans Histoire et conscience de classe, c’est-à-dire la transformation, par le capitalisme, de tous les rapports sociaux et de toutes les formes culturelles en choses et en rapports « chosifiés » ce que Karl Marx appelait le « fétichisme inhérent au monde marchand ».

    Ainsi, le capitalisme transforme les Hommes, et les rapports entre les Hommes, les cultures, les spiritualités en marchandise. Pour Georg Lukacs, toutes les relations et toutes les pensées dans la civilisation capitaliste deviennent inéluctablement des rapports marchands.

    Par ces rapports marchands, les Hommes, les cultures et les spiritualités, dans notre cas l’Islam, sont intégrés à la dynamique du capitalisme. Les Hommes, les cultures et les spiritualités sont asservies à l’idéologie de la marchandise et c’est pourquoi il devient facile de convaincre les individus de consommer.

    La création d’une gamme de produits estampillés « islamiques » permet au marché de trouver de nouveaux débouchés et au capital d’étendre sa sphère de contrôle participant ainsi à la réification de l’Islam qui devient un argument commercial. Ainsi, lorsque les capitalistes parlent de la vie, des Hommes, des cultures ou des spiritualités, et dans notre cas d’Islam, c’est un euphémisme pour évoquer le marché.

    Ce matérialisme, bassement consumériste, inhérent à la civilisation capitaliste, et aux logiques qui la sous-tendent, ne peut aboutir qu’à la dissolution de toutes formes de spiritualité. De l’Islam ne sont préservés qu’une forme purement juridique et les aspects formels, au détriment de sa dynamique spirituelle dont les effets directs sont la transformation de l’Homme et de la société.

    La civilisation capitaliste se définissant par une dynamique d’accumulation par dépossession, ne peut que s’étendre à l’ensemble du globe et à tous les secteurs de l’existence humaine en détruisant tout ce qui risque d’entraver la logique du capital comme les spiritualités et les cultures non-marchandes.

    Décrivant ce système Georg Lukacs écrivait « que l’évolution du capitalisme moderne ne transforme pas seulement les rapports de production selon ses besoins, mais intègre aussi dans l’ensemble de son système les formes du capitalisme primitif qui, dans les société capitalistes, menaient une existence isolée et séparée de la production, et en fait des membres du processus désormais unifié de capitalisation radicale de toute la société […].

    Ces formes du capital sont certes objectivement soumises au processus vital propre au capital, à l’extorsion de la plus-value dans la production même ; elles ne peuvent donc être comprises qu’à partir de l’essence du capitalisme industriel, mais elles apparaissent, dans la conscience de l’homme de la société bourgeoise, comme les formes pures, authentiques et non falsifiées du capital.

    Précisément parce qu’en elles les relations, cachées dans la relation marchande immédiate, des hommes entre eux et avec les objets réels destinés à la satisfaction réelle de leurs besoins, s’estompent jusqu’à devenir complètement imperceptibles et inconnaissables, elles doivent nécessairement devenir pour la conscience réifiée les véritables représentantes de sa vie sociale » [1] .

    Par ce processus de réification, le capital prend le pas sur les impératifs humains, culturels et spirituels non-marchands. Dans cette logique, l’Islam doit être transformé en une valeur marchande quantifiable. L’Islam est soumis au règne de la marchandise qui asservit l’Homme en le rendant étranger à lui même.

    Au sein de la civilisation capitaliste, la marchandise, et donc cet « Islam » qui a été transformé en objet marchand, ne vaut que par l’argent. L’argent est l’équivalent général qui voile la nature réelle des échanges auxquels il est utile. Dans la civilisation capitaliste, la loi suprême est celle du profit, légitimée par une anthropologie faisant de l’individu, l’Homo oeconomicus, un être visant uniquement son intérêt personnel.

    La soumission progressive de tous les aspects de la vie humaine aux exigences de cette logique du capital déstructure les rapports humains, le lien social. Elle produit une civilisation purement marchande. Dans cette civilisation, les Hommes ne sont plus perçus qu’au travers de données statistiques, quantifiables et économiques, comme leurs pouvoirs d’achat, leurs capacités à engendrer du profit et leurs aptitudes à produire, à travailler et à consommer.

    Comme l’écrivait Karl Marx dans cette civilisation « l’homme n’est plus rien »[2] .

    Cette civilisation capitaliste tend à créer un monde sans « extérieur » oùtout est soumis au capital. A ce propos, Georg Lukacs écrivait que « les « lois naturelles » de la production capitaliste ont embrassé l’ensemble des manifestations vitales de la société et que - pour la première fois dans l’histoire - toute la société est soumise (ou tend au moins à être soumise) à un processus économique formant une unité, que le destin de tous les membres de la société est mû par des lois formant une unité»[3] .

    Selon le philosophe hongrois, « le monde réifié apparaît désormais de manière définitive - et s’exprime philosophiquement, à la seconde puissance, dans l’éclairage « critique » - comme le seul monde possible, le seul qui soit conceptuellement saisissable et compréhensible et qui soit donné à nous, les hommes »[4] .

    Face à cette civilisation capitaliste sans « extérieur » Georg Lukacs pensait qu’une modification radicale du point de vue était possible sur le terrain de la société bourgeoise. Dans le cas qui nous intéresse, comment est-il possible de lutter radicalement, c’est-à-dire en prenant le problème à la racine, contre la réification de l’Islam, contre sa transformation en valeur marchande ?

    NOTES

    [1] Lukacs Georg, Histoire et conscience de la classe,Ed. de Minuit, Paris, 1960, page 94

    [2] Marx Karl, Misère de la Philosophie, Ed. Costes, Paris, 1950, page 57

    [3] Lukacs Georg, Histoire et conscience de la classe,op. cit., page 93

    [4] Ibid., page 107

    Publié dans Oumma.com

     

      2ème partie

     

    « Sous le règne de la marchandise, produit par la civilisation capitaliste, le despote ne prend pas forcément l’apparence d’un individu mais plutôt celui d’un système global dans lequel «l’homme n’est plus rien » pour reprendre les mots de Karl Marx.

    De fait, pour réduire a néant cette profession de foi potentiellement libératrice, la civilisation capitaliste s’attache à intégrer à son système réificateur l’Islam comme toutes les autres formes de cultures non-marchandes qui pourraient réduire ou contester son emprise totale sur la vie des Hommes et des sociétés".

    Mettant en garde contre l’argent, le prophète Mohammed (PSL) affirmait dans un hadith: « Pour toute communauté il y a une fitna et celle de ma communauté c’est l’argent » .

     Contre la civilisation capitaliste qui réduit l’Homme à l’état de marchandise, l’intellectuel iranien Ali Shariati expliquait

    qu’« une des mission de Mohammed consiste donc à arracher l’homme de la terre, de cette vie de porc, d’animal, d’individualiste pour le faire évoluer vers Dieu »[1]  .

     Cette mission de faire évoluer l’Homme vers Dieu, le Prophète de l’Islam la réalisa en transmettant le message de l’unicité divine, at-tawhid  contre l’idolâtrie et le fétichisme qui régnaient à l’époque dans la péninsule arabique. L’appel à l’unicité divine reposait sur la négation de la divinité aux idoles de l’époque, tel que Houbal, Uzza, Allat ou Manat, pour ne vouer un culte exclusif qu’à Allah.

     De même, avant Mohammed (PSL), les prophètes et les messagers d’Allah (ST) luttèrent contre l’idolâtrie et le fétichisme régnant dans leur société respective au nom du Tawhid Allah dans le Coran nous dit : 

    « Nous avons envoyé dans chaque communauté un messager [pour leur dire] : « Adorez Allah et écartez-vous du Taghout » »[2]  ; « et Nous n’avons envoyé avant toi aucun Messager à qui nous n’ayons révélé : « Point de divinité en dehors de Moi. Adorez-Moi donc »[3]  

    Le prophète Nouh dénonça les idoles Wadd, Sawa, Yaghut, Ya’uq et Nasr[4]   et annonce à son peuple : « Je suis pour vous un avertisseur explicite afin que vous n’adoriez qu’Allah. Je crains pour vous le châtiment d’un jour douloureux »[5]  . Le prophète Ibrahim brisa les idoles qu’adorait son peuple pour l’appeler au tawhid  . Il affirma : « Je désavoue totalement ce que vous adorez, à l’exception de Celui qui m’a créé, car c’est lui qui me guidera »[6]  . Dans le Sinaï, le prophète Moussa combattit les adorateurs du Veau d’Or au nom du Tawhid .

     Le  tawhid repose en Islam sur la profession de foi : « La ilaha illa Allah » [Il n’y a point de divinité à part Allah]. Cette profession de foi commence par une négation de toutes les idoles et de tous les fétiches en dehors d’Allah.

     Une négation de tous les pouvoirs afin de libérer l’Homme des oppressions sociales pour le lier à Allah. En ce sens l’Islam contient un message profondément libérateur puisqu’il tend à affranchir les Hommes de leurs semblables et des forces sociales oppressives pour lier l’Homme uniquement et directement à Allah.

     A propos du caractère libérateur de cette profession de foi, Abd ar-Rahman al-Kawakibi écrivait que les despotes 

    « ont peur de la science, jusqu’à craindre que les gens ne comprennent le sens des mots « Il n’est de Dieu que Dieu », et ne sachent pourquoi (ce verset) est privilégié, et pourquoi l’Islam est fondé sur lui. L’Islam, voire même l’ensemble des religions, est fondé sur le fait qu’il n’est de Dieu que Dieu, c’est-à-dire que personne d’autre que Lui ne saurait être véritablement adoré, personne d’autre que la créature suprême ».

     Or, l’adoration signifie l’humiliation et la soumission. Dès lors, la signification du verset « Il n’y est de Dieu que Dieu » est que personne d’autre que Dieu ne mérite qu’on s’humilie et qu’on se soumette à lui. Comment les despotes pourraient-ils tolérer que leurs sujets connaissent ce sens et agissent selon lui ? »[7] 

     Sous le règne de la marchandise, produit par la civilisation capitaliste, le despote ne prend pas forcément l’apparence d’un individu mais plutôt celui d’un système global dans lequel «l’homme n’est plus rien » pour reprendre les mots de Karl Marx. De fait, pour réduire a néant cette profession de foi potentiellement libératrice, la civilisation capitaliste s’attache à intégrer à son système réificateur l’Islam comme toutes les autres formes de cultures non-marchandes qui pourraient réduire ou contester son emprise totale sur la vie des Hommes et des sociétés.

     L’Islam réifié, fétichisé, est ainsi intégré dans ses panthéons du marché que sont les grandes surfaces. Il est transformé en bijou doré que l’on porte autour du cou, en habit que l’on revêt, en nourriture que l’on mange. L’Islam fétichisé, vidé de tout contenu spirituel et civilisationnel, se transforme en objet de consommation que l’on achète, que l’on consomme et que d’autres vendent. On vend et on achète de l’Islam comme on vendrait et on achèterait n’importe quel produit.

     Cependant cette intégration de l’Islam réifié au panthéon du marché se fait sous la coupe des idoles de la civilisation capitaliste : l’argent, le profit, la marchandise, le marché ou lecapital lui-même. En effet, la civilisation capitaliste divinise ces notions en les transformant en absolu supérieur à l’Homme, aux cultures et aux spiritualités qui doivent impérativement leur être soumis.

     Ainsi, à la suite de certains théologiens chrétiens de la libération, comme Hugo Assmann et Franz Hinkelammert, nous pouvons définir le système capitaliste comme idolâtre.

     C’est dans la théologie implicite du paradigme économique et dans la pratique dévotionnelle fétichiste quotidienne que se manifeste la « religion économique » de la civilisation capitaliste.

     La divinisation du marché fabrique des idoles sans autel visible donc plus difficile à combattre. Pourtant Allah, dans le Coran, a mis en garde à de nombreuses reprises les croyants contre le fait de Lui associer une divinité : « Parmi les hommes, il en est qui prennent en dehors d’Allah, des égaux à Lui, en les aimant comme on aime Allah. Or les croyants sont les plus ardents en l’amour d’Allah. Quand ils verront le châtiment, ils sauront que la force tout entière est à Allah »[8]   ; « certes Allah ne pardonne pas qu’on Lui donne quelque associé. A part cela, Il pardonne à qui Il veut. Mais quiconque donne à Allah quelque associé commet un énorme péché »[9]  ; « n’invoqué donc personne avec Allah »[10] .

     Le prophète Ibrahim – al-Khalil - invoquait Allah en disant : « Préserve- moi ainsi que mes enfants de l’adoration des idoles. Ô mon Seigneur, elles (les idoles) ont égaré beaucoup de gens »[11]  .

     Parmi les idoles de la civilisation capitaliste, l’argent tient une place particulière , car il est au fondement de l’échange marchand. La devise de l’idole « argent » est inscrite sur chaque billet de dollar US : « In God we Trust ».

     Allah, dans le Coran, nous a pourtant mis en garde contre cette idole qui aliène l’Homme et lui fait confondre l’avoir avec l’être : 

    « Pour l’amour des richesses il [l’Homme] est certes ardent »[12]  ; « les âmes sont portées à la ladrerie »[13]  ; « A ceux qui thésaurisent l’or et l’argent et ne les dépensent pas dans le sentier d’Allah, annonce un châtiment douloureux, le jour où (ces trésors) seront portés à incandescence dans le feu de l’Enfer et qu’ils en seront cautérisés, front et dos : voici ce que vous avez thésaurisé pour vous-mêmes. Goûtez de ce que vous thésaurisiez »[14]  .

     Mettant en garde contre l’argent, le prophète Mohammed (PSL) affirmait dans un hadith : 

    « Pour toute communauté il y a une fitna et celle de ma communauté c’est l’argent »[15]  . Dans un autre hadith, le prophète mit également les croyants en garde contre le fait de vouloir accumuler des richesses pour elle-même : « Si l’Homme avait une rivière d’or, il en voudrait une deuxième et si il en avait une deuxième il en voudrait une troisième mais il n’y a que la terre pour combler les yeux de l’enfant d'Adam (la tombe) »[16]  . 

    Mohammed (PSL) avait compris que lorsque l’argent, médiateur de toute chose, se transforme en seul critère de la puissance, l’Homme devient objectivement aliéné par cet argent. Ainsi, celui qui possède de l’argent fini par être possédé par lui.

     La civilisation capitaliste et ses nouvelles idoles que sont l’argent, le profit, la marchandise, le marché ou le capital, exigent, comme les fétiches des temps anciens, des sacrifices humains au nom de contraintes « objectives », « scientifiques », comptables, profanes, apparemment areligieuses.

     En fait, la théologie idolâtre du marché, depuis Thomas Robert Malthus jusqu’aux institutions financières internationales, comme le FMI et la Banque Mondiale, est une théologie sacrificielle : elle exige des pauvres, des opprimés, des mostadh’afin qu’ils offrent leurs vies sur l’autel des idoles de la civilisation capitaliste.

     Rappelons qu’aujourd’hui près de 800 millions de personnes souffrent de la faim dans le monde. En France, 2 millions de personnes sont mal nourries. En 2000, sur une population de 6 milliards d’habitants, on en comptait 2,7 milliards vivant au-dessous du seuil de pauvreté, et, parmi eux, 1,3 milliard définis comme « extrêmement pauvres » car disposant de moins d’un dollar par jour.

     En 2003, le nombre de pauvres a crû de 100 millions, atteignant 2,8 milliards. En 2005, la France comptait 7,13 millions de personnes, soit 12,3 % de la population, vivant sous le seuil de pauvreté. Dans le monde, en 2005, 1 enfant sur 18 est mort dans sa première année. Cela représente 7,6 millions de décès d’enfants de moins d’un an en une année.

     Tel est le visage des pauvres, des opprimés, des mostadh’afin sacrifiés quotidiennement sur les autels des idoles de l’argent, du profit, de la marchandise, du marché ou du capital auxquels la civilisation capitaliste idolâtre voue un véritable culte.

     Si l’Islam veut retrouver le caractère libérateur qu’il avait à ses débuts lorsqu’il luttait contre les idoles et les fétiches de la péninsule arabique, il devra affronter les nouvelles idoles que sont l’argent, le profit, de la marchandise, du marché ou du capital. S’il ne s’attache pas à lutter contre cette nouvelle forme d’idolâtrie, il ne sera plus qu’un des multiples objets de la civilisation capitaliste. Un fétiche soumis aux idoles supérieures de la civilisation capitaliste. L’Islam sera alors une religion figée et réifiée liant plus les croyants au monde marchand qu’à Allah.

     Dans cette lutte de l’Islam pour la libération de l’Homme, les mostadh’afin ont une place particulière, puisque ce sont les premières victimes de la civilisation capitaliste idolâtre. La foi en cet Islam libérateur, celui qui se réalise dans la lutte des mostadh’afin contre l’oppression de la civilisation capitaliste, s’accomplit nécessairement dans la négation des fausses divinités de l’argent, du profit, de la marchandise, du marché ou du capital c’est-à-dire en retrouvant le souffle libérateur du tawhid .

     Publié sur Oumma.com, 19 juillet 2012

    http://www.algerieinfos-saoudi.com/2015/07/le-capital-contre-l-islam.html

  • Fascisme vert et impérialisme (La Riposte)

     
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    Nice, 14 juillet à 22h30. Un camion blanc déboule sur la Promenade des Anglais et fauche sans distinction tous les passants qui se trouvent sur sa route. Vendredi 15 juillet à neuf heures du matin, on déplore « au moins 84 morts et 18 blessés en urgence absolue », selon le site Mediapart.

    Le choc émotionnel, légitime, ne manque pas de rappeler les attentats survenus à Paris et à Saint-Denis la nuit du 13 novembre 2015. L’assassin de masse a au final été tué par la police au bout de 2 kilomètres de sa course folle. Son identité n’est pas encore certaine mais selon la police, on aurait retrouvé à l’intérieur du camion une carte d’identité au nom d’un Franco-Tunisien âgé de 31 ans. Cet individu était connu des services de police, mais uniquement pour des faits de droit commun. Pour l’instant, aucun lien formel n’a été établi avec l’organisation Etat Islamique qui sévit dans de nombreux pays depuis maintenant trop longtemps.

    Le président Hollande a tout de suite évoqué cette piste, et annoncé un renforcement des bombardements de l’armée française en Irak et en Syrie. La plupart des responsables politiques de droite et d’extrême-droite ont fait la même interprétation des faits. Le Conseil Français du Culte Musulman a immédiatement émis un communiqué condamnant les attentats et a appelé l’ensemble des Musulmans vivant en France à se recueillir pour les victimes, sans pour autant avoir évoqué la piste du terrorisme islamiste.

    D’hypothèse, cette piste est cependant devenue très vite une certitude aux yeux d’une grande partie des médias dès les premières minutes suivant le drame. Il n’est pas question ici de faire des suppositions sur la motivation du meurtrier, mais force est de constater qu’encore une fois, l’identité qui était la sienne légitime de fait la thèse du terrorisme islamiste sans analyse des traits psychologiques de sa personnalité.

    Nous nous souvenons tous du meurtre de masse perpétré en juillet 2011 par un militant d’extrême-droite norvégien. Ses 77  victimes participaient  à l’université d’été du Parti Travailliste de son pays. À l’époque, la polémique médiatique s’était surtout centrée sur son état de santé mentale. Diagnostiqué schizophrène d’abord par un premier groupe d’experts, il a ensuite été jugé sain d’esprit par une seconde équipe. Lui-même s’était dit opposé au premier diagnostic, craignant qu’il ne desserve son idéologie basée sur la haine des Musulmans. Qu’il soit malade ou pas, telle n’est pas la question ici. Mais que sa santé mentale ait été érigée en sujet numéro un par les médias suite au drame révèle une sélectivité certaine dans le recul que peuvent avoir la plupart des journalistes et des responsables politiques sur la responsabilité réelle ou supposée de l’auteur d’un attentat terroriste selon son appartenance, disons le mot, ethnique.

    Alors ceci n’excuse en rien l’auteur de la tuerie de Nice. Mais l’interprétation instantanée et sans nuance qui est faite de ce drame révèle ni plus ni moins qu’un racisme institutionnel dont les origines remontent très loin dans l’histoire française. Ce racisme a très tôt été utilisé par l’Etat français pour justifier sa politique colonialiste. Des les années 1830, les Algériens ont par exemple été jugés intrinsèquement incapables de maintenir la diversité arboricole de leur pays, justifiant ainsi l’accaparement de terres par les colons. Sans expliquer que les concentrations de populations algériennes à l’origine de la désertification étaient dues à la spoliation de terres qui était déjà à l’œuvre de la part de colons français. Cet épisode montre bien comment une interprétation raciste d’un phénomène observé dans un pays peut légitimer l’accaparement de ses ressources par un Etat plus puissant.

    Cette colonisation de l’Algérie et d’une grande partie de l’Afrique et de l’Asie a continué durant tout le 19e siècle. Au fur et à mesure, des mouvements intellectuels ont vu le jour dans les pays musulmans pour questionner leur arriération par rapport aux Etats impérialistes occidentaux. À partir du début du 20e siècle, et surtout après la révolution bolchévique en Russie, deux réactions contre l’impérialisme se sont confrontées. L’une composée de militants nationalistes et communistes, prônait l’arrimage de leurs nations aux valeurs libérales de l’Occident tout en se rendant autonomes politiquement et économiquement de celui-ci. La seconde voyait la question nationale sous l’angle religieux et se servait de la piété de la population pour la monter contre l’occupant. La question nationale était donc un enjeu entre des indépendantistes laïcs et religieux.

    Un pays comme la Tunisie a conquis son indépendance en 1956 grâce à la mobilisation de la classe ouvrière. La concurrence était rude entre tenants d’une identité arrimée à l’Occident et une identité arrimée à la culture arabo-musulmane. Mais à l’indépendance, la tendance nationaliste arabe a été écartée et une politique de nationalisations et de collectivisation a été initiée. Durant une décennie, l’économie a connu une croissance fulgurante. Grâce à ce développement économique et à une action énergique du jeune état tunisien, la société a pu se développer et les femmes du pays ont très vite conquis un haut degré d’autonomie comparé à la plupart des sociétés du monde arabo-musulman. Mais à partir des années soixante-dix, la dette qui s’est pourtant accumulée durant ces années a obligé l’état tunisien à recourir aux prêt du FMI. Ce dernier a conditionné le versement des fonds à un revirement complet de la politique économique de l’état emprunteur. Ceci a eu pour conséquence une dégradation de la vie des travailleurs et une contestation sociale grandissante. Pour endiguer cette menace, l’état a donc fait monter les mouvements extrémistes religieux afin de détourner l’attention des travailleurs de la question sociale au profit de la question religieuse.

    La même chose s’est passée en Egypte après la mort de Nasser en 1970. Le nouveau président Anouar El Sadate qui lui a succédé a opté pour un revirement total de l’économie après une décennie de politique collectiviste. Celle-ci, même si elle était motivée par des revendications nationalistes, n’en revêtait pas moins un caractère progressiste sur le plan social et des droits des femmes. La conduite autoritaire de Nasser n’a pas empêché qu’à sa mort ait eu lieu la plus grande manifestation de l’histoire de l’humanité. Or ce revirement soudain de la politique économique a suscité comme en Tunisie et à la même période un renforcement de la lutte des classes. Et comme en Tunisie, l’Etat a profité du sentiment religieux de la population pour faire en sorte que la conscience religieuse occulte la conscience sociale des masses.

    L’histoire sur le temps long montre ainsi que la religion a été instrumentalisée par certains Etats arabes pour freiner la lutte des classes. Tout comme la question nationale a été utilisée – et jusqu’à aujourd’hui – en Europe pour le même objectif. On voit du coup que la question religieuse se confond avec la question nationale dans les pays à dominante musulmane, dans un premier temps pour combattre l’impérialisme et dans un second temps pour le soutenir.

    Le nationalisme européen est quant à lui un moyen de légitimer la politique impérialiste de pays comme la France et le Royaume-Uni et un moyen utile pour endiguer la contestation sociale. En témoignent les récents événements en France depuis les attentats contre Charlie Hebdo, et les autres qui ont suivi jusqu’à celui du Bataclan. Tous étaient liés au terrorisme islamiste et la motivation première des assaillants était une réaction aux bombardements de la Syrie par les états occidentaux. Or le terrorisme islamique trouve ses origines dans la politique impérialiste des années 70 qui a consisté à faire monter le sentiment religieux des populations arabes afin d’endiguer la montée du mouvement ouvrier.

    L’intensification des bombardements en Irak et en Syrie suite à l’attentat de Nice ne fera qu’exciter davantage le ressentiment des populations de ces pays et le sentiment de stigmatisation que vit une grande partie de la jeunesse d’origine maghrébine en France. L’attentat de Nice, qu’il ait été ou non commandité par l’organisation Etat Islamique, est  une aubaine pour tous les protagonistes des guerres civiles syrienne et irakienne. Du côté des Etats impérialistes occidentaux, cela représente un boulevard pour l’accentuation de la guerre de classes qu’ils mènent dans leurs propres territoires et de l’accaparement des ressources pétrolières de la région mésopotamienne. Du point de vue de l’impérialisme russe, cela représente une légitimation accrue de son soutien à Bachar El Assad en Syrie. En France, cela signifie un ancrage des idées islamophobes encore plus grand dans la population, portées par le Front National, Les Républicains et une partie des responsables « socialistes ». Sur le plan de la politique du gouvernement Valls, cela présage d’un recul encore plus grand des libertés démocratiques au détriment du mouvement ouvrier. En pleine contestation de la Loi El Khomri, cela va porter un rude coup à la cohésion de la classe ouvrière contre la régression sociale dont elle est la victime, et un pas de plus vers le repli nationaliste. Sur le plan international, cela représente le risque très probable de l’intensification de la guerre par procuration que se livrent la Russie et les Etats-Unis. Le mouvement ouvrier ne peut s’en sortir que par une coordination internationale basée sur une analyse marxiste de la réalité d’aujourd’hui et de perspectives révolutionnaires pour l’avenir.

    RB, PCF Saint-Denis, 15 juillet 2016

    http://www.lariposte.org/2016/07/fascisme-vert-imperialisme/

  • Israël face à BDS (Orient 21)

    Interview de Sylvain Cypel

    Hillary Clinton, une fois élue, tentera-t-elle de criminaliser la campagne Boycot-Désinvestissement-Sanctions (BDS) contre Israël ? « Cela pose problème aux États-Unis », dit Sylvain Cypel. D’abord parce que l’expression d’une opinion ne peut pas être criminalisée, ensuite parce que chaque tentative de criminalisation se transforme en échec politique. « Tenter de l’interdire renforce BDS. »

  • Israël. Imposer le silence sur les crimes de l’occupation (Al'Encontre.ch)

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    Tous les Israéliens qui brisent le silence sur l’occupation et les autres crimes accomplissent leur devoir patriotique, humain et moral. C’est la raison pour laquelle le leader de Yesh Atid, Yaïr Lapid, les craint tellement

    Ce n’est qu’à l’étranger que l’on peut mener le débat sur l’occupation. Ce n’est en effet que dans une société libre et démocratique où la population sait ce qui se passe qu’un tel débat est possible. Il ne peut donc se dérouler en Israël, pas plus qu’on ne peut discuter des Yazidis en Irak ou de l’homosexualité ou des journalistes en Russie.

    Israël règne sur deux sociétés qui sont l’une et l’autre incapables de débattre de l’occupation. Il y a, d’un côté, la société juive qui vit dans le déni et la répression, qui n’est au courant de rien et ne veut rien savoir, et, de l’autre, la société palestinienne qui est au courant de tout ce qui concerne l’occupation, mais qui est privée de droits.

    Dans ce contexte où il y a, d’un côté, une société qui détient le pouvoir mais ne reconnaît pas la situation réelle et, de l’autre, une société qui connaît cette situation mais à qui personne ne demande son opinion, il est impératif de faire sortir le débat, de faire en sorte que le monde sache à quoi ressemble l’occupation israélienne et connaisse ses crimes. C’est la seule manière d’y mettre un terme.

    L’argument selon lequel ce serait là une mesure anti-démocratique est l’un des plus éhontés et des plus hypocrites qui aient jamais été exprimés en Israël. Il ne semble plus y avoir de limites à l’hypocrisie et à l’effronterie.

    Yair Lapid, le dirigeant de Yesh Atid, veut régler les choses à l’intérieur, comme on le fait dans une cour hassidique de Gour [la dynastie hassidique la plus importante en Israël], comme on le faisait autrefois dans les kibboutz et comme on le fait dans les familles du crime organisé.

    Lapid a écrit sur Facebook: «Breaking the Silence [initiatives de soldats apportant des témoignages sur les crimes de l’occupation] n’est pas intéressé à influencer la société israélienne depuis l’intérieur et préfère nous calomnier à l’extérieur.»

    Il estime que l’édition anglaise de Haaretz est un partenaire dans ce crime de diffamation. Yair McCarthy mène d’ailleurs une guerre sans limites contre l’édition anglaise de ce journal; il met même en cause la nomination de la prochaine éditrice de l’édition anglaise sous prétexte que son mari fait partie de Breaking the Silence. Accusé de sexisme, il a modifié une petite partie de sa déclaration.

    Les soldats et les vétérans de Breaking the Silence ont le devoir de renseigner tout le monde – et Haaretz a le devoir de le transmettre à tout le monde – en Israël, mais surtout ailleurs dans le monde. Les crimes de l’occupation doivent être connus partout. Les choses ne peuvent pas être «réglées entre nous», «chez nous», parce que chez nous il y a un système de lavage de cerveau et de blanchiment des crimes qui atteint de nouveaux sommets. Maintenant on prétend non seulement qu’il n’y a pas de crime, mais en plus qu’il n’y a pas d’occupation. On ne peut pas débattre avec des gens qui sont autant coupés de la réalité, de cette réalité qui est que les crimes de l’occupation sont horribles et ne font qu’empirer.

    Le monde devrait être informé de chaque exécution, de l’apartheid dans la distribution de l’eau, des arrestations de masse – 4800 personnes ont été arrêtées lors de la récente vague de violence, dont 1400 enfants. Au cours de la deuxième Intifada 80’000 Palestiniens ont été emprisonnés et on a distribué 24’000 ordres pour emprisonner des dizaines de milliers de personnes sans procès.

    Comment pourrions-nous ne pas informer tout le monde? Comment le dire aux Israéliens qui voient dans chaque Palestinien un terroriste et dans chaque terroriste quelqu’un qui doit mourir? Comment ne pas alerter le monde du fait qu’au moins un million de Palestiniens ont été emprisonnés en Israël depuis le début de l’occupation? Comment ne pas dire que 60 parlementaires palestiniens ont été arrêtés dans ce pays qui soi-disant ne procède pas à des arrestations pour des raisons politiques? Un pays où les gens sont séquestrés dans leurs lits toutes les nuits, sans décision de justice et parfois sans aucune raison. Si nous ne dénonçons pas tout cela, qui sera au courant? Et si personne n’est au courant, comment tout cela prendra-t-il fin?

    L’invasion de l’Ukraine par la Russie n’était pas une question de politique intérieure, pas plus que l’apartheid en Afrique du Sud, dont les opposants ont voyagé à travers le monde pour dénoncer les crimes. Diffuser ces informations est une manière de mobiliser la communauté internationale, ce qui est parfois le dernier recours.

    Toutes ces personnes qui brisent le silence en Israël font leur devoir patriotique, humain et moral. Lapid sait que Breaking the Silence et Haaretz n’existeraient pas si ce qu’ils rapportaient n’était pas vrai. Les Lapid savent que ces informations sont vraies; c’est pour cela qu’ils en ont tellement peur et pourquoi ils les combattent aussi férocement.

    Mais on a au moins réussi une chose: le simple fait de savoir que quelque chose brûle sous les pieds des Lapid – ou plutôt au-dessus de leur tête – nous donne une petite lueur d’espoir. (Article publié dans Haaretz le 10 juillet 2016; traduction A l’Encontre)

    Alencontre 15 juillet 2016 Gideon Levy