Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Histoire - Page 11

  • Saint Brieuc: Projection-débat de "This is my land" ( Ujfp)

    Un film de Tamara Erde.

    Soirée organisée par l’Association France-Palestine-Solidarité Saint-Brieuc.

    Et si le conflit israélo-palestinien était surtout une question d’éducation ?

    This is my land observe la manière dont on enseigne l’histoire dans les écoles (publiques ou religieuses) d’Israël et de Palestine, suivi d’un débat avec la réalisatrice et Daniel Lévyne (Union Juive Française pour la Paix).

    Tamara Erde est une réalisatrice franco-israélienne de 34 ans, qui vit actuellement à Paris. C’est lors de son service militaire dans l’armée israélienne qu’elle découvre la Palestine.

    Confrontée à la réalité du terrain, elle s’est interrogée sur ces deux peuples qui coexistent et particulièrement sur l’histoire palestinienne totalement absente de son apprentissage scolaire. Alors elle a voulu savoir comment l’histoire est aujourd’hui enseignée dans les écoles israéliennes et palestiniennes, quel regard les enfants israéliens et palestiniens portent sur le conflit.

    Portraits d’enseignants, enthousiastes ou révoltés, rencontres avec des enfants désenchantés : le film révèle les murs que l’on dresse dans la tête des jeunes générations au moyen de l’éducation.

    Contact : afps22.stbrieuc@gmail.com

    Rendez-vous

    • À Saint-Brieuc (22) , projection-débat du film de Tamara Erde "This is my (...) 
      Le mercredi 27 avril 2016 à 20h00
      Cinéma Club 6

      40 Boulevard Clemenceau
      22000 Saint-Brieuc

    http://www.ujfp.org/spip.php?article4833

  • RASSEMBLEMENT pour Ali Mécili (Algeria Watch)

    mecili.jpg

    À l’initiative de sa famille et de ses amis

    Samedi 9 avril 2016 à 14h30
    Cimetière du Père Lachaise – Entrée principale

     

    Le rassemblement que nous organisons cette année à la mémoire d'Ali Mécili revêt un caractère particulier.

    La disparition de Hocine Aït Ahmed au mois de décembre dernier est une tragédie pour nous, et pour tout le peuple algérien. Oui, une tragédie, à la mesure de l'homme et du combattant qu'il fut.

    Hocine a toujours été à nos côtés dans notre lutte pour obtenir la vérité et la justice dans l'assassinat d'Ali par les services secrets algériens, le 7 avril 1987. Par sa présence fidèle et attentive, il nous a aidés à supporter son absence et aujourd'hui, nous sommes à nouveau orphelins. Leur amitié était profonde. Ils partageaient les mêmes valeurs et le même combat. Ils représentaient ce qu'il y a de plus noble dans la politique et un véritable espoir pour l'Algérie.

    Leurs voix se sont tues, mais leur idéal d'une Algérie démocratique et plurielle est bien vivant. Il appartient aux Algériens de poursuivre le combat qui a uni ces deux hommes d'exception.
    Nous nous retrouverons ce 9 avril pour nous recueillir et leur rendre hommage.

    Paris le 1er avril 2016

    Annie Mécili

    http://www.algeria-watch.org/fr/mecili/rassemblement

    Pour en savoir plus:

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Ali-André-Mecili

  • "Un maillot pour l'Algérie": l'aventure de la première équipe de foot algérienne en BD (France 24)

    Une bande dessinée revient sur l'incroyable épopée de la première équipe de football algérienne, celle du FLN. En avril 1958, une dizaine de joueurs évoluant en France quittent le pays clandestinement pour créer leur sélection.

    Lundi 14 avril 1958. Quatre hommes roulent vers la Suisse depuis la France. Au poste frontière, les douaniers n’en croient pas leurs yeux. À l’intérieur de la voiture, ils découvrent quatre stars du championnat français de football, les Algériens Abdelhamid Bouchouk du Toulouse FC, Abdelhamid Kermali de l’Olympique Lyonnais, Rachid Mekhloufi de Saint-Étienne et Mokhtar Arribi du RC Lens. Après leur avoir fait signer quelques autographes, les hommes au képi les laissent tranquillement passer.

    Ils ne découvriront que quelques minutes plus tard qu’ils viennent de commettre une sacrée bévue. Ces quatre joueurs ont en effet quitté clandestinement la France pour fonder la toute première équipe de football d’Algérie. L'histoire, qui a tout d’un bon scénario, a inspiré les auteurs de bande dessinée Galic et Kris et le dessinateur Rey. Soixante ans après les faits, ils la sortent de l'oubli en publiant "Un maillot pour l'Algérie". "En Algérie, cette histoire est devenue légendaire, mais en France, elle n’est pas connue. C’est anormal. Moi-même, je n’en avais jamais entendu parler il y a encore quelques années", explique Christophe Goret, dit Kris.

    "Ils ont pris des risques fous"

    Tout débute à l’automne 1957 , lorsque des membres du Front de libération nationale (FLN) ont l’idée de promouvoir l’indépendance de l’Algérie en bâtissant une équipe de foot. Ils prennent alors contact avec plusieurs joueurs algériens professionnels en France. Certains d’entre eux, comme Mustapha Zitouni et Rachid Mekhloufi sont déjà de grands noms. À l’époque, ils sont même présélectionnés pour jouer avec les Bleus au Mondial 1958 organisé en Suède. Ils décident pourtant de tout plaquer du jour au lendemain pour porter le maillot vert. "Ils ont pris des risques fous, car certains d’entre eux étaient en période de service militaire. Ils étaient considérés comme des déserteurs, des traîtres. Ils ont aussi été hyper courageux, car ils ont tout abandonné : un certain confort, une carrière. Ils se sont séparés de leurs proches, parfois même de leur famille au nom d’un idéal et pour des valeurs, le droit à la liberté", raconte avec beaucoup d’admiration Bertrand Galic, le second scénariste.

    La bande dessinée revient sur la rocambolesque épopée de ces "fellaghas au ballon rond" de 1958 à la fin de la guerre. Après leur fuite, ils trouvent refuge en Tunisie, où le président Habib Bourguiba soutient la lutte algérienne. Tunis devient alors le camp de base de ces "ambassadeurs en crampons" de l'Algérie indépendante. Malgré la pression de la Fifa, qui ne veut pas reconnaitre leur équipe, ils réussissent à jouer contre de nombreux clubs européens et asiatiques. Au total, avec très peu de moyens, ils partent en tournée sur plusieurs continents et disputent 83 rencontres, totalisant 57 victoires et 14 nuls.

    En France, après un vif engouement médiatique lors de leur spectaculaire échappée, l’intérêt finit par retomber. "La Coupe du monde 1958 en Suède a un peu occulté les événements algériens. Le parcours incroyable des Bleus de Fontaine et Kopa, qui ont été jusqu’en demi-finale où ils ont été battus par le Brésil de Pelé 5 buts à 2 faisait les gros titres", estime Galic.

    Pour Kris, le traumatisme laissé par la guerre d’Algérie explique également l’effacement du "onze de l’indépendance" de notre mémoire : "Ce n’est pas une histoire qui est très glorieuse pour la France. Ce sont quand même 12 footballeurs qui vont rejoindre des ‘terroristes’. Après le scandale du départ, on a décidé de mettre notre mouchoir dessus et de l’oublier alors que cette histoire est constitutive de l’identité algérienne, mais aussi de celles des Algériens en France. On ne peut pas comprendre Zidane, mais aussi ‘la France Black Blanc Beur’, si on n’a pas ce recul historique sur ces événements".

    "Une histoire de réconciliation"

    Le sport, et le football tout particulièrement, est une clé importante si l’on veut étudier les relations franco-algériennes depuis 60 ans, estime Kris. En 1998, la victoire de la France en Coupe du Monde grâce aux deux buts de Zinedine Zidane, fils d’immigrés algériens, est fêtée des deux côtés de la Méditerranée. Trois ans plus tard, au stade de France, la rencontre France-Algérie, marquée par les sifflets contre la Marseillaise et interrompue après l'envahissement du terrain, cristallise encore une fois toutes les passions. Dans cet amour-haine entre les deux pays, le ballon rond n’est jamais bien loin.

    "Mais dans un ‘Maillot pour l’Algérie', c’est avant tout une histoire de réconciliation. Il faut savoir que les joueurs de l’équipe de France n’en ont jamais voulu à leurs coéquipiers algériens d’être partis. Après la guerre, Rachid Mekhloufi est rapidement revenu jouer dans le championnat français et il est redevenu l’idole de Saint-Étienne", insiste Kris. Avec leur BD, les deux auteurs espèrent toucher le plus grand nombre et surtout faire découvrir aux plus jeunes ce pan méconnu de notre passé commun : "C’est un livre qui apaise les relations franco-algériennes. J’aimerais que les lecteurs le prennent comme tel, car c’est aussi leur histoire, une histoire française".  Stéphanie TROUILLARD 02/04/2016

    http://www.france24.com/fr/maillot-algerie-bande-dessinee-football

  • Syrie. «La reconquête de Palmyre» et «les mérites» de Bachar el-Assad (AL'Encontre.ch)

    Maurice Sartre

    Maurice Sartre

    Entretien avec Maurice Sartre, historien

    Les médias diffusent des «images» sur la «reconquête» de Palmyre par la dite armée de Bachar el-Assad. Tout cela présenté comme une sauvegarde du «patrimoine de l’humanité» grâce à l’armée du clan Assad face aux criminels (effectifs) de Daech. Si ce n’est que Bachar et sa clique ne peuvent être rangés dans une autre catégorie de massacreurs que Daech, à la différence qu’ils sévissent depuis plus longtemps. Tout cela participe de la revalorisation de Bachar dans le contexte des dites «négociations de Genève».

    • Nombreux sont ceux qui, depuis mars 2011, ont sous-estimé la détermination de la clique de truands au pouvoir à Damas – dans une Syrie de plus en plus privatisée dans les années antérieures – de s’agripper aux structures de son «empire». Poutine, ses avions, ses hélicoptères de combat et leurs bombardements, ainsi que ses troupes «spécialisées» – avec l’expertise acquise en Tchétchénie – ont certes été d’une aide particulière pour lui permettre de refaire surface avec plus de force, depuis septembre 2015. Mais Bachar et son cercle de malfaiteurs disposent aussi de la carte iranienne: le duo Ali Kahmenei-Hassan Rohani et, avant tout, la structure militaire du «Corps des gardiens de la révolution» (en abrégé: Pasdaran). Bachar ne dépend pas du seul Poutine. Certes Poutine et sa garde militaire ont su utiliser la faillite des Etats-Unis dans la région pour y remettre leurs bottes ainsi que sur la scène diplomatique internationale.

    Toutefois, le marasme économique d’ampleur régnant en Russie, qui s’accompagne d’une crise sociale s’exprimant sous diverses formes – et pas seulement en Asie centrale où ses traits nationaux-religieux sont invoqués pour justifier l’intervention en Syrie, avec la bénédiction ou le silence approbateur de divers impérialismes –, ne fait pas du Kremlin un «acteur» qui puisse jouer un rôle déterminant. De plus, la camarilla Assad peut compter sur le bras armé de l’Iran dans l’espace syrien: le Hezbollah libanais.

    Enfin, comme le disent les diplomates ayant fricoté avec le régime de Damas dans des «négociations»: «il dit 49 fois non et une fois noui». Ce qui ne constitue un «obstacle» que pour ceux – des Etats-Unis à la France en passant par d’autres puissances» – qui ont accepté que dans une prétendue «transition démocratique» l’ascendant des Assad se perpétue. Le gouvernement de Netanyahou ne fait d’ailleurs aucune objection à ce scénario. Car cela le sert. Divers articles de la presse israélienne le constatent et l’analysent.

    • Revenons à la présentation de la «reconquête de Palmyre». Le 26 mars 2016, lors du journal d’informations de 12h30, Antoine Denéchère nous annonce: «Une bonne nouvelle nous parvient depuis la Syrie. La cité antique de Palmyre, patrimoine mondial de l’Humanité, est en passe d’être libérée. L’organisation Etat Islamique subit en effet une offensive importante de l’armée de Bachar el-Assad, appuyée par les Russes.» Puis, il nous prévient que sera interrogé, en direct, en tant qu’invité, l’historien Maurice Sartre, spécialiste de Palmyre.

    Ce dernier va effectuer quelques mises au point face à un journaliste qui puise «ses informations» – pour ne pas dire son savoir – dans on ne sait dans quel battage publicitaire. (Rédaction A l’Encontre)

    *****

    Vous êtes professeur émérite d’histoire ancienne à l’Université de Tours et vous avez coécrit récemment Zénobie, de Palmyre à Rome (Ed. Perrin, 2014). Est-ce que vous avez des informations sur la libération de Palmyre, est-ce que c’est fait?

    51BzzJ+rNqL._SX349_BO1,204,203,200_

    Maurice Sartre: Non, je ne crois pas que c’est fait. Les dernières informations font état de combats qui ont encore lieu et il semblerait – et là je suis comme tout le monde, je ne suis pas à Palmyre – que les troupes de Daech se soient retranchées précisément dans la ville antique. Ce qui modère en quelque sorte notre joie ou notre plaisir de les voir déguerpir du site antique. Car la menace qui pèse sur la ville reste très grave, très lourde et ce n’est pas les combats au milieu des ruines qui peuvent nous rendre très optimistes. Donc, pour l’instant, il semblerait que l’armée de Bachar tienne la citadelle, la zone des grands hôtels à l’entrée sud-ouest de la ville et une partie au moins de la vallée des tombeaux, c’est-à-dire la zone archéologique à l’ouest de la grande colonnade.

    Maurice Sartre, je rappelle que vous êtes spécialiste de la Syrie antique et notamment de Palmyre, est-ce que, en tant qu’historien justement, vous pouvez dire «merci Bachar el-Assad de nous aider à libérer Palmyre»?

    Sûrement pas. D’abord, parce que Bachar est à l’origine de tout le drame que traverse la Syrie. Il ne faut quand même pas oublier que huit morts sur dix sont le fait de Bachar el-Assad et pas de Daech. Ensuite, le pillage de Palmyre, l’armée de Bachar el-Assad s’y est livré grandement pendant le temps où elle l’occupait et en avait repris le contrôle entre 2012 et 2015. Et, enfin, je n’oublie jamais non plus que c’est Bachar el-Assad qui a livré sans combat Palmyre à Daech, s’abstenant même de bombarder les convois de Daech qui faisaient route de Deir ez-Zor à Palmyre à travers 200 km d’un désert plat comme la main et où il n’y a aucune cachette.

    Ne faisons pas de Bachar le sauveur qu’il faut remercier. Il est le complice de Daech très largement. Il ne faut pas oublier que c’est quand même lui qui leur achète du pétrole et une partie du blé qui font leur fortune et qu’il avait livré la ville de Palmyre sans aucun combat. Cela n’empêche pas que je suis très heureux de voir Daech déguerpir. Mais que le deuxième tyran de la Syrie reprenne le contrôle de Palmyre n’est sûrement pas quelque chose qui est fait pour réjouir qui que ce soit et sûrement pas les Syriens.

    Est-ce que vous vous dites aujourd’hui que vous allez bientôt pouvoir retourner à Palmyre et observer l’étendue des dégâts?

    D’abord, que je retourne à Palmyre est très accessoire. Bien sûr j’aimerais y retourner. Je pense que le directeur général des antiquités qui fait un travail formidable va sans doute très vite faire le bilan des destructions. Bien sûr il ne pourra pas, comme d’habitude, tout dire et notamment révéler l’ampleur des pillages qui avaient eu lieu avant l’arrivée de Daech et qui étaient considérables déjà. Mais peu importe, je crois que pour l’instant ce qui est urgent c’est effectivement de faire le point. Non pas sur ce qu’on connaît déjà, car par les photos aériennes on connaît beaucoup des destructions les plus graves, c’est-à-dire ce qu’a fait Daech et qu’il a mis en scène, ce qui fait que le monde entier est au courant. Cela on le connaît. Mais ce qui est le plus grave, c’est l’étendue des pillages et donc la disparition d’un patrimoine archéologique insoupçonné, inconnu, non identifié même encore par les historiens. Et il est extrêmement important de le faire le plus vite possible avant que l’armée de Bachar el-Assad ne se remette, comme elle l’avait fait avant, à piller le site et à se livrer elle-même au trafic des antiquités. (26 mars 2016, journal d’informations de France culture de 12h30).

    Publié par Alencontre le 27 - mars - 2016
     
  • Guerre d’Algérie : pour réprimer, droite et gauche étaient complices (Lutte Ouvrière)

    7_11_54.jpg

    La décision de François Hollande de commémorer l’anniversaire du 19 mars 1962, date du cessez-le-feu qui marqua la fin de la guerre d’Algérie, a déclenché une polémique bien hypocrite, notamment avec Nicolas Sarkozy.

    Quand Sarkozy reproche aujourd’hui à Hollande d’avoir choisi une date qui marque le début de l’exode des Français d’Algérie et du massacre des harkis, les supplétifs de l’armée française, il ne fait que rappeler l’une des conséquences tragiques de cette guerre que ses prédécesseurs et ceux de Hollande menèrent à tour de rôle. Et quelle date aurait-il fallu choisir dans cette guerre où chaque jour était marqué par une empreinte de sang ? Pendant le long combat du peuple algérien pour son indépendance, la droite et les socialistes menèrent la répression d’un commun accord, se partageant la responsabilité de la mort de centaines de milliers d’Algériens, et de dizaines de milliers de jeunes soldats français.

    C’est la gauche qui commença à intensifier la guerre.

    Lorsque la lutte armée commença à la Toussaint 1954, François Mitterrand, qui à l’époque n’était pas encore socialiste, mais ministre de l’Intérieur appartenant à un petit parti de droite, déclara à l’Assemblée « Tous les moyens seront réunis pour que la force de la nation l’emporte, quelles que puissent être les difficultés et les cruautés de cette tâche. » Ce fut le début d’une répression féroce.

    En mars 1956, le socialiste Guy Mollet se fit voter des pouvoirs spéciaux, avec l’appui du PCF.

    Il s’en servit pour rappeler en Algérie des jeunes du contingent et, l’année suivante, il confia le maintien de l’ordre à Alger au général Massu, couvrant ses actes de torture. À partir de mai 1958, lorsque de Gaulle fut appelé au pouvoir par Guy Mollet, la droite prit le relais de la gauche pour aggraver encore la répression, en Algérie mais aussi en France où la police massacra le 17 octobre 1961 plusieurs centaines de manifestants algériens dans les rues de Paris.

    Face à cette complicité sans faille de la droite et de la gauche, la polémique entre Hollande et Sarkozy, cinquante-quatre ans après les faits, apparaît bien dérisoire.

    Après le cessez-le-feu, de nombreux harkis furent massacrés. L’armée française les avait recrutés pour l’aider dans sa sale guerre. Mais à la différence des parachutistes de Massu ou des troupes françaises, la majorité d’entre eux ne purent pas quitter l’Algérie, et restèrent face à la haine de ceux qu’ils avaient réprimés. C’est souvent le sort que les gouvernements des grandes puissances réservent, quand vient le moment de la défaite, à ceux qui leur ont servi de supplétifs. Quant aux 700 000 Français qui durent quitter l’Algérie, eux aussi furent victimes de cette politique qui avait dressé un mur de haine entre les populations française et arabe d’Algérie.

    Hollande et Sarkozy peuvent bien se chamailler aujourd’hui sur une date de commémoration, cela est sans importance, et ne peut effacer la complicité de leurs prédécesseurs dans la guerre sanglante qu’ils menèrent en Algérie.

    Daniel MESCLA 23 Mars 2016
  • Nouveautés sur Europe Solidaire Sans frontières

    tabou-les-harkis.jpg

     

    • Histoire 3: 1945-1962
      Guerre d’Algérie – Les harkis et la torture : l’impossible débat

      , par DAUM Pierre

      Ce jeudi, au tribunal correctionnel de Paris,Smaïl Boufhal, responsable de l’association Générations Mémoire Harkis, attaque le journaliste Jean-Pierre Elkabbach pour propos injurieux. Ce dernier est accusé d’avoir affirmé que les harkis auraient tous plus ou moins participé à la torture pendant la (...)

    • Histoire & mémoire
      Le 19 mars – Guerre d’Algérie et crimes d’État : l’exigence de la reconnaissance

      , par LE COUR GRANDMAISON Olivier

      19 mars 2016. Pour la première fois, le président de la République devrait commémorer le cessez-le-feu consécutif aux accords d’Evian signés le 18 mars 1962 entre le gouvernement français et le Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA). Après plus de sept ans de guerre, le conflit (...)

     

  • 300 Algériens passés par la guillotine entre 1956 et 1959 (Anti-k)

     

     Au moment où Hollande va commémorer la fin de la guerre coloniale menée par la France en Algérie, en imposant à son peuple un martyr, dont les traces perdurent, il est bon de rappeler quelques faits:  350/400 000 morts, dont 300 guillotinés.

    Précisons que c’est François Mitterrand, alors ministre de «la Justice» qui mit en branle la guillotine pour assassiner 38 algériens et c’est de Gaulle qui mit fin à ces horreurs. Les « socialauds » portent bien leur nom depuis un certain 4 août 1914…

    Que quelqu’un le dise à Mélenchon, idolâtre Mitterrandien. … Mais à la différence d’aujourd’hui, où un Valls affectionne les poses martiales pour parler de « guerre »; durant la guerre d’Algérie, les autorités de « gauche » comme de droite s’évertuaient à ne pas prononcer le mot « guerre »  préférant parler des « événements » d’Algérie. D’où vient se renversement sémantique ?

     Les sacrifiés de la «justice» française

    Ahmed Zahana, dit Zabana, le premier guillotiné en 1956

    Le 19 juin 1956 à 4 heures du matin, le couperet de la guillotine, qui avait auparavant «refusé» par deux fois d’aller jusqu’au bout de la sale besogne qui lui avait été assignée, trancha la tête d’Ahmed Zahana dit Zabana, un des moudjahidine de la première heure et responsable du FLN-ALN de la zone Ouest d’Oran. Cinq minutes plus tard, le temps de mettre le corps de Zabana dans la nacelle prévue à cet effet, un autre Algérien, déserteur de l’armée coloniale pour rejoindre le FLN-ALN, Abdelkader Ferradj, subit le même sort.
     
    Ahmed Zahana
     
    Cette double exécution ne répond nullement à une décision de justice – nul besoin de s’étaler sur la parodie de procès réservée aux militants nationalistes algériens –, mais c’est plutôt une abdication du gouvernement Guy Mollet devant la pression du lobby colonial et des pieds-noirs, qui voulaient coûte que coûte qu’il y ait passage d’Algériens à l’échafaud pour en faire un exemple à ceux qui auraient osé défier la France.
     
    Cette sentence fut prononcée par François Mitterrand, alors ministre de «la Justice» du gouvernement français depuis 1955. «L’Algérie, c’est la France […] ceux qui veulent l’en dissocier seront partout combattus et châtiés»», avait-il annoncé. Il ne tardera pas à «légaliser» cette sentence. Le 17 mars 1956 sont publiées au Journal officiel français les lois 56-268 et 56-269, qui permettent de condamner à mort, sans instruction préalable, les membres du FLN pris les armes à la main. François Mitterrand est l’un des quatre ministres à avoir signé ce texte: «En Algérie, les autorités compétentes pourront […] ordonner la traduction directe, sans instruction préalable, devant un tribunal permanent des forces armées des individus pris en flagrant délit de participation à une action contre les personnes ou les biens […] si ces infractions sont susceptibles d’entraîner la peine capitale lorsqu’elles auront été commises.»

    François Mitterrand l'un des quatre ministres signataires du texte relatif à l'exécution de

    Pourquoi Zabana et Ferradj ?

    Au 19 juin 1956, 150 Algériens étaient déjà condamnés à mort, pour avoir osé porter les armes pour le recouvrement de l’indépendance de leur pays, spoliée en 1830. Pourquoi la justice mitterrandienne, cautionnée par Guy Mollet et Robert Lacoste, a-t-elle jeté son «dévolu» sur Zabana et Ferradj pour inaugurer la longue liste des 300 Algériens envoyés chez le bourreau ? La raison est politique. Pierre Nicolaï, directeur de cabinet de François Mitterrand à l’époque, le confirme : «C’est une décision politique.» Il avait été chargé par Mitterrand de lui trouver les premiers condamnés à exécuter (1). Il avait l’embarras du choix. Voulant réprimer le plus tôt possible la Révolution du peuple algérien, la «justice» mitterrandienne avait, à la veille du 19 juin 1956, condamné 150 Algériens à mort. Quelle rapidité ! Ce chiffre témoigne, on ne peut mieux, de la justice expéditive (2). Les critères lui avaient été signifiés. Il faut que le personnage candidat à l’échafaud doive être «crapule» et «politique». Quel dosage ! Il prit tous les dossiers de recours en grâce rejetés par Mitterrand et choisit Zabana, car étant un militant politique et un «assassin», puisqu’il avait tué le garde-forestier Braun, près de la Mare d’eau (sud d’Oran). Il prit le dossier de Ferradj une «crapule», car c’était un déserteur qui avait rejoint le FLN-ALN et pris part à des embuscades meurtrières. Il ne restait à Mitterrand qu’à fixer la date. Ce sera le 19 juin.

    Zabana portait une prothèse oculaire. Son œil fut perdu quand il s’était tiré une balle dans la tête, le 8 novembre 1954, jour de son arrestation et du démantèlement de son groupe, à Ghar Boudjelida (grotte de la chauve-souris) près de l’ex-Saint-Lucien (actuelle Zahana). De plus, il boitait de la jambe gauche du fait d’une blessure par balle. Les demandes de grâce du muphti d’Alger de l’époque et de l’archevêque d’Alger Mgr Duval subirent une fin de non-recevoir de la part de Robert Lacoste, ne pouvant lui aussi mécontenter le lobby colonial assoiffé de sang, malgré l’escalade de violence que cette exécution pouvait engendrer (3).

    Zabana a été exécuté en dépit du fait que le couperet se soit enrayé par deux fois à quelques centimètres de la nuque du chahid. Ce qui signifie pour les juristes que la sentence a été exécutée. Mais Zabana devait mourir ce jour-là. C’étai son destin.

    Ferradj n’a bénéficié d’aucune clémence, lui aussi. Selon Me Benbraham, invitée d’une émission à la Télévision algérienne, le chahid Ferradj avait flanché les derniers moments. Malgré sa crise de démence, aucune clémence ne lui fut accordée et il marcha tel Zabana digne vers l’échafaud. Malgré les représailles du FLN-ALN, qui avait averti que toute exécution à la guillotine sera suivie d’attentats, les gouvernements français firent fi de cette menace et poursuivirent l’envoi des moudjahidine algériens à la «Veuve».

    Bilan macabre

    François Mitterrand qui se fera le chantre de l’abolition de la peine de mort, à son arrivée à la présidence française en 1981, avait fait passer 38 Algériens par la guillotine. Robert Lacoste, le libéral qui voulait pacifier l’Algérie par des réformes sociales, signa l’arrêt de mort de 27 Algériens. La période la plus terrible vécue par ceux qui attendaient dans le sous-sol de Serkadji fut celle allant du 3 au 12 février 1957, en pleine Bataille d’Alger. Douze moudjahidine furent passés par la guillotine. La «justice» devait appuyer le travail des paras de Massu, venus redorer leur blason terni par la défaite de Diên Biên Phu, au détriment des Algériens. Ils l’ont terni encore plus par leurs pratiques moyenâgeuses et qui dépassaient les atrocités nazies, en instituant la torture et les exécutions sommaires (la corvée de bois) (4).

    En quittant son bureau au ministère de la «Justice», Mitterrand venait de faire de la peine de mort par la guillotine le destin de tout Algérien pris les armes à la main. Les gouvernements ayant succédé à celui de Guy Mollet n’ont pas failli à la règle de conduite : 29 Algériens guillotinés en trois mois sous le gouvernement de Bourgès-Maunoury et 49 durant les six mois de Félix Gaillard.

    Même l’arrivée du général de Gaulle au pouvoir ne fera pas arrêter la machine de la mort. Elle continuera à fonctionner jusqu’en 1959. Après son appel à «la paix des braves», le général, en signe de bonne volonté, décide de suspendre les exécutions et de les commuer en emprisonnement à perpétuité. Les militaires qui «voulaient casser du fellagha» ne l’entendirent pas de cette oreille. Ils continuèrent à exécuter les Algériens mais non pas avec la guillotine, mais en recourant aux pelotons d’exécution (5).

    Cette cruauté et cet acharnement n’avaient en rien entamé la détermination des moudjahidine. Ils s’étaient tous avancés vers l’échafaud sereins, car ils savaient que leur sacrifice n’aurait pas été vain. Ils étaient certains que leur mort signifiait la vie de l’Algérie indépendante.

    La guillotine

    Cette machine de la mort a été créée et mise au point par le chirurgien Antoine Louis, mais elle porte le nom de Joseph Guillotin, qui en a fait la présentation devant le Parlement français, le 28 novembre 1789. Un voleur du nom de Nicolas-Jacques Pelletier sera le premier humain à avoir la tête tranchée par cette machine, un certain 25 avril 1792. Elle sera, en plus du nom de guillotine, appelée la «Veuve», «Louisette» et «Louison».  12 mars 2016

    Par Salim Rebahi – Publié le 01 jui 2012
    1. Entretien accordé par Pierre Nicolaï à Sylvie Thénault, auteur d’une thèse de doctorat sur la Justice dans la guerre d’Algérie, Université Paris X- Nanterre, novembre 1999.
    2. Les chercheurs qui se sont intéressés aux condamnés à mort durant la Révolution algérienne ont été étonnés dans les Archives du ministère de la Justice français des dossiers ne contenant pour la plupart qu’une à trois feuilles. Des dossiers moins épais que ceux des droits communs.
    3. Le FLN-ALN avait annoncé que toute exécution à la guillotine d’un militant sera suivie de représailles. Après l’exécution de Zabana et Ferradj, 49 attentats visèrent des Français âgés entre 18 et 54 ans (le FLN-ALN n’étant pas un assassin de femmes, d’enfants et de vieillards). Sur chaque corps, témoigne Yacef Saâdi, ordre fut donné de laisser une feuille de papier sur laquelle était écrit : «Zabana et Ferradj, vous êtes vengés.»
    4. Les tortionnaires français emmenaient le moudjahid arrêté, non sans lui avoir fait subir les affres des gégènes et autres tortures dans un bois, et lui intimaient l’ordre de partir, lui faisant croire à sa libération. Une fois qu’il se mettait à courir il était abattu d’une rafale dans le dos. Dans le rapport justifiant sa mort, on mettait la mention :«Tentative d’évasion».
    5. Selon Boualem Nedjadi, dans son livre Viva Zabana, édité à l’ANEP en 2006, les premiers à être passés par le peloton d’exécution, sont les chouhada Mohamed Baghdadi dit si Abdelwahab et Ahmed Moulay dit si Abdelhafid. Ils furent fusillés le 1er juillet 1959 à Canastel à 12 km à l’Est d’Oran.

    Prolonger :

    http://www.lepoint.fr/politique/les-guillotines-de-mitterrand-31-08-2001-56908_20.php

    http://www.anti-k.org/2016/03/12/300-algeriens-passes-par-la-guillotine-entre-1956-et-1959/

  • Il y a un siècle, l’impérialisme en débats (Anticapitalisme & Révolution)

     

     
    Nous semblons loin du temps des colonies. Non parce que les puissances occidentales justifient par les droits de l’homme leurs expéditions militaires (déjà la colonisation…). Mais les rapports de force à travers le monde semblent chamboulés avec le déclin de la France et autres pays d’Europe, la montée des « émergents », la « mondialisation ».
     
    Et une guerre entre pays développés, ce spectre qui hantait le début du 19ème siècle, semble aujourd’hui inconcevable. Le concept marxiste d’« impérialisme » forgé alors est-il donc obsolète ? Nous empêche-t-il de penser le monde tel qu’il est ? Nous tentons dans ce dossier, d’un côté, de retrouver le fond des analyses de l’impérialisme au début du 20ème siècle et, d’un autre, d’ausculter quelques grandes lignes d’évolution structurantes de notre époque : l’hégémonie américaine, la puissance nouvelle de la Chine, la mort prétendue de la Françafrique... Car pour agir, il faut comprendre dans quel ordre (et désordre) mondial nous vivons.
     
    « L’impérialisme, stade suprême du capitalisme »
     
    Quel drôle de titre que celui de l’ouvrage de Lénine en 1916 ! Un accent prophétique, voire apocalyptique. Mais nous étions alors justement en pleine apocalypse : en pleine guerre mondiale. Or ce titre se veut une synthèse de toutes les analyses non seulement de Lénine, mais de tout le courant marxiste révolutionnaire d’avant 1914, dont Rosa Luxemburg, dont le « pape du marxisme » d’alors, Karl Kautsky, sur lequel pourtant Lénine tape dur.

     
    Ces marxistes, dès 1900, avaient tenté de saisir la nouveauté de leur époque (exemple à suivre). Pour eux, le partage du monde en colonies et la marche à la guerre n’étaient pas le résultat d’une politique fortuite, ou de l’aventurisme de quelques secteurs des classes dominantes, mais une forme inévitable du capitalisme moderne. « Stade suprême » du capitalisme, l’impérialisme était même la « phase terminale » d’un système « en putréfaction », désormais profondément parasitaire. Non qu’il allait s’effondrer tout seul. Mais ce nouvel impérialisme, qui entraînait le monde vers une guerre terrifiante, ne faisait décidément plus progresser la société. Il était donc « mûr pour être remplacé par un système qui ferait bien mieux : le socialisme ». Dixit Karl Kautsky, dans sa brochure de 1907 « Socialisme et politique coloniale ».
     
    A partir de la fin du 19ème siècle, la libre concurrence capitaliste accouche via l’élimination des entreprises les plus faibles d’oligopoles, des trusts industriels d’un côté et des trusts bancaires de l’autre, qui tendent à fusionner sous la domination du capital financier. S’enchaîne alors l’étape suivante : une interpénétration inédite entre ce capital financier et l’État. Au fond, chacun a profondément besoin de l’autre. Les trusts ont besoin du soutien de l’État et l’État moderne doit s’appuyer sur les forces du capital. Et ça tombe bien : celui-ci est désormais assez riche et puissant pour dominer le personnel politique.
     
    Ce capitalisme peut avoir un certain dynamisme, mais il souffre de « disproportions » permanentes (Kautsky toujours…) : le retard, par rapport à l’industrie, de l’agriculture (ce qui provoque une crise de pénurie des matières premières et des biens alimentaires) et de la consommation (qui provoque une crise de surproduction et de sous-consommation, car le capital, exploitant ses travailleurs, ne peut les payer assez pour développer ses marchés de consommation, sauf à menacer le taux de profit). Ces limites internes au développement du capitalisme conduisent les capitalistes à repousser leurs limites géographiques en cherchant dans les pays agraires matières premières et débouchés commerciaux.
     
    Les exportations britanniques passent de 13 milliards de francs en 1870 à 35 en 1913, les allemandes de 5 à 25 (les françaises sont alors à 15 milliards). Selon Daniel Cohen[1], les exportations de marchandises sont passées de 5,1 % du PIB mondial en 1850 à 9,8 % en 1888, 11,9 % en 1913. Elles s’effondreront avec la guerre et ne retrouveront leur niveau de 1913... qu’en 1973.
     
     
    L’exportation des capitaux, tendance majeure du nouvel impérialisme
     
    Mais le capitalisme des pays développés cherche surtout à exporter des capitaux, car il a une difficulté croissante à trouver des placements rentables dans ses bastions déjà industrialisés. Ainsi selon Suzanne Berger[2], à la veille de 1914, « entre le tiers et le quart de la richesse nationale globale [française], en dehors de la terre et de l’argent destiné à la consommation, était placé à l’étranger (…) Les investissements à l’étranger représentaient en 1907 près de 40 % de la richesse nationale des Britanniques. » Des chiffres considérables ! Avec une nuance importante : Grande-Bretagne et France exportent davantage leurs capitaux que l’Allemagne et les États-Unis, parce qu’elles disposent de grands empires, peut-être, mais surtout parce qu’elles sont moins dynamiques sur leur propre sol.
     
    Or Luxemburg et Kautsky insistent sur les conséquences profondément réactionnaires, dramatiques autant économiquement que politiquement, de cette expansion capitaliste d’alors. Elle accélère la course aux colonies (déjà en elle-même une insulte à la dignité des peuples) car le capital, quand il exporte non seulement ses produits, mais lui-même, par des investissements fixes, des infrastructures ou des prêts à des États étrangers, a d’autant plus besoin de la protection de son État national. Les capitalistes ont peur que leurs investissements n’aient pas une rentabilité garantie, soient récupérés par les classes dominantes des pays d’accueil (qui pourraient même imiter les Japonais, à leur tour s’industrialiser et devenir de nouveaux concurrents), ou pire encore par des puissances capitalistes rivales. D’où leur aspiration à la mise sous tutelle directe ou indirecte par leur État. Sont ainsi découpés en tranches des continents entiers, non seulement l’Afrique directement colonisée, mais aussi de grands empires en déclin, la Turquie, la Chine.
     
    Mais l’exportation des capitaux (à la force des armes) ne pouvait-elle permettre aux « peuples arriérés » de moderniser leurs économies et s’arracher à leur soi-disant « sauvagerie » ? Luxemburg dans L’Accumulation du capital (1912), Kautsky dans de multiples textes, exterminent impitoyablement ces préjugés et espoirs (hypocrites) qui courent jusque dans le mouvement ouvrier, dans des pages terribles sur ce qu’on appellerait aujourd’hui le « développement du sous-développement » sous l’impulsion du capital étranger.
     
    La « dette du tiers-monde », déjà…
     
    C’est que ces exportations de capitaux ont des caractéristiques assez particulières. Ainsi la France envoyait finalement peu de ses capitaux dans ses colonies : en 1914, 4 milliards de francs sur 45 investis à l’étranger, contre 25 % en Russie ! Et pour faire quoi ? Des investissements « directs » finançaient des capacités de production mais, en l’occurrence, surtout l’extraction de matières premières et des infrastructures de transport. Ces investissements sont fort utiles pour piller les richesses d’un peuple, mais n’élèvent pas la productivité générale du travail local et n’enclenchent pas une dynamique d’industrialisation et de modernisation (même pas des relations sociales, au contraire, vu l’usage d’une main-d’œuvre indigène quasi servile).
     
    Plus importants étaient les investissements « de portefeuille », comme des prêts de consortiums bancaires occidentaux à des gouvernements de pays pauvres. Des Etats empruntaient pour moderniser leurs infrastructures et s’armer. Ils exploitaient durement leur population pour rembourser, et le chemin de fer servait moins à donner accès au marché mondial à la paysannerie qu’à la faire exproprier, à développer des cultures d’exportation, ruiner les producteurs locaux submergés par les marchandises des pays industrialisés (et les prêteurs). Le défaut de paiement d’un État faible ouvrait la voie à la colonisation. C’est ainsi qu’en 1881, le défaut du bey de Tunis servit de prétexte à une démonstration de force française et au Traité du Bardo qui transforma le pays en protectorat français.
     
    Si l’État endetté était trop puissant pour se laisser dévorer, la dette publique lui servait de toute façon à renforcer l’oppression de son peuple et en même temps garantissait une poule aux œufs d’or pour les créanciers étrangers. C’est ainsi que le tsar se gava d’emprunts contractés à la Bourse de Paris. Les grandes banques françaises placèrent ces emprunts auprès de centaines de milliers de bourgeois et de petit-bourgeois. Chaque mois, le rentier français « tondait les coupons » en allant percevoir à la banque ses dividendes, sueur et sang des moujiks. En favorisant cette perfusion financière, les dirigeants politiques français s’acoquinaient avec les banquiers français et achetaient l’alliance militaire russe.
     
    Pour les marxistes, la compréhension de ces phénomènes leur permit de saisir clairement qu’il ne pouvait pas y avoir de « colonisation progressiste », alors même que le mouvement socialiste était très divisé sur cette question, entre une aile droite carrément « social-impérialiste » et une mouvance platement humaniste (comme Jaurès, qui dénonçait les crimes coloniaux mais en appelait parfois à une colonisation juste). Ces déchirures se traduisirent par les ruptures que l’on sait quand éclata la Première Guerre mondiale.
     
    1914 : une guerre impérialiste
     
    En 1914, selon Lénine, « le partage du monde est terminé ». C’était une exagération : de gros gâteaux aiguisaient encore les rivalités. Mais les disparités technologiques et militaires étaient telles que les colonisateurs n’avaient eu guère de mal à se tailler des empires en quelques décennies... tant qu’ils ne se heurtaient pas les uns aux autres. Le partage en colonies et en « sphères d’influence » s’était fait sur des rapports de forces politiques et économiques. Or ces forces avaient changé : la France et la Grande-Bretagne, désormais en relatif déclin économique, s’étaient taillées la part du lion par rapport à des challengers devenus plus puissants (les États-Unis) ou plus dynamiques (l’Allemagne, le Japon).
     
     
     
    Comment envisager alors un nouveau repartage, sinon par la force armée ? Le spectre de la guerre généralisée hantait donc tous les peuples d’Europe. Quand elle éclata, le mouvement socialiste aussi. Une aile révolutionnaire déclara la guerre à la guerre impérialiste, la plupart des directions socialistes se rallièrent à l’union sacrée au nom de la « défense nationale ».
     
    La guerre était-elle « absolument » impérialiste ? Il est de bon ton depuis quelques années de nuancer la nuance de la nuance et de déplorer comme véritable « raison » de la guerre un enchaînement malheureux de malentendus et d’aveuglements[3].
     
    Mais les dirigeants marxistes de l’époque ne prétendirent jamais que la guerre avait été simplement commanditée par les financiers et les marchands de canons, ni perpétrée pour le seul repartage des colonies africaines. Pour faire une théorie utile de leur époque, il fallait bien saisir les évolutions essentielles, radicalement nouvelles et terriblement dangereuses, de leur époque, sans se jouer de mots ni garder des habitudes de pensée héritées de l’époque précédente. En analysant la guerre comme « impérialiste » (de pillage, de partage du monde au profit des capitalistes), ils pensaient ce qu’avait proclamé la résolution de Bâle de 1912, qui avait fait l’unanimité du congrès de l’Internationale socialiste : « la guerre à venir sera faite pour les profits des capitalistes et l’orgueil des dynasties ».
     
    Les cliques aristocratiques en Allemagne, en Autriche-Hongrie, en Russie, avaient leurs propres motivations (précipiter leur peuple dans la guerre pour consolider le trône). Ce qui n’empêcha pas la République française de pousser à la roue elle aussi ! Or, la symbiose grandissante de l’État et du capital financier joua à plein : des secteurs importants du capitalisme exigeaient le soutien militaire de leurs États pour étendre leurs sphères d’intérêt, réciproquement les sommets des États exigeaient le soutien des milieux financiers pour mener leur diplomatie agressive. Ils s’étaient liés les uns aux autres pour le pire et le pire. Les enjeux dépassaient les colonies, africaines par exemple, pas si rentables d’ailleurs : aux portes des grandes puissances, toute l’Europe centrale et l’empire ottoman étaient en décomposition. Qui allait s’y tailler des sphères d’influence telles qu’il prendrait un ascendant décisif sur ses rivaux ?
     
    Surtout, la guerre devint mondiale et totale. Plus elle durait et coûtait, plus les enjeux grimpaient pour les gouvernements. Ruinés financièrement, l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne comptaient bien, pour se relever, se payer sur la bête, dévorer les restes de l’empire turc, extorquer des réparations aux vaincus, et payer les sacrifices de leurs populations par du poison nationaliste plutôt que par des réformes sociales. L’impérialisme fit la guerre, la guerre le lui a bien rendu. Ses conséquences (et les buts de guerre des puissances) seraient fatalement bien plus impérialistes encore que ses causes.
     
    La querelle de l’« ultra-impérialisme »
     
    Il était donc impensable qu’il puisse y avoir une « bonne issue » à la guerre, une paix « sans vainqueurs ni vaincus », une paix durable entre les puissances. C’est pourtant l’idée que caressait avec de plus en plus d’insistance Karl Kautsky et bien d’autres au sein des courants de la social-démocratie qui se redécouvraient pacifistes et se désolidarisaient de leurs camarades, partisans de la « guerre jusqu’à la victoire ». Kautsky formula ainsi son idée dans L’impérialisme et la Guerre, en septembre 1914 : « L’impérialisme est-il la forme finale de la politique capitaliste mondiale ? (…) La classe capitaliste ne se suicidera pas. L’effort pour conquérir des régions agraires et réduire en esclavage leur population est trop vital pour le capitalisme pour rendre possible une opposition sérieuse de quelque groupe capitaliste que ce soit. » Mais : « Il y a un autre aspect dans l’impérialisme. L’effort de la colonisation a amené des conflits profonds entre les groupes capitalistes et a amené la guerre mondiale depuis longtemps prophétisée. Cette phase de l’impérialisme est-elle nécessaire pour la continuation du capitalisme ? (…) D’un point de vue purement économique, il n’est pas impossible que le capitalisme soit sur le point d’entrer dans une nouvelle phase, marquée par le transfert des méthodes de cartels à la politique internationale, une sorte d’ultra-impérialisme. »
     
    Kautsky ne parlait pas (pour l’instant en tout cas) d’une nouvelle phase de l’histoire du capitalisme qui eût été « non impérialiste », mais d’une nouvelle phase (pacifique, mais tout de même exploiteuse du reste du monde) de l’impérialisme lui-même. Sur la base de cette hypothèse, il rejeta toute politique révolutionnaire contre la guerre, pour lui aventuriste, pour proposer un programme de paix « démocratique » qui puisse rallier des secteurs de la petite bourgeoisie et de la bourgeoisie. D’où la colère de Lénine contre le « renégat » : « cet ultra-impérialisme est une ultra niaiserie » et une « mystification petite bourgeoise » !
     
    L’ultra-impérialisme américain
     
    Les traités « de paix » (allemand de Brest-Litovsk puis allié de Versailles) lui donnèrent raison. Il y avait pourtant une exception, apparente mais de taille : à la Maison Blanche. Le président Wilson présenta un programme de paix en « quatorze points » : ni annexions ni réparations, droit des nations à disposer d’elles-mêmes, Société des Nations, liberté des mers et du commerce... Le plus grand impérialisme ne proposait-il pas ainsi un ordre mondial « ultra-impérialiste » ? Une entente entre les puissances, non pour cesser de piller les pays pauvres, mais pour renoncer aux empires économiques exclusifs et à la guerre ?
     
    Cet « idéalisme wilsonien » était en fait un réalisme politique propre à l’impérialisme américain, tellement fort économiquement, et inexpugnable dans son île-continent, qu’il avait intérêt à promouvoir l’idée d’un autre type « d’empire », sans colonies et libre-échangiste (mais pas sans respect des dettes, car il ne renonça pas aux milliards de dollars de créances sur ses « alliés »). Comme le notera plus tard avec humour Léon Trotski, « l’impérialisme américain a toujours un peuple à libérer. C’est sa profession. »[4] Les gouvernements américains échouèrent cependant à imposer ce nouvel ordre mondial. Il arriva au contraire ce qu’on sait : la Dépression de 1929, la dislocation des relations économiques internationales, puis la Deuxième Guerre mondiale.
     
    Après 1945 : un monde nouveau
     
    Pourtant, un certain trouble s’éveille en nous : l’« ultra niaiserie » ne se serait-elle pas finalement réalisée après 1945 ? Ne serait-ce pas l’ordre impérialiste dans lequel nous vivons encore aujourd’hui ? Les rivalités économiques entre les divers pays capitalistes n’ont certes pas disparu, et suscitent souvent tensions et coups tordus. Mais la guerre, ce n’est plus entre les pays développés, c’est pour les pauvres depuis longtemps et, semble-t-il, pour longtemps.
     
    Mais alors, pourquoi une hypothèse absurde en 1918 avait-elle pris corps en 1945 ? L’argumentation de Lénine contre Kautsky pourrait paradoxalement nous mettre sur la piste. Ainsi, dans la préface à la brochure de Boukharine L’Economie mondiale et l’impérialisme, en décembre 1915, il écrit :
     
    « Il n’y a pas trace de marxisme dans ce désir de tourner le dos à la réalité de l’impérialisme et de s’évader en rêve vers un «ultra-impérialisme» dont on ignore s’il est réalisable ou non (…) Peut-on cependant contester qu’il soit possible de «concevoir» abstraitement une phase nouvelle du capitalisme après l’impérialisme, à savoir l’ultra impérialisme ? Non (…) Seulement dans la pratique, cela signifie devenir un opportuniste, qui nie les tâches aiguës de l’actualité au nom de rêveries sur des tâches futures sans acuité (…) Il ne fait pas de doute que le développement va dans le sens d’un seul et unique trust mondial (…) Mais ce développement s’opère dans des circonstances, sur un rythme, avec des contradictions, des conflits et des bouleversements tels (et non seulement économiques, tant s’en faut, mais aussi politiques, nationaux, etc.) que, sans aucun doute, avant qu’on n’en arrive à un tel trust mondial (…), l’impérialisme devra inévitablement sauter et le capitalisme se transformera en son contraire. »
     
    L’hypothèse de Kautsky supposait des « bouleversements » extraordinaires. Qui eurent lieu. Car pour le coup il y eut bien une « époque de guerres et de révolutions », qui nulle part ne déboucha sur le socialisme (sinon des grimaces de socialisme, staliniennes ou social-démocrates). En 1945, les impérialismes japonais et allemand étaient écrasés, la France et la Grande-Bretagne plus ruinées qu’en 1918. Face aux révolutions coloniales, au « péril rouge » et au bloc soviétique, les puissances impérialistes n’avaient pas d’autre choix que de serrer les rangs et d’accepter l’hégémonie américaine, qui instaura ce que le trotskyste argentin Claudio Katz appelle un « ordre impérialiste collectif »[5], conflictuel mais coopératif, par les accords financiers et monétaires de Bretton Woods, le plan Marshall, son parapluie militaire, la protection des flux financiers par leurs marchés et le dollar, énergétiques par leur force armée.
     
    Ensuite s’engagea ou se confirma une mutation économique profonde. Pour les marxistes, ce sont les limites internes du capitalisme dans ses bases nationales développées qui avaient engendré les conflits inter-impérialistes. Marx n’en avait pas moins noté à propos du développement du capitalisme : « potentiellement illimité ». Mais à travers tant de crises et de souffrances...
     
    L’essor de la mécanisation et de la taylorisation, l’industrialisation de l’agriculture, le développement d’une consommation de masse, le nouveau rôle de l’État au sein de l’économie capitaliste, toutes ces mutations qui ont émergé à travers la crise de 1929 puis la « guerre totale » ont donné un nouveau souffle au capitalisme pendant quelques décennies. Le capitalisme des Trente Glorieuses a été beaucoup moins internationalisé que dans la période précédente, plus centré sur les pays déjà développés.
     
    Le pillage des richesses du « tiers-monde » n’avait pas cessé pour autant. Il fallait garantir des rentes néocoloniales, payer à bas prix les matières premières (ce n’est d’ailleurs qu’après la Deuxième Guerre mondiale que les pays développés commencèrent à importer vraiment leur énergie !). Toute cette période, faite de paix inter-impérialiste, de guerre froide et de guerres chaudes contre des pays pauvres, fut marquée par la fine pensée que l’on prête au secrétaire d’État américain Kissinger, dans les années 1970 : « les Américains ont compris qu’il est plus funny de botter le cul des Arabes de temps en temps que de faire des économies d’essence. » Après 1945, l’impérialisme américain eut toujours un peuple à bombarder… Ce fut en quelque sorte sa profession.
     
    « Ultra » pour les Vietnamiens, les Algériens, les Africains, les Irakiens, les Chiliens... les impérialismes le furent dans le sens le plus banal du terme après 1945.
     
    Yann Cézard
    dans la revue L'Anticapitaliste n° 273 (février 2016)
     
     
    ------
    [1] La Mondialisation et ses ennemis, Grasset, 2004.
    [2] Notre première mondialisation. Leçons d’un échec oublié, Seuil/La République des idées, 2003.
    [3] Les Somnambules (2014) de Christopher Clark sont un modèle (par ailleurs passionnant) du genre.
    [4] Europe et Amérique, 1924.
    [5] Dans un livre très intéressant, Sous l’Empire du capital (l’impérialisme aujourd’hui), M Editeur, Québec, 2014.
     
  • Réflexions sur le nationalisme arabe, la gauche et l’islam(Orient 21)

    Itinéraire de Joseph Samaha

    Dans le Liban des années 1990 et 2000, Joseph Samaha était une figure intellectuelle influente. À l’occasion du neuvième anniversaire de son décès, As-Safir vient de publier un entretien avec Nicolas Dot-Pouillard, effectué en 2006, dont voici la traduction. Si le contexte politique a changé depuis cette époque, il n’est pas inutile de relire les propos d’un intellectuel de gauche libanais préoccupé par la « question nationale » et attentif au devenir de l’islam politique.

    Joseph Samaha est décédé d’une crise cardiaque le 25 février 2007 à Londres. Intellectuel de gauche, ancien militant de l’Organisation d’action communiste au Liban (OACL), se réclamant également de l’héritage du président égyptien Gamal Abdel Nasser, il dialoguait avec l’islam politique. Dans le Liban des années 1990 et 2000, Joseph Samaha était une figure intellectuelle influente, et sa plume était connue dans l’ensemble du monde arabe. Ancien rédacteur en chef du quotidien As-Safir, il fondait, à l’été 2006, en pleine guerre israélienne contre le Liban, le journal Al-Akhbar.

    Le quotidien As-Safir vient de publier un entretien que nous avions eu avec lui le 17 février 2006. Le contexte politique a changé depuis l’époque de cet interview : la guerre israélienne sur le Liban est passée par là, Joseph Samaha n’avait pas encore fondé le quotidien Al-Akhbar. Bien plus, ses propos résonnent étrangement, si ce n’est avec un certain décalage : les soulèvements arabes de 2011 étaient à venir, la crise syrienne n’avait pas encore séparé les Frères musulmans et le Hezbollah — auxquels Joseph Samaha fait souvent référence. La confessionnalisation du politique n’avait pas atteint le degré actuel. Mais il n’est pas inutile d’offrir aux lecteurs la parole d’un intellectuel de gauche libanais d’abord préoccupé par la «  question nationale  » et la «  question sociale  », et attentif, à l’époque, au devenir d’un islam politique qu’il perçoit comme tout à la fois pluriel et hégémonique.

    Nicolas Dot-Pouillard.

    ******************************************************************

    1967-1995, parcours politique

    J’ai d’abord été très influencé par le courant nassérien, mais j’ai eu comme un passage à vide entre 1968 et 1969, en raison de la défaite arabe de juin 1967 face à Israël. Nous avons tous été sous le choc  ; c’est une période que je préfère oublier. J’étais jeune, dans la vingtaine. À partir de 1969, j’étais surtout en relation avec un courant de pensée qui n’a malheureusement pas eu beaucoup d’influence dans la gauche arabe, qui était représenté par deux penseurs syriens, Yassin Hafez et Elias Morqos1. Ces deux penseurs ont essayé d’élaborer une lecture marxiste de Nasser, ou une lecture marxisante du nationalisme arabe. Cela s’inscrivait dans un débat plus large, avec trois autres grands courants, à l’époque. Premièrement, le courant des partis communistes traditionnels dans le monde arabe, les prosoviétiques. Deuxièmement, avec les courants nationalistes arabes du parti Baas. Troisièmement, avec les mouvements d’extrême gauche, ce que l’on nommait les «  nouvelles gauches  », particulièrement celles qui s’appuyaient sur la résistance palestinienne, avec toutes les transformations du Mouvement des nationalistes arabes (MNA)2, la naissance du Front populaire pour la libération de la Palestine (FPLP) et du Front démocratique (FDLP) en 1967 et 1969, mais aussi celle de l’Organisation d’action communiste au Liban (OACL).

    Ce sont Yassin Hafez et Elias Morqos qui m’ont le plus influencé. Il y avait de petits groupuscules autour d’eux, au Liban, en Irak, en Syrie, avec un courant politique qui n’a malheureusement pas réussi à s’élargir : le Parti révolutionnaire arabe des travailleurs. J’étais dans cette mouvance jusqu’en 1972. Nous étions jeunes, le Liban était en pleine ébullition, il y avait le mouvement ouvrier, le mouvement des paysans, le mouvement étudiant, les universités bougeaient beaucoup.

    Puis, en 1972, je suis devenu membre de l’OACL qui était à la lisière des nouvelles gauches radicales et du nationalisme arabe. J’ai intégré la direction de cette organisation jusqu’en 1980, comme membre de son bureau politique. Mais j’avais une position critique sur la stratégie, la tactique, la manière de diriger. J’ai plusieurs fois été menacé d’exclusion par la direction. Et en 1980, j’ai été effectivement expulsé de l’OACL, notamment après une série d’articles critiquant non seulement l’organisation, mais aussi Walid Joumblatt3 et la stratégie générale du mouvement national libanais. Je me sentais toujours de gauche, mais j’essayais d’élaborer une certaine critique de la pratique de la gauche libanaise. À un certain moment, Walid Joumblatt a suggéré qu’on écrive un programme pour un nouveau Parti socialiste qui ne soit pas le Parti socialiste progressiste (PSP), un parti plus large, mais cela a échoué.

    Mes désaccords politiques avec les uns et les autres n’ont jamais affecté mes relations personnelles : j’ai continué à travailler avec Fawaz Traboulsi4, j’ai toujours discuté avec Walid Joumblatt.

    Puis il y a eu l’invasion israélienne de 1982. Je suis resté deux ans après 1982 à Beyrouth, ensuite j’ai quitté pour un temps le Liban pour la France. Cela a été une expérience profonde, sur le plan intellectuel et politique : j’ai lancé, avec d’autres, un hebdomadaire qui était en un sens proche de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Nous l’avions nommé «  le Septième jour  » (al-Yom al-sabi’)5. Cette période du milieu des années 1980 était difficile, il y avait l’occupation israélienne du Sud-Liban, mais aussi la guerre des camps entre les Palestiniens et le mouvement chiite Amal. De fait, notre journal était assez critique envers la politique syrienne au Liban, et pour cette raison, je ne pouvais pas revenir à Beyrouth.

    Je suis donc resté onze ans à Paris jusqu’à mon retour au Liban en1995. Si j’ai pu le faire, c’est que les Syriens n’avaient plus de veto sur ma personne. Il y avait un contexte nouveau : les accords d’Oslo. J’étais très critique envers les accords, cela a aidé. J’ai écrit plusieurs pamphlets : sur le conflit israélo-arabe, sur le «  système Rafiq Hariri  »6 et la reconstruction «  post-Taëf  »7, envers lesquels j’ai toujours été critique.

    L’islam politique et le sens de l’histoire

    Je ne suis plus membre d’un parti politique : la position que j’ai choisie est celle d’un homme de gauche indépendant qui essaie, par le biais du journalisme, de l’éditorial, de la prise de position publique, d’élaborer des idées et des pistes qui à mon avis sont de gauche, mais très liées à la question nationale dans le sens où il ne suffit pas de se dire de gauche, où la gauche doit considérer que ce qui prime dans cette région, c’est l’ingérence étrangère et le devoir de s’y opposer. Et donc, plus la gauche quitte ce champ de bataille, plus elle abandonne la question nationale, plus d’autres, notamment les islamistes, viennent occuper ce terrain et gagner en influence.

    Prenons deux organisations islamistes qui sont devenues, au fur et à mesure des années, emblématiques non seulement de l’islam politique, mais aussi de la résistance à Israël. En tant qu’homme de gauche attaché à la question nationale, je pense qu’ils vont, politiquement, dans le bon sens. Le Hezbollah plus que le Hamas  ; mais le Hezbollah et le Hamas quand même. Nous pouvons ne pas être d’accord avec leur idéologie religieuse, désapprouver certains aspects de leur stratégie, de leur tactique, et même les slogans qu’ils portent. Mais si on regarde honnêtement la situation, si on fait un véritable état des lieux dans le monde arabe, on voit que les Arabes ont une grande attente d’un courant national, ou patriotique. Et après la défaite du courant nationaliste arabe, nous sommes nombreux à avoir cru, à un certain moment, que la gauche pouvait remplir ce vide. Mais elle ne l’a pas fait. Ce sont graduellement les islamistes qui ont rempli ce vide, avec toutes les transformations qu’ils ont connues, notamment dans les années 1990, et ce dans une conjoncture complètement transformée : fin de l’Union soviétique, fin de la guerre d’Afghanistan, politique américaine conquérante.

    Les islamistes ont parfois hérité des anciens cadres qui venaient du mouvement de gauche et du mouvement nationaliste arabe  ; je pense par exemple à Mounir Chafiq8, un intellectuel palestinien de la gauche du Fatah passé à l’islam politique, et je me demande : est- ce qu’il fait de l’entrisme ou est-ce qu’il est réellement convaincu de ce que qu’il dit  ? Mais qu’importe, il a réussi, avec d’autres, à assurer la continuation d’un certain discours national, en Palestine, avec tous les changements qu’a connus le Hamas, au cours des années 1990, et au Liban avec le Hezbollah.

    Il me semble que c’est ce courant islamiste qui a repris le discours de la libération nationale, le seul qui puisse véritablement faire bouger les masses arabes. Pour le moment, aucun autre courant n’a réussi à le faire, ni la gauche, ni les démocrates, ni les libéraux, malheureusement. Les islamistes, au Liban et en Palestine, ont enfin bénéficié d’un certain cadre démocratique, pluraliste, en négociant avec d’autres courants politiques  ; je pense que cela leur a profité, et a participé aussi de leurs évolutions respectives. La démocratie doit profiter à ces courants. Chaque fois que l’occasion s’est présentée, de Nasser à un autocrate comme Saddam Hussein, les Arabes ont dit ce qu’ils voulaient vraiment : une politique qui réponde aux menaces qu’ils sentent, à cette hégémonie américaine et à cette politique de plus en plus expansionniste. En Palestine par exemple.

    Nationalisme arabe, gauche et islam politique

    J’ai eu des sentiments ambivalents en janvier 2006, lorsque le Hamas a gagné les élections législatives en Palestine. J’ai ressenti une certaine peur, mais au fond, j’étais satisfait que le Hamas ait gagné. Car il suffit de regarder ce que Mahmoud Abbas et la direction du Fatah ont fait du mouvement, du Fatah, de l’Autorité nationale palestinienne (ANP) : historiquement, c’est une catastrophe. Or, du simple point de vue de la question nationale, le Hamas a réussi à battre le Fatah et à porter un message nationaliste contre les renoncements de l’Autorité.

    Au Liban, le cadre est différent : le discours de la gauche a été complètement éliminé par l’hégémonie du Hezbollah. Mais le Hezbollah a su lui aussi s’ouvrir et intégrer des idées qui venaient d’autres courants. C’est sa grande force. Je connais bien le Hezbollah, je connais bien ses cadres et ses dirigeants. Chaque fois que je discute avec eux, j’ai l’impression que ce sont de vrais nationalistes. Et paradoxalement, si je compare avec le passé, je me dis aussi parfois que la matière première de ce mouvement, de ses cadres, de sa direction, aurait pu être, à une autre époque, celle d’un grand mouvement patriotique et progressiste.

    Il faut enfin comprendre les césures au sein du mouvement islamique. Les Frères musulmans au Koweït n’ont rien à voir avec les Frères musulmans en Irak, en Égypte, au Soudan ou en Algérie. Il n’y a pas un seul islam politique. Mais l’islam politique qui m’intéresse, c’est celui qui porte le message nationaliste autrefois porté par les nationalistes arabes et la gauche. Au fond, c’est le nationalisme arabe qui s’exprime par le biais de l’islam, idéologie désormais dominante, hégémonique. Il faut voir les contradictions : peut être qu’il y a un discours assez rétrograde, qui peut être considéré comme réactionnaire, mais le fond est progressiste et va dans une direction que je ne peux pas désapprouver.

    Ceci dit, je n’aime pas les compromis idéologiques. Il faut bien comprendre ce que je dis : je considère que certains courants politiques islamistes portent le discours de libération nationale. Mais je ne crois pas non plus qu’on puisse fabriquer, comme cela, un mélange entre le nationalisme arabe, la gauche et l’islam politique. Je n’aime pas ces compromis idéologiques. Je peux être, moi, nationaliste arabe et de gauche, et parler d’un parti politique comme le Hamas : je dis dans ce cas ce que je retiens de positif et de négatif dans leur expérience. Mais pas jusqu’à prôner un mélange idéologique qui peut aussi donner n’importe quoi. Ma préoccupation est double : arabe et anti-impérialiste. Dans ce cadre, j’ai toujours un peu peur du référent purement islamique, qui ne mène à rien. La solidarité islamique, je n’y crois pas.

    Prenons la période de Nasser, par exemple : le critère d’alliance était anti-impérialiste, pas culturel ou religieux. On était avec l’Inde contre le Pakistan, avec la Grèce contre la Turquie. Tout simplement parce que la Turquie et le Pakistan étaient clairement dans le camp impérialiste. L’approche qui consiste à dire : «  nous, les Arabes, quels sont nos intérêts nationaux  ?  » est différente de : «  nous, les musulmans…  ». De nombreux pays arabes ont été alliés de l’Union soviétique en tant qu’Arabes, même si l’URSS représentait un modèle de société éloigné de nos aspirations. Mais, de fait, c’était l’allié des Arabes, dans un certain rapport de force mondial et international. Je ne comprend pas ces Arabes qui sont allés en Afghanistan se battre contre les Soviétiques : ils n’avaient rien à faire là-bas. Le cheikh Abdallah Al-Azzam9 était à deux pas d’Israël, et il est parti se battre au Pakistan et en Afghanistan. Une chose est de dire : «  je défends les partis islamistes qui portent la cause nationale arabe  », une autre est d’affirmer : «  je soutiens les partis islamistes parce qu’ils sont musulmans.  »

    Je vois donc les choses de manière très pragmatique et réaliste. Dans la conjoncture actuelle, nous sommes dans une phase historique ou l’islam domine et va dominer la vie politique et culturelle. C’est un fait, et cela va durer des années et des années. L’islam politique est encore dans sa phase montante. Nous n’en sommes peut-être qu’au début. Yassin Hafez disait : «  vous ne pourrez jamais faire l’économie de l’islam, les Arabes ne pourront jamais faire l’économie de l’islam.  » Il avait raison.

    La crise intellectuelle du monde arabe

    Je ne crois pas à une révolution intellectuelle profonde dans l’islam, tout simplement parce que je crois pas à une révolution intellectuelle profonde, actuellement, dans le monde arabe. La crise intellectuelle frappe tout le monde. Du point de vue intellectuel, je suis pessimiste. Tout est allé déclinant. Cela vaut pour l’islam politique : je pense sincèrement que Djamal Al-Din Al-Afghani était bien meilleur que Mohammed Abdouh10, que Mohammed Abdouh était bien meilleur que Rachid Rida et que Hassan Al-Banna11, qui étaient meilleurs que Sayyid Qutb. À la fin, nous arrivons à Ayman Al-Zawahiri et à Abou Moussab Al-Zarkaoui12  ! La crise que vit l’islam est la crise de la pensée à un niveau plus général. Elle n’est pas réservée aux islamistes et elle est structurelle. Par exemple, les libéraux arabes n’ont rien à faire avec les libéraux égyptiens d’hier : pour le courant libéral, on descend historiquement de Taha Hussein à Ayman Nour13, chez les islamistes, de Al-Afghani à Al-Zawahiri. Cela vaut aussi pour la gauche et les nationalistes arabes : il y a une crise profonde dans ces courants.

    Je ne dis pas que le paysage est complètement négatif. Quelque chose se passe dans certains milieux des Frères musulmans. Ils font un travail sur eux- mêmes. Dans le Hezbollah, clairement, ce travail est à l’œuvre. Dans la pensée chiite en général, il y a les écrits de Mohammed Hussein Fadlallah14, qui sont intéressants. Il y a peut-être, dans la mouvance proche des Frères musulmans, une personne comme le cheikh égyptien Youssef Al-Qardawi. On peut voir en lui un cheikh intégriste, profondément rétrograde  ; mais, d’un autre point de vue, il est avancé, car il se situe à des années-lumières de certains religieux.

    Parmi les Frères musulmans syriens, les choses ont un peu bougé ces dernières années : les deux ou trois derniers documents qu’ils ont rédigés étaient assez modernes. Le cheikh Rachid Ghannouchi15, le leader du mouvement Ennahda en Tunisie essaie de faire quelque chose d’intéressant, en termes de renouvellement intellectuel, de dialogue avec les laïcs. Rachid Ghannouchi était baasiste dans le passé. Il connaît la Syrie, il a une certaine sensibilité à la question arabe, une vision islamiste qui n’est pas étriquée. Mounir Chafiq essaye de développer un point de vue intéressant, Fahmi Howeidi16 également.

    Mais tout cela est très épars. La région est si crispée. Je ne sais pas si on pourra opérer cette révolution culturelle nécessaire à l’intérieur de l’islam, si on reste dans l’état actuel des choses. Parce qu’il n’y a pas de classe sociale qui porte un projet historique. En cela, je reste assez marxiste.

    Quelle «  collectivité politique  »  ?

    Si je choisis une étiquette, je suis à ma manière nassérien. Et de gauche. J’ai écrit plusieurs articles sur ma vision de l’expérience de Nasser, et j’ai toujours dit que, au moins, dans les grands courants de pensée, dans le monde arabe, parmi les islamistes, les libéraux, les marxistes et le courant nationaliste — le Baas notamment —, Nasser est le seul, de par son pragmatisme et son expérience, qui a pu au moins poser les bonnes questions. Le nassérisme n’est pas forcément une pensée, comme le baasisme ou le marxisme, mais c’est une expérience pratique, affective même, qui a profondément modifié le monde arabe à l’époque. Il a modifié la manière dont les Arabes se percevaient face à l’Occident. Il a obtenu des réponses plus ou moins bonnes, d’ailleurs — nous avons vu ce qui s’est passé ultérieurement en Égypte —, mais au moins, si on discute de ces grands courants dans l’histoire contemporaine du monde arabe, il est le plus proche de ce qu’il faut faire en termes d’indépendance et de contenu social. Quand je dis que je suis nassérien, c’est une manière de dire que je ne suis pas baasiste : car si nous n’arrivons pas à faire la différence entre Nasser et le Baas, nous n’arriverons jamais à comprendre ce qu’était l’expérience de Nasser dans le monde arabe.

    Comment, à partir de ces questions qui ont été posées sous Nasser, penser certaines questions contemporaines qui se posent à nous  ? Que voudrait dire aujourd’hui un grand mouvement de libération nationale dans le monde arabe  ? Chez Nasser, c’était, dans une certaine mesure, la combinaison de trois choses : l’achat d’armes à la Tchécoslovaquie (1955), la nationalisation de la compagnie du canal de Suez (1956), et la construction du haut-barrage d’Assouan entré en service dans les années 1960. Ce fut une expérience possible au sein d’un certain ordre du monde, d’un rapport de force mondial différent que celui que nous vivons actuellement. L’idée d’un rôle important de l’État dans l’économie, celle d’un développement attentif aux intérêts des classes populaires, tout cela est complètement sorti du viseur de tout le monde, des islamistes, des libéraux, des démocrates, et même de la gauche arabe. Cette gauche parle de démocratie, de droits humains, mais la problématique du développement, la question de l’État, est sortie de son viseur. Tous ces courants, quels qu’ils soient, s’inscrivent quelque part dans la reconnaissance d’un monde unipolaire, homogène, et d’une mondialisation uniquement conçue comme libérale, économiquement parlant. Quel pourrait être le contenu social d’un mouvement de libération nationale arabe actuellement  ? Je ne sais pas, car le rapport de force est très dégradé.

    Ce n’est pas un hasard s’il y a une dérive, dans le monde arabe, vers un contenu culturel. Lorsque je parle des Arabes, j’aimerais en parler en termes politiques, de collectivité politique. Mais désormais c’est juste une marque culturelle, comme l’islam. Parce que l’ensemble des courants politiques dans le monde arabe sont incapables de donner un contenu politique, économique et social à leur programme. Donc, nous vivons une période de repli identitaire, en tant qu’Arabes et en tant que musulmans. Nous sommes Arabes ou nous sommes musulmans, mais jamais dans un sens politique, stratégique et économique. Juste en termes de culture. Dans le monde arabe, de la Tunisie jusqu’au Liban, il n’y a de commun que la culture. Nous avons effectivement les mêmes écrivains, les mêmes films, les mêmes sensibilités culturelles, avec les nouveaux médias, notamment télévisés. Mais ça s’arrête là. La culture, l’identité, la religion, sont les thématiques qui priment à présent. 4 mars 2016

    http://orientxxi.info/magazine/reflexions-sur-le-nationalisme-arabe-la-gauche-et-l-islam,1226

  • La levée du caractère confidentiel du dossier est une exigence des chercheurs (Algeria Watch)

    GERBOISE_BLEUE-red.jpg

    Essais nucléaires français à Reggane

    La nécessité de lever le caractère confidentiel des dossiers liés aux essais nucléaires français dans le Sahara algérien, pour mettre au jour ces essais dangereux, a été soulignée par un chercheur algérien, spécialiste en génie nucléaire.

    «Lever le caractère confidentiel des dossiers afférents aux essais nucléaires effectués par la France coloniale dans le Sahara algérien permettra de braquer davantage de lumières sur ces dangereuses explosions et élucider leurs effets catastrophiques sur l’environnement et la population», a indiqué
    Dr Ammar Mansouri, chercheur dans le domaine de génie nucléaire, lors d’une rencontre organisée vendredi soir au musée du Moudjahid de Tamanrasset.

    M. Mansouri a souligné que «la levée de l’aspect confidentiel sur ces dossiers d’essais nucléaires permettra aux chercheurs, universitaires et étudiants de s’informer des essais nucléaires, d’évaluer leurs dégâts et répercussions sur l’environnement et l’homme». «Les justifications avancées par la France coloniale sur les modalités de choix de sites de ces essais, admettant que ces endroits ne manifestaient aucun signe de vie humaine, faunistique et floristique, n’est qu’un grand mensonge», a-t-il martelé.

    «Les régions retenues au niveau de Reggane (Adrar) et In-Ikker (Tamanrasset) sont des régions peuplées», a-t-il ajouté, arguant que la population de la région d’In-Ikker, (180 km nord de Tamanrasset) et ses cheptels, ont été transférés vers le nord-est du site des essais, et d'autres populations ont été déplacées vers la région d’Assekrem.

    Lors de cette rencontre à laquelle ont pris part des citoyens, victimes de ces essais nucléaires, des membres d’associations, d’une équipe de journalistes du journal égyptien El-Ahram, l’orateur a mis en exergue les effets nucléaires dévastateurs polluants et dangereux sur l’environnement, tout en signalant que les rayons radioactifs dangereux ont atteint des régions lointaines de l’Afrique et de l’Europe.

    Le secrétaire général de l’association Taourirt des victimes des essais nucléaires à Tamanrasset, Boubaker Ibbeh, a, de son côté souligné que «les essais nucléaires français dans la région sont des crimes contre l’humanité et qu’il appartient de prendre en charge ses répercussions, notamment dans la commune d’In-M’guel, située à 50 km du site des essais, dont les lourdes répercussions y perdurent encore, comme les maladies cancéreuses et différentes infirmités.

    Le Soir d'Algérie, 6 mars 2016

    http://www.algeria-watch.org/fr/article/pol/france/exigence_chercheurs.htm