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Droits humains - Page 17

  • Solidarité avec les prisonniers politiques égyptiens face à la machine répressive de Sissi (Essf)

    Collective death sentence

    Une campagne de solidarité internationale a été lancée il y a quelques semaines par des activistes égyptiens avec les prisonniers politiques égyptiens et dénoncer la répression massive et sanglante du régime militaire au pouvoir, présidé par l’ex maréchal Sissi, contre toute forme d’opposition.

    En effet depuis l’arrivée au pouvoir de Sissi, en juillet 2013, la machine répressive s’est mise en mouvement de façon extrêmement violente.
    Les estimations des conséquences de la répression à ce stade tournent autour de 2 500 morts et 17 000 blessés, quelque 16 000 arrestations, et plus de 1000 condamnations à mort au terme de procès expéditifs.


    Il faut notamment ne pas oublier le massacre commis en août 2013 par les services de sécurité contre les membres des Frères musulmans au Caire, causant la mort de plus de 1 000 manifestants, ou encore l’assassinat par un policier, au cours d’une manifestation pour les 4 ans de la révolution, en janvier 2015, de la militante de la gauche révolutionnaire Shaimaa el-Sabbagh.
    Les prisonniers politiques sont aujourd’hui plus de 40 000 dans tout le pays. Le régime a condamné à mort des centaines de membres du mouvement islamiste des Frères musulmans, y compris l’ancien président Morsi, sans parler des milliers d’entre eux qui sont détenus.

    La nature contre révolutionnaire et réactionnaire du mouvement des Frères musulmans, comme on a pu le constater lors de leur période au pouvoir et depuis le début du processus révolutionnaire en Egypte avec une alliance quasi totale avec le leadership militaire, qui le réprime depuis juillet 2013, contre les autres composantes démocratiques et de gauche, ne doit en aucun cas nous arrêter de défendre les droits démocratiques de toutes et tous, y compris des membres du mouvement islamiste, dans le cas contraire nous retrouverions dans le camp de l’oppresseur.

    Les militants démocrates et de gauche n’ont pas été épargnés. Ainsi, plusieurs figures de la révolution comme Mahiennour Al Masry et Youssef Chaaban, membres des socialistes révolutionnaires, l’activiste Alaa Abdel Fattah, ou encore des leaders du mouvement du 6 avril, organisation de jeunes révolutionnaires, ont été victimes de la répression.

    De plus, le mouvement « Liberté pour les courageux », qui lutte contre les arrestations de militants, a recensé 163 disparitions depuis avril 2015, pour la plupart des militant-es de gauche et démocrates. On a retrouvé la trace de la plupart des interpellés, mais 66 restent introuvables. Dans le passé, tous ses activistes s’étaient battus contre les politiques autoritaires et antisociales, que ce soit sous le régime Moubarak, ou sous celui des Frères Musulmans.


    Des milliers de militants révolutionnaires, laïcs, athées, démocrates ou syndicalistes, sont emprisonnés, réprimés ou poussés à l’exil. La censure de la presse est également imposée : toute critique du régime des militaires est impossible. Les manifestations sont quasi interdites, tandis que le droit de grève est étranglé. Le régime discute aussi de mettre hors la loi les syndicats indépendants, et interdit la grève aux employés de l’État…


    Le régime n’a pas hésité à dissoudre le club de supporters de foot des « Ultra », qui avait joué un rôle important dans le processus révolutionnaire, en décrétant qu’il s’agit d’une organisation terroriste. Le « Mouvement du 6 avril » est menacé d’être désigné comme groupe terroriste, tandis que les « Socialistes révolutionnaires » sont accusés de conspirer avec des forces étrangères pour semer le chaos dans les rues égyptiennes.

    Cette répression massive a reçu l’appui déterminé des monarchies réactionnaires de l’Arabie saoudite et des Émirats arabes unis. L’Arabie Saoudite, le Koweit et les Emirats Arabe Unis ont d’ailleurs annoncé en Mars dernier des aides cumulées de 12 milliards de dollars, sous forme d’investissements pour l’économie égyptienne et d’aides au développement, et dont trois milliards seront déposés à la Banque centrale lors d’une conférence économique internationale, avec la présence de représentants de plus de 100 pays et 25 groupes ou organismes internationaux, organisée par le régime égyptien dans la station balnéaire de Charm el-Cheikh pour attirer les investisseurs étrangers.

    De leurs côtés, les gouvernements occidentaux ne se préoccupent guère des violations des droits démocratiques en Egypte, tout en autorisant toujours la vente d’armes et de technologies de surveillance au régime de Sissi. Par exemple les relations avec le régime autoritaire de Sissi en Egypte se sont normalisé rapidement ces derniers mois suivant l’accord commercial conclu entre le gouvernement français et le régime égyptien concernant la vente des avions militaires Rafale, en plus d’autres contrats conclus par différentes sociétés françaises avec le régime égyptien. C’est sans oublier la récente visite de Sissi à la chancelière allemande Merkel qui préfère les intérêts des hommes d’affaires allemands à la défense des droits démocratiques. Lors de la visite en Allemagne, Sissi a en effet signé un contrat de 9 milliards de dollars avec la société allemande Siemens, la plus grande commande de l’histoire de la société, pour fournir l’Egypte avec de nouvelles centrales gaz-vapeur et l’énergie éolienne.


    Les Etats Unis de leur côté ont finalement annoncé mi avril le dégel de la dernière enveloppe de 650 millions de dollars pour le régime égyptien qui avait été bloqué après la destitution de Morsi et conditionnée par des réformes démocratiques. Cette enveloppe fait partie des 1,5 milliards de dollars d’aide au régime égyptien alloué chaque année par les Etats Unis, dont 1,3 milliard en assistance militaire. Cela s’ajoute aux hélicoptères de guerre Apache livrés récemment pour soutenir Le Caire dans sa lutte contre les jihadistes dans le Sinai. Ils ont annoncé aussi que l’aide annuel pour l’année 2016 sera délivré sans aucun changement.

    Face à ce constat, les organisateurs des actions de protestation à l’échelle internationale demandent, en collaboration avec les militants égyptiens, la fin de la répression des manifestations en Egypte, la libération des prisonniers politiques, des procès équitables pour toutes et tous, l’arrêt de la torture et des exécutions arbitraires. En plus de cela, il nous faut montrer notre solidarité avec les prisonniers politiques en Egypte et apporter notre soutien à toutes celles et tous ceux qui luttent pour les objectifs originaux de la révolution : « pain, liberté et justice sociale » comme scandaient les manifestant-es en 2011 sur Tahrir.

    DAHER Joseph  16 juin 2015

    Ce texte a été publié sur

    https://syriafreedomforever.wordpress.com/2015/06/16/solidarite-avec-les-prisonniers-politiques-egyptiens-face-a-la-machine-repressive-de-sissi/


    Une version courte a été publiée dans le journal le Courrier : 


    http://www.lecourrier.ch/130698/solidarite_avec_les_prisonniers_politiques_egyptiens


    Un tract d’appel à un rassemblement est en ligne sur

    http://www.solidarites.ch/geneve/international/885-18-06-2015-manif-egypte

     

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article35252

  • Appel aux Député(e)s de l’Assemblée Nationale française (Amdh)

    amnesty stop torture 2015

    Rejetez le « protocole additionnel à la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre le Maroc et la France ».

    Mesdames et Messieurs les Député(e)s,

    Vous allez débattre du projet de loi autorisant l’approbation du protocole additionnel à la convention d’entraide judiciaire en matière pénale entre la France et le Maroc, n° 2725, déposé le 15 avril 2015.

    Mesdames et Messieurs les Député(e)s,

    Vous n’êtes pas sans savoir que ce projet veut enterrer les plaintes déposées par des personnes1 qui affirment avoir été torturées au Maroc. Ces mêmes personnes ont reçu le soutien d’associations de défense des Droits Humains reconnues tant au Maroc qu’en France ou à l’international)2. Ce ne sont pas les plaintes de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture(ACAT) qui ont provoqué la crise diplomatique entre le Maroc et la France durant l’année 2014, mais c’est plutôt « le fait que le Maroc est un État tortionnaire. »3

    Le dernier rapport d’Amnesty International évoque 173 cas de torture recensés entre 2010 et 2014. Ce rapport précise que « Les responsables marocains renvoient l’image d’un pays ouvert, respectueux des droits humains. Mais tant que la menace de la torture planera sur les détenus et les voix dissidentes, cette image ne sera qu’un mirage sous des apparences trompeuses, la torture est utilisée pour étouffer la contestation et entache certaines condamnations prononcées par la justice. Que vous remettiez les inégalités en question ou exprimiez vos convictions, vous courez le risque d’être victime de violences et d’actes de torture. »

    Mesdames et Messieurs les Député(e)s,

    La commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) recommande le rejet de ce projet. Dans son avis sur le projet de loi autorisant l’approbation du protocole rendu le 21 mai 2015, la CNCDH exprime :

    « … son opposition résolue à l’adoption du projet de loi autorisant l’approbation du protocole additionnel, dès lors qu’elle conduit à bouleverser nombre de règles françaises de compétence répressive internationale dans les rapports entre la France et le Maroc.

    La CNCDH insiste tout particulièrement sur le fait que la France est liée par la Convention des Nations unies de 1984 qui impose l’établissement d’une compétence universelle en matière de crimes de torture, afin de prévenir l’impunité de leurs auteurs. Pour la CNCDH, la France ne saurait adopter un accord bilatéral allant à l’encontre du but et de l’objet de cette convention ».

    L’approbation de ce projet renforcerait l’impunité. Cet accord est une tentative de détourner, voire liquider, les procédures judiciaires en cours parce qu’elles gênent cet « ami de la France ». Approuver cet accord donnerait un signal fort aux tortionnaires au détriment des conventions et normes internationales ratifiées par les deux pays, le Maroc et la France. Approuver cet accord c’est apporter un soutien à un pouvoir politique qui continue à pratiquer la torture, à protéger ses intérêts et par conséquence cautionner l’impunité et les violations graves des droits humains.

    C’est pourquoi nous, signataires, vous demandons, Mesdames et Messieurs les député(e)s, de rejeter ce projet.

    1 Notamment Zakaria Moumni, Naama Asfari et d’autres.

    2 ACAT, Amnesty, AMDH, HRW, FIDH, etc.

    3 https://www.acatfrance.fr/communique-de-presse/le-maroc-assigne-en-justice-les-victimes-de-torture-et-lacat

    Premières organisations signataires

     

    • L’Association Marocaine des Droits Humains-Paris/IDF (AMDH-Paris/IDF).
    • L’Association des Travailleurs Maghrébins de France (ATMF).
    • L’Association des Femmes Chefs de Famille (AFCF).
    • L’Association des Marocains en France (AMF).
    • L’Association Marocaine des Droits Humains (AMDH-Nord France).
    • Le Forum Citoyenneté et Solidarité des Marocains en Europe (FCSME).
    • L’Association Française d’Amitié et de Solidarité avec les Peuples d’Afrique (AFASPA).
    • L’Association Franco-Chilienne Cordillera.
    • L’Association Marocaine des Droits Humains-Belgique (AMDH-Belgique).
    • Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale (CEDETIM-IPAM).
    • Comité pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT).
    • Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT).
    • La Voie Démocratique Paris (VD-Paris).
    • L’Association des Familles des Prisonniers et Disparus Sahraouis (AFAPREDESA).
    • L’association Survie(Survie).
    • Comité pour le respect des libertés et  des droits de l’homme au Sahara occidental (CORELSO).
    • L’Association Femmes Plurielles.
    • L’association Elghorba.
    • Le Forum de Solidarité Euro-méditerranéenne (FORSEM).

     

    Premières personnes signataires

     

    • Zakaria Moumni, « torturé durant quatre jours dans le centre de torture de Témara au Maroc. Dans la salle de torture, j’ai vu et identifié le directeur de la DGST, Abdellatif Hammouchi ».
    • Mustapha Adib, « ancien détenu arbitraire de 1999 à 2002 (durant le règne du roi Mohammed 6) selon le Groupe de Travail sur la Détention Arbitraire relevant de l’ONU; détention à elle seule considérée comme de la torture selon les critères du Comité contre la Torture».
    • Claude MANGIN-ASFARI, « ex commissaire générale des Guides de France (scoutisme français), chevalière dans l’ordre national du mérite, épouse du détenu politique Sahraoui défenseur des droits humains Naama Asfari ayant porté plainte avec l’ACAT devant les tribunaux français et le comité spécial de l’ONU contre la torture à Genève ».
    • Aminetou Ely, Présidente de l’AFCF(Mauritanie). Prix des Droits de l’Homme de la République Française 2006, Médaille de Chevalier de la Légion d’Honneur Française 2010.
    • Khadija Ryadi, ancienne présidente de l’AMDH, Prix des Nations Unies pour les Droits de l’Homme 2013.
    • Driss Elkherchi, président de l’ATMF.
    • Ouadie El Hankouri, président de l’AMDH-Paris/IDF.
    • Larbi Maaninou, enseignant, ancien président de l’ASDHOM, de l’ASADH et FMVJ-France.
    • Jérôme Gleizes, Conseiller de Paris.
    • Madjid Benchikh, Professeur émérite de l’Université de Cergy-Pontoise, ancien président d’Amnesty International en Algérie.
    • Rudolf Bkouch, Professeur émérite à l’Université de Lille, membre de l’UJFP et de l’IJAN Juif antisioniste.
    • René Gallissot, historien, professeur émérite.
    • Jean-Jacques BUGE, 9 rue Pompidou 59810 Lesquin.
    • Jean-Paul Le Marec, militant associatif.
    • Said Sougty, Secrétaire régional Europe de la Voie Démocratique.
    • Azahoum Boualam, universitaire.

     

    Contacts presse :

    Mohamed JAITE, amdh.paris@gmail.com, 07.52.62.96.62

    Driss ELKHERCHI, delkherchi@yahoo.fr, 06.06.81.68.30

    http://amdhparis.org/wordpress/?p=2527

  • Cour d'appel de Paris : La famille de Ali Mecili conteste le non-lieu (Algeria Watch)

    La famille d'Ali Mecili, opposant algérien assassiné par balle en plein Paris en 1987, a contesté jeudi devant la cour d'appel de Paris le non-lieu rendu en novembre 2014 par une juge d'instruction française et demandé que l'enquête reste ouverte.

    La cour d'appel, devant laquelle le parquet général a demandé la confirmation du non-lieu, rendra sa décision le 10 septembre. En exil en France depuis 1965, Ali Mecili, devenu avocat au barreau de Paris, avait été assassiné de trois balles au soir du 7 avril 1987, dans le hall de son immeuble, en plein centre de Paris. Sa famille a toujours accusé le pouvoir algérien ou les services secrets d'être impliqués dans la mort de cet opposant. Ali Mecili avait confié à ses proches, avant le crime, avoir été menacé à plusieurs reprises.

    «Fermer ce dossier, c'est admettre l'impunité pour les crimes politiques», a affirmé à l'AFP Annie Mecili, devant la cour d'appel où l'audience était à huis clos. Ali Mecili était porte-parole d'Hocine Aït-Ahmed. L'avocat avait joué un rôle important dans le rapprochement entre Aït Ahmed et l'ancien président de la République Ahmed Ben Bella. Aït Ahmed et Ben Bella avaient fondé en 1985 à Londres un front uni contre le président de l'époque, Chadli Benjedid.

    Deux mois après le crime, la brigade criminelle avait interpellé un suspect, Abdelmalek Amellou. Ce dernier avait été relâché après sa garde à vue et expulsé vers l'Algérie sur ordre du ministre de la Sécurité Robert Pandraud.

    Pour l'avocat de la famille Mécili, Me Antoine Comte, «l'empressement des autorités françaises à se débarrasser de ce suspect montre bien qu'il s'agissait d'une « affaire d'État»». L'enquête avait longtemps piétiné avant la délivrance en 2007 de deux mandats d'arrêts contre Abdelmalek Amellou et un diplomate algérien arrêté en août 2008 à l'aéroport de Marseille. Cette arrestation avait provoqué une crise diplomatique entre Alger et Paris. En 2010, le diplomate algérien avait bénéficié d'un non-lieu. «La complaisance des autorités françaises dans ce genre d'assassinat n'aboutit qu'à une chose, c'est qu'ils se reproduisent», a dénoncé Me Comte. Selon une source proche du dossier, le dernier non-lieu rendu par la juge constate que les multiples demandes de coopération internationale sont «demeurées vaines».

    par R. N., Le Quotidien d'Oran, 20 juin 2015

    http://www.algeria-watch.org/fr/article/just/affaire_mecili/non_lieu_conteste.htm

  • Egypte. Pour la libération des prisonniers politiques! (A l'Encontre)

    Au Caire. graffiti contre les violences faites aux femmes

    Au Caire. graffiti contre les violences faites aux femmes

    Rassemblement,
    jeudi 18 juin, 18 heures,
    rue de Lausanne 45-47, devant la Mission d’Egypte, Genève

    Le collectif Egypt Solidarity – créé en février 2014 – a lancé un appel international de solidarité avec les prisonniers et les prisonnières politiques réprimé·e·s par le régime de l’ex-maréchal Abdel Fattah al-Sissi

    Les 20 et 21 juin 2015, le plus grand nombre d’initiatives – telles qu’indiquées par Egypt Solidarity – se doivent d’être entreprises à l’échelle internationale. Les revendications suivantes structurent cette campagne:

    • Arrêt de la répression des manifestations.
    • Libération des prisonniers politiques.
    • Procès équitable pour tous, contre les tribunaux militaires.
    • Arrêt de la torture et de tous les mauvais traitements.
    • Interdiction des condamnations à mort et des exécutions.

    Cette manifestation du 18 juin 2015, à Genève – 18h, devant la Mission permanente de l’Eypte, 45-47 rue de Lausanne – s’inscrit dans le contexte de l’appel lancé par Egypt Solidarity.

    Azouli. L’emblème d’une dictature de militaires

    Le caractère effectif du régime militaire dictatorial égyptien est révélé par une «prison militaire»: celle d’Azouli. Elle échappe à toutes les instances baptisées légales en Egypte. Elle est analogue à ces «prisons pour disparus» de la dictature des généraux argentins entre 1976 et 1983. Amnesty International l’a dénoncé. Une enquête approfondie du quotidien anglais The Guardian en a révélé divers aspects.

    Ce haut lieu des pires tortures et mises à mort se trouve dans un vaste camp militaire à quelque 100 kilomètres au nord-est du Caire.

    Le fonctionnement d’un tel lieu de détention repose sur les mécanismes criminels suivants:

    • toute personne emprisonnée «n’existe pas», car aucun document ne prouve son incarcération;

    • si le prisonnier meurt sous la torture, personne n’est censé le savoir;

    • les militaires et autres tortionnaires disposent d’une double impunité: celle de l’anonymat (les prisonniers sont encapuchonnés) et celle assurée par le pouvoir en place;

    • les interrogatoires et la torture s’effectuent dans un bâtiment spécial (le S-1), haut lieu de la terreur;

    • les «confessions» obtenues doivent correspondre aux scriptes des services dits d’intelligence;

    • les survivants, sur la base de ces «aveux», peuvent être transférés dans une prison «normale» et accusés, dès lors, de «terrorisme» et autres crimes;

    • les juges n’ont aucun accès à Azouli où règnent les services (et les sévices) de l’intelligence militaire.

    Azouli concentre, en quelque sorte, les attributs acquis par Al-Sissi.

    Sous le régime de Moubarak, il exerçait ses fonctions dans les services de «l’intelligence militaire», autrement dit dans ce centre obscur qui contrôlait des leviers décisifs d’une armée dont le pouvoir économique et politique constituait un pilier de l’Etat profond, selon la formule courante. Sa carrière militaire l’a conduit à être attaché militaire en Arabie saoudite – ce régime ultra-réactionnaire qui apporte aujourd’hui un soutien financier massif à l’Eygpte, aux côtés d’autres Etats du Golfe – puis aux Etats-Unis (en 2005 et 2006). Dès août 2012, il prend la tête du ministère de la Défense. Son «élection» – 96,9% des suffrages en juin 2014 – ne fait qu’entériner un pouvoir capturé 11 mois auparavant, le 3 juillet 2013. D’ailleurs, du 14 au 16 août 2013, les «forces de sécurité» attaquèrent les deux camps organisés par les Frères musulmans soutenant Morsi – place al-Nahda et place Rabia-El-Adaouïa – et massacrèrent plus de 2500 personnes. Cela marque le début d’une «guerre contre le terrorisme» et des procès durant lesquels des centaines d’accusés sont condamnés à mort.

    Assassiner la mémoire de janvier 2011

    Ce pouvoir de Sissi et des siens déploie tous les instruments de la contre-révolution, après l’essor des forces démocratiques et révolutionnaires de janvier 2011 à juin 2013. Ainsi, à l’occasion des manifestations pacifiques pour célébrer le quatrième anniversaire de la révolution de janvier 2011, au moins 27 manifestant·e·s ont été tués. Les témoins de ces homicides sont menacés d’arrestations par le ministère public. Et 500 manifestant·e·s sont incarcérés dans des «centres de détention non officiels».

    Une avocate réputée pour la défense des droits humains et militante socialiste-révolutionnaire, Mahienour el-Masry, a été condamnée en appel à 15 mois de prison pour avoir participé à une manifestation d’avocats dénonçant la brutalité de la police et cela trois mois avant la chute de Mohamed Morsi. Lors du verdict, ce 31 mai 2015, Mahienour el-Masry s’est écriée: «A bas, à bas le régime militaire!» Un régime qui restaure la mort de prisonniers durant leur détention, comme à la pire époque de Moubarak.

    Au Caire, le 24 janvier 2015, la militante Shaima al-Sabbagh, qui voulait déposer une couronne de fleurs en mémoire de victimes de la révolution du 25 janvier, a été tuée par un tir de chevrotine. Suite à une plainte déposée par l’Alliance populaire socialiste, le parti de son compagnon, les enquêteurs ont cherché à charger ses amis. Puis, en ce mois de juin, sur injonction du pouvoir, la «justice» a condamné un policier. Une minuscule opération cosmétique.

    Le 6 juin 2015, trois membres du Mouvement du 6 avril, interdit en août 2014, ont été arrêtés pour détenir des tracts appelant à la «désobéissance civile» pour le 11 juin. Un type d’initiative qui, pour éviter les représailles policières, devait se traduire par: ne pas se rendre à son travail, à l’école ou à l’université. Le Mouvement du 6 avril – créé en 2008 – a joué un rôle significatif dans le soulèvement conduisant au renversement de Moubarak. Il s’était aussi opposé à Morsi. Il est aujourd’hui une cible, parmi d’autres, du régime.

    Un appareil répressif «légalisé» à coups de décrets

    L’appareil répressif égyptien ne peut être réduit à l’armée, à la police, aux services de renseignement. En fait, l’Etat profond – représenté par le Président – contrôle la justice, les nominations dans l’appareil d’Etat, les médias, le corps diplomatique, les recteurs d’université, etc. La Constitution de 2014 permet au Président de promulguer des lois, sans parlement. Ces multiples lois-décrets ont contribué à redonner toute sa force à cet appareil répressif, en utilisant le danger du terrorisme et de la sécurité nationale. Ce qui sert aussi à étrangler la population de Gaza.

    De multiples «lois» spécifiques attribuent des pouvoirs aux instances répressives afin de frapper un vaste spectre d’opposants. Quelques exemples. La loi du 26 novembre 2013 viole les droits d’expression, d’association et de réunion. Celle d’octobre 2014 donne aux tribunaux militaires le droit de statuer sur les menaces contre «l’intégrité de la nation». En septembre 2014, les ONG censées être financées «par l’étranger» sont ciblées. En janvier 2015 sont visés les enseignants qui participent à une «activité partisane». En février 2015, tout groupe menaçant la «sécurité, l’unité ou les intérêts de la nation» est défini comme une «entité terroriste». L’ensemble des droits conquis par les salarié·e·s sont remis en cause, alors que le chômage en hausse suscite la misère. Le projet de nouveau Code du travail s’attaque au droit de grève, au droit syndical. L’OIT, dont le siège est à Genève, a été contrainte de mettre l’Egypte sur sa liste noire.

    Les femmes et les jeunes filles sont victimes de sinistres violences. Le dernier rapport de la FIDH (Fédération internationale des ligues des droits de l’homme) a documenté «des cas de viols, de viols anaux et vaginaux, de chantages sexuels perpétrés par la police ou le personnel de l’armée. Ces violences sont utilisées afin d’éliminer toute protestation publique en légitimant les autorités comme garante de l’ordre moral.» Les bourreaux étant les autorités, les victimes ne peuvent porter plainte, car de nouvelles représailles s’abattront sur elles.

    Les gouvernements allemand, suisse… complices actifs

    Simultanément, le régime de Sissi est soutenu non seulement par l’Arabie saoudite, les Etats du Golfe, mais est considéré comme un facteur de «stabilité» dans la région par les pays occidentaux. En novembre 2014, le «socialiste» François Hollande reçoit Abdel Fattah al-Sissi à l’Elysée. La vente de Rafale est à l’ordre du jour. Pour ce qui a trait aux «droits» humains, Sissi affirme: «Je suis 100% pour les droits de l’homme, mais pas pour l’instant.»

    La visite d’Al-Sissi en Allemagne fut un succès: nouvelles livraisons d’armes (après la suspension datant de 2002), contrats milliardaires pour Siemens (turbines, éoliennes). Comme le souligne Al-Ahram (10 juin 2015): «Selon les observateurs, la visite du président en Allemagne a réalisé tous ses objectifs, sur tous les volets.»

    Pour ce qui est du gouvernement helvétique, il s’agit de trouver une solution élégante en ce qui concerne les «fonds» de Moubarak qui sera blanchi par ses pairs. Quant au secrétaire d’Etat au Département des affaires étrangères, Yves Rossier, le 13 juin 2015, le quotidien en ligne Egypt Independent écrivait: «Il a exprimé sa satisfaction face à la manière dont les militaires ont géré les différents problèmes apparus depuis la révolution du 25 janvier. Il a aussi manifesté sa compréhension face aux défis sécuritaires auxquels l’Egypte fait face, ajoutant qu’il serait difficile pour toute personne d’être Président de l’Egypte en ces temps.» Plus impérialisto-helvétique, impossible

    C’est en maintenant les liens de solidarité avec ceux et celles qui se battent pour la démocratie et la justice sociale en Eygpte et en éclairant la complicité du gouvernement suisse qu’une campagne de solidarité, sur la durée, peut et doit se développer, en sachant faire appel aux institutions internationales ayant leur siège en Suisse, comme l’OIT.

    Mouvement pour le socialisme

    Publié par Alencontre le 15 - juin - 2015
     
     
    Afin de coordonner au mieux des actions, il est possible de se référer à la page Facebook d’Egypt Solidarity:
     
    www.facebook.com/egypt.solidarity.initiative ou de consulter l’appel traduit en français et publié sur le site alencontre.org, en date du 3 juin 2015
     
     
  • Djibouti au bord du chaos (Afriques en lutte)

    La position stratégique de Djibouti, petit Etat de la corne de l’Afrique situé sur la deuxième voie maritime la plus importante au monde, fait de lui l’un des acteurs majeurs des relations internationales. Ses partenaires se gardent malheureusement de dénoncer les pratiques anti-démocratiques du président Ismaël Omar Guelleh, qui entend briguer un quatrième mandat successif.

    Paradoxal Djibouti. Petit par la taille – 23 000 km² de superficie totale, classé 150ème –, l’Etat de la corne de l’Afrique est pourtant l’un des grands acteurs de la géopolitique régionale ; la capitale, Djibouti, éminemment riche de son industrie portuaire, compte jusqu’à 65,2 % de personnes en situation de pauvreté – et 57,4 % en situation d’extrême pauvreté. L’ancienne colonie française, située sur la deuxième voie maritime la plus importante au monde, à quelques encablures de l’effervescent Moyen-Orient, accueille aujourd’hui tout ce que le monde civilisé compte de combattants du djihadisme et de la piraterie maritime. Ce qui n’empêche pas son président-dictateur, Ismaël Omar Guelleh (IOG), de multiplier les exactions et les répressions arbitraires en toute impunité. Tandis que les Occidentaux voient en lui un acteur stratégique dans leurs entreprises géopolitiques internationales, les citoyens perçoivent d’un tout autre œil celui qui a la mainmise sur le pouvoir depuis seize ans. Djibouti, décidément ambivalent, n’est pas le même Etat selon que l’on se place en-dehors ou à l’intérieur de ses frontières.

    Des militants se battent dans le Nord du pays pour la démocratie

    La situation y est connue de tous, depuis longtemps : en 2010, les indicateurs sociaux du pays viraient cramoisi ; malgré ses ressources – 1,3 milliards de dollars de PIB et une croissance à 5 % la même année –, Djibouti se classait alors 147ème sur 169 en termes de développement humain. Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) indique à ce titre que « la pauvreté y reste endémique et la richesse du pays distribuée de manière très inégale ». De plus, « la population a toujours un accès limité aux services sociaux de base », et « l’espérance de vie se limitait à 56 ans en 2010. » Comme si cette situation catastrophique ne suffisait pas, le gouvernement, régi d’une main de fer par IOG, réprime violemment quiconque s’oppose à sa politique ; le président djiboutien est d’ailleurs fortement soupçonné d’avoir commandité l’assassinat du juge français Bernard Borrel en 1995. Celui-ci enquêtait, à l’époque, sur des affaires mettant en cause, potentiellement, un Ismaël Omar Guelleh encore aspirant chef de l’Etat – il ne parviendra au poste suprême qu’en 1999 – ; l’affaire, qui a un temps terni les relations entre Djibouti et Paris, a malheureusement disparu des discussions bilatérales.

    Quoi qu’il en soit, IOG est confortablement installé dans son siège présidentiel ; il compte bien tout faire pour maintenir sa position. En 2010, il modifie la Constitution pour pouvoir être élu une troisième fois consécutive : les manifestations populaires qui éclatent alors sont violemment réprimées. Comme un désolant écho au passé, IOG nourrit l’ambition de se représenter – de se faire réélire serait plus exact – en 2016 pour assurer sa propre succession ; le Nord du pays, fief du Front pour la restauration de l’unité et de la démocratie (FRUD), a commencé à s’embraser début avril en réponse à cette intention malvenue. Depuis deux mois, l’armée djiboutienne est ainsi opposée aux militants de ce groupe politico-militaire, qui se battent pour « un Etat démocratique intégrant toutes les composantes nationales ». D’après Mohamed Kadami, l’un de ses dirigeants, « le président veut briguer un quatrième mandat en 2016. Il pense que le FRUD peut être un obstacle. D’où l’idée d’affaiblir cette force, en lui portant des coups. »

    Le monde sait tout des misères de Djibouti mais ne dit rien

    Face à cette soif avide de pouvoir, les citoyens épris de liberté et de démocratie peuvent toutefois compter sur la petite diaspora djiboutienne. Le 16 mai dernier, à Bruxelles, devant l’ambassade de Djibouti, des patriotes se sont ainsi rassemblés pour protester contre la tournure que prennent les événements dans le Nord du pays. Les expatriés ont eu vent des pratiques anti-démocratiques du pouvoir en place et de l’armée : entre autres disparitions et arrestations arbitraires, les affrontements font de nombreuses victimes – essentiellement des civils. Pour l’instant, aucune des nations présentes sur le sol djiboutien – la France, les Etats-Unis, le Japon, les Emirats arabes unis et, depuis peu, la Chine – n’a semblé abonder dans le sens de la diaspora. L’opposition attendait du secrétaire d’Etat américain, John Kerry, en visite à Djibouti début mai, qu’il s’entretienne avec IOG au sujet des répressions. Las. L’appel à une « pause humanitaire » du chef de la diplomatie américaine était destiné au conflit qui fait rage au Yémen.

    C’est l’un des grands – et regrettables – paradoxes qui touchent Djibouti : tout le monde sait ce qu’il s’y passe, mais personne ne parle. Encore moins les pays qui comptent sur le pouvoir local et ses installations portuaires pour abriter leurs bases et flottes militaires. Ceux-là ne risqueront semble-t-il jamais de compromettre leurs relations avec Djibouti en écornant la réputation de son chef tout puissant. Les intérêts en jeu sont, pour ces nations – occidentales pour la plupart –, supérieurs, sans doute, à quelques atteintes aux droits de l’homme : il s’agit, tandis que le djihadisme moyen-oriental refait parler de lui, de maintenir ses positions dans le Golfe d’Aden.

    C’est à croire que l’Occident ne retiendra jamais rien du passé. Sous prétexte de lutter contre le fanatisme quel qu’il soit, les plus grandes puissances se taisent face à des exactions localisées mais tout aussi sérieuses. Les citoyens djiboutiens ont droit, au nom d’une liberté des peuples encore trop bafouée en Afrique, à un sursaut démocratique dans leur pays.

    14 juin 2015

    Source : http://www.agoravox.fr

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-de-l-est/djibouti/article/djibouti-au-bord-du-chaos

  • L’USN France appelle à manifester (Afriques en lutte)

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    Devant l’ambassade de Djibouti à Paris samedi 13 juin 2015

    L’Union pour le salut national (USN) représentée en France regrette l’absence totale de progrès dans l’application de l’accord-cadre signé le 30 décembre 2014 avec le gouvernement de Djibouti, lequel mène campagne, en l’absence de toute réforme démocratique, pour un 4e mandat d’Ismaël Omar Guelleh en avril 2016.

    La communication du gouvernement ne doit pas tromper ! Aucun signe n’est perceptible de sa volonté d’appliquer les engagements pris, alors que l’USN a régulièrement appliqué sa part d’engagements.

    C’est pourquoi, il est grand temps de réinvestir la place publique pour lancer une mobilisation générale contre ce ballet de mensonges servi aux citoyens djiboutiens et à la communauté internationale.

    Tous les citoyens sont concernés, il appartient à chacun de sauver sa liberté et sa démocratie face à un régime de l’arbitraire qui cherche à s’éterniser en usant de tous les artifices.

    L’USN France appelle à manifester le samedi 13 juin de 14 heures à 16 heures devant l’ambassade de Djibouti à Paris, situé au 26 Rue Emile Menier, 75116 Paris, métro Porte Dauphine (ligne 2).

    Un mémorandum sera remis aux autorités consulaires et des documents repères seront distribués.

    Il n’y aura pas d’élection présidentielle en 2016 à Djibouti, s’il n’y a pas de CENI pleine et véritable.

    Pour l’USN France

    Le représentant de l’USN en France Maki HOUMED-GABA

    11 juin 2015 par UNION POUR LE SALUT NATIONAL (Djibouti) 

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-de-l-est/djibouti/article/l-usn-france-appelle-a-manifester

  • Egypte : Les avocats dénoncent les violences policières (Afriques en lutte)

    Le syndicat des avocats égyptiens a organisé samedi une grève générale pour protester contre « les dépassements de la police » contre les avocats après l’agression par un officier de police d’un avocat à l’intérieur d’un tribunal, a-t-on appris de sources syndicales samedi au Caire. Dans des déclarations de presse, le bâtonnier des avocats Sameh Achour a menacé de prendre « d’autres mesures d’escalade si la police ne met pas un terme à ses violations et dépassements ».

    Un officier de police avait battu un avocat la semaine dernière à l’intérieur du tribunal de la province de Damiette, dans le nord égyptien.

    Le syndicat des avocats avait appelé à une grève générale dans tous les tribunaux d’Egypte pendant un jour à l’exception des questions urgentes. Ce syndicat regroupe environ un demi-million d’avocats, ce qui en fait l’un des syndicats professionnels les plus importants du pays.

    Le taux de suivi du mouvement de grève diffère selon les provinces, le plus important ayant été enregistré dans celles de Sohaj, Al-Wadi Al-Jadid et Daghahliya. Les tribunaux égyptiens avaient connu, il y a deux ans environ, une grève similaire qui a duré plus d’un mois en guise de protestation contre des accrochages entre avocats et juges.

    Source : APA 9 juin 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/egypte/article/egypte-les-avocats-denoncent-les

  • Algérie. Les enfants migrants clandestins malgré eux (CI)

    http://www.atlasinfo.fr/photo/art/default/7213324-11071701.jpg?v=1417045282

    De plus en plus de mineurs prennent la route de la migration seuls ou avec leur famille et vivent dans la précarité, privés de leurs droits les plus élémentaires. Le reportage du quotidien algérien El-Watan.

     

    Immobile sur le seuil de la porte de chez lui, Nacer, 5 ans, tend l’oreille. “Mes amis sont dehors, je vais jouer !” s’exclame-t-il à l’adresse de sa mère, Thérèse, assise à l’intérieur. Indécis, le garçon aux grands yeux bruns et au sourire désarmant de malice ne bouge pas, scrutant les alentours de sa “maison”, le squat de Bouchbouk, à Dély Ibrahim [banlieue ouest d'Alger]. Thérèse, dont le garçon a hérité le sourire, ne le quitte pas du regard, tout en rangeant son intérieur. Une table basse, quelques chaises, une télévision et un réfrigérateur.

    L’on devine la présence d’une salle d’eau de l’autre côté. La pièce, dont les panneaux de séparation sont peints en bleu électrique, est certes exiguë, mais propre. L’enfant y déboule comme une tornade et en ressort aussitôt en courant. “Ne cours pas dans les escaliers Nacer, fais attention !” crie, affolée, sa mère. Et à raison. Les marches, nues, sont en colimaçon et donnent directement sur le vide. “Il y a souvent des accidents, des chutes. Mon fils est d’ailleurs tombé plusieurs fois, mais heureusement ça n’a jamais été trop grave”, relate-t-elle. Des rires d’enfants qui jouent se font entendre. Le quartier résidentiel, où les villas imposantes côtoient les chantiers, est calme.

    Dans ce squat, une carcasse de villa inachevée, ils sont ainsi, entre allées et venues, quelque 400 à s’entasser et à se croiser dans les petits espaces des trois étages. Parmi eux, des dizaines d’enfants grandissent sans se départir de leur insouciance. A l’échelle nationale, ils sont des milliers de mineurs, victimes impuissantes de la folie et de la haine des “grands”, ou involontairement otages des aspirations de leurs parents à une “vie meilleure”. Noyés dans la masse que l’on nomme “les migrants”, il n’est pas aisé de savoir combien vivent dans la clandestinité sur le sol algérien, privés de leurs droits les plus élémentaires.

    Dans les locaux du service social intercontinental Rencontre et développement, l’on reçoit une moyenne de 15 à 20 migrants par jour. En 2013 par exemple, ce réseau a dû prendre en charge quelque 870 migrants subsahariens, issus de 25 nationalités différentes. Parmi eux, plus de 200 étaient mineurs à leur arrivée en Algérie, dont une quarantaine, en général des demandeurs d’asile, étaient des enfants seuls. Contrairement aux réfugiés, le statut de ces enfants ne leur ouvre le droit à aucune aide ou prise en charge formelle. Pourtant, dès leur plus jeune âge, ils sont confrontés à toutes sortes de violences.

    Le cycle des injustices ne fait que commencer

    La première étant la migration et la traversée en elle-même. “L’on sous-estime les épreuves que ces personnes, et a fortiori les plus jeunes, ont dû traverser avant d’arriver ici”, rappelle Imène, de Médecins du monde. Les récits font d’ailleurs froid dans le dos. Lorsqu’ils arrivent, enfin, à Alger, c’est dans un état de fatigue et de désespoir extrême, et au prix de mille traumatismes et profonds stigmates.

    “De nombreux cas d’abus ont été signalés, même s’ils sont souvent tus. Il n’est pas rare que l’un d’eux ne préfère pas raconter dans le détail ce qui lui est arrivé”, affirme Hamid, de Rencontre et développement. “Il y a par exemple ce cas d’une migrante et de ses quatre enfants. Un gendarme lui a demandé 10 000 DA pour passer, sans quoi elle devait lui laisser son aînée, une fille de 13 ans”, s’indigne-t-il, écœuré. “Il a fallu l’intervention d’un autre Algérien, dégoûté, qui lui a donné la somme demandée”, poursuit-il.

    Mais il y a plus grave. “Même si elle ne le raconte pas, l’on sait qu’une fillette qui avait à peine 11 ans à l’époque a été enlevée, puis forcée à la prostitution, puis vendue et rachetée, avant d’être ‘libérée’ par l’une de ses compatriotes”, confie un travailleur dans l’humanitaire. Et le cycle des injustices ne fait que commencer pour ces enfants, et ce même lorsqu’ils naissent sur le sol algérien.


    “Ici, c’est le restaurant ! Bienvenue en Côte d’Ivoire !” lance-t-on à la cantonade. En fait de restaurant, il s’agit d’une petite pièce aux murs à la peinture défraîchie. L’odeur de nourriture et d’épices sature l’air confiné. L’espace, pourtant très réduit, sert de chambre à coucher, de salle de séjour et de cuisine-restaurant, comme en attestent les réchauds et les grosses marmites autour desquels s’affaire une dame en tablier.

    Des piles d’affaires s’entassent ça et là, tandis que plusieurs matelas et paillasses sont empilés tout autour de la pièce sombre. Assis en face d’une télévision, des enfants semblent hypnotisés par les aventures de l’universelle Dora l’exploratrice. Ils répètent à l’unisson ce que leur héroïne martèle. “Chut ! Doucement, vous allez le réveiller !” ordonne Dominique, en désignant la petite tête brune qui dépasse d’une couverture. “J’ai quatre enfants. L’aîné a 12 ans tandis que le dernier, celui qui dort là, a 1 an”, dit l’Ivoirienne, qui vit en Algérie depuis plus de deux ans.

    En dépit des conditions de vie précaires qui sont les leurs, les femmes sont nombreuses à fonder une famille, malgré tout. “En 2014, pour les seules villes d’Alger et d’Oran, nos équipes ont enregistré 114 naissances dans les communautés migrantes”, avance Imène, de Médecins du monde. “Cela peut paraître incompréhensible au vu de leur situation. Mais c’est justement leur précarité qui rend précieuse une naissance. De même, les femmes considèrent qu’enfanter est une protection”, explique-t-elle. “Elles vivent dans des milieux de violence, et que cela soit dans leur communauté, dans la rue face aux passants, ou encore vis-à-vis des forces de l’ordre, elles sont rassurées d’avoir des enfants”, tente-t-elle d’analyser. Même si cette idée reçue est constamment contredite, certaines pensent qu’un enfant né sur le sol algérien pourra leur faciliter, un tant soit peu, une régularisation de leur situation. Si les familles s’agrandissent, la gestion de ces grossesses et de ces naissances n’est pas une sinécure.

    Accès aux hôpitaux ou centres de soins interdit

    Médecins du monde aspire ainsi, à travers un programme dédié à cet effet, à permettre à ces femmes de porter leurs enfants et de les mettre au monde dans les meilleures conditions possibles. N’était la sensibilisation, et parfois même le forcing des bénévoles de l’ONG, rares seraient les structures hospitalières à les accueillir. “Il y a encore quelque temps, il arrivait souvent que l’accès aux hôpitaux ou centres de soins leur soit interdit. Il est même arrivé que le personnel soignant, craignant d’avoir des problèmes avec les autorités, appelle les services de sécurité”, rappelle Imène, qui se réjouit que soient dispensés les suivis de grossesse, carnets de vaccination et autres soins pré- et postnatals.

    L’autre casse-tête que provoquent ces naissances est la reconnaissance des enfants et leur identification. “Avant, elles ne recevaient qu’une attestation d’accouchement. Les enfants n’avaient donc aucun document établissant leur identité. Aujourd’hui, et après moult explications et orientations, un extrait de naissance leur est délivré à la mairie”, explique-t-elle. Seulement, cela n’épargne pas à certains petits des imbroglios, comme ceux dont les parents sont entrés en Algérie sous une fausse identité. “De même, les couples ne sont généralement pas mariés et n’ont, de ce fait, pas de livret de famille. Ils sont donc affiliés à la maman et non au papa”, ajoute-t-elle.

    Au-delà des conditions de vie et de l’insécurité du présent, l’avenir est le spectre commun. La plus grande inquiétude des parents est la scolarisation de leurs bambins. “Non, je ne vais plus à l’école. Avant de venir ici, j’étais en 2e année. Et ça me manque. Mes copines aussi me manquent.” Cynthia, au milieu de l’agitation des adultes du squat de Bouchbouk, est silencieuse. Assise devant des dessins animés, elle est indifférente au brouhaha alentour.

    Malgré sa jolie robe, la fillette ne sortira pas de la journée. “Je ne fais rien de particulier de mes journées. Je regarde la télévision, je joue parfois”, dit-elle doucement, en ajoutant qu’elle s’ennuie souvent. Les enfants de ce squat ne vont pas à l’école ou à la maternelle. Pourtant, le ministère de la Solidarité nationale avait annoncé, il y a quelques mois, que tous les mineurs sur le sol algérien devaient être scolarisés. “Après avoir pris connaissance de cette sortie médiatique, j’ai entamé les démarches, et ce en demandant une autorisation spéciale auprès du ministère de l’Education nationale”, indique Mireille, mère de deux fillettes, dont l’aînée a 6 ans.

    “On m’a dit que c’était trop tard, et que je devais réessayer avant la rentrée prochaine”, poursuit-elle. Toutefois, l’un des écueils de taille que rencontrent les enfants subsahariens dans ce volet est le problème de la langue. “Ils sont majoritairement francophones, voire anglophones ou lusophones. Faire des études en arabe leur semble inconcevable ou trop difficile”, estime Imène, de Médecins du monde. Reste alors l’établissement de Descartes ou encore les écoles privées, hors de prix. “Rien que pour la scolarisation de 10 enfants, dont 4 en crèche, et en comptant les formations professionnelles, nous avons déboursé 3 millions de dinars [27 000 euros]”, expliquent Sihem et Hamid, du service social intercontinental Rencontre et développement.

    Ce qui est peu au vu du nombre d’enfants en âge d’aller à l’école. “Le nombre d’inscrits dépend des budgets dont nous disposons. En 2013 par exemple, ils étaient 54 migrants à bénéficier de cette prise en charge, dont 23 enfants scolarisés”, ajoutent-ils. Ce qui n’est, malgré tous les efforts de la société civile, qu’une goutte d’eau dans le désert. Alors, quel avenir pour ces enfants ? “Il est clair que nos conditions de vie sont difficiles. Mais il faut aussi comprendre que si nous arrivons à faire avec, c’est tout simplement parce que ‘chez nous’ c’était pire...”, souffle, le regard vague, Fabrice, père de deux enfants. “Nous faisons de notre mieux pour leur prodiguer amour et protection. Mais je n’ai pas de réponse à cette question. La solution est entre les mains des décideurs et des autorités”, conclut-il, amer. En attendant, le petit Nacer, la petite Cynthia et tant d’autres tentent de vivre leur enfance, privés de tout. Et une question prend à la gorge. Lancinante, têtue : et si ces enfants avaient été algériens sur un sol étranger ?

    Auteur Ghania Lassal Publié le 08/06/2015 - 07:47

    http://www.courrierinternational.com/article/algerie-les-enfants-migrants-clandestins-malgre-eux

  • Disparitions forcées: les Benaziza toujours à la recherche de leur grand-mère (Algeria Watch)

    Nedjma Benaziza

    Le 2 juin 1996, des agents en uniforme kidnappent Daouia, 68 ans. On ne la reverra plus, comme les milliers de disparus en Algérie durant les années 1990. Sa famille a pu obtenir une intervention symbolique de l’ONU qui a réclamé l’ouverture d’une enquête. En vain. La Charte pour la paix est passée par là, mais le combat des familles se poursuit.

    Voilà dix-neuf longues années qu’il se bat lui et toute sa famille pour connaître la vérité sur la disparition de sa mère. Agé aujourd’hui de 65 ans, Abdelkader Benaziza est le fils aîné de Daouia, enlevée chez elle, de nuit, par un groupe d’agents de la sécurité de l’Etat en uniforme. C’était le 2 juin 1996, dans le quartier de Bab El Kantara à Constantine. Elle avait 68 ans au moment des faits. Les agents ont prétendu qu’elle serait libérée de sitôt, au bout d’un bref interrogatoire au commissariat.

    Elle ne reviendra jamais. Abdelkader, sociologue, militant de gauche et ancien cadre de l’Etat, ciblé par les groupes islamistes armés à cause de son engagement, fait partie, lui et les siens, de ces milliers de familles de disparus que la CNCPPDH, présidée par Me Farouk Ksentini, estime à 8000, alors que des ONG algériennes et internationales donnent des chiffres nettement plus élevés.

    Mépris

    Depuis cette funeste date de 1996, la famille Benaziza est maintenue dans l’ignorance absolue de ce qu’il est advenu de la grand-mère. Kaddour, ses frères, sa femme et ses filles n’ont eu de cesse d’alerter les autorités civiles et militaires, locales et nationales qui leur ont opposé silence, indifférence et mépris. Mais beaucoup de choses ont changé depuis l’époque de l’infamante expression «allégations de disparitions» de Rezzag Bara, le président du défunt ONDH et actuel conseiller à la Présidence.

    Car, après avoir agi de manière isolée, la famille a inscrit sa démarche dans un cadre collectif au sein d’associations regroupant les familles des disparus. Grâce à la détermination et la solidarité d’ONG et de militants de droits de l’homme, ils ont réussi à briser le mur du silence ; mieux, leurs luttes ont permis de dépasser les clivages imposés par le pouvoir «qui voulait dresser les victimes de la violence et de l’arbitraire les unes contre les autres», souligne Kaddour. Leur mobilisation a également contraint le pouvoir à admettre le phénomène des disparitions forcées en Algérie tout en continuant, explique-t-il, à jouer la carte de la confusion puisque selon ses représentants l’Etat serait «responsable mais pas coupable».

    Violation

    La Charte pour la paix et la réconciliation nationale qui, selon les victimes, a consacré l’impunité et imposé l’amnésie, a amené les familles de disparus à porter le combat au niveau international, et le cas de Daouia Benaziza a été traité par le comité des droits de l’homme de 2007 à 2010. En juillet 2010, l’instance onusienne a établi la responsabilité de l’Etat dans sa disparition, a considéré sa famille comme victime et a instruit les autorités judiciaires algériennes à diligenter une enquête afin de révéler la vérité sur son sort. Une constatation qui constitue une jurisprudence dans le cas algérien.

    Mais malgré ses engagements internationaux– l’Etat algérien ayant signé et ratifié le Pacte international relatif aux droits civiques et politiques–, aucune suite n’a été donnée à ce jour, et le cas de Daouia n’est pas isolé. Près d’une vingtaine d’autres dossiers ont été examinés par l’instance onusienne des droits de l’homme qui les a définis comme des cas de violation des droits fondamentaux de la personne humaine, ce qui constitue une condamnation de l’Etat algérien.
    Nouri Nesrouche El Watan, 5 juin 2015

    http://www.algeria-watch.org/fr/mrv/mrvdisp/benaziza_chechent_grand_mere.htm