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Féminisme - Page 5

  • Tunisie: Un collectif d'associations et d'organisations appelle à adapter le Code du Statut Personnel à la Constitution (Al Huff' Maghreb)

    13 AOUT 2013

     

    La consécration du principe de l’égalité homme-femme en Tunisie exige l’adaptation du Code du Statut Personnel (CSP) à la nouvelle Constitution du pays, a affirmé Radhia Jerbi, présidente de l’Union Nationale de la Femme Tunisienne (UNFT).

    S’exprimant lors d’une journée d’étude sur "La situation de la femme tunisienne 60 ans après de la promulgation du CSP", tenue mardi, au siège de l’Union Tunisienne de l'Agriculture et de la Pêche (UTAP), à l’initiative de l’UNFT, Jerbi a souligné que "le CSP, en tant qu’acquis important de la femme tunisienne, doit être révisé afin de mieux l’appliquer, sur le terrain, en faveur de l'égalité".

    La présidente de l’UNFT a précisé que cette manifestation s’inscrit dans le cadre des festivités organisées à l’occasion de la célébration de la fête nationale de la femme tunisienne qui coïncide, cette année, avec le 60ème anniversaire de l’UNFT et du CSP.

    Elle a mis l'accent sur l’importance de la coopération entre les différentes organisations afin de servir l’intérêt de la femme tunisienne et de défendre ses droits, soulignant le parcours militant de l’UNFT et la lutte menée en faveur de l’amélioration du statut de la femme.

    De son côté, Saad Seddik, ministre de l’Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, a fait le point sur le rôle crucial de la femme rurale, notamment la femme agricultrice, dans la sécurité alimentaire dans le monde, rappelant l’obligation de défendre ses droits.

    Appuyant son approche par des statistiques, il a évoqué le nombre limité des femmes propriétaires de terres contre le nombre élevé des ouvrières agricoles, dont le taux s’élève à 58 % du nombre total des femmes agricultrices.

    Les statistiques montrent aussi le manque de formation agricole en faveur de la femme rurale, a-t-il révélé, notant que le taux des filles inscrites dans des centres de formation agricole s’élève seulement à 25 %.

    Le ministre a également mis la lumière sur les difficultés qu’affrontent les femmes agricultrices dans l’accès aux sources de financement, indiquant que peu d'entre elles bénéficient de prêts.

    Pour sa part, Abdelmajid Ezzar, président de l’Union Tunisienne de l’Agriculture et de la Pêche (UTAP), a appelé, dans son intervention, à l’amélioration des conditions du travail des ouvrières agricoles, insistant sur l’importance de garantir leur sécurité à travers l'amélioration du transport agricole.

    Outre le danger des accidents de la route qu’affrontent les femmes agricultrices, elles doivent aussi faire face, dans certaines zones forestières, au danger du terrorisme, a-t-il ajouté.

    Selon Ezzar, unir les efforts et coordonner le travail des différentes organisations permettra de protéger la femme et de défendre ses droits.

    Un accord de partenariat a été conclu, dans ce sens, entre l’UNFT et l’UTAP, prévoyant une action commune des deux organisations en faveur de la femme tunisienne.

    Honorée à cette occasion par l’UNFT, Majdouline Cherni, présidente de l’Instance générale des martyrs et blessés de la révolution et des opérations terroristes, a parlé du risque encouru par les femmes habitant près des zones militaires qui peuvent perdre la vie, victimes du terrorisme ou de l'explosion de mines.

    Cette journée d’étude a été organisée en partenariat avec l’UTAP, l’union Générale Tunisienne du Travail (UGTT), la Ligue des Electrices Tunisiennes (LET) et l'Association LAM ECHAML.

     09/08/2016

    http://www.huffpostmaghreb.com/2016/08/09/code-du-statut-personnel-

  • 10949 femmes (Algérie Infos)

    10949 femmes

    Documentaire réalisé par Nassima Guessoum 2014 Algérie, France

    Selon le comptage officiel de l'Etat algérien, 10949 femmes ont combattu pendant la guerre d'indépendance en Algérie. La réalisatrice franco-algérienne Nassima Guessoum a suivi pendant 5 ans Nassima Hablal, une de ces héroïnes souvent oubliées pour en faire son premier film

    Elle chante, elle parle  avec un mélange de faconde et de gouaille, -en se faisant répéter les questions à cause de sa surdité-, elle sourit -et surgit tel un îlot rescapé, son unique dent-, elle prépare le café, elle se maquille, se pare de foulards colorés, elle marche à pas lents, appuyée sur sa canne, elle répond vertement à sa nièce, elle se fait le guide dans les lieux qui ont marqué son passé en Algérie....

    Elle, c'est Nassima Hablal une des 10 949 femmes, moudjahidine de l'indépendance algérienne. Et Nassima Guessoum en la filmant en plans très serrés dans son quotidien d'octogénaire, va "donner un visage" à cette guerre qui longtemps ne fut pas reconnue comme telle par le gouvernement français... 

    Membre du PPA (parti du peuple algérien) puis engagée dans le FLN, militante convaincue (la Révolution primait sur sa vie privée), torturée par les paras de Massu, emprisonnée en France, elle revient en Algérie après l'indépendance. De 2006 à 2013 Nassima Guessoum va la rencontrer et de ces échanges naît ce documentaire certes très intimiste mais bien plus éloquent qu'une "leçon d'histoire"

    Il s'ouvre sur les fêtes de la commémoration (Bouteflika en tête)

    Le faste de cet anniversaire contraste avec la sobriété du documentaire dont la richesse est dans la parole restituée...Et quand Baya son amie témoigne  des viols et de la torture, ou quand Nelly Forget, ex compagne de geôle, raconte face à la caméra leur "évasion" par le rêve (la couverture sur le sol de la cellule servait de piste d'envol ou d'embarcadère vers la ville de Fez !!!), jamais de surenchère facile dans le pathos! D'ailleurs après la perte douloureuse de son fils Youssef -et la tonalité du film va épouser celle du drame- c'est la réalisatrice qui lira (voix off) cette lettre écrite par Nassima (ô ce flux mémoriel que vont illustrer de légers mouvements de caméra sur des objets, témoins d'une vie, dans une demeure ... vide...habitée par le silence ! )

    Un documentaire à la fois sobre et poignant qui a valeur d'épitaphe

    Nassima Hablal (1928-2013) a été inhumée dans l'anonymat, MAIS   sa voix résonne (ra)  par-delà les embruns de l'Histoire 

    Par Colette Lallement-Duchoze, 25  juin 2016 

    Source LE BLOG DE COLETTE LALLEMENT-DUCHOZE

    http://www.algerieinfos-saoudi.com/10949-femmes

  • Nouveautés sur Afriques en Lutte

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    Manifestation féministe à Rabat

    Samedi 18 juin à 21H30, une manifestation féministe s’est tenue sur l’esplanade du parlement, à Rabat. La manifestation, qui a regroupé plusieurs associations et collectifs d’associations féministes, a aussi vu la participation de personnalités du milieu associatif, dont Khadija Ryadi, ex-présidente de l’Association marocaine des droits humains (AMDH), ou encore Ahmed El Haij, l’actuel président de l’association. Les participantes ont brandi des pancartes appelant à la parité et à l’égalité des sexes, (...)

    L’UE risque d’alimenter les violations des droits des réfugiés et des migrants en Libye

    L’Union européenne (UE) projette de coopérer plus étroitement avec la Libye en matière de migration, au risque de favoriser les mauvais traitements endémiques et la détention pour une durée indéterminée, dans des conditions terribles, que subissent des milliers de réfugiés et de migrants, a déclaré Amnesty International. En mai, faisant suite à une demande du nouveau gouvernement libyen, l’UE a annoncé son plan axé sur la prolongation pendant un an de l’opération Sophia, sa mission navale de lutte contre (...)

    Tunisie - Tataouine : Grève de trois jours des employés de la société pétrolière SODAPES

    Abdallah Ben Jabeur, membre du syndicat de base de SODAPES, a indiqué ce mardi 21 juin 2016, à la TAP, que les employés de la société pétrolière à Tataouine entament une grève de trois jours, à partir d’aujourd’hui. Cette grève, indique la même source, a (...)

    Une pétition demande la restitution à Alger des crânes des insurgés de Zaatcha, entreposés dans les sous-sols du musée de l’Homme, à Paris.

    Ils sont numérotés, entreposés dans des boîtes, dans les armoires métalliques de quelque obscur sous-sol du musée de l’Homme, à Paris. Les crânes des résistants algériens tués, puis décapités en 1849, lors de la célèbre bataille de Zaatcha, furent longtemps (...)

    OÙ VA DJIBOUTI ?

    Va-t-on vers un scénario similaire à celui de la Somalie, du Burundi ou du Sud Soudan ? Sur ce petit territoire, trois acteurs se font face : les bases militaires étrangères, le régime et la population djiboutienne. Qu’en est-il de l’opposition ? (...)

  • Insurrection citoyenne contre la corruption et le confessionnalisme en Irak (Orient 21)

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    Portraits d’une nouvelle génération de militants

    Sous des formes diverses, les mobilisations contre le gouvernement irakien se poursuivent. Elles reflètent l’émergence d’une nouvelle génération qui refuse le système politique confessionnel et la corruption des autorités.

    En mars 2016 le cœur de Bagdad battait au rythme d’un sit-in devant les murs en béton qui entourent la «  zone verte  », où se trouvent le siège du gouvernement central, les ambassades étrangères et où réside la totalité des nouveaux dirigeants irakiens. Le leader chiite Moqtada Al-Sadr s’était invité à cette manifestation, donnant au gouvernement une semaine pour se dissoudre au profit d’un gouvernement de technocrates, choisis selon leurs compétences et non leur affiliation à des partis à base communautaire. Le 1er avril, le premier ministre Haïdar Al-Abadi a présenté un nouveau gouvernement de seize ministres, dont quatorze choisis sur la base de leur«  compétence  » et de leur«  intégrité  » n’appartenaient à aucun parti. Les manifestants de la place Tahrir à Bagdad ont dénoncé un remaniement de façade et décidé en mai d’occuper le Parlement, insistant sur la nécessité de remettre en question les bases communautaires du système politique irakien mis en place sous l’occupation américaine en 2003 et de juger les politiciens irakiens coupables de corruption.

    La pression de la rue a fait bouger les lignes, mais la participation d’Al-Sadr ne fait qu’ajouter un chapitre à la protestation populaire, commencée le 31 juillet 2015, et qui se poursuit aujourd’hui. Lancée par des citoyens ordinaires et des militants politiques sur la place Tahrir de la capitale et dans tout l’Irak, elle exprimait l’exaspération générale des citoyens face à la corruption et à la mauvaise gouvernance des gouvernements post-2003.

    «  Pain, liberté et un État civil  »

    Ces protestations se sont rapidement muées en mouvement populaire de masse — soutenu même par l’ayatollah Ali Sistani, éminente personnalité religieuse — dénonçant le régime irakien et exigeant des réformes radicales. Depuis, tous les vendredis, des manifestants se rassemblent sur les places principales des grandes villes irakiennes comme Nadjaf, Nassiriya, Bassora  ; on y entend les mêmes slogans qu’au centre de Bagdad : «  Bismil din bagouna al haramiya  » (au nom de la religion nous avons été volés par des pillards) et «  khoubz, hurriyah, dawla madaniya  » (pain, liberté et un État civil). Les manifestants dénoncent la nature confessionnelle et corrompue du système politique fondé sur des quotas ethnoreligieux et qui a porté au pouvoir une élite incompétente, surtout constituée d’islamistes et de chiites conservateurs ou revenus d’exil, et préoccupés de leurs seuls intérêts.

    Les manifestants du vendredi, membres de groupes indépendants de la société civile ou militants de gauche, sont divisés au sujet de la participation des sadristes (partisans de Moqtada Al-Sadr), qui sont au cœur du mouvement. Falah Alwan et Houssama Al-Watani figurent parmi les plus sceptiques. Tous deux militants de longue date, Houssama Al-Watani étant l’aîné des deux, je les ai rencontrés dans leur bureau de la Fédération des conseils et des syndicats de travailleurs d’Irak, au centre de Bagdad. Ils estiment que le mouvement, d’abord séculier, a été instrumentalisé par les sadristes. Cette critique, exprimée également dans Saout al-Itijaj al-Jamahiri (La voix de la révolte populaire), une revue dédiée aux récentes mobilisations, est construite sur une vision non confessionnelle et marxiste de l’action politique. Selon Alwan et Al-Watani, toute référence à la religion constitue une aliénation et un obstacle à l’émancipation. Les deux hommes considèrent donc toute forme de partenariat avec les islamistes comme une menace pour le mouvement, «  une terrible erreur des gens de gauche, séduits par le populisme des islamistes  ».

    Mais la plupart des militants rencontrés à Bagdad se montrent beaucoup plus nuancés. Hina Edwar, leader de l’organisation Al-Amel et membre important de Shabakat al-Nisaal-Iraqiyat (Réseau des femmes irakiennes), principale plateforme des militantes indépendantes et des organisations pour la défense des droits des femmes, se montre pleine d’espoir quant à l’avenir des manifestations. Je l’ai rencontrée dans les bureaux d’Al-Amel à Kerrada, au centre de Bagdad, le jour même où elle s’est rendue au sit-in avec une délégation de militantes du Réseau des femmes irakiennes. Bien que critique du conservatisme et du populisme des sadristes, particulièrement concernant les questions de genre, Hina Edwar est favorable à leur participation, qu’elle estime positive. La présence dans la rue de la base prolétarienne et populaire du mouvement, poussée par Moqtada Al-Sadr, constitue pour elle une démonstration d’unité nationale et de citoyenneté qui arrive à point au moment où, après des semaines de mobilisation, un certain nombre de manifestants sont fatigués de descendre dans la rue tous les vendredis.

    Comme Hina Edwar, de nombreuses militantes féministes rencontrées à Bagdad insistent sur la nécessité d’associer le combat pour l’égalité des sexes à celui pour les droits sociaux. Pour les militantes du Réseau, la citoyenneté de tous, sans condition d’ethnie ou de religion, est la pierre angulaire de la défense du droit juridique des femmes.

    Saad Salloum, jeune écrivain défenseur des minorités ethniques et religieuse en Irak est sur la même position : il faut défendre en même temps l’égalité de tous sans considération de l’ethnie, de la religion ni de la confession, et l’égalité des sexes. Salloum est le rédacteur en chef du magazine culturel Masarat, dont les bureaux se trouvent dans le quartier chrétien de Kerrada. Salloum insiste pour associer le mouvement pour la justice sociale aux questions d’égalité ethnoreligieuses. Il travaille à la base pour promouvoir une «  culture de la diversité  » et une citoyenneté «  fondée sur l’égalité totale et sans condition  ».

    Pour une réforme globale du système politique

    Place Tahrir, se côtoient des militants radicaux, des poètes, des écrivains, des universitaires et des militantes des droits des femmes. C’est comme si les discussions passionnées qui avaient commencé dans les librairies de la rue Moutanabi étaient transportées tous les vendredis sur la place, résumées en slogans et banderoles. Vendredi 1er avril, dans l’après-midi, la mobilisation n’est pas très importante. C’est le jour de l’annonce de la formation d’un nouveau gouvernement par le premier ministre Haïdar Al-Abadi. Les jeunes femmes sont beaucoup moins présentes que les jeunes hommes. Celles qui sont là sont pour la plupart rassemblées sous la banderole qui proclame : «  la nomination de ministres en dehors des quotas est le premier pas vers une réforme globale  », formule créée par Jassim El-Helfi, un membre important du Parti communiste irakien.

    Un autre groupe, composé surtout de jeunes hommes, lance des slogans comme «  Nihayatkum qariba  » (votre fin est proche). Dhurgham Ghanem et Jamal Mahmoud, deux manifestants indépendants présents dans ce groupe, affirment qu’ils resteront mobilisés parce qu’ils ne sont pas satisfaits de ces «  réformes limitées  ». Tous deux déclarent que ce mouvement a forgé leur politisation et constitue un premier pas vers l’organisation de groupes de jeunes indépendants, dédiés à la justice sociale et au combat contre l’impérialisme. Selon Ghanem, «  cette mobilisation est la continuation d’un combat plus large contre l’impérialisme, car ce sont les forces impérialistes qui ont institutionnalisé le confessionnalisme en Irak par le système des quotas communautaires. C’est la conséquence directe de l’occupation de l’Irak et des politiques impérialistes destinées à ruiner et à détruire le pays.  »

    Les deux hommes font part de leur difficulté à trouver des financements pour poursuivre leurs activités en tant que militants indépendants. En outre, des membres de leur groupe — y compris Mahmoud — ont été victimes de violences et d’arrestations par la police et les services de sécurité.

    Cette violence des «  hommes de la sécurité  » de l’État a été subie par d’autres militants avec qui j’ai parlé à Bagdad, comme Dhurgham Al-Zaïdi, frère du fameux Mountazer, l’homme qui a jeté sa chaussure à la figure George W. Bush en septembre 2009. Militant indépendant et bien connu de la société civile, Dhurgam Al-Zaïdi a subi plusieurs fois la brutalité de la police après avoir participé aux manifestations du vendredi sur la place Tahrir. Dans le café Redha Alwan, sur la rue principale de Kerrada, il raconte que lui et de nombreux autres jeunes militants indépendants ont été attaqués par des inconnus sur le chemin du retour à la maison. Selon lui, ces hommes sont envoyés par des officiels du gouvernement pour affaiblir le mouvement de protestation populaire et traumatiser les militants radicaux. Ce qui n’empêche pas Al-Zaïdi de continuer son action à la base pour l’égalité sociale et contre la pauvreté. Il n’est pas affilié à un parti ni financé par quiconque. C’est un choix courageux, qui le rend plus vulnérable que les membres de groupes formellement organisés.

    Toutefois des protestataires ont aussi reçu un peu de soutien de parlementaires, telle la célèbre députée Shirouk Al-Abayaji. Avant de devenir députée de l’Alliance civile démocratique, un parti de gauche, Al-Abayaji était membre du Réseau des militants pour les droits des femmes, ainsi que militante sociale et écologiste. Quand je l’ai rencontrée à Bagdad, elle venait tout juste de prendre ses distances avec son parti et avait décidé de continuer son mandat comme députée indépendante. Al-Abayaji a soutenu les manifestants depuis le début du mouvement et organisé des discussions, tant dans des rassemblements publics que privés, avec les jeunes militants de la société civile de la place Tahrir.

    Moja et la pensée libre

    Continuant mon exploration des mouvements de base indépendants de la jeunesse irakienne, je suis allée à Nadjaf, à environ 180 kilomètres au sud de Bagdad, pour rencontrer Yasser Mekki et Mountazer Hassan, tous deux membres de Moja ( la vague). Passer la porte toujours ouverte de leur café-bibliothèque, c’est pénétrer dans un autre monde, contrastant avec l’atmosphère chiite conservatrice et traditionnelle de Nadjaf. Ce local de la rue principale de Koufa, encombré de livres et de pop art, est géré par des jeunes, hommes et femmes, la plupart étudiants des universités locales, qui louent ce deux-pièces avec leur propre argent. Ils m’ont accueillie chaleureusement et nous avons discuté de leur travail depuis quelques années. Un travail très varié qui revient en général, comme le dit Mekki, à «  former les gens à la pensée critique et à la liberté de penser  », à «  les pousser à lire autant que possible et des livres aussi variés que possible  » et à «  promouvoir une culture de liberté et d’égalité de tous, sans distinction de classe, de genre, d’ethnie ou de religion  ».

    Moja a beaucoup participé à la campagne nationale de la société civile «  Ana Iraqi, ana aqra  » (je suis Irakien, je lis) qui soutient l’alphabétisation et organise un événement culturel annuel avec distribution de livres sur la promenade Abou Nuwas, sur les rives du Tigre. Complètement indépendants des partis politiques et refusant tout financement, irakien ou étranger, les militants de Moja ont été à la pointe de la protestation contre la corruption et le confessionnalisme à Nadjaf. Ils distribuent aussi des livres enveloppés de papier-cadeau aux passants dans les rues de la ville, pour les encourager à lire de la littérature variée. Ils ont organisé des événements pour lever des fonds en faveur des familles de déplacés chrétiens ou sunnites fuyant l’occupation de l’Organisation de l’État islamique dans leurs villes du nord et de l’ouest de l’Irak. Afin de promouvoir le dialogue interreligieux et les droits des minorités, ils ont encouragé les habitants de Nadjaf à participer aux fêtes de Noël avec leurs compatriotes chrétiens, érigeant et décorant un sapin de Noël baptisé «  shejerah al-salam  » (l’arbre de la paix) dans la rue Al-Rawan, l’une des principales artères de la ville. Moja invite régulièrement des auteurs traitant de philosophie, de religion, de culture et de politique à présenter leurs œuvres et à débattre librement avec le public.

    En quelques années seulement, le groupe a réussi à gagner en notoriété et popularité et a même reçu le soutien de plusieurs figures importantes du clergé chiite de Nadjaf. Pourtant, il provoque aussi discrimination et rejet, y compris des menaces de mort de la part de milices religieuses conservatrices. Mountazer Hassan raconte comment le propriétaire du premier local loué a reçu des menaces de mort, et leur a demandé de partir juste avant l’ouverture au public. Il ne voulait pas prendre la responsabilité de louer à un «  groupe radical  ». «  Fermer et trouver un autre endroit a été assez douloureux pour nous, particulièrement après avoir passé autant de temps avec les volontaires pour repeindre les pièces et régler tous les détails pour l’inauguration  », dit Hassan. Les femmes de Moja sont encore plus exposées aux pressions et aux menaces, car discriminées à la fois à cause de leur sexe et de leur refus de se conformer aux normes de la société.

    Le mouvement de protestation populaire, dans la continuation de celui qui a émergé en 2011, est une réponse au désespoir et à la tension qui ont suivi la prise et l’occupation de Mossoul par l’OEI en juin 2014. Avec des banderoles et des slogans, des citoyens ordinaires, des manifestants politiquement impliqués ou indépendants expriment une vision politique en dehors des identités fondées sur les confessions ou les communautés. Ils dénoncent pacifiquement mais clairement le lien entre la montée de l’OEI, la corruption et le confessionnalisme  ; comme le dit l’une des banderoles les plus célèbres de la place Tahrir, «  Daesh et la corruption sont les deux faces d’une même pièce  ». Dans ce climat de militarisation, les jeunes de la place Tahrir et les groupes de base indépendants comme Moja apportent de nouvelles façons d’être irakien, créatives et pleines d’espoir, dans un pays traumatisé par des décennies d’autoritarisme, d’occupation militaire impérialiste, de guerre confessionnelle et de fragmentation du territoire.

     
  • Nouveautés sur Europe Solidaire Sans frontières

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  • SOUVENIR DAY : 26 janvier 1997, Amel Zenoune assassinée par le GIA pour avoir refusé de porter le voile... (Essf)

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    Amel Zenoune jeune étudiante en droit quitte Alger dans un bus de l’université pour rentrer chez elle à Sidi Moussa, environ une heure avant la rupture du jeune.

    En ce dimanche 26 janvier 1997, 17e jour du ramadan. Sur le chemin le bus est arrêté par ce que les algériens appelleront « un faux barrage » pour le distinguer des barrages de contrôle assuré par les militaires.

    L’embuscade est mise en place par des terroristes du Groupe Islamiste armé GIA au lieu dit Benedja commune de Bentalha de triste mémoire pour avoir subit un des massacres les plus terrifiants des années 90.

    Les passagers du bus tremblent de peur et voient leur dernière heure arrivée. Mais les terroristes ne semblent pas se soucier d’eux. Une seule personne les intéresse : Amel Zenoune. On lui intime l’ordre de descendre du bus et la jeune fille s’exécute avec courage.

    L’un des hommes armés aiguise son couteau sur une pierre et, sans le moindre état d’âme, égorge la jeune fille sous le regard des autres passagers terrifiés. Il leur dira en substance qu’elle servira d’exemple à toutes celles qui fréquentent les universités et qui vont au travail sans être voilées. Un message terrifiant pour celles qui refusent d’abdiquer à leur ordre moral inique.

    Elle avait tout juste 22 ans.

    Elle devait servir de modèle pour terrifier toutes les femmes et jeunes filles qui en Algerie, résistaient au diktat du FIS, Front Islamique du Salut et ses différents bras armés.

    Dans d’autres contrées du Monde, en terre d islam, des millions de femmes à l’image d’amal Zanoune continuent de résister, par tous les moyens, à l intégrisme islamiste et son ambition démesurée de soumettre les femmes et les sociétés à leur projet théocratique moyenâgeux.

    C’est à Paris, capitale de la France laïque, héritière des siècles des Lumières et de la République, promoteur des droits de l’Homme et de l’égalité des droits entre les femmes et les hommes qu’une initiative dite ’Hidjab day’ est lancée. Initiative mondiale lancée en 2013 par un réseau qui réussit parfaitement son marketing politique en Europe. La preuve est là sous nos yeux : c’est précisément à Sciences Po Paris , prestigieuse école où la raison est enseignée pour éclairer l’esprit que l’action démarre !

    Quelque soit les motivations des jeunes étudiantes « solidaires » qui se sont mobilisées pour « soutenir leurs copines voilées », qu’elles n’oublient pas que des centaines de milliers – non des millions – de femmes musulmanes occupent l’espace public tête nue dans leurs pays au péril de leur vie. Résister par tous les moyens pour dire leur aspiration à être libres et insoumises à l’ordre moral qui veut les cacher parce qu’objet sexuel ! Combien d’entre elles ont payé par le viol et la mort le tribut de « butin de guerre » ?

    Que ces jeunes étudiantes, sûrement laïques et émancipées, n’oublient pas que ce combat autour du « voile » cache avant tout l’ambition de forces politico religieuses violentes, déterminées à conquérir le monde pour transformer « le citoyen » en communauté de simples croyants soumis à un ordre totalitaire où les femmes sont appelées à se cacher, s’effacer, obéir, disparaître ...

    Que toutes les jeunes filles voilées à qui les prêcheurs et « dealers de paradis » courtisent par un faux discours de tolérance et de bienveillance fassent l’effort d’interroger cette pratique imposée hors contexte et qui est à des années lumières de l’islam le plus lumineux qu’elles pensent représenter ! Lisez IBN SINA , IBN ROCHD , Mohamed ARKOUN , Fatima MERNISSI pour porter un autre esprit de l’islam que celui qui s affiche en uniforme.

    Par cette expression qui ne fera surement pas l’unanimité, je crie ma rage de militante féministe algérienne ayant vécu comme des centaines de milliers de mes concitoyennes l’ordre intégriste en marche. Sans la résistance des femmes et tous les citoyens acquis à l’idée de la démocratie dans son sens plein d’humanité le visage de l’Algérie aurait été radicalement transformé.

    Certes la France n’est ni l’Algérie, ni la Tunisie, ni l’Irak, ni l’Égypte. Seulement n’oublions pas le credo unique des mouvements conquérants, intégristes d’extrême droite. Quelque soit l’habit sous lequel ils se présentent les premières victimes sont d’abord les femmes. C’est la leçon de notre histoire quotidienne.

    Porter le voile est-ce une question de Liberté garantie par l’exercice de la démocratie ? Je ne le pense pas. La bataille « du voile » est l’ expression la plus visible de la volonté des intégristes de soumettre les femmes. L’ évocation des principes de démocratie et de liberté sont seulement le moyen d’y arriver...

    N’oublions pas le sacrifice d’Amel l’étudiante, de Rachida l’agronome, de Khadidja la vétérinaire, de Lila l’enseignante, de Rabéa mère au foyer et de cette très longue liste de résistantes ...

    Zazi Sadou, RAFD Siawi , par SADOU Zazi

    http://www.siawi.org/article11394.html

    * Zazi Sadou a été la porte parole du RAFD (Rassemblement Al gérien des femmes Démocrates) pendant de nombreuses années.

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article37774

    Et aussi:

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article37762

  • Djibouti : terreur électorale à l’ombre des bases militaires et dans l’indifférence internationale (Afriques en Lutte)

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    L’élection présidentielle djiboutienne est prévue les 8 et 22 avril.

    Depuis qu’il a succédé à son oncle il y a 17 ans, Ismaël Omar Guelleh a déjà imposé à son peuple 3 présidentielles et 3 législatives fraudées ou au résultat inversé. En 2010, il a fait supprimer de la constitution par le parlement la limite de deux mandats de 5 ans. Confrontée à des processus électoraux sans démocratie, l’opposition a boycotté les législatives de 2008 puis la présidentielle de 2011.

    Pour les législatives de 2013, les démocrates se sont unis dans la coalition Union pour le Salut national (USN). Ces législatives ont atteint le comble africain en terme d’inversion du résultat, puisque la majorité à l’assemblée a été complètement inversée en fonction de chiffres entièrement fictifs basés sur aucun procès verbaux issus des bureaux de votes. Aussitôt, en argumentant sur logique militaire régionale, Ismaël Omar Guelleh a obtenu un soutien diplomatique croisé franco-européen[1] qui deviendra une cause de détérioration de la situation politique en 2015 et 2016. En 2013 et 2014, l’USN a refusé de siéger.

    L’inversion extrême du résultat a cependant alerté les diplomates internationaux en particulier ceux de l’Union européenne (Ue) sur la gravité de la situation et le risque de fracture entre population et pouvoir. L’Ue a corrigé sa position suite à la désapprobation du parlement européen en juillet 2013[2], en réclamant à partir de mai 2014 la publication des Procès Verbaux des législatives[3]. En 2014, les diplomates européens et français ont accompagné une négociation entre l’USN et le pouvoir pour désamorcer les tensions électorales[4]. Cette négociation a abouti le 30 décembre 2014 à un compromis très médiatisé, l’Accord-cadre. Cependant, en 2015, l’attention internationale sur le processus électoral s’est relâchée, laissant la possibilité au président de contre-attaquer.

    Ismaël Omar Guelleh, poussé par son clan, a refusé de suivre l’Accord-cadre sur ses points principaux : le statut et le respect de l’opposition, une commission électorale indépendante paritaire. Trois mois avant le scrutin, il a montré sa volonté de s’imposer pour un quatrième mandat en dehors des règles de la démocratie, interrompant brutalement le processus de démocratisation. Le 21 décembre, la garde présidentielle et l’armée ont tiré sur les participants d’une réunion privée, faisant au moins 27 morts[5], sans compter les disparus[6]. Le même jour, la police a tiré sur les dirigeants de la coalition de l’opposition, l’Union pour le Salut National (USN) en réunion. Le président de l’USN, Ahmed Youssouf Houmed, 75 ans, blessé, a dû être opéré. L’ancien ministre Hamoud Abdi Souldan et le député Saïd Houssein Robleh ont été blessés par balle. Le secrétaire général de l’USN et maire de Djibouti, Abdourahman Mohamed Guelleh, a été arrêté. D’autres membres de l’USN et le défenseur des droits humains Omar Ali Ewado ont été faits prisonniers sans charges[7]. Fin mars 2016, Abdourahman Mohamed Guelleh et Hamoud Abdi Souldan sont « toujours en mandat de dépôt à prison centrale de Gabode »[8].

    Ismaël Omar Guelleh a ainsi mis à mort l’Accord-cadre du 31 décembre 2014 qui était soutenu par les diplomates internationaux[9]. Depuis les violences qui ont provoqué assez peu de réactions internationales, en dehors de la réaction de l’Ue, il est décomplexé dans ses attaques contre l’USN. Il a cherché à détruire son unité et à attiser les divergences. Le 31 décembre 2015, suite à l’exclusion des députés de l’opposition, une loi instaurant l’Etat d’urgence empêchant la vie politique pendant deux mois renouvelables a été adoptée par le parlement[10]. Il impose un processus électoral déterminé par la répression de l’opposition. Le ministre de l’intérieur a refusé la participation au scrutin à plusieurs partis de la coalition USN et a attribué le statut légal de plusieurs partis de l’USN à des membres corrompus. Il a exclu du scrutin, par ses manœuvres, la coalition d’opposition telle qu’elle s’était construite en 2013. En violation de la loi, le 28 mars, la Cour constitutionnelle a refusé de permettre la vérification de la liste électorale.

    Le président Ismaël Omar Guelleh s’appuie sur la position stratégique du pays, proche du Moyen-orient et de la Somalie, et sur les bases militaires étrangères. Il est soutenu par un clan profitant des richesses et en particulier des loyers des bases militaires[11]. Après son coup de force, certain que la communauté internationale accorde sa priorité à sa politique militaire au Moyen-Orient par rapport à la démocratie et les droits humains à Djibouti, il fait venir le premier contingent d’une base militaire chinoise[12] et vient de négocier l’ouverture d’une base militaire saoudienne[13].

    Son entêtement à se maintenir au pouvoir risque d’entrainer, comme lors des législatives de 2013, une communauté internationale passive vers le cautionnement d’un arrêt du processus de démocratisation. Déjà, début 2013, l’Ue s’était refusée de mettre en danger son action militaire dans la lutte contre la piraterie maritime sévissant au large des côtes somaliennes, importante dans le démarrage d’une Politique de sécurité et de défense commune (PSDC)[14], et cette position avait permis au président de franchir le cap des législatives.

    Le ministre des affaires étrangères français, Laurent Fabius, a laissé en 2014 et 2015, le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, décider de la politique française en Afrique. Ce dernier s’est rendu à Djibouti fin juillet 2015, mettant l’accent sur les questions sécuritaires au moment où les questions électorales auraient dû s’imposer en priorité[15]. Début janvier 2016, l’ambassadeur de France, Serge Mucetti, rejeté par Ismaël Omar Guelleh, a été remplacé par Christophe Guilhou, ancien directeur de la paix, de la démocratie et des droits de l’homme au sein de l’Organisation internationale de la francophonie. Jean-Yves Le Drian a envoyé, les 8 et le 9 mars 2016, le Chef d’Etat major de l’armée française, le général Pierre de Villiers à Djibouti[16]. Le 18 mars, le nouveau ministère des affaires étrangères français, Jean-Marc Ayrault, s’est félicité d’un progrès entre l’Erythrée et Djibouti permettant d’« apaiser la situation dans la corne de l’Afrique, région fragile et en proie au terrorisme »[17].

    Le 22 mars, Jean-Marc Ayrault a reçu le ministre des Affaires étrangères djiboutien, Mahamoud Ali Youssouf. Ils ont « évoqué le climat politique, à l’approche des élections »[18], sans qu’aucune condamnation n’apparaisse. Le ministre a ensuite pu discuter avec le secrétaire d’État chargé du développement et de la Francophonie, André Vallini, sur le « développement social et économique », alors que le pays, dont les caisses sont alimentées par les loyers des bases militaires, sombre dans la dictature forte. La vision française de Djibouti comme zone militaire et le soutien à la dictature continue pendant la préparation d’un nouveau coup d’Etat électoral.

    En 2016 encore, quelques dizaines de morts avant une élection au Congo Brazzaville ou à Djibouti ne suffisent pas pour déclencher des sanctions internationales. Les démocrates africains sont peu soutenus, faute de droit international dans le domaine des processus électoraux. Une élection présidentielle crédible et transparente n’est plus possible à Djibouti en avril 2016. L’USN est partagée entre partisans d’un boycott et partisans d’un candidat issu de l’USN[19]. Au final, le président sortant pourrait tenter une inversion de résultat au moment de la compilation des Procès Verbaux, puisqu’il ne dispose que d’un électorat réduit, au second tour, ou directement en s’attribuant 50% au premier tour, comme Denis Sassou Nguesso vient de le faire.

    Si les résultats sortis des bureaux de vote et les résultats annoncés par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) ne sont pas conformes, la population djiboutienne qui a observé le printemps en Afrique du nord en 2011 et s’est déjà fortement mobilisée pacifiquement suite à l’inversion du résultat des législatives de 2013, n’acceptera pas l’immobilisme dans la répression.

    A Djibouti, la communauté internationale et africaine se retrouve une nouvelle fois prise à témoin. Elle est actuellement silencieuse. Les acteurs internationaux, en particulier les pays possédant une base militaire, sont interpellés sur l’arrêt du processus de démocratisation. Une vision conservatrice de Djibouti, associé au Moyen-Orient sans démocratie, dans les compromis avec la dictature, s’oppose à la volonté de la population djiboutienne. Dans la Corne de l’Afrique, aussi la paix ne s’installera durablement qu’en s’appuyant sur la démocratie et l’Etat de droit. Un clivage entre militaires et diplomates français et européens, et population, risquerait de pousser une partie de cette population, si ce n’est pas vers le désespoir, vers d’autres voies, en pratique et intellectuellement.

    C’est pourquoi, le Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politiques en Afrique recommande au gouvernement français de :

    - · condamner le massacre du 21 décembre 2015 et l’arrêt du processus électoral par la répression de l’Union pour le Salut National, et d’exiger la libération des prisonniers politiques, en particulier d’Abdourahman Mohamed Guelleh et d’Hamoud Abdi Souldan,
    - · demander au Conseil des droits de l’homme des Nations-Unies d’enquêter sur les violations des droits humains lors du processus électoral[20],
    - · faire pression sur le gouvernement djiboutien pour que soient respectées les libertés constitutionnelles, en particulier le droit de manifester, et les droits humains pendant la période électorale,
    - · exiger un dialogue entre gouvernement djiboutien et partis d’opposition de l’USN concernant un rassemblement des résultats et de la publication de résultats détaillés vérifiables,
    - · dénoncer toute fraude, tout manquement à la transparence garantissant la valeur des résultats, et toute inversion de résultat probable qui pourraient advenir au premier et second tour de la présidentielle,
    - · se concerter avec les Nations-Unies, l’Ue, l’Ua pour prévenir une crise électorale majeure après le scrutin et un blocage définitif du processus de démocratisation, et éviter que les stratégies militaires régionales conduisent par défaut à un soutien d’un régime non-démocratique,
    - · se concerter avec l’Ue pour adapter la coopération européenne[21] en fonction du respect de la qualité du processus électoral et de l’accord-cadre du 30 décembre 2014, en entamant la procédure de consultation prévue dans l’accord de Cotonou, y compris à l’article 96,
    - · considérer la lutte contre le terrorisme dans la Corne de l’Afrique en évitant à Djibouti le soutien d’un régime non-démocratique et la confusion entre personnalité au pouvoir et fonction présidentielle,
    - · réorienter la politique française en Afrique dans le sens d’un soutien accru à la démocratie, en limitant l’influence de la politique de défense et sécurité et de ses acteurs, en particulier au Tchad et à Djibouti.

    7 avril 2016 par Collectif de Solidarité avec les Luttes Sociales et Politique en Afrique

    14 signataires :

    Union pour le Salut national (USN), Association pour le Respect des Droits de l’Homme à Djibouti (ARDHD), Alliance Nationale pour le Changement Ile-de-France (ANC-IDF, Togo), Fédération des Congolais de la Diaspora (FCD, Congo Brazzaville), Forces vives tchadiennes en exil, Rassemblement National Républicain (RNR, Tchad), Union des Populations du Cameroun (UPC), Collectif des Organisations Démocratiques et Patriotiques de la Diaspora Camerounaise (CODE, Bruxelles et Paris), Conseil National pour la Résistance - Mouvement Umnyobiste (CNR-MUN/Cameroun), Mouvement pour la Restauration Démocratique en Guinée Equatoriale (MRD), Amicale Panafricaine, Afriques en lutte, Parti de Gauche, Europe Ecologie les Verts (EELV).

    http://www.afriquesenlutte.org/djibouti/article/djibouti-terreur-electorale

  • Femmes sous lois musulmanes : Contre l’intégrisme, les femmes laïques s’organisent dans un réseau non confessionnel (Essf)

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    Non confessionnel, le réseau Femmes sous lois musulmanes relie toutes les femmes de pays musulmans

    Tournant historique dans la lutte contre l’intégrisme musulman : les femmes laïques s’organisent

    Les quarante dernières années ont vu l’émergence, au plan international, des luttes féministes dans les pays dits musulmans. Bien entendu ces luttes ont toujours existé : l’ouvrage de Farida et Aisha Shaheed sur Nos grandes ancêtres [1] en témoigne et si elles ont décidé de faire démarrer leur recherche au VII° siècle, ce n’est pas faute d’exemples antérieurs. Écrit pour mieux réfuter les accusations d’occidentalisation et de traîtrise à l’islam portées contre nos féministes d’aujourd’hui, il pointe la persistance et l’actualité des demandes des femmes au travers des siècles : l’éducation, la liberté de mouvement, l’autonomie économique et la disposition de ses biens, le libre choix d’un mari ou de ne pas contracter mariage, les multiples formes de contrats passés avec leurs prétendants pour garantir les droits des épouses après le mariage, etc.

    En réclamant ainsi notre histoire féministe, nous avons fait œuvre scientifique et battons en brèche à la fois la revendication identitaire des intégristes qui voudraient faire disparaître ces faits de notre histoire officielle et le ‘choc des civilisations’ de l’extrême droite raciste qui cherchait à nous enfermer, nous assigner à résidence dans une ‘culture musulmane’ unique, a-historique et transcontinentale exclusivement rétrograde.

    À de rares moments, les luttes féministes en Turquie, en Égypte ou dans le sous-continent indien du début du XX° siècle ont trouvé quelques échos dans la presse féministe européenne ; et il y eut parfois de généreuses actions de solidarité spécialement en matière de droits à l’éducation des filles. Mais ce n’est que dans les années 80 que devient visible internationalement Femmes Sous Lois Musulmanes (plus connu sous son acronyme en anglais WLUML – Women Living Under Muslim Laws), le premier réseau féministe qui relie les femmes dans les pays ‘musulmans’ et les communautés ‘musulmanes’ en Asie, en Afrique, au Moyen Orient et dans les diaspora.

    
Ce réseau, rappelons-le, se définit comme non confessionnel ; ce qu’il met en lumière, ce n’est pas l’appartenance religieuse, c’est une réalité socio-politique commune : celle de vivre sous des lois dites musulmanes. En ce sens, il s’adresse à, et regroupe indistinctement, toutes les femmes qui vivent sous ces lois, quelle que soit leur origine, leur religion ou absence de religion. Il a pour but d’organiser l’échange de connaissances sur nos situations, leurs similarités et leurs différences – afin de démonter le mythe d’une ‘monde musulman ‘ homogène ; sur nos luttes, afin d’organiser, pour la première fois, le soutien international des luttes locales par des femmes de pays ‘musulmans’ qui bénéficient ainsi d’une légitimité que n’ont pas les féministes qui nous soutiennent de l’extérieur dans le monde entier ; sur nos stratégies, pour stimuler l’imagination des groupes locaux et faciliter l’échange et l’adoption de stratégies facilement reproductibles. Le tout, en lien avec les féministes du monde entier, car il n’est pas question de se ghettoïser et nous sommes plutôt enclines à voir les similarités qui nous unissent dans notre demande de droits universels.

    Parmi les premières tâches accomplies par le réseau Femmes Sous Lois Musulmanes on trouve deux projets majeurs.

    Programme d’échange

    Le premier est un programme d’échange réalisé où, pour faire prendre conscience de la diversité et de la non-homogénéité du ‘monde musulman’, nous organisons un véritable choc culturel. Pendant trois mois, des femmes vont vivre dans un contexte ‘musulman’ complètement différent du leur. Celles qui vivent dans des pays où les femmes sont voilées vont dans un autre pays ‘musulman’ où elles ne le sont pas, et vice versa. Celles qui vivent dans des pays où les femmes sont excisées vont dans un autre pays ‘musulman’ où on n’a jamais entendu parler de cette coutume – et vice versa, etc. Elles reviennent ensuite passer du temps ensemble pour confronter leurs expériences et c’est un festival de découvertes sur la diversité du ‘monde musulman’ qu’elles partagent.

    Ce sont des cadres féministes qui sortent de ces échanges, exceptionnellement conscientes qu’elles ont des acquis à préserver – puisque les intégristes planifient une homogénéisation par le bas en propageant les lois et les coutumes les plus rétrogrades et misogynes comme étant ‘islamiques’- ; et qu’elles ont des droits à conquérir puisqu’elles ont vu de leurs yeux d’autres citoyennes de pays ‘musulmans’ en bénéficier. On ne sort pas indemne d’une telle expérience, on en sort armée pour ne plus avaler les couleuvres intégristes.

    Femmes et lois

    Le deuxième projet, colossal, est intitulé ‘Femmes et lois’ [2]. Il confie aux militantes de base des organisations des droits des femmes le soin de répertorier les lois sur la famille (celles qui affectent le plus les femmes) dans leur pays, non seulement les textes officiels, mais aussi leur application, ainsi que les coutumes que couvrent les États, ce qui leur donne presque force de loi. Les militantes sont particulièrement bien placées pour faire ce travail à partir de cas concrets, mais aussi pour en restituer ensuite les résultats de façon à stimuler les luttes.

    Outre les rapports nationaux et régionaux, il en ressort au final un Manuel comparatif qui permet aux militantes de voir au premier coup d’œil que les lois sont très diverses bien que chaque pays les affirme ‘islamiques’. Au moment où les intégristes promeuvent des projets législatifs liberticides et misogynes en les parant du nom de ‘charia’ – et ce, y compris dans les pays d’immigration –, il est particulièrement réjouissant de montrer, preuves en main, que certains pays ‘musulmans’ admettent l’égalité totale des conjoints dans le mariage, ne restreignent pas le droit au travail ou aux hautes fonctions de l’État pour les femmes, ou protègent l’intégrité physique des fillettes, tout en s’estimant en parfaite conformité avec l’islam. Si d’autres pays font l’inverse, on peut et doit donc se battre pour abolir ces lois patriarcales.

    Parallèlement, pour bien montrer que ‘l’islam’ ne parle pas d’une seule voix, et certainement pas par la seule voix des intégristes, nous entamons une exploration des sources religieuses de ces lois (pour souvent découvrir qu’elles n’en ont pas), une déconstruction des alibis religieux et des comparaisons d’interprétations coraniques en confrontant les vues intégristes avec les travaux des théologiens progressistes.

    Malheureusement, internationalement, nous sommes victimes de notre succès. L’engouement pour les luttes des ‘musulmanes’ est à double tranchant : on a tôt fait, en particulier les financeurs, mais pas seulement, de nous enfermer dans un carcan identitaire où seules les réinterprétations religieuses vont être considérées comme devant être notre stratégie préférentielle, alors que les luttes pour les droits universels ou pour la laïcité sont jugées moins légitimes. Lors des rassemblements féministes, la demande de présentations se veut, elle, aussi spécifiquement ‘musulmane’. S’ensuit une longue période de purgatoire : les fondations se tournent vers les projets de réinterprétation coranique, sans voir que ce sont devenus des projets inspirés par les intégristes, le ‘féminisme islamique’ fleurit. Les manifestations féministes en Occident apprécient l’exotisme des femmes voilées, comme si cela leur donnait un brevet d’antiracisme.

    Un courant pour la laïcité et l’universalité des droits

    Pourtant, pendant ce temps se développe un courant majeur pour la laïcité et l’universalité des droits des femmes, prépondérant, par exemple, en Algérie, au Sénégal, en Turquie ou au Bangladesh. Et les exactions de plus en plus odieuses des talibans, puis d’Al Qaida et de Daech, au nom de l’islam vont exacerber ce courant. Après des attentats sanglants au Pakistan, les photos d’archives des mouvements féministes montrent des femmes tenant, dans la rue, des panneaux demandant un État laïque.

    Depuis le GIA dans les années 90 en Algérie où les laïcs, qu’ils ou elles soient croyant-es musulman-es ou athées, sont assassiné-es comme kofr (mécréants), les attaques se sont multipliées contre les partisan-es d’États laïques : des emprisonnements et condamnations à la flagellation dans les pays du Golfe aux assassinats des blogueurs athées au Bangladesh. Et parmi les personnes assassinées, de plus en plus de femmes, des journalistes, des avocates, des femmes politiques, des militantes associatives, au Moyen-Orient, au Pakistan, en Afrique du Nord, etc. La décennie 2010 est hélas ! particulièrement meurtrière.

    Mais loin d’enrayer le phénomène, les meurtres donnent plus de visibilité à ces nouveaux mouvements qui commencent à se donner les moyens de s’organiser internationalement. Créé en 2005, le réseau Secularism Is A Women’s Issue donne le coup d’envoi. On a créé des ‘Conseils des Ex-Musulmans’ depuis quelques années en Allemagne et en Grande-Bretagne, fondés l’un comme l’autre par des femmes d’origine iranienne, puis dans d’autres pays européens et du Maghreb, pour revendiquer le droit de quitter l’islam sans le payer de sa vie. Il y a fort à parier qu’ils se multiplieront dans les années à venir. On invite régulièrement leurs fondatrices et fondateurs à l’extérieur – un changement majeur par rapport aux décennies précédentes où la seule stratégie pour laquelle on nous reconnaissait quelque légitimité était celle de la réforme de l’islam.

    Une première conférence internationale sur la laïcité, les droits civils et la citoyenneté se tient à Londres en 2015. Organisée par des féministes de la diaspora algérienne et iranienne, elle regroupe principalement – mais non exclusivement - de nombreux-ses participant-es d’origine ‘musulmane’ venu-es d’Asie et d’Afrique. À la tribune ce sont les femmes qui sont de loin les plus nombreuses, certaines croyantes, mais laïques, et beaucoup d’autres ouvertement athées. Depuis, les interactions entre les laïques et athées de pays dits musulmans et ceux d’Europe se multiplient : cette année, se tiendront en Pologne et en Croatie notamment des évènements laïques où l’on invitera diverses représentantes de la résistance laïque des pays ‘musulmans’. Des conférences internationales sur la laïcité devraient se tenir prochainement en Asie du Sud.

    Une très sérieuse étude datant d’une dizaine d’années montre qu’en France environ 25 % de la population issue de l’immigration de pays dits musulmans se déclarent ouvertement athée et que seuls 5 % se déclarent pratiquants. Il est fort intéressant de noter que c’est exactement la même proportion que parmi les citoyennes et citoyens français d’origine chrétienne. Paru en anglais sous le titre The struggle for secularism in Europe and North America [3], un livre recense les mises en garde de féministes de la diaspora qui ne mâchent pas leurs mots contre l’essor de l’intégrisme musulman en Europe, au Canada et aux USA, et qui expriment clairement leur attachement à la laïcité menacée [4].

    Nous voyons enfin, petit à petit, rétablie la légitimité de nos luttes universalistes et laïques et c’est certainement la grande révolution de cette décennie. Il serait temps que nous entreprenions une nouvelle fois de réclamer notre histoire et que, comme nous l’avons fait pour nos ‘grandes ancêtres’ féministes, nous exhumions aussi nos grandes ancêtres laïques dans les pays à majorité musulmane.

    Marieme Helie Lucas, sociologue et coordonnatrice de Secularism Is A Women’s Issue

    Sites Webs à consulter :

    Secularism is a Women’s Issue : http://www.siawi.org

    Femmes sous lois musulmanes : http://www.wluml.org/fr/node/5409

    * Mis en ligne sur Sisyphe, le 1 mars 2016 :
    http://sisyphe.org/spip.php?article5234

    Notes:

    [1Our Great Ancestors, By Farida Shaheed and Aisha Lee Shaheed Karachi : Oxford University Press, 2011, 220 pp. WLUML ed.

    [2Knowing Our Rights, WLUML ed.

    [3The Struggle for Secularism in Europe and North America – women of migrant descent facing the rise of fundamentalism, Marieme Helie Lucas ed. Amazon. En cours de traduction en français.

    [4Il faut rappeler ici qu’il y a quelques décennies, ce sont des femmes de pays musulmans qui sont venues, à l’initiative du WLUML (Femmes sous lois musulmanes), soutenir les Canadiennes contre l’introduction de tribunaux d’arbitrage religieux en matière de droit de la famille.

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article37444

    Lire aussi:

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article37490

     

  • 8 mars Palestine

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