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Révolutions Arabes - Page 243

  • Maroc: vivant, le mouvement pro-réformes marque son 4e anniversaire (Le Matin.dz)

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    Plusieurs centaines de militants ont marqué vendredi le 4e anniversaire du mouvement pro-réformes du 20-Février né durant le Printemps arabe en participant à des sit-in à Rabat et Casablanca, les deux principales villes du royaume.

    Sur fond d'essoufflement de la mobilisation, environ 200 personnes se sont rassemblées en fin d'après-midi devant le Parlement de Rabat. Dignité!, démocratie!, non à la corruption!, ont-ils scandé. "Nous sommes là pour montrer que le mouvement du 20-Février (M20) continue. Certes il a connu une régression, mais il est toujours vivant", a expliqué à l'AFP un participant, Abdelhamid Amine. "On continue à lutter pour un Maroc démocratique, à même de garantir la dignité et les droits humains pour toutes et pour tous".

    A Casablanca, la capitale économique, environ 150 personnes ont manifesté, sous les mêmes mots d'ordre. Né durant le Printemps arabe, le M20 réclame des réformes politiques et sociales profondes, mais ses activités ont grandement décliné, ses membres dénonçant une répression à leur égard. Les autorités affirment de leur côté que l'essentiel des revendications ont été satisfaites avec l'adoption à l'été 2011 d'une nouvelle Constitution, sur initiative du roi Mohammed VI.

    Cette année-là, les manifestations avaient débouché sur le succès historique des islamistes du Parti justice et développement (PJD) lors des législatives. Le chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, leader du PJD, remettra l'an prochain son mandat en jeu, mais les manifestants de Rabat ont exprimé leur intention de boycotter les scrutins à venir.

    En matinée, un premier ouvrage sur le M20, composé de textes et photos, a par ailleurs été présenté à la Bibliothèque nationale par une ONG locale, Le Médiateur pour la démocratie et les droits de l'Homme (LMDDH).

    La presse, elle, divergeait sur l'ampleur des résultats obtenus par ce mouvement inédit dans l'histoire récente du royaume.

    Le 20-Février a permis de briser la peur du pouvoir dans l'esprit des gens, ainsi que de ramener à la politique des dizaines de jeunes qui se désintéressaient totalement des affaires publiques, se félicitait Taoufiq Bouachrine, du journal Akhbar al-Yaoum.

    Si grâce à eux et à leur audace, le Maroc ne ressemblera jamais plus à celui d'avant, on peut remarquer que les Marocains ont plongé de nouveau dans l'indifférence et la résignation, regrettait par contre Abdellah Tourabi, dans un éditorial intitulé 20-Février: une occasion manquée publié dans l'hebdomadaire Tel Quel.AFP

    http://www.lematindz.net/news/16643-maroc-vivant-le-mouvement-pro-reformes-marque-son-4e-anniversaire.html

  • Humour algérien (El Watan)

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  • Mauritanie : Extension de la grève à la SNIM (Afriques en luttes)

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    Après une quinzaine de jours de grève générale illimitée dans la ville de Zouerate (650 kilomètres au Nord/Est de Nouakchott), le mouvement des travailleurs de la Société Nationale Industrielle et Minière (SNIM) entre dans une phase de durcissement.

    Les délégués syndicaux de Nouadhibou (465 kilomètres au Nord de Nouakchott) ont déposé un préavis de grève.

    Ces milliers de grévistes réclament désormais la tête de l’Administrateur, Directeur Général (ADG) de la grande entreprise minière, Mohamed Abdallahi Ould Oudaa, faisant ainsi monter la mayonnaise de plusieurs crans.

    Zouerate est le site de production du minerai de fer. Celui-ci est convoyé par le plus long train du monde vers Nouadhibou, ville abritant un port minéralier et l’administration de la SNIM.

    Ces grévistes, dont le mouvement est proche de la Centrale Générale des Travailleurs de Mauritanie (CGTM), reprochent à la direction de la SNIM son refus d’ouvrir des négociations après le déclenchement de la grève.

    Celle-ci est motivée par une série d’engagements non tenus de la part de l’entreprise portant sur « une augmentation générale de salaire assortie d’un rappel à partir du mois d’octobre 2014, un bonus de salaire en plus du rappel de primes de production impayées sur l’année 2014 estimées à 30% à chaque fois que la production de minerai de fer atteint un seuil de 1,2 millions de tonnes, la fin du système de sous traitement et le recrutement des travailleurs sous le régime du contrat temporaire etc.

    La SNIM est la plus importante entreprise de Mauritanie opérant dans le secteur des mines. Ce secteur a contribué pour 1/3 dans les recettes budgétaires du pays au cours des 5 dernières années.

    Source : Financial Afrik 18 février 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/mauritanie-55/article/mauritanie-extension-de-la-greve-a

    Lire aussi:

    http://adrar-info.net/?p=30659

     

  • Qu’est-ce que « l’islamo-fascisme » ? (L'orient le Jour)

     

    Le chercheur franco-libanais Gilbert Achcar répond aux questions de « L'Orient-Le Jour ».

    C'est dans un climat des plus tendus, suite aux attentats de Copenhague dimanche, que le Premier ministre français Manuel Valls s'est exprimé hier, brandissant en épouvantail la menace de « l'islamo-fascisme ».

    Mais quel est donc ce néologisme étrange « d'islamo-fascisme », repris aussi bien par les hommes politiques, par la presse, qui vient s'inscrire dans la longue liste des « ismes » ?


    « Un mot des plus absurdes », fustige Gilbert Achcar, chercheur et écrivain franco-libanais. Pour com- prendre l'apparition de cette appellation, il faut remonter aux années 90. Le terme fait référence « à l'utilisation de la foi en l'islam comme couverture pour la promotion d'une idéologie totalitaire » similaire à celle des « mouvements fascistes européens du début du XXe siècle ». Puis cette notion s'est inscrite dans les discours des néoconservateurs américains, après les attentats du 11 septembre 2001 à New York. « Il fallait trouver un terme fort pour justifier une coalition contre le terrorisme et el-Qaëda. L'administration Bush a usé de ce raccourci facile qui ne veut absolument rien dire », nous explique M. Achcar. Car à la racine même du terme, le fascisme évoqué dans « islamo-fascisme » est aux antipodes de ce que le mot exprime réellement. En effet, cette notion est propre à un phénomène européen, qui se réfère à l'Italie et à l'Allemagne de la Seconde Guerre. « Le fascisme était une manipulation des masses. Or les groupes jihadistes comme l'État islamique n'utilisent que les armes. » Cependant, l'idéologie de l'EI tend à utiliser les outils de propagande à la manière des régimes fascistes et semble liguer autour d'elle de plus en plus de partisans. De plus, « l'objectif des fascistes était de reconstituer l'expansion impérialiste en cassant le mouvement des ouvriers, en pleine période de crise du capitalisme. » Alors que les groupes islamistes comme l'EI n'ont évidemment pas la même dynamique.


    D'autre part, il est intriguant de constater que ce terme de « fascisme » s'associe avec un courant religieux. Alors que le fascisme est à proprement parlé antireligieux. « Les musulmans de France ont été sommés de reconnaître les dérives de cet "islamo-fascisme". Pourquoi ne pas évoquer alors "le fascisme-chrétien ou le judéo-fascisme" rappelle le chercheur. Selon M. Achcar, « l'Armée de résistance du Seigneur en Ouganda, visant à instaurer un gouvernement chrétien, n'est pas moins effrayante que Boko Haram. Mais il s'avère que l'islam se retrouve stigmatisé toujours et encore. Les musulmans doivent faire les frais des actions intégristes, comme si tous les catholiques devaient se sentir coupables des dérives pédophiles de l'Église. Il y a véritablement deux poids, deux mesures ».


    Pour Gilbert Achcar, cette notion d'« islamo-fascisme » est un terme dangereux et absurde à visée politique, avec une volonté ferme d'instaurer un climat de peur. « Le jeu des États-Unis s'est retourné contre eux. Leur Frankenstein (l'EI) s'étend et leur échappe totalement... »


    Par ailleurs, l'Europe, comme les États-Unis, qui s'engagent dans cette lutte comme ils l'ont fait contre les régimes totalitaires il y a 75 ans, abusent de cette notion polysémique. Et il est curieux de constater qu'un Premier ministre de gauche utilise de manière consciente un terme si équivoque. Car si « l'islamo-fascisme » tend à désigner les sociétés peu enclines à institutionnaliser les diversités politiques, comment cette notion ne désignerait-elle pas les pays comme l'Arabie saoudite où l'Iran ?

    « Le régime saoudien est le meilleur ami des Américains. Lors de la mort du roi Abdallah, le drapeau anglais était en berne, et cela a choqué de nombreux Britanniques. Mais il faut comprendre que les enjeux économiques nous dépassent. » D'autant que ces courants sectaires, comme el-Qaëda et l'EI, sont « des avatars du wahhabisme. Les États-Unis, dans les années 40, étaient le pays le plus étroitement lié au royaume. Ils ont utilisé leur idéologie contre Nasser, contre l'Union soviétique, puis contre la gauche dans le monde musulman. Le point culminant de cette propagande a été la guerre en Afghanistan ». Mais l'heure n'est plus aux débats sémantiques. Car il est urgent que les États montrent leur implication réelle contre toutes les dérives de tous bords.

    Caroline HAYEK 17/02/2015
     
  • Rassemblement de solidarité à Alain Pojolat (UJFP)

    Vendredi 20 février de 13h30 à 15h30 sur la place de la fontaine Saint-Michel (Paris 6e),

    Cet été, en solidarité avec le Peuple de Gaza, de nombreuses manifestations ont été organisées dans le monde entier. A Paris, les manifestations des 19 et 26 juillet ont été interdites par le Gouvernement.

    Elles se sont quand même déroulées malgré ces interdictions. Certain-es organisateurs et participants ont été arrêtés et inculpés. Les décisions judiciaires ont été parfois lourdes de conséquences.

    Alain Pojolat avait déposé à la Préfecture une déclaration de ces manifestations (avant leur interdiction) au nom de l’ensemble des organisateurs. Il a été inculpé et jugé en première instance le 22 octobre dernier par le TGI de Paris qui l’a relaxé. Dès le lendemain, le Parquet faisait appel.

    Rendez-vous

    Rassemblement de solidarité à Alain Pojolat 
    Le vendredi 20 février 2015 de 13h30 à 15h30
    sur la place de la fontaine Saint-Michel

    Paris 6e

  • Les nouveaux mouvements sociaux au Maroc (Zones Subversives)

    Les nouveaux mouvements sociaux au Maroc
     
    La révolte au Maroc semble méconnue. De nouvelles formes de contestation émergent contre le régime autoritaire. 

     

    En 2011, une vague de révolte partie de Tunisie se propage dans de nombreux pays. Le Printemps arabe touche également le Maroc. Un nouveau cycle de lutte s’amorce avec le Mouvement du 20 février. L’universitaire Frédéric Vairel propose une analyse dans son livre intitulé Politique et mouvements sociaux au Maroc.

    Le régime monarchique encadre les groupes contestataires. Le mouvement du 20 février se contente de demander des aménagements du régime et non pas son renversement. Il s’attache également à un refus de la violence. Mais, issu de la vague de révolte de 2011, il semble spontané et s’organise en dehors des partis et des syndicats. Ce mouvement du 20 février regroupe des militants de l’extrême gauche marxiste mais aussi des défenseurs des droits de l’homme. Des organisations politiques radicales mais aussi des islamistes composent ce mouvement très hétéroclite.

    « Le Maroc est un laboratoire fascinant de la protestation en régime autoritaire et de la manière dont celui-ci s’en accommode », souligne Frédéric Vairel. La révolution n’est plus un horizon politique et les collectifs militants s’institutionnalisent. La sociologie politique, avec l’observation de la répression et des particularités du régime, peut permettre d’enrichir l’analyse des mouvements de lutte. La contestation sociale se construit en opposition mais aussi en référence à la politique institutionnelle.                                

     

    Mouvements de contestation

     

    De nombreux politologues estiment que le régime marocain repose sur la religion pour se légitimer. En réalité, la monarchie s’appuie surtout sur l’Etat avec la répression et les divers moyens de coercition. Le régime utilise l’intimidation, les arrestations et la torture pour museler toute forme d’opposition. L’organisation des élections, du calendrier et la réglementation de la campagne électorale permettent de réserver les postes de pouvoir aux partis proches du régime.

    La monarchie s’appuie sur différents groupes sociaux pour lesquels elle mène une politique clientéliste. La bourgeoisie, la moyenne paysannerie et la petite bourgeoisie citadine soutiennent le régime. Des postes de fonctionnaires sont créés et les entreprises locales sont favorisées.

    En 1990, une vague de mouvements sociaux déferle sur le Maroc. Luttes, grèves et émeutes déstabilisent le pouvoir. Les jeunes précaires occupent l’espace public et participent activement aux émeutes. Le régime ne répond pas par la répression mais par une ouverture. Les partis d’opposition peuvent participer au gouvernement. En 1999, un nouveau roi arrive au pouvoir. Les droits de l’homme sont intégrés au discours officiel et la répression semble moins féroce.

     

    Le syndicat étudiant de l’Unem apparaît comme le creuset des mouvements contestataires, gauchistes ou islamistes. Cette organisation étudiante forme les futures élites. Mais les jeunes contestataires subissent la répression, la clandestinité et la prison. Les trajectoires de ces militants évoluent vers l’action locale et associative. Ils ne s’inscrivent plus dans une remise en cause globale du régime mais agissent pour sa démocratisation.

    Les gauchistes et les islamistes sont issus de la petite bourgeoisie intellectuelle. Les militants sont socialisés dans des familles politisées. Après l’expérience de la prison ou de la répression, les militants continuent leurs activités politiques à travers des associations pour les droits de l’homme. Mais seuls les militants qui disposent du plus important capital culturel et politique, avec des réseaux, continuent leur vie politique. Les autres trouvent davantage de satisfactions dans un « bonheur privé », professionnel et familial.

    Les jeunes militants s’opposent aux partis politiques, en raison de leur dimension autoritaire et électoraliste. Les organisations de femmes s’organisent en marge des partis car leurs problèmes ne sont jamais évoqués dans ce cadre traditionnel. Le militantisme associatif s’oppose au champ politique régit par le calcul cynique et avec la compromission avec les autres partis et le pouvoir. « Selon ces militants, le champ politique se caractérise par son immobilisme auquel vient répondre l’effervescence contestataire de la scène qu’ils animent », indique Frédéric Vairel. De nouvelles pratiques politiques doivent s’inventer en dehors des institutions.

    Les mouvements pour les droits de l’homme deviennent le seul cadre légal pour lutter contre le régime et les rapports de production. Les associations de défense des droits de l’homme abritent souvent les militants d’extrême gauche et les anciens prisonniers politiques qui n’ont pas renoncé à leurs idées.

     

    Des collectifs se forment pour construire une force contestataire dans la durée. Le Forum marocain pour la vérité et la justice (FVJ) regroupe des anciens prisonniers et leurs familles. Ce collectif organise des réunions pour parler des problèmes de la répression dans la démarche d’un groupe de thérapie collective. Mais, progressivement, les moyens d’action sont évoqués. Le collectif ne regroupe donc pas uniquement des militants d’extrême gauche mais s’appuie sur une partie de la population qui a subi directement la répression.

    Le FVJ s’attache à construire une force politique et permet aux personnes de retrouver leur dignité dans la lutte. « Un partie du travail du FVJ a consisté à retourner le stigmate de victime, transformant des identités et des liens fragmentés et localisés en une identité politique commune », observe Frédéric Vairel. Des actions sont organisées, comme les sit-in devant les centres de détention.

    Le FVJ s’appuie sur les témoignages de victimes. Mais, contrairement à la presse, le FVJ refuse toute utilisation misérabiliste et humanitaire. Le collectif donne un sens conflictuel aux témoignages pour dénoncer les causes et les responsables de la répression. Les associations féministes s’appuient également sur des services, comme l’alphabétisation, pour élargir leur capacité de mobilisation.

                     

    Pratiques de lutte

     

    Le sit-in, un rassemblement protestataire, devient le mode d’action central. Il trouve son origine dans les actions d’occupation, valorisées notamment par les jeunes chômeurs. Le FVJ pratique couramment le sit-in avec des slogans qui dénoncent les responsables de la répression. Cette effervescence protestataire permet de construire un rapport de force social qui explique la démocratisation du Maroc. « Contrairement à ce qu’indiquent les points de vue conservateurs, le trait marquant de la libéralisation réside davantage dans la multiplication des démonstrations publiques d’indignation que dans la complexe ingénierie politique qui permet aux partis de l’opposition de sa Majesté d’accéder au gouvernement », analyse Frédéric Vairel.

    Le sit-in permet une occupation de l’espace public. Même lorsque la mobilisation n’est pas massive, elle reste visible. Des tracts et des autocollants permettent d’interpeller les passants. « Vous qui regardez, vous êtes tous concernés », lancent les militants. Le sit-in révèle également la division sexuelle du travail militant. Les dirigeants des collectifs sont tous des hommes. Les organisations comme l’AMDH reproduisent les vieux schémas militants du dogme marxiste-léniniste. Seuls les dirigeants décident du sit-in et planifient son organisation. Ensuite, les actions s’inscrivent dans la vieille routine de l’avant-garde qui doit conscientiser les masses. Les slogans et les banderoles ne sont pas laissés à l’improvisation. En dehors des origines autoritaires des collectifs, la répression explique cet encadrement de la lutte. Les dirigeants des associations peuvent être arrêtés si un slogan attaque directement le régime.

     

    Au-delà de la routine bureaucratique, les rassemblements demeurent des espaces de rencontres et de discussions. « Aux marges du sit-in, on se parle et l’on rit », indique Frédéric Vairel. Un esprit de convivialité s’observe, notamment entre les militants qui ne se sont pas vus de longue date. « D’autres liens que le seul lien politique se nouent. Des ensembles de relations s’y tissent, s’y renouvellent et s’y exposent, qui entourent et renforcent le sentiment d’appartenance à un groupement politique », observe Frédéric Vairel. Les émotions et le plaisir de la mobilisation demeurent un puissant moteur d’engagement.

    Les forces de sécurité marquent fortement leur présence. Le moindre écart se traduit par une répression féroce. Des diplômés chômeurs qui bloquent une rue sont encerclés par la police. Le sit-in ne nécessite pas une autorisation mais peut être réprimé en invoquant la notion floue de « trouble à l’ordre public ».

    Des rassemblements du FVJ rendent hommage aux victimes de la répression. Ces actions, qui s’inspirent des Mères de la place de Mai en Argentine, mêlent émotion et protestation.

     

    En raison de la forte répression, les mouvements sociaux ne s’inscrivent plus dans un horizon révolutionnaire. La moindre émeute peut finir en bain de sang. Ensuite, l’aide internationale oriente également la routine militante. Les associations des droits de l’homme doivent alors gérer des apports financiers. Une professionnalisation et une bureaucratisation se développe, même dans les associations dirigées par des militants d’extrême gauche. L’action devient moins orientée vers les mouvements de lutte et davantage vers un travail d’information avec la diffusion de rapports qui présentent la situation au Maroc.

    Le roi Mohamed VI tente de rompre avec l’autoritarisme d’Hassan II. Les nouvelles élites politiques ne sont plus issues de la police, mais du marxisme-léninisme. Les anciens contestataires sont recrutés par le pouvoir pour participer à la transition démocratique. La monarchie ne s’appuie donc pas uniquement sur la répression pour encadrer les mouvements de lutte mais favorise également leur institutionnalisation. Pour de nombreux militants, le régime ne doit plus être supprimé mais aménagé. Mais des débats traversent les associations. Certains contestataires refusent toute forme de compromission avec un régime toujours considéré comme autoritaire.               

     

    Mouvement du 20 février

     

    En 2011, la vague de contestation du « Printemps arabe » se propage au Maroc. Mais la diversité des situations politiques empêche un effet domino dans la chute des régimes autoritaires. Pourtant, le 20 février 2011 marque un véritable tournant au Maroc. Un soulèvement populaire amorce une « période de réformes où politique dans la rue et politique dans les palais s’articulent, se répondent et s’opposent », analyse Frédéric Vairel.

    Des manifestations et rassemblements attaquent directement le régime. Comme dans de nombreux pays arabes, les autorités se sentent menacées. Le roi du Maroc est même obligé d’annoncer une révision de la constitution. Le mouvement du 20 février ne semble pas entièrement spontané. Il regroupe des jeunes urbains qui ne sont pas issus de familles aisées. Ces activistes ont déjà participé à des collectifs ou à des partis. Mais ils rejettent la discipline partisane et l’autoritarisme de ses formes d’organisation. Ils remettent également en cause la religion et les valeurs patriarcales. La question de la justice sociale demeure majeure, avec celle des libertés démocratiques, et des rassemblements s’organisent dans les quartiers populaires.

    En revanche, le mouvement du 20 février ne s’inscrit pas dans un horizon marxiste, révolutionnaire et internationaliste. Cette contestation se réfère au monde arabe et revendique une démocratisation du régime, et non pas son renversement.

    Les partis et syndicats se tiennent à l’écart de ce mouvement. Ses revendications sont jugées classiques mais son organisation se révèle incontrôlable. Le mouvement dénonce la corruption et le pouvoir de l’argent, mais n’attaque jamais directement le régime. « Sa réforme constitutionnelle ou parlementaire est souhaitée, certainement pas sa chute. C’est là un bon indice de la légitimité de cette institution : les acteurs politiques marocains, y compris les plus radicaux, n’imaginent ni ne revendiquent d’autres modalités de gouvernement », observe Frédéric Vairel. Le mouvement ne prend pas d’ampleur, contrairement à la Tunisie ou l’Égypte. Seuls quelques secteurs professionnels participent à la lutte. Ensuite, l’occupation de la rue est brutalement réprimée avec de violents matraquages.

     

    Le livre de Frédéric Vairel propose un éclairage original sur la situation au Maroc. Il brise l’image véhiculée par le régime et l’industrie touristique. Les sciences politiques opposent trop souvent la sociologie des mouvements sociaux et l’attention portée aux institutions et aux politiques publiques. Les analyses des Frédéric Vairel permettent de croiser ses deux approches pour montrer leur influence réciproque. Les défenseurs du régime monarchique au Maroc insiste sur son evolution et sa democratisation. Mais ce sont bien les mouvements sociaux qui permettent quelques ameliorations de la situation. Ensuite la répression demeure brutale et le régime n’hésite pas à récupérer les dirigeants des mouvements sociaux pour affaiblir la contestation.

    Pourtant, l’étude de Frédéric Vairel connaît quelques limites. Il considère que les islamistes font partis des mouvements sociaux. Ses réactionnaires ne s’inscrivent dans aucune perspective de transformation sociale et veulent renforcer l’ordre dominant malgré leur opposition au régime. Leur presence dans le mouvement du 20 février ne prouve que la faiblesse et la confusion de ce ressemblement hétéroclite sur les bases politiques les plus limités.

    Enfin, Frédéric Vairel, en bon sociologue, ne semble pas toujours saisir l’originalité et la spontanéité de l’évènement. La révolte de 2011 ne correspond pas aux cadres classiques de la routine militante. Même si l’approche sociologique et historique permet aussi de montrer les origines de ce soulèvement. Le mouvement du 20 février permet de developer des pratiques de lutte qui sortent de la hiérarchie marxiste-léniniste pour adopter unr organisation plus horizontale et libertaire. Mais un renversement du régime au Maroc ne peut passer que par l’émergence d’un veritable mouvement de masse. Des grèves permettent de bloquer la production et de mettre en avant la dimension sociale de la lutte. Le mouvement du 20 février se contente de soulever la question des libertés démocratiques mais n’évoque pas l’exploitation capitaliste. Pourtant, les mouvements de lutte qui permettent de renverser des régimes autoritaires articlent lutte contre la repression et lutte contre l’exploitation et la misère.

     

    Source :

     

    Frédéric Vairel, Politique et mouvements sociaux au Maroc. La révolution désamorcée ?, Presses de Sciences Po, 2014

     

    Articles liés :

    Retour sur la révolte tunisienne

    Réflexions sur le Printemps arabe

    Occuper le monde : un désir de radicalité

    L'émeute se propage

    Pour aller plus loin :

     

    Vidéo : Conférence: "Révolte dans le monde arabe: vers un changement politique ?", publié sur le site UQUAM TV le 8 février 2011

    Frédéric Vairel, « "Qu’avez-vous fait de vos vingt ans ?" Militantismes marocains du 23-mars (1965) au 20 février (2011) », L’Année du Maghreb, VIII | 2012

    Julie Chaudier, Maroc : « L’idée de révolution a disparu », selon Frédéric Vairel [Interview], publié sur le site Yabiladi le 13 décembre 2014

    Textes de Frédéric Vairel publié sur le site Cairn

    Olivier Mongin, Note de lecture publiée dans la revue Esprit le 1er décembre 2014

    Béatrice Hibou, Le mouvement du 20 février, le Makhzen et l'antipolitique. L'impensé des réformes au Maroc, publié par le CERI / Sciences Po

    Indymedia Nantes, Maroc : Le Mouvement du 20 février en Europe, publié le 17 juin 2014

     

    http://www.zones-subversives.com/2015/02/les-nouveaux-mouvements-sociaux-au-maroc-2.html

  • Nouveautés sur AFPS Rennes

    • Action urgente d’Amnesty International pour Abdallah Abu Rahma de Bil’In

      Chères amies, chers amis, Nous vous appelons à vous associer à l’action urgente d’Amnesty International concernant Abdallah Abu Rahma de Bil’In. Il va finalement passer en jugement le 22 février et risque une lourde condamnation. Nous vous invitons à écrire dès aujourd’hui à l’ambassadeur d’Israël en France. Vous trouverez ci-après un modèle de lettre du type de ceux proposés par Amnesty que vous pouvez bien sûr adapter comme vous le souhaitez. Vous pouvez également envoyer copie de votre lettre par email (...)


    • Israël n’est pas une démocratie

      17 février

      L’éternelle propagande israélienne, bien ancrée dans les esprits, raconte qu’Israël est la « seule démocratie au Moyen-Orient. » Les déclarations des dirigeants politiques occidentaux, notamment les Américains et les Britannique, s’appuient souvent sur cette allégation pour justifier le renforcement de leurs liens avec Israël. "Je suis cette terre" le cri des Palestiniens dépouillés chaque jour de leur terre Ils prétendent être les seuls porteurs du flambeau de la « démocratie » alors qu’ils sont (...)


     

    • Palestine occupée : les troupes israéliennes détruisent des champs d’oliviers

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      Les Forces Israéliennes d’Occupation (FIO) ont déraciné avec des bulldozers des dizaines d’oliviers dans le village de Tayasir mardi, au nord de la Cisjordanie occupée, ont déclaré les habitants. __7__ 28 octobre 2014 - Abbas Youssef, fermier palestinien âgé de 70 ans, montre du doigt ses oliviers qui commencent à porter leurs fruits, sur des terres situées de chaque côté d’une colonie juive dans le nord de la Cisjordanie occupée, dans le village d’al-Janiya à l’ouest de Ramallah - Photo : AFP/Abbas (...)


     

    • J’ai fait « partie d’une organisation terroriste », dit un pilote israélien, devenu militant

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      Yonatan Shapira est né dans une base militaire israélienne, un an avant que son père ne pilote des avions de combat dans la guerre d’octobre 1973. Trente ans plus tard, dont douze qu’il a passés lui-même comme pilote de l’armée de l’air, Shapira rejetait l’armée. En 2003, il écrit une lettre où il s’engage à ne pas voler au-dessus de la Cisjordanie et de la bande de Gaza occupées. Shapira est l’un des rares Israéliens à avoir déclaré soutenir l’appel des Palestiniens pour le boycott, le désinvestissement et (...)


     

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      Déclaration du Bureau National de l’AFPS __7__ Des soldats israéliens patrouillent en face de la colonie illégale de Halamish (au fond) qui est située près de la ville de Ramallah en Cisjordanie. (Photo d’archives) __7__ Jour après jour, alors que toute perspective de levée du blocus de Gaza semble évanouie, surviennent des annonces de nouvelles confiscations de terres ou d’extension de colonies. Cette semaine « l’administration civile » (terme désignant l’administration militaire dans la novlangue (...)


     

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      Dans le nord de la Vallée du Jourdain, la semaine dernière, les forces israéliennes ont détruit une conduite d’un kilomètre de long installée qui fournissait de l’eau aux communautés palestiniennes. A l’Est de Jérusalem, des dizaines de milliers de Palestiniens ont été privés d’un approvisionnement régulier en eau courante pendant près d’un an. A Gaza, l’infrastructure de l’eau a été détruite et dans les foyers qui reçoivent encore de l’eau, elle n’est pas potable. L’eau et qui la contrôle sont devenus un (...)


     

    • Malak, 14 ans, dénonce ses conditions de détention en Israël

      16 février

      Après 45 jours dans une prison israélienne, Malak al-Khatib, 14 ans, benjamine et désormais icône des prisonniers palestiniens, continue de nier les faits qui lui sont reprochés et dénonce ses conditions de détention, dans un entretien samedi à l’AFP. "C’est sûr que j’aurai plein de choses à raconter à mes camarades quand je retournerai à l’école", dit cette adolescente de Beitin, près de Ramallah, en Cisjordanie occupée. Dès qu’elle reprendra les cours dans trois jours, dit-elle, elle leur racontera "le (...)


  • Débrayage pour les salaires à Renault-Tanger (Lutte Ouvrière)

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    Du lundi 9 au mercredi 11 février, les ouvriers de l’usine Renault Nissan de Tanger, au Maroc, ont débrayé et organisé plusieurs sit-in devant les locaux de la direction pour faire entendre leurs revendications. Ils réclamaient des augmentations de salaire ainsi que le paiement des temps de pause et de diverses primes : pour compenser par exemple l’augmentation de la productivité ou l’éloignement géographique de l’usine par rapport à la ville.

    Jeudi 12 février, le gouverneur de la ville intervenait, accompagné par les services de police, pour essayer de convaincre les travailleurs de cesser leur mouvement. Finalement, samedi 14 février, la direction négociait avec l’UMT (Union marocaine du travail) et cédait sur certaines de leurs revendications : augmentation de salaire pour toutes les catégories de personnel, prime de compensation pour les temps de pause. Elle accordait aussi une dotation de cartables et fournitures scolaires pour les enfants du personnel et des conditions préférentielles pour l’achat à crédit d’un véhicule Renault ou Nissan.

    Il n’était sans doute pas question pour la direction de risquer un mouvement plus profond et un blocage de la production car, depuis son ouverture en février 2012, l’usine de Tanger a pris de l’importance dans le groupe, permettant l’exportation de 170 000 véhicules en 2014, essentiellement vers l’Europe. Elle vise à terme les 340 000 véhicules par an.

    Il y a quelques semaines, Carlos Ghosn se félicitait de son choix stratégique d’avoir investi au Maroc et présentait l’usine de Tanger comme l’une des plus performantes du groupe au niveau mondial. Mais les ouvriers ne se laissent pas exploiter sans réagir. Valérie FONTAINE

    http://www.lutte-ouvriere-journal.org/lutte-ouvriere/2429/dans-les-entreprises/article/2015/02/18/36450-debrayage-pour-les-salaires-renault-tanger.html

  • Arabie Saoudite: Al Awamiya, bastion et cœur de la révolution (lcr.be)

    Près de quatre ans après le début du mouvement révolutionnaire à Qatif, les autorités affrontent encore ce mouvement par la violence, les meurtres, les arrestations, la torture en prison, et des cours d’inquisition Aussi n’y a-t-il rien d’étonnant dans la démarche de l’Etat lors des opérations récentes, commises avec une sauvagerie extrême, par la terreur et le châtiment collectif des civils désarmés. Les forces de sécurité ont commis dernièrement un crime qui n’a pas été relaté dans les médias officiels sinon sous forme de cris de vengeance, ou, comme de coutume, pour faire l’éloge des succès de la sûreté dans leur guerre contre le terrorisme. Dans cet article, nous aborderons plusieurs axes dont : le dernier massacre, la réforme et le marchandage, le mouvement révolutionnaire et ses problématiques, l’avenir de la lutte dans la région.

    Il y a eu 27 martyrs, des centaines de blessés et des milliers de détenus dans les cachots du pouvoir depuis le début du mouvement révolutionnaire. La ville de Qatif a subi 7 raids militaires de blindés, dont 6 pour la ville d’Al Awamiya, qui était en réalité la cible… Elle est le bastion et le cœur de la révolution.

    Septième massacre et  vingt-septième martyr

    En ce jour sanglant du 20 décembre dernier, Al Awamiya a subi le raid militaire de dizaines de blindés et d’hélicoptères. Les quartiers résidentiels ont été bombardés, se soldant par la mort de cinq martyrs dont un enfant ne dépassant pas les 13 ans. Les cinq martyrs sont : Ali Abou Abdallah, Abdallah Al Maddad, Ridha Bandari, Thameur Al Rabii, Hassan Mousallab.  Beaucoup de s’en sont sortis avec des blessures variables. Leur nombre s’élève à 74, dont une femme, 7 personnes âgées, et 8 enfants. Il y a eu une tentative de résistance, menée par un groupe qui s’est auto-dénommé « Brigades de la résistance ».

    Cette opération sécuritaire au cours de laquelle les autorités ont utilisé différentes armes, grenades, balles et blindés, a entraîné une destruction matérielle qui n’a épargné ni les fermes, ni les logements, les commerces ou les véhicules. Elle a endommagé tout ou partie de plus de 50 bâtiments et plus de 30 commerces et 79 voitures ont été incendiées ou endommagées.

    La sanction avant le crime

    Les autorités locales ne traitent pas avec le mouvement de protestation, ses militants et sympathisants en tant qu’opposants pacifiques « protestataires » ou en tant que « manifestants ». La  déformation et l’affabulation ont prévalu et servent à qualifier le mouvement. C’est pourquoi nous trouvons toujours ces expressions toutes faites : « provocateurs et émeutiers », « cellule d’espionnage », « soutenus par des Etats étrangers », et « terroristes », « valets » et « crânes bourrés ». Ces allégations ont été toujours de mise lors de tout mouvement de protestation opposé aux régimes. Ce discours a été utilisé pour dénaturer les mouvements révolutionnaires, surtout à l’ère de la contre-révolution au printemps arabe. La presse officielle a déclaré que le dernier massacre était « pour venger le martyr du devoir », en d’autres termes que le pouvoir sécuritaire avait vengé le soldat Abdelaziz Assiri dont les autorités ont affirmé qu’il avait été tué dans le quartier d’Al Nassera, donc pas à Al Awamiya. Par la suite, le général Mansour Turki, qui parle au nom du ministère de l’Intérieur, a fait une sortie affirmant que l’opération était une opération de représailles. C’est ainsi que les journaux ont reproduit l’information, mettant le pouvoir dans l’embarras, puisqu’il avait dépeint la milice comme une milice de représailles. Afin de rectifier ses déclarations hâtives, le général Turki a fait une autre sortie et est revenu sur «  venger le martyr du devoir » et il a dit : «  Les hommes de la sûreté ne font pas de représailles et ne se vengent de personne ». Par ailleurs, la presse officielle n’a pas produit une seule preuve du prétendu assassinat, et en réalité il y a plus de 25 domiciles sur une distance de 100 à 150 mètres du lieu dont les autorités prétendent être celui du crime, le point de contrôle de Nassera– or personne n’y a entendu le moindre tir et personne n’y a vu ce soldat-, c’est un événement auquel nul n’a assisté. Un crime commis dans un lieu différent de celui de l’opération de représailles. En outre, il n’y a pas eu non plus de publication de photo du soldat tué ni de déclarations de témoins oculaires, et nous nous demandons pourquoi ? Les autorités auraient pu publier des preuves de cet événement comme elles l’ont fait pour le soldat blessé dans un hôpital. Elles avaient allégué qu’il avait été atteint par un coup de feu lors de ce même raid. Ainsi l’assassinat du soldat Al Assiri à Al Awamiya reste une invention des autorités – faute de preuves à l’appui de ces allégations.

    Le porte-parole du ministère de l’Intérieur a affirmé que le martyr Ali Abou Abdallah était l’assassin et l’auteur du meurtre du soldat Abdelaziz Assiri. Le militant des droits de l’homme Ali Al Dabissi a commenté cette accusation et la méthode utilisée pour tuer le martyr : « Les enregistrements sonores disponibles et qui contiennent les appels au secours des martyrs (que Dieu les accueille dans sa bonté), prouvent qu’il était possible de les attraper au lieu de les tuer. Le site a été bouclé, les tueurs en ont pris possession, et il était donc aisé de les attraper et de les déférer devant la justice. Cela sera avéré à l’écoute des bandes.».

    Que les forces sécuritaires préfèrent l’assassinat à l’arrestation n’est que la conséquence de l’aggravation de l’impuissance des solutions sécuritaires et judiciaires adoptées par les tribunaux d’inquisition. L’enfant martyr Thameur Al Rabii n’est autre que le petit frère d’Houssine Al Rabii, militant révolutionnaire emprisonné dans les prisons du pouvoir. Quant au martyr Hassan Mousallab, son frère aîné est mort en martyr dans une opération sécuritaire similaire l’année passée. Que les autorités ciblent les proches des militants révèle la tendance vengeresse empruntée par les forces de sécurité face au mouvement révolutionnaire et à la lutte dans la région. Au cours de son histoire, le pouvoir n’a pas eu besoin de justification pour se livrer à ce type de représailles. Nous avons toujours en mémoire l’accident au cours duquel des soldats du secteur sécuritaire se moquent d’une femme de Qatif : « C’est une chiite qui va se divertir » lors d’une scène de représailles aux relents de confessionnalisme, d’humiliation et de sexisme.

    Le mouvement réformiste –le courtier prêt au marchandage

    Les dignitaires et les élites militantes des droits de l’homme de diverses sensibilités ont signé des communiqués politiques de marchandage et de négociation. Ce sont eux qui ont appelé au calme depuis leurs estrades, et ils ont tenté par tous les moyens de faire avorter le mouvement révolutionnaire considérant que la sagesse et les médiations politiques étaient la solution. Malgré l’état de siège et les poursuites que vivent ces militants et les militants des droits de l’homme, dont le militant Fadhel Al Safwani, Mohammad Al Libad, Salman Al Faraj etc.,  les notoriétés et les élites ont exigé de les livrer aux services de sécurité. Ils ont ainsi fait du troc une méthode. Ils échangent l’organisation, le mouvement, la protestation pour les médiations politiques, la flânerie élitiste dans les palais, les correspondances et les rendez-vous dans les hôtels. Ainsi des symboles du courant réformateur nous sortent leur : « As-Sayf, As-Saffar et Al-Habil » avec toutes leurs sensibilités. Mais qui ont en commun de placer la pacification au-dessus de toute autre considération et appellent à s’en remettre aux notables. Dans la période de montée du mouvement révolutionnaire, lorsque la voie réformatrice se heurtait à une crise de polarisation, car ces élites vivent un moment de quasi chômage technique du fait qu’ils perdent leur statut social de médiateur, les voix s’élèvent pour faire porter aux militants la responsabilité de tous les massacres perpétrés par les autorités.

    Tawfik As-Sayf dit à propos du massacre du 20 décembre : « La responsabilité dans ce qui s’est passé à Al Awamiya aujourd’hui, le sang qui a coulé et les vies qui se sont éteintes, incombe à ceux qui sont armés et qui prônent la violence aveugle. Et derrière eux les personnes qui les encouragent et justifient leurs actes. ». C’est le moyen le plus facile ! Considérer que les diverses protestations sont détournées par un groupe de tueurs, d’hommes armés et des partisans du crime. Lénine disait : « Le pessimisme, la non-violence, la faiblesse de la volonté, et faire appel à « l’Esprit » forment une idéologie qui apparaît inévitablement à une époque où l’ancien régime tout entier « a été bouleversé »  et où la masse qui a été élevée sous cet ancien régime et en a sucé le lait maternel, les principes, les habitudes, les traditions, les croyances, ne voit pas ni ne peut voir quel est le nouveau régime qui s’ « ordonne », quelles forces sociales l’ »ordonnent » et comment, quelles forces sociales sont capables de la délivrer des maux sans nombre, particulièrement redoutables, propres aux époques de transformations violentes ». C’est pourquoi les cris humains (utopiques) lancés par As-Sayf et consorts sont le refuge adéquat pour les masses. Le docteur As-Sayf a décrit le mouvement révolutionnaire dans son ensemble comme « daechiste » considérant qu’il s’agissait de milices terroristes. Avant que nous ne critiquions les allégations d’As-Sayf, il faut faire appel à quelques réalités : si les porteurs d’armes sont responsables des crimes du pouvoir, pourquoi Qatif n’est pas considéré comme le gouvernorat où on a abattu le plus d’hommes de la Sûreté ?! Le journal Al Hayat a publié un rapport du ministère de la Justice, qui fait état de 3 villes où on a tué le plus d’éléments de la Sûreté : Riyadh, Jeddah, Haïl, dans ce cas pourquoi n’y a-t-il pas eu d’assaut sur la capitale, la côte ouest ou la région nord ? Si l’on considère que les responsables sont les hommes armés  ?! En réalité, il n’y a pas de logique dans cette analyse même si elle a été publiée suite à une erreur commise par l’esprit « rationnel »  de sa grandeur As-Sayf, le médiateur, en fin de compte : « Prenons garde à la mobilisation individuelle » et la nécessité d’en revenir à un généraliste avachi et un misérable notable qui pour nous a concocté une formule de génie pour résoudre les problèmes sociaux. Ce discours de marchandage a échoué au cours des cinquante dernières années et il est fort probable que les factures d’encre des imprimeries réformistes qui avaient imprimé leurs communiqués de suppliques et mendicité leurs seront réglées. La contestation est un droit de l’homme. C’est le moyen qui a permis les acquis politiques ou économiques de l’histoire. Les mouvements révolutionnaires, y compris dans notre histoire locale, ont mis en place une élite de réformateurs capables de réaliser ce marchandage politique.

    Entre réforme et guérilla

    Comme nous l’avons expliqué, le régime ne peut pas être réformé, car celui qui a intérêt à la radicalisation confessionnelle et le racisme est le même qui a intérêt à torpiller tout mouvement revendiquant la justice sociale. Celui qui possède les palais gardés par des blindés n’a pas d’intérêt politique ni matériel à l’édification d’une société basée sur la justice et l’égalité. Au moment où nous écrivons cet article quelques 50 blindés ont été attachés lors d’une mobilisation sécuritaire à la protection du roi qui a été transporté à l’hôpital de la garde nationale. Les fonctions dévolues à ces militaires sont la protection de la propriété privée et celle de la classe dirigeante et de la bourgeoisie locale. C’est la priorité sécuritaire et non pas la protection des citoyens comme le vantent les élites politiques.

    Comment le réformisme en est-il arrivé là ? ! Le chaos dans les groupes révolutionnaires actuels a conduit le mouvement de protestation à une impasse politique fatale. L’écart entre l’extrémisme révolutionnaire et l’opportunisme politique ne peut être tracé par la conjecture et la ferveur spontanée, mais à travers l’organisation révolutionnaire, la théorie et la pratique concrète jusqu’à ce que le mouvement parvienne à dépasser ses tribulations, comme l’a écrit le militant Bassem Chit : « Afficher la colère est facile, le problème le plus difficile est de l’orienter, car lorsque la spontanéité et l’anarchisme se déplacent vers son point d’impact réel, cela devient plus compliqué, et encore plus profond. C’est là la différence entre le populisme et la révolution. Le populisme assied son trône sur ce moment de spontanéité et finit avec lui, tandis que la pratique révolutionnaire est celle qui peut faire passer cette colère de son instantanéité à sa dimension historique de lutte permanente, non pas par le prisme d’un imaginaire aseptisé de la lutte, mais par la reconnaissance que la colère humaine n’est pas un joli spectacle! Et que sa beauté (possible) se construit dans la « boue » de la lutte, et pas du haut des tours de guet ! »

    La crise du mouvement réformiste a mis en exergue que beaucoup d’activistes, à travers l’émotion révolutionnaire œuvraient à torpiller cette frange qui trahit le mouvement et participe à détruire la région en faisant corps autour des forces sécuritaires contre les civils. De là beaucoup de questions s’imposent: est-ce que le changement de la conscience collective du désespoir à l’espoir et de la réforme à la révolution passe par la lutte contre les forces réformatrices et leurs symboles ?! Est-ce que la polarisation des masses par leur appel au sacrifice fait partie de la voie révolutionnaire ? Est-ce que l’abandon des revendications sociales du mouvement de contestation par des slogans appelant à la mort d’Al Saoud est la tactique adaptée à la conjoncture ?

     

    Dans la réalité, si les masses sont d’accord et unies dans la conscience et croient à la révolution pourquoi les autorités ont-elles pu envahir Al Awamiya et commettre le dernier massacre ! L’accumulation d’erreurs commises par le mouvement révolutionnaire est l’une des raisons pour lesquelles les réformistes en sont arrivés là. Le réformisme a tourné les erreurs du mouvement à son avantage à travers la polarisation de classe de ceux qui n’ont aucun projet sérieux de changement d’une part, et ces franges qui ne peuvent adhérer au mouvement révolutionnaire porteur de slogans « guérilleristes » d’autre part. Ils sont parvenus à se positionner dans une posture qui leur garantit leurs privilèges de classe au détriment du mouvement contestataire, ses opprimés, ses prisonniers et ses martyrs.

    Trotski disait du réformisme et du mouvement révolutionnaire  que l’un des objectifs de l’action des révolutionnaires avec les militants convaincus de la réforme sur le terrain dans des combats unis est de démasquer les directions réformistes et donner une preuve concrète à ces militants que même pour ces réformes on ne peut mener une lutte cohérente et jusqu’au bout que sous la direction des révolutionnaires. L’un des objectifs de l’entrée dans ces combats réformateurs partiels main dans la main avec la jeunesse combattante qui croit dans les directions réformistes et les idées réformistes est l’appel concret à la révolution et sa nécessité !  En d’autres termes, le meilleur moyen d’entraîner les militants réformistes vers le mouvement révolutionnaire passe par les mouvements de protestation civils et leurs revendications sociales, qui donnent l’occasion de polariser diverses franges dont des réformistes. Nous ne pouvons attirer les masses qu’au cœur des luttes. Pour cela, nous avons besoin de ces réformistes pour leur prouver, d’une part que le mouvement réformiste a échoué à réaliser des acquis et à diriger la lutte, et pour attirer, d’autre part, ces masses qui marchent derrière le mouvement réformiste et ses symboles. La tendance à l’extrémisme révolutionnaire qui se fait jour aujourd’hui à même de relancer le sectarisme et le factionnalisme et de détruire le mouvement de l’intérieur.

    L’une des erreurs les plus grossières dans la pratique révolutionnaire est que le subjectivisme prend le dessus sur la revendication. Et la surenchère et l’extrémisme révolutionnaire prennent le pas sur la construction et l’organisation, comme cela arrive lorsque se répandent des modes spécifiques d’opposition qui n’interagissent pas avec les revendications sociales. Mais elles se reflètent avec enthousiasme dans la contestation de la souveraineté royale en piétinant des photos des politiciens et des rois ou en lançant des slogans qui appellent à la mort ou l’anéantissement de la famille royale.

    Cela éclaire la problématique chez le militant en la considérant comme une crise de sacrifice ! C’est alors que l’un d’eux assène : «  Le problème c’est que le peuple ne veut pas se sacrifier pour la victoire ! » De cette vision étroite découle le sectarisme organisationnel et le factionnalisme armé. Car l’armement fractionnel peut apparaître à première vue relever du droit naturel à l’auto défense alors qu’il est la conséquence de l’impasse réelle que vit le mouvement révolutionnaire. Le mouvement révolutionnaire dévie de l’organisation de masse aux méthodes aventuristes révolutionnaires extrémistes qui sous-estiment l’importance de conscience les masses au lieu de la construction et de l’organisation révolutionnaire, la compréhension de la lutte, le fait de mener des luttes autour de revendications bien déterminées. Se satisfaire des revendications révolutionnaires expose le mouvement à l’isolement de l’ensemble du mouvement social et de ses revendications.

    A l’ombre de l’escalade politique de l’Etat à soutenir les contre révolutions pour faire avorter le printemps arabe, l’escalade politique et sécuritaire locale va de pair avec l’escalade régionale. A ce stade crucial de la lutte révolutionnaire, il faut se concentrer sur les revendications sociales et des droits civiques, il faut attirer les masses avec toutes leurs revendications politiques et économiques qui touchent à leur vie quotidienne et ne pas se contenter des revendications révolutionnaires. Il nous faut défendre la liberté d’expression, les droits des femmes et les grèves ouvrières et les droits des travailleurs étrangers en luttant contre le racisme, revendiquer le droit à l’enseignement et aux services de santé et défendre l’environnement. Ce sont des revendications essentielles qui concernent la vie des travailleurs anéantis par le rouleau compresseur du pillage et de l’exploitation. Nous devons évaluer les slogans du mouvement et réexaminer les différentes problématiques. Sans construction d’une organisation socialiste révolutionnaire aucun progrès ne sera réalisé sur le plan du changement social.

    Eternité pour les martyrs des massacres cruels, liberté pour les prisonniers, gloire au mouvement révolutionnaire !

    Nidhal Farah Pour Bassem Chit 8 février 2015

    (traduction de l’arabe, Luiza Toscane, Rafik Khalfaoui)

     http://www.lcr-lagauche.org/arabie-saoudite-al-awamiya-bastion-et-coeur-de-la-revolution/

  • Algérie : harcèlement continuel envers les syndicalistes autonomes (Afriques en lutte)

    Nous reproduisons ici un communiqué de nos camarades de la Confédération Générale Autonome des Travailleurs en Algérie.

    Il illustre la situation faite aux syndicalistes de la CGATA, du SNAPAP, de tous ceux et toutes celles qui font vivre un syndicalisme véritable, de luttes et autonome, malgré les poursuites judiciaires, les arrestations, le harcèlement étatique.

    Les poursuites et harcèlements contre les cadres syndicaux du SNAPAP et de la CGATA continuent !

    Après les harcèlements dans les wilayas d’El-Bayad et M’sila c’est le tour cette fois-ci de ceux du grand sud. Abdelkader Hamaoui, membre fondateur de la CGATA (Confédération Générale Autonome des Travailleurs en Algérie), et président du Bureau régional du grand sud subit de multiples pressions et harcèlements de la part de services de sécurité pour non collaboration avec ces derniers, par rapport à son activité syndicale, sa défense des droits de l’homme, et sa participation au mouvement anti gaz de schiste. Abdelkader est connu par son honnêteté et sa sincérité dans le combat militant !

    En sa qualité de représentant du SNAPAP et de la CGATA au grand sud, Hamaoui avait dénoncé le harcèlement sexuel dont ont fait l’objet deux femmes cadres à Air Algérie. Ces femmes subissent aujourd’hui des pressions allant jusqu’à leur demander de quitter leur logement de fonction.

    La Confédération Générale Autonome des Travailleurs en Algérie CGATA, et le SNAPAP, dénoncent énergiquement ces harcèlement et ses pressions exercés contres les syndicalistes autonomes et des défenseurs des droits de l’homme. La CGATA et le SNAPAP, réitèrent leurs engagements à défendre leurs cadres syndicaux, et tous les militant-es pour les causes justes, et interpellent l’opinion nationale et internationale à poursuivre les efforts pour la protection des syndicalistes et des militants autonomes.

    Source : - www.solidaires.org

    17 février 2015

    http://www.afriquesenlutte.org/afrique-du-nord/algerie/article/algerie-harcelement-continuel