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Révolutions Arabes - Page 247

  • Aux origines de l’État islamique, la destruction de l’Irak et de la Syrie (ESSF)

    Un développement spectaculaire au cours des dernières années, favorisé par la décomposition des appareils étatiques et la violence de la répression des pouvoirs en place.

    En Irak...

    La naissance de l’État islamique (EI) remonte à l’année 2006 en Irak, et ne peut être comprise que dans le contexte spécifique de l’Irak post-invasion états­unienne. Les bombardements puis l’invasion de l’Irak ont en effet été suivis d’une politique de réorganisation du pays par les forces d’occupation, avec notamment la volonté de mettre en place un gouvernement soumis aux intérêts des États-Unis et de leurs alliés. Au nom de la « débaathification » (du nom du parti Baath, celui de Saddam Hussein), une grande partie de l’appareil d’État a été démantelée, avec notamment la dissolution de l’armée, première institution du pays, dont l’origine remontait aux années 1920 sous le mandat britannique.

    Ce démantèlement brutal, et l’incapacité des États-Unis et de leurs alliés irakiens à faire émerger des structures politico-­administratives légitimes et stables, ont non seulement accéléré la décomposition du pays, mais ont de plus contribué à convaincre nombre de soldats et d’anciens officiers de Saddam Hussein, qui se sont retrouvés sans emploi et sans avenir, de rejoindre les rangs de la résistance à l’occupation. La politique sectaire conduite par le Premier ministre chiite Nouri al-Maliki (en poste de 2006 à 2014), qui marginalise la minorité sunnite (dominante durant l’ère de la dictature de Saddam Hussein), et la répression féroce de l’armée d’occupation et de ses supplétifs irakiens, vont quant à elle favoriser non seulement une radicalisation mais une confessionnalisation des affrontements.

    C’est dans ce contexte que l’État islamique a pu naître et se développer.

    Il ne s’agit évidemment pas de nier l’action et l’idéologie résolues de militants religieux radicaux proches d’Al-Qaïda, mais de comprendre que leur discours et leur projet n’ont pu gagner l’audience qu’ils ont obtenue que dans ce contexte de décomposition de l’État irakien et de confessionnalisation de la politique et des conflits. Tous les spécialistes s’accordent en effet aujourd’hui pour reconnaître que l’on retrouve dans l’ossature de l’EI, et notamment dans son commandement militaire, un nombre significatif d’anciens officiers de Saddam Hussein. Selon l’analyste irakien Hisham al-Hashimi, ce sont aujourd’hui pas moins de 17 des 25 leaders les plus importants de l’EI, parmi lesquels son numéro un, Abu Bakar Al Baghdadi, qui ont transité par les prisons étatsuniennes en Irak pendant les années 2004-2011.

    Un basculement s’est opéré à la fin de l’année 2012, lorsque plusieurs villes sunnites se sont soulevées pacifiquement contre le pouvoir central et que ce dernier a tenté d’écraser dans le sang le soulèvement. Dans la ville d’Hawija, au cœur de laquelle un sit-in était organisé depuis plusieurs semaines, les troupes de Bagdad ont commis le 23 avril 2013 un véritable massacre : au moins 50 mortEs et plus d’une centaine de blesséEs dans une opération qualifiée, bien évidemment, d’« antiterroriste » par le gouvernement central. Le silence du pouvoir face aux revendications et la violence de la répression ont achevé de convaincre nombre d’Irakiens de rejoindre les rangs des factions les plus radicales, au premier rang desquelles l’EI, qui a connu un spectaculaire développement après les événements d’Hawija, prenant notamment le contrôle de zones pétrolifères lui permettant de s’autofinancer et remportant de faciles victoires face à une armée irakienne mal préparée, mal entraînée et ne bénéficiant plus du soutien de l’armée US (qui s’est progressivement retirée en 2010-2011).

    … et en Syrie

    Des causes similaires, quand bien même la situation n’est pas strictement équivalente, ont produit les mêmes effets en Syrie. Le pays n’a bien sûr pas connu d’invasion et d’occupation étrangère. Mais il a lui aussi connu un soulèvement populaire en mars 2011, qui a subi (malgré son caractère pacifique) une violente répression de la part du régime, précipitant le pays dans des affrontements armés de plus en plus violents. On sait désormais que Bachar el-Assad a libéré dès 2011 des prisons syriennes des milliers de militants « djihadistes » dans l’objectif inavoué de durcir et de confessionnaliser les affrontements et de se poser comme seul garant de l’unité de la Syrie et du retour à l’ordre. Ce calcul cynique a en réalité favorisé la jonction entre ces combattants, leurs homologues venus de l’étranger et l’EI.

    Dans une Syrie dévastée par les combats et par la violence de la répression du régime, l’EI s’est en effet progressivement imposé, notamment à la lumière de son développement en Irak, comme une force de plus en plus crédible, non seulement pour lutter contre Bachar el-Assad, mais aussi pour ramener un semblant d’ordre dans les villes et régions échappant au contrôle du régime et donc livrées à elles-mêmes. La disparition des structures étatiques a en effet créé une situation de chaos dans ces zones, que l’EI se propose de pacifier et de réorganiser. En effet, en Syrie comme en Irak, l’EI comble le vide laissé par l’État, en rétablissant l’ordre et en fournissant une assistance aux populations : l’EI n’est pas seulement une bande de fanatiques avec une idéologie totalitaire, mais aussi « un système militaire, politique et économico-social bien huilé » (pour reprendre les termes de la chercheuse Myriam Benraad.

    À cet égard, et ce malgré les dénégations forcenées des chancelleries occidentales, l’EI possède bel et bien certaines caractéristiques d’un État.

    Son développement spectaculaire au cours des dernières années, en Irak puis en Syrie, aurait été impossible sans les processus de décomposition des appareils étatiques et sans la violence de la répression qui s’est abattue sur les populations marginalisées. Il ne s’agit pas de verser dans le complotisme et de proclamer que les États-Unis ou Bachar el-Assad aurait « créé » de toutes pièces l’EI. Force est toutefois de constater que les combattants et les idéologues du mouvement n’auraient jamais pu acquérir une telle audience et une telle puissance si les pouvoirs en place et leurs alliés internationaux n’avaient pas choisi la politique du pire, au mépris des revendications populaires.

    Julien Salingue

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34242

  • Aux origines d’Al-Qaïda, l’URSS et le nouvel ordre mondial (ESSF)

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    La première manifestation spectaculaire de la mouvance djihadiste moderne a été l’attaque de la Grande mosquée à La Mecque, avec une prise de nombreux otages, en novembre 1979.

    Cette action, qui a été réprimée par l’assaut de forces mixtes saoudiennes et françaises, et qui a fait plus de 300 morts des deux côtés, avait été menée au nom d’une idée messianique : l’« arrivée du Mahdi », sauveur envoyé par Dieu. Des membres de la famille Ben Laden ont été impliqués dans la préparation de cette action.

    En lutte contre le « communisme »

    Sa préparation avait été effectuée au nom d’une dénonciation du mode de vie « impie » des dirigeants saoudiens, fait de luxe, de corruption et de vice. Ce faisant, les djihadistes avaient retourné l’idéologie officielle du royaume wahhabite contre ses dirigeants. Les djihadistes revendiquent l’application au pied de la lettre de l’idéologie, sous sa forme pure et dure, pour « remoraliser » la société, en y soumettant aussi les dirigeants du pays.

    La grande lutte des islamistes radicaux des années 1980 sera la lutte contre le régime « communiste » régnant en Afghanistan depuis 1979 et appuyé par une armée d’occupation soviétique. Le régime s’impose par la force à une société qui lui résiste (parmi d’autres raisons, on trouve l’échec d’une réforme agraire ne permettant pas aux paysans affranchis des pouvoirs féodaux de survivre). Mais les forces islamistes qui mènent la résistance armée dénoncent ses aspects modernisateurs, par exemple la scolarisation des filles. Toutes les forces djihadistes de la région se tournent alors contre le communisme, athée et donc pervers par nature. Les services saoudiens et états-uniens fournissent toute sorte d’aide : logistique, matérielle, militaire. Et comme d’autres, Oussama Ben Laden participe à la lutte en Afghanistan...

    Le nouvel ordre mondial

    L’alliance tacite avec la réaction wahhabite et avec les États-Unis est rompue en 1990. À partir de la « crise du Golfe », suite à l’occupation du Koweït par la dictature irakienne, le royaume saoudien offre son sol au déploiement d’une armada impérialiste qui va bombarder l’Irak en janvier et février 1991. À l’instar d’autres, Oussama Ben Laden dénonce un pouvoir royal qui « laisse fouler le sol du pays par des soldats non-musulmans, alors qu’il est le gardien de La Mecque et de Médine ». Leur combat international sera désormais orienté contre les USA et leurs alliés. Ben Laden séjourne dans plusieurs pays arabes, en Libye, au Soudan… S’ensuivront des séjours en Afghanistan, et la préparation des attentats du 11 septembre 2011. Les Talibans, au pouvoir depuis 1996, le protègent.

    Le développement des « filiales »

    Après 2001, Al-Qaïda, nom désormais connu dans le monde entier, ouvrira des « filiales » dans plusieurs pays arabes. Des groupes locaux cherchent à s’affilier pour gagner en notoriété. En 2004, Al-Qaïda s’implante en Irak pour tenter d’apparaître comme la force en pointe dans la résistance à l’occupation US. En 2007, le dernier reste des groupes islamistes armés en Algérie (après la défaite de la mouvance islamiste dans la guerre civile des années de 1992 à 1999) choisit d’adopter le nom d’ « Al-Qaïda au pays du Maghreb islamique » (AQMI).

    En 2009, la dernière « filiale » sera créée : « Al-Qaïda dans la péninsule arabique » (AQPA). Aujourd’hui, au Yémen, le réseau profite largement de la faiblesse structurelle du pouvoir central, dans une société à structuration encore tribale et traversée par un clivage confessionnel sunnites/chiites.

    Bertold du Ryon

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34242

  • Régimes d’Arabie Saoudite et du Qatar... (ESSF)

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    L’Arabie Saoudite vient de faire parler d’elle à l’échelle internationale, avec la mort du roi Abdallah, décédé le 23 janvier dernier à l’âgé de 90 ans. Son successeur sera son frère Salmane, un jeunot de 79 ans, aussi « ouvert d’esprit » que son aîné.

    Les divers hommages venus des grandes puissances au défunt roi prêteraient à rire, si la réalité de la vie des « sujets » saoudiens n’était pas aussi triste. Mais une partie des dirigeants impérialistes a un peu moins trouvé à rire quand est venue sur la table la question du rôle du royaume saoudien dans la région.

    Ainsi le 2 octobre 2014, le vice-président des États-Unis, Joe Biden, déclara lors d’une réunion à l’université de Harvard (aux USA), à propos des soutiens dont bénéficiaient les groupes djihadistes : « Notre plus gros problème, c’était nos alliés dans la région. Les Turcs sont des grands amis, ainsi que les Saoudiens et les résidents des Émirats arabes unis. Mais (…) ils ont mené une guerre par procuration entre sunnites et chiites, et ils ont fourni des centaines de millions de dollars et des dizaines de milliers d’armes à tous ceux qui acceptent de lutter contre el-Assad. »

    Pouvoir wahhabite et Frères musulmans

    On comprend bien que ce qui inquiétait le vice-président US, ce n’est pas que les pays nommés auraient soutenu des forces démocratiques se battant contre la dictature syrienne, mais bien les djihadistes qui conçoivent cette lutte dans une optique de guerre confessionnelle : le pouvoir syrien est entre les mains du courant religieux alaouite, et ses principaux alliés sont chiites (le régime iranien et le Hezbollah libanais).

    Certains ont cru ou croient toujours que la monarchie saoudienne soutiendrait les partis affiliés à l’internationale des Frères musulmans, ce qui est une erreur. Si le pouvoir wahhabite saoudien a aidé les Frères musulmans dans les années 1950 et 1960 contre le régime nassériste – le nationalisme arabe séculier était alors son ennemi principal absolu –, les deux sont devenus des rivaux depuis de longues années. Cela s’explique par des rivalités pour la direction des forces islamistes dans le monde, mais aussi par l’orientation « républicaine » des Frères musulmans (qui aspirent à une République islamique, mais rejettent la monarchie).

    Concernant l’Égypte, les alliés de l’Arabie saoudite se trouvent parmi les partis salafistes, qui ont majoritairement soutenu les militaires contre les Frères musulmans. L’Arabie saoudite et d’autres monarchies du Golfe ont rapidement collecté 12 milliards de dollars d’aide financière en quelques jours début juillet 2013, permettant au nouveau pouvoir égyptien de colmater les brèches dans le budget de l’État...

    Le Qatar en soutien aux radicaux

    Le Qatar est le seul régime monarchique du Golfe à déplorer ouvertement la mise à l’écart des Frères musulmans en Egypte. La chaîne télévisée qatarie a pris d’ailleurs ouvertement leur parti, mais le pouvoir qatari a fini par accepter les nouvelles réalités égyptiennes.

    Mais le Qatar soutient, lui aussi, des islamistes plus radicaux, d’obédience djihadistes, dans certains pays. Ainsi, quand les djihadistes avaient pris le pouvoir par les armes au Nord du Mali entre janvier et avril 2012, le Qatar leur fournissait une aide qui ne tarda pas à être remarquée : des avions en provenance du Qatar atterrissaient sur place, officiellement dans un but « humanitaire »…

    Et sur le théâtre de guerre syrien, le Qatar joue par ailleurs le même jeu que le pouvoir saoudien, cherchant à transformer l’affrontement politique avec le régime Assad en guerre confessionnelle.

    Bertold du Ryon

    * Paru dans l’Hebdo L’Anticapitaliste - 274 (29/01/2015). http://www.npa2009.org/

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34242

  • “Nous refusons l’instrumentalisation de l’histoire et de la mémoire juives au service d’une cause indéfendable et dangereuse” (ESSF)

     
     
    Les meurtres de l’Hyper Cacher, l’antisémitisme, le sionisme et les juifs de France

    Entretien. Les meurtres du 9 janvier dernier lors de la prise d’otage à l’Hyper Cacher nous incitent à faire le point sur l’antisémitisme en France. Michèle Sibony, vice-présidente de l’UJFP (Union juive française pour la paix) nous a accordé une interview.

    Ross Harrold et Henri Wilno – Les meurtres commis par Amedy Coulibaly sont clairement anti­sémites. Peux-tu faire le point sur l’anti­sémitisme en France, ses ressorts et ses zones d’influence ?

    Michèle Sibony – L’après-guerre a rendu l’antisémitisme de la vieille droite réactionnaire française illicite, mais latent. Cet antisémitisme n’a jamais cessé d’exister ou d’agir. Depuis le début des années 2000, nombre de cimetières juifs et de synagogues ont été attaqués en même temps que des mosquées et des cimetières musulmans, œuvre commune le plus souvent de groupes d’extrême droite.

    Avec la deuxième Intifada s’est développée une forme plus populaire de ressentiment antisémite liée à l’adhésion forcée, j’y reviendrai, des juifs français à la cause sioniste. Cela s’est accompagné de la désignation de toute prise de position pour la Palestine comme antisémite et de l’installation dans les médias, dans les déclarations et les actions politiques officielles, d’un soutien unidimensionnel à la politique israélienne.

    Cette émotion à deux vitesses devant les actes racistes, la solidarité systématique exprimée à la communauté juive, alors que rien de tel ne se produit devant les attentats racistes visant la population arabe, la présentation du conflit israélo-palestinien qui fait toujours l’impasse sur le rapport de domination d’un État contre un peuple occupé et colonisé, ont fini, associées à la crise sociale qui frappe les quartiers populaires où vivent une grande partie de ces descendants d’indigènes, par développer chez une partie d’entre eux rancœur et révolte. Ce sentiment en a rendu certains réceptifs aux thèses antisémites d’un Dieudonné, puis aux thèses du complot développées par des Soral et pire encore parfois.

    Des journaux ont titré récemment sur des départs de juifs de France. Quelle en est la réalité ? Quel rôle joue la propagande d’Israël et des organisations sionistes ?

    Il y a une réalité nuancée : d’une part dans les deux dernières décennies, une classe moyenne qui s’est installée progressivement dans un entre-deux entre Israël et la France, attirée par le soleil et la « bulle » de Tel Aviv, des professions libérales, ont acheté des appartements à Tel Aviv et y viennent plusieurs fois dans l’année. Il y a aussi une classe plus pauvre et fragile de juifs qui vivent dans les banlieues et les cités des quartiers populaires, prise en otage par l’embrigadement inconditionnel pour Israël indissociable de la peur de l’antisémitisme. Le premier est la conséquence de l’autre dans la logique sioniste (et l’antisémitisme fait peur aux juifs, n’est-ce pas normal ?). Cette catégorie fragile tente l’émigration sans filet, et eux, leurs enfants feront l’armée. Ils rencontrent là-bas des difficultés d’intégration, de travail, et un pourcentage important de cette « aliya » (montée ou immigration) revient en France, déçu par des conditions de vie pas plus faciles, au contraire.

    Les chiffres de la « yerida » (descente ou retour) ne sont pas communiqués, mais un tout récent reportage télévisé en Israël indiquait comment les effets d’annonce concernant une « alyia » massive suite à la tuerie de la porte de Vincennes, devaient être relativisés, et que les chiffres de la « yerida » finissaient par rendre ceux de l’«  aliya » française des dernières années, là encore, très relatifs.

    Peux-tu nous expliquer ce qu’est le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France) et son influence ? Cet organisme se targue de représenter les juifs français. Est-ce vrai ?

    Le CRIF est un collectif issu de la Résistance. Il comprend aujourd’hui 60 associations, certaines importantes et d’autres très faibles numériquement. Il a longtemps été un organisme peu politisé, peu ou pas sioniste, peu utilisé par les gouvernements français, et parfois à gauche. Son corps électoral, évalué dans le meilleur des cas à 6 000 membres, ne peut en aucun cas l’autoriser à prétendre représenter une communauté que l’on évalue à 500 000 ou 600 000 personnes. Son virage vers un sionisme agressif a été catastrophique pour les juifs en France, surtout par l’audience que lui ont accordée les gouvernements successifs depuis 2000.

    C’est la rencontre des intérêts politiques français alliés d’Israël, dans le cadre de la vision néolibérale du monde et de sa nouvelle stratégie, d’une ambassade israélienne très active et de son bras armé, le CRIF, qui a produit la prise en otage de la communauté juive : tous comme un seul homme derrière Israël, et cela parce qu’il y a antisémitisme en France puisqu’il y a expression de solidarité avec la Palestine... L’équivalence imposée des termes juif, sioniste, israélien, a encore fragilisé les juifs, les rendant comptables aux yeux de certains des exactions israéliennes.

    Quels sont le poids et l’évolution des organisations comme la LDJ, Ligue de défense juive?

    Au lendemain de l’attentat de Copernic, le CRIF et les consistoires ont passé un accord avec le gouvernement, les autorisant à développer leurs propres systèmes de sécurité devant les synagogues et lieux sensibles juifs : le Service de protection de la communauté juive, qui travaille en étroite collaboration avec le ministère de l’Intérieur. C’est ce qui a favorisé le développement de petites milices juives violentes issues de groupes d’extrême droite, comme le Betar puis la LDJ, Ligue de défense juive, fondée par le rabbin américain d’extrême droite Meïr Kahana, un adepte du transfert de tous les Palestiniens hors du « Grand Israël ». Interdite aux États-Unis puis en Israël en raison de son extrême violence et de son racisme, elle bénéficie en France d’une incroyable protection gouvernementale. Pour la première fois l’été dernier, pendant les événements de Gaza, le ministre de l’Intérieur a évoqué la possibilité d’étudier sa dissolution... Mais plus rien depuis, et l’affaire semble avoir été classée... jusqu’à la prochaine agression.

    En 2013, Enzo Traverso a publié un livre, la Fin de la modernité juive, sous-titré Histoire d’un tournant conservateur. Les courants progressistes et communistes étaient importants chez les juifs français. Qu’en est-il maintenant ? Quel est le rôle d’une organisation comme l’UJFP ?

    Nous avons trouvé remarquable l’étude d’Enzo Traverso, et tristement juste son analyse sur le tournant conservateur juif. Les courants progressistes juifs, héritiers des lumières ou du Yiddishland révolutionnaire d’Europe centrale, étaient le fait des juifs européens, mais les juifs français sont dans leur majorité actuelle le produit de la décolonisation nord-africaine. Ils sont arrivés en France au début des années 60 (et non au début du siècle dernier ou bien avant) et n’avaient pas ou peu « bénéficié » des lumières ou des vertus républicaines dans les colonies. Cela dit, la chute du communisme, la perte de vitesse de la gauche en général, et le tournant conservateur, ne concernent pas, loin de là, que les juifs en France...

    L’UJFP est une association juive laïque qui porte une parole juive progressiste. Nous refusons les instrumentalisations politiques des juifs d’où qu’elles viennent, du CRIF, d’Israël, ou des gouvernements français, qui semblent vouloir jouer les juifs et Israël contre les Arabes, et les musulmans, sacrifiant de fait les droits nationaux du peuple palestinien. Nous refusons aussi l’instrumentalisation de l’histoire et de la mémoire juives au service d’une cause que nous jugeons aujourd’hui tragiquement indéfendable et dangereuse pour les Palestiniens comme pour le collectif juif israélien. Au Moyen-Orient comme ici en France et en Europe, une paix véritable ne peut s’instaurer que dans la reconnaissance des droits de tous et de chacun, et dans l’égalité de traitement des citoyens. Il n’y a pas de paix sans justice.

    Propos recueillis par Ross Harrold et Henri Wilno

    * « Nous refusons l’instrumentalisation de l’histoire et de la mémoire juives au service d’une cause indéfendable et dangereuse ». Paru dans l’Hebdo L’Anticapitaliste - 274 (29/01/2015). http://www.npa2009.org/

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34243

     

  • L’impasse essentialiste ( Syria Freedom Forever)

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    Depuis les évènements tragiques de Paris en Janvier, les médias et politiques n’ont cessé de concentrer les discussions sur la religion islamique pour tenter d’expliquer les crimes et violences par les assassins de Paris, par Boko Haram et l’Etat Islamique (EI). Le débat se fait dès lors sur quelle interprétation ou tradition, progressiste ou réactionnaire, du Coran avons nous pour tenter d’expliquer les violences commises au nom de la religion.

    Le problème de toutes ces discussions, c’est qu’elles axent l’explication de toutes violences commises au nom de l’Islam (y compris par Boko Haram et l’EI) dans la religion islamique et plus précisément le Coran. Il faut relever que dans ces nombreux débats dit « démocratiques », les islamophobes de tous poils tel que les Onfray, Zemmour, Finkelkraut et autres restent au devant de la scène sur les plateaux de télévision et journaux. L’islamophobie n’est en effet pas un phénomène nouveau et s’intensifie depuis les événements du 7 janvier.

    Le Journal Libération a ainsi publié une interview du juriste d’origine palestinienne Sami Al-Deeb, islamophobe notoire et qui est très souvent republié dans des sites d’extrême droite racistes en France, qui nous explique qu’il faut interdire le Coran en France dans sa publication actuelle et soumettre les populations musulmanes à un test de citoyenneté comme les personnes de confession juive l’étaient à l’époque de Napoléon avant d’obtenir la nationalité française.

    Les explications qui veulent trouver dans le Coran et dans la religion islamique les raisons des phénomènes de violence des attentats de Paris, de Daech, Boko Haram, etc… font fausse route, mais surtout renforcent les amalgames racistes et islamophobes tout en voulant octroyer une nature intrinsèquement violente à l’Islam et plus généralement aux populations musulmanes.

    Les phénomènes cités doivent être analysés dans leurs contextes politiques sociaux et économiques et ne trouvent pas leur raison dans le Coran.

    Prenons par exemple l’EI : ce dernier est le résultat principalement de l’impérialisme occidental, des interventions des différents régimes autoritaires de la région du Moyen Orient en Iraq (Iran, Qatar, Arabie Saoudite, etc…), et du régime autoritaire et sectaire actuel de l’Iraq hérité de l’invasion de 2003, sans oublier dans le passé le régime de Saddam Hussein.[1]

    De même, certains tentent d’expliquer les tensions religieuses actuelles entre Chiites et Sunnites au Moyen Orient dans le Coran ou comme une conséquence du conflit qui est pparu à la mort du prophète et sur sa succession il y a 1400 ans. Cela nie le contexte politique et sociale actuel hérité de l’invasion américaine et britannique en 2003 et du rôle de ces deux derniers dans la destruction du tissu social irakien et qui ont privilégié l’arrivée au pouvoir de forces politiques sectaires et réactionnaires.

    Même si l’EI, Boko Haram et les assassins de Charlie Hebdo se réclament de l’Islam, la religion n’explique pas leurs comportements et leurs agissements. Ces groupes ou personnes ont des raisons qui s’inscrivent dans l’époque actuelle et non il y a 1400 ans.

    Analyse t-on l’invasion américaine de l’Iraq par les paroles et les croyances religieuses de Bush (qui avait déclaré avoir entendu en rêve Dieu lui dire qu’il avait une mission et qu’il fallait envahir l’Iraq) ou bien selon des motivations impérialistes (politiques et économiques)? Allons-nous trouver les raisons de l’invasion américaine dans la Bible? Allons-nous analyser l’invasion américaine sur la base du comportement des chrétiens il y a 2000 ans? De même, lors de la tuerie perpétrée en Norvège le 22 juillet 2011 par Anders Breivik, qui affirmait agir pour préserver la chrétienté face au multiculturalisme, a-t-on cherché les raisons de son acte dans le christianisme ou la Bible ?

    L’écrivain arabe, Aziz Al-Azmeh, affirmait que «la compréhension des phénomènes politiques islamiques nécessite l’équipement normal des sciences sociales et humaines, et non leur déni”. Ne pas s’atteler à cette tâche, c’est nous mener vers une essentialisation de « l’Autre », en l’occurrence aujourd’hui « du musulman ».

    Toute religion n’existe en effet pas indépendamment des personnes, de la même manière que Dieu n’existe pas en dehors du domaine de l’action intellectuelle de l’homme. Bien au contraire la religion, comme le pouvoir surnaturel de Dieu, sont une expression mystique populaire des contradictions et des réalités matérielles dont les gens vivent.

    C’est pourquoi il faut tenter de trouver les raisons de ces crimes, sans vouloir les excuser ou les justifier, perpétrés par ces groupes ou personnes et comprendre les motivations qui les ont poussé ou les poussent à agir dans ce sens. Ces raisons ne se trouvent pas en lisant le Coran ou la Bible, mais bien d’abord dans le contexte politique et socio-économique dans lequel se trouvent ces groupes et personnes et aussi dans les dynamiques internationales.

    Les crimes et le parcours des djihadistes sont en effet à bien des égards un reflet des contradictions des politiques interne et externes de l’Etat Français.

    Comment ne pas parler de la violence étatique et policière toujours croissante, particulièrement contre les populations d’origines étrangères et musulmanes. L’Etat français contemporain est un Etat colonial et structurellement raciste qui traite encore très souvent de la même manière et avec les mêmes techniques les populations originaires des anciennes colonies. Dans les prisons, souvent très surchargées et sans réelle stratégie de réhabilitation des détenu-es, presque 70 % des prisonniers sont issus de populations d’ex colonies alors qu’au niveau national elles représentent moins de 10% de la population.

    Au niveau social, les gouvernements successifs n’ont cessé de diminuer les services sociaux de l’Etat et ont appliqué des politiques de libéralisations économiques.  

    Cela a encore renforcé la ghettoïsation des quartiers où vivent les classes populaires en les appauvrissant toujours plus. Ce constat fut même tiré par le très droitier Premier Ministre Manuel Valls qui déclarait que certaines régions avaient été abandonnées par l’Etat et constituaient des Apartheids sociaux, ethniques et territoriaux.

    Enfin il ne faut pas oublier les politiques impérialistes de la France et les nombreuses interventions militaires à l’étranger, particulièrement dans le monde Arabe et la dite « France-Afrique », sans oublier son soutien aux dictatures du Moyen Orient tel que l’Arabie Saoudite ou l’Algérie.

    Au delà de se revendiquer de l’Islam, les assassins de Charlie Hebdo ont en effet dans leurs interviews, vidéos et autres parlé de la souffrance du peuple syrien, iraqien, de l’intervention française au Mali des offenses faites aux populations musulmanes en France et dans le monde, etc…

    Il est nécessaire pour nous, à gauche, de comprendre ce genre d’évènements et/ou groupes et d’analyser de manière matérielle les dynamiques qui les sous-tendent, pour s’attaquer aux réels problèmes des sociétés en général. Lenine dans le texte « L’attitude du Parti des travailleurs à la religion » de mai 1909 écrit que nous, en tant que marxistes, « devons expliquer la source de la foi et de la religion des masses d’une façon matérialiste ». Il poursuivait en affirmant que si l’on ne s’attelait pas à cette tâche, nous n’aurions pas une vision différente des classes bourgeoises, qui accusent les masses d’ignorance pour expliquer le phénomène de la croyance religieuse. Le fondamentalisme religieux n’est en fait que l’expression de cette frustration et non sa source.

    Et c’est pourquoi qu’il faut comprendre les fondamentalismes religieux, quel qu’ils soient, comme des facteurs et raisons modernes et qui trouvent leurs sources dans des phénomènes actuels et non du passé, même si leur propagande fait référence à un passé mystifié.

    La barbarie des assassins de Paris et des groupes comme l’EI et Boko Haram se nourrit en premier lieu des contradictions et les différentes formes d’oppressions de leurs sociétés, mais aussi de la barbarie des Etats occidentaux capitalistes et impérialistes qui ont commis beaucoup plus de victimes que le djihadisme islamique. D’ailleurs, aucune égalité au niveau absolu ne peut égaler la barbarie des Etats occidentaux dans le nombre de victimes qu’ils ont causé à travers le monde. Ce sont des Etats occidentaux qui ont mené des interventions militaires destructives ces dernières décennies par exemple comme en Iraq en 2003, intervention qui a suivi l’embargo meurtrier contre le peuple irakien pendant plus de 10 ans. Ce sont des Etats occidentaux qui apportent leur soutien sans faille aux dictatures sanglantes au Moyen Orient, sans oublier un soutien total à l’Etat colonial et d’Apartheid d’Israel qui opprime depuis plus de 60 ans le peuple palestinien. Que dire des politiques néo-libérales imposées par les Etats occidentaux et les institutions monétaires internationales qui on causé l’appauvrissement de sociétés entières, des déplacements de populations, des famines, etc…

    Nous devons mener une opposition sans merci aux politiques impérialistes des Etats occidentaux qui assassinent et appauvrissent les peuples de nombreuses régions du monde. Nous devons également opposer toutes les formes d’impérialismes internationales et d’impérialisme régionales qui ont tous pour objectifs d’écraser d’autres peuples pour les intérêts politiques de leurs bourgeoisies.

    En même temps, aucune illusion ne doit exister sur les mouvements islamiques réactionnaires et djihadistes, qui dans le passé (entre les années 50 et fin des années 1970) ont reçu le soutien des Etats Occidentaux et des dictatures de la région du Moyen Orient pour affaiblir les mouvements progressistes et nationalistes de la région. Les mouvements islamiques réactionnaires et djihadistes ont suite à la répression et aux échecs des mouvements progressistes et nationalistes du Moyen Orient pu capter les frustrations de certaines tranches des classes populaires, mais ils ne représentent en aucun cas une alternative progressiste ou anti impérialiste, bien au contraire, ce sont des organisations ultra-réactionnaires, anti-démocratiques et anti sociales, certaines comme l’EI sont sans aucun doute des entités totalitaires et meurtrières.  Leurs comportements et attaques sur les forces démocratiques et progressistes durant les processus révolutionnaires témoignent de cette réalité. Ils sont dans une optique de guerre de civilisation et d’imposition autoritaire de leur hégémonie culturelle et religieuse contre une autre et non une perspective d’émancipation et de libération des classes populaires.

    En conclusion et en plus de s’opposer aux politiques impérialistes des Etats occidentaux, la tâche de la gauche où qu’elle soit est de reconstruire un mouvement progressiste et démocratique large, qui permet l’unité et l’indépendance des classes populaires et travailleuses sans distinction ethnique, communautaires et autres qui est la seule voie pour la libération et l’émancipation des classes populaires. Cela ne signifie pas qu’il faut simplement avoir une approche « économiste », les luttes ouvrières ne seront pas suffisantes pour unir les classes populaires. Bien sûr que la gauche radicale doit être à la tête de la lutte contre les politiques d’austérité et néolibérales, mais la gauche radicale doit être le champion de la défense des droits démocratiques dans leur ensemble que ce soit dans la liberté d’expression ou la lutte contre le racisme. L’islamophobie, comme les autres formes du racisme, est un instrument des classes dirigeantes pour diviser les classes populaires et les détourner de leur réel ennemi: la classe bourgeoise.

    Pour construire un mouvement progressiste, nous devons comprendre comment, au-delà des dynamiques capitalistes, les questions de genre, de discrimination basée sur la religion et/ou sur la « race » influencent à la fois la structure et les dynamiques de nos sociétés et de nos lieux de travail et les processus de développement de la conscience. Il ne s’agit pas de savoir si les classes passent avant le genre/ race/ religion ou l’inverse, mais comment ces éléments interviennent ensemble dans la production et les relations de pouvoir capitalistes, qui se traduisent par une réalité complexe.

    Les discriminations basées sur la race, le genre, les conditions économiques, les oppressions culturelles et idéologiques ne doivent pas être sous-estimées, au risque de perdre de vue la complexité de la tâche, au moment de construire un mouvement progressiste comprenant des travailleurs et travailleuses de tous les horizons. L’absence de prise en compte de ces intersections dessert la volonté d’unir les classes populaires et le projet politique visant la transformation radicale de la société.

    A nous de nous attaquer aux sources des problèmes (le capitalisme, l’impérialisme et le racisme, etc…) et donc des politiques des Etats capitalistes occidentaux et autres, pour réellement couper l’herbe sous les pieds des forces ultra réactionnaires et les faire disparaître.

    Joseph Daher

    [1] pour plus d’information voir: http://www.npa2009.org/idees/lirak-une-souffrance-continue-aux-causes-multiples

    https://syriafreedomforever.wordpress.com/2015/02/03/limpasse-essentialiste/

  • Bahrein, les opposants déchus de leur nationalité (Courrier international)

    Soixante-douze personnes ont été déchues de la nationalité bahreïnie ce 31 janvier 2015. Les autorités font valoir la lutte contre le terrorisme sunnite, mais d'après l'opposition chiite, cette mesure vise en réalité principalement des militants politiques.
     
    Khalil Marzouq, dirigeant de la principale organisation chiite du pays, Al-Wefaq, lors de son interview sur la chaîne Al-Arab,le 1er février. 
     
    Les autorités bahreïnies ont annoncé le 31 janvier la déchéance de nationalité de 72 personnes, accusées d'avoir "nui aux intérêt du royaume" et, pour certaines, de combattre aux côtés de l'organisation Etat islamique en Syrie et en Irak. Or, selon l'opposition, 50 d'entre elles au moins sont de simples militants politiques, rapporte le quotidien bahreini Al-Wasat.

    "Selon une nouvelle loi, une telle décision peut désormais se prendre sans passer par les juges", commente Khalil Marzouq, dirigeant de la principale organisation chiite du pays, Al-Wefaq. Il a pu s'exprimer hier 1er février sur la toute nouvelle chaîne d'information Al-Arab, propriété d'un prince saoudien mais installée à Bahreïn. Peu de temps après l'interview, la chaîne a cessé d'émettre. Elle aurait subi des pressions de la part des Saoudiens, indéfectibles alliés du régime sunnite de Bahreïn, expliquent certains. D'autres estiment qu'il s'agit simplement d'une opération de communication visant à faire parler de la chaîne.

    Quoi qu'il en soit, selon le blogueur Ali Abdulemam, lui-même visé par la condamnation, les autorités cherchent tout simplement à étouffer, par tous les moyens, la contestation de la rue qui n'a pas cessé depuis quatre ans.
     
    Courrier international 2 février 2015
     
    http://www.courrierinternational.com/article/2015/02/02/des-opposants-dechus-de-leur-nationalite

  • Le Front populaire de Tunisie sur les élections en Grèce (ESSF)

    Syria vient de remporter une victoire historique le 25 janvier 2015, lors des élections législatives en Grèce, Ce pays a vécu, durant les dernières années, dans des conditions économiques et sociales difficiles, conduisant à une crise politique grave, qui a fini par balayer la droite libérale au gouvernement ainsi que ses politiques antipopulaires.

    A cette occasion, le Front Populaire de Tunisie tient à féliciter le peuple grec, ainsi que sa nouvelle direction. Il considère que les résultats de ces élections sont la confirmation de :

    - La faillite des directives et des recettes des Institutions financières internationales, de la Banque centrale européenne et de la Commission européenne (Troïka), imposées et appliquées contre le peuple grec ;

    - Le choix du peuple grec d’élire une nouvelle direction politique, celle qui a présenté un programme d’urgence pour le salut national. Un programme qui s’appuie sur une économie nationale, dans laquelle l’Etat joue un rôle important et décide, de manière urgente, d’un train de mesures au bénéfice des couches sociales les plus faibles, afin de garantir leurs droits à la gratuité des soins médicaux, ainsi que le traitement de la pauvreté et du chômage qui accablent le quart de la population grecque ;

    - La réussite du peuple grec à rompre avec les politiques économiques oppressives, apporte la preuve, de l’intérieur même de l’Europe, de la faillite du modèle basé sur l’endettement, la dépendance économique et l’aggravation de l’appauvrissement des classes opprimées s’appuyant sur des mesures d’austérité. Cette réussite prouve aussi que des alternatives, capables d’améliorer les conditions d’existences de classes populaires, existent bel et bien ;

    - L’importance de l’alliance des forces progressistes et sociales dans un front politique unique, afin d’assumer leurs responsabilités devant le peuple et devant l’histoire. En effet, chaque fois que ces forces ont affirmé leur volonté politique d’union ainsi que l’union de leur peuple, ils ont décuplé leur force et, par là même, leur capacité à faire face, partout, aux plans et aux outils capitalistes néolibéraux ;

    - Enfin, ce qui vient d’arriver en Grèce a valeur de leçon pour tous les peuples d’Europe obligés, par leur gouvernement, à supporter les répercussions des crises dont ils ne sont pas responsables. Il a aussi valeur de leçon pour notre peuple en Tunisie, dont les gouvernements successifs, qui sont arrivés au pouvoir après la chute de Ben Ali le 14 janvier 2011, n’ont pas cessé de le tromper, tout en lui imposant des politiques économiques et sociales qui vont à l’encontre de ses intérêts, en affirmant qu’elles sont une fatalité.

    Tunis, le 26 janvier 2015

    Communiqué du
    Front populaire (Tunisie)

    * Traduit de l’arabe par Fathi Chamkhi

    http://www.europe-solidaire.org/spip.php?article34229

  • Paris avec In Salah

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  • Liban: La guerre contre les réfugié(e)s syrien(ne)s ou la continuation de la guerre de classe (LCR.b)

    A chaque fois qu’on formule des expressions telles que « le prestige de l’Etat », « l’armée est une ligne rouge », et la  « préservation de l’institution militaire », ou autres phrases ronflantes que serinent à l’envi les politiciens des pivots confessionnels de l’intérieur des retranchement du pouvoir libanais, ou de l’extérieur, je sais alors que l’Etat libanais mène par le biais de l’armée une nouvelle guerre de classe contre les réfugiés, les pauvres, les travailleurs, hommes ou femmes.

    Notons ici que l’institution militaire de la classe dirigeante et de l’Etat libanais ne se limite pas à la police et l’armée, -mais s’étend aux milices et aux nervis de quartiers qui composent l’appareil « local » du pouvoir libanais et qui assument la tâche de maintenir « les populations » dans des compartiments confessionnels, et sous le prestige de directions « populaires-locales » qui ont étendu leur pouvoir aux quartiers.

    Mais cette institution militaire à travers ses branches, officielles ou non, joue un autre rôle encore plus féroce.

    C’est l’oppression et la torture des réfugié(e)s, des travailleur(se)s étrange(ère)s. Avec l’intensification de leur main de fer, elle arrête, tue et détruit des camps de réfugiés, se montre gentille devant les armes miliciennes et confessionnelles sophistiquées, de Saïda à Beyrouth et Tripoli, la Bekaa et le Sud. Cette institution militaire n’a joué qu’un rôle d’officier de la Sûreté politico-confessionnelle. Elle n’a jamais défendu le peuple et les gens face aux massacres confessionnels, mais elle s’y est adaptée et s’est transformée elle aussi en milices soutenant des directions confessionnelles contre d’autres, comme c’est arrivé pendant la guerre civile. Avec le retour de l’ère de « la paix », après l’accord de Taïef, les milices combattantes ont été intégrées dans l’armée « nationale » et sont devenues un appareil parmi d’autres appareils de contention de classe et confessionnelle, de par les quotas confessionnels à l’embauche, pour les promotions ou autres. Elles ont été les premières à exécuter les décisions du régime du Bath au Liban, où elles ont eu le privilège et l’orgueil de porter ses dogmes.

    Cette institution militaire a toujours été le bras droit des guerres du pouvoir libanais contre les réfugiés, sous le couvert de « lutte nationale » ou de « lutte anti terroriste ».

    Dans les deux cas cet appareil ne s’attaque pas à l’occupation israélienne par exemple, ni aux milices confessionnelles armées, mais elle torture, contraint à la fuite et frappe les réfugié(e)s, les pauvres. Nous l’avons vu au camp de Nahr El Bared en 2007 et nous le voyons aujourd’hui à Ersal : c’est une nouvelle version de la seule guerre qui soit, à savoir celle du régime contre les réfugiés.

    Cette année-là, les factions palestiniennes ont proposé leur aide à la direction militaire pour se débarrasser de Fath Al Islam dans le camp de Nhar El Bared, sans recourir à la destruction du camp. Mais l’armée à décliné l’offre de ceux qui connaissent le camp pierre par pierre, et le bombardement ne s’est calmé qu’après la destruction totale du camp et le martyre de nombreux civils palestiniens et de soldats libanais au cours de la bataille.

    En 2008, l’armée libanaise en collaboration avec des milices du 8 mars à Beyrouth et d’autres régions a contribué au rééquilibrage « militaire-confessionnel » interne dans toutes les régions du Liban, notamment à Beyrouth et à la « pacification » de la situation entre forces s’entre égorgeant, et bien sûr aucun homme armé des partis au pouvoir n’a été arrêté.

    Nous ne pouvons pas oublier non plus 2004, lorsque cette institution nationale s’était opposée à la grève générale d’alors, tuant cinq travailleurs dans le quartier de Salam. Elle avait réprimé elle-même les mouvements revendiquant l’électricité et avait tué des citoyens pendant des années en menant la répression de ces mouvements.

    L’histoire libanaise contemporaine a vu plusieurs exemples de ce qu’ont enduré les Palestiniens au Liban par exemple, ou les Libanais eux-mêmes, avant, pendant et après la guerre civile, aux mains des institutions militaire et sécuritaire libanaises. A qui l’aurait oublié, nous rappelons la grève de l’usine de Gandour, et la manifestation au cours de laquelle a été tué Maarouf Saad à Saïda, ainsi que la guerre d’annihilation entre Aoun et Geagea, lorsque ce qui restait de l’armée s’est réparti entre les deux camps.

    Cette institution dans son dogme, identifie le nationalisme par l’embrigadement confessionnel, en d’autres termes son rôle reste confiné à la sphère de l’équilibre militaire politico-confessionnel, en uniforme « national » et il n’est pas étonnant que la seule institution considérée comme « nationale » au Liban soit l’institution militaire et de sécurité, soit l’institution dont le premier pilier est la violence organisée.

    Dans la logique du système confessionnel libanais, le gouvernement national est l’antithèse du confessionnalisme, mais dans la réalité il n’est qu’un pouvoir sécuritaire et dans la plupart des cas une déclaration de guerre de classe, permanente, à certains moments contre les travailleurs et les mouvements sociaux, qui menaceraient la paix sociale, et à d’autres moments, contre les réfugié(e)s au prétexte de la construction d’une identité « libanaise » qui les sauverait de la crise sociale économique et politique du régime, et le meilleur moyen pour la bourgeoisie, où qu’elle se trouve, pour fuir sa crise, c’est le racisme et le fascisme.

    C’est exactement ce qui se passe aujourd’hui. Du fait de l’absence de volonté de pans du pouvoir politique de trouver une solution à la question des otages de façon politique, ou même militaire,- ce qui a été fait maintes fois avec l’ennemi sioniste ou les milices libanaises-, le pouvoir politique et l’institution militaire transforment leur combat en affrontement contre les réfugiés syriens, pour fuir leur impuissance. Bien que les familles des soldats enlevés eux-mêmes aient répété plusieurs fois qu’il n’y avait pas de rapport entre les réfugiés syriens et la question du kidnapping. Et comment pourrait-il y avoir un rapport puisqu’ils sont eux-mêmes les premières victimes de Daech et de leurs actes terroristes.

    Quant à ce racisme, bien des plumes tentent de le justifier par l’existence de causes objectives contingentes, comme la question du gagne-pain et de la concurrence pour les emplois et autres, ou encore l’héritage de la relation libano-syrienne sous le protectorat.

    Mais, et pendant la période du pouvoir du Baath au Liban, la direction militaire fut de façon permanente le bras droit de l’exécution de toutes les exigences de l’autorité d’Assad. Ses commandants et ses troupes ont été formées pour porter et défendre la « relation stratégique avec la Syrie d’Assad », c’est-à-dire l’alliance entre le régime confessionnel libanais et le régime tyrannique du Baath.

    Dans les combats actuels d’Ersal à la suite de l’enlèvement des soldats libanais par Daech et En-Nosra, l’institution militaire libanaise a mis le feu aux camps de réfugiés, harcèle et arrête les réfugiés syriens dans tout le Liban, sous l’égide d’un discours raciste et haineux qui considère tout Syrien comme « daechiste » ;

    La fabrication de cette relation entre Daech et les réfugiés syriens n’est que racisme, direct et clair, qui se refugie derrière « la lutte contre Daech » pour combattre les réfugiés syriens au Liban.

    Aujourd’hui comme hier, le pouvoir libanais procède à une catégorisation raciste claire sous couvert de lutte anti-terroriste, feignant d’oublier et d’ignorer la réalité que Daech ou En-Nosra ne sont ni l’une ni l’autre des organisations syriennes, de même que Fath Al Islam n’était pas une organisation palestinienne, mais il s’agit d’organisations confessionnelles tekfiries transnationales, parrainées par les forces régionales et locales, qui vont des classes dirigeantes libanaise ou syrienne aux monarchies et émirats du Golfe.

    Au lieu de riposter à Daech et En-Nosra, qui ont enlevé les soldats, nous les voyons appuyer et maintenir l’équilibre confessionnel et militaire et régional. Les exigences de « nationalisme libanais », soit ce prestige s’enorgueillissant au rythme des bottes qui écrasent sont les conditions sine qua non de la préservation de ce système à la botte de l’institution militaire.

    Dans les années qui ont suivi 1948, c’est-à-dire dans la première phase d’exil palestinien au Liban, résultant de l’expansion de l’occupation sioniste en Palestine, le pouvoir libanais avait transféré les camps de réfugiés du Sud au Centre et dans la Bekaa et à Alep (le convoi d’Alep s’est arrêté au Nord et s’est stabilisé au camp de Nahr Al Bared), et avait administré les camps de façon sécuritaire directe par la police et l’armée. Avec la création du deuxième bureau à l’époque du général président Fouad Shehab, la main de fer sécuritaire et du renseignement s’est accrue contre les Palestiniens, et parmi les plus importantes « réalisations »  du deuxième bureau d’alors, la mort en martyr du militant Jalal Kaoush sous la torture dans son cachot.

    Il n’aurait pas été nécessaire de parler ne serait-ce qu’une journée de « l’importance » du maintien du prestige de l’Etat si l’armée s’était engagée dans une confrontation contre l’occupation israélienne par exemple, dans le peu de fois où cela a été le cas, mais cela aurait alors salué son héroïsme, mais ce prestige ainsi que la nécessité de le préserver sont d’actualité seulement lorsque l’institution militaire mène une guerre de classe contre les réfugié(e)s, les pauvres et les travailleur(euse)s.

    Les récents événements d’Ersal qui ont conduit à l’enlèvement de soldats libanais par Daesh et En-Nosra, sont le nouvel « argument » utilisé par la plupart des forces politiques libanaises pour réhabiliter leur racisme préexistant, tenter d’en étendre la portée et d’embrigader toute la société dans une nouvelle guerre contre les réfugié(e)s.

    Ce racisme n’est pas étonnant de la part de l’Etat libanais, ou de ses partis, car la plupart des partis qui composent le pouvoir en place, ont construit leur légitimité « nouvelle » sur les ruines des massacres et des guerres sociales interminables contre les réfugiés palestiniens, et ce racisme a été couronné par l’accord de Taïef qui a prolongé et fixé les mesures arbitraires et les politiques de punition collective contre les Palestiniens au Liban.

    Aujourd’hui, le régime libanais commence une autre guerre contre les réfugiés syriens au Liban, qui va des politiques d’expulsion, d’annulation des statuts de réfugié, d’incendie des camps et d’arrestations arbitraires, d’humiliations par les fouilles, pour en finir par les passages à tabac, la torture et autres méthodes violentes et arbitraires.

    En outre, une guerre économique est menée contre eux par l’augmentation des  loyers, sans parler de la répétition hystérique de ce que « Les Syriens volent le pain libanais », l’obligation faite aux réfugiés syriens de payer le prix de leur assignation à résidence dans des tentes de réfugiés aux propriétaires des terrains, aux intermédiaires et aux courtiers de l’asile qui volent leurs ressources puis les chassent de leurs abris, et autres moyens détournés qui font que dans la plupart de cas, la condition du réfugié est plus difficile que la guerre elle-même.

    Certains pourraient s’étonner de l’emploi du terme « racisme » ici, puisque les Syrien(ne)s et les Libanais(e)s ne sont pas des éléments différents, et certains renonceront à utiliser ce terme ou tentent de le justifier comme une « une réaction naturelle » dans la situation que nous vivons. Le racisme et le confessionnalisme ne sont pas nouveaux pour la classe au pouvoir et l’Etat libanais tout entier. La « première république » qui a vu le jour et s’est développée dans le giron du mandat français, s’est édifiée sur l’héritage des massacres confessionnels perpétrées par la féodalité libanaise lors de la guerre de 1860 contre les paysans, qui a été encouragée par l’Empire ottoman et dont a profité le colonialisme européen, pour construire un équilibre confessionnel et géopolitique en Syrie et au Liban, qui a garanti à tous les deux une domination concurrentielle dans l’espace libano-syrien. Le grand Liban fut l’incarnation réelle du confessionnalisme fabriqué par la féodalité libanaise lors de cette guerre.

    Tandis que la plupart des dirigeants politiques libanais,-indépendamment de leur position au sein de la répartition libanaise-, en appellent à expulser de larges pans des réfugiés syriens, nombre de municipalités ont commencé en retour à expulser les réfugiés syriens de leurs localités.

    En même temps, les milices libanaises et leurs nervis dans les quartiers lancent des menaces et les attaquent, frappent et kidnappent les réfugiés et les travailleurs syriens dans les régions où ils sont présents, réalisant ainsi (de façon concrète), les espoirs de leurs dirigeants en se débarrassant des réfugiés syriens au Liban.

    En outre, sous le parapluie et sous couvert « national » l’institution militaire libanaise dans toutes ses  branches, harcèle, fait fuir et frappe des milliers de réfugiés syriens lors de raids dans les camps, en les incendiant, en les détruisant, tout cela pour « lutter contre le terrorisme ». L’armée est le premier et le dernier ressort de la couverture « nationale » du régime confessionnel libanais.

    Avec l’institution militaire, la violence confessionnelle et raciste et de classe menée par le régime se transforme en violence « laïque » ornée dans le passé et chaque jour de slogans tels que « 100% Libanais » et « Armée, peuple et résistance » et  « Gloire à tes bottes » et autre expressions de la psychose de la soldatesque et du chauvinisme « national » et de la soumission totale face aux scènes d’écrasement menées par l’armée nationale contre les réfugié(e)s syrien(ne)s, comme elle l’a fait précédemment contre les Palestinien(ne)s et contre les Libanais(e)s pendant la guerre civile. Ces scènes d’écrasement ne diffèrent guère de celle qu’elle a pratiquée et que pratique la soldatesque du régime syrien indifféremment contre les Libanais(e)s, les Syrien(ne)s et les Palestinien(ne)s. La soldatesque n’a qu’une seule nationalité, l’identité d’«écrasement», le dispositif à travers lequel on impose et on applique cette violence de classe, confessionnelle et raciste.

    Depuis l’Egypte qui est l’un des plus importants centres de la contre-révolution jusqu’au Golfe à l’est et à l’Océan atlantique à l’ouest, en passant et en arrivant en Syrie et au Liban, le racisme a été une arme aux mains des régimes et ce qu’endurent les travailleurs étrangers dans les monarchies du pétrole ne diffère en rien des souffrances des travailleurs africains en Tunisie ou en Liban, et ce à quoi sont exposés les Amazigh au nord de l’Afrique n’est pas différent de la situation des Kurdes sous le régime du Baath, irakien et syrien. Actuellement, alors que la révolution régresse, ou s’éteint par les épées de Daech, les fusées de la coalition internationale et les bottes de l’armée, il faut, alors que se coalisent les régimes dictatoriaux arabes et leurs parrains impérialistes mondiaux ou régionaux, former une alliance révolutionnaire des peuples insurgés pour s’opposer à ces régimes, en dépassant l’illusion des divisions nationales, de frontière et identitaires, vers un mouvement solidaire pour faire face aux régimes de la répression et de l’oppression.

    (Le texte ci-dessus est le dernier article de Bassem Chit. Notre camarade y mettait la touche finale dans la nuit du 30 septembre, quelques heures avant sa mort. (Publié par le comité de rédaction)

    (Traduction de l’arabe, Luiza Toscane, Rafik Khalfaoui)

    lien vers l’article en arabe : http://www.al-manshour.org/node/603

    http://www.lcr-lagauche.org/liban-la-guerre-contre-les-refugiees-syriennes-ou-la-continuation-de-la-guerre-de-classe/

  • Nancy Palestine

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