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Algérie - Page 28

  • Sous le bleu de Bab-El-Oued, l'hommage à M'Hamed Rachedi, "l'arabe" héros du printemps amazigh (Al Huffington)

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    M’hamed Rachedi était "l’arabe" héros du printemps amazigh. La fondation Bacha a exhumé son étincelant souvenir. Sous le bleu de Bab El Oued.

    C’était une silhouette aérienne, une énergie explosive haranguant les assemblées générales étudiantes du printemps 1980. Un jeune homme d’un grand courage.

    "Il savait qu’il en prendrait pour 20 ans incompressibles dans sa situation" a rappelé un de ses compagnons de lutte de cette période sur sa tombe ce samedi 25 avril, jour choisit par la fondation Bacha, grande figure du militantisme des années 80, pour faire le pèlerinage commémorative du cimetière El Kettar à Alger.

    M'hamed Rachedi, est né en mars 1955 d’une modeste famille de la basse Casbah. Il restera pour l’éternité le détenu arabophone parmi les 24 historiques de Berrouaghia, les animateurs du mouvement avril 1980 que le régime "débutant" de Chadli Bendjedid, voulait traduire devant la cour de sureté de l’Etat.

    "Ces interrogatoires à la sécurité militaire étaient particulièrement féroces". Les barbouzes ne comprenaient pas ce qu’un non kabyle faisait là, à la pointe d’un mouvement pour la reconnaissance du tamazight.

    M’hamed Rachedi ne s’est pas retrouvé par hasard dans cette galère. Il était militant clandestin du GCR , l’organisation de la gauche révolutionnaire - d’où le risque des 20 ans de prison sous le régime du parti unique – et l’un des leaders les plus actifs des campus d’Alger – avant 1980 - pour le droit des étudiants à s’organiser librement en dehors de la tutelle de l’UNJA, l’organisation de jeunesse du FLN.

    Il a été, à la salle Ben Baatouche de la faculté centrale, lieu mythique du mouvement à Alger, l’un des meilleurs pédagogues du lien entre la reconnaissance de la pluralité linguistique et culturelle de l’Algérie et l’avancée des libertés démocratiques. Tribun hors pair, M'hamed Rachedi était un cauchemar pour les RG de la DGSN. Après son intervention à la tribune, les actions du mouvement devenaient plus audacieuses, plus subtiles aussi.

    Salarié puis élu syndical à l’ARDESS, ancêtre du CNEAP, (Le Centre National d'Etudes et d'Analyses pour la Population et le Développement), à la fin de son cursus de licence, Mhamed avait également une expérience du syndicalisme d’entreprise, qui a beaucoup servi, avant son arrestation, la coordination des comités étudiants autonomes d’Alger durant le printemps 1980.

    Une étoile filante

    Face à la superbe crique de Bab El Oued, sur les pentes du cimetière d’El Kettar, un attroupement de quelques dizaines d’amis de M’hamed Rachedi a évoqué, ce samedi matin, le militant disparu en mars 1989 à quelques jours de son 35e anniversaire.

    Une étoile filante du combat démocratique et social en Algérie. Après les épreuves de l’interrogatoire et de la prison, le reflux du mouvement les années suivantes, M’hamed a poursuivi son crédo sur la scène du monde. A partir de Paris.

    Toujours engagé dans sa famille politique de la gauche révolutionnaire (LCR – Trotskyste), il a, comme en Algérie était de tous les combats. Celui du peuple palestinien était un qui lui tenait le plus à cœur. Mhamed était l’homme au Keffieh. Elégance et fierté.

    Au cœur de l’attroupement, deux hommes, Mahmoud Rachedi, son frère cadet, porte-parole du PST, et Karim Bacha, frère cadet de Mustapha Bacha et co-fondateur de la fondation éponyme.

    Mahmoud témoigne de ce moment de la dernière volonté où M’hamed, condamné sur son lit d’hôpital à Paris, chuchote son souhait de revenir voir la lumière d’Alger avant de partir.

    Il a revu sa Casbah natale avant de s’adosser à son flanc d’El Kettar. Karim a rappelé combien il était important que la génération qui a animé les luttes démocratiques des années 80 transmette des repères aux jeunes d’aujourd’hui. M’hamed Rachedi, Mustapha Bacha et Salah Boukrif, les trois aujourd’hui disparus, étaient amis. C’étaient, sans doute avec Arezki Ait Larbi, les figures les plus emblématiques du printemps amazigh à Alger.

    Publication: 25/04/2015 21h54 CEST Mis à jour: 25/04/2015 22h07 CEST
     
  • Algérie, 1er Mai 2015 Pour une convergence anti libérale et anti impérialiste (Essf)

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    Les travailleurs et les travailleuses algériens célèbrent le 1er Mai 2015, journée internationale de mobilisation et de lutte de la classe ouvrière, dans un contexte de persistance de la crise du système capitaliste et d’accentuation des pressions libérales pour imposer plus d’austérité, plus de précarité et de démantèlement de nos acquis démocratiques et sociaux.

    A la faveur de la chute des prix du pétrole, une offensive sans précédent du patronat privé et du gouvernement est orchestrée pour mettre en œuvre la privatisation du secteur public, y compris dans les secteurs stratégiques et de souveraineté, ( les hydrocarbures, transport aérien…), selon une feuille de route dictée par le FMI, la Banque mondiale et l’OMC. Elle vise fondamentalement la soumission de notre économie et nos richesses nationales aux intérêts privés d’une nouvelle classe de prédateurs alliée des multinationales et des puissances impérialistes.

    Toutes les nouvelles lois et les dispositions qui sont entrain d’être prises (Code du travail, code de la santé, loi régissant la sécurité sociale, code de l’investissement …) visent la diminution du pouvoir d’achat et la suppression des subventions aux produits de première nécessité, la généralisation des CDD et la précarité sociale, la suppression de la médecine gratuite, le démantèlement du secteurs public et l’accaparement des terres agricoles et du foncier public. L’adhésion à l’OMC achèvera ce qui reste de notre tissu industriel, aggravera le chômage et la précarité et profitera, à l’instar de l’accord d’association avec l’UE, aux multinationales et à l’économie des puissances étrangères.

    La crise de succession engendrée par la maladie de Bouteflika suscite des luttes d’intérêts entre les factions au pouvoir et une course effrénée à l’accaparement des biens publics amplifiant la corruption et les détournements. Dans ce contexte, les « oppositions » exprimées par les partisans de la « transition démocratique » ou par les promoteurs du « consensus national » s’inscrivent dans la perspective du partage du pouvoir dans le cadre du même projet libéral. Cependant, les luttes des travailleurs et les mobilisations des mouvements sociaux, en dépit de leur faiblesse et leur manque de coordination, atténuent relativement le rythme de cette offensive libérale.

    Pour le PST, le désastre social du projet libéral menace sérieusement l’indépendance de notre pays parce qu’il affaibli nos capacités de résistance sur le plan économique et politique. Pour le PST, les choix économiques et sociaux doivent être décidés démocratiquement et souverainement par le peuple algérien. Ni le pouvoir en déficit de légitimité, ni les organisations patronales, et encore moins les institutions financières du capitalisme mondial ne sont habilités à nous imposer le suicide libéral.

    Les travailleurs et les travailleuses, les chômeurs et les jeunes, les femmes et les masses populaires démontrent à travers leurs luttes la nécessité de stopper le projet politique libéral et d’imposer une autre politique. Les grèves des cheminots et des enseignants, les grèves des travailleurs de la zone industrielle de Rouiba et de la santé, les mobilisations des chômeurs et des citoyens pour le logement et des conditions de vie meilleures montrent la voie de la résistance. Mais, ces luttes doivent s’unir dans le mouvement syndical et se renforcer sur le plan politique dans une convergence anti libérale et anti impérialiste pour imposer les libertés démocratiques et une économie au service des besoins sociaux de notre peuple. Pour imposer une politique qui offre l’emploi à tous et amorce notre développement par l’industrialisation de notre pays et la modernisation de notre agriculture. Une politique qui consacre notre souveraineté et notre indépendance nationale.

    • Pour la défense de nos libertés démocratiques, nos droits de manifestation, d’organisation et de grève !

    • Pour la défense de notre pouvoir d’achat exigeons l’indexation des salaires sur le coût de la vie ! Pour un SNMG à 45 000 DA !

    • Pour l’unité du mouvement syndicale et son indépendance ! Pour un syndicat démocratique, combatif et indépendant !

    • Pour la solidarité internationale des travailleurs ! Pour la solidarité avec les peuples en lutte pour leur émancipation !

    • Vive la lutte des travailleurs ! Vive le 1er Mai !

    Le secrétariat National du PST

    Alger, le 28 avril 2015

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34855
  • L'Autre 8 mai 1945 (Algéria Watch)

    Il est impossible de célébrer les 70 ans de la victoire contre le fascisme sans la volonté d'arracher de l’oubli ce qui s’est passé en Algérie ce même 8 mai et les jours suivants.

    Une manifestation pacifique à Sétif, Guelma, Khératta et la région a été réprimée dans le sang ;des dizaines de milliers de civils algériens ont été massacrés par la Police, la Gendarmerie, les milices armées par les autorités locales, l'Armée Française, agissant sur ordre de l'exécutif.

    Amputer notre histoire commune par l'occultation de ce crime d'Etat est une négation du combat contre le colonialisme.

    Le 14 avril 2015, un Collectif Unitaire pour la reconnaissance des crimes d'Etat de 1945 en Algérie (Sétif, Guelma, Kherrata) s'est constitué.

    Outre cette reconnaissance, il demande: l’ouverture de toutes les archives, l'inscription dans la mémoire nationale de ces événements par le biais de gestes forts des plus hautes autorités de l'Etat et un soutien à la diffusion des documentaires relatifs aux événements dans l'Education Nationale comme dans les média publics.

    Après le vote à l'unanimité du conseil municipal de Paris demandant au chef de l'Etat de reconnaître ces massacres comme crimes d'Etat, nous appelons à un:

    Rassemblement unitaire le 8 mai 2015 à 15 h

    sur le parvis de l'Hôtel de Ville, à Paris, et devant toutes les mairies de France, car le geste symbolique du secrétaire d'Etat chargé des Anciens combattants et de la mémoire, J-M. Todeschini, à Sétif, demeure très en-deçà de ces revendications.

    Premiers Signataires :

    Associations : 4acg (Anciens Appelés en Algérie et leurs amis Contre la Guerre), 17 octobre contre l'oubli, ACDA (Agir pour le changement et la démocratie en Algérie), ANPNPA (Association Nationale des Pieds Noirs Progressistes et leurs Amis), ARAC (Association Republicaine des Anciens Combattants), Association Culturelle les Oranges, Cercle de Résistance, Idle No More Kabylie, MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples), PROMEMO (Provence Mémoire et Monde Ouvrier), Respaix Conscience Musulmane, Sortir du Colonialisme, UJFP (Union Juive Française pour la Paix), ...

    Syndicats :

    Partis : PG (Parti de Gauche)

    http://www.algeria-watch.org/fr/article/hist/8mai45/autre_8mai1945.htm

  • 70 ans après le massacre de Sétif : voyage mémoriel et crimes coloniaux (Lutte ouvrière)

    http://www.bougaa.com/wp-content/uploads/2010/05/4yhz860t.jpg

     

    Le 19 avril, le secrétaire d’État aux Anciens combattants, Jean-Marc Todeschini, s’est rendu à Sétif, au nord-est de l’Algérie, pour un « voyage mémoriel ».

    Une heure et demie et quelques gerbes de fleurs plus tard, avec une phrase sur « la reconnaissance par la France des souffrances endurées et l’hommage aux victimes algériennes et européennes de Sétif, de Guelma et de Kheratta », la question de Sétif devenait, pour le gouvernement ­Valls, une affaire réglée. Tout au plus sera-t-il question, d’ici quelques semaines, de la nouvelle visite d’un ministre un peu plus élevé dans la hiérarchie, pour évoquer le massacre commis par l’armée française et les milices de colons dans les quelques jours suivant le 8 mai 1945.

    Ce jour-là, la manifestation organisée par les autorités françaises à Sétif pour fêter la reddition de l’Allemagne vit fleurir des slogans réclamant l’indépendance, et même un drapeau algérien !

    Des manifestants et des Européens furent tués. C’en était trop pour les forces armées françaises et les responsables de l’administration coloniale, qui organisèrent le massacre de plusieurs dizaines de milliers d’Algériens, à Sétif mais aussi à Guelma et Kheratta.

    Bombardements de villages, arrestations, tortures, exécutions, actes de barbarie jalonnèrent ces journées, dans la pure tradition de violence coloniale appliquée à la population algérienne depuis plus d’un siècle. Elles annonçaient déjà la guerre d’Algérie.

    Ces massacres de mai 1945, couverts par un gouvernement de Gaulle comprenant des ministres SFIO et PCF, furent longtemps occultés par l’histoire officielle. Et si Hollande y fit allusion lors de son arrivée à la présidence, c’est néanmoins un gouvernement de droite qui dicta en 2005 un des premiers gestes de repentance à son ambassadeur en Algérie. Depuis, le silence était retombé, à quelques exceptions près, jusqu’à ce voyage protocolaire du 19 avril qui, même tout symbolique, a provoqué de la part de l’ancien ministre UMP Wauquiez, quelques plaintes sur l’absence de « fierté de notre histoire » et la « repentance à sens unique ». Todeschini avait pourtant soigneusement équilibré son geste en se rendant également au cimetière marin de Mers-el-Kébir pour un hommage aux marins français tués en juillet 1940 lors d’un bombardement britannique.

    Cette visite se plaçait sans doute dans le cadre d’un processus de rapprochement diplomatique franco-algérien. Mais, de là à une véritable reconnaissance des crimes de la bourgeoisie française au cours de sa domination coloniale en Algérie, il y a loin.

    Viviane LAFONT 22 Avril 2015
     
     
     
  • Le régime algérien à la recherche de son consensus (Essf)

     
    La révision de la Constitution dans l’agenda de Bouteflika

    L’idée d’un « consensus national » a occupé l’espace politique pour un temps. Elle sert, nous dit-on, à faire face à la crise qui menace le pays ! Mais, le récente démarche du FFS pour regrouper toutes les parties autour d’une table de négociation semble aujourd’hui dépassée. Elle a buté sur une double impasse : d’un coté elle a rencontré un rejet net de la part des parties qui sont au pouvoir refusant toute remise en cause de leur légitimité, car, soutiennent-elles, le pouvoir de Bouteflika ne souffre d’aucune illégitimité ! D’un autre coté, l’opposition organisée dans La Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) l’a désapprouvé en accusant cette initiative de pérenniser le gouvernement actuel et la coalition autour de Bouteflika !

    Quels enjeux !

    Mais, il y a comme un faux débat autour de cette question. Car, la véritable interrogation est celle de la caractérisation de la crise, face à laquelle découlera la nécessité ou non d’aller vers un consensus ; autrement dit, autour de quoi doit-on nous mettre d’accord ?

    Il y a deux réponses à cette question : la première vient de la critique néolibérale qui reproche au gouvernement son inertie et ses hésitations à mener les réformes économiques libérales à terme. Elle crie à la catastrophe. La maladie de Bouteflika est, dans ce scénario catastrophe, le verrou principal du blocage. Car, cette critique ne cible pas la politique du président malade, qui est économiquement néolibérale par ailleurs, mais elle vise son omnipotence et sa volonté, malgré son handicap, à diriger le pays par une main de fer et sans partage. Le projet du code du travail qui prépare l’institutionnalisation de la précarité des travailleurs pour, nous dit-on, être concurrentiel au niveau économique, de même que l’avant-projet de la santé qui fragilise et prépare à liquider à terme ce qui reste de la santé publique, le dossier de l’adhésion à l’OMC, sont autant de dossiers qui ne sont pas les cibles de la critique, ni soumis à la négociation !

    La deuxième critique se veut patriotique. Elle revendique un « renforcement du front interne » autour de Bouteflika. Car l’enjeu serait de faire face à « la main étrangère », au complot qui veut déstabiliser l’Algérie dans le sillage de la déstabilisation du monde arabe ! La violence qui vire vers un conflit communautaire dans la vallée du Mzab, les différentes explosions sociales, la manifestation de la police, les récentes protestations sur l’exploitation du gaz du schiste sont l’une après l’autre mise dans le lot du complot interne ou externe. Toute manifestation hostile au régime de Bouteflika n’est, de ce point de vue, que l’expression d’actes inscrits dans les agendas étrangers qui ne visent en définitive que la destruction des Etats nationaux et de leurs armées au seul profit des forces qui portent la mondialisation libérales à leur têtes l’impérialisme américano-européen, le sionisme et les vassaux dans la région.

    Mais, ces positionnements évacuent une question clé inscrite dans l’agenda de Bouteflika : la révision de la Constitution. Sentant son régime finissant ou voyant souffler le vent du changement au rythme des protestations et les crises successives, le président malade charge Ouyahia de construire son consensus autour d’une réforme des institutions du pays à travers la révision de la Constitution. Le projet va même jusqu’à revenir sur le mandat illimité du président de la république ! C’est là en réalité où devrait se jouer l’avenir immédiat du pays, ou comme le veut la formule en vogue, c’est là ou se joue « la transition » !

    Une mutation en douce

    Au niveau politique, la question de la succession à Bouteflika est surement un enjeu interne pour les tenants du pouvoir actuel. Mais il est secondaire devant l’agenda réel du concerné qui est celui d’assurer une mutation en douce d’un pouvoir bonapartiste à tradition populiste vers un pouvoir plus enclin à suivre les recettes du libéralisme économique version FMI et de l’OMC. Ce qui mettra fin à toute protection de l’Etat dans les affaires économiques et sociales. Les recompositions en cours dans les organisations patronales, la montée spectaculaire des patrons comme Rabrab, Ali Haddad qui prend la tête de l’organisation patronale FCE, et qui aurait des velléités politiques, ou encore de Laid Benamor à la Chambre de commerce, sont autant de signes qui mettent en exergue l’émergence d’une nouvelle logique de pouvoir. Un pouvoir de plus en plus sous l’influence d’une nouvelle « oligarchie » financière. Autrement dit un nouveau consensus historique ! C’est ici où se joue réellement la recherche du « consensus national ».

    En réalité, les véritables exécutants d’agendas impérialistes sont au gouvernement de Bouteflika. Leur programme néolibéral s’exécute à petit feu. La dernière entrave à ce projet sera levée avec l’adhésion définitive à l’OMC qui sera la fin de toute protection d’une économie nationale et la fin des acquis, déjà malmenés, de l’indépendance nationale.

    Pour un processus constituant démocratique et social

    Mais pour la majorité des Algériens, des couches populaires, des travailleurs, des jeunes, l’enjeu est aussi social. En effet la question sociale reste au centre de la question politique. Toute négociation, toute recherche de consensus doit tenir compte de cette dimension si l’on veut construire un socle solide pour une quelconque transition démocratique. Les politiques économiques et sociales du gouvernement, notamment celles qui engagent stratégiquement l’Algérie comme le gaz de schiste par exemple et la question énergétique, nécessitent une transparence dans les prises de décisions. Elles exigent pour cela l’engagement des institutions élues et la population qu’elles sont sensé représenter. Mais le gouvernement actuel, fort du rapport de force et de la légitimité que s’octroient ses institutions ne l’entend pas sous cet angle ! il veut mener seul cette transition et imposer un « consensus » autour de lui.

    Voila pourquoi, la crise actuelle est une crise de représentation politique qui exige une rupture avec les institutions actuelles et la construction d’un processus constituant qui mette en place une démocratie où les assemblée élues au suffrage universel, et sous contrôle populaire, de la commune au niveau national, qui décident de toutes les questions politiques, sociales et économiques. Cela exige à son tour que les travailleurs et les travailleuses et les couches populaires fassent irruption sur la scène politique.

    Nadir Djermoune, 31mars 2015

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34787
  • L’industrie pétrolière algérienne danse sur un baril de poudre (Orient 21)

    Depuis l’élection d’Abdelaziz Bouteflika à la présidence, en 1999, l’avenir du régime n’a jamais été aussi incertain.

    Malade, le chef de l’État n’exerce plus guère de fonction autre que protocolaire. Ses pouvoirs sont allés à un collège officieux de régents : des proches collaborateurs, comme son conseiller et frère Saïd Bouteflika, le premier ministre, Abdelmalek Sellal et le vice-ministre de la défense ou le chef d’état-major de l’armée, le général Ahmed Gaid Salah. Rien n’indique qu’une solution consensuelle ait été trouvée à la crise de succession qui secoue le régime et qui s’est manifestée, à la veille de l’élection présidentielle de 2014, par un conflit feutré, par justice et presse interposées, entre deux groupes adverses, l’un hostile, l’autre favorable à la candidature d’Abdelaziz Bouteflika à un quatrième mandat.

    Cet inquiétant tableau politique voisine avec un tableau économique non moins préoccupant.

    L’année 2014 a fermé la boucle d’une aisance financière sans précédent dans l’histoire de l’Algérie, due à d’excellents cours pétroliers depuis le début des années 2000. Mais les prix du brut ont plongé ces derniers mois de 50 % environ entre juin 2014 et avril 2015. Rien ne présage de leur redressement à court terme, leur effondrement ne s’expliquant pas uniquement par une offre excédentaire, mais aussi par un début de bouleversement du marché énergétique mondial, avec l’essor des énergies renouvelables et l’entrée en compétition des hydrocarbures non conventionnels, notamment les gaz de schiste américains.

    Crise des revenus de l’État

    Selon le Fonds monétaire international (FMI), sur la base d’un prix du baril de pétrole à 89 dollars, les revenus extérieurs de l’Algérie ne dépasseraient pas 48,9 milliards de dollars en 2015, contre 62,95 milliards en 2014 et 76,9 milliards en 2008. L’hypothèse d’un baril de pétrole à 89 dollars paraît, au demeurant, bien trop optimiste. Si les prix se maintiennent en 2015 à 50 dollars en moyenne, les recettes en devises seront divisées par deux et les recettes fiscales en recul d’un gros tiers.

    Les contestations sociales ne feront que s’étendre et se radicaliser.

    Si la protestation a pu être contenue ces dernières années, c’est aussi grâce à la redistribution de la rente pétrolière, après une décennie 1990 marquée par une chute libre du pouvoir d’achat de la majorité des Algériens. La détérioration des cours pétroliers n’était pas imprévisible. Nombre d’observateurs avaient mis en garde contre le caractère éphémère de l’aisance financière de la décennie 2000.

    Ils avaient rappelé que les mirobolants revenus des exportations devaient être employés pour mettre l’Algérie sur les rails d’une économie moins dépendante du brut. Car s’ils ont financé nombre d’infrastructures et amélioré le pouvoir d’achat de larges couches (les dépenses des ménages ont triplé en dinars courants entre 2000 et 2011), ces revenus n’ont pas servi à transformer l’Algérie en pays émergent — le rêve officiel. Le pétrole et le gaz représentent toujours la majeure partie des exportations (95,6 % en 2014) et l’industrie pétrogazière fournit, à elle seule, près du tiers du PIB (27,5 % en 2014 selon les prévisions gouvernementales). La chute des cours s’ajoute à la stagnation de la production et des exportations pétrolières (1,202 milliard de barils produits en 2013, selon l’Organisation des pays producteurs de pétrole - OPEP, contre 1,371 en 2007) et à la baisse sensible des exportations gazières (44 milliards de mètres cubes en 2014 contre 46,708 milliards en 2013 et plus de 50 milliards en 2010), baisse due à une explosion de la consommation intérieure, qui devrait passer à 50 milliards de mètres cubes en 2017-2020.

    Diversification de l’économie  ?

    Devant ce contre-choc pétrolier rappelant par certains aspects celui de 1985-1986, des mesures pour une meilleure maîtrise des dépenses publiques ont été annoncées : arrêt du recrutement de fonctionnaires, gel des chantiers d’infrastructures «  non indispensables  », etc. La crise, s’est plu à déclarer le président de la République fin 2014, devrait être transformée en opportunité pour diversifier l’économie.

    Mais le gouvernement est-il réellement résolu à prendre le chemin d’une déconnexion progressive du budget et des recettes en devises de la manne pétrogazière  ? Rien ne permet de l’affirmer. L’importance du programme d’investissement de la société publique d’hydrocarbures Sonatrach (90 milliards de dollars pour 2015-2019) n’est pas, en soi, la preuve que la voie rentière demeure celle privilégiée par les pouvoirs publics (les revenus du pétrole et du gaz pourraient aussi bien financer la constitution d’une économie plus diversifiée). En revanche, il témoigne du caractère imprécis des orientations présidentielles pour la diversification économique.

    Des orientations similaires pour la dynamisation de l’industrie, de la pétrochimie, de l’agriculture, du tourisme et des NTIC ont été données, par le passé, à l’exécutif sans jamais se traduire en objectifs chiffrés ni en réalisations. L’augmentation promise de la production d’hydrocarbures vise sans doute moins à financer le passage à une économie émergente qu’à compenser le manque à gagner pour les caisses de l’État de la baisse des prix du brut.

    Le gouvernement espère d’ici à 2019 augmenter la production de pétrole de 20 % et produire 151 milliards de mètres cubes de gaz conventionnels (contre 131 milliards en 2014). Il entend également lancer l’exploitation des gaz de schiste, dont l’Algérie détiendrait, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), les quatrièmes réserves mondiales techniquement récupérables. Comment financer ces ambitieux projets si les revenus pétrogaziers sont en baisse  ? Le recours à l’investissement étranger n’est pas l’option la plus probable, à en juger par le peu empressement des firmes internationales à répondre au 4e appel d’offres de l’Agence nationale pour la valorisation des ressources en hydrocarbures (Alnaft) en septembre 2014 (quatre périmètres de recherche et d’exploration attribués sur 32 offres).

    Le gaz de schiste : une aubaine  ?

    Légale depuis 2013, l’exploitation des gaz non conventionnels tient une place de plus en plus grande dans les projets gaziers algériens. Leur production, a déclaré le 7 décembre 2014 le président de Sonatrach Saïd Sahnoune, atteindra 20 milliards de mètres cubes en 2022 et 30 milliards en 2025 (soit, respectivement, 15,2 % et 22,9 % de la production gazière algérienne de 2014).

    Qualifiée d’«  aubaine  » par le premier ministre Abdelmalek Sellal, le gaz de schiste n’est pourtant pas la solution-miracle à la crise financière. L’extraction de ces ressources non conventionnelles nécessite de plus lourds investissements que les hydrocarbures classiques. Et même si le potentiel algérien est confirmé par l’exploration sur le terrain, son exploitation nécessitera le recours aux sociétés étrangères. En effet, Sonatrach ne peut mener seule un projet d’exploitation commercialement rentable.

    À supposer qu’elles aient envie d’investir dans le sous-sol algérien, les compagnies internationales ont besoin d’être rassurées sur l’accueil par la population du gaz de schiste, réputé dangereux pour l’environnement. Or, leur acceptation est loin d’être acquise. Le mouvement anti-gaz de schiste à In Salah, ville de l’extrême sud, l’a récemment montré. Les habitants s’opposent à son exploitation dans le bassin d’Ahnet où des tests de production ont été concluants. Ils craignent une possible pollution des nappes phréatiques et leur tarissement rapide à cause des besoins en eau de la fracturation hydraulique. Dans une région où le souvenir des essais nucléaires français des années 1960 reste vivace, la préoccupation écologique et sanitaire est profonde.

    Le sud et la menace djihadiste

    Le gouvernement, si prompt à réprimer la moindre contestation populaire, a montré une certaine prudence dans le traitement des protestations d’In Salah : réunions entre des membres du gouvernement et les représentants de la population, envoyés spéciaux de la présidence... Cette prudence s’explique par la délicatesse de la situation dans le sud, région ouverte, de surcroît, sur deux pays instables : le Mali et la Libye. Le sud vit, en effet, depuis plus d’un an au rythme d’affrontements ethno-religieux dans la vallée du M’zab entre ibadites «  berbères  » et sunnites «  arabes  ». Il vit également, depuis plus longtemps encore, au rythme de contestations sociales non négligeables. Avant In Salah, la ville de Ouargla, chef lieu de la wilaya où se situe le plus grand gisement algérien de pétrole (Hassi Messaoud), avait été — est toujours — le théâtre d’un mouvement radical de chômeurs qui revendiquent la priorité pour la population locale dans l’accès aux emplois des hydrocarbures.

    La contestation exprime le sentiment d’injustice des habitants du sud, pauvres en dépit des budgets colossaux qui ont été officiellement alloués (2,415 milliards de dinars, soit quelque 24 milliards d’euros, entre 1999 et 2013, selon une déclaration d’Abdelmalek Sellal le 23 mai 2013). Une des banderoles déployées par les manifestants d’In-Salah énonçait : «  Nous avons été un champ d’expérimentation pour vos bombes. Nous ne le serons pas pour le gaz de schiste  ! Nous n’avons pas profité du gaz conventionnel, ni des retombées de la manne pétrolière. (...) Le gaz de schiste nous prendra le peu que nous avons.  »

    Le fruit amer de la répression

    La répression des premières contestations sociales dans le sud a été à l’origine de la naissance du groupe armé appelé «  Les enfants du sud pour la justice islamique  ». La justice condamna à des peines d’emprisonnement, en 2004, certains de ses fondateurs, alors membres d’un mouvement social pacifique, le Mouvement des enfants du sud pour la justice. Des médiations traditionnelles persuadèrent une partie de ses membres de se rendre aux autorités en 2008 mais il n’a pas pour autant disparu. Son émir, Mohamed Lamine Ben Cheneb, a lancé en janvier 2013 un audacieux assaut sur le site gazier de Tiguentourine (sud-est), qui s’est soldé par 40 morts, en majorité étrangers.

    Le gouvernement semble être, face à la contestation d’In Salah, devant un dilemme : la répression pourrait engendrer une dangereuse radicalisation de la jeunesse du sud  ; cependant, céder à ses revendications éloignerait les firmes pétrogazières internationales, indispensables à l’exploitation des gaz de schiste. Il est toutefois improbable que pour échapper à ce dilemme le choix se porte sur une solution démocratique : ouvrir un débat sur la production des hydrocarbures non conventionnels et sur un meilleur modèle de développement du Sahara. Le plus probable est que, sous la pression de services de sécurité de plus en plus omnipotents, l’exécutif soit tenté par le tout-répressif. Ce n’est pas un hasard si l’émissaire dépêché par la présidence pour écouter les doléances des habitants d’In Salah est le patron de la sûreté nationale, le général Abdelghani Hamel, «  grand spécialiste des gaz lacrymogènes  », pour citer un journaliste algérien.

    Yassin Temlal 21 mai 2011.

    http://orientxxi.info/magazine/l-industrie-petroliere-algerienne,0874

  • Algérie, le secrétaire général du PST (Essf)

     
     
    « La dynamique de la gauche est de se construire dans les mouvements réels »

    Dans cet entretien, le parti socialiste des travailleurs, par la voix de son secrétaire général, réaffirme ses positions et ses oppositions. De la constitution aux initiatives des partis pour regrouper l’opposition en passant par les questions économiques, le PST ne veut pas dévier d’un iota de la ligne adoptée depuis quelques années.

    Reporters : Pourquoi la gauche aujourd’hui n’est-elle ni visible ni audible sur le terrain. Qu’en est-il réellement ?

    Mahmoud Rachedi : Quel terrain justement (rire). Nous sommes sur le terrain, mais le terrain réel. Nous sommes dans les mouvements étudiants, travailleurs, chômeurs et aux côtés de tous ceux qui luttent pour la justice sociale. Et cela, au niveau de tous les secteurs.

    Maintenant, si vous analysez notre absence à travers les médias, c’est vrai. Nos actions ne sont pas médiatisées. Les journalistes, aujourd’hui, rapportent la mode du moment, les stars et les personnages politiques et ils ne s’intéressent pas aux maux et contestations sociaux. Il y a des partis politiques qui ne représentent absolument rien du tout sur le terrain réel et concret, mais qui sont très visibles sur la presse.

    Et puis, peut-être que vous n’êtes pas bien branché, mais nous avons animé des rencontres avec la presse nationale, des conférences thématiques et topos avec nos militants et nous restons toujours attachés à nos valeurs. Certes, vous pouvez dire que c’est insuffisant pour un parti comme le PST, mais cela est dû à diverses raisons. Y a un autre élément, et vous le savez très bien, nos conférences de presse ne sont pas hautement médiatisées. Il y a aujourd’hui des personnes qui n’existent qu’à travers la presse. Et cela n’est pas notre objectif. Cela ne veut pas dire non plus qu’on n’aime pas être médiatisés, au contraire.

    En fait, même les partis au pouvoir n’existent pas dans la réalité.

    Ils existent qu’à travers les institutions de l’Etat et des élections antidémocratiques. Ce que je veux dire, c’est que le phénomène n’est pas propre à la gauche ou autre courant politique, mais c’est un constat qui s’applique sur tout le monde.

    La dynamique de la gauche est de se construire dans les mouvements réels. Nous avons organisé un rassemblement de soutien à la population d’In Salah bien avant que des partis aillent se mettre au-devant d’une manifestation à laquelle ils n’ont jamais travaillé ou construit. Sur la dernière grève qui a secoué le secteur de l’éducation, plusieurs de nos cadres étaient même des meneurs. On est impliqués dans les luttes réelles !

    Il y a aujourd’hui des velléités de rassemblement pour le changement en Algérie.

    La CLTD appelle à une élection présidentielles anticipée pour une transition démocratique le FFS appelle, quant à lui, à la reconstruction d’un consensus national. Le PST ne s’est affiché avec aucune partie… En ce qui concerne de la CLTD qui s’est constituée au lendemain de la « réélection » de Bouteflika pour un quatrième mandat, des partis politiques ont décidé de se rassembler, de discuter et de préparer ce qu’ils ont appelé plus tard la réunion de Zéralda. 24 h avant, on nous adresse une invitation pour y assister. Pour une plate-forme démocratique, on aurait aimé être associé et concerté à l’avance. Et ce n’est pas au moment de rendre publique devant la presse leur plate-forme qu’on invite un parti.

    Ce que je veux dire par là, c’est que ça ne nous intéresse pas d’y aller juste pour remplir la salle en servant de décor et applaudir leur plate-forme. Cela dit, si l’invitation avait été faite dans les normes, on aurait assisté par principe au combat démocratique. Et puis dans la plate-forme de Mazafran, ils dénoncent les grèves, or un front démocratique est censé défendre et consolider les grèves. De plus, leur concept de transition démocratique ne prévoit à aucun moment le peuple.

    C’est dire que dans leur philosophie, ce sont les partis politiques qui négocient avec le pouvoir. Inadmissible ! C’est comme si le peuple algérien n’était pas concerné, alors que la souveraineté est censée lui revenir. Nous combattons pour la démocratie et pour que le peuple puisse s’exprimer en toute liberté.

    Quid du FFS ?

    S’agissant du FFS qui appelle à un consensus national, c’est-à-dire trouver un consensus entre les différentes parties, il a demandé à nous voir, et nous l’avons reçu pour exposer sa démarche. Sur le principe, que ce soit avec la CLTD ou le FFS, au PST on est partant quand il s’agit d’un front démocratique, car il y a ce qu’on partage ensemble, comme la question de la femme, les libertés, tamazight… Mais quand il s’agit des questions sociales, on est certainement différents.

    Contrairement à eux, nous, on est anti-impérialiste et anticapitaliste.

    Le FFS nous a dit qu’il allait associer le pouvoir à sa démarche, nous lui avons dit que s’il s’agit d’un front, nous allons le constituer, mais dans ce cas on aura des exigences. Si le pouvoir veut s’associer pour trouver une solution démocratique, ce dernier doit montrer un minimum de volonté. C’est quoi ? Il doit lever toutes les entraves à l’exercice des libertés démocratiques en Algérie. C’est une condition sine qua non, le gel de tous les grands projets qui hypothèquent l’avenir de l’Algérie : le Code du travail, le Code sur la santé et l’adhésion de l’Algérie à l’OMC. Car on ne peut pas négocier avec un pouvoir qui nous interdit de manifester.

    Le débat économique est aujourd’hui saturé par les inquiétudes sur l’avenir énergétique du pays et le recours au schiste. Etes-vous pour ou contre l’exploitation de cette énergie non conventionnelle ?

    Nous nous sommes exprimés depuis longtemps sur cette question. Le système capitaliste et à l’échelle mondiale a atteint dans son développement une étape où la destruction de la planète est réelle. Le réchauffement de la planète et la crise écologique dans le monde sont devenus une réalité. Maintenant, sur l’exploitation du schiste, au PST même pour les hydrocarbures conventionnels, nous sommes contre une exploitation effrénée. Et nous plaidons pour des énergies alternatives, notamment dans le renouvelable pour préserver un minimum d’équilibre écologique.

    Pour le gaz de schiste, il y a un certain nombre de pays et d’experts qui disent qu’il y a danger pour son exploitation. Il y en a d’autres qui disent le contraire. Tant mieux. Et du moment qu’il y a ces deux thèses, on exige au moins qu’il y ait une transparence dans un débat large et national sur la question. Car, ça concerne les Algériens, c’est leur destin et leur avenir, et non pas Total ou autres multinationales américaines.

    Nous ne sommes pas des experts pour dire de manière catégorique non il y a danger sur les nappes albiennes ou autre chose, mais nous sommes un parti qui exige un débat politique. On est pour un référendum, on veut que le peuple algérien soit souverain sur des questions qui engagent son avenir. Et le développement ne se fera pas avec le schiste, mais dans les énergies alternatives, comme le solaire et l’halieutique.

    Il y a un débat sur le secteur public et son incompétence à relever les défis, surtout économiques. Pourquoi et que préconise le PST pour sa réhabilitation ?

    Je démens la thèse qui soutient que ça ne marche pas dans le secteur public. Ça marche bien et plus que la propagande le dit. Car il y a des préparatifs pour privatiser le tissu qui reste. De prime abord, la gratuité est un acquis arraché de longue lutte. Il faut dire qu’il y a un manque d’infrastructures destinées au service public. Si on prend l’exemple du secteur de la santé, il est clair que l’effectif ne répond pas au flux des patients et malades, et donc il est tout à fait normal que la qualité ne soit pas bonne et efficace. Mais cela n’est pas dû à la gratuité, car cette dernière est censée permettre à tous les Algériens de se soigner en leur assurant une bonne qualité, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. En Algérie, il y a une volonté de marchandisation et c’est ce qui est grave et dangereux à nos yeux.

    A chaque fois, il y a propagande sur tel ou tel secteur dont le but escompté est de le privatiser, comme c’était le cas avec Naftal et qui s’est avéré par la suite que c’est Qatari Wouqoud qui veut s’installer en Algérie et privatiser Naftal. Et je tiens à préciser que les multinationales ne créent aucun emploi ou autre avantage comme on le dit, elles sont là pour s’enrichir sur le dos des travailleurs, avec bien évidemment leurs relais au pouvoir, sinon d’où vient l’argent dont les comptes révélés dernièrement par la presse sur les ministres et dirigeants algériens, si ce n’est pas l’argent du peuple ?

    Que reste-t-il du secteur public ?

    Il est détruit depuis les accords avec le FMI et l’accélération de cette spirale du libéralisme. J’ajoute que dans les années 1990, on a détruit tout le secteur du bâtiment et 500 000 travailleurs ont été mis dehors. Où sont-elles les entreprises communales, de daïras et de wilayas ? Et le ministre de l’Habitat vient aujourd’hui nous dire qu’on n’a pas d’entreprises suffisantes pour construire les logements !

    Il est impératif de défendre le secteur public.

    Et ce qui est logique, l’argent public doit aller au secteur public. Le secteur public existe, on doit le préserver, le moderniser et lui assurer des outils de travail adéquats et l’Etat doit investir dans son élargissement. Et l’Etat ne doit pas se retirer du commerce extérieur, et j’en veux pour preuve que dès qu’il s’est retiré pour laisser champ libre aux importateurs, on a atteint 60 milliards de dollars d’importation, car, il ne faut pas se voiler la face, le privé pense qu’à gagner et s’enrichir, l’économie nationale et son épanouissement viennent en second plan.

    Nous allons vers la révision constitutionnelle. Quel est votre commentaire ?

    Tout d’abord, je signale que nous n’avons pas pris part aux consultations sur la Constitution initiées par Ouyahia, mais nous avons adressé un mémorandum à la présidence de la République pour exposer notre vision des choses. Si la démarche du pouvoir va jusqu’au bout, ça sera tout simplement un passage en force. Il est regrettable que les avis divergents portés par des hommes du gouvernement s’affichent à la télévision ! C’est comme si la Loi fondamentale du pays ne concerne par le peuple en premier lieu, mais juste quelques personnes. C’est du théâtre !

    Ce qu’on dit nous, c’est que le peuple algérien doit se battre pour une autre Constitution issue d’une Assemblée nationale constituante et d’un projet de société garantissant les libertés, l’égalité des sexes, la justice sociale et le libre choix économique du peuple, dont l’Assemblée constituante sera l’émanation de la seule volonté des masses populaires.

    RECHIDI Mahmoud

    * Reporters

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34762

    Commentaire: Le PST est notre "parti frère" en Algérie, le PT est (était?) lié au POI

  • Corruption. “Pour être dirigeant en Algérie, il faut être résident en France” (Courrier International)


    Une enquête menée par deux reporters français, et publiée dans un livre sorti le 15 avril, révèle l’acquisition par de nombreux dirigeants algériens de résidences parisiennes. Vives réactions dans la presse algérienne.
     

    “C'est désormais clair ! Pour être ministre ou dirigeant en Algérie, il faut être résident en France. Il n’est pas de bon ton d’être ministre sans connaître le faste bourgeois du faubourg Saint-Honoré. Il n'est pas possible de devenir ministre si l’on ne connaît que la rue de Tanger et ses bouis-bouis”, dénonce Algérie-Focus.

    Le site d’information réagit au livre Paris-Alger : une histoire passionnelle,  rédigé par deux journalistes français, Christophe Dubois et Marie-Christine Tabet (éd. Stock, sortie en France le 15 avril).

    Dans un chapitre consacré aux “affaires” et plus particulièrement aux biens “acquis” ou “mal acquis” par de hauts responsables algériens, apparaissent les noms de la fille de l’actuel Premier ministre, Abdelmalek Sellal, de l’ex-président de l’Assemblée et actuel dirigeant du FLN (Front de libération nationale, au pouvoir), Amar Saadani, d’anciens ministres et d’autres en fonction à l’image du ministre de l’Industrie et des Mines, Abdeslam Bouchouareb, enchaîne El Watan.

    “Et dire que tous ces hauts responsables cultivent un patriotisme ostentatoire, un nationalisme d’apparat et ne cessent de demander aux jeunes de croire en eux”, poursuit Algérie-Focus. “Ce dont les Algériens ont le plus besoin serait des dirigeants exemplaires qui leur disent la vérité, ils n’ont pas besoin de ces dirigeants qui leur parlent de patriotisme alors qu'ils sont les premiers à tourner le dos à la rue de Tanger et à ouvrir grands les bras au faubourg Saint-Honoré.”

    Charlatanisme et bricolage

    De son côté, Liberté souligne que les responsables dont les noms ont émergé dans certaines affaires, échappant ainsi à la chape d’omerta couvrant des activités à la limite de la légalité, ne sont guère inquiétés. “La chronique de la délinquance économique a beau insister, le système réagit en ignorant placidement le tollé médiatique. Les haros de l’opinion subissent, dans ce cas, le traitement des aboiements : pourquoi s’y arrêter puisqu’on ne les entendra plus quand on sera plus loin ?”

    Le quotidien relève que ces fortunes mal acquises sont amassées et transférées par des acteurs qui interviennent “dans la conception de la perspective nationale.  En quoi un décideur qui inscrit ses lendemains et ceux de ses enfants sur les bords de la Seine se préoccuperait de ce que demain sera fait de ce côté-ci du monde ? Cela donne des politiques qui sont les alibis d’un pouvoir qui laisse l’école au charlatanisme, la santé au bricolage, l’économie en panne, la société à la terreur bigote, l’environnement à la décrépitude.”



  • Quand l'avenir de l'Algérie s'oppose au gaz de schiste (Algeria Watch)

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    La question de l'exploitation du gaz de schiste en Algérie se pose publiquement depuis moins de deux ans alors que le gouvernement semble en avoir fait l'option depuis au moins 2008.

    Une fois révélée, elle a été très rapidement imposée sans débats ni consultation d'experts critiques. Comme à l'accoutumée, le parlement a approuvé dans sa grande majorité cette orientation. Les déclarations de membres du gouvernement ainsi que les informations disponibles sur les projets, l'agenda, les financements, les sociétés étrangères impliquées sont contradictoires. Les uns défendent ouvertement ce choix sous prétexte de nécessité face au déclin des réserves de pétrole tandis que d'autres assurent qu'il n'est pas à l'ordre du jour.

    La mobilisation à In Salah contre l'exploitation du gaz de schiste en Algérie a débuté le 31 décembre 2014 et perdure à ce jour.

    C'est à quelques kilomètres de cette ville de 50 000 habitants située à 1200km d'Alger que le premier forage a été réalisé, officiellement à titre d'exploration. La population est alarmée des conséquences des techniques employées dans l'extraction du gaz de schiste, en particulier la fracturation hydraulique (fracking) qui nécessite de grande quantité d'eau, de sable et de produits chimiques. Il s'agit du premier mouvement populaire sans caractère revendicatif socio-professionnel ou partisan. La contestation se répand à la fois dans le temps et dans l'espace. Et plus elle perdure plus elle attire la convoitise d'acteurs politiques qui en font leur cheval de bataille dans leur confrontation avec le pouvoir qui lui, passe d'une attitude paternaliste aux menaces contre une population qui demande qu'une question aussi importante pour le pays fasse l'objet d'un débat national.

    Les autorités agissent dans l’opacité

    Les conditions juridiques et pratiques pour l'exploitation du gaz de schiste sont mises en place à partir de la fin des années 2000 : Des firmes étrangères dont la française Total obtiennent des permis « d'exploration et d'exploitation » sans toutefois se lancer tout de suite dans le projet. Une nouvelle loi sur les hydrocarbures est adoptée par le parlement en 2012 et publiée au Journal officiel le 24 février 2013 (jour anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures en 1971). Cette loi est particulièrement scandaleuse car elle revient sur des principes de souveraineté. Pour attirer les compagnies spécialisées, frileuses face à ce qu'elles considèrent être des contraintes financières, la fiscalité est dorénavant calculée sur la base du rendement que fixe les compagnies elles-mêmes sans que l'administration algérienne n'ait de moyen de contrôle.

    En juin 2013, l'EIA, Energy Information Administration des Etats-Unis, publie un rapport dans lequel il est affirmé que l'Algérie détiendrait la 3e réserve mondiale de gaz de schiste (707 trillions m3) située dans sept bassins : Ahnet, Berkine-Ghadames, Mouydir, Reggane, Timimoun et Tindouf. Dans d'autres régions du monde ces estimations se sont souvent avérées fausses et auraient été lancées pour motiver et justifier l'option gaz de schiste, en particulier lorsque les réserves de gaz et de pétrole conventionnelles se tarissent comme c'est le cas en Algérie.

    Rapidement après la publication de cette information, les premières déclarations officielles expriment la volonté de se lancer dans cette voie et le Conseil des ministres du 21 mai 2014 donne le feu vert à l’exploitation du gaz de schiste. Quatre puits d'exploration dans les bassins d'Ahnet et Illizi ont été prévus pour l'année 2014 dans le cadre d'un programme de forage de 11 puits étalés sur 7 à 13 ans. Ils ne semblent pas avoir été tous forés. Les travaux d'exploration du site Ahnet, à près de 20 km au sud d’In Salah, ont débuté en août 2014 par la compagnie nationale d'hydrocarbures Sonatrach et Total. Les sociétés Halliburton (américaine) et Schlumberger (française) chargées de l'aspect technique de la fracturation sont également présentes sur le site. En 2012 déjà, un forage schiste expérimental qui s'est avéré prometteur avait été réalisé à Ahnet.

    Le 27 décembre 2014, la mise en service « avec succès » de ce puits-pilote est annoncée en grande pompe par les ministres de l’Énergie, des Ressources en eau et de l’Environnement devant un parterre de journalistes venus sur place. Sonatrach se félicite de cet exploit sans évoquer le rôle crucial des firmes étrangères alors qu'il est connu que la compagnie algérienne ne peut réaliser les forages horizontaux qui sont indispensables à l'extraction du gaz de schiste. Le PDG de Sonatrach, Saïd Sahnoun, déclare le 11 janvier 2015 vouloir investir « 70 milliards de dollars sur 20 ans pour produire 20 milliards de mètres cubes de gaz de schiste par an ».

    Mais ce que les officiels et les partisans de cette option ne disent pas c'est que l'extraction de ce gaz est très onéreux: Un puits de schiste coûte aujourd'hui entre 15 et 20 millions de dollars et le déclin de la production est d'environ 40 % après à peine un an d'exploitation. Ceci signifie selon les experts qu'il faut sans cesse forer de nouveaux puits. Pour produire environ 25 milliards de m3, il faut forer 600 puits. Ces puits une fois abandonnés continuent de dégager des gaz, notamment du méthane, gaz à effet de serre bien plus puissant que le CO2. La fracturation de roches entraîne l’accentuation des fissures et failles et provoque des séismes de magnitude 4,5 à 5 degrés sur l’échelle de Richter.

    Bien plus dangereux cependant, sont les conséquences de l'utilisation extensive d'eau et de produits chimiques nécessaire à la fracturation hydraulique.

    Chacune nécessite entre 10 et 25 millions de litres d’eau qui seront extraits de la nappe phréatique, une ressource qui ne se renouvelle pas. Des tonnes de sable et une grande quantité de substances chimiques (500 d'après les spécialistes), dont les composantes de certaines restent inconnues, sont également essentielles pour fracturer la roche dans laquelle le gaz est enfermé. Selon les explications données, l'eau usée de la fracturation, très toxique, serait décontaminée et réinjectée dans le sol ou transportée par camion vers des centres de décontamination. Mais ces précautions très coûteuses ne seront pas prises et elles n'assurent pas la détoxication totale, on le voit aux Etats-Unis, qui pourtant disposent d'une plus longue expérience de ces techniques. Dans de nombreux lieux, l'agriculture est impossible, l'eau alimentaire est contaminée et les paysages sont massacrés par les centaines de puits, de bassins de décantation des eaux polluées, de routes aménagées pour les véhicules transportant le gaz ou les eaux, etc.

    Une population aspirant à préserver son environnement

    Les précurseurs de la forte mobilisation du début de l'année 2015 se manifestent peu après le fameux Conseil des ministres du 21 mai qui officialise l'entrée de l'Algérie dans l'ère du gaz de schiste. A Adrar et Ouargla les premiers rassemblements ont lieu dès le mois de juin 2014. Dès ce moment les appels à un débat national sont adressés au gouvernement et au Président mais également aux sociétés étrangères qui sont sommées de quitter le pays.

    Le 31 décembre 2014, quatre jours après la visite officielle des ministres à In Salah pour célébrer l'entrée officielle de l'Algérie dans l'exploitation du gaz de schiste, des habitants d’In Salah bloquent la route nationale 1 qui mène vers le puits pilote de Gour Mahmoud, situé dans le périmètre Ahnet, à une trentaine de kilomètres de leur ville. C'est le début des protestations qui vont s'amplifier jour après jour et entraîner les populations de Tamanrasset, Adrar, Ouargla.

    Le mouvement de protestation fait preuve d'une maturité impressionnante.

    Composé d'âges et de milieux différents, travailleurs, agriculteurs, notables, cadres de la Sonatrach, rappeurs, enseignants, universitaires, les femmes y jouent un rôle prédominant en raison des enjeux de la lutte. Il n'exprime pas de revendications socio-professionnelles, ne demande pas programmes de développement ou de lutte contre le chômage. Il n'exige encore moins un changement de régime ou le départ du président Bouteflika. La population du Sud se sait en marge des richesses que génèrent leur région pétrolifère de laquelle elle profite bien moins que d'autres régions. Mais pour elle, l'urgence de l'heure est de préserver un environnement fragile, déjà malmenée par l'exploitation conventionnelle du gaz et du pétrole. Cette société agricole, profondément attachée à la terre, a une conscience accrue de l'importance de la terre qui la nourrit mais surtout de l'eau qu'elle a appris à gérer avec parcimonie grâce au système d'irrigation ancestral appelé Foggara, canalisation souterraine alimentée par la nappe aquifère. Si l'eau est menacée par le pompage extensif et la pollution chimique, la vie de ces populations est en danger.

    Dans ce combat, les femmes sont aux avant-postes, car comme l'explique l'anthropologue Dida Badi « le rapport est évident entre la terre qui enfante la source des entrailles de laquelle l’eau jaillit, et la mère qui engendre et fonde le groupe de parenté qui s’en réclame ». Et comme l'explique Mohad Gasemi, le président du bureau régional de l’Association de promotion de l’activité agricole : « Nos ancêtres ont développé dans la région d’Adrar des systèmes d’irrigation qui ont permis à toutes les populations de se nourrir grâce à leurs propres efforts. L’exploitation de gaz de schiste détruira tout ce trésor. Les produits chimiques qui seront utilisés dans la fracturation hydraulique pollueront toutes les nappes du pays, puisque les bassins hydriques sont interconnectés. Au lieu d’investir dans un projet destructeur, qui d’ailleurs n’est pas rentable économiquement, il serait plus judicieux d’investir dans les ressources humaines locales. Outre le tourisme, je ne vois que le secteur de l’agriculture à développer dans notre région, entre autres les céréales et le maïs. Avec le soleil régulier, et l’eau à profusion, les récoltes peuvent être triplées dans le pays. »

    Rapidement la place centrale de la ville d'In Salah est investie par les opposants et dénommée «maydan as-soumoud » (Place de la résistance) où des tentes sont érigées et les habitants se regroupent quotidiennement pour s'échanger et sensibiliser la population. Dans les autres villes du Sud des manifestations sont également organisées régulièrement, mais le centre de la contestation reste In Salah. Une grande manifestation est organisée le 15 janvier à laquelle participent plus de 25 000 marcheurs venus de toute la région pour exprimer leur refus de ce projet qu'ils considèrent être une « question de vie ou de mort ».

    Face à l'absence de réponse aux différents appels lancés par les habitants d'In Salah, le 21 février 2015, une demande de moratoire - le temps de tenir un débat national - tel qu'il est appliqué dans d'autres pays, est adressée par la société civile et des organisations non gouvernementales locales au Président de la République. En se basant sur plusieurs études d'experts, le document met en relief la dangerosité des procédés employés dans la fracturation hydraulique, la pollution de l'air et les risques pour la nappe phréatique ainsi que les conséquences à long terme une fois les puits de fracturation abandonnés. Les photos du site du forage du puits-pilote d'Ahnet montrent qu'aucune mesure de protection n'a été prise : les produits chimiques de la société Halliburton sont stockés dans des sacs à l'air libre ; les bassins de récupération de l'eau utilisée lors de la fracturation hydraulique ne sont que de simples bâches dont l'étanchéité n'est que relative, tandis que l'eau s'évapore, le sable et les produits toxiques subsistent et sont livrés aux vents ; les cadavres d'animaux entrés en contact avec ces bassins sans évoquer la destruction du site. De nombreux pays et notamment la France ont décidé d'un moratoire en raison des dangers des procédés d'extraction et de l'opposition des populations concernées.

    De la confrontation à l'apaisement

    Entre temps le mouvement fait des émules dans le pays et la Coordination pour les libertés et la transition démocratique, CNLTD, dans laquelle se retrouvent de nombreux partis autrefois au pouvoir et aujourd'hui unis contre le 4e mandat d'un président malade et absent, s'empare du sujet. Des manifestations sont programmées dans différentes villes le 24 février, jour anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures en 1971. A In Salah défilent à nouveau près de 25 000 personnes, et dans toutes les grandes villes, plusieurs centaines d'opposants se rassemblent. Les têtes de partis d'opposition tentent de marcher à Alger mais la police les en empêche et des dizaines de manifestants sont arrêtés, tout comme en Kabylie.

    Mais à In Salah également le climat paisible des protestations bascule ce 28 février, lorsque des activistes se rendent à la base de vie de la société Halliburton pour remettre à ses représentants une lettre informant que la population s'oppose au forage d’un nouveau puits. Des gendarmes anti-émeutes les reçoivent sur place en proférant des insultes racistes et les chassent avec violence. Le ton monte et la confrontation éclate, jets de pierre contre bombes de gaz lacrymogène.

    Les affrontements se poursuivent en ville, les forces de l'ordre n'ont plus aucune retenue, à coup de bulldozers, matraques et de gaz, ils évacuent la place As-soumoud, symbole de résilience d'une population jusque là patiente et attachée à la non-violence. Des bâtiments publics sont incendiés, tandis que des personnes sont arrêtées et blessées notamment par des tirs à balles réelles. Ce n'est que lorsque l'armée intervient pour apaiser les esprits et pousser les policiers à retourner dans leurs casernes que le calme se rétablit. Le collectif des habitants de In Salah dénonce dans un communiqué d'une grande lucidité que pour « respecter les contrats signés avec les multinationales étrangères et de manière à satisfaire ses exigences premières, Sonatrach a décidé d'opérer le 'fracking' en soutenant, par un renfort sécuritaire extraordinaire, l'entreprise Halliburton, en charge des hydro-fracturations assassines ». Tout en voulant préserver le caractère pacifique de leur mouvement, malgré le débordement de fin février, les habitants d'In Salah restent attachés au dialogue avec le gouvernement afin de trouver une solution commune.

    L'irresponsabilité des autorités met en danger l'avenir du pays

    Si jusqu'à présent les autorités algériennes ont fait preuve d'une certaine retenue - à l'exception de la vague de répression fin février - face à un mouvement qui par sa maturité et son expertise représente un véritable défi pour le gouvernement, d'autant plus qu'il ne conteste pas le pouvoir en place, n'exige pas son départ, les différents ministres et responsables de la Sonatrach ont quant à eux brillé par leurs propos incompétents et contradictoires qui ne sont pas pour rassurer les populations laissées dans l'ignorance quant à l'évolution du programme d'extraction de gaz de schiste. Les uns parlent de stade d’exploration, les autres d’exploitation et les troisièmes suggèrent les deux étapes.

    Les rares arguments opposés aux militants anti-gaz de schiste critiquent qu’ils ne prendraient pas en considération « l’impératif économique » et verseraient dans « l’utopie environnementale ». Quel impératif économique ? Celui d'honorer des contrats de vente d'hydrocarbures à long terme datant de la période de Chekib Khelil, ministre de l'énergie et des mines jusqu'en 2010, qui a bradé les ressources fossiles du pays et qui est aujourd'hui poursuivi dans des affaires de corruption de la Sonatrach ?

    N'est-ce pas plutôt l'esprit de rente qui prédomine à la fois dans la classe politique mais également chez de nombreux journalistes et une bonne partie des Algériens ?

    Habitués à recourir à la manne pétrolière, la perspective d'un tarissement des hydrocarbures, est inimaginable voire inacceptable. C'est la paix sociale qui est en jeu dans un pays qui bien qu'aspirant à l'apaisement après les violences subies durant la « sale guerre » des années 1992-2002 est traversé d'antagonismes explosifs.

    Que faut il penser d'un Président de la République qui en réponse à la demande de moratoire présentée par les habitants d'In Salah assène fin février que le gaz de schiste est « un don de Dieu qu’il faut fructifier » ? Invoquer le registre religieux et infantiliser ceux qui en appellent à la responsabilité du chef de l'Etat montre une fois de plus quelle relation il entretient avec ses administrés. Et face à une mobilisation qui ne fléchit pas, Le président Bouteflika passe peu après à des menaces à peine larvées. Lors de la commémoration du cessez-le-feu du 19 mars 1962, à Ghardaia, dans une déclaration qui lui est attribuée, il lance un avertissement aux opposants du gaz de schiste qui remettraient en question les « programmes de développement ». « C’est un Etat généreux qu’offense la propension de certains de ses citoyens à douter de lui, et de ses engagements. Je veux parler d’une partie de la population d’In Salah qui persiste dans ses protestations, en dépit de toutes les assurances qui lui ont été données. (…) Je suis particulièrement affligé de voir des enfants de la région poussés à nuire à l’Etat de leur pays, et de constater que d’autres tendent à mettre en doute le dévouement et l’intégrité des dirigeants de leur Etat, et à s’inscrire en faux contre le bien-fondé de leurs actions, décisions et plans conçus pour réaliser le développement du pays dans son ensemble ». Ces déclarations ne laissent pas présager de volonté à prendre véritablement en considération les inquiétudes fondées des populations du Sud.

    En conclusion

    La mobilisation populaire contre la fracturation hydraulique, bascule dans une autre dimension avec la participation de politiques. Les responsables de divers partis d'opposition se rendent dernièrement régulièrement à In Salah pour participer aux protestations. Le 14 mars une grande manifestation nationale a été organisée à Ouargla à laquelle avait également appelé la CNLTD. Les opposants politiques ont été à cette occasion accueillis avec enthousiasme par la population qui n'aspire qu'à sortir de son relative isolement et désire que le débat autour de la question du gaz de schiste s'élargisse en particulier au nord du pays où la mobilisation pour un moratoire n'est pas encore très forte. Certains avertissent toutefois qu'il est nécessaire que le mouvement anti-gaz de schiste conserve son autonomie et ne laisse pas brouiller son message par les actions de politiciens qui aspirent à un « printemps arabe » en Algérie. Ceci est d'autant plus important que cette mobilisation non-partisane, de par son caractère populaire transcendant tous les clivages sociaux et professionnels, désarçonne le gouvernement. Si elle devait être récupérée par l'opposition politique, elle risquerait de perdre de sa force et de sa vitalité.

    La question de l'exploitation du gaz de schiste n'est pas à traiter comme un problème du Sud algérien en raison de la localisation des gisements.

    Elle concerne le pays tout entier et en appelle à une réponse globale afin de préserver un environnement qui permettrait le développement du pays à condition d'engager d'autres orientations. L'utilisation prudente des nappes d'eau phréatiques et albiennes pourraient garantir une couverture alimentaire du pays entier tout en fournissant du travail à des milliers d'agriculteurs. L'exploitation d'une richesse naturelle, le soleil, pourrait produire une grande partie de l'énergie nécessaire en Algérie et être exportée. Mais ce sont là des décisions politiques qui placent au centre des préoccupations non pas les profits à court terme mais l'avenir du pays et des générations futures.

    Salima Mellah, Assafir al-arabi, 16 avril 2015

    http://www.algeria-watch.org/fr/article/analyse/mellah_gaz_schiste.htm

  • Le Collectif national pour un moratoire sur le gaz de schiste dénonce (Le Matin.dz)

    Le collectif national pour un moratoire sur le gaz de schiste Algérie (CNMGS) s’indigne et dénonce l’éminence de nouvelles fracturations hydro-chimiques dans la région d’in Salah, malgré le refus de la population locale mobilisée depuis plus de 100 jours pacifiquement et de façon déterminée et le refus des nombreux militants antigaz de schiste en Algérie.

    En effet, il a été constaté sur le site du KM 35 la présence de quantités importantes de produits chimiques stockées dans des fûts mais aussi dans des sacs, ces derniers pouvant laisser échapper des produits chimiques dans l’atmosphère et, ce faisant, créer une irrémédiable pollution sur l’environnement et les personnes. Il a été également constaté la présence de matériel lourd de fracturation, véhicules, etc.

    Alors que le débat transparent souhaité par la société civile et la communauté scientifique algérienne contre la fracturation hydro-chimique des schistes ainsi que l’appel à moratoire n’ont reçu aucune réponse des pouvoirs publics, nous revoilà, encore une fois, confrontés aux dangers de cette technique sur les ressources hydriques et sur la population.

    Face aux déclarations contradictoires et à tort rassurantes des pouvoirs publics le Collectif national pour un moratoire du gaz de schiste Algérie réitère avec force et détermination l’urgence d’un moratoire et en appelle aux plus hautes instances de notre pays.

    Il est de notre devoir de citoyens de continuer notre mobilisation contre la fracturation hydrochimique des schistes et de rester intransigeants quant au devenir de la gestion de nos ressources naturelles et hydriques afin de préserver l’avenir des générations futures.

    Il est également de notre devoir de soutenir la mobilisation exemplaire d’In Salah et de faire écho à Sahet Essoumoud.


    Nous rappelons que le Collectif national pour un moratoire sur le gaz de schiste Algérie a été créé le 25 février 2015 afin de soutenir l’appel à moratoire adressé par la société civile d’In Salah le 23 février 2015 au Président de la République.
    Notre collectif appelle par ailleurs à la création d’une commission indépendante sur la question des gaz de schistes par fracturation hydraulique et nous demandons à ce que soient rendus publics:


    - Le document validé par l’Assemblée nationale populaire sur la question des gaz de schistes,
    - Le rapport des experts remis par M. Mebtoul au Premier ministre,
    - Et les conclusions qui ont permis à l’Autorité de Régulation des hydrocarbures la validation de l’exploitation des gaz de schistes en Algérie.

    Bien que l’arrêt de l’exploitation des gaz de schistes soit notre préoccupation première au vu de ses diverses conséquences, il n’en demeure pas moins que nous nous inscrivons dans une démarche plus large, celle du développement durable, de l’économie responsable, de la diversification de nos ressources énergétiques et d’une économie plurielle et diverse qui mettrait l’Algérie à l’abri des aléas d’une économie rentière

    Signataires :

    le Collectif national pour un moratoire sur le gaz de schiste Algérie: Alger, Adrar, Timimoum, Metlili, Tamanrasset, Tébessa, Oum El Bouaghi, Bejaia, Tizi-Ouzou, Constantine, Oran, Boumerdès, Batna, Djelfa, Jijel, les représentants de la diaspora (France, Angleterre, Etats-Unis et Canada).Par Le Matin | 15/04/2015 10:42:00

    http://www.lematindz.net/news/17177-le-collectif-national-pour-un-moratoire-sur-le-gaz-de-schiste-denonce.html